N° 4502

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 septembre 2021.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482)

TOME VIII

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

 

AFFAIRES MARITIMES

PAR Mme Maina SAGE

Députée

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 Voir les numéros : 4482, 4524 (Tome III, annexe 16).


 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

premiÈre partie : un budget en augmentation

I. le programme 205

A. L’action 1 « SÉcurité et suretÉ maritimes »

1. Le financement de l’armement des phares et balises

2. Le financement de la SNSM

3. Le financement de l’action des CROSS, MRCC, JRCC

4. Le financement des CSN

5. Le financement du BEA mer

B. L’action 2 « Gens de mer et enseignement maritime »

1. Le financement de l’ENSM

2. Le financement de la formation secondaire maritime

C. L’action 3 « Flotte de commerce »

1. L’impact de la crise du Covid-19 sur la flotte de commerce

2. La situation du pavillon français

3. Le financement des aides à la flotte de commerce dans le cadre de l’action 3

D. L’action 4 « Action interministérielle de la mer »

E. L’action 5 « Soutien au programme »

II. L’action 43 DU programme 203

DeuxiÈme partie : la dÉcarbonation du secteur maritime

I. Les mesures prises au niveau international

II. les mesures prises au niveau national

TroisiÈme partie : la lutte contre la pollution en mer

I. Des rÈgles internationales pour lutter contre la pollution

II. Le dispositif français de lutte contre les pollutions marines

III. La protection et la prÉvention, des enjeux majeurs

Examen en commission

LISTE des personnes auditioNnées

liste des Contributions écrites reçues

 


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   introduction

Les océans et les mers constituent un patrimoine naturel d’exception et leur bonne santé est vitale pour assurer la vie sur Terre, la pérennité de nos économies et la stabilité de nos États.

Sur le plan environnemental, les services rendus par ces milieux sont aujourd’hui quantifiables. L’océan abrite 82 % de la vie de notre planète, il produit 50 % de l’oxygène que nous respirons et capte 30 % du CO2 contenu dans l’atmosphère.

Sur le plan économique, les États ont bâti une partie de leur richesse sur les ressources provenant de la mer. Chaque année, 2 560 milliards d’euros sont issus d’activités directement liées à la mer, soit 5 % de la richesse mondiale, 200 millions d’individus travaillent dans des activités de pêche maritime et 3,5 milliards de personnes dépendent des océans pour leur subsistance.

Enfin, les océans sont aussi le théâtre d’enjeux géostratégiques exacerbés par le réchauffement climatique et l’apparition de nouvelles routes maritimes, jusqu’ici non exploitées. Ils présentent également des défis de souveraineté et de sécurité liés à la protection de la circulation de l’information via des câbles sous‑marins intercontinentaux.

Aussi, en raison des défis qui leur sont liés, de l’exploitation et de la pollution excessives dont ils font l’objet, les mers et les océans exigent des moyens de préservation spécifiques et ambitieux.

Le transport maritime représentait environ 2,89 % des émissions anthropiques totales mondiales de CO2 en 2018 contre 2,76 % en 2012. D’ici 2050, son impact pourrait être multiplié par 6 et atteindre 17 % des émissions ([1]). Avec 90 % des volumes transportés et 80 % des valeurs, le commerce maritime assure notre approvisionnement et est un moteur de l’économie mondiale. Ils doivent prendre leur part et la prennent. Ces défis sont à relever dans un contexte particulier, à la fois d’un enjeu vital de préservation face au changement climatique, et plus récemment, au contexte de crise sanitaire.

Le monde maritime a été durement affecté par la crise du coronavirus qui a éclaté en 2020. Toutefois, le secteur maritime a relativement bien résisté, à l’exception du transport de passagers. Les effets de cette crise continuent de se faire sentir, notamment sur ce segment de flotte et dans les ports de commerce, où les durées d’escale se sont allongées. Le retour à la normale n’est prévu que pour fin 2022-début 2023 selon les informations recueillies lors des auditions.

La France est au cœur de ces défis. Grande nation tournée vers les océans, elle possède le second espace maritime au monde, avec une zone économique exclusive de plus de 11 millions de kilomètres carrés, dont 97 % relèvent des outre-mer qui s’établissent dans trois océans différents. L’héritage maritime de la France se retrouve également au travers de la qualité de la formation de ses marins, reconnue dans le monde entier. Des savoir-faire développés par les entreprises d’armement maritime permettent également à certains groupes de nos groupes d’être des leaders mondiaux.

Le secteur maritime ne se limite pas au transport maritime et au secteur portuaire. Il comprend également tout un tissu d’entreprises et d’emplois dans des domaines aussi divers que la construction navale, la pêche, l’assurance maritime ou encore les énergies marines renouvelables. Il peut s’agir d’emplois à terre comme d’emplois en mer. En ce qui concerne plus particulièrement la marine de commerce, objet du programme 205, on compte plus de 400 navires de plus de 100 UMS (Universal Measurement System) et plus de 12 500 marins affiliés à l’Établissement national des invalides de la marine.

Le monde maritime est aussi celui des usagers et notamment des plaisanciers. L’usage de la mer est à la fois professionnel et récréatif. C’est pourquoi il est indispensable d’assurer la meilleure conciliation des usages possibles en prenant en compte toutes les parties concernées : usagers professionnels et de loisir, responsables du domaine public maritime, riverains, associations de protection de l’environnement…

En effet une surexploitation et un usage trop intensif de nos ressources marines peuvent déjà porter gravement atteinte à notre patrimoine marin. Il incombe de continuer et d’approfondir notre action en faveur de sa protection. Celle-ci passe notamment par deux leviers : d’une part, la transition écologique du transport maritime, et d’autre part la lutte contre les pollutions.

C’est pourquoi, votre rapporteure a choisi de faire des focus sur ces deux sujets après avoir présenté et commenté les crédits du programme et de l’action 43 du programme 203 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Les politiques financées par le programme 205 visent à rendre plus cohérente l’action régulatrice de l’État en ce qui concerne le navire, le marin et la mer. Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit une hausse des autorisations d’engagement et des crédits de paiement : les autorisations d’engagement votées dans la loi de finances initiale pour 2021 passent de 154,9 millions d’euros à 192, 1 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022, et les crédits de paiement de 159 millions d’euros à 192, 8 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022 ([2]).

Les autorisations d’engagement et les crédits de paiement de l’action 43 du programme 203 (relative aux ports) sont stables : 99,9 millions d’euros ([3]) dans le projet de loi de finances pour 2022 comme dans la loi de finances pour 2021.

Dans ces conditions, votre rapporteure donne un avis favorable à l’adoption des crédits des affaires maritimes.

Enfin, elle tient à saluer les axes de la mandature développés par Mme Sophie Panonacle, et Monsieur Jimmy Pahun dans les précédents rapports budgétaires réalisés au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur les crédits consacrés aux affaires maritimes, notamment la transition écologique, la formation maritime, l’enseignement et le soutien à la SNSM.


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   premiÈre partie : un budget en augmentation

I.   le programme 205

Le programme 205 permet de financer des actions relatives à la politique de sécurité et de sûreté maritimes civiles (actions 1 et 4), la régulation sociale de l’emploi maritime (formation, hygiène, santé, conditions de travail), qui est au cœur de l’action préventive en matière de sécurité maritime (action 2), le soutien à la qualité et au développement du pavillon français (action 3) ou encore la participation à la protection de l’environnement marin et littoral (action 4). Le montant des autorisations d’engagement étant pratiquement identique à celui des crédits de paiement, du fait de la nature des dépenses financées, la présente partie traitera uniquement de l’évolution des crédits de paiement pour chacune des actions du programme.

A.   L’action 1 « SÉcurité et suretÉ maritimes »

Les crédits de paiement de l’action 1 – qui représentent 17 % des crédits alloués aux affaires maritimes – passent de 32,57 millions d’euros dans la loi de finances pour 2021 à 34, 42 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022 ([4]) (soit près de 6 % d’augmentation).

Le budget de l’action 1 permet à la France d’exercer trois types de missions :

– en tant qu’État du pavillon, elle garantit le respect des normes internationales requises à bord des navires battant pavillon français ;

– en tant qu’État du port, elle contrôle les navires de commerce étrangers faisant escale dans ses ports ;

– en tant qu’État côtier, elle assure l’organisation et la coordination de la recherche et du sauvetage maritimes le long des côtes françaises ainsi que la sécurisation des routes et des accès portuaires.

Cette dernière mission recouvre :

– l’organisation et la coordination de la recherche et du sauvetage maritime ;

– la surveillance de la circulation maritime dans les zones de séparation de trafic ;

– l’information des capitaines, patrons et skippers sur l’environnement et la situation nautique ;

– la sécurisation des routes et des accès portuaires avec le balisage maritime.

L’action 1 rassemble les crédits d’investissement et de fonctionnement d’une partie des services spécialisés qui permettent d’assurer ces trois missions.

1.   Le financement de l’armement des phares et balises

Près de 42 % des crédits de l’action 1 reviennent à l’armement des phares et balises dans le projet de loi de finances pour 2022 soit 14,27 millions d’euros de crédits de paiement. Ce service à compétence nationale, dépendant de la direction des affaires maritimes, est chargé de la mise en œuvre ([5]) et de la mise à disposition de moyens nautiques adaptés aux besoins des directions interrégionales de la mer (en France hexagonale) et des directions de la mer (en outre-mer) pour l’exercice de leurs attributions relatives à la signalisation maritime et à la diffusion de l’information nautique afférente.

Il s’agit essentiellement de crédits de fonctionnement (8,30 millions d’euros) et de crédits d’investissement (5,05 millions d’euros).

Les crédits de fonctionnement financent notamment le fonctionnement et le maintien en conditions opérationnelles des 6 100 établissements de signalisation maritime ainsi que l’acquisition des équipements de protection individuels des personnels et la formation des agents. Ils financent également des opérations lourdes de rénovation des édifices vétustes, des travaux de génie civil et de remplacement de pièces de structures Ils peuvent aussi financer des opérations patrimoniales sur les phares et maisons feux visant à accompagner leur préservation, leur transfert et leur reconversion. Ces dépenses permettent d’accompagner la stratégie de valorisation qui vise à favoriser le partage et la conservation des ouvrages historiques que sont les « grands phares du littoral ».

Les crédits d’investissement financent les travaux de « gros entretien » (par exemple le carénage et la rénovation des motorisations). Ils servent aussi à financer les opérations de remise à niveau, d’amélioration des technologies et de modernisation des infrastructures et matériels des établissements de signalisation maritime tels que les optiques de phares, les systèmes de solarisation ou les pylônes. Par ailleurs, dans le cadre du plan de modernisation des affaires maritimes, des actions d’investissement sur des technologies d’avenir seront menées pour :

– finaliser le renouvellement des balises répondeuses radar installé sur le littoral (ces systèmes permettent aux navires de visualiser la position des balises sur leur écran radar) ;

– poursuivre le plan de déploiement d’un système d’identification automatique des aides à la navigation les plus sensibles ;

– poursuivre et finaliser le déploiement des émetteurs/récepteurs de signal DGPS (programme de positionnement GPS amélioré́ qui permettra aux navires de disposer d’une meilleure fiabilité́ du calcul de leur position) ;

– doter les services d’un outil de pilotage de leur activité à la fois ́ performant et efficace.

Enfin, les crédits d’investissement de l’armement des phares et balises permettent le renouvellement des moyens nautiques. Ainsi, le plan de modernisation des affaires maritimes prévoit de remplacer 17 unités par 9 navires polyvalents, performants sur les plans technique et environnemental. Deux navires neufs ont déjà été mis en service : le Chef de Baie basé à La Rochelle et la vedette Giraglia pour la Corse. Un baliseur côtier est en cours de construction pour la zone Brest-Morlaix pour une mise en service fin 2022 et un baliseur océanique à faible empreinte environnementale fait l’objet d’un appel d’offres et serait mis en service en 2023. ([6])

Il faut souligner que le plan de relance n’a pas oublié le maritime car les investissements de l’armement des phares et balises y sont soutenus, à hauteur de 25 millions d’euros.

Selon les personnes auditionnées, les côtes de France hexagonale, des îles dans ces zones disposaient d’un système de balisage globalement suffisant. Toutefois, la direction des affaires maritimes travaille à l’actualisation des stratégies de balisage pour prendre en compte les besoins des usagers, l’évolution des pratiques et des technologies. Cela permettra de modifier le système de balisage pour le rendre plus performant, plus pérenne et plus efficient ([7]).

Les côtes de la France hexagonale et des îles dans ces zones disposent également d’un système de balisage globalement suffisant. Toutefois, la direction des affaires maritimes travaille à l’actualisation des stratégies de balisage pour prendre en compte les besoins des usagers, l’évolution des pratiques et des technologies. Cela permettra de modifier le système de balisage pour le rendre plus performant, plus pérenne et plus efficient ([8]). Votre rapporteure souhaite que cette actualisation soit l’occasion pour l’armement des phares et balises de se doter de « bouées intelligentes ». Ce type de bouées, qui est de plus en plus dans les ports de plaisance, n’est pas encore assez développé dans les installations relevant de l’État. Une bouée intelligente peut par exemple être dotée d’un radar, d’un sondeur et d’équipements audio et vidéo qui permettent d’observer et écouter les vertébrés marins. Ce type de bouée a par exemple été testé en mer d’Iroise en 2015 ([9]). Il existe de nombreux dispositifs prometteurs comme celui développé par la société Out‑There. Cette société s’est associée à la société Synox et l’Institut d’Électronique et des Systèmes de Montpellier pour développer des capteurs marins automatisés qui pourraient collecter, transmettre, stocker et valoriser des paramètres environnementaux marins grâce à des supports tels que des bouées instrumentées à bord desquels ils seraient embarqués ([10]).

2.   Le financement de la SNSM

Près de 31 % des crédits de l’action 1 (soit 10,64 millions d’euros) sont consacrés au financement de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). Cette somme a fortement augmenté depuis 2015 (où elle représentait un peu moins de 3,2 millions d’euros) pour faire face aux besoins de financement de la SNSM, nécessités notamment par le développement de la formation et le renouvellement des moyens nautiques. La SNSM joue un rôle crucial pour la sécurité maritime française et elle est malheureusement encore trop peu connue.

Il s’agit d’une association reconnue d’utilité publique au titre de la loi de 1901 et agréée en qualité d’organisme de secours et de sauvetage en mer (par un arrêté du 21 juin 2006). Elle compte 89 salariés et 8 630 bénévoles. Sa flotte comprend près de 200 embarcations principales : 40 canots tous temps, 31 vedettes de première classe, 72 vedettes de deuxième classe, 3 vedettes de troisième classe, 20 vedettes légères et plus d’une centaine d’embarcations semi-rigides. Elle possède également des pneumatiques et des jet-skis. Le renouvellement et la rationalisation de cette flotte prévus par le programme « Cap 2030 » ont été lancés.

La SNSM exerce son activité dans le cadre du sauvetage en mer sous la coordination des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS). Dans la majorité des cas, il s’agit de porter secours à des navires de plaisance. Les plaisanciers et les pratiquants de loisirs nautiques constituent la majorité des personnes impliquées dans des événements de mer et font l’objet de 72 % des opérations coordonnées par les CROSS. Lors de ces événements, la moitié des interventions est assurée par des moyens nautiques de la SNSM armés par les sauveteurs embarqués. En 2020, les sauveteurs embarqués ont réalisé 4 083 interventions (à une distance moyenne de 3,53 milles marins) et secouru 7 408 personnes ([11]).

La SNSM intervient également dans le cadre de la police spéciale de la baignade qui est confiée aux maires des communes littorales dans une bande de 300 mètres à compter de la limite des eaux et qui implique de mettre en place des postes de plage saisonniers. Elle fournit un grand nombre de sauveteurs de plages. En 2020, les nageurs sauveteurs ont réalisé 3 110 interventions, secouru 3 122 personnes et soigné 15 990 personnes. Cette année-là, les nageurs sauveteurs étaient répartis dans 256 postes de secours rattachés à 148 communes littorales.

Si la quasi-totalité des départements et collectivités d’outre-mer disposent de stations SNSM, ce n’est pas le cas de la Polynésie. De ce fait, les organismes de sauvetage en mer y sont implantés ne peuvent bénéficier des moyens supplémentaires que l’État a alloués à la SNSM., C’est le cas de la Fédération d’Entraide Polynésienne de Sauvetage en Mer (FEPSM), qui a été créée le 10 novembre 2009.

3.   Le financement de l’action des CROSS, MRCC, JRCC

22 % des crédits de l’action 1 soit 7,67 millions d’euros servent à financer les dépenses de fonctionnement et d’investissement des cinq CROSS de France hexagonale, des deux CROSS d’outre-mer (Martinique et La Réunion), du MRCC (Maritime Rescue Coordination Centers) de Nouvelle-Calédonie ([12]) et du JRCC (Joint Rescue Coordination Centre) de Polynésie française.

Ces unités sont chargées de la coordination de la recherche et du sauvetage des personnes en détresse en mer, de la surveillance de la navigation maritime, de la diffusion des renseignements de sécurité maritime, de la surveillance des pollutions marines, de la veille des alertes de sûreté des navires et de la surveillance des pêches maritimes.

La création du JRCC de Polynésie française est une première en France. Il a été créé par l’arrêté du 8 août 2016 ([13]) et regroupe l’ancien MRCC et l’ARCC (Air Rescue Coordination Center). Il vise à créer une synergie étroite entre les centres de coordination de sauvetage aéronautiques et maritimes. Il est placé sous la responsabilité du Haut-Commissaire de la République en Polynésie française et basé à Arue sur l’île de Tahiti. Il dirige toutes les opérations de recherche et de sauvetage aéronautiques et maritimes dans sa zone de compétence située dans le Pacifique sud, qui couvre plus de 12,5 millions de km².

L’essentiel des crédits alloués aux CROSS sont des crédits de fonctionnement. Ceux-ci financent les dépenses de maintien en condition opérationnelle des équipements radars, de télécommunications et des systèmes d’information, ce qui concerne notamment l’entretien des infrastructures techniques des CROSS ainsi que :

– les systèmes radars dédiés à la surveillance des dispositifs de séparation de trafic en Manche et Mer du Nord ;

– les systèmes d’information relatifs au suivi du trafic maritime mis en place en application de la directive européenne 27 juin 2002 ([14]) ;

– le SGVT (Système de Gestion des Voies de Télécommunications), qui permet l’exploitation opérationnelle des équipements de radiocommunication ;

– les stations de radiocommunications dédiées au système mondial de détresse et de sécurité́ en mer et télécommandées depuis les CROSS.

Les crédits d’investissements sont très faibles (0,65 million d’euros) du fait de l’apport du plan de relance qui monte à 20 millions d’euros. Ces crédits contribuent notamment à financer un programme de remplacement des radars des CROSS.

4.   Le financement des CSN

5 % des crédits de l’action 1 (1,78 million d’euros) sont alloués aux CSN (centres de sécurité des navires). Ceux-ci sont chargés d’inspecter les navires et de contrôler leur conformité à la réglementation en vigueur (essentiellement sur le plan technique).

Il s’agit uniquement de crédits de fonctionnement. Ceux-ci servent notamment à financer des dépenses en matière d’immobilier, les frais de mission des agents ou encore les dépenses d’analyses en laboratoire (comme le contrôle des émissions d’oxydes de soufre des carburants). Ils servent aussi à assurer le maintien en conditions opérationnelles de la base « GINA », où sont enregistrés 10 000 navires professionnels français. Cette base permet de planifier les visites et contrôles réalisés.

