médicaments génériques
Question de :
M. Jean-Claude Lefort
Val-de-Marne (10e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
M. Jean-Claude Lefort attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la protection sociale sur la politique du médicament générique telle qu'elle se développe actuellement en France au vu de tous et en particulier des organismes officiels (comité économique des produits de santé, DGCCRF) chargés de sa mise en oeuvre et de son contrôle. Chacun sait désormais qu'un médicament générique résulte de la possibilité offerte à l'industrie pharmaceutique de copier un médicament princeps à l'expiration du brevet - au terme des dix-sept ou vingt années autorisées au « découvreur » de ce médicament original. Le médicament générique présente au terme de son évaluation la même qualité et bien entendu la même efficacité que « l'original », il est généralement vendu sous le nom de sa molécule associée à celui du laboratoire et le prix de vente au public est en principe largement inférieur au produit de référence. Est ainsi ouverte la possibilité de soigner correctement les personnes mais aussi de réaliser des économies substantielles pour celles-ci, pour la société et ses comptes sociaux - les médicaments génériques devant être vendus 30 % ou 40 % moins cher en moyenne sur le prix fabricant hors taxe du princeps. Or le développement croissant des médicaments génériques en France présente des aspects troublants et parfaitement inquiétants quand ils ne sont pas purement et simplement de nature scandaleuse et totalement illégale. Il souhaite d'abord faire part de son grand étonnement et lui demande de ce fait des éclaircissements précis sur le premier fait, et notamment pourquoi certains médicaments génériques sont vendus plus chers en France que les originaux. Des lois et décrets, toute une « batterie » d'arrêtés et autres circulaires existent, rendant théoriquement impossible cette situation. Et pourtant le fait est constatable et incontestable. Il a pu le vérifier personnellement. Autre fait surprenant qui porte sur la politique globale du médicament (génériques ou non) : pourquoi donc « ordre » est donné en France aux firmes pharmaceutiques (qui d'ailleurs, et contrairement à ce qu'on pourrait penser, maîtrisent totalement la fabrication des génériques) de ne pas aligner le prix de vente des médicaments sur les prix les plus bas qui existent au niveau d'autres pays européens - laissant ainsi jouer le marché auquel le ministre se réfère souvent et auquel il se déclare si attaché ? Pourquoi doivent-ils « caler » ces prix, et cela obligatoirement, sur les prix de pays européens dits « comparables » au nôtre, c'est-à-dire vendre à un coût plus élevé que possible ? Pourquoi faut-il donc vendre en France des médicaments plus chers que dans d'autres pays de l'Union européenne, notamment ceux de l'Europe du Sud ? Pourquoi, s'il déclare vouloir « traquer » les économies à réaliser en matière de dépenses de santé, jusqu'à en faire porter sur chaque malade une quote-part significative, donne-t-il instruction, avec son collègue ministre de l'économie et des finances, de ne pas autoriser en France la vente de médicaments à des prix bas identiques à ceux pratiqués en Europe, laissant ainsi jouer le marché ? Cela constituerait pourtant et de toute évidence une économie considérable pour les patients et la société. Il y aurait ici une source de réduction sérieuse des dépenses manifestement bien supérieure aux efforts imposés à tous les patients - efforts qui sont supportés de manière inégale car ils pèsent plus lourdement pour les plus défavorisés ou bien les plus malades -, efforts demandés par la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Mais il y a pire en termes de justice sociale et, cette fois, de légalité. En effet, il est établi et connu que les acteurs significatifs du médicament générique qui, il faut le rappeler, sont pour la plupart des filiales de grands groupes pharmaceutiques (donc producteurs de médicaments non génériques), consentent des remises commerciales très importantes aux pharmaciens d'officine. Le grand public n'a pas connaissance de ce fait scandaleux qui consiste à « donner » un nombre grandissant d'unités gratuites qui seront ensuite replacées dans le circuit pharmaceutique et par conséquent vendues et prises en compte pour la plupart de ces produits par la collectivité au travers de leur remboursement. Outre ce problème de légalité qui est du ressort des services de l'État (voir la note du directeur général de la DGCCRF - M. Jérôme Gallot - relative au contrôle du plafonnement des remises en date du 18 août 2000 à l'attention des acteurs de la