délais de paiement
Question de :
M. Patrick Rimbert
Loire-Atlantique (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 2 décembre 1998
M. le président. La parole est à M. Patrick Rimbert.
M. Patrick Rimbert. Madame la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat, au moment où les Français commencent leurs achats de Noël, je voudrais aborder le problème des relations entre la grande distribution et ses fournisseurs, plus particulièrement les petites et moyennes entreprises.
Premier problème, toujours d'actualité: des délais de paiement trop longs pénalisent les entreprises et notamment les plus petites d'entre elles. Or de nombreux fournisseurs hésitent à dénoncer le non-respect des paiements, préférant supporter des coûts financiers supplémentaires plutôt que de courir le risque de ne plus voir leur produits distribués.
La Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil européen d'Amsterdam ont fait de la réduction des retards de paiement un objectif essentiel. Comment allez-vous saisir cette opportunité, madame la secrétaire d'Etat, pour avancer sur ce sujet ?
Deuxième problème: pour se faire «référencer», c'est-à-dire se faire distribuer dans les grandes surfaces, les entreprises doivent prendre en charge, outre les remises et les délais de paiement, de plus en plus d'obligations annexes: mise en rayon, décoration, par exemple. Il s'agit, ni plus, ni moins, de véritables transferts de charges sur le fournisseur, mais ce sont également autant de barrières à l'accès des petites et moyennes entreprises à la grande distribution.
Que comptez-vous faire, madame la secrétaire d'Etat, pour mettre fin à ces pratiques et clarifier les relations entre fournisseurs et distributeurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat. Monsieur le député, je suis désolée d'avoir si peu de temps pour vous répondre, car ces deux questions me sont également posées dans toutes les régions de France, lors de mes rencontres avec les chefs d'entreprises comme avec les consommateurs. Elles concernent en fait les relations entre les producteurs et les distributeurs, mais aussi entre les petites entreprises et les grandes. Il ne faudrait pas ramener le problème des délais de paiement aux seules relations entre producteurs et grande distribution, même si votre seconde question sur le référencement y est entièrement consacrée.
S'agissant des délais de paiement d'abord, nous avons un gros travail à mener en deux temps. D'abord, soutenir les petites entreprises dans la gestion de leurs rapports avec leurs donneurs d'ordre quels qu'ils soient, grandes entreprises distributeurs ou clients étrangers. Beaucoup de petites entreprises ne prennent pas suffisamment en compte ce problème des délais de paiement, auquel trop de cessations d'activités sont encore directement liées. Cela suppose, pardonnez-moi l'expression, une véritable externalisation des fonctions, un effort de formation, d'information, de mise en synergie des chambres de commerce et des chambres de métiers sur le sujet.
Cela dit, je vois mal comment les plus petites entreprises iraient se battre contre un donneur d'ordre en lui réclamant des pénalités de retard. Nous avons l'habitude en France, il est vrai, de privilégier la relation contractuelle, mais il faut que celle-ci ait une limite: celle où la petite entreprise ne peut plus tenir devant la grande, où la peur de perdre un client devient si forte que l'on renonce à faire jouer la clause de pénalité. C'est pourquoi nous songeons à retenir, en appuyant la directive européenne dans ce sens, un système de pénalité de paiement qui soit automatique et cessible à un tiers médiateur, par exemple une banque ou la société qui gère les comptes de l'entreprise. Quand il n'y aura plus de liens directs de l'un à l'autre, nous pourrons gagner la partie.
Sur les référencements, vous avez raison. En effet, si la loi interdit ces pratiques, chacun sait que l'on peut, en contrepartie d'un emplacement dans une bonne gondole, passer ce que l'on appelle des contrats de coopération commerciale. Or, si certains de ces contrats sont parfaitement loyaux et correspondent à une réalité - la place dans un catalogue, une opération de promotion -, leur rédaction est souvent peu claire et peu explicite sur ce à quoi l'on a exactement droit au titre de la promotion du produit. Bien des petites entreprises s'en plaignent.
Pourquoi sommes-nous dans une telle situation ? Parce que la majorité des petites entreprises, par crainte, là encore, de perdre le référencement dans la grande distribution, ne vont pas jusqu'au bout, hésitent à porter plainte et parfois, lorsqu'elles le font, en viennent à la retirer. Auquel cas, la direction de la concurrence du ministère de l'économie, mon secrétariat d'Etat ou le parquet ne peuvent poursuivre ces détournements de la loi comme ils en ont le droit, faute de preuves suffisantes. Je crois du reste pouvoir dire, car c'est important, que la grande distribution elle-même souhaite voir les procédures aller jusqu'au bout pour mettre fin à un système qui, sans être totalement illégal, n'en crée pas moins des conditions de concurrence peu saines. A vouloir à toute force obtenir immédiatement une valeur ajoutée maximale, on en vient à oublier que l'autre partie, le producteur ou le fournisseur, en créent aussi dans leurs domaines et qu'ils doivent bien rester en vie si l'on veut avoir des produits de qualité à vendre.
Nous avançons, me semble-t-il, vers une meilleure application du droit, pour peu que tout le monde s'y mette. Je compte sur vous pour y parvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Patrick Rimbert
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : PME, commerce et artisanat
Ministère répondant : PME, commerce et artisanat
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 2 décembre 1998