5.   Le financement du BEA mer

Enfin, 0,15 % des crédits de l’action 1 (soit 50 000 euros) sert à financer le bureau d’enquêtes sur les événements de mer (BEA mer). Il s’agit d’un service à compétence nationale placé auprès de l’Inspecteur général des affaires maritimes. Ce service doit rechercher et déterminer les causes techniques des accidents, afin d’en tirer les enseignements pour l’amélioration de la sécurité maritime.

B.   L’action 2 « Gens de mer et enseignement maritime »

Les crédits de paiement de l’action 2 représentent 18,2 % des crédits alloués aux affaires maritimes. Ils augmentent de près de 19 % et passent de 26,66 millions d’euros dans la loi de finances pour 2021 à 31,66 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022. La plus grande partie de l’action 2 contribue au financement de la formation maritime.

1.   Le financement de l’ENSM

Une grande partie des crédits de l’action 2 est consacrée à l’ENSM (École nationale supérieure maritime) qui bénéficie d’une subvention pour charges de service public de 23,25 millions d’euros, destinée essentiellement au financement de la masse salariale (il y a 248 emplois à l’ENSM).

L’École nationale supérieure maritime (ENSM) a été créée en 2010 à partir du regroupement des quatre écoles nationales de la marine marchande qui existaient auparavant à Nantes, au Havre, à Saint-Malo et à Marseille. L’ENSM dispense des formations supérieures scientifiques, techniques et générales, et notamment des formations d’officiers de la marine marchande et d’ingénieurs dans les domaines de l’économie maritime et portuaire, de la navigation maritime et fluviale, des transports, de l’industrie, des pêches maritimes et des cultures marines, de l’environnement et du développement durable.

En ce qui concerne la formation des officiers, l’ENSM propose à la fois des formations d’officiers polyvalents (compétences pont et machine) et celle d’officiers monovalents (compétences pont ou machine) car ces deux profils sont demandés par les armateurs. En ce qui concerne la formation continue, l’ENSM assure les stages internationaux et les revalidations associées nécessaires aux officiers pour exercer leurs fonctions.

L’école échange régulièrement avec les armateurs et met en place des formations répondant à leurs attentes. Par exemple, dans le cadre de la formation continue, elle propose des stages « gaz » liés à la propulsion au gaz naturel liquéfié des navires, solution de propulsion qui est amenée à se développer dans l’avenir. L’ENSM travaille avec de nombreux partenaires académiques et industriels, ce qui lui permet de développer des formations dans des domaines novateurs. Ainsi un projet collaboratif visant à développer un référentiel de formation pour la propulsion vélique va être mis en place ([15]).

L’enseignement délivré par le personnel est un enseignement professionnel, très pratique qui repose en grande partie sur des mises en situation et l’ENSM fait donc appel non seulement à des enseignants venant de l’Éducation nationale pour les matières générales mais aussi à des enseignants « maritimes » qui peuvent être d’anciens navigants recrutés comme professeurs dans le cadre d’une seconde carrière ou encore des professionnels en activité qui interviennent sous forme de vacations. La crise du Covid-19 a perturbé les recrutements d’enseignants. Pour pallier ces manques, l’ENSM a eu recours aux heures supplémentaires ou encore à l’emploi de vacataires. Or le recrutement d’enseignants est un problème majeur. En effet, le salaire proposé comme enseignant est très éloigné de la rémunération d’officier navigant. C’est pourquoi ENSM étudie une revalorisation des grilles de contractuels ([16]).

À la rentrée 2021, l’ENSM comptait 1 040 élèves en formation ([17]). Le recrutement se fait principalement par concours post-baccalauréat. La notoriété de l’école demeurait faible en dehors du monde maritime et le concours semblait n’être connu que des seuls initiés, la majorité des candidats provenant de régions littorales ou de familles liées aux métiers de la mer ([18]). En 2021, l’ENSM a rejoint Parcoursup, ce qui peut contribuer à faire évoluer la situation. Par rapport à 2020, 371 dossiers supplémentaires ont ainsi été reçus pour le recrutement des élèves officiers.

Suite au Fontenoy du Maritime, processus engagé en 2020, le Gouvernement s’est engagé à doubler le nombre d’officiers formés à ENSM à l’horizon 2027 et l’ENSM doit donc voir son budget de fonctionnement et d’investissement augmenter. Cette décision a été annoncée en septembre dernier lors des Assises de la mer par le Premier ministre. D’ores et déjà, la subvention pour charge de service public dont bénéficie l’ENSM passe de 18,25 millions d’euros pour 2021 à 23,25 millions d’euros pour 2022. Cette augmentation et le principe d’un doublement du nombre d’officiers formés par l’ENSM sont appréciables. Toutefois, votre rapporteure considère qu’il faudrait dès aujourd’hui fixer une trajectoire adéquate en matière d’augmentation des moyens de l’ENSM, tant sur le plan humain que sur le plan financier.

2.   Le financement de la formation secondaire maritime

Les crédits de l’action 2 servent également à verser une subvention de 5,15 millions d’euros aux lycées professionnels maritimes et aux établissements offrant une formation maritime secondaire agréée en l’absence de lycées professionnels maritimes. De plus, 940 000 euros sont consacrés au financement des aides aux élèves boursiers de l’enseignement maritime secondaire.

La formation maritime repose tout d’abord sur un réseau de 12 lycées professionnels maritimes (LPM) ([19]) qui offrent une formation variée allant du CAP au BTS en passant par le baccalauréat professionnel. Trois types d’enseignement sont dispensés : les cours théoriques, les cours pratiques et les stages embarqués sur des navires. Ces stages dits « STCW » ([20]) conduisent à la délivrance des certificats et brevets obligatoires pour exercer des fonctions à tous les niveaux hiérarchiques à bord d’un navire. La formation prépare aux métiers de la navigation dans les filières du commerce, de la pêche et de la plaisance, mais aussi aux métiers des cultures marines (conchyliculture, algoculture, aquaculture maritime). Dans les zones dépourvues de LPM, des centres agréés dispensent une formation maritime. C’est notamment le cas en outre-mer.

En outre-mer, le ministère de la Mer accorde un agrément pour dispenser des formations conduisant à des diplômes secondaires de l’enseignement maritime aux établissements suivants ([21]) :

– Lycée professionnel privé de Blanchet à Basse-Terre en Guadeloupe (qui propose un CAP maritime et un baccalauréat professionnel « maintenance nautique ») ;

– École de formation professionnelle maritime et aquacole à La Trinité en Martinique (qui propose un CAP matelot et des baccalauréats professionnels « Conduite et Gestion entreprises maritimes » et « Électromécanicien Marine ») ;

– École d’apprentissage maritime à Le Port à La Réunion (qui propose un baccalauréat professionnel polyvalent navigant pont/machine) ;

– École d’apprentissage maritime à Dzaoudzi à Mayotte (qui propose un CAP matelot).

Le manque de formation maritime, initiale et continue, dans les outre-mer est à déplorer Si le nombre d’élèves concernés est susceptible d’être faible, ces territoires, dont la plupart sont insulaires, ont une vocation maritime affirmée. Le développement de formations maritimes sur place peut permettre d’éviter le départ des jeunes du territoire, comme il l’a été indiqué lors la table ronde qui a réuni les clusters maritimes ultra-marins et la Fédération des entreprises outre-mer. De ce fait, votre rapporteure appelle l’État à intensifier ses efforts dans les années à venir, le cas échéant en mutualisant les moyens. Toutefois, cette mutualisation peut rencontrer des limites, même dans des territoires relativement proches comme dans le bassin Caraïbes. En effet, les clusters maritimes ont soulevé un point de vigilance lors de cette même table ronde relative au fait que les marins de Guadeloupe devaient aller revalider certains brevets en Martinique, faute de structure sur place.

Sur un autre plan, il convient de remarquer que, désormais, certains lycées professionnels maritimes ont pris le nom de « lycées de la mer », comme le lycée Paul Bousquet de Sète ([22]). Par ailleurs, des lycées qui comportent des filières générales, technologiques et professionnelles peuvent prendre un tel nom. C’est par exemple le cas du « lycée polyvalent de la mer » de Gujan-Mestras qui, parmi les baccalauréats professionnels qu’il propose, prépare aux baccalauréats professionnels « cultures marines » et « maintenance nautique » ([23]). Interrogé sur l’opportunité de mettre en place des « lycées européens terre-mer » dans le cadre du questionnaire budgétaire qui lui a été envoyé, le ministère de la mer a répondu que cela « ne semble pas envisageable dans l’immédiat car le volume horaire des référentiels des baccalauréats professionnels maritimes, intégrant des enseignements spécifiques (qualifications répondant aux normes internationales STCW), est déjà très fourni et compte déjà en moyenne 35 heures de cours hebdomadaires. ». De plus, le plafond d’emplois du ministère de la transition écologique dont dépendent les lycées professionnels maritimes, déjà très contraint, ne permettrait pas le recrutement des compétences nécessaires à la mise en œuvre de projets de ce type ([24]). Malgré ces enjeux financiers, votre rapporteure souhaite qu’un projet pilote de lycée terre-mer européen soit mis en place dans le cadre d’un partenariat entre le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et le ministère de la mer.

À noter qu’un effort est déjà fait pour le développement d’une culture de la mer dans les lycées non professionnels avec la création en 2020 du « Brevet d’Initiation à la Mer » (BIMer). Il s’agit d’un diplôme de découverte de la culture maritime et des métiers de la mer qui peut être passé par de nombreux élèves (de ceux de classe de troisième en allant jusqu’à ceux des classes préparatoires). Il a été porté dans un premier temps par le lycée Vauban de Brest. Il a été conçu dans le cadre d’un travail collectif avec la direction interrégionale de la Mer Nord Atlantique Manche Ouest, l’académie de Rennes et la région Bretagne. La Marine nationale a également contribué à l’élaboration de ce diplôme. Celui-ci est défini par un décret du 21 septembre 2020 ([25]), complété par un arrêté du 21 septembre 2020 ([26]).

Le Brevet d’initiation à la mer

Le BIMer valide un niveau d’initiation aux activités professionnelles et à la culture scientifique et technique dans le domaine de la mer.

Pour le valider, les élèves doivent suivre sur une année une quarantaine d’heures de cours théoriques sur les activités professionnelles et la culture scientifique et technique dans le domaine de la mer. Ils participent également à des sorties pédagogiques (par exemple des visites d’entreprises comme un chantier naval ou une installation portuaire). Ils rencontrent également des professionnels de la mer et sont initiés à la pratique d’activités nautiques.

Le programme du BIMer détaillé dans l’arrêté du 21 septembre 2020 est composé de cinq parties :

Description, construction (cette partie vise à faire connaître aux élèves les différents types de navires, leur classification, les différentes parties qui les constituent, leurs modes de construction et les réglementations qui les concernent, notamment en matière de sécurité) :

Flottabilité – stabilité – sécurité du flotteur (cette partie vise à faire comprendre aux élèves les principes physiques de flottabilité et de stabilité des navires et les principes de base de la sécurité maritime) ;

 Mer et météo (cette partie vise à faire connaître aux élèves les savoirs météorologiques fondamentaux nécessaires pour la navigation et les outils associés, les phénomènes météorologiques qui peuvent être dangereux en mer et l’utilisation d’une carte isobarique pour les repérer) ;

Navigation, réglementation, sécurité (cette partie vise à initier les élèves aux instruments et paramètres nécessaires à la préparation de la navigation, aux consignes à observer en mer et en cas d’abordage aux modes de communication en mer en particulier dans les situations de détresse) ;

Les espaces maritimes, leurs milieux marins et les espaces associés (cette partie vise à faire connaître et à sensibiliser les élèves enjeux géopolitiques, économiques, socio-culturels et environnementaux du secteur maritime).

L’examen du BIMer prend la forme d’un questionnaire comprenant 60 questions. Il dure deux heures et est passé en ligne par les élèves dans leur établissement.

En 2018-2019, 77 élèves ont présenté le BIMer et 52 ont été reçus. Quatre établissements ont fait passer le BIMer ([27]). En 2019-2020, six nouveaux établissements avaient intégré le dispositif ([28]) (dont lycée Taiarapu-Nui de Tahiti) et on comptait davantage d’élèves inscrits (235) mais ceux-ci n’ont pas pu passer le BIMer en raison de la crise sanitaire ([29]) . Votre rapporteure appelle de ses vœux l’extension du BIMer soit généralisé aux établissements en zone littorale et rétro-littorale. Elle juge que ce déploiement peut permettre d’attirer des jeunes qui n’auraient pas songé à cette voie vers les métiers de la mer, qui sont aujourd’hui en tension. En effet, malgré des salaires élevés, des débouchés professionnels assurés et les efforts visant à améliorer les conditions de travail sur les navires, les formations dans le secteur de maritime peinent à attirer des jeunes ; par exemple, entre 25 et 35 % seulement des élèves des lycées maritimes se destinent à la pêche et ces effectifs sont en forte baisse depuis de nombreuses années ([30]). En outre, il conviendrait d’introduire une formation complémentaire dans les lycées hôteliers pour inciter leurs élèves à entreprendre une carrière sur les paquebots de croisière.

Faire connaître les métiers maritimes ne doit pas seulement être un objectif de la formation initiale mais toucher aussi des personnes en recherche d’emploi. Ainsi, aux assises de l’économie maritime qui ont lieu en septembre 2021, une convention a été signée entre le Cluster maritime français et Pôle emploi au sujet de la semaine de l’emploi maritime. Cette semaine doit normalement être organisée en mars et votre rapporteure considère qu’il serait plutôt intéressant de la coupler avec la fête de la mer et des littoraux qui a lieu à l’été, période plus attractive. La sensibilisation au monde maritime devrait être prise en compte dans le cadre du plan « Avenir littoral » que votre rapporteure détaillera dans le D.

C.   L’action 3 « Flotte de commerce »

1.   L’impact de la crise du Covid-19 sur la flotte de commerce

Les transports maritimes internationaux, qui sont des acteurs essentiels du commerce mondial, ont été fortement touchés par la crise de la Covid-19. Toutefois, contrairement à d’autres secteurs comme le transport aérien, le transport maritime a poursuivi une activité de manière relativement normale dans la plupart des cas, notamment pour le transport de marchandises.

Dans un premier temps, la baisse de la demande de produits de base et de matières premières, notamment en Chine, a impacté les besoins de transport et affecté le taux de fret des vracs. Puis la paralysie de l’industrie chinoise a induit une baisse de l’offre chinoise, suivie de celle de la demande occidentale, ce qui a affecté le transport conteneurisé. Enfin, les activités de croisières et les ferries ont été affectés par les restrictions sanitaires. Assurer les relèves d’équipage a également été difficile dans le contexte où les frontières étaient fermées et le transport aérien réduit.

Toutefois, tous les segments de la flotte n’ont pas été affectés de la même manière.

En ce qui concerne le vrac sec, les plus gros navires (Capesize), souvent destinés aux minerais, ont vu leurs taux de fret s’effondrer sur les premiers mois de 2020 en raison de la baisse de la demande chinoise en charbon et minerais de fer. Cependant, la demande est repartie en Chine et les mines australiennes ont poursuivi leur activité, ce qui a relancé le segment au printemps. À l’inverse, les vraquiers plus petits (Panamax, Handy) ont vu leurs taux de fret se maintenir sur la période, voire augmenter assez nettement, en raison de la forte dynamique des exportations/importations de produits agricoles. Sur les premiers mois de l’année 2021, le trafic de matières premières a été en forte hausse, notamment pour ce qui est des minerais et produits agricoles.

En ce qui concerne le vrac liquide, au début de la pandémie, la baisse des prix du pétrole (et, dans une moindre mesure, du gaz naturel liquéfié), a alimenté une certaine dynamique de transport des hydrocarbures pour constituer des stocks à bas coût. La baisse du prix du baril a entraîné une forte hausse des taux de fret journaliers des pétroliers bruts car ceux-ci servaient de stockage flottant à un moment où les capacités terrestres étant saturées. Les armateurs pétroliers ont pu afficher des résultats financiers extrêmement positifs sur les premiers mois de 2020, multipliant parfois leurs bénéfices par dix par rapport à l’année précédente. Toutefois, la demande de pétrole s’est ensuite effondrée, et les stocks étant remplis, la demande a baissé. De ce fait, le secteur du transport des hydrocarbures a subi la crise après les autres secteurs. En revanche, tant en 2020 qu’en 2021, le trafic de GNL s’est maintenu, profitant de la demande continue.

En ce qui concerne les porte-conteneurs, la conjugaison de la chute de l’offre en Chine et de celle de la demande occidentale a partiellement affecté le segment début 2020. Mais les opérations se sont globalement maintenues à l’échelle planétaire. Toutefois, pour améliorer le remplissage de leurs navires sur la grande route Asie-Europe, les compagnies ont retiré, au printemps 2020, environ 20 % de leurs capacités, en annulant ou regroupant des services. Ces capacités ont ensuite été progressivement remises en service pour répondre à la hausse de la demande. L’agilité opérationnelle de la plupart des compagnies leur a permis de maintenir des taux de fret élevés et de réaliser des performances financières très correctes sur le début de l’année 2020. Ensuite, la conjugaison d’une forte reprise de la consommation dans les pays occidentaux dès le printemps 2020 (qui a fortement stimulé les importations asiatiques), d’une pénurie de conteneurs disponibles et de la congestion des flux dans les ports a entraîné une forte hausse du trafic de conteneurs dès le second semestre 2020. Les taux du fret ont alors fortement augmenté à partir de juin 2020, allant jusqu’à être multipliés par dix entre l’Asie et l’Europe fin 2020. Cette situation a entraîné une hausse considérable des résultats des grands opérateurs du segment. Par exemple CMA-CGM a réalisé un bénéfice de 1,75 milliard d’euros l’an passé. La dynamique continue avec des taux de fret élevés.

La désorganisation des chaînes logistiques des trafics de conteneurs et son impact sur l’encombrement des ports de commerce

La crise du Covid-19 a entraîné une croissance forte du e-commerce au printemps 2020. Puis a été constatée une demande plus forte qu’attendue dans la période de déconfinement. Cela a entraîné une hausse du trafic conteneurisé dès le début de l’été 2020. Les processus habituels de répartition de conteneurs pleins et vides entre les lieux de production (principalement l’Asie) et les lieux de consommation (Amérique, Europe) ont été désorganisés. Une accumulation de conteneurs vides a été observée dans de nombreux ports européens et américains. Certaines compagnies maritimes ont en outre privilégié l’acheminement de conteneurs pleins au détriment du repositionnement des conteneurs vides laissés dans les lieux de consommation.

La désorganisation des échanges a généré des retards ou des annulations d’escales programmées dans certains ports, ce qui a accentué le phénomène de congestion des ports, déjà encombrés par les conteneurs vides.

La faible production mondiale de conteneurs et le manque de porte-conteneurs disponibles ont contribué à la persistance de cette situation fin 2020 - début 2021.

Dans ce contexte dégradé, le blocage du canal de Suez par le navire Ever Given au mois de mars 2021, a amplifié la désorganisation des trafics de conteneurs mais n’a semble-t-il pas eu d’effets structurels durables sur l’ensemble des trafics portuaires.

La désorganisation logistique liée à la pandémie de Covid-19 s’est répercutée sur l’ensemble des acteurs de la chaîne de transport :

– les transporteurs ont dû supporter les surcoûts liés au repositionnement de nombreux conteneurs vides qui se sont accumulés dans les ports des marchés d’import vers les ports des marchés d’export ;

– les transitaires ont dû assumer des coûts de stockage des boîtes vides ;

– les manutentionnaires ont dû s’adapter aux modifications des rotations de certains armateurs ;

– les armateurs ont dû faire face aux retards de chargement et de déchargement de conteneurs et certains d’entre eux ont fait le choix de supprimer certaines escales.

