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N° 4527

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2021.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482)

TOME III

COHÉSION DES TERRITOIRES

LOGEMENT

PAR Mme StÉphanie Do

Députée

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 Voir les numéros : 4582 et 4524 (Tome III, annexe 7).


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SOMMAIRE

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  Pages

introduction

PREMIÈRE PARTIE : Les CRÉDITS DU LOGEMENT montrent la dÉTERMINATION À accompagner les publics pendant la crise

I. LE PROGRAMME 109 « AIDE À L’ACCÈS AU LOGEMENT »

A. la rÉforme dES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT est entrÉE en vigueur

1. Les aides personnelles au logement continuent d’être un levier d’équité sociale particulièrement valorisé au cours de la crise

2. Le versement contemporain, réforme vectrice de justice sociale et d’économie budgétaire, a été ajusté pour ne pas pénaliser les publics précaires

B. Le dispositif VISALE et le rÉSEAU de l’information sur le logement amplifient leurs actions en faveur des locataires

1. Le dispositif Visale, qui connaît un succès croissant, a vu ses conditions d’octroi élargies

2. Le réseau ANIL/ADIL continue de jouer un rôle de premier plan dans l’accompagnement des ménages

II. LE PRogramme 135 « urbanisme, territoires et amÉlioration de l’habitat »

A. le gouvernement amplifie encore son soutien À LA transition ÉCOLOGIQUE ET ÉnergÉtique DANS LE BÂTIMENT

1. L’action de l’ANAH en faveur de la réhabilitation des logements prend toujours plus d’ampleur

2. La prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ » a vu ses conditions d’attribution élargies

B. Les dÉpenses fiscales doivent faire l’objet d’une discussion parlementaire approfondie

1. Des modulations du dispositif « Pinel » permettraient d’optimiser ses dernières années d’existence

a. Le dispositif « Pinel » a désormais un champ d’intervention resserré

b. Le bénéfice social en économie de loyer reste limité alors que la dépense fiscale est en expansion

2. Le dispositif « Censi-Bouvard », qui a permis de soutenir la création de logements dans des résidences de services, va être prorogé

3. D’autres leviers fiscaux en faveur de l’investissement locatif privé vont évoluer

III. le programme 177 « HÉbergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnÉrables »

A. L’effort d’HÉbergement d’urgence est pÉrennisÉ

1. L’effort financier et institutionnel massif en faveur de l’hébergement d’urgence a été prolongé

2. Les centres d’hébergement spécialisés ouverts pour la crise ont eu un impact important

B. le PROGRAMME « logement d’abord » Évolue vers un nouveau service public de la rue au logement

1. Le programme « Logement d’abord » a été un succès

2. La création d’un nouveau service public valide les efforts fournis au cours de la législature

SECONDE PARTIE : LA prÉVENTION DE LA CRISE DU LOGEMENT doit Être au cœur des prÉoccupations du lÉgislateur

I. le secteur de la construction NEUVE ne s’est pas relevÉ du coup d’arrÊt imprimÉ par la crise sanitaire

A. EN DÉPIT de la relance, la construction continue d’Être insatisfaisante DANS le secteur privÉ

1. Un décrochage structurel de la construction neuve en zone tendue a eu lieu au cours des dernières années

2. La production de logements sociaux ne répond pas aux ambitions des réformes menées

B. Le logement traverse une crise structurelle liÉE À l’inacceptabilitÉ sociale de l’acte de construire

1. Les populations et les élus montrent une réticence croissante envers l’acte de construire

2. Modifier les règles d’urbanisme pour encourager des dynamiques positives dans l’aménagement et la construction

3. Mieux soutenir les décideurs locaux dans la construction pour aider les territoires à mieux produire du logement

C. concilier la recherche de la qualitÉ du logement avec la massification de la construction

1. Les dispositifs fiscaux d’incitation à l’investissement locatif peuvent être mieux ciblés sur une construction durable

a. Le dispositif Pinel a permis le développement de logements intermédiaires dans les zones tendues

b. Prévoir sans délaisser : la fin du dispositif Pinel doit amener à penser sa suite sans abandonner l’accompagnement des investisseurs jusqu’à son terme

c. Réfléchir à l’avenir de la réduction d’impôt « Denormandie dans l’ancien »

2. Mieux aiguiller l’aide à l’accession vers des projets qui s’inscrivent dans une démarche de sobriété foncière

3. Vers un référentiel de la qualité du logement ?

II. Dans ce cadre, l’action des acteurs institutionnels continue de compter fortement pour l’avenir du secteur

A. les deux acteurs majeurs du secteur continuent d’Être des soutiens prÉcieux pour l’action de l’État

1. Le groupe Action Logement augmente encore son engagement dans les quartiers prioritaires

2. Le groupe Caisse des dépôts et consignations soutient le marché par des prêts et subventions avantageux

B. le fonds national des aides À la pierre doit Être abondÉ pour promouvoir la production de logements

1. La production de logements sociaux et intermédiaires doit être amplifiée pour résorber le décalage entre l’offre et la demande

2. Le Fonds national des aides à la pierre, sous employé, doit voir sa gouvernance et son mode d’action évoluer

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes


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   introduction

 

Dans la première partie de son avis, votre rapporteure examine les crédits des programmes 109, 135 et 177 de la mission interministérielle « Cohésion des territoires », qui relèvent principalement des compétences de la ministre déléguée chargée du logement.

Les crédits du programme 109 « Aide à l’accès au logement » continuent de connaître une dynamique forte au titre notamment de l’effort fourni, tout au long de la crise sanitaire, sur les aides personnelles au logement (APL). Cet effort se traduit par une hausse des crédits, et ceci en dépit de l’économie budgétaire, estimée à 1,1 milliard d’euros (Md€), qui a résulté de la réforme du versement contemporain des aides, entrée en vigueur au 1er janvier 2021. Avec 13,079 Md€ en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), le programme enregistre une progression de 700 millions d’euros (M€) par rapport aux 12,427 Md€ de la loi de finances initiale (LFI) de l’an dernier (+ 5,1 %), qui était elle-même en progression de près de quatre points par rapport à l’année précédente.

Les crédits du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat » apparaissent stables. L’impulsion apportée en 2021 et en 2022, dans le cadre du plan de relance, à la rénovation énergétique des logements, qui passe en particulier par la forte montée en charge du dispositif de la prime de transition énergétique, ne repose en effet que partiellement sur la mobilisation des crédits de ce programme. L’activité de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), opérateur de ce programme, connaît cependant une croissance forte dans l’ensemble de ses domaines d’action.

Les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » augmentent à nouveau de manière très considérable, poursuivant en cela la trajectoire engagée ces dernières années. Leur évolution cette année est de + 21 % en CP, passant de 2,200 Md€ en 2021 à 2,677 Md€ en 2022 et de + 28 % en AE, passant de 2,175 Md€ à 2,786 Md€ par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale l’an dernier, déjà en hausse de plus de 10 % par rapport à 2019. Cette dynamique très forte traduit la poursuite de l’effort en faveur des capacités d’hébergement d’urgence engagé en réponse à la crise sanitaire, et l’engagement renouvelé en faveur de l’accès au logement des populations vulnérables, dont témoigne la création du nouveau service public de la rue au logement.

Au total, le budget du logement est de 17,15 Md€ en 2022 (programmes 109, 177, 135 et taxes affectées), ce qui représente une hausse de plus de 1 Md€ par rapport à l’année dernière. À ce budget s’ajoutent les 2 Md€ engagés au titre de la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ », qui relève du programme 174. Ces crédits permettent des avancées structurantes pour nos politiques publiques :

– des moyens massifs pour la rénovation des logements : l’augmentation de 2 Md€ des crédits orientés vers la rénovation énergétique et la création de 33 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires pour l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), étant entendu également que la Caisse des dépôts et consignations est particulièrement investie dans cette dynamique par la mise en avant d’une offre de prêts diversifiée (prêt classique, éco-prêt qui a permis la réhabilitation depuis 2009 de 425 000 logements sociaux, soit 14,5 Md€ de travaux engagés, prêt de haut de bilan bonifié, etc.) ;

 un changement de méthode historique dans la lutte contre le « sansabrisme », avec un budget de 2,7 Md€ pour le programme 177, qui représente une hausse de 50 % sur la durée du quinquennat. Dans la continuité de la première loi de finances rectificative pour 2021, le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 actera la fin de la « gestion au thermomètre » des places d’hébergement, avec un objectif de 190 000 places d’hébergement fin 2022 et une augmentation de 7,5 % des crédits consacrés au programme « Logement d’abord », pour permettre un accompagnement vers des solutions de logement pérennes ;

– l’accompagnement des Français vers un logement abordable, avec un budget stable pour les aides personnelles au logement de 15,5 Md€ et le financement de 250 000 logements sociaux sur deux ans.

Dans la seconde partie de son rapport, votre rapporteure mène une réflexion sur la santé du secteur du logement et notamment de la construction. Les moyens qui ont été déployés dans le cadre du plan de relance impulsé par le Gouvernement sont massifs et ont permis de maintenir les filières du bâtiment et des travaux publics (BTP) à flot, ce dont les acteurs se réjouissent. En revanche, des appréhensions demeurent sur les perspectives à long terme du bâtiment, dans le cadre de changements paradigmatiques comme la lutte contre l’artificialisation des sols, consacrée dans le droit par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « loi Climat et résilience »), et la réticence des populations et des élus envers l’acte de construire.

Votre rapporteure constate que les chiffres de la construction (permis de construire, mises en vente et commercialisations) témoignent d’un ralentissement structurel de la production de logements neufs : 384 000 logements ont été autorisés au cours des douze derniers mois contre 457 000 en février 2020. Ce constat est d’autant plus préoccupant que le ralentissement de la construction neuve est plus fort dans les zones tendues, où le besoin en offre nouvelle est le plus important. Toute la chaîne de la construction, de l’autorisation jusqu’à la mise en vente, est en repli. Sans un rebond rapide, ce ralentissement aura des effets durables sur l’offre de logement disponible pour nos concitoyens, avec un effet d’éviction des plus modestes vers des territoires où les marchés de l’immobilier et de la location sont plus accessibles.

Et la crise n’a rien changé sur ce plan, avec désormais moins de 180 000 logements autorisés sur douze mois. Malheureusement, ce décrochage dans les zones tendues s’observe également pour le logement social.

Votre rapporteure estime que les causes de ce phénomène sont en partie attribuables à la crise sanitaire, qui frappe durement notre pays et a fortement affecté la production de logements neufs. Les périodes de confinement et l’allongement des élections municipales ont conduit à un ralentissement net de la délivrance des permis de construire.

Tout particulièrement dans nombre de grands métropoles, c’estàdire là même où des tensions existaient déjà, l’octroi de permis de construire s’est très significativement réduit, parfois effondré, touchant à l’occasion des opérations déjà lancées. Les permis de construire délivrés en zone tendue en juin 2021 sont en fort repli, de l’ordre de – 20 % par rapport à leur moyenne d’avant crise. En Île-de-France, les tensions sur le marché du logement atteignent des niveaux inégalés.

Votre rapporteure alerte sur le fait que continuer de créer des emplois dans les métropoles tout en y freinant la construction, c’est tout simplement accepter, et même organiser, l’éviction des plus pauvres en dehors des villes et des métropoles. C’est condamner une partie de la population active à devoir habiter toujours plus loin de son lieu de travail, en nourrissant un insupportable sentiment de relégation.

Le logement est un bien de première nécessité. Qu’il se raréfie, qu’il vienne à manquer, que ses prix augmentent de façon à le rendre inaccessible à toute une part de la population, et c’est, nous le savons, notre pacte social et républicain qui est aussitôt mis en péril.

