N° 2303

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2019.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2020 (n° 2272),

 

TOME VIII

 

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES

 

Action audiovisuelle extérieure

PAR M. Alain DAVID

Député

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Voir le numéro : 2301.

 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

I. France Médias Monde : des résultats toujours plus satisfaisants, dans un contexte budgétaire toujours plus contraint

A. la mise en œuvre des objectifs du com s’est poursuivie malgrÉ les restrictions budgÉtaires

1. Une politique éditoriale dynamique

2. La poursuite de la transformation numérique

3. Un développement mondial limité par les restrictions budgétaires

4. Une recherche toujours active déconomies et de synergies

B. Les chaines de France MEDIAS MONDE connaissent des résultats très encourageants

C. Une situation toujours très incertaine en matière de missions et de moyens, qui contraint le groupe à réduire une partie de ses activités

1. Des marges de manœuvres financières toujours plus réduites

2. Un groupe contraint à réduire ses activités malgré les bons résultats obtenus

3. Un personnel qui doit faire face à des incertitudes croissantes

D. Des inquiétudes suscitées par le projet de holding de laudiovisuel public

II. TV5MONDE : le parachÈvement du plan stratÉgique de la chaÎne francophone

A. La poursuite de la mise en œuvre du plan stratégique 2017-2020

1. LAfrique : une priorité stratégique et un relais pour la diplomatie dinfluence

2. La transformation numérique : une priorité confirmée

a. La mise en œuvre du plan stratégique

b. Le développement dune plateforme audiovisuelle francophone mondiale

3. Des résultats daudience qui restent satisfaisants

B. une situation financière qui reste contrainte

1. Un effort de maîtrise des dépenses qui sest poursuivi en 2019

2. Des ressources propres limitées

3. Un impact attendu sur les projets et les effectifs de la chaîne

III. La coopération audiovisuelle : une dynamique à confirmer et des reflexions à mener

A. Une coopération européenne à valoriser

1. Maintenir une perspective de coopération avec la BBC

2. Développer et consolider le partenariat franco-allemand

B. Une réflexion à mener sur larticulation entre audiovisuel extérieur et aide publique au développement

1. Le rôle de Canal France International

2. Des synergies à développer

C. Des priorités transversales : le maintien du réseau dattachés audiovisuels et la francophonie

1. Préserver la couverture et la qualité de notre réseau dattachés audiovisuels

2. Laudiovisuel extérieur : un atout précieux pour la promotion de la francophonie

IV. Laudiovisuel extérieur : un outil prÉcieux de notre diplomatie dinfluence dans un contexte de guerre de linformation

A. Opposer à la désinformation une information indépendante et de qualité

1. La désinformation est devenue le vecteur dune véritable « guerre froide de linformation »

2. Laudiovisuel extérieur et la coopération audiovisuelle doivent être pleinement mobilisés dans la lutte contre la désinformation

a. Une série doutils a été adoptée pour lutter contre la désinformation

b. Laudiovisuel extérieur sest pleinement mobilisé contre la désinformation

c. La piste dun Conseil de déontologie

B. Le rÔle stratÉgique de notre audiovisuel extÉrieur : le cas de la roumanie

a. Une coopération culturelle et audiovisuelle dense avec un pays francophone et francophile

b. La diffusion de laudiovisuel extérieur en Roumanie : une place stratégique

i. RFI Romania

ii. TV5 Monde

c. Quelles perspectives pour laudiovisuel extérieur en Europe centrale et orientale et dans les Balkans ?

Conclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION : PRÉSENTATION DU RAPPORT DEVANT LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

ANNEXE : Liste des personnalités rencontrées par votre rapporteur


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   Introduction

À quelques mois de l’examen par le Parlement du projet de loi de réforme de l’audiovisuel public, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, dans son discours de clôture de la Conférence des ambassadeurs et des ambassadrices le 29 août dernier, décrivait « la culture, l’information et le développement » comme les « nouveaux attributs de puissance » indispensables pour « continuer à peser sur la scène internationale ». Dans ce contexte, le ministre a appelé à se doter d’un « audiovisuel extérieur puissant au service d’une information objective et de qualité ».

Dans un contexte de concurrence toujours plus accrue sur la scène internationale, qui prend parfois les traits d’une véritable guerre de l’information, notre audiovisuel extérieur apparaît comme un puissant outil d’influence, à la valeur stratégique. Face à la désinformation à laquelle se livrent certains acteurs, souvent au service de discours anti-démocratiques, radicaux ou simplistes, notre audiovisuel extérieur s’est déjà pleinement mobilisé au service non seulement d’une information de qualité, mais aussi pour la promotion des valeurs que la France véhicule grâce à sa diplomatie d’influence.

Pour autant, les trajectoires financières de France Médias Monde (programme 844) et de TV5 Monde (programme 847) ont été revues à la baisse à l’été 2018, à hauteur respectivement de 3,5 et d’1,2 millions d’euros à horizon 2022. La dotation de France Médias Monde dans le PLF pour 2020 est en recul d’1 million d’euros par rapport à l’année dernière, et de près de 10 millions d’euros par rapport à la trajectoire fixée dans le COM 2016-2020. Il ne s’agit pas de contester la participation de l’audiovisuel extérieur aux mesures d’économie imposées à l’ensemble de l’audiovisuel public, mais de constater un hiatus de plus en plus criant entre les ambitions affichées par le Gouvernement et les moyens qui y sont alloués.

Il ne suffit pas de répéter que l’audiovisuel extérieur est un précieux outil d’influence, il faut se donner les moyens, y compris en mobilisant la coopération audiovisuelle et des bailleurs de fonds tels que l’Agence française de développement ou l’Union européenne, de répondre aux objectifs suivants :

-         Produire et promouvoir une information nourrie par le respect des standards déontologiques du journalisme et le pluralisme des points de vue ;

-         Contribuer à la francophonie et à la francophilie dans le monde et porter les valeurs de la France ;

-         Capitaliser sur le lien entre audiovisuel extérieur et aide publique au développement.

À ce titre, votre rapporteur souhaite d’emblée attirer l’attention sur un point. Si notre audiovisuel extérieur connaît chaque année des résultats toujours plus satisfaisants malgré les réductions budgétaires imposées, la tentation est grande de considérer qu’il ne s’agit là que d’optimisations et autres rationalisations des moyens, là où nous risquons en réalité de faire de cet outil précieux une peau de chagrin.

 

 

 

 


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I.   France Médias Monde : des résultats toujours plus satisfaisants, dans un contexte budgétaire toujours plus contraint

A.   la mise en œuvre des objectifs du com s’est poursuivie malgrÉ les restrictions budgÉtaires

Pour rappel, le contrat dobjectifs et de moyens 2016-2020 de France Médias Monde - qui regroupe France 24, RFI et Monte Carlo Doualiya - repose sur les trois axes suivants :

- adapter les offres éditoriales de la société à la diversité des publics, notamment les plus jeunes, ainsi qu’aux changements induits par la révolution numérique en matière d’usages et de modes d’accès à l’information ;

- développer la présence mondiale de France Médias Monde dans un contexte dintensification de la concurrence, en adaptant sa stratégie de distribution aux évolutions techniques (passage en TNT en Afrique, et en haute définition dans l’ensemble du monde), en améliorant la notoriété des médias de FMM à travers une hausse du budget de communication, et enfin en développant l’activité de coopération internationale dans le domaine des médias à travers un rapprochement de la société avec Canal France International (CFI) ;

- optimiser lorganisation et la maîtrise des équilibres budgétaires, en améliorant notamment les processus internes à l’entreprise (ressources humaines, procédures d’achats…) et en développant les coopérations avec les autres entreprises de l’audiovisuel public en vue de réaliser des économies en gestion (achats groupés par exemple) et de porter des projets ambitieux à moindre coût, à l’image de la création de l’offre d’information en continu de service public.

1.   Une politique éditoriale dynamique

FMM a poursuivi le développement de nouveaux contenus éditoriaux, en liens étroits avec la mise en œuvre de sa politique linguistique.

Loffre de contenus en langues étrangères sest enrichie, notamment dans le sillage du lancement de France 24 en espagnol en 2017. La déclinaison hispanophone de la chaîne est désormais accessible dans 8 millions de foyers, auxquels s’ajoutent 12 millions de foyers en diffusion partielle au Mexique. Les résultats d’audience sont déjà très positifs (Colombie, Argentine, Mexique), et la chaîne a gagné plus de 50 % de notoriété entre le dernier trimestre 2017 et le premier semestre 2018. Surtout, la chaîne connaît un taux de conversion très élevé : près d’un quart des personnes connaissant France 24 déclarent la regarder au moins une fois par mois.

En numérique, France 24 en espagnol avait déjà dépassé en août 2019 le million de visites, et connaît une croissance exponentielle sur YouTube avec 15,5 millions de vidéos vues, soit 7,5 fois plus qu’en 2018. La déclinaison de la chaîne a ainsi reçu le « Trophée Youtube de créateur Argent ».

Dans ce contexte, votre rapporteur souhaite attirer lattention sur un point en particulier. Alors que tout est prêt pour passer à une diffusion en espagnol de 12h, contre 6h actuellement, toute avancée est bloquée depuis plusieurs mois. Cette situation est d’autant moins justifiable que le passage à 12h va pouvoir se faire à coûts constants, et n’aura pas d’impact sur la réalisation des économies attendues du groupe. Il serait particulièrement fâcheux, compte tenu des très bons résultats obtenus par France 24 en espagnol, de retarder davantage le passage à 12h de diffusion.

L’élargissement de l’offre en langues étrangères est aussi passé par lextension du programme InfosMigrants (voir infra) à deux nouvelles langues afghanes, en plus du français, de l’arabe et de l’anglais, et par le renforcement des langues africaines de RFI. On peut aussi mentionner le lancement des premiers programmes en peul, dans le cadre du projet MédiaSahel, développé en partenariat avec Canal France international (CFI) et l’Agence française de développement.

2.   La poursuite de la transformation numérique

FMM poursuit la mise en œuvre de sa stratégique numérique, selon plusieurs objectifs :

-         Développer la mise à disposition des contenus sur l’ensemble des environnements numériques, selon une stratégie d’hyperdistribution adaptée à la spécificité de médias plurilingues à vocation mondiale. Face aux risques liés à la prédominance de grandes plateformes, et notamment aux modifications d’algorithmes de certains réseaux sociaux, FMM cherche à diversifier ses sources de trafic – au travers d’une politique de syndication avec des médias partenaires – mais aussi investit dans le développement de ses environnements numériques propres, comme en témoigne la récente refonte des sites et applications mobiles du groupe ;

-         Développer des formes de contenus adaptés aux usages du numérique, l’ensemble des équipes concernées travaillant au déploiement de formats adaptés aux nouveaux modes de consommation de l’information (« Instant Article » sur Facebook, directs sur Facebook, « stories » sur Facebook et Instagram, lancement de l’application RFI sur l’assistant vocal d’Amazon Alexa) ;

-         Renforcer l’offre numérique existante avec le développement de nouvelles offres ciblées (InfoMigrants, ENTER, Culture Prime).

Des moyens ont été spécifiquement dédiés à cette stratégie numérique. Au total, l’enveloppe hors rédactions devrait s’élève à 8,3 millions d’euros sur l’année 2019, en hausse de 9,5 % par rapport à 2018. En incluant les moyens des rédactions, on atteint près de 16,3 millions d’euros soit 6 % du budget global.

Les résultats atteints sont globalement très satisfaisants et en croissance, avec une empreinte numérique en hausse de plus de 8 % entre 2017 et 2018, et un succès important sur les réseaux sociaux. RFI, France et MCD atteignent fin 2018 65 millions d’abonnés sur Facebook et Twitter, et 3 millions d’abonnés aux chaînes YouTube. Sur l’ensemble de l’année 2018, 900 millions de vidéos et sons ont été consommés (75 millions par mois, soit +32 % par rapport 2017). FMM enregistre près de 35 millions de visites mensuelles en moyenne en 2018 sur ses environnements propres, soit 420 millions de visites annuelles.

3.   Un développement mondial limité par les restrictions budgétaires

Sur ce point, la révision de la trajectoire financière du COM a contraint le groupe à limiter ses ambitions.

Le nombre de foyers touchés par France 24 continue daugmenter, en hausse de 8 % par rapport à lannée dernière, avec 385 millions de foyers. Cela s’explique par les progressions de la chaîne en Amérique latine et en Asie, et par les positions conquises sur la TNT dans plusieurs pays d’Afrique.

Pour RFI, c’est sur le territoire national que les principaux développements ont été enregistrés. RFI a été lancée en radio numérique terrestre en 2018 à Lille, Lyon et Strasbourg, et devrait gagner Toulouse, Bordeaux et Marseille d’ici la fin de l’année 2019.

Pour autant, au plan mondial, les économies exigées ont contraint le groupe à réduire sa voilure : arrêt de France 24 en anglais aux États-Unis (diffusion payante) et en Scandinavie, arrêt de MCD aux Émirats arabes unis. La chaîne a aussi dû renoncer au passage en HD dans certaines zones et à une présence sur la TNT publique dans plusieurs pays d’Afrique du fait de coûts d’entrée trop élevés ([1]), alors qu’il s’agit là d’outils clef pour son développement mondial.

4.   Une recherche toujours active d’économies et de synergies

En 2018, FMM a poursuivi la recherche doptimisations et de synergies, permettant là encore de réaliser des économies budgétaires.

Source : ministère de la Culture

Ainsi le coût des grilles de programmes, qui inclut les dépenses de programmes et les dépenses techniques de fabrication associées ([2]), est resté quasiment stable par rapport à 2018 (il a même baissé de 0,1 %). Cette évolution s’est faite au prix de plusieurs mesures déconomie, qui sont passées notamment par une réduction des recrutements : gains de productivité réalisés dans le cadre de départs de collaborateurs non remplacés, baisse du recours au remplacement de personnels (piges et CDD) au sein de RFI et de la direction technique, et d’autre part réforme numérique de la rédaction de RFI en anglais, et effet favorable de la transformation du crédit d’impôt compétitivité et emploi (CICE) en allègement de charges patronales (rédactions et directions techniques).

Deuxièmement, FMM a poursuivi et renforcé ses collaborations avec les autres sociétés de laudiovisuel public. On peut mentionner le lancement de l’offre culturelle numérique Culture Prime, la contribution de FMM à l’onglet « Vrai ou Fake » sur le site de Franceinfo, la création d’une nouvelle émission sur RFI intitulée « Les dessous de l’infox », la coproduction par France 24 d’une nouvelle émission d’actualité internationale diffusée sur Franceinfo, « Le monde dans tous ses États » ainsi que la participation de la société à un appel conjoint à projets dans le domaine des écritures numériques.

FMM développe et approfondit la coopération à léchelle européenne, notamment avec Deutsche Welle. De nouveaux projets éditoriaux communs ont été élaborés après le succès d’InfoMigrants (voir infra), et une chaîne numérique en langue turque, « +90 », a été lancée avec Deutsche Welle, Voice of America et BBC World.

De façon générale, la coopération européenne et internationale, en plus de sinscrire pleinement dans notre diplomatie dinfluence, constitue un levier pour mobiliser des sources alternatives de financement.

B.   Les chaines de France MEDIAS MONDE connaissent des résultats très encourageants

En 2018, les chaînes de France Médias Monde ont touché 176 millions de personnes chaque semaine, en progression de 26 millions de contacts par rapport à 2017, soit une hausse de 17,4 %, après la progression de 11 % enregistrée entre 2016 et 2017. Un « contact » englobe à la fois la diffusion en linéaire sur télévision ou radio et l’offre numérique, afin de tenir compte de l’évolution des usages et se doter d’une vision unifiée de l’audience.

On dénombrait en 2018 :

-         129, 8 millions de téléspectateurs et auditeurs hebdomadaires en linéaire, soit une hausse de 21 % par rapport en 2017, et selon une mesure opérée dans un tiers des pays de diffusion et hors radios partenaires ;

-         46,3 millions dutilisateurs sur les environnements numériques, soit une hausse annuelle de 8,4 %.

France 24 a touché 15,5 millions de personnes chaque semaine en numérique, et 79,8 millions en linéaire, soit 18,6 millions de plus quen 2017 et 24,8 millions de plus quen 2016. À noter que si la fréquentation en numérique a reculé de 6 % par rapport à 2017, cela s’explique essentiellement par un effet négatif lié à une modification des paramètres de l’algorithme de recommandations de Facebook, qui privilégie le relais de contenus personnels aux dépens de contenus édités par des médias.