Selon les informations communiquées à votre rapporteure par le ministère de la Mer et les clusters maritimes d’outremers, la situation logistique des zones insulaires – et notamment les territoires d’outre-mer – a été gravement perturbée mais n’a pas été structurellement impactée par la situation globale.

Le cumul de ces tensions logistiques sur la filière conteneur, associé à la reprise mondiale de la demande, ont occasionné une hausse des taux de fret inédite. Les principaux cabinets de conseil en transport maritime ont relevé de fortes hausses de prix pour le transport de conteneur au cours des derniers mois : 9 300 dollars pour le transport d’un conteneur de 40 pieds par voie de mer (juillet 2021), soit 5 fois plus qu’avant la crise sanitaire ([31]).

Votre rapporteure souhaite souligner la situation particulièrement difficile qu’ont connue les outre-mer. Ces territoires sont par nature loin de l’Hexagone (et même, pour les territoires insulaires, loin de tout continent). Cette situation rend le coût de la vie particulièrement élevé. Par exemple, les prix sont plus élevés qu’en Hexagone de 12 % aux Antilles, de 11,7 % en Guyane et de 7 % à La Réunion ([32]). Pour les collectivités du Pacifique, le niveau des prix est encore plus élevé. En 2016, les prix étaient en moyenne supérieurs de 19 % pour un panier de biens polynésiens et de 55 % pour un panier de biens hexagonaux soit un surcoût moyen de 38,5 %. En 2017, les prix en Nouvelle-Calédonie sont dans leur ensemble de 33 % supérieurs à ceux de l’Hexagone ([33]).

Les outre-mer ont subi la crise du Covid-19 comme tous les territoires, mais peut‑être de façon exacerbée et les tensions d’approvisionnement ont renchéri le coût de la vie.  Néanmoins, on peut saluer les efforts des acteurs locaux qui ont permis de résister à l’impact malgré des phénomènes de congestions liés au stockage des conteneurs vides. Ce phénomène de congestion a notamment été constaté en Guadeloupe et à la Réunion, véritable Hub de l’Océan Indien. Toutefois, la situation s’y résorbe progressivement ([34]).

Cette hausse très sensible des prix du transport pourrait se répercuter à terme par une hausse des prix à la consommation. C’est pourquoi votre rapporteure salue à ce titre la démarche du groupe CMA-CGM qui a gelé ses tarifs depuis le 9 septembre 2021 et demande au Gouvernement d’avoir une attention particulière sur l’évolution des prix notamment outremer, veillant à ce que les approvisionnements puissent être effectués sans encombre.

En ce qui concerne le segment des services offshore, l’effondrement du prix du baril en 2020 a entraîné une chute sévère des investissements offshore, ce qui ne peut qu’enrayer le développement de nouvelles plateformes. Or les investissements offshore sont le moteur de la croissance de cette activité depuis vingt ans. De plus, malgré une remontée du prix du baril, les compagnies pétrolières se montrent frileuses à investir de nouveau à l’offshore, étant donné que nombre d’États affichent des objectifs de décarbonation. Dans ce contexte, le groupe français Bourbon, déjà en position extrêmement difficile avant la crise, peine à retrouver son équilibre.

Le segment de la croisière est l’un des segments les plus durement touchés par la crise du Covid-19. Les paquebots ont été mis à l’arrêt total dans le monde, pour ne reprendre une activité partielle que depuis l’été 2021 en Europe. Dans ce contexte, les petits paquebots de Ponant, de par leur taille et positionnement sur une croisière haut de gamme, bénéficient sans doute, dans le contexte pandémique, d’un avantage relatif en termes d’image vis-à-vis des autres croisiéristes.

Enfin, les ferries ont subi une importante baisse de leur fréquentation de passagers du fait des restrictions imposées aux voyageurs. En revanche, le trafic de fret a nettement mieux résisté et se montre même particulièrement dynamique sur certaines liaisons, telles que celles entre l’Irlande et le continent européen. La situation diffère en fonction des armements. Brittany ferries, qui opère sur le transmanche, a enregistré une baisse d’environ 70 % de son trafic de passagers du fait des restrictions de voyages avec le Royaume-Uni. Le trafic des lignes vers le Maghreb, habituellement très empruntées en été, a fortement chuté en 2020. Les lignes nationales ont un peu mieux résisté à la crise. Corsica Ferries a vu son trafic de passagers baisser « seulement » de 39 % puisque les liaisons ont pu reprendre à peu près normalement pendant l’été. Quant au trafic de passagers des petites lignes nationales (Antilles, Bretagne), il a baissé de 25 à 40 %.

Enfin, le domaine des services portuaires (remorquage, pilotage, lamanage) a subi une baisse d’activité en 2020 puis un redressement en 2021.

2.   La situation du pavillon français

Au 1er janvier 2021, la flotte française comptait 423 navires de plus de 100 UMS (Universal Measurement System) sur lesquels on comptait 190 navires de transport et 233 navires de services maritimes ([35]).

Parmi les 190 navires de transport, 43 appartiennent à la flotte pétrolière et gazière, chiffre qui a considérablement diminué par rapport à 2010 où l’on comptait 70 navires. 66 navires sont des navires de charge, dont 29 des porte‑conteneurs. La flotte de transport de passagers compte 81 navires : 48 navires rouliers à passagers, 18 navires à passagers et 15 paquebots de croisière ([36]). Parmi les 233 navires de services maritimes, on compte 36 navires spécialisés (tels que des câbliers), 57 navires de services offshore et 140 navires portuaires et côtiers ([37]).

On compte 190 navires immatriculés au premier registre (60 navires de transport et 130 navires de services maritimes), 177 navires immatriculés au registre international français (89 navires de transport et 88 navires de services maritimes) et 56 navires immatriculés à des registres d’outre-mer (41 navires de transport et 15 navires de services maritimes) ([38]).

En 2020, les armements français ont employé ([39]) 12 678 marins au commerce ([40]) affiliés à l’ENIM (hors plaisance professionnelle et portuaire). Parmi ces marins, 8 634 étaient embarqués sur les navires immatriculés au premier registre, 2 899 sur des navires immatriculés au RIF (registre international français), 681 sur des navires immatriculés à des registres ultra-marins et 716 sur des navires sous pavillon étranger ([41]). Le nombre des marins, qui augmentait auparavant, a diminué et la durée de navigation a diminué elle aussi. Tous les registres n’ont pas été affectés de la même manière. Ainsi, le nombre des marins qui ont navigué plus de six mois par rapport à 2019 a baissé 21,8 % pour le premier registre en France hexagonale contre 3 % pour le RIF ([42]).

Les marins français embarqués sur des navires immatriculés au RIF sont essentiellement des officiers car, sur ces navires, la majeure partie de l’équipage est d’origine extra-communautaire. Par contre, les navires immatriculés au premier registre emploient non seulement des officiers mais un grand nombre de personnels d’exploitation français. Sur les navires qui n’emploient pas uniquement des marins français, au vu de l’examen de listes d’équipage, la plus grande part des marins étrangers (hors Union européenne), sont originaires des Philippines. Toutefois, on trouve également des marins d’autres nationalités tels que des Ukrainiens, des Malgaches et des ressortissants d’États africains ([43]).

3.   Le financement des aides à la flotte de commerce dans le cadre de l’action 3

Les crédits de paiement de l’action 3 représentent 46,5 % des crédits alloués aux affaires maritimes. Ils augmentent d’un peu plus de 12 % et passent de 79, 51 millions d’euros dans la loi de finances pour 2021 à 89, 42 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022.

La plus grande partie des crédits (65,07 millions d’euros) sert à financer la compensation à l’ENIM (Établissement national des invalides de la marine, en charge des prestations maladie, accidents du travail et vieillesse), à l’ACOSS (Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui verse les prestations sociales familiales) et à Pôle Emploi des allégements de cotisations patronales qui correspondent au dispositif dit du « netwage ». Ce dispositif permet de soutenir l’emploi maritime et de renforcer la compétitivité économique des entreprises de transport ou de services maritimes soumises à une importante concurrence internationale.

Le netwage

Le netwage est un dispositif d’exonérations de cotisations sociales patronales. Il est issu d’un élargissement du champ des exonérations de cotisations sociales prévu par la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, qui a été consolidé par la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

L’article L. 5553-11 du code des transports prévoit que les entreprises d’armement maritime sont exonérées de cotisations sociales ainsi que de la contribution à l’allocation d’assurance contre le risque de privation d’emploi pour les équipages et les gens de mer affiliés à l’ENIM qui sont embarqués à bord des navires de commerce répondant à l’ensemble des conditions suivantes :

– ils sont dirigés et contrôlés à partir d’un établissement stable situé sur le territoire français ;

– ils battent pavillon français ou ils battent pavillon d’un autre État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

– ils sont affectés à des activités de transport ou à des activités de services maritimes soumises aux orientations de l’Union européenne sur les aides d’État au transport maritime, soumises à titre principal à une concurrence internationale.

Une autre partie des crédits de paiement de l’action 3 sert à financer le remboursement par l’État à la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) des charges spécifiques de retraite et d’accident du travail des personnels sédentaires de l’ancienne Compagnie générale maritime (CGM). Ils représentent un montant de 7,75 millions d’euros de crédits de paiement.

Enfin des aides ont été mises en place pendant la crise du Covid-19, dont le financement ne relève pas obligatoirement de l’action 3. Par exemple, le secteur de la flotte de commerce a pu, comme les autres secteurs, bénéficier des mesures de droit commun telles que le dispositif de chômage partiel (article L. 5122-1 du code du travail), le dispositif d’activité partielle de longue durée (article 53 de la loi du 17 juin 2020) ([44])  ou encore les prêts garantis par l’État (article 6 de la loi du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020) ([45]). Les prêts garantis par l’État ont par exemple bénéficié à CMA-CGM ou encore à Brittany Ferries. Les armateurs en difficulté ont également pu bénéficier du fonds de solidarité, institué par l’ordonnance du 25 mars 2020 ([46]). De plus, l’article 65 de loi du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 ([47]) a permis aux entreprises exerçant leur activité dans un secteur particulièrement affecté par la crise (dont le transport transmanche et le transport maritime et côtier de passagers) d’être exonérés du paiement de la part patronale des cotisations et contributions dues au titre des périodes d’emploi comprises entre février et avril 2020 et de bénéficier d’une aide au paiement des cotisations dues au titre de la part salariale à hauteur de 20 % des revenus versés au cours de la même période. Les armateurs du transport de passagers ont ainsi été exonérés des cotisations dues au titre de leur personnel sédentaire en plus des exonérations dont ils bénéficiaient déjà pour leur personnel embarqué ([48]).

Enfin une aide exceptionnelle destinée à sauvegarder les compagnies de ferries en difficulté du fait des restrictions de déplacement imposées aux voyageurs dans le contexte de la crise sanitaire a été mise en place. Elle est équivalente au montant des cotisations salariales dont se sont acquittées ces dernières pour l’exercice 2021. 19,2 millions d’euros de crédits supplémentaires destinés à financer, en 2021 le dispositif ont été ouverts par loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020.

Le dispositif a fait l’objet du décret du 14 mai 2021 ([49]). Il institue une aide trimestrielle aux employeurs de marins affiliés à l’ENIM et communautaires, embarqués sur certains navires à passagers effectuant des trajets internationaux. L’article 2 de ce décret prévoit que son montant est égal « à la somme des montants versés par les entreprises éligibles, pour les marins communautaires au sens des orientations de l’Union européenne sur les aides d’État au transport maritime, employés au cours du trimestre et embarqués sur des navires à passagers, autres que de croisière, effectuant des trajets internationaux », au titre :

– des cotisations personnelles mentionnées au 2° de l’article L. 5553-1 du code des transports ;

– de la contribution sociale généralisée prévue à l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale ;

– de la contribution pour le remboursement de la dette sociale prévue à l’article 14 de l’ordonnance du 24 janvier 1996 ([50]).

Cette mesure d’aide ne constitue pas un remboursement des cotisations versées par l’État aux caisses d’assurance sociale, mais bien un versement direct de l’État au bénéfice des armateurs ou entreprises d’armement maritime. L’aide est versée de manière trimestrielle et rétroactive, pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021. Cette aide exceptionnelle ne s’applique qu’aux lignes régulières internationales hors délégation de service public. De fait, les armateurs exploitant des navires battant pavillon français et bénéficiant d’une délégation de service public ne peuvent en bénéficier. Ainsi, les sociétés Corsica Linea et La Méridionale bénéficient de l’aide exceptionnelle uniquement au titre de l’exploitation de lignes vers le Maghreb. Au premier trimestre 2021, elles ont reçu, respectivement, près de 130 000 euros pour la première et un peu plus de 324 000 euros pour la seconde. Britanny Ferries a en revanche reçu 1,6 million d’euros au premier trimestre ([51]).

Dans le projet de loi de finances pour 2022, ce dispositif exceptionnel de soutien est financé à hauteur de 16,6 millions d’euros par l’action 3.

Lors de la table ronde des Armateurs de France, une alerte a été lancée sur le fait que les ferries qui assurent le lien entre le continent et la Corse ne bénéficient pas complètement du dispositif car ils font l’objet d’une délégation de service public ([52]) sur les lignes qui relient le continent à la Corse. De ce fait, votre Rapporteure appelle de ses vœux le développement d’un dialogue entre l’État, la collectivité et les sociétés de ferries assurant les liaisons avec la Corse pour trouver un autre moyen de les soutenir dans la période difficile qu’elles traversent.

Il faut aussi veiller à ce que le secteur de la croisière, lui aussi affecté par la crise du coronavirus, reste attractif. Votre rapporteure salue à ce propos l’action de M. Sylvain Brial, député de Wallis-et-Futuna qui lui a transmis une contribution écrite à ce sujet. En effet les paquebots de croisière dépendent du registre d’immatriculation de Wallis-et-Futuna.

En 2017, on comptait environ 300 navires de croisière dans le monde ([53]). La France, elle, compte seulement 11 navires de croisière sous son pavillon au 1er janvier 2020 ([54]).

Les navires de croisière sont immatriculés au registre de Wallis-et-Futuna. Ce registre permet aux armateurs de bénéficier d’une certaine flexibilité et au territoire de percevoir les retombées économiques (taxe, tourisme et débouchés professionnels pour les îliens) liées à l’immatriculation des navires. Il n’est pas assimilable à ce qui est classé « pavillon de complaisance » par la Fédération internationale des ouvriers du transport. Tout d’abord, les navires immatriculés au registre de Wallis-et-Futuna ont un lien substantiel avec l’État du pavillon alors que ce lien est considérablement distendu et se limite souvent à la domiciliation de la structure juridique détenant le navire pour les « pavillons de complaisance ». La France exerce sur ces navires une juridiction effective en matière administrative, technique et sociale. De plus, les navires immatriculés au registre de Wallis-et-Futuna sont soumis aux mêmes règles de sécurité, sûreté et prévention de la pollution (en particulier les conventions SOLAS ([55]) et MARPOL ([56])) que les navires qui sont immatriculés au premier registre ou au registre international français. Aucune différence, que ce soit en matière de normes ou en matière d’inspections par l’autorité du pavillon, n’est faite avec les navires au premier registre. En revanche, un navire sous registre des Bahamas va se contenter d’appliquer le standard international fixé par l’Organisation maritime internationale. Enfin, si le socle en matière du droit du travail, est la convention MLC 2006 ([57]), le nombre de jours de congés payés du registre de Wallis-et-Futuna va au-delà de celui prévu par la MLC 2006 (3 jours par mois contre 2,5 jours). En outre, dans les domaines du droit du travail non couverts par la MLC 2006 tels que les modalités de rupture des contrats, leur durée des contrats ou la durée légale du travail, le registre de Wallis‑et-Futuna s’appuie sur la loi du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires d’outre-mer ([58]).

Votre rapporteure constate l’urgence de sécuriser la situation sociale des personnels marins et hôteliers, qui ont toute leur place à l’ENIM et d’harmoniser leur situation fiscale avec le RIF, et de faciliter la mise en œuvre de l’article 51 de la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue ([59]), qui permet l’installation de casinos à bord des navires.

Votre rapporteure appelle de ses vœux une convergence des règles applicables en matière fiscale et en matière d’affiliation à l’ENIM des personnels naviguant sur des navires immatriculés à Wallis-et-Futuna. Ces mesures permettront d’attirer de jeunes officiers français sur les navires de ce registre, ce qui constituera un débouché pour les formations françaises. En outre, cela permettra d’assurer l’attractivité de ce registre. Il est en effet indispensable que la France conserve une flotte de croisière sous pavillon français alors que la majeure partie des navires de croisière sont inscrits sous des pavillons « de complaisance ».

Il convient de saluer la simplification des procédures administratives, avec la mise en place d’un guichet unique du registre Wallis à Marseille, où il y a déjà le guichet unique du RIF.

Certes, l’ENIM est dans une situation difficile. Toutefois, en attendant une réforme des retraites qui conduirait à réexaminer l’ensemble du système et à le rendre plus lisible, il est indispensable d’agir dès maintenant. Du fait de l’article 70 de la loi de finances de 1910, les marins naviguant sur un navire immatriculé au registre de Wallis-et-Futuna ne peuvent être affiliés à l’ENIM sauf s’ils l’ont été avant d’embarquer sur un navire immatriculé à ce registre. Plusieurs pistes se dessinent : une intégration de l’ensemble des personnels marins et hôteliers qui travaillent à bord des navires immatriculés au registre de Wallis-et-Futuna à l’ENIM, la création d’une catégorie « personnel de croisière » à l’ENIM ou encore la consolidation, pour ces personnes, d’un droit social dans les domaines couverts par l’ENIM en partenariat avec Wallis-et-Futuna.

En outre, votre rapporteure souhaiterait que les marins français naviguant sur les navires inscrits au registre de Wallis puissent être exonérés d’impôt sur le revenu, comme c’est le cas pour les marins naviguant sur des navires immatriculés au RIF. En effet, le 2° du I de l’article 81 A du code général des impôts prévoit que cette exonération est de droit quand les marins ont navigué « pendant une durée supérieure à cent quatre-vingt-trois jours au cours d’une période de douze mois consécutifs ».

Des efforts doivent encore être accomplis pour garantir la pleine application de l’article 51 de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue. Cet article a ouvert la possibilité d’installer, sous des conditions précisément définies, des casinos à bord des navires. Or, aujourd’hui, cette disposition n’a pas encore été mise en œuvre. Selon les armateurs concernés, les règles actuellement posées pour la mise en œuvre du dispositif le rendent trop complexe pour que cette possibilité puisse être utilisée.

Sur l’ensemble de ces sujets (affiliation à l’ENIM, exonération de l’impôt sur le revenu, mise en place de la loi autorisant les casinos à bord des navires), votre rapporteure demande la mise en place rapide d’un groupe de travail interministériel réunissant les ministères de la Mer, des Transports, des Outre-Mer, des Affaires sociales et de l’Économie, des Finances et de la Relance. Ce groupe doit travailler en partenariat avec la collectivité de Wallis-et-Futuna, les armateurs concernés et les représentants des gens de mer.

D.   L’action 4 « Action interministérielle de la mer »

Les crédits de paiement de l’action 4 représentent 14,1 % des crédits alloués aux affaires maritimes. Ils augmentent de 120 % et passent de 13 millions d’euros dans la loi de finances pour 2021 à 28,77 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022. Ce budget finance des services et actions essentiels pour la préservation de l’environnement marin et la sécurité maritime.

