ART. 6 QUINQUIESN°CD1322

ASSEMBLÉE NATIONALE
20 novembre 2019

RELATIF À LA LUTTE CONTRE LE GASPILLAGE ET À L'ÉCONOMIE CIRCULAIRE - (N° 2274)

Tombé

AMENDEMENT N°CD1322

présenté par

M. Perea et Mme Tanguy

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ARTICLE 6 QUINQUIES

Rédiger ainsi cet article :

« Le chapitre II du titre VII du livre Ier de la deuxième partie du code de la commande publique est complété par un article L. 2172‑5 ainsi rédigé : 

« Art. L. 2172‑5. – Les achats de pneumatiques effectués par l’État, les collectivités territoriales et leurs opérateurs portent sur des pneumatiques rechapés. Si la consultation est infructueuse, les achats peuvent porter sur des pneumatiques non rechapés.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. » 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement a pour objectif d’améliorer la disposition introduite au Sénat visant à favoriser l’achat de pneus rechapés par les acteurs publics, en rendant cette disposition plus contraignante afin qu’elle ne reste pas un simple symbole, et en la codifiant. 

Le pneu rechapé est une mise en œuvre parfaite du principe d’économie circulaire : lorsque la bande de roulement du pneu a atteint sa limite d’usure, elle est remplacée, la carcasse d’origine étant conservée. Ce rechapage réduit l’impact environnemental du pneu (gain de 70 % de matière première et réduction de 50 kg de déchets par rapport à un pneu neuf, dans le cas d’un pneu de poids-lourds). 

Encourager l’achat de pneus rechapés permet de favoriser l’utilisation de pneus de qualité, réemployables, à l’opposé d’autres types de pneus peu durables, non réemployables et difficilement recyclables. Les pneus sont de plus en plus souvent achetés à bas coût, engendrant une généralisation de l’utilisation de pneus de moins bonne qualité, jetés lorsqu’ils sont usagés ; de plus, ces pneus sont généralement produits dans des pays éloignés, entraînant un mauvais bilan carbone du transport des pneus. 

Le rechapage contribue aussi à résoudre la problématique du stockage et du traitement des pneus usagés. 

L’achat de pneus rechapés est envisageable non seulement pour les poids-lourds, mais également pour les véhicules particuliers : l’offre de pneus rechapés pour les véhicules particuliers existe en effet, notamment en France et en Europe, bien qu’elle soit peu connue. Cette filière se réduit de plus en plus (alors qu’elle comptait encore 150 rechapeurs en France il y a 20 ans). Il ne manque qu’un encouragement à l’utilisation de pneus rechapés pour lui donner un nouveau souffle. 

Il est essentiel d’enclencher la revitalisation d’une filière de pneus vertueuse car locale et de qualité, allant de pair avec la production de pneus premium durables et rechapables diminuant la consommation de ressources. Le changement de culture par lequel les achats s’orienteront vers des pneus rechapés sera bénéfique à la fois pour la vitalité de l’économie française et pour le bilan carbone du transport de ses pneus.

Imposer l’achat de pneus rechapés par les personnes publiques permettra d’enclencher ce changement de culture.

Les pneus rechapés coûtant jusqu’à 40 % moins cher à qualité équivalente, cette orientation des achats ne pèsera pas sur les finances publiques. 

Par rapport à l’article adopté au Sénat, il convient de supprimer le mot « rechapable » qui, selon l’industrie du pneumatique, ne correspond à aucune définition technique française ou européenne. Tous les pneus sont a priori rechapables, n’importe quel producteur peut apposer sur le flanc du pneu le mot « rechapable » pour pouvoir bénéficier d’une commande publique, sans garantie qu’après la mise sur le marché ce pneu sera effectivement rechapable. Pour pouvoir être effectivement rechapé, un pneumatique doit être examiné par un professionnel avec un grand savoir-faire, après sa première vie de roulage. L’atelier de production dont le pneu est examiné doit également être homologué selon le règlement UN n° 108 ou 109 de l’ONU. Dans les faits, les pneumatiques à bas coût ne sont en général conçus que pour une seule vie et ne seront pas rechapés.

C’est donc aux pneus rechapés que la commande publique doit donner la priorité si elle veut soutenir ce modèle historique d’économie circulaire, l’ajout d’obligation concernant les pneus rechapables n’étant pas opérante. 

Lorsque cette évolution aura été amorcée par le secteur public, les flottes d’entreprises et les particuliers seront susceptibles pour certains d’entre eux d’orienter eux aussi leurs achats vers les pneus rechapés. 

Plusieurs entreprises de pneus rechapés pour les véhicules particuliers et les poids lourds sont présentes en Europe (Italie, Espagne, Pologne) et permettront de répondre aux besoins de la commande publique le temps que la filière française se renforce. La capacité de production de pneus rechapés pour les véhicules particuliers est actuellement de 300 000 pneus/an en France, et 2 millions/an en Europe. De même pour les poids-lourds, la capacité de production française est largement suffisante pour absorber le besoin supplémentaire.