LAfrique francophone (27,9 millions de contacts) et la zone Afrique du Nord et Moyen-Orient (26,1 millions) restent largement dominantes dans les audiences de la chaîne, en légère hausse par rapport à lannée dernière. France 24 est désormais la chaîne d’information internationale la plus regardée dans les trois pays du Maghreb central, devançant notamment les chaînes panarabes.

En Afrique francophone, France 24 demeure la chaîne d’information internationale la plus regardée et se maintient parmi les dix premières chaînes, tous genres confondus, les plus regardées dans la quasi-totalité des capitales mesurées.

Concernant l’Amérique latine, les premières études d’audiences linéaires spécifiques à la déclinaison hispanophone de la chaîne seront disponibles début 2020, sur les résultats 2019. Toutefois la chaîne était déjà accessible à près de 8 millions de foyers fin 2017, soit un doublement de sa distribution en quelques mois, et connaît déjà de très bons résultats, qui ne pourront qu’être confirmés par le passage à 12h de diffusion journalière.

RFI a enregistré une audience hebdomadaire linéaire de 40,8 millions dauditeurs, mesurée dans 33 pays sur les 150 où la chaîne est disponible. Cela représente une légère hausse, de 0,2 %, par rapport à lannée précédente.  LAfrique francophone concentre toujours lessentiel des audiences de RFI, à hauteur de 73 % des audiences hebdomadaires mesurées, comme en 2017. RFI parvient à rester parmi les cinq stations les plus écoutées quotidiennement dans la quasi-totalité des capitales évaluées, et a pu conserver sa position de station la plus écoutée quotidiennement en RDC, tout en ayant pâti de la fermeture de son émetteur FM à Kinshasa pendant plusieurs mois, conformément à une décision du gouvernement local.

MCD a également connu une hausse de son audience hebdomadaire en linéaire depuis lannée dernière. Elle s’établit à 9,2 millions d’auditeurs, soit une progression de 70 %, qui s’explique par la réouverture des relais FM irakiens de la chaîne du fait de l’amélioration du climat sécuritaire local. MCD compte désormais près de 4 millions d’auditeurs en Irak, soit 19 % de la population. Si la chaîne doit se développer en numérique, la fermeture de lémetteur de Chypre aura un impact modeste mais négatif sur ses résultats daudience en ondes moyennes (voir infra).

C.   Une situation toujours très incertaine en matière de missions et de moyens, qui contraint le groupe à réduire une partie de ses activités

Une fois encore, les engagements pris par lÉtat dans le COM de France Médias Monde pour 2016-2020 ne seront pas respectés. L’État s’était engagé à augmenter les ressources publiques de 23,1 millions d’euros, soit 1,9 % par an en moyenne. Pour lannée 2020, la dotation de France Médias Monde est de 255,2 millions deuros, en baisse de 1 million deuros par rapport à 2019 et de 10 millions deuros par rapport aux engagements du COM pour 2020.

Tout cela dans un contexte de concurrence toujours plus accrue pour notre audiovisuel public sur la scène internationale. La dynamique budgétaire retenue pour FMM est totalement à rebours des choix retenus par nos principaux concurrents :

-         Deutsche Welle disposait en 2019 d’une dotation de 350 millions d’euros, en croissance continue ces dernières années (+25 % depuis 2013), pour 162 millions de contacts hebdomadaires soit environ 15 millions de contacts de moins que FMM ;

-         La branche internationale de la BBC, BBC World, dispose d’un budget de plus de 430 millions d’euros, dont 380 millions d’euros pour BBC World Service, abondé par 282 millions d’euros de redevance et 98 millions d’euros de subventions sous forme d’aide au développement, via le Foreign office ([3])  ;

-         L’US Agency for global media, qui regroupe cinq réseaux de médias dont la radio Voice of America, correspond à un budget de 719 millions d’euros.

En outre, FMM doit faire face aux stratégies offensives menées par de nouveaux concurrents, tout particulièrement la Chine et la Russie. Selon un rapport de Reporters sans frontières ([4]), la Chine aurait investi 6 milliards deuros sur les dix dernières années pour développer son audiovisuel extérieur, montant qui aurait augmenté depuis pour atteindre 1,3 milliard d’euros par an. La Chine s’est lancée dans une importante politique de conquête audiovisuelle, notamment grâce à sa chaîne « CGTN Africa », diffusée en anglais et dans des langues locales sur ses stations de radio. Laudiovisuel extérieur chinois progresse également en Europe, avec limplantation dun centre de production à Londres, « CGTN Europe », qui s’est appuyé sur le recrutement de 90 journalistes locaux, et revendique l’adoption d’une « perspective chinoise » sur l’actualité européenne ([5]). Lancée en septembre 2019, cette déclinaison de la chaîne, qui fait actuellement l’objet d’une enquête de l’Ofcom, l’autorité régulatrice des télécommunications du Royaume-Uni, a déjà fait l’objet de critiques sur son traitement des évènements à Hong Kong ([6]).

Les médias internationaux russes sinscrivent aussi dans une stratégie offensive et globale, avec un développement en Amérique latine, aux ÉtatsUnis ou encore en Europe, comme en témoigne le lancement en 2017 de la chaîne de télévision RT en français. Le groupe RT est présent via plusieurs chaînes dans le monde, grâce à une diffusion en cinq langues (russe, anglais, français, espagnol et arabe).

À cela s’ajoute l’agence de presse internationale Sputnik, lancée en 2017 et regroupant aujourd’hui plus de 30 sites et des rédactions travaillant en plus de 30 langues.

Or pour la Chine comme pour la Russie, l’expansion de l’audiovisuel extérieur participe pleinement et explicitement d’une diplomatie dinfluence offensive, qui doit alerter la France sur sa capacité à conserver son influence dans le monde et à garantir par là-même la promotion d’un modèle démocratique et pluraliste.

1.   Des marges de manœuvres financières toujours plus réduites

ÉVOLUTION DES CHARGES DE France MEDIAS MONDE DEPUIS 2016

Source : Ministère de la Culture

Si les charges dexploitation de FMM ont diminué de 0,4 % entre 2018 et 2019 (soit 1,18 million d’euros), entre 2016 et 2018, hors dépenses couvertes par des subventions de bailleurs de fonds internationaux, elles ont connu une augmentation de 13,7 millions deuros, soit une hausse de 5,4 %.

Pour 2018-2019, l’évolution de charges d’exploitation a été essentiellement marquée par :

-         La stabilité du coût des offres linéaires et numériques (baisse de -0,1 %), au prix toutefois de départs non remplacés, et d’un moindre recours au remplacement de personnels (piges et CDD) au sein de RFI et de la direction technique, dans le cadre de l’allongement du temps de travail des personnels permanents ;

-         La quasi-stabilité du coût de France 24 en espagnol (6,57 millions d’euros, soit une hausse de 3 %) ;

-         L’augmentation des dépenses consacrées aux environnements numériques (8,33 millions d’euros, soit 9 %), principalement liée à la hausse du coût de bande passante et d’hébergement, à la création de postes numériques en 2019 et à la hausse des amortissements liés aux investissements numériques ;

-         La stabilité des frais de diffusion et de distribution (+0,1 %, soit 24,81 millions d’euros), et des frais de communication et de marketing (3,26 millions d’euros, soit -0,6 %) ;

-         La diminution des dépenses affectées aux directions communes et aux frais généraux (42,76 millions d’euros, soit -4,9 %), notamment du fait d’une baisse des dépenses liées à des départs de personnels.

Les charges de personnels représentent 54,3 % des dépenses totales, une proportion stable dun niveau élevé, qui sexplique par les productions en interne des contenus des antennes de FMM.

Source : ministère de la Culture

Entre 2016 et 2018, les charges de personnel de FMM ont augmenté de 4,5 millions deuros, et le budget 2019 prévoyait une hausse de 2,4 millions deuros par rapport à 2018.

On peut expliquer cette progression par plusieurs facteurs : glissement de la masse salariale dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire (+1,70 M€), poursuite de la transformation numérique éditoriale et renfort des services planning / formation de la société (0,60 M€), revalorisation du budget alloué aux correspondants de France 24 (+ 0,9 M€), non-reconduction d’effets positifs constatés en 2018 (reprise de charges à payer sur des dépenses de personnel non utilisées, baisse des départs à la retraite) (+1,6 M€), développements financés par subventions (InfoMigrants, création d’un pôle de coordination de projets avec l’Agence française de développement) (-0,4 M€).

À ces charges en hausse, s’ajoutent des ressources propres limitées.

Le niveau des ressources propres de FMM devrait sétablit en 2019 à 11,25 millions deuros, en hausse de 4,3 % par rapport à 2018, soit 0,46 million deuros. Cela s’explique essentiellement par une progression de 0,39 million d’euros des recettes publicitaires, liée à une hausse attendue des recettes de France 24, et à l’effet favorable de la Coupe d’Afrique des Nations pour RFI. On relève par ailleurs une hausse de 0,24 million d’euros des subventions de bailleurs de fonds internationaux, telles que les subventions européennes reçues au titre d’InfoMigrants, et une diminution de 0,16 million d’euros des autres ressources propres (éditions musicales, syndication de contenus, vente de services, partenariats, distribution payante et académie de formation).

Cette hausse s’explique donc en partie par des évolutions ponctuelles, et n’empêchera pas la nécessaire réalisation de nouvelles économies au cours de lexercice 2020, imposée par la diminution de la dotation publique du groupe.

2.   Un groupe contraint à réduire ses activités malgré les bons résultats obtenus

Pour faire à cette succession de coups de rabot, le groupe a dû prévoir de nouvelles mesures déconomie, qui s’ajoutent aux efforts déjà réalisés ces dernières années.

Ces économies sont passées par des mesures de gestion d’une part : renégociation du bail immobilier par anticipation qui devrait permettre une économie annuelle de 1,5 million d’euros, renouvellement de la prestation de production TV. De plus, une politique de modération salariale est envisagée, avec un gel des mesures individuelles en 2020, sans remise en cause des accords signés avec les partenaires sociaux.

Surtout, le groupe a été contraint de réduire à nouveau ses activités de distribution et de diffusion malgré les bons résultats obtenus. La distribution payante de France 24 aux États-Unis a dû s’arrêter (la chaîne restant présente sur les OTT ([7])  et le numérique), de même que sa diffusion sur la TNT en Ile-de-France, avec une présence maintenue sur Franceinfo et en continu sur le câble et le satellite. Depuis le 8 avril 2019, la diffusion de Franceinfo s’est substituée à celle de France 24 sur la TNT en Outre-mer, alors que France 24 y était la première chaîne. Le groupe a aussi dû renoncer au passage à la HD dans plusieurs zones, et au passage à la TNT payante en Afrique.

La fermeture de l’émetteur de Chypre, suite au départ des États-Unis qui fournissaient une ressource locative de l’ordre de 1,5 million d’euros, a contraint MCD a abandonné sa diffusion en ondes moyennes. Outre l’impact attendu de 4 à 8 % de parts de marchés en moins dans les pays non pourvus en FM, la fermeture du site revêt une dimension symbolique très forte. Alerté à plusieurs reprises, le gouvernement na apporté aucune réponse, alors que cet outil permet démettre dans une zone à limportance géostratégique incontestable. Si MCD va pouvoir se développer en numérique, labandon de lémetteur de Chypre prive FMM dune sécurisation de la diffusion au Proche et Moyen-Orient en cas de fermeture de relais FM, tout à fait plausible dans une région exposée aux conflits. Les récentes attaques et intimidations dont ont fait l’objet plusieurs médias irakiens, suite à leur couverture de la vague de contestation sociale qui touche le pays depuis le début du mois d’octobre, suffisent à le rappeler (locaux saccagés, transmission coupée, journalistes menacés…).

Au total, les perspectives déconomies sont de 2 millions deuros dici 2022, avec une baisse attendue de 8 millions de foyers, dont 3,6 en Europe et 4,5 aux États-Unis.

Les restrictions budgétaires ont aussi un impact sur la politique éditoriale et sur la politique de langues de FMM.

RFI émet quotidiennement en français et dans treize autres langues, mais a dû abandonner la diffusion radio en anglais, au profit d’une seule diffusion sur internet, via des podcasts. Or, la diffusion en langues étrangères définit le cœur de métier de FMM, et apparaît comme le signe distinctif de tout média international. La fragilisation, sans grande cohérence, de la politique de langues de FMM, est à la fois un signal très négatif et un vecteur de fragilisation du groupe et de sa crédibilité.

Les rédactions sont contraintes de recourir de plus en plus aux rediffusions, et ont dû prolonger la programmation allégée de la période estivale et de Noël.

Malgré les efforts entrepris, le groupe conserve de vives inquiétudes pour lavenir. Ainsi l’idée d’une fermeture de France 24 en espagnol est régulièrement avancée, alors qu’elle serait pourtant dommageable pour l’image de la France et irait là encore à rebours des très bons résultats obtenus, pour un coût budgétaire relativement limité.

3.   Un personnel qui doit faire face à des incertitudes croissantes

Dans ce contexte, le personnel de FMM, dont votre rapporteur a rencontré les représentants, doit faire face à des inquiétudes et incertitudes persistantes. Le personnel, qui a déjà dû devenir polyvalent et apprendre à travailler avec des moyens toujours plus contraints, pâtit d’un manque de visibilité et d’un sentiment de perte de sens dans les restrictions imposées au groupe par sa tutelle.

Plus spécifiquement, la situation des correspondants étrangers reste très incertaine. La base juridique conférée par l’article L. 7112-1 du code de travail dispose que « toute convention par laquelle une entreprise de presse sassure, moyennant rémunération, le concours dun journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties ». Or si certaines entreprises de presse en déduisent la nécessité de payer des cotisations sociales pour leurs collaborateurs à l’étranger, la pratique n’est pas harmonisée.

France Médias Monde a mis un terme à l’affiliation des correspondants étrangers à la sécurité sociale française, avec en compensation le versement direct d’une aide pour les correspondants. Or, pour certains correspondants, tout particulièrement ceux qui ne sont ni en CDI ni en détachement, la Caisse des Français de l’Étranger (CFE) est trop onéreuse, et les sommes qui leur sont versées par l’entreprise insuffisantes pour pallier cette difficulté. 

Une lettre a été adressée en juin dernier au ministre de la Culture par le réseau de journalistes pigistes à l’étranger Spartacus, mais reste aujourd’hui sans réponse. France Médias Monde et Radio France s’apprêtent également à saisir le ministre d’une lettre commune, et il est impératif de trouver rapidement une solution pour garantir la protection sociale de nos correspondants à létranger. Ce réseau, constitué d’une petite centaine de personnes, participe pleinement du rayonnement de la France et contribue directement à linformation des citoyens français, composante essentielle de toute démocratie. Or, de nombreux journalistes ont déjà décidé de mettre fin à leurs activités pour des raisons financières et sociales.

Dans ce contexte, votre rapporteur appelle à ce que la réforme prochaine de laudiovisuel public aborde pleinement ce sujet, afin dapporter une réponse législative claire et stable au problème de la protection sociale des correspondants étrangers.

D.   Des inquiétudes suscitées par le projet de holding de l’audiovisuel public

Votre rapporteur souhaite, en prévision du débat parlementaire sur le projet de loi de réforme de laudiovisuel public, qui doit être présenté dans les prochains mois, alerter sur la nécessité de tenir compte des spécificités de laudiovisuel extérieur, et sur les risques créés par le projet de création dune « holding » de laudiovisuel public.

En partie inspiré des modèles intégrés d’audiovisuel public existants au Royaume-Uni et en Allemagne, le projet de holding devrait avoir, selon les informations communiquées à votre rapport, les caractéristiques suivantes :

-         Mise en place d’une structure de taille modeste qui sera chargée de la nomination des dirigeants et de la répartition des financements, issus de la contribution à l’audiovisuel public, et d’animer et de favoriser les coopérations entre les filiales ;

-         Au plan budgétaire, adoption d’un contrat d’objectifs et de moyens communs, qui fixera une dotation distincte pour chaque filiale, sur plusieurs années ;

-         Mise en place d’un conseil d’administration de douze personnes, dont un « commissaire du gouvernement » sans droite de vote issu du ministère de la Culture, et un siège unique pour le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

En l’état actuel des choses, il existe un risque important de voir laudiovisuel extérieur devenir le parent pauvre de la holding. Pour votre rapporteur, un seul siège sur douze au conseil dadministration de la future holding pour le MEAE ne constitue pas une garantie suffisante pour assurer la prise en compte des spécificités de laudiovisuel extérieur, là où le ministère de l’Action et des Comptes publics et l’Agence des participations de l’État disposeront chacun d’un siège. Au plan budgétaire, si le futur COM devra fixer une trajectoire pluriannuelle, rien n’empêchera, comme cela a été précisé à votre rapporteur en audition, de revoir ces trajectoires en loi de finances, et donc de redistribuer les ressources entre opérateurs.