7,8 millions d’euros sont affectés au dispositif de contrôle et de surveillance (DCS) qui participe à l’exercice des missions de police en mer, missions qui vont de la police de la navigation maritime à la police des pêches maritimes. Les crédits de fonctionnement représentent 5,36 millions d’euros et sont utilisés pour les unités littorales des affaires maritimes des directions départementales des territoires et de la mer, les navires hauturiers des directions interrégionales de la mer ou encore pour des actions transversales comme la maintenance des systèmes d’information pour le contrôle des pêches.

2,62 millions d’euros contribuent au financement du dispositif POLMAR-terre. Les crédits de fonctionnement sont de 1,3 million d’euros. Ils servent notamment à l’entretien des bâtiments et au maintien des matériels en conditions de fonctionnement. Les crédits d’investissement sont de 0,78 million d’euros. Ils peuvent permettre l’acquisition de barrages flottants anti-pollution, de récupérateurs pour produits visqueux, pompes ou encore d’embarcations. 0,18 million d’euros sont des dépenses d’intervention, qui consistent en une subvention accordée au Centre de documentation, de recherche et d’expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux.

Au regard des crédits accordés au soutien de la flotte de commerce, les crédits de l’action 4 sont trop faibles eu égard aux enjeux de protection de l’environnement marin et de lutte contre ces pollutions. Ce point sera développé dans la troisième partie.

Enfin, 17,72 millions d’euros sont attribués aux actions de coordination mer et littoral et permettent d’abonder un fonds d’intervention maritime (FIM), création qui est à saluer. La Stratégie nationale pour la mer et le littoral publiée en février 2017, doit être déclinée dans chaque façade maritime de la France hexagonale ou bassin d’outre-mer par des documents stratégiques de façades (DSF). Ces documents sont actuellement en cours de finalisation et devraient être mis en œuvre en 2022 dans plusieurs domaines. Leur mise en œuvre passera notamment par des actions du FIM sur le dragage (pour valoriser durablement les sédiments) ou encore l’industrie nautique (le FIM cible le soutien aux innovations à destination des usagers, notamment via le lancement d’appels à projets partenariaux et la mise en place de filières de déconstruction des navires).

Néanmoins, ces crédits sont bien loin de permettre de faire face à l’ensemble des problématiques qui affectent les littoraux. Votre rapporteure est consciente du fait qu’une partie des crédits qui permettent de lutter contre les risques sur le littoral proviennent d’autres programmes que le programme 205 (et en particulier, le programme 181). Toutefois, le FIM ne pourra seul suppléer aux carences qui restent en la matière.

Votre rapporteure propose de mettre en place dès maintenant un plan « Avenir littoral ».

Si les outre-mer sont particulièrement exposés aux risques liés au changement climatique du fait de l’insularité qui les concerne dans leur majorité, l’ensemble des littoraux sont en fait concernés. La France compte, hors espaces ultra-marins, 5 800 kilomètres de côtes. Les fortes densités touristiques en été, l’élévation du niveau de la mer ou encore le recul du trait de côté les affectent fortement et font peser des responsabilités immenses sur les épaules des élus des communes littorales. Un quart des côtes de France hexagonale est déjà affecté par l’érosion. Le risque de submersion marine concerne, à l’aune d’un événement d’occurrence centennale, 590 000 hectares de terres, soit 1 % du territoire, et 165 000 bâtiments répartis sur 864 communes ([60]). 1,4 million de nos concitoyens vivent dans des zones inondables ([61]).

Au vu de ces enjeux, votre rapporteure considère qu’il serait nécessaire de créer un programme dédié au plan « Avenir littoral » qu’elle appelle de ses vœux. Ce plan peut contribuer à répondre à une partie des attentes des élus du littoral. En effet, lors des journées d’études organisées par l’Association des élus du littoral à Pornic les 7 et 8 octobre dernier, ceux-ci ont lancé un appel demandant notamment qu’une stratégie d’ensemble soit élaborée pour permettre d’adapter les littoraux au changement climatique ([62]). Dans cette dynamique, veillons à ce que les décisions soient adaptées aux spécificités locales en s’appuyant sur un processus de déconcentration voire de décentralisation.

Ce plan permettra de renforcer la résilience et d’accompagner les collectivités territoriales et les entreprises dans les transformations à venir. Outre la consolidation des connaissances par la cartographie des zones à risques et l’analyse des impacts que le changement climatique aura sur ces zones, il est nécessaire de former les élus, les accompagner, mettre en œuvre les outils de planification pour leur permettre d’assurer la bonne information des populations concernées et leur implication dans des dispositifs de concertation. Ces efforts doivent amener l’ensemble des acteurs et citoyens à développer une culture du risque, qui peut aussi passer par l’organisation d’exercices. Hormis les moyens de protection immédiats, il faudra accompagner les collectivités, les entreprises et les populations dans les investissements qu’elles auront à réaliser – et qui seront d’autant plus coûteux que nous attendrons longtemps.

E.   L’action 5 « Soutien au programme »

Les crédits de paiement de l’action 5 représentent 4,1 % des crédits alloués aux affaires maritimes. Ils augmentent de 17,8 % % et passent de 7,26 millions d’euros dans la loi de finances pour 2021 à 8, 55 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2022 ([63]).

Ces crédits regroupent essentiellement le budget relatif au fonctionnement courant de l’administration centrale et des services déconcentrés (6,05 millions d’euros). Il comprend également 1,48 million d’euros de crédit d’investissement, qui servent notamment à des investissements informatiques.

II.   L’action 43 DU programme 203

Si la plus grande partie du programme 203 n’entre pas dans le périmètre du présent avis car ce programme est surtout consacré aux infrastructures ferroviaires, routières et aéroportuaires, il convient toutefois d’évoquer ici les crédits de l’action 43, qui représentent 2,6 % des crédits du programme. Ils restent stables par rapport à la loi de finances pour 2021 et représentent 99,86 millions d’euros ([64]).

L’essentiel des crédits de paiement de cette action (92,7 millions d’euros) sert à financer l’entretien des accès et pour répondre au sous-financement chronique des opérations de dragage des grands ports maritimes sur lequel les rapporteurs pour avis successifs du budget des affaires maritimes pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’avaient cessé d’alerter le Gouvernement au cours des années précédentes.


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   DeuxiÈme partie : la dÉcarbonation du secteur maritime

Selon l’étude de l’Organisation maritime internationale (OMI) sur les gaz à effet de serre publiée en 2014, les émissions de CO2 imputables à l’ensemble des transports maritimes représentaient environ 938 millions de tonnes en 2012, dont la plus grande partie (796 millions de tonnes) provenait des transports maritimes internationaux, qui est responsable d’environ 2,2 % des émissions mondiales de CO2. Les principaux émetteurs de CO2 étaient les porte-conteneurs (205 millions de tonnes), les vraquiers (166 millions de tonnes) et les pétroliers (124 millions de tonnes) ([65]).

En effet les émissions de CO2 sont corrélées à la consommation de combustible par les navires et la plupart des navires de commerce utilisent le moteur diesel comme propulsion principale (le diesel est également utilisé pour les groupes électrogènes auxiliaires). Si cette technologie est attractive parce qu’elle est simple à entretenir, fiable, robuste et économe en combustible, elle est fortement émettrice de CO2, de particules fines, d’oxydes d’azote (NOx), d’oxydes de soufre (SOx) et de composés organiques volatils. Le CO2 est un gaz à effet de serre, identifié comme la principale cause du réchauffement climatique global sur le long terme. Les NOx et les SOx ont un impact environnemental important car ils peuvent entraîner des pluies acides, aux effets nocifs avérés sur la flore et les sols. Une problématique spécifique est liée aux carburants employés par les grands navires de commerce (tankers, ferries, vraquiers). En effet, ceux-ci utilisent comme carburant du fioul lourd, qui a une très forte teneur en soufre.

I.   Les mesures prises au niveau international

Des mesures ont été prises au niveau international pour réduire les émissions polluantes des navires. L’adoption, le 26 septembre 1997, de l’annexe VI ([66]) de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (dite « Convention MARPOL ») du 2 novembre 1973 ([67]), élaborée dans le cadre de l’Organisation maritime internationale (OMI), traduit la prise de conscience de la question des pollutions atmosphériques causées par les navires.

La convention MARPOL autorise les navires à utiliser des carburants contenant au maximum 0,5 % de soufre. Cette teneur, de plus de 7 % initialement, a été abaissée progressivement depuis les 30 dernières années, pour atteindre ce taux au 1er janvier 2020.

La convention MARPOL prévoit aussi la possibilité pour les États parties à la convention de demander la mise en place de zones de contrôle des émissions (dites « ECA » ([68])) plus contraignantes, dédiées aux émissions de SOx (« SECA ») ou de NOx (« NECA) ». Dans les SECA, la limite pour les émissions de soufre, qui était de 1 % depuis le 1er juillet 2010, est passée à 0,1 % à partir du 1er janvier 2015. Le calendrier de limitation des émissions de NOx se fonde quant à lui sur trois niveaux d’émissions de référence auxquels doivent se conformer les navires en fonction de l’année de l’installation de leur moteur (en effet, les émissions de NOx dépendent de la motorisation installée et non de la qualité du carburant). Plus la construction du navire est récente, plus les limitations sont rigoureuses.

Les espaces maritimes français de la Manche et de la mer du Nord situés à l’Est du cinquième méridien Ouest sont placés en zone SECA depuis le 1er janvier 2015 et en zone NECA depuis le 1er janvier 2021. Par ailleurs, dans tous les ports de l’Union européenne, depuis 2010, les navires à quai ou au mouillage plus de deux heures doivent utiliser un fioul dont la teneur en soufre ne dépasse pas 0,1 % en masse.

La situation est différente en Méditerranée. Pour édicter une zone SECA, les États doivent d’abord déposer un dossier auprès de l’Organisation maritime internationale qui s’appuie sur une étude du trafic maritime, des émissions polluantes et de leurs conséquences sanitaires et environnementales. La France a lancé en 2017 une étude d’impact pour déterminer le bénéfice sanitaire, environnemental et économique apporté par une telle zone en Méditerranée. L’Union européenne et l’organisme de coopération maritime méditerranéen REMPEC ont également conduit des études. En décembre 2019, tous les États méditerranéens réunis au sein de la Convention de Barcelone se sont mis d’accord sur l’objectif de mise en place d’une zone SECA à la condition que des études socio-économiques supplémentaires soient effectuées. En effet, certains pays insulaires et de la rive Sud craignent que la mise en place de cette zone ne représente un poids économique trop lourd (le fuel peu soufré coûte plus cher que le fuel classique). La Commission européenne a donc lancé un appel à projet en juin 2020 dans le cadre de son programme LIFE. Elle vise à mener une étude sur trois ans permettant de répondre aux inquiétudes des pays réticents et de mettre à jour les données nécessaires au dépôt du dossier à l’OMI. La direction des affaires maritimes a constitué un consortium avec des organisations non gouvernementales, des fondations, des instituts de recherche internationaux ainsi que les ministères de l’environnement italien et néerlandais. Celui-ci a remporté l’appel d’offres et, en décembre 2020, il a signé une convention avec la Commission européenne pour lancer des études complémentaires. Par ailleurs, la Direction des affaires maritimes a procédé de même en janvier 2020 avec le CEREMA et le CITEPA (Centre technique de référence en matière de pollution atmosphérique et de changement climatique) dont les résultats pourront venir en complément ([69]).

En avril 2018, l’OMI a adopté une stratégie pour éliminer les émissions de CO2 des navires. Cette stratégie fixe deux objectifs intermédiaires. Le premier est de réduire les émissions de CO2 par activité de transport d’au moins 40 % d’ici 2030 et de 70 % d’ici 2050 (en prenant l’année 2008 comme année de référence). Le second objectif est de réduire le volume total des émissions annuelles de gaz à effet de serre d’au moins 50 % en 2050 par rapport à 2008. En application de cette stratégie et en vue de l’atteinte de l’objectif fixé pour 2030, de premières mesures réglementaires ont été adoptées en juin 2021. Elles définissent des indices et cibles annuelles de réduction d’intensité carbone obligatoire par types de navires sur la décennie 2020 pour l’ensemble des navires existants, afin d’encourager les opérateurs des navires de mettre en œuvre des mesures techniques et opérationnelles de leur choix :

– travail sur la forme des carènes ;

– limitation de la puissance des moteurs ;

– dispositifs renforçant l’efficacité de la propulsion ;

– installation de dispositifs d’assistance vélique à la propulsion ;

– mise en place de systèmes de récupération de chaleur ;

– mise en place de systèmes de lubrication par l’air ;

– optimisation du routage ;

– navigation à vitesse réduite ;

Pour soutenir cette dynamique, la France a déposé en 2019 un projet auprès de l’OMI pour réduire la vitesse des navires ([70]). Il s’agit d’un outil extrêmement efficace et aisé à mettre en place pour réduire les émissions de CO2. La consommation de carburant augmente par rapport à la vitesse du navire selon une fonction cubique. Dans ces conditions, une réduction de 10 % de la vitesse d’un navire conduit à une réduction de 20 % de la consommation de carburant ([71]). Suite à la crise économique de 2007, la vitesse des navires a été réduite pour des raisons d’économies, ce qui a entraîné une baisse de la consommation journalière de combustible d’environ 27 % et les émissions de CO2 des vraquiers, des porte‑conteneurs et des pétroliers ont diminué. En ce qui concerne les pétroliers, on a constaté que les émissions de CO2 avaient baissé de 20 % entre 2007 et 2012 ([72]). Par ailleurs, la réduction de la vitesse des navires ne nécessite aucune modification technique et donc aucun investissement coûteux.

En outre, lors du débat sur la loi d’orientation des mobilités qui a eu lieu en 2019, l’Assemblée nationale a adopté un amendement (devenu l’article 147 de la loi) qui prévoit que la France doit défendre au niveau de l’Organisation maritime internationale une stratégie ambitieuse de réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques en navigation internationale. Cet article prévoit également que l’État doit engager une concertation avec l’ensemble des parties prenantes pour définir une stratégie pour accélérer la transition vers une propulsion neutre en carbone à l’horizon 2050 pour l’ensemble des flottes de commerce, de transport de passagers, de pêche et de plaisance sous pavillon national.

II.   les mesures prises au niveau national

Si les navires peuvent également chercher à améliorer leur efficacité énergétique, le secteur ne pourra accomplir sa décarbonation complète uniquement par des mesures d’efficacité énergétique. Une profonde mutation technologique des modes de propulsion des navires est nécessaire. Elle doit être enclenchée le plus rapidement possible compte tenu de la durée de vie moyenne d’un navire (20 à 30 ans selon les types de navires). Aucun navire zéro-carbone commercialement viable ne semble prêt avant 2028-2030 selon la direction des affaires maritimes ([73]).

Toutefois, la France a mis en place des outils permettant aux armateurs français d’engager une démarche de transition écologique. L’article 56 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a mis en place un mécanisme de suramortissement destiné à favoriser la décarbonation du transport maritime. Ce dispositif a été ajusté par l’article 48 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, notamment pour être rendu compatible avec le droit européen. Le principal problème soulevé par la Commission européenne à laquelle le dispositif avait été notifié était que l’assiette retenue était la totalité du coût du navire en cas de construction neuve, ce qui était excessif car l’aide ne devait porter que sur le surcoût relatif au caractère écologiquement vertueux du navire.

Le dispositif de suramortissement est codifié à l’article 39 decies C du code général des impôts. Celui-ci prévoit que les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu selon un régime réel d’imposition peuvent déduire de leur résultat imposable une somme égale à une partie des coûts supplémentaires immobilisés (hors frais financiers) directement liés à l’installation d’équipements, acquis à l’état neuf, permettant l’utilisation de certaines énergies propulsives « vertes » comme énergie propulsive principale.

Pour ce suramortissement, le taux de déduction est de 125 % « des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l'installation d'équipements, acquis à l'état neuf » permettant le recours à une propulsion décarbonée (comme l’hydrogène, la propulsion par le vent…) ou la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale. Si le développement de la propulsion à l’hydrogène est peu avancé, la France est en revanche un pays pionnier du vélique et il convient de ne pas lui laisser perdre son avantage compétitif dans ce domaine. Certes il s’agit d’un marché encore peu développé (il y a aujourd’hui 35 navires à propulsion vélique en opération ([74]). Toutefois, ce secteur prometteur permet non seulement de réduire les émissions polluantes mais aussi les bruits sous-marins, qui ont un impact sur la biodiversité marine.

Le vélique, une énergie à nouveau prometteuse

De réelles opportunités sont en train de se concrétiser, avec le soutien d’acteurs industriels majeurs. C’est le cas par exemple du projet de navire Canopée, réalisé pour le compte de Ariane Group et destiné au transport des différents éléments de sa fusée Ariane 6, de l’Europe jusqu’au centre spatial de Kourou en Guyane. Il s’agit d’un navire roulier à voile de 121 mètres de long pour 23 mètres de large équipé de quatre ailes articulées rigides de 375 m² et d’une propulsion mécanique diesel peu polluante. Il permettra une réduction de 35 % des émissions polluantes. Ce navire, conçu par Zéphyr et Borée, sera construit et exploité par Alizés, une joint venture réalisée avec Jifmar Offshore Service, partenaire de Zéphyr et Borée. Le lancement du navire est prévu pour 2022.

Lors de l’audition qu’elle a accordée à l’association Windship, qui regroupe les acteurs du secteur, votre rapporteure a été marquée par le caractère innovant et la diversité des projets.

Par exemple, TOWT propose un projet de « voilier cargo » qui est une solution alternative aux porte-conteneurs conventionnels et emploie des jeux de voiles souples. Il dispose d’une capacité de chargement 1 100 tonnes et peut naviguer à une vitesse moyenne de 10,5 nœuds. Il permet d’éviter la consommation de 18 grammes de CO2 par tonne et par kilomètre (ce qui équivaut à une réduction de 2 400 tonnes de CO2 par an). Le lancement du premier navire est prévu d’ici 2023 et trois sisterships (navires jumeaux) doivent voir le jour d’ici 2026.

Les chantiers de l’Atlantique ont quant à eux travaillé sur un projet de voile rigide « Solidsail ». Cette voile possède une performance équivalente aux voiles souples et a l’avantage d’être facile à manœuvrer indépendamment de la direction du vent et d’avoir une durabilité de 25 ans. Des tests ont été réalisés sur des navires à partir de 2016. En particulier, ce système a été testé pendant un an d’exploitation aux Antilles et sur deux traversées de l’Atlantique. La prochaine étape est la validation en 2022 d’un démonstrateur pour grands navires et les Chantiers de l’Atlantique prévoient de livrer un à deux navires par an à partir de 2025.

CWS propose quant à lui une voile-aile automatisée rigide qui peut être utilisée pour le rétrofit des navires. Deux démonstrateurs ont déjà été réalisés.

Les voiles ne sont pas le seul élément de la propulsion vélique, qui peut aussi faire appel à des ailes de cerf-volant. Une telle solution est développée par Airseas.