Dans ce cadre, votre rapporteure salue les annonces récentes du Premier ministre en ce qui concerne la mobilisation du levier fiscal afin de rendre la production de logements plus attractive pour les exécutifs locaux, bien qu’elle regrette que ces évolutions n’aient pas été intégrées au projet de loi de finances initial afin de mieux nourrir les débats parlementaires.

Au terme de son analyse, votre rapporteure émet un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 109, 135 et 177 de la mission « Cohésion des territoires ».

 

Numéro et intitulé du programme et de l’action

LFI 2021

PLF 2022

Évolution 2021/2022

(CP en M€)

(CP en M€)

(en %)

109 – Aide à l’accès au logement

12 439

13 079

+ 5,1

01 – Aides personnelles

12 427

13 070

+ 5,1

02 – Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté

11,3

9,4

– 16,8

03 – Sécurisation des risques locatifs

1

0

– 100

135 – Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

523

530

+ 1,3

01 – Construction locative et amélioration du parc

19

17,5

– 7,9

02 – Soutien à l’accession à la propriété

4,1

4,1

0

03 – Lutte contre l’habitat indigne

19,2

15,5

– 19,3

04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction

217

217

0

05 – Soutien

25

29,4

+ 16,8

07 – Urbanisme et aménagement

239

 246

+ 3,3

177 – Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

2 200

2 677

+ 21,7

11 – Prévention de l’exclusion

52

32

– 39,3

12 – Hébergement et logement adapté

2 138

2 637

+ 23,3

14 – Conduite et animation des politiques de l’hébergement et de l’inclusion sociale

9,1

9,1

0

TOTAL Programmes 109, 135 et 177

15 162

16 286

+ 7,4

Source: Projet de loi de finances pour 2022, projet annuel de performances de la mission « Cohésion des territoires »

 

 

 


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   PREMIÈRE PARTIE :
Les CRÉDITS DU LOGEMENT montrent la dÉTERMINATION À accompagner les publics pendant la crise

I.   LE PROGRAMME 109 « AIDE À L’ACCÈS AU LOGEMENT »

Le programme 109 connaît une progression forte qui résulte essentiellement du dynamisme des aides au logement, en dépit de la réforme du versement contemporain, vecteur d’économies. L’évolution globale de l’enveloppe correspond à la hausse de l’action 01 (« aides personnelles »), presque exclusivement constituée de dépenses d’intervention.

(en euros)

Programme / action

LFI 2021

PLF 2022

Écart LFI 2021/ PLF 2022

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01 – Aides personnelles

12 427 000 000

12 427 000 000

13 070 000 000

13 070 000 000

643 000 000

643 000 000

Action 02 – Info. logement et accompagnement

11 300 000

11 300 000

9 400 000

9 400 000

- 1 900 000

- 1 900 000

Action 03 –
Garantie des risques locatifs

1 000 000

1 000 000

0

0

- 1 000 000

- 1 000 000

TOTAL P 109

12 439 300 000

12 439 300 000

13 079 400 000

13 079 400 000

640 100 000

640 100 000

Source : Projet de loi de finances pour 2022, projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires »

A.   la rÉforme dES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT est entrÉE en vigueur

1.   Les aides personnelles au logement continuent d’être un levier d’équité sociale particulièrement valorisé au cours de la crise

Les trois aides personnelles au logement (APL), qui constituent la prestation majeure servie par la branche Famille de la sécurité sociale, constituent un outil fortement redistributif dont le rôle de stabilisateur a aidé ses 6,5 millions d’allocataires à traverser la crise dans de bonnes conditions.

L’octroi des APL réduit en effet nettement l’effort financier des bénéficiaires, mesuré en calculant le taux d’effort supporté par les ménages, c’est-à-dire la part des dépenses du logement sur le revenu net. Le taux d’effort brut, avant la déduction des allocations, est plus élevé pour les ménages locataires et bénéficiaires des aides au logement et les écarts se réduisent pour le taux d’effort net, après la déduction des allocations.

Globalement, les aides au logement réduisent d’un tiers le taux d’effort agrégé des ménages qui en bénéficient, l’abaissant de 41 % à 27 % en 2021, tandis qu’il passe de 19 % à 18 % pour l’ensemble des ménages. Le résultat est que le taux d’effort des allocataires se rapproche du taux d’effort moyen des ménages, surtout dans le parc social, où il passe à 24 % (contre 28 % dans le parc privé).

 

Les prestations d’APL

En 2021, environ 17 milliards d’euros (dont 80 % versés par l’État) de prestations d’aides personnelles au logement ont été versées à environ 6,5 millions de ménages.

(en millions d’€)

Locatif

Foyers

Accession

Ensemble

APL

6 625

755

187

7 567

ALS

4 626

340

78

5 044

ALF

3 681

< 1

370

4 051

Ensemble

14 932

1 095

635

16 662

Source : CNAF et CCMSA, ventilation entre Locatif et Foyers estimée par la DHUP pour l’ALS

(en milliers de personnes)

Locatif

Foyers

Accession

Ensemble

APL

2 593

276

87

2 956

ALS

2 152

213

52

2 417

ALF

975

1

194

1 170

Ensemble

5 720

490

333

6 543

Source : statistiques de bénéficiaires CNAF et CCMSA (répartition par parc estimée pour la CCMSA)

2.   Le versement contemporain, réforme vectrice de justice sociale et d’économie budgétaire, a été ajusté pour ne pas pénaliser les publics précaires

La mise en œuvre de la réforme du versement contemporain des aides au logement, dite réforme des « APL en temps réel », a eu lieu au 1er janvier 2021. Cette réforme, qui se situe dans la lignée de la réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu et dont l’échéance avait précédemment été reportée deux fois ([1]), vise à ajuster la méthode de calcul des aides au logement afin que les revenus pris en compte pour déterminer leur niveau soient ceux de l’année n et non plus ceux de l’année n - 2. Cette réforme permet ainsi d’actualiser de manière automatique, tous les trimestres, les ressources des bénéficiaires afin de déterminer de façon plus juste le montant d’APL à verser en fonction de la réalité des ressources perçues.

Avec le versement en temps réel des aides personnelles au logement, nous sommes désormais certains de voir des versements au plus près des droits des Français et de soutenir ceux qui en ont le plus besoin pour se loger.

Les mesures gouvernementales (activité partielle, fonds de solidarité, etc.) ont permis le maintien du pouvoir d’achat des Français en 2020 et 2021. Notre système de protection sociale a su résister en cette année de crise sanitaire inédite. La majorité des allocataires (52 %) ont vu leur situation inchangée avec les APL en temps réel, car nous renforçons notre système de protection sociale. Ainsi, en janvier 2021 :

‒ pour 52,2 % des allocataires, la réforme des APL en temps réel est sans impact sur le montant de leur allocation ;

‒ pour 29,6 % d’entre eux, la réforme conduit à une baisse des APL d’un montant moyen de 73 euros. Parmi eux, 6,6 % perdent leur droit aux APL ;

‒ pour 18,2 % d’entre eux, la réforme conduit à une hausse de leur montant d’APL de 49 euros en moyenne. Parmi eux, 115 000 allocataires n’auraient pas bénéficié d’APL en 2021 sans la réforme.

Le versement en temps réel des APL, une réforme adapté aux plus précaires

La réforme des APL a fait l’objet de plusieurs ajustements visant à mieux prendre en compte la situation des personnes les plus fragiles :

– les ressources des étudiants sont prises en compte sur la base d’un forfait, de sorte que la réforme ne modifie pas leur APL à situation inchangée et améliore l’APL des étudiants salariés (en d’autres termes, quel que soit le montant de leur rémunération, leur APL ne varie pas, contrairement au système précédent).

– les apprentis bénéficient d’un abattement sur leurs ressources ;

– les titulaires d’un contrat de professionnalisation bénéficieront également de cet abattement en septembre, avec effet rétroactif pour les nouveaux allocataires. D’ici là, les allocataires bénéficient du maintien de leur droit de décembre 2020 avec un abattement sur le revenu équivalent au SMIC ;

– pour les jeunes actifs, par ailleurs, le groupe Action Logement propose une aide gratuite de 1 000 euros pour aider ceux dont les revenus bruts sont compris entre 30 % (467 euros) et 110 % (1 711 euros) du SMIC brut (1 554,58 euros au 1er janvier 2021) à s’installer dans leur logement.

Cette réforme a permis de dégager une économie actuellement estimée à 1,1 Md€. La prévision retenue dans la loi de finances initiale pour 2021, qui était de l’ordre de 750 M€, a été fortement rehaussée. Cette évolution est à mettre au crédit de la préservation des ressources des allocataires pendant la crise sanitaire du fait des mesures de soutien déployées par le Gouvernement : activité partielle, prêts et subventions, prolongement de droits, aides individuelles d’urgence, etc.

La lecture du PLF pour 2022 permet cependant de se rendre compte que la dépense budgétaire pour les APL en 2021 devrait être quasiment identique à celle prévue en loi de finances initiale, c’est-à-dire de l’ordre de 15,6 Md€, et que la dépense restera dynamique en 2022. En effet, le tendanciel de dépenses en matière d’aides au logement, hors mise en œuvre de la réforme, s’est avéré être plus élevé que ce qui était anticipé lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2021.

Dans la mise en œuvre de cette réforme, la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) a connu des difficultés d’une ampleur inattendue, selon sa présidente et son directeur général, entendus par votre rapporteure. Il était prévu, comme pour tout changement dans les prestations sociales, qu’il y ait un « choc de contact », assez rapidement mesuré dans le nombre de sollicitations au guichet. Certaines problématiques, en particulier, ont émergé. L’ancien système prenait en compte toutes les catégories possibles de ressources et de dépenses, dont les charges. Aujourd’hui, la CNAF ne s’alimente plus à la feuille d’impôts mais au payeur des impôts, et elle a donc dû demander aux bénéficiaires de lui communiquer le montant de leurs frais réels. Ces difficultés de transition ont occasionné un surcroît de travail considérable aux personnels des caisses.

Votre rapporteure tient donc à saluer les efforts considérables consentis par les personnels de la CNAF et des caisses d’allocations familiales, noyau professionnel qui a été mis à rude épreuve, pour assurer la réussite de la mise en œuvre de la réforme, alors même que l’exercice budgétaire a vu 500 suppressions d’ETP en contrat à durée indéterminée au sein de la branche Famille. Les personnels ont réussi à mener de front cette réforme d’ampleur tout en renouvelant massivement le système d’information sous-jacent au calcul et à la liquidation des aides, qui datait précédemment des années 1980. Ces deux chantiers concomitants ont occasionné des difficultés informatiques qui ont touché, certains mois, jusqu’à 3 % des six millions d’allocataires. Le rétablissement des personnes lésées dans leurs droits et la correction des défauts d’identification a mobilisé fortement les personnels des caisses.

B.   Le dispositif VISALE et le rÉSEAU de l’information sur le logement amplifient leurs actions en faveur des locataires

1.   Le dispositif Visale, qui connaît un succès croissant, a vu ses conditions d’octroi élargies

Les crédits de la garantie des risques locatifs (GRL), en voie d’extinction depuis six exercices, s’éteignent définitivement cette année (action n° 03 du programme 109). La GRL, destinée à faciliter l’accès au logement des locataires potentiels qui auraient des difficultés à présenter une personne physique qui soit leur caution, est fondée sur la souscription par le bailleur d’un contrat d’assurance garantissant le risque d’impayés de loyer et les dégradations locatives. Historiquement cofinancée par la participation des employeurs à la construction et l’État, la GRL a été remplacée en 2016 par le dispositif Visale, financé et géré par le groupe Action Logement.

Ce dispositif, qui avait déjà témoigné de son dynamisme l’an dernier, a fait cette année encore l’objet d’une progression impressionnante, le nombre de ménages logés grâce à Visale passant de 310 000 en septembre 2020 à 500 000 un an plus tard (+ 61 %).