Or, les spécificités de laudiovisuel extérieur sont nombreuses, et justifient un traitement distinct pour FMM. Cette distinction a déjà été reconnue pour Arte et pour TV5 Monde, compte tenu de l’impossibilité juridique et diplomatique de nationaliser des capitaux étrangers. Ainsi Arte, qui repose sur Arte France, Arte Allemagne et un GIE, n’est ni une chaîne française, ni une chaîne allemande. Compte tenu de la répartition du capital d’Arte France, dont les actionnaires sont France Télévisions à 45 %, l’État à 25 %, Radio France à 15 % et l’Ina à 15 %, une intégration à la holding aurait rassemblé les participations françaises, qui seraient ainsi devenues majoritaires, ce qui n’est pas compatible avec le statut d’Arte. Dans le cas de TV5 Monde, une difficulté similaire aurait été constatée, la chaîne étant issue d’une coopération et d’une participation financière de la France, de la Suisse, de la Belgique, du Canada et du Québec.

Si FMM est un groupe exclusivement français, il n’en présente pas moins des spécificités éditoriales, à commencer par le rôle joué par les langues étrangères. FMM diffuse en quinze langues au quotidien et trois langues hebdomadaires (créole, arménien, peul), et la moitié des utilisateurs est touchée via les langues étrangères. Plusieurs de ces langues connaissent actuellement une progression très importante : c’est le cas de l’arabe, du brésilien, ou encore du chinois, du vietnamien et du cambodgien qui ont connu sur un an une hausse de 38 % des fréquentations. Autre spécificité de FMM par rapport aux autres opérateurs de l’audiovisuel public, lhyperdistribution, à l’inverse de la stratégie des médias nationaux qui sont présents et puissants sur un seul territoire.

De façon générale, il s’agit de reconnaître la dimension géopolitique et régalienne des missions de FMM, qu’il serait fâcheux de négliger au profit de la dimension et de la diffusion purement nationales de l’audiovisuel public.

Dans ce contexte, votre rapporteur appelle à la mise en place dans la structure de la future holding dun financement plancher en pourcentage et/ ou en valeur absolue du montant de la contribution à laudiovisuel public attribué à FMM, sur le modèle, si souvent invoqué, de BBC World, dans le cadre global de la BBC. À défaut, et bien que cette configuration soit moins protectrice, il faudrait recourir à une ligne budgétaire distincte, à linstar de ce qui sera maintenu pour Arte et TV5 Monde. Une telle protection n’empêcherait en aucun cas de mettre en place des projets communs entre les chaînes, qui se sont déjà largement développés dans le cadre actuel.

II.   TV5MONDE : le parachÈvement du plan stratÉgique de la chaÎne francophone

A.   La poursuite de la mise en œuvre du plan stratégique 2017-2020

Adopté en 2016, le plan stratégique 2017-2020 de TV5 monde repose sur deux axes principaux : la transformation numérique de la chaîne, et lAfrique, véritable priorité géostratégique pour la chaîne de la Francophonie. En 2019, les moyens alloués à la mise en œuvre du plan ont pour la deuxième année consécutive été revus à la baisse.

La dotation allouée à TV5 Monde, après avoir connu une baisse de 1,2 million deuros en 2019 par rapport à 2018, sera stable pour 2020, pour un montant de 76,2 millions deuros. Outre la mise en œuvre du plan stratégique, TV5 monde devra en 2020 mobiliser ses capacités déconomie et de redéploiements pour le développement du projet de plateforme francophone « TV5 Monde plus » porté par le Canada. Pour financer les coûts d’exploitation de cette plateforme, TV5 Monde devra prendre des mesures de réduction des dépenses concernant sa diffusion traditionnelle. Par ailleurs dautres économies seront attendues, afin de poursuivre le renouvellement du dispositif technique de production, post-production et diffusion de la chaîne à compter de 2021.

1.   L’Afrique : une priorité stratégique et un relais pour la diplomatie d’influence

Principal bassin de croissance démographique et de développement économique de la francophonie, l’Afrique constitue une priorité logique pour TV5 monde.

L’activité de TV5 Monde en Afrique passe d’abord par un développement éditorial et de diffusion. La chaîne a poursuivi ses investissements en programmes originaux africains et franco-africains, et a développé son offre jeunesse avec la chaîne TiVi5, s’assurant ainsi une progression sensible de l’audience.

L’offre numérique, lancée fin 2017 à Kigali au Rwanda, s’accompagne d’un développement des co-productions avec une série de magazines, ou encore le lancement de la version africaine des « Maternelles » (coproduction Yobo Studios, Togo), et le renouvellement du programme « Bonne santé ! » (coproduction On Est Ensemble Productions, Gabon). La chaîne participe activement au développement de l’industrie de l’animation en Afrique, via Tivi5 et le préachat jeunesse, et en partenariat avec plusieurs studios notamment en Côte d’Ivoire (Afrika Toon, Voyelles Editions, Studio 6 etc). Par ailleurs, et dans un contexte de plus en plus concurrentiel, TV5 Monde développe ses activités de coproducteur de séries télévisées, notamment en Côte d’Ivoire et au Sénégal.

Cette stratégie de co-production connaît un prolongement avec le développement des coopérations. Dans le cadre de la dynamisation du Conseil de coopération de TV5 Afrique, un budget est désormais dédié à des coopérations bilatérales avec les télévisions publiques africaines.

En tant que partenaire des chaînes nationales africaines, TV5 Monde a conclu des accords de diffusion et / ou de promotion avec des diffuseurs, pour des programmes financés en commun. TV5 Monde est aussi impliquée dans le domaine du cinéma, en tant que partenaire de l’Association des trophées francophones et en tant que membre et partenaire du Fonds pour la Jeune Création francophone, mécanisme d’aide à la création cinématographique et audiovisuelle dans les pays francophones d’Afrique subsaharienne et à Haïti.

TV5 Monde est partenaire de nombreuses manifestations culturelles dans toute lAfrique francophone, dont les Francofolies de Kinshasa et le Festival panafricain du cinéma et de la télévision (FESPACO). Surtout, TV5 Monde a été engagé dès la première heure dans le projet de Saison des cultures africaines « Africa 2020 ».

À moyen terme, des Etats d’Afrique, et selon une ambition portée par l’actuelle Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie Louise Mushikiwabo, pourraient devenir des partenaires à part entière de la chaîne.

2.   La transformation numérique : une priorité confirmée

a.   La mise en œuvre du plan stratégique

La transformation numérique de TV5 Monde est l’un des piliers du plan stratégique 2017-2020, dont la mise en œuvre s’est poursuivie en 2018.

Sur la refonte de l’offre non-linéaire, la société a poursuivi le développement de plusieurs verticales thématiques, qui doit s’achever d’ici la fin de l’année 2019 avec le lancement de la thématique Art de vivre. Les thématiques Information, Afrique et Jeunesse avaient été lancées en 2017, suivies des thématiques Langue française, Culture et Télévision en 2018. TV5 Monde a par ailleurs lancé en mars 2019 le label « TV5 Monde webcréations », qui vise à favoriser le développement de formats de programmes numériques, faisant appel à jeunes talents, et destinés à nourrir la cible des 15-35 ans.

Cette refonte de l’offre avait été précédée par une refonte des rédactions, avec la mise en place d’une organisation bi-média afin d’assurer la complémentarité entre les rédactions numérique et traditionnelle.

L’entreprise travaille également à lamélioration de laccessibilité des offres numériques, par le biais d’une refonte des sites locaux en langues étrangères, qui sont souvent le premier point de contact avec TV5 Monde pour les publics non francophones. Cet axe est complété par une valorisation des programmes sur le non-linéaire, via un effort de marketing, mais aussi via un effort technique, avec le développement de logiciels de gestion de métadonnées.

Cette stratégie porte ses fruits, puisque lannée 2019 a été marquée par des audiences numériques poursuivant la forte croissance amorcée en 2017. Les utilisateurs numériques plébiscitent les offres de TV5 Monde : le nombre de vidéos vues par exemple, qui s’élevait en 2016 à 76 millions, est en 2018 de 237 millions – le premier semestre 2019 enregistrant une progression additionnelle de 71 % par rapport à 2018.

 

b.   Le développement d’une plateforme audiovisuelle francophone mondiale

Porté en priorité par le Canada, qui assure actuellement la présidence tournante de TV5 Monde, le projet de plateforme SVOD (vidéo à la demande par abonnement) francophone, qui sera denvergure mondiale, est apparu nécessaire compte tenu de la transformation du paysage audiovisuel global. Pour préparer la mise en service de la plateforme, attendue pour le second semestre 2020, une étude de faisabilité a été réalisée en 2019, et un comité de pilotage a été mis en place, incluant des équipes de Radio-Canada, France Télévisions (France), la RTBF (Belgique), Télé Québec, TV5 Québec Canada (Canada et Québec), et la RTS (Suisse). Les radio-télédiffuseurs y sont convenus dintituler le projet « TV5 Monde Plus », et de le centrer sur une mise en valeur des programmes de leurs chaînes ainsi quune maximisation de la « découvrabilité » des programmes francophones.

La plateforme sera accessible gratuitement partout dans le monde, et proposera un catalogue ajusté localement en fonction des éventuelles restrictions de droits ou de contrats. En outre, grâce à l’authentification préalable qui sera demandée aux utilisateurs, il sera possible pour la première fois de constituer une base de données dabonnés francophones et francophiles.

En termes de financement, le projet sera porté exclusivement par le Canada, qui a dégagé une enveloppe de 14,6 millions de dollars canadiens soit environ 9,5 millions d’euros sur cinq ans. Le budget alloué à la plateforme sera intégré au budget de la chaîne dès 2020, et si les autres pays partenaires, dont la France, nont pas souhaité labonder à ce stade, cette possibilité restera ouverte. Toutefois, les moyens affectés à la plateforme, qui sera intégrée au plan stratégique 2021-2024, comporteront aussi un apport en industrie de TV5 Monde, qui reposera sur la mobilisation des antennes, des offres numériques et de l’ensemble des partenariats culturels, évènementiels et institutionnels afin de faire la promotion de la plateforme, et ce à hauteur de plus de 5 millions d’euros par an. Une vingtaine de personnes seront mobilisées sur le projet, ainsi que quatre personnes recrutées spécifiquement à temps plein. Un apport en financement supplémentaire par redéploiement, notamment afin d’assurer l’exploitation de la plateforme, est également prévu, à hauteur de 2 millions d’euros par an.

3.   Des résultats d’audience qui restent satisfaisants

Du fait de sa très large diffusion (plus de 200 pays et territoires), TV5 monde ne peut mesurer ses audiences partout où elle est distribuée. L’évaluation est donc concentrée sur 24 pays recouvrant 39 % des foyers en mesure de recevoir la chaîne, en tenant compte des pays prioritaires pour la francophonie, et sur des périodes triennales.

Selon les dernières estimations, laudience hebdomadaire « globale » de la chaîne sélevait en 2018 à 42,1 millions de personnes, en progression par rapport à 2017 (41,9 millions de personnes). La réalisation depuis 2018 d’une nouvelle étude évaluant les résultats de la chaîne jeunesse TiVi5, auprès des moins de 15 dans 4 pays d’Afrique francophone (Sénégal, Côte d’Ivoire, RDC et Cameroun) a permis d’ajouter une audience hebdomadaire cumulée de 15,7 millions de personnes, pour un total de 57,82 millions de téléspectateurs hebdomadaires.

Au plan géographique, les résultats sont dans l’ensemble très encourageants ([8]).

En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la chaîne a enregistré une hausse de 430 000 téléspectateurs par semaine soit 11 % de plus par rapport à 2017. TV5 Monde reste la chaîne francophone qui rassemble le plus large public auprès des 15 ans et plus et des cadres et dirigeants au Maghreb.

En Afrique subsaharienne, la chaîne jeunesse TiVi5 est devenue, un peu plus de deux ans après son lancement, la deuxième chaîne dans sa catégorie en termes d’audience hebdomadaire auprès des moins de 15 ans.

En Asie, l’audience de TV5 monde a connu une hausse non négligeable de 23 %, qui s’explique en premier lieu par le dynamisme du marché indien. Sous-titrée en anglais, TV5 Monde se positionne même devant la BBC World News en part d’audience, grâce à des durées d’écoute plus élevées.

Si on observe une légère baisse de l’audience en Afrique francophone, passant de 29,9 à 29,1 millions de téléspectateurs entre 2017 et 2018, ces données ne rendent pas compte du basculement d’audiences partiel entre TV5 Monde et TiVi5, et peuvent s’expliquer plus ponctuellement par le passage à la TNT à Kinshasa, que certains téléspectateurs n’ont pas pu suivre à ce stade.

En Europe, il faut relever la perte de 2 millions de foyers aux Pays-Bas suite à la sortie du réseau KPN, et le risque d’une diminution de l’audience enregistrée en France et en Belgique en raison du développement de la consommation de contenus délinéarisés ou en streaming.

Sur le numérique, laudience de TV5 Monde connaît une progression depuis plusieurs années.

La fréquentation des sites a progressé de 8 % au 1er semestre 2019, ce qui représente une hausse de 13 % et de 26 % par rapport aux mêmes périodes en 2017 et 2016. Surtout, les outils créés récemment dans le but daméliorer la visibilité de la chaîne sur internet enregistrent des progressions plus importantes encore. C’est le cas de l’offre Afrique, lancée en octobre 2017 et qui connaît une progression de 40 % de ses visites au 1er semestre 2019, et de l’offre Langue française lancée en décembre 2018 et enregistrant plus d’un million de visites mensuelles. Enfin, la consommation de vidéos, tous environnements numériques confondus, a connu une progression significative entre 2016 et 2018, de 76 à 237 millions de vue, et la dynamique s’est confirmée au premier semestre 2019.

Comme l’année dernière, la hausse daudience numérique la plus importante a été constatée sur les réseaux sociaux. TV5 Monde cumule sur Facebook plus de 9,7 millions d’abonnés, en hausse de 8 % par rapport à 2018, et se maintient ainsi au quatrième rang des chaînes francophones généralistes et d’information, derrière France 24, TF1 et Canal +. La chaîne compte désormais 9 chaînes dédiées sur Youtube, lui permettant d’enregistrer plus de 6 millions de vidéos vues chaque mois au premier semestre 2019. La part d’audience réalisée en Afrique est passée de 19 % en septembre 2017, juste avant le lancement de l’offre numérique Afrique, à 35 % au premier semestre 2019, en progression constante. Sur Twitter, l’ensemble des comptes de la chaîne rassemble plus de 1,3 million d’abonnés et en moyenne 620 000 vidéos vues chaque mois, soit plus d’1,5 fois plus qu’au premier semestre 2018. Sur Instagram enfin, avec plus de 220 000 abonnés, en hausse de 30 % entre juillet 2018 et juillet 2019, les deux axes stratégiques identifiés sont maintenus, à savoir la promotion des formats vidéo dédiés au web, et la mise en avant des actions régulières et évènementielles de l’antenne.

B.   une situation financière qui reste contrainte

1.   Un effort de maîtrise des dépenses qui s’est poursuivi en 2019

Entre le réalisé 2016 et la projection 2019, le total des dépenses a diminué de 1,4 %, soit de 1,58 million deuros, confirmant une tendance déjà entamée les années précédentes (à titre indicatif, le total des dépenses a diminué de 4,6 % entre 2012 et 2019).

Le coût des grilles de TV5 Monde représente environ 70 % du budget de la société et regroupe les dépenses de programmes et les coûts techniques de fabrication pour les chaînes linéaires et le numérique (hormis coûts de cyber sécurité). Il connaît une diminution de 0,82 M€ entre 2016 et 2019 (-1 %), portée par l’enveloppe des frais spécifiques affectée aux programmes français et par les dépenses techniques.

Les coûts de diffusion, de distribution et de promotion des antennes régionalisées représentent le second poste de dépenses de la société, en recul de 0,68 M€ entre 2016 et la prévision 2019 (-2,9 %), où ils ne représentent plus que 20,1 % des dépenses. Les coûts de transports et de diffusion des signaux ont diminué de 0,83 M€ sur la période, au prix du renoncement à différentes capacités satellitaires de la société (Turquie, Espagne, Royaume-Uni/Irlande).