Le suramortissement est un peu moindre pour le GNL que pour les énergies décarbonées comme le vélique. Le taux de déduction est de 105 % « des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l'installation d'équipements, acquis à l'état neuf, » permettant l’utilisation du GNL comme énergie propulsive principe ou pour produire l’énergie électrique destinée à la propulsion principale. L’usage du GNL supprime les émissions de soufre et les émissions de particules, réduit drastiquement les émissions d’oxydes d’azote et diminue de près d’un quart les émissions de dioxyde de carbone. De ce fait, un certain nombre d’armateurs y ont déjà recours, notamment pour naviguer dans les zones SECA et NECA. Environ 300 navires dans le monde sont actuellement propulsés au GNL ([75]). Certains armateurs français ont déjà franchi le pas pour leurs prochaines unités, tels que Brittany Ferries ou CMA-CGM. Au total, le nombre de porte-conteneurs au GNL du groupe CMA CGM s’élèvera donc à 44 unités, dont treize ont déjà été livrées ([76]). Si seuls 26 navires de la CMA-CGM sont actuellement sous pavillon français ([77]), la CMA-CGM a annoncé qu’une partie des navires propulsés au GNL doit être sous pavillon français ([78]). En outre le récent paquebot brise-glace Commandant Charcot de la compagnie du Ponant est aussi propulsé au GNL. Enfin, le recours au GNL peut aussi passer par le « rétrofitage » des navires. Ainsi, dans le domaine des services maritimes, une drague, le Samuel de Champlain, a déjà été convertie avec succès au GNL ([79]). Toutefois, lors de son audition, la plate-forme GNL a indiqué que le mécanisme des garanties d’origine ([80]) n’est pas satisfaisant pour le GNL utilisé comme carburant marin en France. En effet, le gaz issu d’énergies fossiles (y compris du gaz de schiste) et le biométhane sont mélangés dans les réseaux de transport. De ce fait, en France, l’acheteur de GNL ne peut bénéficier du mécanisme des garanties d’origine (valorisable financièrement) alors qu’il le peut dans d’autres pays. Cette situation l’incite à aller s’approvisionner dans les ports de ces pays (par exemple à Rotterdam) et à délaisser les ports français. Or, dans une logique d’optimisation, les navires vont charger et décharger leur marchandise dans les ports où ils se ravitaillent en carburant. Cette situation est donc susceptible de réduire la compétitivité des ports français.

L’article 39 decies C du code général des impôts prévoit également une déduction de 85 % des coûts supplémentaires immobilisés (hors frais financiers) directement liés à l’installation de scrubbers acquis à l’état neuf. Il s’agit de tours de lavage dans lesquelles les fumées d’échappement des moteurs passent pour être purifiées, soit par lavage à l’eau de mer soit par lavage à d’eau douce avec un réactif basique. Les scrubbers permettent de réduire les émissions de SOx mais pas celles de gaz à effet de serre ni celles de NOx (toutefois l’installation sur le scrubber d’une sorte de pot catalytique appelé « selective catalytic reduction » permet de traiter les NOx). Par ailleurs, dans le cas de scrubbers à boucle ouverte, l’eau de lavage est rejetée à la mer, ce qui peut générer des pollutions et cette solution n’est donc pas la plus optimale, même si les scrubbers ont un effet positif pour la réduction de la pollution de l’air, notamment dans les ports.

Enfin, l’article 39 decies C prévoit également une déduction de 20 % de la valeur d’origine (hors frais financiers) des biens acquis à l’état neuf s’ils sont destinés :

– à permettre l’alimentation électrique durant l’escale par le réseau terrestre ou au moyen de moteurs auxiliaires utilisant le gaz naturel liquéfié ou une énergie décarbonée ;

– à compléter la propulsion principale du navire ou du bateau par une propulsion décarbonée,

Certains acteurs du vélique ayant exprimé des inquiétudes quant à l’éligibilité du vélique à l’article 39 decies C du code général des impôts, votre rapporteure a interrogé la direction des affaires maritimes qui lui a confirmé que le 1° et le 4° du I de cet article (ainsi que les dispositions correspondantes dans le III, qui concernent le crédit-bail) s’appliquaient au vélique. Les acteurs du vélique s’inquiètent toutefois de la définition qui sera donné des notions de « propulsion principale » et « propulsion auxiliaire » lorsqu’il y aura lieu d’appliquer l’article 39 decies C au vélique. En effet, des navires comme le navire Canopée sont propulsés à la voile mais ont aussi un moteur qui fonctionne au diesel.

L’ensemble des dispositions de l’article 39 decies C du code général des impôts s’applique non seulement en cas d’achat des navires et équipements mais aussi en cas de recours aux dispositifs du crédit-bail ou de la location avec option d’achat. Le dispositif prend fin au 31 décembre 2024. Il est applicable aux navires de commerce battant pavillon d’un des États membres de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen. En revanche, les navires de pêche ne sont pas visés par cet article et le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins a indiqué lors de son audition que le verdissement de la flotte de pêche manquait fortement de soutien. L’effort de verdissement est d’autant plus difficile pour les pêcheurs qu’il ne s’agit pas en général de gros armements mais de patrons pêcheurs individuels qui ne sont pas forcément regroupés collectivement.

À ce jour, aucun navire visé par l’article 39 decies C du code général des impôts n’a encore profité de ce dispositif. C’est pourquoi l’article 8 du projet de loi de finances pour 2022 a cherché à lever deux freins dans sa rédaction.

Tout d’abord, cet article prévoit que, pour bénéficier du dispositif, les navires armés au commerce doivent effectuer un nombre minimal d’escales dans les ports français (plus de 30 % par an) ou un temps de navigation minimal dans la zone économique exclusive (plus de 30 % par an). C’est pourquoi l’article 8 supprime ces conditions. Le champ des navires concernés par le dispositif s’étend donc et peut par exemple englober les porte-conteneurs. Le dispositif devient ainsi plus attractif pour les armateurs. Si ce dispositif était initialement calibré pour lutter contre la pollution dans les ports, il devient désormais un outil permettant de lutter contre la pollution dans les zones maritimes, qui n’est pas spécifiquement française mais mondiale.

Par ailleurs, les technologies en matière de propulsion évoluent rapidement. C’est pourquoi l’article 8 du projet de loi de finances étend le suramortissement prévu pour le GNL au gaz de pétrole liquéfié, au gaz naturel comprimé, à l’ammoniac, au méthanol, à l’éthanol et au diméthyl éther. La rédaction de cette disposition a été modifiée par l’adoption en première lecture en séance publique d’un amendement n°I-1390 de M. Laurent Saint-Martin, rapporteur des finances et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis pour la commission du développement durable. Cet amendement, dont la commission du développement durable est à l’origine, prévoit de remplacer la liste des carburants « fermée » proposée par le Gouvernement par une formule plus ouverte visant les « carburants dont les performances en matière d’émissions de dioxyde de carbone, d’oxydes de soufre, d’oxydes d’azote et de particules fines et ultra-fines sont au moins équivalentes à celles du gaz naturel liquéfié ».

Enfin, pour éviter les « effets d’aubaine », l’article 8 complète l’article 39 decies C pour plafonner le montant des coûts d’investissement supplémentaires éligibles à la déduction fiscale définie par cet article. Ce plafonnement est de 15 millions d’euros par navire, lorsque les équipements acquis permettent l’utilisation d’une des sources d’énergie mentionnées au 2° du I de l’article 39 decies C (GNL et autres carburants aussi efficaces). Le plafonnement est de 10 millions d’euros par navire pour les coûts supplémentaires immobilisés liés à l’acquisition de « scrubbers ». En outre, l’article 8 modifie l’article 39 decies C pour limiter les cas de recours au dispositif de suramortisssement dans les situations de location avec option d’achat ou de crédit-bail aux cas où il a été opté pour la taxe au tonnage ([81]). Cela doit permettre d’éviter des effets d’aubaine et de garantir que l’aide fiscale aura bien des retombées nationales en termes économiques.

Toutefois, le dispositif de suramortissement ne s’applique qu’aux navires battant pavillon français. De ce fait, il ne constitue pas un outil adéquat pour soutenir les équipementiers français qui développeraient des technologies décarbonées, et notamment véliques, vendues à des armateurs étrangers. Cela peut notamment être le cas pour les Chantiers de l’Atlantique. Toutefois, les entreprises françaises qui conçoivent des navires à propulsion vélique ne peuvent uniquement s’approvisionner en France pour tous les composants, comme il l’a été indiqué lors des auditions. De ce fait, votre rapporteure appelle de ses vœux la mise en place d’un instrument spécifique venant en complément du suramortissement pour soutenir les équipements innovants décarbonés produits en France.

En outre, l’article 8 du projet de loi de finances ne prévoit pas d’amélioration du dispositif de soutien à la propulsion vélique auxiliaire. Votre rapporteure appelle de ses vœux à rehausser le taux de la propulsion vélique auxiliaire prévue à l’article 39 decies C du code général des impôts. En effet, la plupart des projets de navires utilisant la propulsion vélique sont des projets à propulsion vélique auxiliaire. Afin de rendre le dispositif applicable et de donner de la visibilité à la filière, aux motoristes et aux équipementiers, il est essentiel d’appliquer un taux cohérent et incitatif d’au moins 85 % au regard du caractère décarboné de cette énergie et des taux prévus aux 1°, 2°, et 3° du I de cet article.

 


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   TroisiÈme partie : la lutte contre la pollution en mer

I.   Des rÈgles internationales pour lutter contre la pollution

La lutte contre les pollutions passe par la mise en œuvre de conventions internationales adoptées dans le cadre de l’Organisation maritime internationale.

Ainsi, les rejets en mer sont réglementés par la convention MARPOL. Elle vise à prévenir et à réduire au minimum la pollution due aux navires, qu’elle soit accidentelle ou découle d’opérations de routine. Pour ce faire, elle interdit ou encadre les modalités de rejets par les navires selon la catégorie de produit et la zone géographique. Elle compte à ce jour six annexes :

– l’annexe I porte sur la prévention de la pollution par les hydrocarbures liés à l’exploitation ainsi qu’aux rejets accidentels ;

– l’annexe II précise les critères applicables aux rejets d’environ 250 substances liquides nocives transportées en vrac (elles doivent être soit déchargées dans des installations de réception, soit, pour les moins nocives, rejetées à plus de 12 miles des côtes) ;

– l’annexe III contient des prescriptions concernant les substances nuisibles transportées en mer par colis ;

– l’annexe IV concerne la pollution par les eaux usées ;

– l’annexe V traite des différents types de déchets ;

– l’annexe VI fixe des limites aux émissions d’oxyde de soufre et d’oxyde d’azote provenant des gaz d’échappement des navires et interdit les émissions délibérées de substances qui appauvrissent la couche d’ozone.

Le contrôle de l’application de la Convention MARPOL est réalisé en France par les agents des centres de sécurité des navires. En 2020, 41 écarts aux dispositions de la Convention (toutes annexes confondues) ont été relevés sur 40 navires étrangers et ont conduit, dans six cas à retenir le navire au port ([82]).

Il ne faut pas seulement s’attacher à la pollution causée par la marine de commerce liée aux rejets de substances polluantes. Comme l’a souligné Mme Élodie Martinie-Cousty, pilote du réseau Océans, Mers et Littoral de France Nature Environnement lors de son audition, les pollutions peuvent aussi provenir d’actions antérieures. Par exemple, pendant des années, la mer a été polluée par les rejets radioactifs de La Hague. Plus loin encore dans le temps, des navires chargés de bombes contenant des armes tels que des gaz toxiques du temps de la Première guerre mondiale ont été coulés. Ils constituent aujourd’hui une menace pour la biodiversité en cas de rouille des fûts et un retraitement à terre par l’Armée serait indispensable pour éviter des dommages futurs. Votre rapporteure vous soumettra une proposition de rapport d’impact de ce retraitement.

Il faut aussi mentionner la pollution importante liée aux 193 essais nucléaires dont 46 tirs aériens et 137 souterrains réalisés sur les atolls de Moruroa et Fangataufa en Polynésie française, d’une énergie 800 fois supérieure à celle de la bombe d’Hiroshima. La succession de ces tirs a largement endommagé la structure de l’atoll de Moruroa, provoquant des failles importantes, la disparition de motus sous les eaux et des effondrements rocheux depuis les parois sous-marines générant des risques de vagues de tailles importantes en surface. Les déchets produits par ces expérimentations et le démantèlement des installations ont été stockés sur place dans des puits ou immergés dans les eaux territoriales françaises. Ils font l’objet d’une surveillance permanente et de rapports annuels ([83]).

Notre rapport s’attache principalement aux pollutions liées aux activités maritimes actuelles. Aux rejets de produits toxiques en mer s’ajoute désormais le problème de la perte de conteneurs. Toutes les pertes de conteneurs ne sont pas signalées mais ce phénomène devient de plus en plus préoccupant. Par exemple, le porte-conteneurs Svendborg Maersk a perdu 517 conteneurs en 2014 au large des côtes bretonnes. L’ONG Surfrider Foundation Europe estime que 16 635 conteneurs ont été perdus entre 1994 et mars 2019. Pour la période 2008-2016, l’estimation du World Shipping Council est en moyenne de 1 582 conteneurs par an ([84]). Un conteneur perdu en mer devient un déchet et donc une source de pollution, en raison de son contenu (plastique, produits chimiques) ou du conteneur lui-même (matériaux, revêtement, peinture). De plus, il peut mettre en danger les populations quand il dérive vers le rivage, risquant de s’échouer sur les côtes en dispersant son contenu. Même s’il ne contient pas de matière dangereuse, un conteneur peut être potentiellement dangereux : pour des raisons sanitaires et de lutte contre les parasites, un conteneur peut être sous fumigation et ces fumigations sont létales pour l’homme.

Pour limiter la perte de conteneurs en mer, un amendement a été apporté par la résolution MSC380(94). à la convention SOLAS ([85]). Cette résolution, qui date du 21 novembre 2014, prévoit que la masse brute du conteneur doit être vérifiée. La responsabilité de la vérification incombe au chargeur, qui en fait part au terminal et au transporteur. Par ailleurs, la convention MARPOL oblige les capitaines de navires à déclarer les pertes de conteneurs mais l’application de cette convention s’avère limitée selon le ministère de la mer ([86]).

Toutefois, il est nécessaire d’aller plus loin. En effet, aux termes du c du 4 de l’article premier de la Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves ([87]), tout objet qui est perdu en mer par un navire et qui est échoué, submergé ou à la dérive en mer est considéré comme une épave. Les conteneurs perdus en mer devraient donc être considérés comme relevant du champ d’application de cet article. C’est pourquoi il conviendrait notamment d’instaurer un régime obligatoire de déclaration formatée de pertes de conteneurs ou encore de mettre en œuvre les mesures pour détecter et positionner les conteneurs perdus notamment dans les zones sensibles, telles que les zones de pêche.

En France, ce sont les CROSS qui prennent les mesures nécessaires à la neutralisation des conteneurs tombés à la mer. L’armateur doit mettre en œuvre et financer, sauf cas de force majeure, les opérations de recherche et d’évacuation aux côtés des autres acteurs (autorités maritimes, entreprises de remorquage,..). Si le propriétaire n’est pas identifié, les autorités maritimes compétentes procéderont directement aux opérations de neutralisation. Votre rapporteure déplore l’absence de chiffres sur le traitement réel des conteneurs ([88]) perdus et demande à ce qu’un indicateur annuel soit dorénavant annexé à l’étude de ces crédits.

Enfin, la biodiversité maritime n’est pas uniquement menacée par des substances polluantes. Elle peut aussi l’être par des espèces exotiques envahissantes. C’est ce qui a été souligné par Mme Nadia Essayan et M. Patrice Perrot dans le rapport de la mission d’information sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation qui a été adopté en juillet dernier par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ([89]). En effet, ces espèces peuvent être introduites par le biais des eaux de ballast ([90]) ou la fixation d’organismes sur la coque des navires. Selon l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER), le trafic maritime représente 60 % des cas d’introduction d’espèces exotiques.

Pour enrayer ce phénomène, l’Organisation maritime internationale a adopté le 13 février 2004 la Convention internationale pour le contrôle et la gestion des eaux de ballast et sédiments des navires (dite « Convention BWM) ». Cette convention est entrée en vigueur le 8 septembre 2017. Cette convention prévoit que tous les navires effectuant des voyages internationaux sont tenus de gérer leurs eaux de ballast et sédiments en fonction de certaines règles, conformément à un plan de gestion des eaux de ballast qui leur est propre. Un dispositif d’adaptation progressif est prévu pour les navires existants. En outre, les États partie à la Convention s’engagent à assurer la mise en place d’installations de réception adéquates des sédiments dans les ports et les terminaux où ont lieu le nettoyage ou les réparations des citernes à ballast. Enfin, les navires peuvent être inspectés par des fonctionnaires chargés du contrôle par l’État du port qui peuvent vérifier que le navire possède un certificat en cours de validité, inspecter le registre des eaux de ballast et/ou prélever des échantillons de l’eau de ballast.

Toutefois, Mme Nadia Essayan et M. Patrice Perrot ont mis en lumière la faiblesse des contrôles opérationnels dans les ports et ont fait remarquer qu’il n’existe aucune obligation en ce qui concerne les organismes présents sur la coque des navires. Votre rapporteure proposera par voie d’amendement un rapport sur l’impact financier de la mise en place d’obligations et de dispositifs de compensation.

II.   Le dispositif français de lutte contre les pollutions marines

La lutte contre la pollution dans l’espace maritime sous souveraineté française et sur le littoral français repose sur une série de textes législatifs et réglementaires qui sont :

– la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile ;

– le décret n° 2005-1157 du 13 septembre 2005 relatif au plan ORSEC et pris pour application des articles L.741-1 à L.741-5 du code de la sécurité intérieure ;

– le décret n° 2005-1156 du 13 septembre 2005 relatif au plan communal de sauvegarde et pris pour application de l’article 13 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile ;

– le décret n° 2010-224 du 4 mars 2010 relatif aux pouvoirs des préfets de zone de défense et de sécurité ;

– le décret n° 2010-130 du 11 février 2010 relatif à l’organisation et aux missions des directions interrégionales de la mer ;

– le décret n° 2010-130 du 11 février 2010 relatif à l’organisation et aux missions des directions interrégionales de la mer.

Pour la mise en œuvre des actions de lutte contre les pollutions, on distingue traditionnellement le dispositif POLMAR/Mer du dispositif POLMAR/Terre.  Le dispositif POLMAR/Mer est confié à la marine nationale. Il est placé sous l’autorité des préfets maritimes qui disposent, à titre complémentaire, des moyens interministériels relatifs à l’« action de l’État en mer ». La Marine nationale arme notamment des navires spécialisés sous affrètement permanent et comporte un service spécialisé dans ce domaine : le centre d’expertise pratique de lutte antipollution (CEPPOL). Le dispositif POLMAR/Terre est confié localement au préfet de département et il y a un « plan Polmar/Terre » par département littoral. Les moyens matériels mis à la disposition des préfets relèvent du ministère de la mer. Le préfet de zone de défense et de sécurité s’assure de la cohérence des actions terrestres et maritimes.

Depuis la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile ([91]), l’ensemble du dispositif POLMAR (POLMAR/Mer et POLMAR/Terre) est rattaché à l’Organisation de la réponse de sécurité civile (ORSEC). En cas de pollution de grande ampleur des littoraux ou lorsque les communes touchées ne sont pas en capacité de faire face, le volet POLMAR/Terre de l’ORSEC est activé.

Les préfets de département et de zone de défense et de sécurité font alors appel aux moyens matériels et humains :

– des services de l’État : directions interrégionales de la mer, directions départementales des territoires et de la mer, formations militaires de la sécurité civile ;

–  des services départementaux d’incendie et de secours ;

– des collectivités territoriales,

– des entreprises privées requises dans ce cadre.

En aval, le traitement des déchets issus des récupérations et nettoyages est organisé par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL).

