décentralisation
Question de :
M. Jacques Barrot
Haute-Loire (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 29 mai 2003
ÉDUCATION NATIONALE
M. le président. La parole est à M. Jacques Barrot, pour le groupe UMP.
M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, nous n'avons jamais sous-estimé les difficultés rencontrées par nos enseignants dans une société complexe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Vous ne les connaissez pas !
M. Jacques Barrot. Ils sont en charge d'une jeunesse qui, confrontée à des problèmes difficiles, ne bénéficie pas toujours des repères nécessaires.
M. Alain Néri. Amen !
M. Jacques Barrot. Mais nous souhaitons que les enseignants, dont la mission est décisive pour l'avenir de la nation, ne s'enferment pas dans des peurs excessives et dans le repli sur soi. La nation ne comprendrait pas en particulier que certains d'entre eux puissent compromettre le bon déroulement des examens au détriment de l'avenir de notre jeunesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. François Hollande. La faute à qui ?
M. Jacques Barrot. Mais le refus le plus ferme de certains débordements doit s'accompagner, monsieur le Premier ministre, d'un dialogue approfondi. Certes, il ne s'agit pas de remettre en cause la démarche décentralisatrice.
M. Jean-Claude Lefort. Ah ?
M. Jacques Barrot. D'autant que les lycées et collèges en tirent, depuis vingt ans, des bénéfices certains. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Par contre, on peut en discuter de façon très ouverte les modalités, le calendrier et les garanties.
M. Pierre Ducout. Oui, mon père !
M. Jacques Barrot. En outre, vous avez manifesté hier la volonté d'ouvrir deux chantiers significatifs : l'un consacré au métier et au déroulement de la carrière des enseignants ; l'autre à la place fondamentale de l'éducation nationale dans la préparation de l'avenir du pays.
M. Alain Néri. Amen !
M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous, devant notre assemblée, réaffirmer, s'il en est besoin, votre volonté d'écoute et d'ouverture en direction des enseignants, des personnels et de leurs représentants ? Car la nation a besoin que la bonne volonté de tous et l'attachement de chacun à l'avenir du pays l'emportent sur toutes les tentatives d'obstruction et d'intimidation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Paul Giacobbi. Oh ! là ! là !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président Jacques Barrot, nous sommes très attentifs à l'inquiétude de la communauté éducative nationale, celle des enseignants et de tous les personnels.
Mme Catherine Génisson. On l'a vu !
M. le Premier ministre. C'est dans cet esprit que j'ai tenu à organiser hier un comité interministériel consacré aux métiers de l'éducation, qui rassemblait une vingtaine de ministres, pour que l'on puisse traiter ensemble les problèmes de l'éducation. Car ces questions éducatives croisent souvent les questions de sécurité, d'autorité, de culture, du sport, les affaires sociales, les finances, et au fond toutes les questions de société. Le risque est de voir la société rejeter sur le monde éducatif toutes les difficultés qu'elle a à assumer ses différentes mutations ; et je ne veux pas que l'on fasse de l'éducation un concentré des problèmes sociaux.
C'est pour cela que nous disons combien nous sommes attachés à une éducation nationale.
M. François Hollande. Alors montrez-le !
M. le Premier ministre. Nationale, elle est ; nationale, elle restera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Chacun de nous éprouve de la reconnaissance et de la gratitude pour les maîtres qui l'ont construit.
Mme Martine David. On n'a pas cette impresssion !
M. le Premier ministre. Je le dis avec sincérité, nous sommes attachés à tous ces enseignants qui ont forgé nos personnalités. C'est pour cela que nous les respectons !
M. François Hollande. Alors négociez !
M. le Premier ministre. Et tout comme nous les respectons, nous souhaitons que nos engagements aussi soient respectés,...
M. Alain Néri. Dans les négociations ?
M. le Premier ministre. ... que l'information remplace la désinformation et la vérité, la rumeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Nous défendrons l'école maternelle française qui est l'une des meilleures du monde.
M. François Hollande. Créez des postes !
M. le Premier ministre. Toutes les semaines des délégations étrangères visitent nos écoles maternelles pour en étudier la pédagogie et l'organisation. Jamais il n'a été question d'affaiblir l'école maternelle, force de la société et de la République française. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Yves Durand. Mais vous supprimez des postes !
M. Bernard Roman. Et la scolarisation avant trois ans ?
M. le Premier ministre. Je sais qu'on parle, par malice ou par provocation,...
M. Pascal Clément. Les deux !
M. le Premier ministre. ... d'une prétendue privatisation de l'éducation. Cela me choque, cela nous choque. L'éducation est un service public national...
M. André Chassaigne. Les inspecteurs disent le contraire, sur le terrain !
M. le Premier ministre. ... et ce n'est pas parce qu'on a confié aux régions les lycées, aux départements les collèges, que l'éducation est devenue régionale ou départementale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Pascal Clément. Exactement !