Le régime conventionnel du dispositif Visale

Il avait été convenu, à l’occasion de la convention quinquennale 2015-2019 entre l’État et l’organisme gestionnaire de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), signée le 2 décembre 2014, et de la convention État-Action Logement du 24 décembre 2015 pour la mise en œuvre de Visale, de mettre en place un dispositif permettant de « sécuriser les salariés entrant dans un emploi par tout contrat de travail, y compris mission d’intérim, ou par promesse d’embauche, hors contrat à durée indéterminée (CDI) confirmé, d’une entreprise du secteur dit assujetti (secteur privé hors agricole) et entrant dans un logement du parc locatif privé ».

Ce dispositif bénéficie, par extension, à l’ensemble des jeunes salariés de moins de trente ans du secteur assujetti, ainsi qu’aux ménages accompagnés dans le cadre d’une intermédiation locative (logement en mandat de gestion ou dans un dispositif de location – sous-location) via un organisme agréé dans les conditions prévues à l’article L. 365-4 du code de la construction et de l’habitation.

La nouvelle convention quinquennale 2018-2022 et l’avenant à la convention Visale du 19 juin 2018 prévoient une nouvelle extension du dispositif, pour les publics suivants :

– tous les étudiants sans distinction (notamment en incluant les publics non boursiers et rattachés au foyer fiscal de leurs parents, dans tous les parcs de logement) ;

– les titulaires d’un « bail mobilité » et bénéficiaires du dispositif de mobilisation des logements vacants du parc privé « Louer pour l’emploi » ;

– les salariés de plus de 30 ans en double mobilité professionnelle et résidentielle, y compris ceux en CDI confirmé.

À la suite des dispositions de l’avenant de relance du 15 février 2021 et à compter de juin 2021, les salariés de plus de 30 ans sous conditions de ressources peuvent également bénéficier de la garantie.

Le dispositif Visale prend la forme d’un contrat de cautionnement dans lequel Action Logement s’engage à payer au bailleur les loyers et charges récupérables non payées par son locataire, dans la limite d’un plafond fixé à 1 500 euros de ressources en Îlede-France et 1 300 euros pour le reste du territoire. Pour les étudiants et alternants sans justification de ressources, le loyer maximum est fixé à 800 euros en Île-de-France et 600 euros dans le reste du territoire. La couverture comprend 36 mois de loyers maximum dans le parc privé et 9 mois dans le parc social. Visale couvre par ailleurs les dégradations locatives pour les logements relevant du parc locatif privé. Les frais de remise en état, en cas de dégradations imputables au locataire, sont couverts jusqu’à deux mois de loyer et charges inscrits au bail, après déduction du dépôt de garantie (sauf pour le bail mobilité qui n’autorise pas de dépôt de garantie).

Ce dispositif est distribué directement et gratuitement par le réseau Action Logement. En outre, Action Logement est en charge du recouvrement des créances auprès des locataires en impayés, par voies amiable et contentieuse.

Le groupe Action Logement a poursuivi les efforts engagés lors du dernier exercice en vue d’assurer la publicité de Visale auprès des particuliers. En effet, le dispositif a fait l’objet d’une campagne publicitaire soutenue en juin, juillet et septembre 2020, à la radio et à la télévision. Ces opérations visent en particulier les bailleurs, dont certains restent à ce jour sceptiques quant à la fiabilité de cet instrument. Une progression comprise entre six et dix points de la notoriété du dispositif auprès du public avait été mesurée à l’occasion des sondages réalisés.

Chez les publics locataires visés, cette aide dispose d’une réputation de plus en plus ancrée. Par exemple, sur la plateforme « MesServicesÉtudiants », l’accès au dispositif Visale est assuré par une pastille d’accès voisine de celle des résidences des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), ce qui permet d’assurer la notoriété auprès d’un public cible important.

Votre rapporteure, qui avait plaidé l’an dernier en faveur d’un élargissement des critères d’éligibilité à cette aide ([2]), se réjouit que cette préconisation ait été suivie d’effet. Depuis le 1er juin 2021, le bénéfice de la garantie Visale est élargi à tous les salariés gagnant moins de 1 500 euros nets par mois, quels que soient leur âge et la nature de leur contrat de travail.

Néanmoins, pour votre rapporteure, il demeure absolument nécessaire – tout particulièrement, en cette période de crise sans précédent aux impacts dévastateurs sur notre jeunesse – d’élargir les critères d’éligibilité à la garantie Visale en ce qui concerne les étudiants. À l’heure actuelle, la garantie Visale n’est pas disponible si le loyer du bien loué se situe au-dessus d’un certain loyer plafond, qui atteint 1 500 euros en Île-de-France et 1 300 euros hors Île-de-France. Lorsque l’étudiant n’a pas de ressources propres, ces loyers plafonds sont respectivement de 800 et 600 euros. Votre rapporteure estime que ces plafonds compliquent et inhibent l’accès au dispositif et que les étudiants doivent pouvoir y accéder sans pour autant exercer le temps plein nécessaire pour être considéré comme disposant de ressources autonomes. En effet, la jouissance de cette garantie ne doit pas se faire au détriment d’un parcours d’études serein et apaisé.

2.   Le réseau ANIL/ADIL continue de jouer un rôle de premier plan dans l’accompagnement des ménages

Le réseau des associations départementales d’information sur le logement (ADIL), qui sont présentes dans 85 départements et dont la mission est d’informer les ménages et les acteurs territoriaux sur les questions liées au logement, est financé à hauteur de 50 % par l’État. C’est l’action n° 02 du programme 109 qui porte ce financement à 9,4 M€ en 2022.

Le réseau a poursuivi cette année son action de soutien en matière de loyers impayés, la plateforme « SOS loyers impayés » proposant un accompagnement des procédures avec des conseils sur les délais et les obligations ou encore des modèles de courriers administratifs. Un numéro vert est mis à disposition afin d’entrer en contact avec un juriste du réseau, qui explique les procédures et oriente vers les acteurs qui peuvent accompagner les demandeurs. Le réseau ADIL constitue ainsi une porte d’entrée utile pour actionner le Fonds de solidarité logement (FSL), également très sollicité à l’occasion de la crise sanitaire.

Pour ce qui concerne la problématique des impayés de loyers, déjà soulevée l’an dernier, votre rapporteure a sondé les caisses d’allocations familiales et les ADIL sur le sujet. Il apparaît, selon les données transmises par ces acteurs, que les dossiers de loyers impayés sont passés en-dessous de la barre des trois cent mille, tombant à 289 000 dossiers en 2021. Le temps de la crise a été un temps de protection, les bailleurs, comme tous les acteurs économiques du pays, ayant fait preuve d’une certaine compréhension. Les dispositions prises par le Gouvernement ont aussi contribué à limiter les cas de dégradation de la solvabilité des ménages. La CNAF a également mobilisé 50 M€ pour des aides individuelles d’urgence, dont 20 M€ ont été distribués l’an dernier, l’enveloppe de 10 M€ prévue au titre de l’année en cours ayant déjà été entièrement consommée à ce jour.

L’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL), qui pilote le réseau, s’est également vue doter d’une mission d’accompagnement sur la rénovation énergétique. Votre rapporteure, qui avait plaidé l’an dernier en faveur d’une extension budgétaire pour permettre à l’agence de mieux faire face à ses obligations, se réjouit donc de la dotation supplémentaire de 10 M€ qui lui a été accordée. Dans une période où les normes sur le bâtiment se cumulent et se complexifient, l’ANIL fournit une aide précieuse aux particuliers pour se situer lors de leurs projets d’adaptation, du ravalement à la surélévation.

II.   LE PRogramme 135 « urbanisme, territoires et amÉlioration de l’habitat »

Ce programme, qui porte une grande variété de crédits budgétaires, connaît sur l’exercice une certaine stabilité. Des subventions pour service public de montants équivalents continuent d’être versés aux quatre opérateurs qui en dépendent et qui ont vu leurs actions s’amplifier au cours des derniers exercices : la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS), le Fonds national des aides à la pierre (FNAP) et l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Les crédits de cette dernière correspondent à ses dépenses de fonctionnement et de personnel et à certaines de ses prestations, notamment l’aide « Habiter mieux », mais ne comprennent pas les crédits de la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ », distribuée par l’ANAH mais financée sur des crédits des programmes 174 et 362.

(en euros)

 

Programme / action

LFI 2021

PLF 2022

Ecart LFI 2021/ PLF 2022

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01 – Construction locative et amélioration du parc (dont FNAP)

19 000 000

19 000 000

17 500 000

17 500 000

- 1 500 000

- 1 500 000

Action 02 – Soutien à l’accession à la propriété

4 100 000

4 100 000

4 100 000

4 100 000

0

0

Action 03 – Lutte contre l’habitat indigne

15 500 000

19 200 000

15 500 000

15 500 000

0

- 3 700 000

Action 04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction (dont ANAH)

217 400 000

217 400 000

217 400 000

217 400 000

0

0

Action 05 – Soutien

26 070 000

25 200 000

29 430 000

29 430 000

3 360 000

4 230 000

Action 07 – urbanisme et aménagement

241 391 811

238 561 811

246 347 932

246 347 932

4 956 121

7 786 121

Programme 135

523 461 811

523 461 811

530 277 932

530 277 932

6 816 121

6 816 121

A.   le gouvernement amplifie encore son soutien À LA transition ÉCOLOGIQUE ET ÉnergÉtique DANS LE BÂTIMENT

1.   L’action de l’ANAH en faveur de la réhabilitation des logements prend toujours plus d’ampleur

Le périmètre de compétence de l’Agence nationale de l’habitat, établissement public administratif historiquement chargé de l’amélioration des logements du parc privé, n’a pas évolué lors des derniers exercices, mais l’intensité des actions qu’elle déploie a fortement augmenté. Comme le fait valoir son directeur général adjoint, entendu par votre rapporteure, l’ensemble des vecteurs de rénovation et de réhabilitation animés par l’agence connaissent depuis deux ans un changement de dimension considérable. En effet, en ce qui concerne l’habitat indigne, la prise en main des copropriétés, l’adaptation des logements aux pertes d’autonomie et la rénovation énergétique, les actions menées par l’agence connaissent une dynamique positive, avec une augmentation de 30 % des aides historiques sur l’exercice écoulé.

L’ANAH distribue la prime de transition énergétique (PTE) « MaPrimeRénov’ », qui est encore montée en charge cette année après son lancement l’an dernier. Là où il avait été annoncé que 500 000 ménages auraient été aidés à fin 2021, le nombre atteint se situera plutôt aux environs de 700 000 dossiers validés, avec un taux de validation qui avoisine les 86 %, le ministère chargé du logement indiquant qu’environ 10 % des dossiers sont refusés. Le directeur général adjoint de l’ANAH a notamment pu souligner que le plan de relance a eu pour résultat de massifier considérablement la demande, de sorte que ce qui devait être réalisé sur les deux exercices 2021 et 2022 sera finalement réalisé sur la seule année 2021.

La forte montée en charge du programme PTE, qui a sollicité les personnels de l’agence de façon intense, n’a pas entraîné un abandon de ses missions historiques. En effet, les programmes de l’ANAH hors PTE atteignent en 2021 un total de 100 000 ménages aidés, là où la moyenne en 2018 se situait autour de 80 000 ménages aidés. En rassemblant toutes les actions de l’agence, celle-ci a vu son activité multipliée par dix en trois ans.

Ainsi, le programme « Habiter mieux », qui se situe au cœur de la mission historique de l’opérateur, continue-t-il de mener une part importante de son activité. Ce programme permet de faire des rénovations globales pour les ménages modestes et très modestes. Il permet, en parallèle du déploiement de « MaPrimeRénov’ », d’assurer une offre complémentaire et complète : la rénovation par geste permise avec la PTE n’a pas absorbé le programme « Habiter mieux », qui continue de croître, et n’a donc pas freiné la rénovation globale, qui constitue aux yeux de votre rapporteure un vecteur important pour l’adaptation des logements.