Les moyens matériels utilisés pour lutter contre les pollutions sont ceux des 14 centres de stockage POLMAR/Terre, Ils sont placés localement sous la responsabilité des directions interrégionales de la mer (en outre-mer, des directions de la mer). Ils sont financés dans le cadre de l’action 4 du programme 205 qui relève du ministère de la Mer (voir première partie).

Les moyens humains sont diversifiés. Les personnels des services des phares et balises constituent les effectifs des centres de stockage. Les personnels des directions départementales des territoires et de la mer et, en outre-mer, des directions de la mer peuvent aussi être mobilités, tout comme les personnels des DREAL.

La raréfaction et la dispersion des effectifs, ainsi que l’intensification et la diversification des risques de pollution nécessitent de regrouper les compétences en matière de connaissance des moyens, de gestion des stocks et de méthode de lutte. À cette fin, le ministère de la mer a créé en 2020 un Pôle national d’expertise. Ce pôle, basé à Brest, compte trois ETP.

En outre, la direction des affaires maritimes a lancé une étude visant à rationaliser le maillage territorial des centres de stockage pour mieux adapter la nature et la quantité des matériels au regard de la sensibilité environnementale de chaque façade littorale et améliorer les circuits logistiques de mise à disposition desdits matériels. ([92])

Il n’y a pas eu de pollution majeure des littoraux français en 2020. En juin 2021, à l’Est de la Corse, une pollution par hydrocarbure répartie en deux nappes sur une longueur d’environ 19 milles nautiques s’est produite à 5 milles nautiques des côtes. Pour la surveillance, des moyens aériens de la Marine nationale, des douanes, de l’armée de l’air, et de la sécurité civile ont été engagés. Des moyens nautiques ont été utilisés pour réaliser des opérations de récupération de la pollution en mer sous la coordination du préfet maritime de la Méditerranée. Le dispositif de lutte mis en place en mer, s’est poursuivi en frange littorale et à terre en coordination avec les services des préfectures de Haute-Corse et de Corse du Sud. Enfin, le pôle national d’expertise a exercé ses actions de soutien aux directions des territoires et de la mer et d’organisation de la projection de renforts de matériels depuis le continent ([93]).

Suite à l’audition de Maître Christian Huglo, avocat associé fondateur du cabinet Huglo Lepage, spécialiste en droit de l’environnement, votre rapporteure note que le système actuel de déclenchement de POLMAR/terre ne prend en compte que les pollutions majeures. Elle souhaite une automatisation du déclenchement de ce dispositif à tous les types de pollutions en mer quelle que soit sa taille.

Outre les substances polluantes, nos littoraux – et notamment nos ports de plaisance–  sont menacés par la prolifération d’épaves. Ce point a notamment été soulevé par la Fédération française des ports de plaisance lors de son audition. Une filière REP a été mise en place pour les épaves et confié à l’APER (association pour la plaisance éco-responsable), qui a été officiellement agréée par arrêté le 21 mars 2019. La Fédération française des ports de plaisance a souligné les freins concernant l’identification des propriétaires et la saisie des bateaux laissés en mer qui diffère des épaves abandonnées à terre. En effet, ces dernières bénéficient des dispositions de l’article 54 de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue (dit « loi Leroy ») permettant une prise en charge plus rapide.

La Fédération française des ports de plaisance a également alerté sur l’accumulation d’épaves de type zodiacs dans les ports de plaisance ­– notamment celui de Dunkerque –  et de l’absence de filière de traitement pour ces embarcations utilisées par des migrants.

Des centres de déconstruction existent déjà quelques endroits en France hexagonale et en Martinique ([94]). Ce n’est pas le cas dans tous les outre-mer, où le stock d’épaves peut être très important à gérer sur des espaces parfois restreints. C’est par exemple le cas à Saint-Martin, où l’ouragan Irma a engendré 400 épaves de navires selon le rapport précité de la mission d’information sur la gestion des événements climatiques majeurs dans les zones littorales de la France hexagonale et des outre-mer (. Or, comme il l’a été indiqué à votre rapporteure par la Fédération des industries nautiques, à Saint-Martin, l’éco-site avait un grand nombre d’épaves de véhicules à traiter et la déconstruction des épaves de navires ne semblait alors pas une priorité. Toutefois, il vient de candidater pour intégrer l’APER. Eu égard aux enjeux, votre rapporteure demande que le Fonds d’intervention maritime financé par le programme 205 contribue aider la déconstruction dans l’ensemble des outre-mer.

III.   La protection et la prÉvention, des enjeux majeurs

Comme le rapportait maître Christian Huglo lors de son audition, si le dispositif juridique de lutte contre les pollutions a été fortement renforcé ces dernières années à la suite des catastrophes qui se sont produites, il est aujourd’hui indispensable de mettre l’accent sur la prévention.

La prévention des pollutions ne concerne pas uniquement la marine de commerce mais tous les usagers du littoral, Ainsi, les communes littorales de la France hexagonale, qui ne représentent que 4 % du territoire, regroupent plus de 6 millions d’habitants et disposent de 7,5 millions de lits touristiques. 45 % de la population y prend ses vacances. De ce fait, les conflits d’usage y sont nombreux alors qu’il est indispensable de préserver la biodiversité de ces espaces. Les nuisances sont liées au bruit, au piétinement des dunes, aux pressions relatives au mouillage des navires sur les herbiers, à la pollution lumineuse et plastique ou encore au risque d’incendie ([95]).

Pour lutter contre les effets de la surfréquentation l’article L. 360-1 du code de l’environnement a été modifié par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Il permet aux maires de réglementer voire d’interdire par arrêté motivé « l’accès et la circulation des personnes, des véhicules et des animaux domestiques aux espaces protégés » dès lors que « cet accès est de nature à compromettre soit leur protection ou leur mise en valeur à des fins écologiques, agricoles, forestières, esthétiques, paysagères ou touristiques, soit la protection des espèces animales ou végétales ». Si la mesure concerne les espaces maritimes, elle est prise par le représentant de l’État en mer.

Le tourisme estival sur les espaces insulaires présente des spécificités. Les séjours sont généralement de courte durée, parfois uniquement à la journée, avec une arrivée par voie maritime. Les repas sont pris sur place et les espaces et infrastructures sont contraints. Les enjeux de la surfréquentation y sont nombreux : mouillage des navires sur les herbiers protégés, accès à l’eau potable, difficultés d’assainissement et de gestion des déchets, …De ce fait, ces espaces bénéficient souvent de dispositifs de protection spécifiques et sont intégrées aux périmètres d’aires marines protégées Par exemple, Porquerolles fait partie du Parc national de Port-Cros. Au large des Antilles, le sanctuaire Agoa assure la protection des mammifères marins. Les zones protégées sont priorisées par les unités de contrôle pour s’assurer du respect des règles, notamment en période estivale.

Outre les contrôles, des mesures innovantes ont été prises localement comme la mise en place en 2021 d’une jauge journalière de 6 000 personnes pour Porquerolles par l’autorité de gestion du Parc national de Port-Cros. Les archipels des Glénans dans le Morbihan et de Chausey dans la Manche ont quant à eux mis en place des plans d’action coordonnés entre les acteurs locaux (collectivités et État) pour le développement d’infrastructures d’assainissement ou d’accès à l’électricité ([96]).

Si le tourisme peut-être au cœur des conflits d’usages, celui-ci peut aussi provenir d’autres usages du littoral comme la pêche à pied, qui favorise l’arrachage des herbiers de zostère, une espèce protégée située sur l’estran. La pêche à pied fait l’objet d’une réglementation et d’un contrôle mais des actions de sensibilisation sont également menées par les unités littorales des affaires maritimes sur la façade Nord-Atlantique – Manche Ouest, à la faveur des opérations relatives à la surveillance des habitats marins soumis à la pression de la pêche à pied ([97]).

La mise en place de règles concertées avec les acteurs intervenant sur le littoral et en mer peut être une solution, par exemple en impliquant les pêcheurs côtiers. La ville d’Agde, gestionnaire de l’aire marine protégée de la côte agathoise où se situe le site Natura 2000 « Posidonies du Cap d’Agde » mis en place en 2019 une zone de protection forte à moins de 2 kilomètres au large de l’île de Brescou. Un cantonnement de pêche pour une durée de six ans renouvelable y a été institué. Il s’agit d’une opération réalisée en concertation avec les pêcheurs « petits métiers » agathois. Toutefois, certains pêcheurs, notamment de loisirs ou extérieur, ne respectent pas le dispositif, ce qui le rend plus difficile à faire accepter et suscite la colère des pêcheurs locaux, comme l’a indiqué à votre rapporteure Renaud Dupuy de la Grandrive, directeur du milieu marin de la ville d’Agde et de l’aire marine protégée de la côte agathoise. Le problème vient de l’insuffisance des contrôles. C’est pourquoi votre rapporteure considère qu’il est indispensable de cibler l’action des effectifs dédiés au contrôle de la manière la plus efficiente possible.

La concertation, qui est indispensable à la fixation de règles, doit veiller à permettre à tous les usagers de pouvoir profiter du littoral sans le mettre en danger tout en en assurant l’attractivité de la France. La conciliation de ces objectifs peut poser des difficultés, comme pour le mouillage des navires. Pour protéger les herbiers de posidonie en Méditerranée, un arrêté-cadre réglementant ce mouillage des navires a été pris en 2019([98]) . Plusieurs arrêtés locaux de gestion du mouillage des navires ont alors été pris sur l’ensemble du littoral méditerranéen. En 2021, 176 contrôles relatifs au mouillage ont déjà été réalisés par la préfecture maritime, la majorité ayant été effectuée lors de la période estivale ([99]). Toutefois, comme l’a souligné la Fédération française des ports de plaisance lors de son audition, cette mesure réduit l’attractivité du secteur du yatching français et les usagers se détournent vers l’Italie ou la Croatie.

Enfin, outre les usagers adultes, qu’ils soient professionnels ou amateurs, il ne faut pas oublier les jeunes. C’est pourquoi la prise en compte des questions environnementales dans les lycées professionnels maritimes est indispensable. Cette prise en compte se fait par deux moyens. Tout d’abord, les référentiels de formation qui alimentent les programmes d’enseignement des lycées prennent en compte les évolutions de la législation nationale et internationale. Par ailleurs, la France a ajouté une matière complémentaire dans la formation initiale des lycées, intitulée « réglementation des activités maritimes et développement durable ». Elle correspond à une heure d’enseignement par semaine. Elle expose les règles juridiques d’encadrement de la profession réglementée de marin (y compris en matière environnementale) et les sensibilise aux questions de transition écologique et énergétique, de développement durable, de lutte contre le réchauffement climatique et contre ses conséquences ([100]).

L’action envers les jeunes ne doit pas concerner uniquement les futurs professionnels et les aires marines éducatives peuvent constituer un excellent levier pour toucher d’autres jeunes publics. Nées en 2012 à l’école primaire de Vaitahu sur l’île de Tahuata dans l’archipel des Marquises, les aires marines éducatives permettent aux élèves et aux enseignants de gérer de manière participative une zone maritime littorale de petite taille. Ce dispositif vise les élèves de CM1 à la troisième. Il les fait développer avec leur enseignant un projet de connaissance et de protection du milieu littoral et marin et cette démarche se fait en lien direct avec les acteurs de ces milieux : pêcheurs et autres métiers de la mer, collectivités territoriales, scientifiques, associations de protection de l’environnement ([101]). Votre rapporteure salue cette initiative qui essaime aujourd’hui en France et appelle à ce qu’un maximum d’enseignants et d’acteurs du monde maritime se saisissent de cet outil.


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   Examen en commission

Lors de sa réunion du mercredi 27 octobre 2021 matin, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, pour avis, sur le rapport de Mme Maina Sage, les crédits du programme « Affaires maritimes » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis sur les crédits relatifs aux affaires maritimes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Nous sommes réunis pour examiner les crédits consacrés aux affaires maritimes, comprenant l’action 43 « Ports » du programme 203, relative notamment au dragage des ports, et le programme 205 qui traite en particulier de la sécurité maritime, des normes sociales applicables aux gens de mer, du financement de l’enseignement maritime et des exonérations de cotisations sociales et patronales. Les crédits relatifs aux ports du programme 203 sont stables par rapport à 2021, d’environ 100 millions d’euros. Le programme 205 connaît une forte augmentation, de + 24 % en autorisations d’engagement (AE) et + 21 % en crédits de paiement (CP). Au total, les autorisations d’engagement comme les crédits de paiement représentent 192 millions d’euros pour 2022. La hausse est liée notamment à la création très attendue d’un nouveau fonds d’intervention maritime.

Il faut aussi souligner la création du ministère de la mer en faveur d’un meilleur accompagnement du monde maritime. Je salue le travail de mes prédécesseurs, M. Jimmy Pahun et Mme Sophie Panonacle, qui ont œuvré à l’augmentation de ces budgets et à la consolidation des politiques maritimes.

Dans cette dernière année de la législature, je souhaiterais mettre l’accent sur deux sujets liés d’une part au traitement, au contrôle et à la gestion des pollutions et d’autre part, à la décarbonation de la filière du transport maritime. Le programme 205 ne reflète qu’une partie d’un ensemble de moyens en faveur d’une politique de soutien et de développement à l’un des moteurs de l’économie française. La filière maritime représente 97 milliards d’euros en valeur de production, 360 000 emplois et un moteur d’activité mondiale car 90 % des échanges sont réalisés par voie maritime.

Près de la moitié des crédits du programme 205 sont consacrés à la compensation d’exonérations de cotisations sociales patronales à l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM), à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et à Pôle emploi. Ces mesures peuvent s’apparenter à un dispositif de salaire net (netwage). Elles servent à financer une aide exceptionnelle aux ferrys. Si certains segments de la flotte comme les porte-conteneurs se portent bien, le secteur des ferrys a été durement affecté par la crise sanitaire qui a provoqué des tensions sur le marché, une très forte chute du transport de passagers et la déstabilisation de ses activités.

Le secteur de la croisière, très touché par la baisse du tourisme mondial, reste perturbé. Aux Antilles, les acteurs attendent des réponses sur les perspectives de réouverture et la reprise du trafic et des escales. Le programme 205 finance aussi la gestion des registres du pavillon français, notamment celui de Wallis-et-Futuna auquel les navires de croisière sont immatriculés. S’ils sont soumis aux mêmes règles de sécurité, de sûreté et de prévention de la pollution que les navires immatriculés au premier registre ou au registre international français (RIF), il faut toutefois sécuriser la situation sociale des personnels, notamment hôteliers, qui souhaitent intégrer l’ENIM. Quoique l’établissement soit en difficulté, il est urgent d’apporter une solution viable et pérenne à ces employés, de manière à stabiliser le personnel recruté. De la même façon, il faut harmoniser leur situation fiscale avec celle des marins du RIF.

Par ailleurs, 18 % des crédits du programme 205 contribuent au financement de la formation, notamment par les lycées professionnels maritimes et l’École nationale supérieure maritime (ENSM). Lors du « Fontenoy du maritime », le Gouvernement s’est engagé à doubler le nombre d’officiers formés à l’ENSM. L’augmentation des crédits est notable, mais il faudra veiller à pérenniser ces moyens, en adéquation avec cette ambition.

Les formations dispensées montrent la nécessité de renforcer le volet environnemental, très lié aux enjeux du littoral. En ce sens, je propose un projet pilote d’un lycée littoral qui puisse aborder les questions maritimes, comme les activités terrestres, dans le cadre d’un partenariat entre le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et le ministère de la mer.

Dix-sept pour cent des crédits du programme 205 servent à financer l’action de l’État dans les domaines de la sécurité et de la sûreté maritimes. Ils servent notamment à financer les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) et les centres de sécurité des navires ainsi qu’à apporter un soutien à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). Il est à noter que la SNSM est présente dans l’ensemble de la France, sauf en Polynésie française. J’ai donc demandé que l’État, compétent en la matière, soutienne le plan de formation des sauveteurs bénévoles de la Polynésie française, qui œuvrent sur une superficie maritime équivalente aux deux tiers de l’Europe.

Les crédits de l’action 04 « Action interministérielle de la mer » représentent 14 % du programme 205. De 13 millions d’euros dans la loi de finances de 2021, ils passeront à 28,77 millions d’euros en 2022, avec la création du fonds d’intervention maritime, auquel près de 18 millions d’euros sont alloués. Sa création facilitera la réalisation d’actions concrètes pour mettre en œuvre la stratégie nationale pour la mer et le littoral. Néanmoins, cette dotation de quelque 18 millions d’euros reste faible : devant l’immense chantier des problèmes qui affectent nos littoraux, le renforcement de cette structure paraît inévitable. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement au programme 205 et à la mission « Cohésion des territoires » pour bâtir un véritable plan « Avenir littoral ». Il est nécessaire d’avoir une vision nationale des moyens, coordonnés à l’échelon des collectivités territoriales, pour soutenir des mesures d’urgence, comme de prévention – protection des littoraux, formation des élus, information du public –, ainsi que d’amélioration de la gestion de la crise et de la culture du risque et, avec le vote des plans littoraux, de les aider à redessiner leur avenir. Tout cela demande un accompagnement et une volonté marquée au niveau national. Or, au-delà de la stratégie, on manque encore beaucoup de moyens.

Enfin, les crédits de l’action 04 servent également à financer, d’une part, le dispositif de contrôle et de surveillance et, d’autre part, le dispositif POLMAR/Terre. Les crédits de paiement attribués s’élèvent respectivement à 7,8 millions d’euros et à 2,62 millions d’euros. D’après les personnes que nous avons auditionnées, cela reste insuffisant en matière de contrôle. Nous proposons que le dispositif POLMAR soit étendu à tout type de pollutions. La filière est à la croisée des chemins, avec un développement croissant des échanges et la nécessité de relever les défis climatiques de protection de nos océans.

S’agissant du traitement des pollutions, il manque dans notre droit des obligations plus fermes sur le traitement des eaux de ballast et le nettoyage des coques ainsi que sur les pertes de conteneurs en mer, estimées à 1 500 par an, voire le double, selon un récent rapport. C’est une bombe à retardement.

Pour ce qui relève des pollutions du passé, nous avons besoin de déclassifier des zones d’immersion et de traiter les munitions, conventionnelles et chimiques, des deux dernières guerres, qui ont été déposées tout au long des côtes françaises. J’ai donc déposé un amendement en ce sens.

Enfin, comme le disait maître Christian Huglo, spécialiste de ces sujets, gérer les pollutions, c’est bien, mais les prévenir, c’est encore mieux. Sur le plan de la décarbonation, nous avons fait voter lors des débats sur la loi de finances pour 2019.un dispositif de suramortissement, désormais défini à l’article 39 decies C du code général des impôts. Nous défendrons des amendements pour bonifier le taux de la propulsion vélique auxiliaire à au moins 85 %. Nous demandons aussi à pérenniser le dispositif au-delà de 2024 et à réduire les durées d’amortissement, pour donner de la visibilité aux acteurs. Le gaz naturel liquéfié (GNL) doit bénéficier d’un mécanisme de garantie d’origine dans les ports français, pour renforcer la compétitivité de ces derniers. Enfin, il nous faut poursuivre nos efforts sur la réduction des pollutions à quai, avec le déploiement des zones de contrôle des émissions atmosphériques (ECA) de soufre et d’azote.

Eu égard aux augmentations des crédits consacrés aux affaires maritimes, j’émets un avis favorable à leur adoption.