chaîne de distribution du médicament et qui semble être restée sans effet), il apparaît clairement que les médicaments génériques pourraient être vendus à un prix beaucoup plus bas que les 30 % ou 40 % appliqués sur le prix fabricant hors taxe du princeps dans la mesure où les largesses - sous forme d'unités gratuites - dispensées par l'industrie pharmaceutique sont supportées par les patients et la collectivité. Si l'on considère qu'il existe environ 20 000 officines en France, on peut facilement mesurer l'ampleur des sommes mises en jeu. Tout cela ne constitue en aucun cas une remise en cause de notre système de distribution du médicament au travers des officines françaises, d'autant que celui-ci pourrait être menacé par la grande distribution avec une mise en place progressive et en perspective de la vente de médicaments dans les supermarchés. Mieux vaut que les patients aient affaire à un pharmacien pleinement formé qui puisse conseiller et dispenser le médicament tout en étant un acteur privilégié de la santé au plan local qu'à un « vendeur » pharmacien dans un supermarché. Au reste, les pharmacies pourraient également voir se développer leur activité en faisant du « portage à domicile » de médicaments pour des personnes en difficulté - ce qui créerait de surcroît des emplois dans le pays. Devant l'ampleur des problèmes posés, leurs conséquences et leur gravité, il lui demande de bien vouloir apporter à l'ensemble de ses questions des réponses précises, claires et non dilatoires.
Réponse publiée le 5 avril 2005
La politique du Gouvernement vise à favoriser l'innovation et à garantir à tous l'accès aux médicaments les plus innovants. Ces médicaments sont de plus en plus coûteux : par exemple, le traitement par Glivec des patients atteints d'une leucémie myéloïde chronique revient à 30 000 euros par an et par patient. L'accord cadre signé entre le comité économique des produits de santé (CEPS), et le syndicat représentant les entreprises du médicament qui porte sur la période 2003-2006 prévoit que le prix des médicaments qui se sont vus attribuer une amélioration du service médical rendu de niveau I ou II, et dans certains cas de niveau III, se situe dans une fourchette de prix correspondant à ceux pratiqués dans les quatre principaux marchés européens. La négociation menée au comité économique des produits de santé a pour but, comme le suggère l'honorable parlementaire, de disposer du médicament au prix le plus bas pratiqué dans ces pays. Comme vous le savez, les médicaments génériques sont des copies de médicaments originaux (princeps) qui ne bénéficient plus d'une exclusivité commerciale. Les firmes produisant ces médicaments génériques n'ont donc pas de frais de recherche ni de développement, ce qui explique que le prix du générique est plus faible que celui du princeps. Le développement du marché des génériques s'inscrit comme corollaire à l'innovation thérapeutique. Autrement dit, ce sont les économies dégagées par le développement des médicaments génériques qui permettent de financer la prise en charge des nouveaux produits innovants. Le ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale a donc engagé une politique qui vise à accélérer la montée en puissance des médicaments génériques par le biais de la substitution réalisée par les pharmaciens d'officine. Il a ainsi chargé le (CEPS) de mettre en place un comité de suivi des médicaments génériques avec l'ensemble des professionnels de la filière du médicament (syndicats d'officinaux, de fabricants de princeps et de génériques). Dans ce cadre, le CEPS applique les orientations des ministres sur des objectifs cibles de pénétration du marché par les génériques. Lorsque ces objectifs de développement n'ont pu être tenus, le groupe générique sera susceptible de passer sous tarif forfaitaire de responsabilité (TFR). Cela permet à l'assurance maladie de rembourser le médicament au prix du générique. Par ailleurs, le ministre a demandé au CEPS de pratiquer des baisses de prix des médicaments génériques dès qu'il existe des marges suffisantes. De plus, le CEPS a étudié avec les pharmaciens d'officine et les génériqueurs la possibilité d'encadrer plus strictement les remises commerciales octroyées par les fabricants aux pharmaciens afin de dégager des marges de manoeuvre qui permettront d'envisager des baisses de prix ultérieures des médicaments génériques plus importantes encore.
Auteur : M. Jean-Claude Lefort
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : solidarités, santé et famille
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 29 mars 2005
Dates :
Question publiée le 5 octobre 2004
Réponse publiée le 5 avril 2005