Ce programme reste en effet un vrai succès : l’entièreté des crédits au titre de cette année sont d’ores et déjà consommés, et l’ANAH s’interroge désormais sur le niveau approprié pour accompagner cette dynamique vertueuse du programme, (60 000 ménages aidés). Votre rapporteure estime que, si l’ANAH a un devoir de maîtrise de ses ressources, il est important de trouver le bon point d’équilibre pour ne pas freiner dans les territoires la dynamique d’utilisation de ce programme, qui a fait ses preuves. Un abondement des crédits au titre de ce programme pourrait donc être bienvenu.

Le programme « Habiter mieux », pour lequel l’ANAH bénéficie de 170 M€ de crédits budgétaires, soit le même montant qu’en loi de finances initiale pour 2021, présente l’avantage d’être un programme expérimenté et bien organisé. Ciblé sur trois gestes de travaux réalisés, il s’inscrit dans le cadre d’une évaluation avant/après, le ménage étant accompagné par l’ANAH pour l’aider à monter son dossier et calculer le gain énergétique réalisé. « Habiter mieux » permet d’obtenir des améliorations tangibles de la qualité thermique : un gain de 35 % d’énergie est nécessaire pour justifier l’opération (précédemment, l’exigence n’était que de 25 %) ; une moyenne de 40 % de gain énergétique est constatée sur les opérations réalisées dans le cadre du programme.

Selon votre rapporteure, le succès des programmes de l’ANAH réside dans la place faite au sein de chacun d’eux à l’accompagnement : tous les ménages sont accompagnés et ce, quel que soit le dispositif dont ils veulent bénéficier. Concrètement, un accompagnateur technique fournit un accompagnement avant/après et est présent tout au long de la démarche pour monter le dossier de demande d’aide. Cet accompagnement est essentiel, tout particulièrement dans le cadre de « MaPrimeRénov’ » : pour massifier ce dispositif, il faut en faire un instrument participant à la rénovation globale, ce qui nécessite un accompagnement généralisé des ménages, comme le préconise le rapport de M. Olivier Sichel publié en mars 2021.

Le programme FAIRE, qui regroupe mille conseillers, exerce une action très positive dans ce sens, mais n’est pas encore à disposition pour aider les ménages sur tout le territoire. De plus, la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 met en place une offre d’accompagnement, qui permet à tous les ménages de bénéficier d’une information complète sur les questions de rénovation.

2.   La prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ » a vu ses conditions d’attribution élargies

Les droits à la prime de transition énergétique (PTE) ont été élargis. La forte impulsion apportée à la transition énergétique dans le plan de relance de 2021 et dans la loi précitée du 22 août 2021 a suscité une réflexion sur l’ouverture des droits à la PTE. Avec, comme horizon, la sortie du parc locatif privé des logements notés G et F dans le cadre d’un diagnostic de performance énergétique en 2024 et 2028, respectivement, il a été considéré qu’une aide doit être apportée aux bailleurs afin qu’ils adaptent leur logement en amont de ces échéances. Là où le dispositif devait initialement être ouvert seulement aux propriétaires occupants, il a finalement été étendu aux propriétaires bailleurs ainsi qu’aux copropriétés, là où seules les copropriétés fragiles avaient été ciblées initialement. L’extension aux bailleurs a également été décidée compte tenu du fait que le dispositif que la prime remplace, à savoir le crédit d’impôt à la transition énergétique (CITE), était ouvert aux locataires, ce qui n’est plus le cas de la prime. Il est donc apparu que les biens se trouvant sur le marché locatif n’avaient plus de moyen naturel de bénéficier d’une aide à la rénovation. Cette ouverture aux propriétaires bailleurs et aux copropriétés fait donc de cette aide l’aide la plus universelle en matière de logement.

La plateforme « MaPrimeRénov’ » a été ouverte aux propriétaires bailleurs le 1er juillet 2021, avec un effet rétroactif qui permet de déposer une demande même si les travaux ont été engagés au 1er janvier. Pour l’heure, il demeure un temps d’appropriation nécessaire pour les bailleurs, et seuls dix mille dossiers ont été déposés depuis le 1er juillet. Votre rapporteure estime qu’il faut œuvrer pour faire connaître l’aide aux propriétaires bailleurs, afin qu’ils puissent s’en emparer et en bénéficier à sa juste valeur. Pour faite face au surplus de demande qui résulte de l’extension des catégories éligibles à la prime, un effort important est consenti pour optimiser le pilotage et l’organisation des travaux.

En termes de catégories de population visées par le dispositif, 65 % des ménages aidés sont des ménages modestes et très modestes issus des quatre premiers déciles de revenus. L’agence considère donc que, le confinement aidant, le recentrage social souhaité a été accompli, la prime atteignant un public nettement moins aisé que le CITE. En ce qui concerne les travaux subventionnés, les principaux restent le changement du mode de chauffage (installation d’une pompe à chaleur ou d’un poêle à granulés) et l’isolation intérieure ou extérieure, ainsi que, de façon plus marginale, les travaux de remplacement des fenêtres.

Pour améliorer l’usage de « MaPrimeRénov’ », votre rapporteure estime qu’il faut encourager les ménages à s’engager dans un parcours de travaux. En ce sens, l’ANAH tente de simplifier au maximum le recours à ce dispositif : elle a ainsi défini une liste des gestes les plus performants à destination des ménages, comme, par exemple, l’installation d’une pompe à chaleur très performante écologiquement et énergiquement. Pour rendre la démarche encore plus aisée, elle n’impose pas d’évaluation avant/après. Le propriétaire peut demander un audit préalable, dont le coût est de 500 euros, mais seulement 800 audits sont mis en œuvre dans ce cadre.

Votre rapporteure propose d’augmenter le budget de l’ANAH pour qu’elle prenne en charge totalement les audits sans reste à charge, notamment pour les ménages modestes et très modestes. Ceci permettrait de mettre en œuvre davantage d’accompagnement et d’inciter, par l’audit, les particuliers à intégrer des parcours de travaux.

Les instruments budgétaires pour la rénovation énergétique

Plusieurs leviers financiers inscrits dans la loi de finances illustrent la dépense importante consentie par l’État en faveur de la rénovation énergétique :

– la prime de transition énergétique (PTE), commercialisée sous le nom « MaPrimeRénov’ », créée en 2020 pour remplacer le CITE (également porté au programme 174), à l’action n° 02 « Accompagnement transition énergétique », pour 1,7 Md€ en AE et 1,37 Md€ en CP. Ces fonds sont transférés à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), opérateur du programme 135, qui assure la gestion et la distribution de la prime ;

– les dépenses fiscales, au premier rang desquelles le crédit d’impôt transition énergétique (CITE), porté au programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et en voie d’extinction programmée ;

– les certificats d’économies d’énergie, qui ne reposent pas sur des dotations publiques mais dont le pilotage et la gestion sont assurés par la direction générale de l’énergie et du climat sur des crédits du programme 174 ;

– les dispositifs « Habiter mieux » de l’ANAH, financés par la subvention pour charges de service public, portée à l’action n° 04 « Réglementation, politique technique et qualité de la construction » du programme 135 ;

– le programme « Action Cœur de ville », financé par le programme 112 et ciblé sur 222 villes petites et moyennes : ce plan mobilise 5 Md€ sur cinq ans en provenance de l’État, la Banque des territoires, l’Agence nationale de l’habitat et Action Logement, afin notamment de réhabiliter des logements et de répondre aux enjeux d’attractivité du territoire. Ce programme, dont le Premier ministre a annoncé la pérennisation jusqu’en 2026, compte une partie des crédits pour la rénovation énergétique des bâtiments visés.

À ces dispositions pérennes s’ajoutent les dispositions exceptionnelles du plan de relance, pour sa deuxième et dernière année :

– un abondement complémentaire de la prime de transition énergétique (PTE), pour augmenter l’aide à la rénovation énergétique des logements, à hauteur de 565,6 M€ en CP en provenance de l’action n° 01 « Rénovation énergétique » du programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ». L’action n° 01 s’étend cependant au-delà de la rénovation des seuls logements, puisqu’elle comprend également les dotations en faveur de la rénovation des bâtiments publics et des locaux des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises ;

– des crédits pour l’effort de rénovation énergétique et de réhabilitation lourde des logements sociaux, portés à la même action pour 27,5 M€ en CP en 2022.

B.   Les dÉpenses fiscales doivent faire l’objet d’une discussion parlementaire approfondie

1.   Des modulations du dispositif « Pinel » permettraient d’optimiser ses dernières années d’existence

a.   Le dispositif « Pinel » a désormais un champ d’intervention resserré

Le dispositif de soutien à l’investissement locatif dit « Pinel », qui a largement contribué à la construction de logements neufs dans les zones tendues ([3]), a vu son champ d’intervention resserré par les évolutions législatives récentes. Depuis le 1er janvier 2018, seules les constructions situées dans les zones A et B1 ou dans les communes couvertes par un contrat de redynamisation des sites de défense y sont éligibles ([4]), cette mesure visant à favoriser le logement dans les zones tendues.

La loi de finances pour 2020 a encore limité le bénéfice du dispositif en le réservant aux logements construits dans des bâtiments d’habitation collectifs à compter du 1er janvier 2021 ([5]). La direction générale des finances publiques a précisé la notion d’habitat collectif en excluant les villas individuelles construites au sein d’une copropriété et les villas construites de manière jumelée ou en bande ([6]).

La réduction d’impôt Pinel

Le dispositif Pinel est une réduction d’impôt en faveur du logement locatif régie par le code général des impôts ([7]) et introduite par la loi de finances pour 2015 ([8]).

Cette mesure reprend et remplace les dispositions de la réduction d’impôt dite « Duflot » ([9]). Elle s’inscrit dans la volonté du gouvernement de l’époque de poursuivre quatre objectifs :

– soutenir l’investissement dans l’immobilier locatif ;

– soutenir la construction de logements dans les zones tendues ;

– proposer une offre de logement intermédiaire pour les ménages qui n’ont pas accès au logement social ;

– offrir une possibilité d’investissement aux ménages fortement fiscalisés.

Le dispositif Pinel accorde aux particuliers qui investissent dans un logement neuf en état futur d’achèvement (VEFA) ou dans le capital d’une société civile de placement immobilier (SCPI) entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2024 ([10]), une réduction d’impôt sur le revenu calculée à partir du prix d’achat du bien.

Pour les biens acquis entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2022, la réduction d’impôt s’étale sur 6 ans à hauteur de 2 % du prix de vente par an, soit un total de 12 %. A la fin de cette période, si le logement est toujours loué, deux prolongations de trois ans peuvent être consenties. Durant la première prolongation, la réduction reste de 2 % par an, lors de la seconde, celle-ci tombe à 1 % par an. Ainsi, la réduction d’impôt atteint 21 % après 12 ans. Deux limites s’appliquent à cette réduction : le montant de l’investissement ne peut dépasser les 300 000 euros par an et les 5 500 euros par mètre carré. Enfin, il convient de noter que le dispositif Pinel entre dans le cadre du plafonnement des niches fiscales à hauteur de 10 000 euros par an.

Concernant les biens acquis entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2024, la loi de finances pour 2021 prévoit une baisse de la réduction d’impôt. Pour l’année 2023, elle s’élèvera ainsi à 10,5 % sur 6 ans, 15 % sur 9 ans et 16,5 % sur 12 ans. Pour l’année 2024, elle sera plafonnée à 9 %, 12 % et 14 %, respectivement.

Le dispositif Pinel est soumis à des conditions d’éligibilité. Les logements doivent être sis dans une commune située en zone tendue ([11]). Pour bénéficier du dispositif, il faut également respecter un plafonnement des loyers au mètre carré et un plafonnement des revenus du locataire, précisés par décret ([12]).