M. Jean-Yves Besselat. Evidemment !
M. le Premier ministre. D'ailleurs, la majorité ici peut avoir la fierté d'avoir pour la première fois inscrit dans la Constitution le principe de péréquation, pour que l'égalité territoriale soit respectée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Car aujourd'hui, hélas ! On ne connaît pas le même destin suivant qu'on est dans telle ou telle école, dans tel ou tel lycée,...
M. François Hollande. En Poitou-Charentes !
M. Lucien Degauchy. La gauche n'a rien fait !
M. le Premier ministre. ... et il y a aujourd'hui des sites privilégiés et des sites fragilisés. Et si nous avons voté la péréquation, c'est bien pour assurer l'égalité nationale et républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jacques Le Guen. Très bien !
M. le Premier ministre. Monsieur le président Jacques Barrot, vous avez raison de souhaiter le dialogue. C'est pour cela qu'hier, à l'issue du comité interministériel, j'ai tendu la main aux forces sociales.
Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. Non !
M. Richard Mallié. Ils s'en foutent !
M. le Premier ministre. Je leur dis : « Mettons-nous autour de la table de négociation. »
M. François Hollande. Quand ? Tout de suite !
M. le Premier ministre. J'ai proposé trois grands sujets. Le premier sujet, en concertation avec le minitre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et celui de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, est celui des carrières, des métiers, de ce qui est la réalité du travail du professeur dans sa classe, de ses attentes, afin qu'on puisse parler de l'ensemble des métiers de l'éducation nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Martine David. Baratin !
M. Jean-Claude Lefort. Le temps de parole, monsieur le président !
M. Bernard Roman. Négociez !
M. Guy Teissier. Négocier quoi ?
M. le Premier ministre. Deuxième sujet très important, j'ai pris l'engagement, en ce qui concerne la décentralisation, de faire en sorte que l'on puisse discuter avec les partenaires sociaux...
M. Jean-Claude Lefort. C'est scandaleux, monsieur le président !
M. Alain Néri. Personne ne vous croit !
M. Jean Glavany. Négociez !
M. le Premier ministre. ... et je m'engage à n'adresser au Conseil d'Etat notre avant-projet qu'une fois achevées les discussions avec les partenaires sociaux,...
M. Jean-Claude Lefort. Il serait temps !
M. le Premier ministre. ... de manière que ce processus de décentralisation puisse tenir compte des avis des uns et des autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Je tiens à la décentralisation.
M. Bruno Le Roux. Négociez !
M. le Premier ministre. Je tiens à appliquer les conclusions du rapport Mauroy. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je tiens à faire de la décentralisation un atout pour la France, et ceci dans le dialogue et la concertation. C'est dans ce but que nous avons ouvert les discussions.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Négociez !
M. le Premier ministre. Enfin, troisième dossier important, la nation et l'école, l'attachement de la République à l'école.
Mme Martine David. C'est du baratin !
M. le Premier ministre. Nous ouvrons un grand débat national. Les ministres discuteront avec les syndicats. Ils définiront avec eux, avec également les parlementaires et tous les acteurs concernés, les conditions de ce grand débat national.
M. François Hollande. Mais quand ?
M. Alain Néri. Quand et où ? Ici ?
M. le Premier ministre. Nous sommes prêts à engager ces discussions dès vendredi, au lendemain de l'Ascension.
M. Jean-Claude Lefort. Monsieur le président !
M. le Premier ministre. Nous voulons un grand débat national où chacun puisse s'exprimer. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Négociations !
M. le Premier ministre. Je dis bien « s'exprimer » et non pas « hurler » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Parler démocratiquement, s'écouter les uns les autres, se respecter les uns les autres ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Claude Lefort. Respecter le temps de parole !
M. le Premier ministre. Je demande le respect dans ce débat essentiel. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) A l'issue du débat, une loi nationale d'orientation... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), dont la représentation nationale pourra débattre, définira notre action (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) pour les dix années à venir.
Mesdames, messieurs les députés, j'observe la société française. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est du baratin !
M. le Premier ministre. J'écoute. Ce que je vois, c'est que, quand on propose la réforme aux Français, ils hésitent, et il nous faut les convaincre... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Arnaud Montebourg. Bonimenteur !
M. Jean-Michel Ferrand. Et vous, vous êtes une baudruche !
Un député du groupe socialiste. C'est long ! C'est creux !
M. le Premier ministre. Mais quand on leur propose l'immobilisme, ils refusent.
M. Alain Néri. Négociez !
M. le Premier ministre. Et c'est bien parce qu'ils condamnent l'immobilisme qu'il y a eu un changement de majorité au printemps dernier ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Négociations ! Négociations !
Auteur : M. Jacques Barrot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 mai 2003