Mme Sophie Panonacle (LaREM). Je suis heureuse de voir Mme Maina Sage, qui représente si bien les territoires ultramarins, défendre l’avis de notre commission sur les crédits consacrés aux affaires maritimes. C’est grâce aux outre‑mer que nous, les Hexagonaux, avons la première zone économique exclusive (ZEE) du monde. Cela nous honore souvent, et doit nous obliger toujours. Les politiques financées par le programme 205 s’intéressent aux navires, aux marins et à la mer. C’est un vaste programme dont le budget progresse d’année en année. En 2022, il avoisine les 200 millions d’euros, avec une augmentation qui dépasse 20 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement par rapport à 2021.

Parmi les mesures qui méritent notre attention, le brevet d’initiation à la mer (BIMer) valide un niveau d’initiation aux activités professionnelles et à la culture scientifique et technique dans le domaine de la mer. Cette formation doit être ouverte à tous les jeunes sur l’ensemble des territoires littoraux et non littoraux. Les personnes en recherche d’emploi devraient pouvoir en bénéficier.

J’ai aussi examiné avec attention la question de la décarbonation du secteur maritime. De PLF en PLF, nous portons des amendements visant à encourager les armateurs à utiliser des carburants plus propres, notamment le GNL.

Nous soutenons le transport vélique, mais il semble que nous avancions un peu trop lentement. La décarbonation du secteur maritime passe également par celle du nautisme. C’est pourquoi je propose la création d’un bonus écologique pour les navires de plaisance neufs ou « refittés », à motorisation électrique ou hybride.

En matière de lutte contre la pollution en mer, la plus insidieuse, donc la plus dangereuse, est celle du quotidien. Le plastique qui envahit nos océans est un fléau que nous devons éradiquer avant qu’il ne dégrade définitivement nos écosystèmes marins.

Mme Maina Sage a réalisé avec bienveillance et vigilance un travail remarquable, construit sur l’engagement et la responsabilité. Je suis convaincue qu’ici comme ailleurs, nous nous retrouverons pour partager notre volonté commune de défendre l’avenir maritime de notre pays et la protection de l’océan.

Mme Valérie Beauvais (LR). À l’heure de l’examen du budget, force est de constater que le Président de la République est bien en campagne électorale. En effet, le PLF pour 2022 traduit une véritable fuite en avant budgétaire, à laquelle le groupe Les Républicains ne peut souscrire, les intentions budgétaires gouvernementales étant financées soit par le plan de relance, soit par la dette.

S’agissant des crédits consacrés aux affaires maritimes, présentés par Mme Maina Sage, je regrette la timidité du volet relatif à la sécurité et à la sûreté maritimes, c’est-à-dire l’action 01 du programme 205. Malgré le plan de relance, on peine à y trouver des engagements forts qui contribueraient à relever les défis que vous décrivez. En effet, vous indiquez que le transport maritime, qui représente environ 2,89 % des émissions anthropiques totales mondiales de CO2 en 2018, contre 2,76 % en 2012, pourrait voir son impact multiplié par six et atteindre 17 % des émissions. Vous considérez que la priorité est de financer les travaux de gros entretien des établissements de signalisation maritime, tels que les optiques de phares, c’est-à-dire essentiellement des dépenses de fonctionnement, alors que le plan de relance devrait financer des travaux d’investissement.

Sur la question de la décarbonation du transport maritime, votre prudence est regrettable : pour les navires, vous ne prévoyez qu’une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, pour mener la transition vers une propulsion neutre en carbone à l’horizon 2050. Il y a là deux poids deux mesures car, pour les voitures, vous annoncez la suppression des moteurs thermiques en 2030.

M. Jimmy Pahun (Dem). Je remercie tous les collègues qui ont travaillé sur les dossiers maritimes depuis le début de notre mandat ; nous avons fait du bon travail.

Je pense au verdissement de la flotte – ce sont des armements français qui sont en pointe en matière d’utilisation du GNL – et au gel des abattements du DAFN (droit annuel de francisation et de navigation), un bel effort de la part des plaisanciers qui a permis de revaloriser dès cette année le budget du Conservatoire du littoral, parallèlement à la simplification qu’induit la collecte du DAFN par la direction générale des finances publiques (DGFIP) et non plus par les douanes.

Outre l’aide aux navires de plaisance à propulsion électrique, souhaitée par Mme Sophie Panonacle, il faudra faire participer davantage à l’effort les grosses puissances moteur.

Nous avons aussi bien travaillé concernant la SNSM – pas en Polynésie française, madame la rapporteure pour avis, mais cela va venir –, qui a bénéficié de 4,5 millions d’euros supplémentaires par an.

À Biarritz, le Président de la République a évoqué la possibilité d’agir sur la vitesse des navires ; en réduisant celle-ci de deux nœuds, on économiserait 40 millions de tonnes de gaz à effet de serre. Quand on voit le temps que les navires passent en escale dans les ports, il y a peut-être moyen de faire quelque chose en la matière.

S’agissant des conteneurs, vous avez raison, madame la rapporteure pour avis. Nous avons d’ailleurs été près de faire adopter un amendement à la loi « climat et résilience » qui aurait amélioré leur traçabilité.

La création du ministère de la mer, qui organise le monde maritime, est une bonne chose.

S’y ajoute le congrès de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), lors duquel a été pris l’engagement de parvenir à 30 % d’aires protégées, dont 10 % en protection forte, avec une attention particulière envers la Méditerranée – à propos de zone SECA (de contrôle des émissions de soufre), peut-être y aurait-il, là aussi, quelque chose à faire.

Je mentionnerai enfin le Fontenoy du maritime et son important volet relatif à la formation.

En ce qui concerne l’avenir du littoral, à quoi vont servir exactement les quelque 18 millions d’euros dont vous avez parlé ?

Mentionnons pour terminer le suramortissement applicable à la propulsion vélique : la voile ne sera jamais un moyen de propulsion directe, mais fournira une aide véritable – et gratuite !

M. Gérard Leseul (SOC). Je remercie Mme Maina Sage d’avoir insisté sur la nécessité de recourir à des plans littoraux ambitieux et de généraliser le dispositif POLMAR ; il conviendrait d’y consacrer d’importants moyens supplémentaires.

Mme Valérie Petit (Agir ens). Nous saluons la hausse du budget consacré aux transports terrestres et fluviaux ainsi qu’aux affaires maritimes.

S’agissant des transports maritimes, elle vient compléter les crédits du plan de relance qui apporte un soutien inédit au fret et au transport ferroviaires. Les mobilités durables sont fortement encouragées.

La hausse du budget dévolu aux affaires maritimes vise à accélérer la décarbonation du secteur et à protéger la mer des conséquences du changement climatique, notamment de nos usages intensifs.

Parmi les défis à relever figurent l’élévation préoccupante du niveau de la mer et le recul du trait de côte, qui préoccupent beaucoup les élus des communes littorales. Si les littoraux sont aujourd’hui attractifs, les effets conjugués de la surpopulation touristique et du dérèglement climatique entraînent des conséquences irréversibles. Madame la rapporteure pour avis, vous appelez au lancement d’un plan Avenir littoral, sur le modèle du plan Avenir montagnes, pour aider les élus locaux à traiter ces enjeux. Comment pourrait-il être matérialisé ? Comment aidera-t-il les communes littorales à protéger ces espaces naturels précieux tout en préservant une attractivité et un flux touristiques soutenables ?

Dans ce contexte, nous défendons l’action : dans un monde de tous les risques, nous devons continuer de prendre des risques et d’innover pour nous adapter au défi climatique plutôt que le subir.

Pour toutes ces raisons, budgétaires et philosophiques, nous voterons en faveur de l’adoption des crédits qui nous sont soumis.

M. Guy Bricout (UDI-I). S’agissant des affaires maritimes, la simplification voulue des procédures administratives bénéficie-t-elle de moyens à la hauteur des ambitions ? Comment s’applique-t-elle concrètement ? Le plan de relance consacre 175 millions d’euros au verdissement des ports ; les efforts en la matière, notamment en vue du report modal, sont-ils proportionnés aux enjeux ? Qu’en est-il de la modernisation des navires pour le développement massif de machines moins polluantes ? La recherche dans ce domaine est-elle suffisamment encouragée à long terme ? Madame la rapporteure pour avis, que pensez-vous du sentiment que les ports ne sont pas suffisamment pris en considération dans ce budget, qui met davantage l’accent sur la formation et l’emploi ?

Mme Sophie Métadier. Les risques en milieu littoral sont nombreux, qu’ils soient naturels ou d’origine humaine. Il faut donc créer une culture du risque en partageant avec tous les acteurs la connaissance des dangers passés, actuels et à venir. Quels moyens sont donnés aux services de l’État, aux élus et aux entreprises pour traiter ces enjeux majeurs ?

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Je suis d’accord avec Mme Sophie Panonacle, le brevet d’initiation à la mer devrait, en effet, être généralisé et la propulsion vélique, notamment auxiliaire, bonifiée. Le dispositif de suramortissement, créé il y a trois ans, n’a pas apporté la preuve de son efficacité et nous l’avons modifié lors de l’examen de la première partie du PLF. Il faudra aller plus loin. Pour ce qui est des pollutions, les plastiques que l’on retrouve en mer viennent des zones terrestres : c’est à nous d’agir en amont pour réduire leur production et leur utilisation.

L’action 01 du programme 205 « Affaires maritimes » rassemble l’ensemble des moyens dédiés à la sécurité et à la sûreté maritimes, qui ne se résument pas aux phares et aux balises. Ses crédits augmentent de 6 % pour atteindre près de 35 millions d’euros. Le budget dédié aux phares et balises est donc important, sans oublier les 7,7 millions d’euros consacrés aux CROSS ou les 10,6 millions d’euros dédiés à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). Ce ne sont pas les crédits du plan de relance que nous examinons aujourd’hui, madame Valérie Beauvais. J’espère que vous voterez mon amendement qui tend à doubler certains de ces moyens, pour mieux gérer les CROSS et étendre le dispositif POLMAR/Terre à l’ensemble des pollutions, qu’elles soient ou non majeures.

Concernant la décarbonation, notre action ne se limite pas à proposer une concertation interministérielle. Surtout, dans le rapport que j’ai présenté, la mise en place d’un processus de concertation ne concerne que la résolution des problèmes urgents liés au registre du pavillon de Wallis-et-Futuna. En effet, les marins qui travaillent à bord des navires, notamment dans l’hôtellerie, se retrouvent dans une situation instable, tant au niveau de leur régime de sécurité sociale que de leur régime fiscal. Même si nous devons réformer le régime social des marins et l’ENIM, nous devons trouver des solutions en urgence. Les ministères du travail, des affaires sociales, du tourisme et des finances doivent s’installer autour de la table avec l’ensemble des acteurs du monde maritime.

Je vous invite donc à vous pencher plus précisément sur notre travail. Nous souhaitons renforcer les efforts en faveur de la propulsion vélique auxiliaire et proposons de revoir la durée d’amortissement, d’allonger le dispositif pour apporter de la visibilité aux investisseurs. Quant au GNL, il est opérationnel et permet de mener des projets dans les prochaines années, comme indiqué lors de l’audition de l’association Windship.

Nous sommes leader dans le GNL. Cependant, les navires à propulsion GNL préfèrent s’approvisionner à l’étranger, en particulier dans de grands ports européens non français, pour bénéficier de la garantie d’origine, ce qui n’est pas encore possible dans les ports français. Nous devrons résoudre ce problème pour renforcer la compétitivité des ports français. C’est en effet souvent là où l’on se ravitaille que l’on charge et décharge les containers.

S’agissant d’un plan « Avenir littoral », nous pourrions concrétiser cette ambition dans un programme spécifique, sur le modèle d’« Avenir montagnes », qui serait dédié à une stratégie pour le littoral. Dotée de moyens nationaux, elle permettrait de mener des actions cohérentes dans l’ensemble du territoire tout en soutenant les politiques spécifiques décidées dans les communes et les collectivités du littoral. Nous proposerons ainsi de financer une cellule dédiée interministérielle pour garantir aux collectivités la pérennisation des moyens qui leur permettront de mener des actions de prévention et de relever les défis environnementaux. Les submersions marines ou les épisodes cévenols constituent des menaces permanentes qui engagent la responsabilité des acteurs locaux. Or, entre la stratégie que l’on peut élaborer en théorie et la réalité, il y a un gap. Je vous invite à lire l’appel de Pornic, lancé par l’Association nationale des élus du littoral (ANEL) : il est devenu nécessaire de mieux structurer la réflexion, la coordination et les actions pour accompagner les collectivités. L’enjeu n’est pas seulement local, il est national. C’est toute la France que nous devrons remodeler d’ici à dix ou vingt ans. Les collectivités ne peuvent pas rester seules.

Le plan Littoral illustre l’importance de prendre en compte trois enjeux : prévention, gestion des risques et reconstruction. Le développement de la culture du risque en fait partie. Dans le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit « 3DS », est introduit au titre VIII dédié à l’outre-mer, l’état de calamité naturelle exceptionnelle. Au-delà, nous souhaitons enrichir ce texte pour rendre obligatoire le développement de la culture du risque : informer les élus, les citoyens, réaliser des exercices de mise en situation et aménager les espaces en fonction des risques.

Article 20 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CD103 de la rapporteure pour avis.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Je propose d’augmenter de 4 millions d’euros les crédits consacrés à l’action 01 « Sécurité et sûreté maritimes » du programme 205. Il faut mieux concilier les usages croissants en zone littorale, tout particulièrement pendant la période estivale. Les conflits entre les différents acteurs ont tendance à s’accroître, ce qui exige davantage de contrôles. Ceux-ci seront en outre de plus en plus nécessaires avec l’objectif ambitieux de 30 % d’aires marines protégées en 2030.

M. David Lorion. Je soutiens cet amendement, car la densification du trafic maritime est un phénomène général, avec des voies maritimes qui sont souvent proches de territoires d’outre-mer. On se souvient du drame de l’échouement du Wakashio survenu en 2020, qui a occasionné une pollution par hydrocarbures de l’ensemble de la côte sud de l’île Maurice. Il peut très bien se passer la même chose à l’île de La Réunion, à Mayotte, à Tahiti ou dans l’Atlantique. Un effort plus important doit être réalisé en matière de sécurité maritime.

Mme Sophie Panonacle. Cet amendement est pertinent. Il faut augmenter les moyens des CROSS, car l’activité touristique s’accroît constamment sur les littoraux. Le développement de nombreuses activités pose des problèmes de nuisances sonores, de pollution et de sécurité de plus en plus importants.

Je profite aussi de cette occasion pour souligner la nécessité de développer des engins nautiques moins polluants.

M. Jean-Marc Zulesi. Je suis tout à fait d’accord avec Mme Sophie Panonacle et le groupe La République en Marche votera la plupart des amendements de la rapporteure pour avis.

Il reste qu’il faudra travailler d’ici à la séance publique sur la manière dont ces amendements sont financés au sein de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », afin que nos décisions n’entrent pas en contradiction avec les travaux menés par M. Damien Pichereau et avec notre volonté commune de développer les infrastructures et les services de transport.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD104 de la rapporteure pour avis.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Je précise que mes amendements qui prélèvent des crédits sur le programme 203 « Infrastructures et services de transports » le font sur l’action 43 « Ports », qui finance notamment le dragage des ports. Aucun crédit n’est retiré au financement des transports terrestres et fluviaux, dont M. Damien Pichereau est le rapporteur pour avis. Mais, bien entendu, j’espère que ces modalités de financement pourront être affinées en séance.

L’amendement II-CD104 propose de renforcer les crédits affectés au dispositif POLMAR/Terre, ce qui est aussi urgent qu’utile. Le système actuel de déclenchement de POLMAR/Terre ne prend en compte que les pollutions majeures. En effet, quand un événement de faible ou moyenne ampleur survient, le traitement des pollutions doit être géré par la commune concernée. L’amendement prévoit les crédits nécessaires pour une automatisation du déclenchement de ce dispositif à tous les types de pollution en mer.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD102 de la rapporteure pour avis.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à favoriser l’instauration d’un plan « Avenir littoral », en lui affectant une dotation de 1 million d’euros. Il s’agit de s’inspirer du plan « Avenir montagnes », annoncé en mai dernier et doté d’une enveloppe conséquente au travers notamment du fonds « Avenir montagnes ».

Les politiques publiques doivent évoluer pour permettre une gestion globale du littoral, ne séparant pas la terre de la mer. Cela doit constituer un message fort de notre commission.

Des objectifs ont certes été fixés en matière de stratégie littorale, mais lorsqu’on écoute les collectivités concernées, on s’aperçoit qu’il manque une coordination efficace entre les différents échelons pour mener une action ambitieuse. Cela doit se manifester très concrètement au travers des trois volets que constituent la prévention, la gestion d’un évènement et la reconstruction. Tout maire ou président d’un conseil départemental ayant à gérer un espace littoral mesure le défi que cela représente. Ces élus ont en tête cette obsédante question : comment réorganiser le littoral de manière apaisée pour protéger la population, dans une perspective de moyen et de long terme ?

On demande désormais aux communes de financer une cartographie des risques, alors que l’on sait que ce travail a déjà été réalisé par les établissements publics concernés, qu’il s’agisse du service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM), du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) ou du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA). Comme le dit souvent Mme Sophie Panonacle, présidente du bureau du Conseil national de la mer et des littoraux (CNML), nous disposons d’une expertise nationale. La question est davantage de la traduire en actions. Cet exemple montre à quel point est nécessaire une structure intermédiaire faisant le lien entre la vision nationale et les réalités vécues par les différents acteurs du terrain. La création d’une cellule interministérielle dans le cadre du plan « Avenir littoral » proposé constituerait un grand pas en avant.

Mme Sophie Panonacle. Je reconnais bien votre enthousiasme, madame la rapporteure pour avis, et ce plan est une excellente idée que je soutiens pleinement.

Toutefois, avant d’affecter des crédits il est nécessaire d’associer à la réflexion l’ensemble des acteurs – ministères, collectivités littorales, experts et associations – pour déterminer la meilleure organisation. Ce plan « Avenir littoral » est en effet susceptible de porter sur de très nombreuses questions : érosion côtière et relocalisation des activités, mais aussi tourisme et urbanisation. Je vous propose donc d’en parler le 24 novembre lors de la prochaine réunion plénière du CNML, dont vous êtes membre, et de proposer à cette occasion à la ministre de la mer de constituer un groupe de travail. Dans cette attente, je suggère le retrait de l’amendement, qui pourra être déposé en séance publique.

M. David Lorion. Ce sujet est éminemment important parce qu’il regroupe les notions de risques naturels, de protection et de développement économique. Il est aussi extrêmement périlleux : le problème des risques naturels relève des services de l’État ; il faut prendre garde à ne pas le transférer aux collectivités, car celles-ci ne sont pas en mesure d’y faire face s’agissant des littoraux.

Je souhaite donc que soit conduite une réflexion associant le CEREMA, l’ensemble des collectivités concernées et peut-être aussi l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), afin de déterminer les responsabilités de chacun. Ces dernières doivent être partagées car les collectivités territoriales ne doivent pas être amenées à prendre en charge une part trop importante des risques, dont ceux liés à l’érosion.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Il me paraissait nécessaire que ce sujet soit discuté au sein de notre commission, notamment au regard des travaux déjà menés. La mission d’information sur la gestion des événements climatiques majeurs dans les zones littorales de l’Hexagone et des outre-mer a présenté son rapport en 2018. Un projet de loi est attendu depuis plusieurs années, dont une partie des dispositions figurera dans le projet de loi « 3DS ».