Il est à noter également que le rapport que doit remettre prochainement le Gouvernement au parlement sur l’expérimentation du « Pinel breton » ([13]) pourra servir de fondement pour la discussion, qui doit avoir lieu, sur l’avenir des dispositifs fiscaux d’incitation à l’investissement locatif. Sur ce point, le directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages ainsi que le cabinet de la ministre chargée du logement ont exprimé à votre rapporteure le souhait de voir prolonger cette expérimentation vertueuse.

b.   Le bénéfice social en économie de loyer reste limité alors que la dépense fiscale est en expansion

Les économies de loyer permises par le dispositif Pinel ne sont pas suffisantes pour justifier les dépenses fiscales. Il ressort des évaluations réalisées que la réduction de loyers ne représente que 9,3 % du coût de la réduction d’impôt ([14]). C’est‑à-dire, inversement, que 90 % du coût du dispositif Pinel n’a donc comme seul effet que la construction de logements locatifs. Il doit également être noté que les réductions de loyers ne sont pas homogènes entre les différentes zones, pas plus qu’entre les communes d’une même zone. Ainsi, si 66 % des logements Pinel dans la zone B1 ont des plafonds inférieurs au loyer de marché moyen, calculé par les observatoires locaux des loyers, ils ne sont que 20 % dans la zone A bis. Du reste, dans certaines villes, les plafonds du Pinel ne sont pas contraignants puisqu’ils se trouvent dans la moyenne des loyers de marché (Nancy ou Clermont-Ferrand).

Sur la période 2005-2018, le coût des dispositifs fiscaux en faveur de l’investissement locatif a été multiplié par quatre, selon une étude conjointe du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’Inspection générale des finances (IGF)  ([15]), le coût total pour l’État se situant autour de 2,16 milliards d’euros. Plus généralement, le CGEDD et l’IGF estiment que cette dépense publique n’engendre pas de recettes fiscales suffisantes pour obtenir un bilan positif. Plusieurs hypothèses concernant l’effet d’aubaine des investisseurs, la part des locataires qui auraient pu décohabiter et la part des sommes investies que l’investisseur aurait consommées ont été testées, aucune combinaison n’ayant abouti à un surplus pour les finances publiques.

2.   Le dispositif « Censi-Bouvard », qui a permis de soutenir la création de logements dans des résidences de services, va être prorogé

Le dispositif « Censi-Bouvard », qui devait s’appliquer aux logements éligibles acquis jusqu’au 31 décembre 2021 et prendre fin, après plusieurs prorogations, à cette date, sera finalement prorogé d’une année dans le cadre du présent projet de loi de finances. Plusieurs évolutions législatives avaient déjà restreint les avantages de cette mesure. Alors que la réduction d’impôt s’élevait à 25 % du prix du bien à la naissance du dispositif, celle-ci a été revue à 18 % en 2011 et 11 % à compter de 2012 ([16]). De plus, la loi de finances pour 2017 a limité son champ d’application en excluant les résidences de tourisme classées ([17]).

La réduction d’impôt Censi-Bouvard

Le dispositif Censi-Bouvard est une réduction d’impôt en faveur de la construction de l’habitat dans les résidences de services créé par la loi de finances rectificative pour 2009 ([18]) et régi par les dispositions de l’article 199 sexvicies du code général des impôts.

Il concerne l’investissement locatif dans les résidences de services neuves, ainsi que les logements achevés depuis au moins 15 ans et qui font l’objet de travaux de réhabilitation. Sont comprises dans les résidences de services :

– les résidences étudiantes ou jeunes actifs ;

– les résidences personnes âgées ou handicapées ([19]) ;

– les résidences de soins de longue durée ([20]).

Le dispositif permet à l’investisseur d’obtenir une réduction d’impôt sur le revenu de 11 % sur 9 ans du prix de revient du bien, plafonné à 300 000 euros. En contrepartie, l’acquéreur doit céder la gestion de son bien à un gestionnaire pendant une période de 9 ans. Les loyers sont garantis par ce gestionnaire.

Si les investissements en Censi-Bouvard se sont contractés après le pic de 2010, du fait notamment de la baisse du taux de réduction d’impôt, la construction de résidences a bien résisté, notamment en comparaison avec les secteurs du logement individuel et collectif, qui ont connu un ralentissement au début des années 2010 ([21]). À ce titre, le Gouvernement a souhaité en 2019 sa prorogation, considérant qu’il s’agit d’un outil efficace pour faire face au besoin en matière de résidences étudiantes et pour personnes âgées ([22]). La prorogation d’autres dispositifs fiscaux d’investissement comme le Pinel ou le prêt à taux zéro ayant été retenue jusqu’en 2022 ou en 2024, il a été estimé qu’il serait opportun de proroger le Censi-Bouvard d’une nouvelle année. Le ministère chargé du logement s’est engagé vis-à-vis de votre rapporteure à faire réaliser, au sujet de ce dispositif, une évaluation inter-inspections au cours de l’exercice à venir pour mieux cerner ses avantages et ses inconvénients.

3.   D’autres leviers fiscaux en faveur de l’investissement locatif privé vont évoluer

Le prêt à taux zéro (PTZ), déjà prorogé l’an dernier, sera à nouveau prorogé cette année jusqu’en 2023, comme l’a annoncé récemment la ministre chargée du logement. Le PTZ, prêt immobilier sans frais de dossier et dont les intérêts sont à la charge de l’État, permet de financer une partie de l’achat ou de la construction d’une future résidence principale neuve ou encore de réhabiliter un bien. Ce dispositif a été progressivement modifié afin de favoriser l’accession sociale à la propriété des ménages modestes. Ainsi, dans un contexte de croissance des prix du foncier et de la construction, il permet à ces ménages de limiter leur taux d’effort.

Votre rapporteure décrivait, dans son avis de l’an dernier, la forte hausse des PTZ accordés en 2019 par rapport à 2018, qui s’expliquait notamment par l’extension du dispositif en zone détendue, permettant ainsi à de nombreux ménages, qui se trouvaient exclus des zones tendues où les prix étaient trop élevés
‒ notamment, les jeunes ménages souhaitant construire ‒ de jouir de ce dispositif vertueux. C’est dans ce cadre que l’article 164 de la loi de finances pour 2021 a prolongé la distribution de ce prêt jusqu’au 31 décembre 2022 et qu’il sera à nouveau prorogé jusqu’en 2023. Les conditions de ressources pour y accéder seront maintenues.

Pour ce qui concerne le dispositif dit « Denormandie dans l’ancien », votre rapporteure considère qu’il s’agit là d’un instrument de première ligne pour lutter efficacement contre l’habitat insalubre tout en répondant à la demande forte de logements en France et d’accession à la propriété. Il ouvre droit à une réduction fiscale pour tout achat d’un logement ancien, situé dans les villes du programme « Action Cœur de ville » et certaines autres villes moyennes confrontées à un habitat dégradé, sous condition de réhabilitation (performance énergétique, modernisation, assainissement, aménagement des surfaces habitables). Votre rapporteure se réjouit de l’annonce récente, par le Président de la République, de la prolongation du programme « Action Cœur de ville » jusqu’en 2026, accompagnée d’une prorogation du dispositif Denormandie au-delà de 2022.

L’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) a trouvé un second souffle depuis 2019 et il faut à présent envisager son amélioration et sa prorogation dans le temps. Ce dispositif s’adresse à tout propriétaire d’un logement utilisé comme résidence principale et achevé depuis plus de deux ans, sans condition de ressources, pour financer des travaux d’amélioration de la performance énergétique. Si la pérennité de ce mécanisme était incertaine jusqu’à encore récemment – dans son format actuel, l’éco-PTZ a connu une baisse de près de 73 % des demandes entre ses débuts en 2009 et l’année 2018 – le décollage observé depuis 2019 inspire confiance.

Ainsi, alors que l’éco-PTZ doit disparaître à la fin de l’année, votre rapporteure estime que le bilan réalisé en mai 2021 par notre collègue Bénédicte Peyrol ([23]), dans le cadre de sa mission sur les engagements financiers de l’État, montre qu’il s’agit d’un dispositif utile et qu’une version améliorée doit être préservée et prorogée.

Enfin, en ce qui concerne le dispositif dit « Louer abordable », votre rapporteure rappelle que, depuis le 1er janvier 2017, un nouveau dispositif d’incitation fiscale dit « Cosse » a remplacé les dispositifs dits « Besson ancien » et « Borloo ancien » pour les logements conventionnés avec l’Agence nationale de l’habitat. Ce dispositif permet un abattement, variant de 15 % à 85 % en fonction de la zone géographique, du niveau de loyer mis en place et du mode de gestion du bien (mandat de gestion par une agence immobilière sociale ou location/sous‑location). Lors du 81e congrès HLM qui s’est tenu à Bordeaux en septembre dernier, le Premier ministre s’est engagé à une réforme de ce dispositif. Ainsi, dès 2022, l’État engagera une révision des paramètres du « Louer abordable », afin de mieux adhérer à la réalité du terrain. Les contours de cette réforme seront présentés par la ministre chargée du logement dans les prochaines semaines.

III.   le programme 177 « HÉbergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnÉrables »

Cette majorité a engagé depuis 2017 des efforts considérables en faveur d’un accès direct au logement contribuant à la réinsertion des personnes sans domicile. Ces efforts seront encore amplifiés en 2022, le développement de logements abordables et adaptés restant prioritaire. L’objectif quinquennal de création de 40 000 places d’intermédiation locative est ainsi porté à 43 000 places et les moyens qui y sont consacrés augmenteront de 35 M€ en 2022. Le niveau historiquement haut du parc d’hébergement d’urgence, à hauteur de 200 000 places, sera maintenu jusqu’à la fin de la période hivernale. De plus, les moyens consacrés aux dispositifs de veille sociale sont également augmentés à hauteur de 13 M€. Enfin, une nuit nationale de la solidarité sera organisée en janvier 2022 dans plusieurs grandes villes de France pour mieux connaître et maîtriser les besoins en la matière.

Des dispositifs seront activés au bénéfice des personnes en grande difficulté : 74 M€ mobilisés en 2022 au titre des mesures « Logement » de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté ; 1 500 places pour les femmes enceintes ou sortant de maternité sans solution ; 1 000 places pour les personnes en situation de grande marginalité, accompagnées dans l’hébergement et le logement ; consolidation du financement des 1 000 places d’hébergement supplémentaires pour les femmes victimes de violences ouvertes en 2021, pour un total de 7 500 places ouvertes aujourd’hui ; mise en place de chèques services pendant la crise d’un montant unitaire de 7 euros, pour un montant de 49,7 M€, et qui ont permis à 90 000 personnes d’accéder à des denrées alimentaires et des produits d’hygiène.

En outre, 4 900 logements ont été agréés dans ce cadre comme pensions de famille. Votre rapporteure rappelle, à cet égard, que les pensions de famille constituent une réponse de logement de très haute qualité, gisement de solidarité, pour les personnes en difficulté.

A.   L’effort d’HÉbergement d’urgence est pÉrennisÉ

1.   L’effort financier et institutionnel massif en faveur de l’hébergement d’urgence a été prolongé

Depuis le début de la crise sanitaire, l’engagement des services de l’État, des collectivités et des associations en faveur de la mise à l’abri immédiate et inconditionnelle a permis d’apporter une réponse décisive aux situations des sans-abri. Votre rapporteure salue l’engagement et le volontarisme de ces interventions, qui ont permis de résoudre des situations humaines difficiles. Au 1er juin 2021, le parc d’hébergement généraliste financé sur les crédits du programme 177 a atteint un niveau historique avec 203 031 places, dont 43 000 places d’hébergement supplémentaires ouvertes en urgence depuis le mois de mars 2020 ([24]).