Les coûts généraux propres à TV5 Monde et dépenses des fonctions supports représentent actuellement 6 % des dépenses totales. Ils ont augmenté de 0,57 M€ entre 2016 et la projection 2019 pour atteindre 6,59 M€. Ils sont impactés chaque année par les indexations des contrats et les glissements des charges de personnel dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire (NAO). La progression la plus importante est liée aux prestations externes mobilisées dans le cadre de la modernisation des outils de gestion des ressources humaines.

Enfin, TV5 Monde doit toujours assumer des coûts liés à la cyberattaque subie le 8 avril 2015, afin de reconstruire le système d’information et de mettre en place une supervision renforcée de la sécurité informatique et un renforcement de ses processus métiers. Après des coûts d’un niveau exceptionnel en 2015 (4,4 M€) et en 2016 (3,1 M€), les coûts pérennes se sont stabilisés autour de 2,5 à 2,7 M€ par an.

Concernant les dépenses de personnel, la masse salariale, après avoir augmenté de 2,16 % en 2018, devrait augmenter de 1,69 % en 2019, ce qui représente un taux anormalement bas. Il résulte d’un nombre important de postes à combler, ainsi que des efforts de l’entreprise pour maîtriser sa masse salariale et ses effectifs. La masse salariale prévisionnelle tient aussi compte de premières embauches, dès la fin 2019, pour le projet de plateforme numérique francophone, ainsi que de l’intégration à temps plein de onze nouveaux pigistes à compter de novembre 2019, dans le cadre du plan de réduction de la précarité.

Ainsi entre 2016 et la projection 2019, la masse salariale, hors éléments exceptionnels, aura évolué de 6,5 %, incluant les évolutions annuelles prévues dans le cadre de la NAO, tandis que le total des dépenses de TV5 aura régressé de 1,2 %.

Évolution des dépenses de la chaÎne depuis 2016

Source : ministère de la Culture

2.   Des ressources propres limitées

Pour 2019, la composition des ressources propres de TV5 monde devrait légèrement évoluer au profit des recettes publicitaires, à hauteur de 27 %, pour 73 % de recettes de distribution, là où la répartition était traditionnellement de 25-75. Cette tendance devrait s’accentuer en 2020 compte tenu de l’impact des mesures d’économies prévues sur les recettes de distribution notamment en Europe et au Brésil, et des dévaluations des devises en Amérique latine.

La publicité et le parrainage sur TV5 Monde font l’objet d’un contrat de régie avec France Télévisions Publicité (FTP). Ce contrat de régie a été remis en concurrence en juin 2018 par la publication d’un appel d’offres portant sur les années 2019 à 2021. TV5 Monde a retenu la proposition de FTP, qui s’est associée à Canal+ Advertising pour la commercialisation de TV5 Monde Afrique.

Le chiffre daffaires net (commission de régie déduite) perçu par TV5 Monde au titre de ses recettes de publicité et parrainage a augmenté de 90 000 euros entre 2016 et 2018 (+3 %). Compte tenu de la nécessaire période d’adaptation de la régie Canal+ Advertising pour la commercialisation de TV5 Monde en Afrique, les recettes publicitaires devraient diminuer en 2019 (2,6 M€ contre un objectif initial de 2,8 M€), avant une reprise à la hausse en 2020.

Les recettes de distribution de TV5 Monde connaissent une diminution de 0,60 M€ entre 2016 et 2018, baisse principalement liée aux deux territoires générant le plus de revenus, les États-Unis et les Pays-Bas. S’agissant des États-Unis, la baisse est principalement imputable à la concurrence d’offres pirates. S’agissant des Pays-Bas, TV5 Monde a été retirée de l’offre commercialisée par KPN, deuxième opérateur local de télévision payante à compter du 1er juillet 2018, au profit de France 2 (-0,42 M€ en année pleine).

En dépit de ces diminutions, le niveau global des recettes de distribution est attendu en légère augmentation en 2019, grâce à de bons résultats enregistrés dans d’autres territoires. En revanche, les mesures déconomies concernant la diffusion et la distribution, initiées fin 2018 et qui seront amplifiées en 2020 notamment en Europe et au Brésil, impacteront nécessairement à la baisse le niveau des recettes de distribution. Cette baisse risque également d’être accentuée par les dévaluations des devises dans lesquelles sont facturées les recettes d’abonnement, notamment en Amérique latine.

3.   Un impact attendu sur les projets et les effectifs de la chaîne

Les perspectives financières vont conduire TV5 monde, pour la première fois dans son histoire, à présenter des indicateurs en baisse :

-         Abandon de la diffusion câble/satellite au Brésil, après le Royaume-Uni et l’Irlande cette année ;

-         Perte attendue en 2020 de plus de 30 millions de foyers, essentiellement en Europe et à hauteur de 2 millions au Brésil.

À horizon 2020, le nombre de foyers touchés devrait donc passer de 364 millions à 320 voire 310 millions. Par ailleurs dans le contexte du Brexit, le choix contraint de renoncer à la diffusion câble/satellite au Royaume-Uni semble particulièrement regrettable.

Comme l’année dernière, plusieurs pans du plan stratégique ont dû être mis de côté faute de moyens :

-         Augmentation du nombre de langues et de sous-titrages (abandon de l’expansion au swahili et au lingala, au turc, ou encore du projet de sous-titrage automatique en français et en anglais des diffusions en direct et du sport) ;

-         Poursuite du développement du passage en HD sur le continent américain hors États-Unis et Canada.

Enfin, et là encore pour la première fois dans lhistoire de la chaîne, un plan social va devoir être adopté. Sur les 412 ETP dont dispose la chaîne à ce jour, le plan devrait porter sur une trentaine de personnes, essentiellement à la rédaction.

III.   La coopération audiovisuelle : une dynamique à confirmer et des reflexions à mener

A.   Une coopération européenne à valoriser

Dans un contexte de concurrence accrue pour notre audiovisuel extérieur, nos concurrents peuvent aussi être nos partenaires, tout particulièrement en Europe. Si la coopération future avec le Royaume-Uni et la BBC reste à redéfinir dans le cadre du Brexit, l’Allemagne et la Deutsche Welle apparaissent comme des partenaires clef en Europe. Là où certains médias étrangers n’hésitent pas à se placer à rebours des valeurs européennes, les médias d’Europe occidentale font face à des défis communs (désinformation, émergence d’acteurs étatiques ou non étatiques disruptifs), qui appellent à continuer à travailler ensemble.

1.   Maintenir une perspective de coopération avec la BBC

Le Royaume-Uni, où votre rapporteur s’est rendu l’année dernière, peut constituer un allié dans le domaine audiovisuel, bien que le futur de notre coopération reste à définir en post Brexit.

Le BBC collabore régulièrement avec RFI, notamment en Afrique. Par exemple, la BBC a pu, en utilisant les ondes de RFI, diffuser du contenu en Haïti après le tremblement de terre de 2010, au profit d’un programme humanitaire. La chaîne britannique tend toutefois à considérer France 24 comme un concurrent, ce qui rend les partenariats moins naturels, pour autant, le fait que France 24 mette davantage l’accent que la BCC sur la diffusion de la culture crée des perspectives en matière de complémentarité.

2.   Développer et consolider le partenariat franco-allemand

À lheure où le sentiment et les valeurs européennes sont fréquemment remis en cause, y compris au sein de lUnion européenne, la Deutsche Welle apparaît comme un partenaire central pour notre audiovisuel extérieur, tout particulièrement pour France Médias Monde.

Cette coopération est d’autant plus importante à préserver et à développer que la lutte contre la désinformation en constitue lun des axes majeurs.

FMM et la DW, qui touchent ensemble plus de 320 millions de contacts hebdomadaires, ont initié en 2016 une démarche de coopération autour de plusieurs projets communs :

-         InfoMigrants, un site mobile d’information à destination des populations migrantes, lancé en 2017 par DW et FMM avec l’ANSA (agence de presse italienne), et désormais disponible en cinq langues (français, anglais, arabe, dari et pachtoune). En 2018, le site a atteint plus de cinq millions d’utilisateurs mensuels tous environnements numériques confondus ;

-         Participation de France 24 à la chaîne numérique en langue turque, 90+, lancée sur YouTube en avril 2019 par la Deutsche Welle. France 24 met à disposition des programmes concernant la Turquie et conçus initialement pour les antennes de France 24, sous-titrés et/doublés ensuite par la DW ;

-         Mise en place de projets communs dans le cadre des élections européennes, pour sensibiliser à la couverture du scrutin : coproduction d’une série numérique de 28 portraits et témoignages de jeunes primo-votants dans les différents pays de l’Union Européenne, réalisation de débats communs en France et en Allemagne… 

 

Le projet ENTER

 

France Médias Monde et la Deutsche Welle travaillent actuellement à l’élaboration du projet ENTER, qui a pour but de lutter contre la montée en puissances des populismes et des fausses informations, et de contribuer à renforcer le sentiment européen. Offre numérique plurilingue qui sera essentiellement destinée à une consommation sur dispositifs mobiles, ENTER visera en priorité les 15-34 ans.

Ce projet est toutefois conditionné à lobtention de financements européens. Or, l’octroi des financements risque de se heurter à la concurrence potentielle d’Euronews. Si la France tend à soutenir Euronews dans la mesure où son siège est implanté à Lyon, votre rapporteur souhaite attirer l’attention sur le fait que la chaîne n’est plus aujourd’hui européenne qu’à hauteur du tiers de ses financements, elle est en effet détenue majoritairement par des actionnaires extra-européens (États-Unis et Égypte). Surtout, dans un contexte budgétaire contraint, le levier européen doit être mis à profit et votre rapporteur appelle à une vigilance soutenue de la France dans les plaidoyers à venir au niveau européen.

Enfin, ce projet est complémentaire dun autre projet qui sera porté par Arte, avec une dimension culturelle.

 

Le projet ENTER est l’un des deux piliers du projet annoncé dans le Traité dAix-la-Chapelle de « plateforme numérique destinée en particulier aux jeunes » (chapitre 3, article 9), la liste des quinze projets prioritaires associés au Traité mentionnant la « création dune plateforme numérique franco-allemande de contenus audiovisuels et dinformation ».

Le second pilier, complémentaire et porté par Arte, propose des œuvres audiovisuelles à forte valeur culturelle : depuis 2015, Arte a développé une offre numérique de programmes sous-titrée en six langues (allemand, français, anglais, espagnol, polonais et italien) avec le soutien financier du programme MEDIA de l’Union européenne. Arte entend enrichir ce socle et l’étendre, notamment à travers l’exposition de programmes de ses diffuseurs sociétaires (ARD, ZDF et France Télévisions), cette coopération ayant vocation à s’étendre à terme à d’autres diffuseurs publics européens dont les neuf chaînes européennes partenaires de la chaîne.

Par ailleurs, votre rapporteur se félicite de voir que la lutte contre les fausses informations et les « vidéos trafiquées », ainsi que la juste représentation des femmes dans les médias, ont été retenues comme thématiques de travail en décembre 2018, à loccasion de la dernière réunion annuelle du groupement des audiovisuels internationaux de service public (ex DG7), dont FMM est membre aux côtés de la BCC, de la Deutsche Welle et de trois autres opérateurs (NHK (Japon), Australian Broadcasting Corporation et United States Agency for Global Media).

B.   Une réflexion à mener sur l’articulation entre audiovisuel extérieur et aide publique au développement

1.   Le rôle de Canal France International

Opérateur du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères en charge de la coopération avec les pays en développement dans le domaine des médias, Canal France International (CFI) est devenu en juin 2017 une filiale de FMM, qui a acquis 100 % de son capital ([9]).

L’adossement de CFI à FMM visait à permettre à CFI d’être davantage en mesure de mobiliser l’expertise française publique et privée dans le domaine des médias et au profit des pays en développement, tout en préservant sa singularité. En 2019, cet adossement s’est poursuivi et consolidé, avec la mise en place de nouvelles synergies :

-         Participation à des projets communs dont le projet de soutien aux médias dans le Sahel (MédiaSahel), financé par l’Agence française de développement ;

-         Valorisation sur les antennes de FMM de projets de développement conduits par CFI ;

-         Apport du savoir-faire de FMM en matière de sécurité, via la direction de la Sûreté de FMM ;

-         Mutualisation de certaines prestations (back-office, gestion comptable, recherche de fonds etc) grâce à l’installation des équipes de CFI dans les locaux de FMM.

Un premier contrat d’objectifs et de moyens a été adopté pour la période 2018-2020. Son premier objectif est de réaffirmer linscription de la mission de CFI dans le cadre de la politique daide publique au développement, notamment pour renforcer le rôle des médias en tant que ciment social et acteurs de développement économique, démocratique et éducatif dans les pays partenaires. Le second objectif vise à renforcer linfluence de la France à linternational dans le domaine des médias en faisant de CFI un pôle dexpertise de référence au sein de FMM. Le troisième objectif porte sur laccroissement des financements de CFI en optimisant son impact et son efficacité.

Chaque projet de CFI doit s’insérer dans au moins l’un des trois axes programmatiques suivants :

-         Médias et Développement : ce programme regroupe les projets qui favorisent la compréhension et l’appropriation des enjeux de développement par les médias des pays du Sud, leurs équipes et leurs auditoires. Ceux-ci sont en effet des leviers de transformation et de changement des perceptions, des représentations collectives et des comportements. Ce programme cherche en particulier à développer la diffusion, par les médias locaux, de contenus sur les enjeux du développement durable, avec pour objectif final de toucher le plus grand nombre.

-         Médias et Gouvernance : ce programme favorise le renforcement des capacités des médias au sens large dans le domaine de la gouvernance. Il rassemble les projets concernant l’État de droit, le soutien aux instances de régulation, le soutien au contrôle des politiques publiques par les médias, le renforcement de la redevabilité des institutions et la montée en puissance de la CivicTech (ensemble des outils qui permettent d’améliorer le système politique, dont les médias en ligne), ainsi que le renforcement des capacités des médias dans les domaines de l’éthique journalistique, du « fact checking » et de la transparence des bénéficiaires effectifs (propriétaires des groupes médiatiques). Autant que faire se peut, et selon les contraintes de sécurité éventuelles, CFI s’efforce d’accompagner la transparence, la neutralité et la pluralité des médias en période électorale.

-         Médias et Entreprise : ce programme réunit les projets portant sur les enjeux économiques des médias en tant qu’entreprises. L’analyse des conditions de concurrence, l’optimisation des grilles de programmation, la stabilisation des recettes sont des variables importantes. Il s’agit donc d’asseoir les modèles d’activité et d’assurer une autonomie financière indispensable à l’indépendance éditoriale et au pluralisme. Le renforcement de la compétence technique et professionnelle des médias partenaires, gage de leur crédibilité, de leur audience et de leur pérennité, est un autre volet de cet axe thématique. Enfin, ce programme favorise l’identification et la formation de jeunes talents dans le domaine des industries culturelles, afin de soutenir la structuration du marché de l’audiovisuel dans les pays cibles. La mise en relation des médias partenaires avec les opérateurs français est favorisée autant que possible.

Parmi les projets emblématiques mis en œuvre par CFI en 2018, on peut citer :

-         Le projet D-Jil, qui consiste à accompagner des jeunes citoyens de neuf pays du monde arabe pour créer et produire des contenus numériques destinés aux nouvelles générations ;

-         Le projet Tasalah, qui consiste à fournir un soutien aux médias dans leur rôle de promotion de la cohésion sociale en Irak, et à y renforcer le rôle du journalisme comme élément pivot d’une meilleure gouvernance démocratique. Mené en partenariat avec l’ONG allemande MiCT, le projet s’est étalé sur une période allant de novembre 2017 à avril 2019, autour d’ateliers de formations pour formateurs et pour journalistes, d’un monitoring sur la couverture des élections, ou encore d’ateliers d’accompagnement de journalistes pour réduire l’autocensure et produire des reportages et des contenus médiatiques.

2.   Des synergies à développer

Si l’action de CFI, qui vise à favoriser de véritables transferts de compétences pour faciliter l’appropriation et l’autonomisation des procédures et des techniques par les bénéficiaires de ses projets, s’inscrit pleinement dans la logique de notre aide publique au développement, il convient de développer davantage le lien entre audiovisuel extérieur et aide publique au développement.