J’entends la proposition de Mme Sophie Panonacle et je suis d’accord pour travailler de nouveau la question pour la séance. Je souhaite que nous décidions à cette occasion d’affecter des moyens permettant la mise en œuvre effective d’un plan d’action. Les enjeux de ce dossier ne sont en effet pas seulement d’ordre climatique, et il faut le prendre à bras-le-corps pour aider les collectivités concernées à redéfinir les modalités d’utilisation des espaces littoraux. D’autant que s’il existe normalement un partage des compétences, en pratique, ce sont ces collectivités qui font quotidiennement face aux événements.

L’amendement est retiré.

L’amendement II-CD105 de la rapporteure pour avis est retiré.

Amendement II-CD101 de la rapporteure pour avis.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. La Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) est présente partout en France, sauf en Polynésie où intervient une association locale, la Fédération d’entraide polynésienne de sauvetage en mer (FEPSM). Le sauvetage en mer y demeure bien entendu une compétence de l’État, mais il est assuré par des bénévoles. L’amendement propose d’affecter 35 000 euros à la FEPSM pour lui permettre de dispenser des formations – ce montant est très réduit au regard du total des crédits de l’action qui est prélevée.

Mme Sophie Panonacle. Au vu des services rendus par la SNSM, soutenir la FEPSM est indispensable.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 : Rapport du Gouvernement sur l’impact budgétaire de la gestion des pollutions marines causées par la présence d’armes et munitions

Amendement II-CD106 de la rapporteure pour avis.

Mme Maina Sage, rapporteure pour avis. Lors de son audition, France Nature Environnement a rappelé qu’il fallait aussi traiter les pollutions du passé.

Cet amendement demande donc au Gouvernement de remettre un rapport sur l’impact budgétaire de la gestion des pollutions marines causées ou pouvant être causées par la présence d’armes et de munitions dans les espaces maritimes sous souveraineté ou sous juridiction française.

De nombreux pays en Europe ont déjà engagé des plans spécifiques pour déminer ces espaces et pour les gérer en cas de remontée d’obus. La prise en compte de cette question est encore très timide en France. Il est impératif d’affecter des moyens à la dépollution définitive de ces zones, en associant le ministère des armées à la réflexion.

Mme Sophie Panonacle. Nous devons tendre vers la tolérance zéro pour les pollutions marines. Je soutiens donc cet amendement.

La commission adopte l’amendement.

*

*     *

Lors de sa réunion du mercredi 27 octobre 2021 après-midi, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » modifiés.


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   LISTE des personnes auditioNnées

(par ordre chronologique)

Ministère de la mer – Direction des affaires maritimes

M. Thierry Coquil, directeur des affaires maritimes

Table ronde « Armateurs » de France*

 Armateurs de France

M. Jean Emmanuel Sauvée, président

M. Jean Marc Lacave, délégué général

Mme Laurène Niamba, responsable « Relations institutionnelles et affaires juridiques »

Mme Cécile Rafat, responsable des affaires économiques, fiscales, statistiques

 Brittany Ferries

M. Jean Marc Roué, président du conseil de surveillance

M. Bruno Denoyelle, conseiller institutionnel

 DFDS

M. Jean-Claude Charlo, directeur général

 CMA-CGM

M. Jacques Gérault, conseiller institutionnel

 Louis Dreyfus Armateurs

M. Antoine Person, secrétaire général

 Geogas

M. Marc Etcheberry, directeur général

 Ponant

M. Hervé Gastinel, président

M. François Vielfaure, conseiller spécial des opérations maritimes

M. Bruno Joubert, senior advisor « Relations institutionnelles et internationales »

Fédération des industries nautiques

Mme Maud Dugourd, secrétaire générale

M. Guillaume Arnauld des Lion, délégué général adjoint et délégué général de l’APER

TLF Overseas*

M. Florent Noblet, délégué général

Mme Louise Drouin, déléguée aux affaires maritimes

Syndicat des énergies renouvelables*

M. Jérémy Simon, délégué général adjoint

Mme Anne Georgelin, responsable « Éolien en mer, hydroélectricité et EMR »

Mme Léa Ezenfis, responsable juridique et affaires institutionnelles

M. Alexandre de Montesquiou, consultant, directeur associé d’Ai2P

Union nationale des industries de la manutention dans les ports français*

M. Christian de Tinguy, président

M. Ronan Sévette, délégué général

M. Valentin Lejeune, conseiller

M. Thierry Souladié, CMA-CGM

Association des utilisateurs de transport de fret*

M. Fabrice Accary, directeur général

M. Jean-Michel Garcia, délégué aux transports internationaux

Union des ports de France*

M. Jean-Pierre Chalus, président, président du directoire du Grand port maritime de la Guadeloupe

M. Jean-Paul Le Caill, directeur du port autonome de Papeete

M. Ronald Tsu, Directeur général adjoint du port autonome de Papeete

Mme Mathilde Pollet, responsable des affaires économiques et européennes

Plateforme GNL

M. Patrick Corbin, président de l’Association française du gaz*

Table ronde réunissant des clusters maritimes ultra-marins et la Fédération des entreprises des Outre-mer

– Cluster maritime français*

M. Alexandre Luczkiewicz, responsable des relations et des actions « Outre-mer », en charge de la coordination des clusters maritimes d’outre-mer

Mme Solweig de Lantivy, stagiaire

– Cluster maritime de la Guadeloupe

Mme Marie-Laure Ciprin, présidente

M. Christophe Foucault, vice-président

– Cluster maritime de la Martinique

M. Patrick Mazzei, vice-président du cluster maritime, en charge du nautisme

– Cluster maritime de la Polynésie française

Mme Anne-Mai Do Chi, secrétaire générale

M. Stéphane Renard, coordinateur

M. Jean Hourçourigaray, co-fondateur de la société Airaro

– Cluster maritime de Nouvelle-Calédonie

M. Philippe Darrason, président

M. Lionel Loubersac, vice-président

Mme Emma Colombin, membre du conseil d’administration

Mme Sophie Chenel, chargée d’animation

– Fédération des entreprises des Outre-mer*

M. Laurent Renouf, délégué général

Mme Françoise de Palmas, secrétaire générale

M. Arnaud Busseuil, chargé de mission

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins*

M. Jean-Luc Hall, directeur général

Mme Émilie Gérard, juriste

Mme Sophie Panonacle, députée, présidente du bureau du Conseil national de la mer et des littoraux

M. Christian Huglo, directeur général du cabinet Huglo Lepage Avocats, avocat à la cour

Fédération française des ports de plaisance

Mme Camille Contamine, déléguée générale

Mme Véronique Tourrel, déléguée générale de l’Union des ports de plaisance PACA

M. Ludovic Richard, administrateur, président de SODEPORT

Ministère chargé des transports

M. Alban Virlet, conseiller « Affaires industrielles, mer, régulation, filières économiques maritimes, logistiques et aériennes » du ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports

Mme Claire Le Deuff, conseillère parlementaire et politique

M. Nicolas Trift, sous-directeur en charge des ports et du transport fluvial à la direction des services de transport de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Association Wind-Ship

Mme Lise Detrimont, déléguée générale de Wind Ship

M. Amaury Bolvin, co-fondateur de Zéphyr & Borée

Mme Stéphanie Lesage, secrétaire générale d’Airseas

M. Bruno Toubiana, directeur général de CWS Morel

Mme Louise Bigot, chargée de projet chez TOWT

M. Laurent Rouxel-Duval, responsable « Recherche et développement » aux Chantiers de l'Atlantique

Office français de la biodiversité

M. Pierre Dubreuil, directeur général

M. Michel Peltier, délégué « Mer »

M. Jean-Michel Zammmite, directeur du contrôle des usages et de l'action territoriale

M. Renaud Dupuy de la Grandrive, directeur de la gestion du milieu marin de la ville d’Agde et de l’aire marine protégée de la côte agathoise.

M. Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président du Cluster maritime français, président de l’École nationale supérieure maritime*

Mme Élodie Martinie-Cousty, pilote du réseau « Océans, mers et littoral » de France Nature Environnement*

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 

 


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   liste des Contributions écrites reçues

Association nationale des élus du littoral

M. Sylvain Brial, député de Wallis-et-Futuna

Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux

École nationale supérieure maritime

 

 

 

 

 

 

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([1])  Selon l’Organisation maritime internationale (OMI).

([2]) Hors fonds de concours et affectations de produits.

([3]) Hors fonds de concours et affectations de produits.

([4]) Hors fonds de concours et affectations de produits, qui devraient représenter 2,75  millions d’euros en 2022.

([5]) Recrutement et gestion des équipages, acquisition et maintenance des navires utilisés par le service des phrases et balises..

([6]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°19 du questionnaire budgétaire.

([7])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°20 du questionnaire budgétaire

([8])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°20 du questionnaire budgétaire

([9])  Yannick Guérin, « Une bouée intelligente testée en Iroise », Ouest France, 17 mars 2015.

([10])  https://out-there.fr/home/projets-test/e-seanergy/.

([11]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°26 du questionnaire budgétaire.

([12]) Le MRCC (Maritime Rescue Coordination Center) est créé au sein des états-majors des forces armées de Nouvelle-Calédonie.

([13])  Arrêté du 8 août 2016 portant établissement en Polynésie française d’un centre de coordination aéronautique et maritime de sauvetage conjoint.

([14])  Directive 2002/59/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2002 relative à la mise en place d’un système communautaire de suivi du trafic des navires et d’information, et abrogeant la directive 93/75/CEE du Conseil

([15]) Contribution écrite de l’ENSM.

([16]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question budgétaire n°30.

([17]) Contribution écrite de l’ENSM.

([18]) Cour des comptes, Rapport public 2018, t. 1, p. 356.

([19])  Boulogne-sur-Mer ; Fécamp ; Cherbourg ; Saint-Malo ; Paimpol ; Le Guilvinec ; Étel ; Nantes ; La Rochelle ; Ciboure ; Sète ; Bastia

([20]) La convention STCW (convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille) du 7 juillet 1978 traite des normes de formation des marins et de la délivrance de leurs brevets.

([21]) Ministère de la mer, Organismes de formation aux métiers de la mer, disponible sur :  https://www.mer.gouv.fr/organismes-de-formation-aux-metiers-de-la-mer .

([22])  https://www.lyceedelamer.fr/ .

([23])  https://www.lyceedelamergujan.fr/ ; https://www.letudiant.fr/etudes/annuaire-des-lycees/lycee-polyvalent-lycee-des-metiers-de-la-mer-3237.html .

([24]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes - Réponse à la question n° 33 du questionnaire budgétaire.

([25])  Décret n° 2020-1158 du 21 septembre 2020 relatif aux formations d’initiation à la mer.

([26])  Arrêté du 21 septembre 2020 relatif au brevet d’initiation à la mer.

([27])  Lycée Jules Verne de Guigamp, lycée Vauban de Brest, lycée La Croix Rouge-La Salle de Brest, lycée Pierre Guéguin de Concarneau.

([28])  Lycée Freyssinet de Saint-Brieuc, lycée Le Likès de Quimper, lycée Emile James d’Etel, lycée Jean Aicard d’Hyères, collège Les Eucalyptus d’Ollioules, lycée Taiarapu-Nui de Tahiti.

([29]) Gouvernement, Le Brevet d’Initiation à la Mer (BIMer), un diplôme de découverte de la culture maritime et des métiers de la merVademecum, p. 16, disponible sur : https://eduscol.education.fr/sti/sites/eduscol.education.fr.sti/files/textes/tout-niveau/brevet-dinitiation-la-mer-bimer/13283-vademecum-bimer.pdf.

([30]) FranceAgrimer, Prospective filière française de la pêche maritime, tome 1 : Représentation du système et scénarios, 21 mai 2018, p. 38.

([31]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse n° 63 au questionnaire budgétaire.

([32]) Assemblée nationale, Rapport d’information n° 3638 fait au nom de la délégation aux Outre-Mer sur le coût de la vie dans les Outre-Mer, par M. Lénaïck Adam et Mme Claire Guion-Firmin, 3 décembre 2020, p. 7.

([33]) Assemblée nationale, Rapport d’information n° 3638 fait au nom de la délégation aux outre-mer sur le coût de la vie dans les outre-mer, par M. Lénaïck Adam et Mme Claire Guion-Firmin, 3 décembre 2020, p. 11.

([34])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse n°63 au questionnaire budgétaire.

([35]) Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021, p. 10.

([36]) Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021, p. 22.

([37]) Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021, p. 32.

([38]) Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021, p. 10.

([39]) Marins ayant embarqué au moins un jour au cours de l’année.

([40]) Marins employés au long cours, au cabotage et à la navigation côtière hors portuaire et hors plaisance professionnelle, sur les navires de tous tonnages sous pavillon français et divers pavillons étrangers.

([41]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, Réponse à la question n° 35 du questionnaire budgétaire.

([42])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, Réponse à la question n° 35 du questionnaire budgétaire.

([43])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, Réponse à la question n° 38 du questionnaire budgétaire.

([44]) Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne.

([45]) Loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020.

([46]) M. Saïd Ahamada, Annexe n° 17 « Écologie, développement et mobilité durables : affaires maritimes » au rapport fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle sur le projet de loi de finances pour 2021 (n° 3360), par M.. Laurent Saint-Martin, p. 26-28.

([47]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([48]) M. Saïd Ahamada, Annexe n° 17 « Écologie, développement et mobilité durables : affaires maritimes » au rapport fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090), par M.. Laurent Saint-Martin, p. 51-52.

([49]) Décret n° 2021-603 du 14 mai 2021 instituant une aide aux employeurs de marins embarqués sur certains navires à passagers effectuant des trajets internationaux.

([50])  Ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

([51]) Ministère de la mer – Direction des affaires maritimes, réponses au questionnaire budgétaire n° 40 et 43.

([52])  Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation/

([53]) Camille Valero, « L’industrie de la croisière : Entre croissance et défis », Institut supérieur d’économie maritime Nantes-Saint-Nazaire, note de synthèse n° 202, septembre 2012, p. 1.

([54])  Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021, p. 23.

([55])  Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer signée le 1er novembre 1974 et entrée en vigueur le 25 mai 1980.

([56])  Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires adoptée le 2 novembre 1973 dans le cadre de l’Organisation maritime internationale.

([57]) Convention du travail maritime adopté le 23 février 2006 dans le cadre de l’Organisation internationale du travail.

([58])  Loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d’Outre-mer.

([59])  Loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue.

([60]) Assemblée nationale rapport d’information n° 1399 de la mission d’information sur la gestion des événements climatiques majeurs dans les zones littorales de l’Hexagone et des Outre-mer, présenté par Mme Maina Sage, présidente  et M. Yannick Haury, rapporteur, 14 novembre 2018, p. 107 p. 62.

([61]) Ibid., p. 82.

([62]) Association des élus du littoral, journées d’études de l’Association des élus du littoral, Pornic, 7 et 8 octobre 2021, dossier de presse, p. 4.

([63]) Hors fonds de concours et affectations de produits.

([64]) Hors fonds de concours et affectations de produits.

([65]) Organisation maritime internationale, Troisième étude sur les gaz à effet de serre - Résumé analytique, 2014, p. 1, p. 7 et p. 20.

([66]) Cette annexe est entrée en vigueur le 19 mai 2005.

([67]) Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires adoptée le 2 novembre 1973 à l’OMI  (révisée en 1978 et 1997) et entrée en vigueur le 2 octobre 1983.

([68]) Emission Control Areas.

([69]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°72 du questionnaire budgétaire.

([70])  Ministère  de la Transition écologique et solidaire Communiqué de presse «  Réduction des émissions de CO2 du transport maritime :  la France souhaite réguler la vitesse des navires », 4 avril 2019, disponible sur : https://www.ecologie.gouv.fr/reduction-des-emissions-co2-du-transport-maritime-france-souhaite-reguler-vitesse-des-navires

([71]) Organisation maritime internationale, Investigation of appropriate control measures (abatement technologies) to reduce black carbon emissions from international shipping, 2015, p. 7.

([72]) Organisation maritime internationale, Troisième étude sur les gaz à effet de serre - Résumé analytique, 2014, p. 12 et p. 14.

([73]) Information fournie par la direction des affaires maritimes.

([74]) Information communiquée par l’association Windship lors de son audition.

([75]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse n°85 au questionnaire budgétaire

([76])  Adeline Descamps, « CMA CGM passe commande de 22 nouveaux porte-conteneurs », Le journal de la marine marchande, 30 avril 2021.

([77]) Ministère de la mer, Statistiques-Flotte de commerce sous pavillon français, janvier 2021,  p.63

([78])  « CMA CGM annonce la mise sous pavillon français de 5 nouveaux navires de 15 000 EVP au GNL », disponible sur : https://www.cmacgm-group.com/fr/actualites-medias/CMA-CGM-annonce-la-mise-sous-pavillon-francais-de-5-nouveaux-navires-de-15000-EVP-au-GNL .

([79])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse n°85 au questionnaire budgétaire

([80]) Les garanties d’origines sont définies par la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre III du code de l’environnement.

([81])  Cette taxe, définie par l’article 209-0 B du code général des impôts, est un régime d’imposition forfaitaire dont le bénéfice est ouvert aux « entreprises dont le chiffre d’affaires provient pour 75 % au moins de l’exploitation de navires armés au commerce » et qui exploitent « sous pavillon d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen une proportion de tonnage net au moins égale à 25 % », qu’elles s’engagent à maintenir ou à augmenter.

([82])  Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°71 du questionnaire budgétaire.

([83])  Rapport de la Direction générale de l’armement, n° 236/DGA/DO/UM NBC /SCEN.

([84]) Direction des affaires maritimes- ministère de la mer, réponse n°73 au questionnaire budgétaire.

([85])  Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer signée le1er novembre 1974 et entrée en vigueur le 25 mai 1980.

([86])  Direction des affaires maritimes- ministère de la mer, réponse n°73 au questionnaire budgétaire.

([87])  Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves signée le18 mai 2007 et entrée en vigueur le 14 avril 2015.

([88])  « Déchets en mer : « La plupart des conteneurs perdus finissent au fond de l'eau », interview de Nicolas Tamic, responsable d'opérations au Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux, ActuEnvironnement.com, 30 avril 2021, disponible sur : https://www.actu-environnement.com/ae/news/dechets-mer-conteneurs-perdus-fond-eau-pollution-37457.php4 .

([89])  Mme Nadia Essayan et M. Patrice Perrot, rapport d’information n°4391 de la mission d’information de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation , 21 juillet 2021.

([90])  Réservoirs contenant de l’eau de mer qui sont remplis lorsque les navires n’ont pas de cargaison et qui sont vidés une fois les navires chargés.

([91])  Loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile.

([92])  Ministère de la mer – réponse à la question n°75 du questionnaire budgétaire.

([93])  Ministère de la mer – réponse à la question n°75 du questionnaire budgétaire.

([94]) APER, « Filière de recyclage des bateaux », disponible sur : https://www.recyclermonbateau.fr/filiere-de-recyclage-des-bateaux/ .

([95]) Ministère de la mer – réponse à la question n°76 du questionnaire budgétaire.

([96])  Ministère de la mer – réponse à la question n°76 du questionnaire budgétaire

([97])  Ministère de la mer – réponse à la question n°76 du questionnaire budgétaire.

([98])  Arrêté préfectoral n°123/2019f ixant le cadre général du mouillage et de l’arrêt des navires dans les eaux intérieures et territoriales françaises de méditerranée

([99])  Ministère de la mer – réponse à la question n°76 du questionnaire budgétaire.

([100]) Ministère de la mer – direction des affaires maritimes, réponse à la question n°32 du questionnaire budgétaire.

([101]) Office français de la biodiversité, « Les aires marines éducatives », disponible sur : https://ofb.gouv.fr/les-aires-marines-educatives.