Votre rapporteure se réjouit du maintien de cet effort au-delà des limites temporelles de la crise sanitaire. Alors que la trêve hivernale, prolongée à plusieurs reprises par le Gouvernement, a pris fin le 31 mai 2021, la ministre déléguée chargée du logement a annoncé le maintien jusqu’à fin mars 2022 des 203 000 places d’hébergement ouvertes à ce jour ([25]). Pour la première fois dans le secteur de l’hébergement d’urgence, aucune fermeture de place n’a donc eu lieu à l’issue de la période hivernale. Les personnes hébergées le sont en hiver comme en été, ce qui permet la continuité de l’accompagnement social vers l’accès au droit, à la santé, au logement et à l’emploi.

Cette décision en rupture avec une gestion dite « au thermomètre » a été rendue financièrement possible par une augmentation de 700 millions d’euros de crédits en loi de finances rectificative ([26]), qui a porté le budget annuel du programme 177 pour 2021 à 2,9 milliards d’euros.

La crise sanitaire a largement amplifié le recours aux nuitées hôtelières. Début juin 2021, le nombre de nuitées hôtelières mobilisées s’élevait à près de 74 000 nuitées. Profitant de l’opportunité offerte par la fermeture ou la sous-occupation d’un grand nombre d’établissements, l’État et l’Union des métiers et industries de l’hôtellerie (UMIH) ont signé, au mois de mars 2020, un accord-cadre pour faciliter l’hébergement hôtelier des personnes précaires. Cet accord, mis à jour par une nouvelle charte en novembre 2020, définissait les règles générales d’occupation et fixait les tarifs maximaux à la chambre (à partir de 30 euros pour un hôtel non classé).

2.   Les centres d’hébergement spécialisés ouverts pour la crise ont eu un impact important

Dans le cadre de la crise sanitaire, des centres d’hébergement spécialisés (CHS) ont été créés, dès mars 2020, pour accueillir, d’une part, les personnes malades sans gravité de la Covid-19 et qui ne pouvaient pas être suivies dans leur structure collective, du fait que les conditions de prise en charge n’étaient pas réunies (pas de possibilité d’isolement, risque de comorbidité, etc.), et, d’autre part, les personnes sans abri. Il s’agit, non pas de centres de soins, mais de centres d’hébergement permettant l’hébergement et l’isolement sanitaire de personnes atteintes de formes non graves de la maladie.

Les CHS ont été conçus et mis en œuvre en coordination et en complémentarité des structures d’hébergement existantes. Pour les personnes déjà hébergées, la prise en charge au sein de leur centre d’hébergement a été privilégiée dans la mesure du possible. Il a été demandé à chaque structure d’hébergement d’identifier un ou des espaces consacrés au confinement des personnes hébergées malades. L’orientation en CHS a donc été considérée comme une solution ambulatoire exceptionnelle, la prise en charge étant prévue pour durer jusqu’à 48 heures après la disparition complète des symptômes ; le patient avait ensuite vocation à retourner dans le centre où il était hébergé précédemment, sa place ayant été gelée durant toute la durée de prise en charge au sein du CHS. Pour les personnes à la rue orientées vers les CHS, il a été demandé qu’une solution d’hébergement soit impérativement identifiée, en lien avec le service intégré de l’accueil et de l’orientation, avant la sortie du CHS.

Votre rapporteure salue la réussite de ce programme d’urgence, qui a permis de soutenir les centres d’hébergement et de mieux prendre en charge les personnes hébergées malades. Le parc de CHS, qui a atteint son ampleur maximale le 5 mai 2020 (3 620 places ouvertes), a vu son ampleur progressivement réduite jusqu’à une moyenne de 800 places au mois de juin 2021. L’amplitude des moyens prévus a permis de ne pas saturer l’occupation des centres mis à disposition, avec un taux d’occupation national moyen de 24 % depuis le début de la crise sanitaire.

B.   le PROGRAMME « logement d’abord » Évolue vers un nouveau service public de la rue au logement

1.   Le programme « Logement d’abord » a été un succès

Les leviers majeurs du programme « Logement d’abord » continuent d’être déployés. Les efforts en faveur d’un meilleur accès au logement des ménages sans domicile, qu’ils soient hébergés ou sans-abri, se poursuivent. Entre 2018 et le premier semestre 2021, au moins 280 000 personnes hébergées ou sans-abri ont accédé au logement social ou à une solution de logement adapté, avec des résultats en amélioration continue depuis 2017 ([27]).

Pour les personnes entendues par votre rapporteure, la crise sanitaire et les confinements successifs ont montré, plus que jamais, le rôle protecteur du logement. Là où les personnes sans domicile cumulent des problématiques sociales et sanitaires qui les rendent particulièrement vulnérables, les structures collectives d’accueil et d’hébergement se sont révélées inadaptées pour appliquer les mesures rigoureuses de confinement recommandées. La stratégie du « Logement d’abord » se trouve donc confortée, puisqu’elle vise un accès direct au logement, dans le cadre d’un accompagnement adapté aux besoins des personnes. L’insertion se faisant directement dans le logement, cette stratégie apporte aux personnes en grande précarité, non seulement la sécurité d’un logement mais également celle d’un accompagnement adapté, rapidement mobilisable si nécessaire, que ce soit dans le parc social ou privé. À ce titre, votre rapporteure considère également que le programme « Logement d’abord » apparaît comme une politique particulièrement adaptée aux situations de crise sanitaire.

2.   La création d’un nouveau service public valide les efforts fournis au cours de la législature

L’année 2021 a été marquée par la création du service public « de la rue au logement », qui se traduit par un nouveau cadre de gouvernance de l’action de l’État dans la continuité stratégique de la mise en œuvre du plan quinquennal 2018‑2022 pour le logement et la lutte contre le « sans-abrisme ».

Le renforcement du pilotage se traduit, en premier lieu, par une unification des missions au sein de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL), qui exerce depuis le 1er janvier 2021 l’ensemble des compétences, jusqu’alors partagées avec la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), en matière d’hébergement et d’accès au logement. Cette réforme crée donc une direction d’administration centrale chargée de la lutte contre le sans-abrisme, et exclusivement consacrée à cet objet. Les services concernés évoquent des gains en matière de simplification administrative, de réactivité et de capacité de projection opérationnelle. En termes de pilotage, cette réforme se concrétise aussi par la reprise de la responsabilité du programme 177 et un rapprochement du pilotage métier et du pilotage budgétaire, qui devrait permettre un dialogue de gestion avec les services déconcentrés.

Une feuille de route ([28]) est venue rendre publics l’ensemble des chantiers structurels de transformation qui doivent concrétiser la réduction importante du nombre de sans-abri à laquelle cette majorité est engagée. Cette feuille de route assume la recherche de la « performance sociale » afin d’agir plus efficacement au service des personnes les plus précaires. Parmi ces chantiers figurent, entre autres, le renforcement du pilotage des opérateurs et l’engagement d’une démarche de maîtrise des coûts, notamment par le passage à un pilotage sous enveloppe fermée et la recherche d’une trajectoire financière pluriannuelle maîtrisée.

Enfin, dans le cadre de la mise en place du service public de la rue au logement, deux chantiers majeurs ont été ouverts :

– la réforme des services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO), pour une action mieux coordonnée et plus partenariale ;

– la transformation du système d’information des SIAO (SI-SIAO), système d’information qui se situe au cœur de la mission de mise à l’abri et d’insertion des personnes à la rue, mais qui a connu d’importantes difficultés.


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   SECONDE PARTIE :
LA prÉVENTION DE LA CRISE DU LOGEMENT doit Être au cœur des prÉoccupations du lÉgislateur

I.   le secteur de la construction NEUVE ne s’est pas relevÉ du coup d’arrÊt imprimÉ par la crise sanitaire

Dans son avis de l’an dernier, votre rapporteure avait alerté sur la nécessité de soutenir activement le secteur de la construction neuve en mobilisant des leviers budgétaires et fiscaux, afin de protéger la capacité d’investissement et de renouvellement des acteurs. Votre rapporteure salue à présent les moyens qui ont été déployés dans le cadre du plan de relance impulsé par le Gouvernement et se réjouit que la reprise du secteur ait été assurée, mais elle souligne que les craintes sur sa bonne santé sur le long terme ne sont pas pour autant effacées.

A.   EN DÉPIT de la relance, la construction continue d’Être insatisfaisante DANS le secteur privÉ

1.   Un décrochage structurel de la construction neuve en zone tendue a eu lieu au cours des dernières années

La reprise sectorielle de la construction neuve après la crise sanitaire n’a pas éloigné les craintes d’une crise durable du logement, alimentées par des chiffres mitigés depuis 2018. Alors qu’entre 2014 et 2019, 212 000 logements collectifs en moyenne étaient autorisés chaque année, avec un pic à 240 000 en 2017, les chiffres sont désormais en chute libre, avec désormais moins de 180 000 logements autorisés sur douze mois.

Les chiffres publiés en 2021 montrent que le nombre de projets vendus, s’il est en hausse sur l’exercice, ne progresse pas de manière suffisamment dynamique. En effet, le secteur de la promotion immobilière a enregistré, à l’occasion du deuxième trimestre 2021, une hausse de 27,2 % des ventes par rapport au même trimestre 2020. Ce chiffre représente néanmoins une baisse de 14,1 % des ventes par rapport au même trimestre 2019 ([29]).

Cette tendance globale cache une réalité plus nuancée : si les ventes en bloc ont fortement reculé, les ventes aux particuliers ont, quant à elles, connu une dynamique très positive. La raison doit en être cherchée, selon la Fédération des promoteurs immobiliers entendue par votre rapporteure, dans la faiblesse structurelle de l’offre par rapport à la demande : face à l’engouement persistant des particuliers pour l’achat neuf, le secteur n’est pas en mesure de produire suffisamment de logements. La délivrance des permis de construire a cependant progressé de + 67 % (112 600 permis octroyés) au deuxième trimestre par rapport à l’année dernière, et les mises en chantier de + 33 % (95 500 mises en chantier).

Les acteurs soulignent cependant que cette reprise est insuffisante pour assurer la pérennité économique du secteur et répondre à la crise du logement que traverse le pays. En ce sens, les informations en provenance des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement laissent prévoir un rebond des chiffres de la construction, qui ne seront cependant pas assez conséquents pour rattraper les chiffres de 2019. L’offre est inférieure de plus de 30 000 logements par rapport à son niveau de 2018. Les chiffres transmis par la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) confirment le net recul enregistré depuis trois ans en matière de logements neufs réservés et mis en vente (cf. graphique ci-dessous).

Selon les conclusions de la commission pour la relance durable de la construction de logements, un décrochage de la construction particulièrement prononcé a lieu dans les zones tendues, là même où se concentre une grande partie de la demande. Les autorisations de construire dans ces zones connaîtraient une dynamique négative avec - 14 % en 2021 par rapport au niveau de l’année 2018 ([30]).

 

 

Commercialisation de logements neufs en France hexagonale
de 1995 à 2020

Source : service des données et études statistiques (SDES) du commissariat général au développement durable (CGDD), données de l’enquête sur la commercialisation des logements neufs (ECLN). Les données sont arrêtées au 2ème trimestre 2021 et ne concernent que le territoire européen de la France. Elles comptent de manière exhaustive la commercialisation de logements neufs (ou réhabilités) dans le cadre de programmes immobiliers ou de permis de construire de cinq logements et plus destinés à la vente. Cette enquête suit donc la commercialisation de logements par les promoteurs, mais exclut la production des logements sociaux réalisée en propre par les bailleurs sociaux et celle des maisons individuelles diffuses.

Les professionnels du bâtiment vont jusqu’à évoquer, depuis le 30 juin 2020, un « écroulement du résidentiel collectif neuf et du non résidentiel ». En effet, les données montrent une forte baisse des constructions dans le collectif, alors même que le secteur des maisons individuelles résiste très bien, comme l’ont confirmé les représentants de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles (FFC) entendus par votre rapporteure. En ce qui concerne, en revanche, l’habitat collectif, le redressement des chiffres de la construction n’y est pas : aujourd’hui, construire du collectif en France n’est plus à la mode, selon la Fédération française du bâtiment (FFB), qui engage en ce sens une démarche pédagogique auprès des acteurs du bâtiment afin de les inciter à ne pas délaisser l’habitat collectif.