Ainsi une évaluation de l’action de CFI sur 2015-2019 est actuellement en cours, dans le but non seulement de rendre compte des actions menées, mais aussi et surtout de formuler des recommandations pour l’élaboration du prochain COM (2021-2024), afin de renforcer la cohérence et ladaptation de lopérateur aux enjeux et priorités stratégiques de laide publique au développement.

Dans ce contexte et en amont du débat parlementaire sur le projet de loi de réforme de l’audiovisuel public, votre rapporteur ne peut que renouveler son constat sur la nécessité de mener une véritable réflexion sur la contribution de notre audiovisuel public à la politique de développement, et dopérer une montée en puissance dans ce domaine.

Il s’agit, d’une part, de préserver les moyens alloués à CFI, qui demeurent très modestes et bénéficient d’un effet de levier très important pour notre diplomatie d’influence et notre aide publique au développement. La subvention allouée par le MEAE à CFI, retracée dans le programme budgétaire 209, est restée stable en 2019 par rapport à 2018, avec une enveloppe de 7 226 500 euros net de réserve, auquel il faut ajouter le financement exceptionnel accordé à CFI dans le cadre du programme « Médialab francophone » qui s’établissait à 563 500 euros. En 2020, le montant de la subvention restera stable à hauteur de 8 200 000 euros, avec réserve. Le projet de loi de finances pour 2020 devrait par ailleurs prévoir l’octroi à CFI du reliquat correspondant à la deuxième tranche du financement du projet « Médialab francophone » d’un montant de 164 000 €.

Le projet « Vérifox »

En lien avec France Médias Monde qui dispose d’une expertise unique en la matière, CFI a développé un projet de formation à la lutte contre les Infoxs dans plusieurs pays d’Afrique francophone (Côte d’Ivoire, Bénin, Burkina Faso) en prévision d’élections présidentielles.

Ce projet, doté d’un budget de près de 500 000 euros, devrait être complété, en réponse à une priorité présidentielle, d’une dotation supplémentaire qui pourrait aller jusqu’à 1,5 million d’euros sur trois ans, afin de pleinement prendre en compte les risques liés à la désinformation en Afrique subsaharienne, où les fausses informations peuvent aviver tensions et conflits.

Pour votre rapporteur, ce projet, qui sera financé sur le programme 209 « solidarité à l’égard des pays en développement », atteste pleinement du rôle géostratégique de notre audiovisuel extérieur et de la dynamique très positive qui émane de ses liens avec l’APD.

Source : MEAE et CFI

D’autre part, il sagit de mener une véritable réflexion sur les liens entre laudiovisuel extérieur et laide publique au développement. Pour rappel, BBC World est fléché parmi les programmes et actions éligibles à l’aide au développement, et la Deutsche Welle bénéficie de financements via l’agence de développement allemande à hauteur de 30 millions d’euros, selon une dynamique budgétaire croissante. Au-delà du rôle de CFI, les liens sont déjà forts. Ainsi les priorités stratégiques de FMM – ainsi que de TV5 Monde – recoupent en partie les priorités de notre aide publique au développement, notamment du fait de l’attention particulière apportée à l’Afrique ([10]). Dans le cas du Proche et du Moyen-Orient, l’audiovisuel extérieur peut être pleinement mobilisé dans les zones de crise et dans les zones en reconstruction telles que l’Irak (voir supra).

 Dans un premier temps et à défaut d’un recours direct à l’aide publique au développement, votre rapporteur plaide en faveur dune mobilisation accrue de lAFD sur des projets communs, à linstar de MediaSahel. Ce projet, qui vise à lancer une rédaction en peul et à renforcer le haoussa et le mandingue, a été lancé il y a plus d’un. Tout en cherchant à développer de nouvelles activités, il s’est appuyé en partie sur l’utilisation de canaux de distribution et de rédactions existantes.

C.   Des priorités transversales : le maintien du réseau d’attachés audiovisuels et la francophonie

1.   Préserver la couverture et la qualité de notre réseau d’attachés audiovisuels

Il est illusoire de penser quune stratégie dinfluence auprès des médias locaux, doffre dexpertise ou de formation, ou encore de présence de nos groupes privés et publics peut se faire depuis Paris. La Tunisie, où votre rapporteur s’est rendu en 2017, offre un exemple de coopération menée sur le long terme, au plus près des besoins et avec une large palette d’actions par l’attaché audiovisuel : soutien de l’État de droit, soutien de la société civile via une éducation aux médias, promotion des contrats français dans le domaine audiovisuel, promotion de notre système de régulation audiovisuelle, renforcement de la place du français dans les médias tunisiens, développement des liens avec la jeunesse.

 En outre, si le réseau des attachés audiovisuels sera maintenu lannée prochaine à son niveau actuel, soit 32 attachés pour 92 pays, l’essentiel d’entre eux disposant d’un portefeuille régional, votre rapporteur appelle à maintenir une attention particulière sur le type de contrat mobilisé. À l’heure où l’on constate un développement des contrats de recrutés locaux pour ce poste, tant le poids des contraintes associées à ce type ce contrat pour une couverture régionale, que l’importance stratégique des postes diplomatiques où l’attaché audiovisuel est national (Royaume-Uni, Allemagne etc), plaident en faveur d’un maintien dans la mesure du possible de contrats d’expatriés, plus valorisants.

2.   L’audiovisuel extérieur : un atout précieux pour la promotion de la francophonie

La mobilisation des opérateurs de l’audiovisuel extérieur dans la mise en œuvre du plan pour la langue française et le plurilinguisme est venue le rappeler : l’audiovisuel extérieur est un superbe outil de promotion de la francophonie et au-delà, ou en amont, de la francophilie.

Pour TV5 Monde, la promotion de la francophonie passe aussi par des partenariats. C’est le cas dans le cadre de sa mission d’apprentissage du français, avec par exemple une :

-         Participation à la création de nouvelles ressources pédagogiques numériques ou la participation aux séminaires régionaux LabelFrancEducation, à des politiques du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ;

-         Consolidation de partenariats avec des éditeurs de français langue étrangère (Hachette FLE en France, Santillana en Espagne, Samir Éditions au Liban) afin de créer des ressources pédagogiques pour de jeunes publics, enfants et adolescents ;

-         Contribution à la politique publique d’accueil et d’accompagnement des personnes étrangères arrivant en France, en concevant un dispositif pédagogique destiné aux adultes migrants primo-arrivants.

De façon générale, la chaîne a renouvelé ou mis en place en 2019 de nombreux partenariats : Campus France, France Éducation International (ex CIEP), Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGFLF), Mission Laïque Française, Collège de France.

Enfin, on peut mentionner des initiatives ponctuelles comme l’émission « La Piste de la Francophonie », proposée le 26 septembre 2019, en collaboration avec les chaînes partenaires, l’OIF ainsi que les télévisions de 17 pays et Radio France internationale (RFI), et à l’occasion de laquelle les téléspectateurs ont pu visiter dix-huit grandes métropoles francophones du monde grâce à un programme de vingt heures en direct.

Dans le cas de France Médias Monde, un accord avec le ministère de la Culture a été conclu dès 2018 pour participer à la promotion de la langue française (partenariats autour de la semaine de la langue française et de la francophonie, soutien aux jeunes talents francophones des médias, collaborations éditoriales).

Enfin, CFI est également pleinement mobilisé. On le voit à la mise en œuvre en 2018 de nouveaux projets en particulier au Maghreb, au Liban, en Haïti, et au Togo. Pour accompagner la mise en œuvre de ces projets, CFI a doublé le nombre de formations de journalistes de médias francophones et a fait la promotion d’un modèle d’information libre et indépendante. Le projet Medialab francophone doit être lancé pour favoriser l’émergence d’une nouvelle offre de contenus journalistiques francophones dans le monde arabe et dans certains pays africains. Il visera notamment à développer les échanges entre étudiants et enseignants des écoles de journalismes du monde arabe et françaises.

 

 

 

 

 

 

 

IV.   L’audiovisuel extérieur : un outil prÉcieux de notre diplomatie d’influence dans un contexte de guerre de l’information

A.   Opposer à la désinformation une information indépendante et de qualité

1.   La désinformation est devenue le vecteur d’une véritable « guerre froide de l’information »

Si notre audiovisuel extérieur doit faire face à une concurrence internationale accrue entre médias, il doit aussi composer avec ce qui sapparente à une véritable « guerre froide de linformation », qui n’exclut ni les manipulations de l’information ni la diffusion de fausses nouvelles, et qui peut bénéficier à la diffusion de modes de pensées radicaux ou sectaires.

La diffusion de fausses informations et son utilisation à des fins politiques n’ont rien d’un phénomène inédit. M. Patrick Eveno, spécialiste de l’histoire des médias et président de l’Observatoire de la déontologie de l’information, a ainsi évoqué en audition le cas de la dépêche d’Ems, et d’autres exemples antérieurs pourraient être mentionnés ([11]). Toutefois, cette pratique a pris, du fait des moyens de diffusion numérique, une ampleur radicalement nouvelle.

L’élection présidentielle américaine et le référendum relatif au « Brexit » en 2016, ou encore le référendum relatif à l’indépendance de la Catalogne et l’élection présidentielle française en 2017 l’ont souligné : les élections sont devenues la cible de campagnes de désinformation, le plus souvent menées au profit dopinions et de visées anti-démocratiques. La candidate du parti démocrate Hillary Clinton a ainsi fait l’objet de fausses allégations diffusées de manière virale, sous la forme de photographies ou de textes prétendant révéler son état de santé, tandis que la campagne précédent le référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne a été marquée par la diffusion de fausses informations portant notamment sur la contribution financière britannique au budget de l’Union européenne.

Or face à la dissémination de fausses informations et aux risques croissants dingérences étrangères via les médias dinformation, laudiovisuel extérieur français constitue un véritable contrepoids à même de proposer, notamment aux jeunes générations, des contenus audiovisuels opposés aux discours radicaux et extrémistes.

Si l’audiovisuel extérieur français peut être décrit comme la « voix de la France », c’est bien au sens de la promotion de valeurs comme le pluralisme, la démocratie et la liberté d’expression, qu’il faut entendre ce terme, loin de toute diffusion d’un discours « officiel » français.

2.   L’audiovisuel extérieur et la coopération audiovisuelle doivent être pleinement mobilisés dans la lutte contre la désinformation

a.   Une série d’outils a été adoptée pour lutter contre la désinformation

Face à l’ampleur nouvelle prise par la désinformation, plusieurs outils ont été mis en place au plan national et au niveau de lUnion européenne.

La Commission européenne s’est saisie du sujet notamment via une communication d’avril 2018 intitulée « Lutter contre la désinformation en ligne : une approche européenne », qui a débouché sur ladoption dun code de bonnes pratiques à destination des plateformes. Ce code vise à contrôler les placements de publicité, afin d’entraîner une réduction des recettes des vecteurs de désinformation. Il invite les plateformes à garantir la transparence de leurs contenus sponsorisés, et les inciter à renforcer le repérage et la fermeture de comptes automatisés ou destins à diffuser de fausses informations. En outre, la Commission européenne a mis en place une revue mensuelle évaluant la bonne coopération des plateformes.

En septembre 2018, la Commission a présenté un paquet de mesures pour « garantir des élections européennes libres et équitables », promouvant un environnement en ligne plus transparent et prévoyant la mise en place d’un Réseau européen de coopération électorale, ainsi que des sanctions financières pour les partis politiques européens qui ne respecteraient pas les règles en matière de protection des données dans le but d’influencer le résultat des élections européennes.

La Commission et le Service européen d’action extérieure ont également présenté en décembre 2018 un plan daction européen de lutte contre la désinformation, qui a notamment conduit à la mise en place dun système dalerte rapide, réunissant un réseau de points de contact au sein des capitales et s’articulant autour de quatre fonctions principales : alerte, partage et analyse, échange de bonnes pratiques, suivi et proposition d’actions.

En France, la loi n° 2018-1202 du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de linformation a mis en place plusieurs dispositifs, pour lessentiel valables en période pré-électorale et électorale :

-         Définition des « fausses informations » à l’article 1 comme des « allégations ou imputations inexactes ou trompeuses dun fait de nature à altérer la sincérité du scrutin » ;

-         Insertion d’un article L. 163-1 dans le code électoral créant, en période pré-électorale et électorale ([12]) et uniquement pour les scrutins nationaux, de nouvelles obligations de transparence pour les plateformes en ligne ([13]) « dont lactivité dépasse un seuil déterminé de nombre de connexions sur le territoire français », dont l’obligation de donner à l’utilisateur « une information loyale, claire et transparente » sur l’identité et la qualité de la personne physique ou morale « qui verse à la plateforme des rémunérations en contrepartie de la promotion de contenus dinformation se rattachant à un débat dintérêt général » ;

-         Insertion d’un article L. 163-2 dans le code électoral créant un référé permettant au juge civil, sous 48 heures, de prononcer des mesures visant à faire cesser la diffusion de fausses informations par des tiers tels que les hébergeurs, plateformes et fournisseurs d’accès à internet, et ce uniquement en période pré-électorale ou électorale ;

-         Modification de l’article 33-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication afin de définir les critères en vertu desquels le CSA peut rejeter une demande de convention avec un service de radio ou de télévision. Lorsque la convention est sollicitée par une personne morale contrôlée « par un État étranger ou placée sous linfluence de cet État », le CSA peut « tenir compte des contenus que le demandeur, ses filiales, la personne morale qui le contrôle ou les filiales de celle-ci éditent sur dautres services de communication au public par voie électronique » ;

-         Modification de l’article 33-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication afin de permettre au Conseil supérieur de l’audiovisuel, en période électorale ou électorale et pour les scrutins nationaux, de suspendre temporairement la diffusion d’une chaîne conventionnée contrôlée par ou sous influence d’un État étranger, en cas de diffusion, « de façon délibérée, de fausses informations de nature à altérer la sincérité du scrutin ».

Pour autant, ces outils ne sauraient constituer une réponse unique ni définitive aux problèmes liés à la désinformation. D’une part, ces dispositifs visent quasi exclusivement les scrutins et les périodes électorales. D’autre part, la définition des fausses informations proposée par la loi de décembre 2018 ne permet pas dintégrer toutes les manipulations de linformation, à commencer par les faits qui auraient été déformés.

En pratique, une seule saisine du Tribunal de grande instance de Paris a été enregistrée à loccasion des élections européennes, et le CSA na suspendu aucune convention. S’il est encore tôt pour dresser un bilan, on peut émettre des réserves sur la capacité dun dispositif législatif à enrayer les fausses informations. Comme l’a souligné en audition Patrick Eveno, le dispositif anti-diffamation mis en place par l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse n’a été utilisé que deux fois depuis son entrée en vigueur.

Cest dans ce contexte que limportance de notre audiovisuel public et tout particulièrement de notre audiovisuel extérieur doit être appréciée. La lutte contre la désinformation doit en effet passer par la production et la diffusion d’une information de qualité, conforme aux standards déontologiques du journalisme, et par des actions de pédagogie que les acteurs de notre audiovisuel extérieur sont à même de concevoir et de promouvoir. Elle ne saurait se limiter à des dispositifs situés en aval de la diffusion de l’information, et répondant à une approche répressive.

b.   L’audiovisuel extérieur s’est pleinement mobilisé contre la désinformation

Tout d’abord, plusieurs programmes réguliers dédiés à la lutte contre les fausses informations ont été créés, et ce dès 2014 :

-         « Info ou Intox » sur France 24, qui présente chaque semaine en images un exemple de fausse information, explique en quoi il s’agit d’une fausse information, comment elle s’est répandue, et comment la repérer et la déconstruire ;

-         « Les dessous de lInfox » sur RFI, programme devenu un rendez-vous hebdomadaire dédié à la lutte contre les fausses informations, et cherchant à révéler les ressorts des tentatives de manipulation de l’information européenne et internationale ;

-         « À vrai dire », module de vérification des faits accessible sur le site internet de TV5 Monde, et mis en ligne sur la plateforme « Vrai ou fake », lancée en juin 2018 et commune à l’ensemble du secteur audiovisuel public.

À ces contenus, sajoute une mobilisation permanente des journalistes, qui passe aussi par des actions de formation. La plateforme de journalisme participatif les « Observateurs de France 24 », propose différents programmes dédiés à la déconstruction des fausses informations – dont « Info ou Intox » – et s’appuie sur un réseau de 500 contributeurs volontaires internationaux, qui s’attachent notamment à vérifier les contenus circulant sur les réseaux sociaux.

