PME
Question de :
M. Jacques Barrot
Haute-Loire (1re circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 30 mai 2001
M. le président. La parole est à M. Jacques Barrot, pour le groupe UDF.
M. Jacques Barrot. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Manifestement, les choix deviennent de plus en plus difficiles pour le Gouvernement, aux prises avec une majorité de plus en plus plurielle.
M. Lucien Degauchy. Une majorité «plus rien» !
M. Jacques Barrot. Il y a néanmoins des choix, monsieur le Premier ministre, qui ne peuvent pas - je reprends votre qualificatif - être indéfiniment différés.
M. Bernard Accoyer. Eh oui !
M. Jacques Barrot. Nous savons combien les petites entreprises peuvent être utiles pour amortir les chocs douloureux provoqués par la restructuration des grandes entreprises. Or, beaucoup de nos petites entreprises sont tentées aujourd'hui de freiner leur développement parce qu'elles sont inquiètes à l'idée de subir une application stricte des 35 heures au 1er janvier.
M. Yves Fromion. Eh oui !
M. Jacques Barrot. Ce qui a été conçu pour les entreprises importantes, où il est possible de redéployer des effectifs, est inapproprié à ces entreprises.
M. Arthur Dehaine. Il a raison !
M. Jacques Barrot. Le personnel des petites entreprises exerce souvent des missions qui ne sont pas interchangeables: réduire de 10 % le temps de travail d'un commercial, d'un technicien, d'un magasinier ne permet pas de créer un poste multifonctions assurant un dixième de chacune de ces fonctions.
M. René André. Assurément. Il a raison !
M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, je n'évoque pas la remise en cause de la loi des 35 heures, mais je veux être très clair. Le Gouvernement est-il prêt, oui ou non, à prendre des mesures significatives d'assouplissement ?
M. Arthur Dehaine. Il le faut !
M. Jacques Barrot. Elles sont, monsieur le Premier ministre, à votre portée. Si le principe du contingent des heures supplémentaires est fixé par la loi, le volume, lui, est fixé par décret. Dès lors, vous pouvez déjà prendre quelques décisions.
Je donnerai trois exemples: prévoir un contingent mutualisable d'heures supplémentaires pour l'ensemble de l'entreprise, prévoir un contingent maximum individuel de 188 heures à partir duquel seulement serait ouvert le repos compensateur, aligner le sort des entreprises de moins de vingt salariés sur celui des moins de dix salariés, pour les unes - repos compensateur à 50 %, pour les autres à 100 %.
M. Alfred Recours. Allez !
M. Jacques Barrot. Je vous donne des exemples concrets qui montrent bien que l'on peut, demain, alléger les contraintes des petites entreprises, leur permettre de faire preuve de dynamisme, donner à leurs salariés une plus grande liberté de choix.
M. le président. Votre question, monsieur Barrot !
M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, entendez-vous, oui ou non, avancer dans cette voie ? Le temps presse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le ministre Jacques Barrot, il est de fait que la situation des petites entreprises, et notamment des très petites entreprises, au regard des 35 heures, n'est pas concrètement la même que celle des grandes entreprises. C'est une évidence. («Bravo» ! sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Yves Fromion. C'est nouveau !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mais, lorsque nous dialoguons avec certaines organisations, comme l'UPA, l'Union professionnelle des artisans, nous constatons que ceux qui représentent les petites et moyennes entreprises ne souhaitent pas avoir un régime légal radicalement différent des grandes entreprises. Si tel était le cas, nous mettent-ils en garde, les salariés choisiraient les grandes entreprises au détriment des petites. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Soisson. Vous nous prenez pour des idiots !
Plusieurs députés du groupe socialiste. Oui !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Non, monsieur Soisson, même si, parfois, la tentation peut effleurer certains ! (Rires et applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Soisson. Alors continuez. Ne vous en privez pas !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cette constatation de bon sens étant faite, qu'a fait le Gouvernement et qu'entend-il faire ? Une loi s'applique déjà mais n'est souvent pas bien connue des petites entreprises. Il faut donc rappeler à celles-ci - et cette séance en est l'occasion - qu'à partir de janvier 2002 jusqu'à la fin de 2003, un régime transitoire doit leur permettre de se mettre petit à petit en conformité avec la loi. Il est prévu un renforcement des dispositifs d'appui-conseil. Comme vous le savez sans doute, des dispositions plus favorables ont été décidées pour les entreprises de moins de dix salariés qui n'ont pas de syndicat. Le Gouvernement, Mme Guigou et moi-même, sommes tout à fait ouverts à ce qu'on a appelé dans notre langage de la souplesse, à des assouplissements. Il ne s'agit pas de revenir sur le principe même de la loi. En revanche, sur la base des propositions que nous ferons les fédérations, les confédérations et les représentants des PME, nous sommes, je vous le répète, monsieur Barrot, parfaitement ouverts à la souplesse. Pourquoi ?
M. Yves Fromion. Parce que vous ne pouvez pas faire autrement !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Parce que l'intérêt du pays, de la majorité, comme sans doute de l'opposition (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) est de permettre à ces entreprises de se développer.
Contrairement à ce que vous avez indiqué, monsieur le député Jacques Barrot, le moral dans ces entreprises reste extrêmement élevé. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Lucien Degauchy. On voit que vous n'y allez jamais. Il n'y a pas de souplesse du tout !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est un signe très important car, si nous voulons continuer à lutter contre le chômage et à favoriser la progression de l'emploi, nous avons besoin des grandes entreprises, comme des moyennes et des petites, des artisans, des commerçants. (Mêmes mouvements.)
M. René André. Merci de le reconnaître !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous trouverez, face à vous, un gouvernement désireux d'aider l'esprit d'entreprise et, en particulier, les PME. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Arthur Dehaine. Faites-le !
Auteur : M. Jacques Barrot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 30 mai 2001