Cette tendance baissière apparaît plus clairement dans certaines zones tendues, notamment en Île-de-France et particulièrement en zone A bis. Les tensions sur le marché du logement y atteignent en effet un niveau très élevé du fait notamment d’une carence de l’offre. Depuis un point haut atteint en 2017, une diminution s’est engagée qui s’est confirmée même dans la période de reprise observée après la crise sanitaire ([31]). Selon la FFB, le cycle des élections municipales de 2020 a contribué à cette tendance, avec un arrêt des dépôts de permis de construire qui a duré quatre mois.

Le graphique suivant laisse apparaître la différence croissante dans les trajectoires d’autorisation des logements neufs en fonction de la tension de la zone considérée. On y remarque qu’à la suite de la crise sanitaire, la construction neuve reprend très fortement dans les zones détendues (B2, C), mais qu’elle reste atone, voire déclinante, dans les zones tendues (A, A bis, B1).

Le dynamisme des transactions immobilières dans l’ancien atteste du fait que le déclin dans les ventes de logements neufs s’explique principalement par une carence de l’offre et non de la demande. Malgré un léger reflux en 2020 en contrecoup de la crise sanitaire ([32]), les transactions immobilières dans l’ancien se sont maintenues à un niveau très élevé (1,02 million de transactions, contre un record historique de 1,07 million de transactions enregistré en 2019) ([33]). Le logement ancien est d’autant plus attractif que l’offre de logement neuf est faible et que la capacité d’épargne des ménages a augmenté à l’occasion de la crise sanitaire sans que les taux d’intérêt à l’emprunt ne s’envolent. La FFC estime, pour sa part, qu’il y a eu un impact négatif de la crise sur les obtentions de crédit, et que cette tension sur l’octroi de crédits s’est répercutée sur le volume de production de maisons individuelles.

Évolution trimestrielle des logements autorisés en zones tendues et en zones détendues depuis le 1er trimestre 2014 (base 100 = 2014-T1)

Source : SDES (sit@del – données au 31/08/2021 corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrés) ; retraitements par la commission pour la relance durable de la construction de logements.

Les professionnels soulignent la forte empreinte du secteur de la construction en matière de créations d’emplois. En une année, le BTP a vu la création de 70 000 emplois nets, ce qui le porte à 1,25 million de salariés. Ainsi, même si le secteur ne retrouve pas le chiffre de 2019, le BTP a su garder sa force et sa main-d’œuvre : les entreprises emploient et forment toujours plus de travailleurs pour ce secteur. La FFB possède ainsi ses propres centres de formation d’apprentis et développe des partenariats avec Pôle emploi. Par ailleurs, la FFB et la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) ont noué des partenariats pour favoriser les embauches dans les entreprises du BTP, notamment artisanales.

L’enjeu est d’agir conjointement sur des difficultés de recrutement récurrentes, alors que la transition écologique et la transition numérique génèrent de nouveaux besoins en compétences. Concrètement, les partenaires misent sur un renforcement du travail en commun entre leurs réseaux respectifs, au plus près des entreprises du BTP, afin de faciliter le partage d’information sur les métiers et leurs spécificités locales. Cette collaboration se traduira par la mise en place de référents au niveau le plus pertinent. L’ambition est, en outre, de permettre d’identifier les compétences transférables, afin d’élargir les recrutements à des candidats issus d’autres secteurs en mobilisant, si besoin, les dispositifs de formation du BTP.

La filière particulièrement dynamique de la rénovation énergétique parvient, pour l’heure, à absorber la demande supplémentaire engendrée par les aides du plan de relance. Le président de la FFB a souligné à votre rapporteure les efforts de la filière pour améliorer l’attractivité du bâtiment, autour du message selon lequel, bien que les métiers y soient difficiles, la progression est rapide et la technicité grande dans ce secteur, car il y a un grand besoin d’ingénieurs et de techniciens.

La FFB appelle donc le Gouvernement à maintenir et pérenniser les mesures en matière de rénovation énergétique pour les prochaines années, car elles sont source de dynamisme et de résilience pour le secteur du BTP. Ainsi, d’après cet acteur et malgré la hausse du prix des matériaux, les délais allongés et les pénuries de bois, les entreprises du BTP ne cessent d’employer et de former de nouveaux travailleurs aux techniques spécifiques et aux processus de la rénovation énergétique. Leur objectif est de former entre trois cent et quatre cent mille salariés, déjà présents au sein du BTP, mais qui ont besoin d’une formation renforcée sur le sujet de la rénovation. En effet, d’après eux, il existe déjà en France un vivier de travailleurs qui pourraient être réorientés dans la branche Rénovation énergétique du BTP.

2.   La production de logements sociaux ne répond pas aux ambitions des réformes menées

Le déclin de la production de logements en zone tendue concerne également le logement social : en effet, le nombre de logements sociaux agréés est en baisse dans ces territoires depuis 2016, alors même qu’il se maintient dans les zones détendues (cf. graphique). Après un pic à 75 000 logements sociaux neufs agréés en zone tendue en 2016, ce nombre baisse chaque année pour s’établir en 2019 à 62 000 (- 17 %). L’année 2020, exceptionnelle, ne voit que 48 000 agréments dans ces zones, ce qui occasionne un ralentissement durable.

À l’inverse, dans les autres zones, le nombre de logements sociaux agréés se maintient. Ces chiffres doivent d’autant plus faire réfléchir que, dans les prochaines années, la croissance démographique devrait être en moyenne de 200 000 personnes par an.

Nombres annuels de logements locatifs agréés sociaux en construction neuve dans les zones tendues et les zones détendues
(2011-2020)

Source : données de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages ; retraitements par la commission pour la relance durable de la construction de logements.

La Banque des territoires, financeur au plus proche des bailleurs sociaux et qui connaît donc bien leurs problématiques et aspirations, n’exprime cependant aucune inquiétude sur la capacité du secteur à financer ses investissements grâce à la capacité d’auto-financement. En effet, la réforme de la réduction du loyer de solidarité a été absorbée. Seuls les bailleurs qui, avant la réforme, avaient très peu de capacités de financement ont été affectés par la perte de loyer. À ce titre, la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) a révisé ses protocoles pour allonger les durées de rétablissement de la situation des bailleurs. Les effets constatés sont donc en voie de résorption :

– une baisse des dépenses d’entretien et de maintenance de leur parc par les gestionnaires de logement social, particulièrement notable en 2018 et qui pourrait nuire à sa viabilité financière à long terme : les dépenses d’entretien courant et surtout de gros entretien ont diminué de 7 % en valeur. Votre rapporteure estime que cette tendance va à l’encontre des objectifs de notre époque, qui exige la rénovation et la réhabilitation de l’ancien ;

– une réduction des investissements, comme en attestent des engagements en-deçà des objectifs de construction et de rénovation, ainsi que le retard d’engagement des bailleurs sociaux dans le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), encore accentué par le faible nombre d’agréments et de mises en chantier dans le secteur.

Pour ce qui concerne les décisions de financement, les données publiées ont confirmé que l’année 2021 continue de manquer de dynamisme en termes de production de logements locatifs sociaux, poursuivant en cela la dynamique enclenchée dès 2016 (cf. encadré). La présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), entendue par votre rapporteure, a indiqué que, selon les prévisions consolidées des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement pour 2021, discutées lors du comité de pilotage entre les bailleurs et les administrations, cent mille agréments de logement locatif social seraient octroyés sur l’année. La DHUP a confirmé à votre rapporteure que, si les objectifs de programmation de cent vingt mille agréments ne seront pas atteints, il est en revanche crédible que ces agréments atteignent la barre des cent mille agréments en 2021. En revanche, il faut rester particulièrement vigilant au taux de délivrance des agréments dans les grandes métropoles, car celui-ci a davantage baissé en 2020 que la moyenne nationale.

Une fois encore, cependant, les initiatives du Gouvernement dans le cadre du plan de relance pour enrayer les effets de la crise pourraient avoir un effet positif :

– la mise en œuvre du fonds Friches, qui a donné lieu à un appel à projet national coordonné par l’Agence de la transition écologique (ADEME), à hauteur de 40 M€, pour le recyclage des friches industrielles et minières polluées. Cette mesure a eu un réel succès et votre rapporteure considère qu’il serait donc intéressant d’engager une réflexion sur sa pérennisation. C’est, en tout cas, le vœu de nombreux acteurs du logement tels que la Fédération des entreprises publiques locales, qui a fait part à votre rapporteure de l’engouement de ses adhérents pour ce dispositif. La Fédération a également en alerté votre rapporteure sur les effets néfastes de mesures à court terme en ce qui concerne des projets d’aménagements et appelle à renforcer la visibilité sur la durée d’existence de ce fonds, afin de ne pas freiner les élus locaux dans leurs réflexions sur l’engagement d’opérations d’aménagement sur leurs territoires ;

– les appels à projets régionaux pilotés par les préfets de région en faveur du « recyclage foncier » (259 M€), pourraient générer 37 000 logements sociaux et 64 000 logements privés sur des secteurs en friche, ainsi que près de 5 600 000 mètres carrés de surface économique.

Ainsi, ces projets représentent un potentiel de recyclage de 55 000 hectares de friches, de création de plus de 4 millions de mètres carrés de logements, et de plus de 2 millions de mètres carrés d’activités économiques. Devant l’importance du besoin, le Gouvernement a décidé d’accélérer l’engagement des crédits du fonds en mobilisant, dès 2021, l’intégralité de l’enveloppe de 259 M€, initialement prévue pour deux ans.

Objectifs budgétaires et décisions de financement de logements locatifs sociaux
 

(source : bilan des logements aidés, DHUP ; retraitement USH)

B.   Le logement traverse une crise structurelle liÉE À l’inacceptabilitÉ sociale de l’acte de construire

1.   Les populations et les élus montrent une réticence croissante envers l’acte de construire

Selon les représentantes du Conseil national de l’Ordre des architectes (CNOA) auditionnées par votre rapporteure, le déclin observé dans la construction neuve devrait se poursuivre en 2022 et 2023 du fait du ralentissement durable des projets déposés. C’est le double effet des élections municipales, qui affectent toujours les études d’architecture, et de la crise sanitaire. L’effet de la crise a été nettement atténué, en ce qui concerne les architectes, par les prêts garantis par l’État (PGE), et, en ce qui concerne les constructeurs, par l’activité partielle.

D’autres acteurs avancent également d’autres explications : ainsi, la suppression définitive de la taxe d’habitation (TH), qui, avec 22 Md€ de rendement en 2017, constituait une ressource fiscale importante pour les collectivités, aurait, selon les représentants de CDC Habitat auditionnés par votre rapporteure, diminué l’attrait des constructions neuves pour celles-ci. Ceci est d’autant plus vrai pour les logements sociaux et intermédiaires, pour lesquels la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) fait l’objet d’une exonération intégrale pendant les premières années.

À ces facteurs s’ajoutent d’autres causes d’une nature plus économique, notamment la hausse du coût des matériaux de construction, qui représentent en moyenne 40 % du coût de revient d’un projet ([34]) – une hausse particulièrement forte cette année pour ce qui concerne notamment le fer, l’acier et le plastique, et qui a occasionné la création d’une commission spéciale à ce sujet par le ministre chargé de l’économie. À cela s’ajoute la hausse systématique du prix du foncier, déjà souligné par notre collègue Jean-Luc Lagleize dans un rapport de novembre 2019 ([35]) : ce foncier, qui représente en moyenne 25 % du coût de revient d’un projet, peut monter à 50 % de celui-ci dans certaines zones tendues.