Cette plateforme est révélatrice de la capacité d’un opérateur comme France Médias Monde à mobiliser des ressources dans le monde entier. Par ailleurs, le bilinguisme répandu chez les journalistes de FMM favorise le développement de projets d’éducation aux médias et à l’information (EMI) :

-         Projets menés par les rédactions en langue étrangère de RFI et MCD, comme l’enregistrement par des élèves d’une émission de radio en arabe et en espagnol en 2018 ;

-         Échanges entre des journalistes de FMM en français, espagnol, arabe ou roumain et 1 500 élèves lors de l’édition 2019 de la Semaine de la presse et des médias dans l’école.

Surtout, notre audiovisuel extérieur est particulièrement à même de participer à une coopération européenne et internationale en matière de lutte contre la désinformation, comme on l’a vu notamment à l’occasion des élections européennes de 2019.

Ainsi France Médias Monde a mis en place en 2017, en partenariat avec la Deutsche Welle, le site « InfoMigrants », qui permet aux populations migrantes de disposer dune information fiable. La coopération franco-allemande dans ce domaine devrait se poursuivre avec un nouveau projet à l’intention des jeunes, « ENTER » (voir supra).

France 24 a lancé en 2018, en partenariat avec le Parlement européen, la chronique « Contre-Faits », proposée en français et en anglais afin de débusquer les fausses informations liées à l’actualité européenne. À l’occasion des élections européennes de 2019, France 24 a participé à la plateforme « FactCheckEU » avec 18 autres médias européens.

Enfin, on peut mentionner la « Journalism Trust Initiative » à laquelle TV5 Monde participe. Il s’agit d’un projet mené conjointement par l’Association française de normalisation (AFNOR) et Reporters Sans Frontières, au nom du Comité européen de normalisation. Il vise à élaborer un guide de bonnes pratiques journalistiques, selon un processus largement ouvert (médias, associations professionnelles, syndicats, conseils de presse, ONG etc), qui regroupe aujourd’hui 70 structures.

c.   La piste d’un Conseil de déontologie

Proposée notamment par le rapport Hoog de mars 2019, la création dun conseil de déontologie journalistique est défendue par lObservatoire de la déontologie de linformation. Pour Emmanuel Hoog, la création d’une telle instance permettrait de rétablir la confiance du public envers les médias, dans un contexte de fragilisation où la désinformation a une grande part de responsabilité.

Il s’agirait d’une instance indépendante qui pourrait rendre des avis et des recommandations, et, sans être dotée d’un pouvoir de sanction, offrirait aux citoyens une voie de recours plus accessible et rapide que la voie judiciaire en cas de manquement à la déontologie, et pourrait participer à des missions de médiation dans des affaires civiles.

Si des conseils de ce type existent déjà dans 18 pays de l’Union européenne, cette proposition divise les journalistes, certains y voyant un risque pour le pluralisme et la liberté de la presse. Face à ces inquiétudes, il s’agirait de créer un conseil indépendant de l’État, à l’initiative des professionnels des médias et sous la forme d’une association.

B.   Le rÔle stratÉgique de notre audiovisuel extÉrieur : le cas de la roumanie

La coopération audiovisuelle franco-roumaine et le déploiement de l’audiovisuel extérieur français en Roumanie, à commencer par RFI, s’inscrivent dans un véritable cercle vertueux de la diplomatie culturelle : l’apprentissage du français, la diffusion de contenus audiovisuels en français ou répondant aux standards journalistiques de notre audiovisuel public, et la consommation de biens culturels français sont étroitement liés et s’entretiennent mutuellement.

En outre, la Roumanie, principal bassin francophone en Europe orientale, dispose dune position stratégique, quon peut voir comme un tremplin pour la diplomatie dinfluence française. Si la Roumanie est beaucoup moins sensible à l’influence russe que ses voisins moldave ou bulgare, les médias indépendants, dont fait partie RFI Romania, y ont joué un rôle central pour stopper les risques de dérives nationalistes et anti-européennes.

Pour reprendre les mots de l’actuel ambassadeur de Roumanie en France M. Luca Niculescu, ancien journaliste à RFI Romania, RFI joue un Roumanie le rôle double de vecteur de francophonie et de démocratie.

a.   Une coopération culturelle et audiovisuelle dense avec un pays francophone et francophile

La coopération culturelle dans son ensemble sarticule en Roumanie autour de trois axes prioritaires : la promotion et la coopération autour des industries culturelles et créatives françaises (ICC) (audiovisuel, cinéma, livre, théâtre, musiques), le renouvellement des publics avec une attention particulière en direction des jeunes, la mise en valeur transversale et systématique de la langue française.

Cette coopération a connu une consécration cette année autour de la « saison France-Roumanie ([14]) », qui s’est ouverte en France le 27 novembre 2018 et jusqu’au 17 avril 2019. Son volet roumain a été lancé en Roumanie le 18 avril 2019, et s’est terminé le 14 juillet dernier à Bucarest, quelques jours après lorganisation dAssises de la langue française sur le thème « La Francophonie dans tous ses états ». Plus de 400 manifestations ont été organisées en France et en Roumanie, avec pour objectif principal de renouveler l’image et la perception de chaque pays dans l’autre, tout en ouvrant la voie à des partenariats durables.

L’action de l’Institut français de Roumanie (IFR) s’est concentrée depuis 2016 sur le développement de partenariats structurants et dactions en direction des professionnels du secteur, les arts de la scène étant très dynamiques en Roumanie comme dans l’ensemble de l’Europe du Sud-Est. La salle Elvire Popesco de l’Institut programme régulièrement des spectacles de jazz, et la restauration du piano historique de l’Institut, un modèle Schiedmayer 1900, a permis depuis son inauguration en décembre de programmer des récitals et concerts de musique de chambre, « L’Atrium à musique ».

Si le marché du livre et la pratique de la lecture sont relativement modestes en Roumanie par rapport à la moyenne européenne (BIEF 2018), lintérêt pour la littérature française y est très fort. L’Institut français de Roumanie et l’Institut français de Paris accompagnent la publication des auteurs francophones et les Programmes d’Aides à la Publication ont permis depuis quatre ans la publication d’environ 90 livres français traduits en roumain.

Par ailleurs, lIFR accueille régulièrement des débats et des rencontres avec des auteurs francophones, tels les écrivains Eric Vuillard et François-Henri Désérable, respectivement Prix Goncourt 2017 et Prix Goncourt de la Roumanie 2017.

Dans ce domaine, la coopération franco-roumaine a été consolidée par ladoption dun accord de coproduction (2009), et plus récemment par l’adoption d’une convention de coopération entre le CNC français et le CNC roumain, qui n’a toutefois pas pu aboutir à ce stade à l’adoption de mesures concrètes, une réforme sur le cinéma attendue par le secteur depuis plusieurs années étant toujours en attente.

Pour ce qui est de la salle Elvire Popesco, qui compte 183 places, on peut se féliciter d’une progression régulière de la fréquentation (de 23 000 spectateurs en 2012 à plus de 74 000 en 2017). Les recettes de lIFR ont ainsi suffisamment augmenté pour dépasser le seuil de rentabilité.

L’IFR travaille également en collaboration avec Cinetic, « hub créatif » accueillant des artistes roumains dans le domaine de l’animation, de la réalité virtuelle ou encore de la réalité augmentée, pour promouvoir la coopération dans le champ des arts numériques.

b.   La diffusion de l’audiovisuel extérieur en Roumanie : une place stratégique

Pour mesurer l’importance stratégique de l’audiovisuel extérieur français en Roumanie, il convient de le resituer dans le paysage médiatique national et régional.

Les échanges que votre rapporteur a pu avoir en Roumanie avec plusieurs journalistes ont fait état dune indépendance encore limitée pour les médias. Les liens entre les chaînes de télévision – média le plus plébiscité en Roumanie où la presse écrite est peu lue – sont souvent très étroits, c’est le cas par exemple pour des chaînes de télévision privées comme Romania TV ou Antena 3, dont le propriétaire est proche du parti au pouvoir, le PSD.

Si linfluence russe reste limitée en Roumanie, les médias russophones y connaissent une progression croissante. Surtout, dans un pays où la BBC n’est plus présente depuis la fin des années 2000 et où l’influence de la Deutsche Welle reste très modeste, RFI Romania apparaît comme une référence en matière de liberté éditoriale, et comme la voix européenne de référence.

En outre, si aucune chaîne de télévision russe n’est directement implantée en Roumanie, la chaîne Sputnik est présente en Moldavie et diffuse des programmes en langue roumaine, tandis que son site internet propose une page en roumain. Au-delà de cette présente directe, on constate des investissements plus discrets, qui passent par des fermes de « trolls », diffusant, notamment via les réseaux sociaux, un discours anti-européen. Selon le Center for Civic participation and democracy, l’antenne moldave de Sputnik est l’une des plus actives parmi les antennes implantées dans les pays situés aux frontières de l’OTAN.

Surtout, si le soutien aux valeurs européennes et démocratiques reste fort en Roumanie, on observe des tendances inquiétantes parmi certaines franges de la population, telles que les jeunes dits « NEETS » (ni étudiant, ni employé, ni stagiaire), avec une forme de méfiance à l’égard de l’intégration européenne de la Roumanie.

Dans ce contexte, il est essentiel de conforter la présence des médias français et francophones. À ce stade, il s’agit essentiellement de RFI et de TV5 Monde, la distribution de France 24, plus récente, connaissant des marges de progression.

i.   RFI Romania

RFI, radio bilingue en français et en roumain ([15]), a été créée en 1990. Elle diffuse 24 heures sur 24 des programmes en roumain et en français consacrés à l’actualité, à la culture et à la francophonie, et est aujourd’hui la radio la plus écoutée parmi les leaders d’opinion. Sa réputation de neutralité et de qualité – la radio a reçu en 2016 lordre roumain du mérite culturel pour la qualité de son traitement de linformation  en a fait un point de passage incontournable pour les décideurs politiques, économiques et culturels du pays. Les contenus proposés, très orientés sur lactualité européenne et internationale, distinguent RFI du reste du paysage médiatique roumain.

RFI Romania 

Émission en FM dans six villes roumaines (Bucarest, Iasi, Cluj, Craiova, Sibiu, Timisoara) et à Chisinau.

Audience hebdomadaire correspondant à près de 10 % de la population et à 80 % des cadres dirigeants.

60 radios partenaires diffusant des programmes d’informations dans tout le pays.

Une rédaction de 24 postes, appuyée par la rédaction roumaine de Paris (2 journalistes) et par plus de 13 correspondants dans le monde.

Au-delà de la diffusion de la langue française via les programmes proposés en français, RFI Romania intègre pleinement dans ses missions la diffusion des valeurs et de la culture françaises, et le développement d’une approche de l’actualité fondée sur la diversité des opinions et la confrontation des points de vue.

Le but de RFI est aujourd’hui de créer un réseau de diffusion de plus de 10 FM et de s’implanter dans d’autres grandes villes roumaines telles que Constanta, Brasov, Oradea, Galati, Arad et Ploiesti, l’attribution des fréquences FM se faisant en Roumanie par concours.

ii.   TV5 Monde

Également présente en Roumanie depuis 1990, TV5 Monde y enregistre environ 1,2 million de téléspectateurs hebdomadaires. La chaîne francophone a fait le choix d’un développement pragmatique avec le recours partiel à des sous-titres en roumain, et connaît un taux de pénétration de plus 80 % des foyers équipés de la télévision. Le roumain fait ainsi partie des 14 langues de sous-titrage mobilisées par la chaîne, qui vise non seulement les francophones, mais aussi les francophiles.

Surtout, la Roumanie est le premier bassin daudience de la chaîne en Europe hors France, Suisse et Belgique. TV5 Monde s’associe régulièrement aux grands évènements culturels francophones et roumains, qu’il s’agisse du domaine du cinéma ou du théâtre.

Si la diffusion de la chaîne est aujourd’hui imposée sur le câble, dans la mesure où la Roumanie est membre de l’Organisation internationale de la francophonie, lenjeu prioritaire pour TV5 Monde aujourdhui est la pérennisation de son statut sur lensemble des systèmes de distribution, dont les opérateurs satellite et la TNT. De l’avis de certains journalistes rencontrés à Bucarest par votre rapporteur, TV5 Monde gagnerait aussi à davantage se développer sur les réseaux sociaux.

c.   Quelles perspectives pour l’audiovisuel extérieur en Europe centrale et orientale et dans les Balkans ?

Stratégiques, lEurope centrale et orientale et les Balkans sont des zones géographiques investies par notre audiovisuel extérieur, où nos opérateurs connaissent une progression constante. Pour autant, dans un contexte budgétaire contraint, les moyens manquent pour développer et renforcer la présence de notre audiovisuel extérieur dans ces régions. Compte tenu du rôle géostratégique de leur place en Europe, elles pourraient à plus court terme faire l’objet de nouvelles coopérations audiovisuelles, notamment avec l’Allemagne.

Pour TV5 Monde, il faut distinguer entre les pays membres de l’OIF et les pays non membres :

-         Dans les pays membres de lOIF, comme la Roumanie, la stratégie de la chaîne consiste à privilégier une distribution maximale, en cohérence avec les dispositions de la Déclaration signée à l’issue de chaque Sommet de la Francophonie par les chefs d’État des gouvernements membres et par laquelle ils s’engagent à diffuser TV5 Monde aux côtés de leurs chaînes nationales et à mettre en place les politiques nécessaires à sa réception par le plus grand nombre, afin de promouvoir la langue française. À ce titre, la chaîne bénéficie d’un accès gracieux à la TNT en Grèce (4 millions de foyers), du statut d’obligation de diffusion (Must Carry) ou assimilé en Roumanie, Moldavie et en Arménie, tandis que sa présence dans les autres territoires membres de l’OIF est facilitée (Albanie, Bulgarie, Chypre, Macédoine). En contrepartie, TV5 Monde ne perçoit pas de recettes de distribution dans ces pays ;

-         Dans les pays non membres de lOIF, la stratégie retenue vise à privilégier les recettes de distribution plutôt qu’une distribution maximale, afin de développer les ressources propres de l’entreprise ([16]). La chaîne y est donc distribuée commercialement, en particulier dans les Balkans occidentaux. Depuis 2015, les recettes propres de distribution sur cette zone ont augmenté de 57 % (de 376 000 € à 592 000 €), alors même que la distribution s’est réduite sur cette même période de 22 % passant de 96,2 à 75,2 millions de foyers. Depuis quelques années, les opérateurs locaux tendent à se recentrer sur des offres très riches en chaînes locales, repoussant de ce fait les chaînes étrangères dans des offres à la carte. Face à cette nouvelle réalité, la stratégie de TV5 Monde consiste à se maintenir dans des offres de niveau intermédiaire touchant 20 à 50 % des abonnés, notamment grâce au sous-titrage, afin de préserver son potentiel de ressources de distribution.

Pour France Médias Monde, qui couvre quotidiennement lensemble de lactualité européenne, la stratégie éditoriale mise en œuvre conduit à régulièrement évoquer lactualité et les enjeux propres aux pays dEurope centrale et orientale comme aux Balkans occidentaux. La politique de langue de FMM met aussi les langues européennes à lhonneur, avec la rédaction de RFI Romania, basée à Bucarest et diffusant en roumain et en français.

En dehors de l’implantation roumaine de RFI, de loin la plus importante, la radio est diffusée via 17 émetteurs FM en Europe. Dans les Balkans, RFI diffuse en Albanie (Korca et Tirana) ainsi qu’au Kosovo (Pristina). En Europe centrale et orientale, RFI est présente en République Tchèque (Prague) et en Moldavie. RFI dispose également d’émetteurs FM dans le Sud du Caucase, en Géorgie et en Arménie (où elle diffuse un programme hebdomadaire en arménien).

Pour France 24, la stratégie mise en œuvre en Europe centrale et Orientale (Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République Tchèque, Roumanie, Slovaquie et Slovénie) et dans les Balkans occidentaux (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Macédoine, Monténégro et Serbie) vise à rendre accessible la chaîne au plus grand nombre, en utilisant lensemble des moyens hertziens et numériques de distribution.

Le paysage audiovisuel des pays de cette zone se caractérise par une distribution des chaînes de télévision en analogique qui demeure forte, ce qui rend ces marchés plus difficilement accessibles. Il faut aussi tenir compte d’importantes disparités entre certains marchés où l’offre d’opérateurs payants est très faible (comme par exemple en Albanie et au Kosovo où seuls quatre opérateurs payants existent), et d’autres marchés où l’offre est très fragmentée (en Pologne, par exemple, se côtoient plus de 150 opérateurs payants).

Dans ce contexte, France 24 assure une veille stratégique de chaque marché pour évaluer sa progressive mutation de l’analogique vers le numérique, meilleur marché potentiel et, dans l’intervalle, propose dès que possible des solutions de distribution alternatives à la diffusion linéaire complète (diffusion partielle du flux direct, diffusion de programmes de France 24 sur des chaînes de télévision nationales, mise de l’application de France 24 à la disposition des opérateurs qui sont techniquement en mesure de l’intégrer,…).

 


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   Conclusion

Face aux perspectives ouvertes par la future réforme de l’audiovisuel public et après des réductions budgétaires successives, notre audiovisuel extérieur mérite une attention soutenue. Pour votre rapporteur, il sera crucial de veiller à ce que l’audiovisuel extérieur ne devienne pas la variable d’ajustement de l’audiovisuel public, à la faveur d’une perte de sens et d’une vision de court-terme que les opérateurs, et plus encore les salariés, redoutent déjà.

Inquiet de voir chaque année se creuser le hiatus entre les ambitions affichées par le Gouvernement et les moyens attribués à notre audiovisuel extérieur, votre rapporteur appelle à ne pas compromettre un outil qui a le mérite d’offrir un levier d’influence considérable relativement aux moyens qui y sont alloués.

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION : PRÉSENTATION DU RAPPORT DEVANT LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Au cours de sa réunion du mercredi 16 octobre 2019, la commission des affaires étrangères examine le présent avis budgétaire.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Notre ordre du jour appelle à présent l’examen des crédits alloués à l’action audiovisuelle extérieure au sein de la mission Médias, livre et industries culturelles, dont le rapporteur est M. Alain David.

L’audiovisuel extérieur est un outil essentiel de notre diplomatie d’influence. Les enjeux stratégiques sont nombreux : promotion de la francophonie et de la francophilie, soutien à l’aide publique au développement dans le domaine des médias ou encore lutte contre la désinformation, dans un contexte international tendu – c’est le moins que l’on puisse dire.

Monsieur David, vous revenez sur chacun de ces enjeux dans votre rapport, en rappelant, à juste titre, l’attention que notre commission doit porter à l’audiovisuel extérieur, à quelques mois du débat parlementaire sur le projet de réforme de l’audiovisuel public dont l’examen est prévu, au jour d’aujourd’hui – je suis prudente –, en février 2020. Ainsi, 2020 sera une année cruciale pour l’audiovisuel extérieur, en raison de l’intégration annoncée de France Médias Monde (FMM) au sein d’une holding de l’audiovisuel public et de la présidence française de TV5 Monde, qui s’étalera sur deux ans. Notre commission, qui émettra un avis sur le projet de loi, veillera, bien entendu, à ce que l’audiovisuel extérieur de la France sorte renforcé de cette réforme ; telle sera notre feuille de route.

M. Alain David, rapporteur pour avis. Il y a dix jours, plusieurs médias irakiens ont été attaqués suite à leur couverture du mouvement de contestation sociale qui touche l’Irak depuis le début du mois d’octobre. Des journalistes ont été menacés et plusieurs médias ont vu leur transmission coupée. Cette attaque intervient alors que la fermeture de l’émetteur de Chypre, utilisé par France Médias Monde pour diffuser en ondes moyennes au Proche-Orient, a été actée cette année, malgré les alertes adressées au Gouvernement. Cet outil garantissait pourtant une sécurisation de la diffusion de la radio Monte Carlo Doualiya (MCD) en ondes moyennes dans une zone à l’importance géostratégique incontestable où les relais FM peuvent être coupés brutalement.

Cet exemple illustre l’importance stratégique de notre audiovisuel extérieur, dont nous ne prenons pas toujours la mesure.

Comme vous le savez, nos médias doivent aujourd’hui faire face à une concurrence accrue ; parler, à cet égard, de guerre de l’information n’est en rien une exagération. Dans ce contexte, le rôle de notre audiovisuel extérieur n’en est que plus déterminant. Or, une nouvelle fois, les crédits alloués à l’action audiovisuelle extérieure sont en baisse, à rebours des choix opérés par nos principaux concurrents.

La dotation de FMM, qui regroupe France 24, Radio France internationale (RFI) et MCD, s’établit ainsi, dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2020, à 255,2 millions d’euros, en baisse d’un million d’euros par rapport à 2019, et en retrait de 10 millions d’euros par rapport à la trajectoire initialement fixée dans le contrat d’objectifs et de moyens du groupe, trajectoire qui a été entièrement revue à l’été 2018. Pour rappel, le budget de BBC World, dont le modèle est régulièrement invoqué, s’élevait, en 2019, à 430 millions d’euros et celui de la Deutsche Welle à 350 millions d’euros, en hausse de 25 % depuis 2013. La dotation de TV5 Monde, après avoir connu une baisse d’1,2 million d’euros en 2019, est stabilisée en 2020, à hauteur de 76,2 millions d’euros.

Malgré ce contexte budgétaire plus que contraint, notre audiovisuel extérieur connaît des résultats très satisfaisants. Les chaînes de France Médias Monde ont touché, en 2018, 176 millions de personnes chaque semaine, en linéaire et en numérique, soit une progression de plus de 17 % par rapport à l’année précédente. Pour TV5 monde, dont la mesure d’audience ne peut être que partielle du fait de sa très large diffusion, on constate également une progression entre 2017 et 2018, avec 42,1 millions de personnes touchées par semaine.

Surtout, nos médias ont poursuivi leur développement. On peut citer, à propos de France Médias Monde, l’enrichissement de l’offre de contenus en langues étrangères, à commencer par la diffusion de France 24 en espagnol, qui a gagné 50 % de notoriété en quelques mois, après son lancement fin 2017. Le groupe a poursuivi la mise en œuvre de sa stratégie numérique et renforcé sa coopération avec les opérateurs de l’audiovisuel public et ses partenaires européens, réalisant ainsi des synergies qui sont une source d’économies.

S’agissant de TV5 Monde, on peut souligner la poursuite de la mise en œuvre du plan stratégique de la chaîne, grâce au développement éditorial et de la diffusion en Afrique, priorité essentielle pour la chaîne francophone, et à la poursuite de sa transformation numérique. Cette stratégie a porté ses fruits, puisque l’année 2019 a confirmé la forte croissance des audiences numériques de la chaîne amorcée en 2017.

Avec, d’un côté, des résultats toujours plus satisfaisants et, de l’autre, une succession de coups de rabots budgétaires, la tentation est grande de considérer qu’il ne s’agit là que d’une optimisation des moyens. Or, s’arrêter à cette conclusion, c’est s’enfermer dans une vision à court terme de notre diplomatie d’influence que nous risquons fort de regretter dans quelques années. TV5 Monde a déjà dû abandonner, faute de moyens, plusieurs des objectifs de son plan stratégique triennal et devrait perdre plus de 30 millions de foyers en 2020. Les chaînes de France Médias Monde devraient, quant à elles, perdre 8 millions de foyers l’année prochaine du fait des réductions des activités de distribution et de diffusion. Dans ce contexte, la direction du groupe comme les représentants du personnel sont très inquiets et déplorent une perte de sens dans les choix effectués par leur tutelle.

J’insisterai sur trois enjeux cruciaux pour notre audiovisuel extérieur.

Tout d’abord, à quelques mois du débat parlementaire sur le projet de loi de réforme de l’audiovisuel public, nous devons nous préparer à être extrêmement vigilants sur la prise en compte des spécificités de l’audiovisuel extérieur dans cette réforme. Le projet annoncé de holding de l’audiovisuel public suscite des inquiétudes au sein de France Médias Monde, où l’on redoute d’être relégué au second rang, derrière les opérateurs à vocation purement nationale. Du fait de son organisation multilatérale, TV5 Monde, ne fera pas partie de la holding, non plus que Arte. En revanche, France Médias Monde sera intégrée à cette nouvelle structure, dotée d’un contrat d’objectifs et de moyens commun qui admettra, chaque année, de nouveaux arbitrages entre opérateurs et dont le conseil d’administration ne comportera qu’un seul siège pour le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, ce qui apparaît comme une garantie bien maigre pour notre action extérieure et le rayonnement de notre diplomatie.

Deuxièmement, et c’est étroitement lié, nous devons pleinement reconnaître la valeur stratégique de notre audiovisuel extérieur. Dans un contexte de guerre de l’information, où certains concurrents n’hésitent pas à recourir à la désinformation au profit de discours souvent radicaux, simplistes ou antidémocratiques, l’audiovisuel extérieur constitue un rempart essentiel. En effet, c’est d’abord par une information indépendante et de qualité que passe la lutte contre les fausses informations. Au-delà de cet objectif permanent, notre audiovisuel extérieur est pleinement mobilisé contre ces fausses informations, comme en témoignent des programmes dédiés tels que « Info ou Intox » sur France 24, « Les dessous de l’Infox » sur RFI ou « À vrai dire », module de vérification des faits développé par TV5 Monde. La lutte contre la désinformation est également un des axes de la coopération avec la Deutsche Welle, avec le lancement du programme « Infos Migrants » et l’élaboration d’un projet ciblé sur la jeunesse, dans le cadre du traité d’Aix-la-Chapelle, qui prévoit la création d’une plateforme numérique franco-allemande. Enfin, FMM participe à des projets d’éducation aux médias et à l’information dans plusieurs langues.

Le rôle stratégique de notre audiovisuel extérieur passe par une information qui n’est pas la voix de la France en tant qu’État mais qui promeut les valeurs que notre diplomatie culturelle dans son ensemble cherche à diffuser. Face aux offensives des médias russes ou chinois, nous devons faire le choix politique d’un audiovisuel extérieur fort, doté de moyens suffisants. Pour reprendre les mots de l’actuel ambassadeur de Roumanie en France, M. Luca Niculescu, ancien journaliste à RFI Romania, RFI a été, en Roumanie, où je me suis rendu cette année, à la fois un vecteur de démocratie et de francophonie.

La promotion de la francophonie est en effet l’un des autres objectifs prioritaires de notre audiovisuel extérieur. C’est la raison d’être de TV5 Monde et une mission quotidienne pour France Médias Monde, dans le cadre d’une politique de langues qui promeut le multilinguisme et la diversité culturelle.

Troisièmement, les débats à venir sur l’audiovisuel public seront l’occasion de réaffirmer le lien très étroit entre l’audiovisuel extérieur et l’aide publique au développement. Canal France international (CFI), opérateur du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, qui est devenu une filiale de FMM en 2017, illustre parfaitement ce lien. Ce rapprochement a permis de constituer un pôle d’expertise médias, et des projets ont été lancés en coopération avec l’Agence française de développement (AFD), notamment dans la zone stratégique du Sahel. Au-delà du travail remarquable effectué par CFI, nous devons mener une véritable réflexion sur le lien stratégique entre audiovisuel extérieur et aide publique au développement, pleinement pris en compte par la BBC ou la Deutsche Welle.

Pour conclure, j’aimerais revenir sur la Roumanie, où j’ai choisi de me déplacer cette année. RFI Romania m’a été décrit par tous mes interlocuteurs, à commencer par les journalistes roumains, comme un média de référence, loué pour sa qualité et sa neutralité dans un contexte où de nombreux médias nationaux restent liés aux partis politiques. En Roumanie, les médias indépendants, dont fait partie RFI Romania, ont joué un rôle central pour stopper les risques de dérives antieuropéennes.

Par ailleurs, la présence de RFI et de TV5 Monde en Roumanie contribue à renforcer la position de ce pays en tant que principal bassin francophone en Europe orientale. Comme souvent, notre audiovisuel extérieur s’inscrit dans un cercle vertueux de la diplomatie culturelle, avec l’apprentissage du français et la consommation de contenus culturels français.

Compte tenu du décalage entre ces nombreux enjeux stratégiques et les moyens alloués à notre audiovisuel extérieur, j’émets un avis défavorable sur les crédits consacrés à celui-ci.

Mme Mireille Clapot. Merci, monsieur le rapporteur pour avis, pour la grande qualité de votre rapport et de votre exposé. L’action audiovisuelle extérieure de la France est un élément essentiel de sa politique d’influence au service non seulement de la diffusion de ses valeurs et de sa culture à l’étranger, du dialogue avec les autres cultures mais aussi de la diffusion d’une information de qualité. Vous avez longuement évoqué France Médias Monde et TV5 Monde ; je n’y reviendrai donc pas.

Je vous remercie d’avoir insisté, dans votre rapport, sur la Roumanie – la région des Balkans m’est chère – où l’objectivité de l’information, la promotion de la francophonie et la défense contre des influences extérieures, en l’occurrence russes, sont des enjeux très forts. RFI y est diffusée en français et en roumain, comme TV5 Monde depuis 1990 et France 24 plus récemment.

Certes, ce budget est un budget de transformation. Il est utile d’affirmer, ici, la dimension géopolitique et régalienne de l’audiovisuel extérieur, ainsi que sa contribution indispensable à la diplomatie culturelle et au rayonnement de la France. Mais ce PLF s’inscrit dans un arbitrage rendu en juillet 2018 en faveur d’une trajectoire d’économies, certes exigeante, mais réaliste. Il est en effet demandé à l’audiovisuel public de réaliser 190 millions d’euros d’économies entre 2018 et 2022, dont 10 millions d’euros pour l’audiovisuel extérieur. La dotation de France Médias Monde prévue dans le PLF pour 2020 est en léger retrait, d’un million d’euros, par rapport à 2019, celle de TV5 Monde demeurant stable, à 76 millions d’euros.

Cette trajectoire traduit, aujourd’hui comme hier, un engagement de l’État envers les sociétés de l’audiovisuel public, dont l’audiovisuel extérieur. Rappelons qu’ont été construits, sur ces bases, des plans de transformation ambitieux en matière d’information, de culture et d’offre de proximité. Il s’agit donc de la confirmation d’une trajectoire arbitrée, avec des résultats en matière d’audience et de qualité.

Aussi le groupe LaREM votera-t-il les crédits du PLF pour 2020 alloués à l’audiovisuel extérieur.

M. Frédéric Petit. Monsieur le rapporteur, je suis ravi que vous ayez pu découvrir l’un des pays de ma circonscription, où la francophonie est en effet importante.

Je m’étonne des craintes que vous inspire la réforme de l’audiovisuel. Tout d’abord, notre commission doit se saisir du projet de loi – peut-être même faut-il aller plus loin et créer une commission spéciale –, car l’audiovisuel n’a pas de frontières. Au reste, comme je l’ai expliqué à certains d’entre vous, il conviendrait non seulement que les téléspectateurs français puissent regarder France Médias Monde sur le hertzien, car il est intéressant qu’une chaîne publique d’État émette en arabe et en espagnol, mais aussi que l’on puisse regarder les chaînes françaises à l’étranger sans se faire traiter de tricheur ou de voleur. Je ne comprends pas vos craintes, car la future réforme ne peut pas, à moins de remettre en cause la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), ne pas maintenir des lignes budgétaires distinctes pour chaque opérateur. Par ailleurs, il me paraît souhaitable que l’ensemble des opérateurs soient soumis à un seul contrat d’objectifs et de moyens car nous pourrons ainsi, si nous sommes vigilants, imposer l’utilisation de CFI, par exemple, et de l’international dans une vision d’ensemble de la politique audiovisuelle.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Notre commission se saisira pour avis du futur projet de loi et elle défendra, je l’espère, une position forte.

M. Jérôme Lambert. Je veux tout d’abord remercier Alain David pour son rapport. Je m’étonne des premières réactions que celui-ci a suscitées : les faits sont les faits. Nous devrions tous reconnaître qu’il y va de l’influence de la France, de la francophonie, c’est-à-dire d’enjeux majeurs défendus non seulement par notre commission, mais aussi par le Président de la République lui-même. De fait, l’audiovisuel est l’un des instruments, sinon le principal, de notre influence dans le monde, car on mesure bien le rôle qu’il joue dans la vie quotidienne de plusieurs milliards d’êtres humains. Comment peut-on continuer à tenir un discours presque gaullien sur l’influence de la France et la francophonie et se donner de moins en moins de moyens pour faire entendre la voix de la France et des Français à l’étranger ?

Encore une fois, je tiens à remercier Alain David de nous avoir éclairés sur la très triste et révoltante réalité de la situation de l’audiovisuel extérieur. Le groupe Socialistes ne votera pas les crédits de la mission.

Mme Frédérique Dumas. Comme l’a rappelé le rapporteur, Arte, d’un côté, TV5, de l’autre, sont relativement à l’abri de décisions budgétaires, juridiques ou organisationnelles arbitraires, car elles font l’objet de traités ou d’accords internationaux qui les protègent en partie. Mais, concernant France Médias Monde, ce que révèle, à ce stade, le projet de loi de finances, c’est bien un écart significatif entre les ambitions affichées et les moyens alloués. Un budget est au service d’une vision.

France Médias Monde est un facteur de stabilisation des zones de tension et contribue à l’objectif de sécurité de la politique internationale de la France, grâce à sa position de leader en matière d’information en Afrique francophone, notamment dans la zone sahélienne et au Maghreb, ainsi qu’au poids croissant de son influence au Proche et Moyen-Orient. L’action de RFI a ainsi été repérée par le Haut-Commissariat aux réfugiés.

France Médias Monde est un véritable promoteur de la francophonie dans un monde plurilingue. Elle est engagée auprès des jeunes générations. En Afrique, 70 % des téléspectateurs de France 24 et 60 % des auditeurs de RFI ont moins de quarante ans ; au Maghreb, cette proportion est comprise entre 55 % et 65 % et, dans les pays du Proche et du Moyen-Orient, elle très proche de ces chiffres.

France Médias Monde promeut la culture face à la montée des modes de pensée radicaux et sectaires. Elle participe également à la cohésion nationale en touchant, en France, des populations faiblement francophones. Cet engagement au service des populations vulnérables est également illustré par le site d’information « Info migrants ».

France Médias Monde est engagée en faveur de l’Europe. Compte tenu des enjeux aux frontières, il peut paraître pertinent de renforcer l’offre en russe et de réfléchir, dans le contexte actuel, à un projet d’offre en turc.

Les résultats et les audiences sont là. L’entreprise s’est déjà transformée profondément, au cours des dernières années, en mettant en œuvre des réformes structurelles ambitieuses, une réorganisation profonde et une évolution des métiers. Toute nouvelle économie implique ainsi qu’elle renonce à des missions prioritaires. Ce n’est pas 1 million d’euros mais 4 millions qu’il faudra trouver, du fait des glissements, pour préserver l’existant. À l’heure où l’on décide d’une baisse, présentée comme symbolique, d’un euro de la contribution à l’audiovisuel public – soit un manque de recettes de 25 millions –, l’enjeu est, non pas budgétaire, mais politique. Alors que les tensions internationales n’ont jamais été aussi fortes, nous ne faisons qu’accroître notre impuissance.

Pour toutes ces raisons, le groupe Libertés et Territoires émet un avis négatif sur ces crédits.

M. Jean-Paul Lecoq. Le ministre Le Drian présente toujours l’audiovisuel extérieur comme un outil de la puissance française – le soft power, comme il dit – indispensable au rayonnement de notre pays. On aurait donc pu s’attendre à ce que le budget de l’audiovisuel extérieur soit en augmentation. Or, il n’en est rien. Pourtant, je sais, pour l’avoir vécu, que, lors de la révolution tunisienne, les Tunisiens ne regardaient que France 24 car ils considéraient que c’était, pour eux, le moyen de connaître la vérité sur ce qui se passait dans leur pays. Cela veut dire quelque chose : le crédit de l’audiovisuel extérieur français est important et son rôle vital !

J’adore le vocabulaire qu’on emploie parfois dans notre commission. On a parlé de « trajectoire arbitrée ». En clair, cela signifie que toutes les lignes de crédits sont en baisse, et l’on considère que c’est positif. Non ! Une telle trajectoire est scandaleuse car, cela a été dit par Jérôme Lambert, le rôle que joue notre audiovisuel extérieur est important.

J’ajoute, puisque les députés du groupe GDR ont déposé un amendement à ce sujet, que, même si un euro est un euro – ce n’est pas un communiste qui vous dira le contraire –, la diminution de la contribution à l’audiovisuel public est symbolique pour les Français mais représente une baisse de recettes de 30 millions pour le service public de la télévision.

Par ailleurs, je tiens à dénoncer l’arrêt de la diffusion de France Ô. Certes, cette chaîne ne relève pas de l’audiovisuel extérieur de la France, mais elle établit un lien extraordinaire entre les Caraïbes et la Métropole.

Diminution des ressources, menace sur la redevance qui soutient ces outils d’influence, une réforme à venir qui semble inquiétante pour les chaînes internationales : tout nous conduit à voter contre ces crédits, comme nous y invite Alain David.

Mme Anne Genetet. Merci, monsieur David, pour votre rapport. Vous soulignez, à juste titre, l’importance des médias audiovisuels extérieurs pour la présence de la France dans le monde. Vous avez également rappelé qu’ils constituaient un rempart essentiel contre les fausses informations et, j’insiste sur ce point, un outil stratégique dont nous avons besoin si nous voulons continuer à peser sur les grands enjeux internationaux.

Je souhaiterais appeler l’attention de la commission sur deux points. Tout d’abord, les chaînes de l’audiovisuel extérieur français ne sont pas toujours accessibles de façon gratuite à l’extérieur de nos frontières. Nous subissons, à cet égard, la concurrence déloyale de la Deutsche Welle, des chaînes américaines, chinoises ou japonaises, qui sont diffusées sur des bouquets d’information auxquels nous avons également accès mais à condition de payer. C’est un grand désavantage.

Ensuite, nous avons besoin, ces médias ont besoin de journalistes, notamment de journalistes reporters d’images. Or, ceux-ci sont souvent des pigistes et n’ont pas de protection sociale. Ma question est simple : savez-vous quelles sont les politiques de responsabilité sociale des entreprises auxquelles s’astreignent nos médias pour protéger ces journalistes, qui nous font exister hors de nos frontières ?

M. Denis Masséglia. Nous examinons les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles. Or, on a beaucoup parlé des médias, un peu du livre, mais très peu des industries culturelles.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Nous examinons les crédits de l’action audiovisuelle extérieure.

M. Denis Masséglia. Puisque vous vous êtes rendu, monsieur le rapporteur, à Bucarest, en Roumanie, permettez-moi de rappeler que le ministère de la culture a créé un jeu vidéo intitulé Romanica, qui vaut ce qu’il vaut mais qui a pour vocation précisément de promouvoir la langue française dans les pays de langue romane. Je rappelle également qu’une entreprise française a conçu une visite virtuelle de sites tels que Palmyre ou Mossoul, qui ont été détruits. Je cite ces exemples, car nous nous focalisons sur l’audiovisuel extérieur – qui est certes l’objet de votre rapport – alors que nous devrions nous ouvrir à d’autres actions qui contribuent au rayonnement de la France et me semblent être plus en adéquation avec une partie des attentes de la population mondiale.

M. Jean-Louis Bourlanges. Il existe une contradiction assez profonde entre l’ambition affichée, et saluée du reste dans cet excellent rapport, et notre ladrerie budgétaire. Ce n’est pas dans ce domaine qu’il faut faire des économies. Je m’associe à ceux qui estiment que la diffusion de la parole de la France ou, d’une façon générale, des valeurs qui sont les nôtres ne coûte pas très cher et rapporte gros, si je puis dire, car l’effet est considérable. C’est pourquoi je m’abstiendrai. Comme chacun sait, s’abstenir lorsqu’on est dans la majorité, c’est être au moins aussi critique que voter non lorsqu’on est dans l’opposition.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Je remercie les différents orateurs pour la concision de leurs propos et notre rapporteur pour la qualité de son travail. Nous y reviendrons lors de la préparation du projet de loi.

Je vous proposerai en effet que nous travaillions en amont de celui-ci, comme nous l’avions fait pour le projet de loi d’orientation et de programmation relative à l’aide publique au développement. Peut-être notre commission pourrait-elle élaborer un document dans lequel elle insisterait sur l’importance qu’elle accorde à l’audiovisuel extérieur, document que nous adresserions au ministre de l’Europe et des affaires étrangères ainsi qu’à celui de la culture. Il serait souhaitable que nous nous y attelions dans les semaines qui viennent, car le projet de loi serait présenté, dit-on, en conseil des ministres au mois de novembre. Je vous soumettrai donc prochainement un document de travail comportant quelques pistes et orientations défendues par notre commission dans le domaine de la politique d’influence française et de l’audiovisuel extérieur.

M. Frédéric Petit. J’insiste pour que l’on parle de l’audiovisuel de la France dans le monde plutôt que de l’audiovisuel extérieur.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Bien sûr.

M. Alain David, rapporteur pour avis. Vous l’avez tous relevé, il s’agit de la présence, du rayonnement de la France dans le monde. Or, dans ce domaine, nous avons pris, en l’espace de quelques années, un retard considérable. On pourrait penser qu’une baisse d’un million d’euros sur un budget de 255 millions, ce n’est rien. Mais les baisses se succèdent et la diminution des crédits atteindra 10 millions d’ici à 2022. France Médias Monde doit donc faire face à des difficultés croissantes, au point que le personnel, privé de visibilité sur son avenir, risque de se démobiliser. Je puis vous dire, du reste, pour avoir rencontré l’ensemble des syndicats de France Médias Monde, que le moral des personnels est à zéro. Aujourd’hui, sur le plan financier, après les licenciements successifs qui ont fait suite aux diverses baisses de crédits depuis cinq ou six ans, la société est pratiquement à l’os. Elle est désormais confrontée à des difficultés structurelles qui mettent en cause son avenir même.

La comparaison avec la Deutsche Welle ou BBC World est éloquente. Il manque pratiquement un million d’euros au budget de France Médias Monde pour être compétitif en Afrique, dont le nombre d’habitants atteindra 4 milliards dans les trente années qui viennent. Or, la présence de la France est essentielle sur ce contient crucial pour le développement et l’avenir économique. Hélas ! nous perdons pied face aux Chinois, aux Anglais, aux Allemands. Nous devons réagir.

Je comprends la solidarité des députés de La République en marche, qui font corps pour soutenir le budget et justifier les coups de rabot du Gouvernement. Mais je leur demande de mesurer l’importance de la présence française dans le monde. On ne peut pas considérer l’outil de rayonnement qu’est France Médias Monde comme n’importe quel autre secteur d’activité. Tel est, en tout cas, mon sentiment, car cela fait trois ans – depuis que vous m’avez confié cette responsabilité, madame la présidente – que je vis en quelque sorte avec ces personnels, au rythme des budgets et des visites que j’effectue partout dans le monde.

Il est vrai, par exemple, que le rôle de France 24 a été essentiel dans la révolution tunisienne. De fait, les références du peuple tunisien étaient complètement faussées par les médias arabes notamment, qui distillaient des informations contraires à ses intérêts. Or, France 24 apparaissait comme indépendante : c’était la voix de la France, une voix non pas politique, mais culturelle, celle de la France des Lumières. Lorsque je me suis rendu en Tunisie, j’ai pu constater combien nos médias extérieurs étaient appréciés – et j’ai fait le même constat en Roumanie.

Je voudrais dire un mot sur la future holding, qui suscite de très fortes inquiétudes car le ministère de l’Europe et des affaires étrangères représentera, au sein du conseil d’administration, un poste sur douze. À partir de 2022, l’audiovisuel public sera placé sous l’autorité d’un seul PDG, d’une seule direction, et le représentant du ministère des affaires étrangères n’aura pas la qualité de commissaire du Gouvernement, à la différence de celui du ministère de la culture. En outre, l’audiovisuel extérieur, noyé dans l’audiovisuel public, ne bénéficiera pas d’un budget plancher. En effet, lorsque j’ai proposé que lui soit au moins garanti un budget de 255 millions du budget lors de la création de la holding, on m’a répondu que ce n’était pas possible.

Or, c’est essentiel, dès lors que l’audiovisuel public sera confronté à la disparition ou à la modification de la contribution à l’audiovisuel public. De fait, la suppression de la taxe d’habitation, à laquelle est adossée la taxe sur l’audiovisuel, soulèvera un certain nombre de problèmes. Adressera-t-on aux contribuables, qui ne paieront plus la taxe d’habitation, un avis concernant exclusivement la contribution à l’audiovisuel public ou modifiera-t-on entièrement le système ? Il importe donc que l’audiovisuel extérieur ne soit pas noyé dans l’audiovisuel public, car il risquerait, à terme, de subir les mêmes contraintes que ce dernier, c’est-à-dire des baisses constantes, décidées au motif, par exemple, que la publicité pourra payer ou qu’il est possible de faire telle ou telle économie.

Je vous en conjure, chers amis de La République en marche, ne considérez pas l’audiovisuel extérieur comme un secteur qui doit, au même titre que les autres, faire des économies : il s’agit d’un outil du rayonnement de la France à l’extérieur, essentiel pour notre pays.

Mme Frédérique Dumas. Ayant travaillé dans le secteur de l’audiovisuel et ayant siégé à la commission des affaires culturelles, je souhaiterais m’associer à la réflexion sur la réforme que vous avez annoncée, madame la présidente.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Bien sûr. Nous rédigerons ce document d’orientation de manière pluraliste, comme nous l’avions fait pour le texte relatif à l’aide publique au développement. Je vous proposerai une méthode de travail et, une fois que ce document, qui comprendra les orientations que nous aurons définies de manière consensuelle – chaque groupe y sera associé –, sera établi, je vous suggérerai d’auditionner le ministre de la culture, si possible avant la présentation du texte en conseil des ministres.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles tels qu’ils figurent à l’état B annexé à l’article 38 du projet de loi de finances pour 2020.

 


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   ANNEXE : Liste des personnalités rencontrées par votre rapporteur

1/ À Paris

 

 

Table ronde des représentants du personnel de France Médias Monde

CFDT

 

CFTC-France Médias Monde

 

CGT

 

FO

 

Syndicat national des journalistes(SNJ)

 

2/ À Bucarest (du 2 au 4 juillet 2019)


([1]) C’est le cas notamment en Côte d’Ivoire  (création d’une société de droit ivoirien, quota de contenus locaux et couts de diffusion liés à l’obtention de la licence et frais techniques d’un montant total estimé d’environ 600 000€ par an) et au Burkina Faso (coûts d’entrée fixés à plus de 110 000 € par an). 

 

([2])  Coût de la direction technique et des systèmes d’information avec notamment les coûts des régies de production et de diffusion, la maintenance technique des équipements, l’amortissement des matériels et investissements techniques, la sous-traitance de certaines prestations techniques, etc.

([3]) Le reste de l’enveloppe correspond à BBC World News, financé par 57 millions d’euros de recettes commerciales.

([4])  Reporters sans frontières, Le nouvel ordre mondial de l’information selon la Chine, mars 2019.

([5])  https://www.ft.com/content/71d0e972-c998-11e9-a1f4-3669401ba76f

([6])  https://www.theguardian.com/tv-and-radio/2019/sep/18/chinese-news-channel-dealt-blow-as-former-ofcom-executive-quits

([7]) Un OTT « over-the-top service » ou service par contournement est un service de livraison d’audio, de vidéo ou d’autres médias sur Internet sans la participation d’un opérateur de réseau traditionnel dans le contrôle ou la distribution du contenu.

([8]) TV5 Monde ne dispose pas actuellement d’outils de mesure pour ses audiences linéaires sur la zone Pacifique, en Amérique Latine, aux États-Unis d’Amérique, ni en Afrique anglophone.

([9]) Qui était détenu auparavant par France Télévisions (75%) et Arte France (25%).

([10]) Pour rappel, les pays prioritaires de l’aide publique au développement, tels que désignés lors du CICID du 8 février 2018, sont les suivants :  Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, Djibouti, Éthiopie, Gambie, Guinée, Haïti, Liberia, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sénégal, Tchad, Togo.

([11])  La mort de Louis XIV fut ainsi annoncée à tort à de multiples reprises par des gazettes étrangères durant son règne.

([12])  Soit « pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d’élections générales et jusqu’à la date du tour de scrutin où celles-ci sont acquises », aux termes de l’article L. 163-1 du Code électoral.

([13])  Au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation.

([14]) A noter que le financement de la saison, dont le budget global a été de 4,5 millions d’euros, a reposé pour la partie française sur du mécénat à hauteur de 1,48 millions d’euros.

([15])  De 7h à 20h, les programmes sont en roumain, de 20h à 7h, c’est le programme international en français qui est diffusé. La programmation musicale est à 85% française ou francophone.

([16])  Il doit toutefois être souligné que dans tous les pays de la zone Europe centrale et orientale et comme de ceux des Balkans occidentaux, chaque particulier peut installer une parabole individuelle et recevoir gratuitement TV5 Monde grâce au satellite Eutelsat « Hotbird » qui touche plus de 8 millions de foyers en réception directe sur la zone.