La mauvaise santé durable du secteur exige une prolongation du plan de relance. Dans ce cadre, les architectes recommandent de mieux adosser les mesures prolongées à des critères écologiques et de qualité, afin d’éviter l’écueil de la massification peu durable. Les personnes entendues par votre rapporteure se sont accordées à dire que, s’il faut éviter, dans la mesure du possible, de construire en extension, il est nécessaire que les élus fassent la place à des démarches de recyclage urbain et de densification urbaine.

2.   Modifier les règles d’urbanisme pour encourager des dynamiques positives dans l’aménagement et la construction

En dépit de cet impératif, il est fréquent que les règles locales d’urbanisme, inscrites dans le règlement du plan local d’urbanisme (PLU[i]), fassent obstacle à ces dynamiques, en dressant des obligations difficiles à concilier avec la densité des constructions. Il en est ainsi des règles de recul par rapport aux espaces publics, parfois très importantes, et de l’interdiction de construire en limite de propriété. Ces dispositions peuvent freiner les démarches visant à densifier certaines zones pavillonnaires, où des parcelles historiques de grande taille pourraient faire l’objet de nouvelles constructions sans engendrer une artificialisation supplémentaire.

Il apparaît nécessaire de mieux maîtriser les règles d’urbanisme afin qu’elles prêtent plus activement leur concours à l’encouragement de pratiques vertueuses. Ainsi, le Conseil national de l’ordre des architectes a soulevé la question des normes de gabarit dans le PLU(i). Celles-ci peuvent, par exemple, agir comme un frein lorsqu’il s’agit de construire des planchers en bois, plus épais que les planchers en béton, et dont l’addition peut donc, à gabarit équivalent, conduire à devoir se priver d’un étage, ce qui remet en cause l’équilibre économique de l’opération.

3.   Mieux soutenir les décideurs locaux dans la construction pour aider les territoires à mieux produire du logement

Le principal enjeu réside désormais dans la reprise et l’accélération des permis de construire délivrés par les collectivités, dans les zones tendues. Le Gouvernement entend donc soutenir fortement la relance de la construction de logements neufs là où elle est nécessaire, rapidement – grâce aux investissements sans précédent du plan « France Relance » – et durablement – par l’identification et la levée des freins du point de vue des collectivités.

Dans la lignée des travaux de la commission pour la relance durable de la construction de logement ([36]) présidée par M. François Rebsamen, le Premier ministre a annoncé, mardi 28 septembre 2021 lors du 81e congrès HLM de Bordeaux, des mesures de soutien envers les maires bâtisseurs. Parmi ces mesures :

– une compensation totale de la part de l’État du coût des exonérations de TFPB applicables au logements sociaux. Le coût de cette mesure, selon les estimations du rapport, s’élèverait à 289 millions d’euros en moyenne sur quinze ans, pour un coût total de 4,3 Md€. Malgré son coût, la compensation de l’exonération par l’État présenterait plusieurs avantages, comme le soutien général à la construction de logements et spécifiquement le soutien à l’autorisation de logements sociaux. Votre rapporteure se réjouit de cette annonce, qui va permettre de renflouer les recettes des collectivités. La Caisse des dépôts et consignations prévoit de bons résultats pour ce mécanisme de compensation du fait de son accueil favorable par le secteur. Ainsi, cette compensation devrait favoriser l’émergence de nouveaux projets sur le territoire. Toutefois, il sera essentiel dans un futur proche d’évaluer l’impact réel de cette mesure sur les décisions locales et sur la production de logements ;

 l’instauration d’un contrat local entre l’État, l’intercommunalité et les communes dans les zones tendues. Ce contrat viendrait se substituer aux aides à la relance de la construction durable (ARCD), qui ne remplit pas de conditions suffisantes en termes de ciblage et de visibilité. Le nouveau contrat fixerait des objectifs de construction en fonction des besoins : une fois ces objectifs remplis, le versement de l’aide serait automatique ;

– il sera demandé aux préfets des départements concernés par les zones tendues, de signer avec les collectivités locales des contrats sur le développement du logement dans leur périmètre, avec des engagements réciproques de l’État et des collectivités. L’État affectera 175 M€ à ces contrats, baptisés « contrats de relance du logement », en substitution de l’aide aux maires densificateurs qui n’a pas eu les effets escomptés et pour encourager les « maires bâtisseurs ».

C.   concilier la recherche de la qualitÉ du logement avec la massification de la construction

1.   Les dispositifs fiscaux d’incitation à l’investissement locatif peuvent être mieux ciblés sur une construction durable

a.   Le dispositif Pinel a permis le développement de logements intermédiaires dans les zones tendues

Selon le rapport d’évaluation du dispositif Pinel publié par le CGEDD et l’IGF en novembre 2019, 48 % des ventes de logements neufs seraient réalisés par l’intermédiaire de ce dispositif ([37]). La majeure partie d’entre eux se situe dans les zones A et surtout B1 : 32,7 % se trouvent dans les zones A et A bis et 55,2 % dans les zones B ([38]). Au total, ce sont 131 013 logements qui ont bénéficié du dispositif Pinel entre 2014 et 2017, chiffre qui s’élèverait en réalité à 195 252 logements selon les estimations du CGEDD et de l’IGF – la déclaration intervient une fois seulement le logement construit, ce qui induit un décalage entre l’achat et celle-ci. Le dispositif Pinel a donc, selon le même rapport, participé fortement à la croissance continue du parc de logements depuis trente ans, à raison de 1,1 % en moyenne par an.

Ce mécanisme a donc eu un effet très salutaire sur la production de logements en général, qu’il a permis de maintenir à un niveau satisfaisant. Il a également permis de répondre à la demande croissante dans le parc locatif privé, privilégié dans le cadre de la mobilité professionnelle. Le parc locatif privé est ainsi passé de 5,4 millions de logements en 2001 à 6,9 millions en 2019.

b.   Prévoir sans délaisser : la fin du dispositif Pinel doit amener à penser sa suite sans abandonner l’accompagnement des investisseurs jusqu’à son terme

La fin programmée du dispositif Pinel en 2024 impose néanmoins de penser à sa suite et à l’accompagnement des investisseurs dans cette sortie progressive. Bien que les avantages fiscaux soient appelés à se réduire à partir de 2023, cet investissement reste plébiscité par les particuliers. À ce titre, comme l’indique la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), plusieurs évolutions pourraient optimiser le recours au dispositif. Par amendement, votre rapporteure proposera d’intégrer les logements définitifs conçus dans le cadre des jeux olympiques et paralympiques de 2024 dans le champ d’application du dispositif Pinel.

Le prochain dispositif fiscal en faveur du logement locatif devra prendre en compte les manques soulevés par l’évaluation du dispositif actuel. À ce titre, le rapport de MM. Laurent Girometti et François Leclercq propose de créer un nouvel instrument dès 2023 pour prendre le relai du dispositif Pinel, qui intégrera des critères liés à la qualité des logements, notamment la taille de ceux-ci ([39]). Les nouvelles contraintes découlant de la loi Climat et résilience sur l’artificialisation nette ([40]) conduisent à imposer un urbanisme de recyclage et de densification : il convient donc de rendre cette densification supportable par une hausse générale de la qualité de construction, qui doit pouvoir être intégrée comme critère discriminant pour l’obtention des aides fiscales.

Votre rapporteure regrette vivement que l’évaluation du zonage du dispositif Pinel, au sujet duquel elle demande la remise d’un rapport depuis 2017, n’ait pas encore été transmise à ce jour au Parlement. Cette étude aurait permis une meilleure compréhension des forces et des faiblesses des dispositions existantes et aurait été un outil précieux pour penser l’avenir du dispositif.

c.   Réfléchir à l’avenir de la réduction d’impôt « Denormandie dans l’ancien »

Votre rapporteure invite également à s’interroger sur l’avenir du dispositif dit « Denormandie dans l’ancien », introduit en 2018 et qui permet de financer l’investissement locatif dans l’ancien, sous condition d’engagement à réhabiliter le bâti vétuste. Cette réduction d’impôt, aujourd’hui ciblée sur des territoires en cours de revitalisation et couverts par les programmes de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (programmes « Action Cœur de ville » et « Petites villes de demain »), pourrait éventuellement être étendue à l’ensemble du territoire pour ce qui concerne les milieux urbains densément peuplés. L’objectif est d’améliorer la qualité du parc immobilier français et de répondre au besoin de logement des populations en rénovant l’ancien plutôt qu’en construisant du neuf, ce qui permettra aussi de s’inscrire dans la lutte contre l’artificialisation des sols promue par la loi du 22 août portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Toutefois, avant d’apporter une quelconque évolution notable à ce dispositif, la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages appelle à une évaluation des effets de ce mécanisme, et votre rapporteure estime également qu’une telle démarche est nécessaire.

2.   Mieux aiguiller l’aide à l’accession vers des projets qui s’inscrivent dans une démarche de sobriété foncière

L’objectif d’une division par deux de l’artificialisation nette des sols dans les dix prochaines années a fait réagir la filière de la construction. Selon les constructeurs de maisons individuelles, il est parfaitement possible de baisser l’assise foncière d’une construction tout en en préservant la qualité et l’agrément. Ainsi, alors que le terrain moyen de construction d’une maison individuelle mesure 933 mètres carrés en 2019, les professionnels estiment qu’il est possible de construire convenablement sur 450 mètres carrés de terrain d’emprise. Certaines régions, comme l’Alsace, voient déjà des terrains d’emprise d’une superficie plus réduite (300 mètres carrés).

Les personnes auditionnées invitent à poursuivre l’aide à l’accession, vecteur nécessaire d’ascension et de mixité sociales, tout en contribuant à la maîtrise de la consommation foncière : ainsi, il serait possible de conditionner l’obtention d’une mesure d’aide, comme par exemple un prêt à taux zéro (PTZ) ou une APL accession, à un projet conduit sur une surface maximale de terrain ou avec un coefficient minimal d’emprise au sol.

3.   Vers un référentiel de la qualité du logement ?

L’exercice budgétaire actuel a été marqué par une réflexion publique sur la qualité des logements des Français, favorisée par le confinement dans le logement. Plusieurs travaux sont parus sur le sujet, commandés notamment par la ministre chargée du logement. C’est le cas, par exemple, du rapport de M. Pierre-René Lemas sur la qualité de construction dans le logement social, remis à la ministre au mois de février 2021, ou encore de celui de MM. Laurent Girometti et François Leclercq, architectes, remis à la ministre au mois de septembre (cf. encadré).

Le Conseil national de l’ordre des architectes, auditionné par votre rapporteure, s’associe étroitement aux conclusions de ces rapports, en appelant à une hausse générale de la qualité des logements produits. Un accent particulier a été mis sur la hausse des coûts du foncier, qui engendrerait une pression à la baisse sur les surfaces de logement, ce qui suscite à son tour l’inconfort des occupants.

Rapport de la mission sur la qualité du logement

Dans le cadre de la démarche « Habiter la France de demain », la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement, a rendu public en septembre 2021 le rapport de MM. Laurent Girometti et François Leclercq, qui conclut les travaux de la mission en vue de définir un référentiel du logement de qualité ([41]).

Dans le cadre de l’élaboration du rapport, un panel d’acteurs de la construction a été constitué. Les personnes interrogées partagent le même constat quant aux évolutions récentes du logement, qui affectent négativement la qualité de vie : baisse de la surface moyenne des logements neufs, généralisation des cuisines ouvertes qui réduisent leur praticité, mono-orientation des espaces. Le rapport fixe donc cinq objectifs pour contrecarrer ces évolutions :

– encourager l’évolutivité de l’habitat ;

– optimiser la luminosité des espaces ;

– favoriser la sensation d’espace ressentie par les habitants ;

– assurer une réponse pratique à des fonctions essentielles, telles que le rangement, le séchage du linge et le tri des déchets ;

– permettre un rapport vécu à l’espace extérieur, par la création de balcons, terrasses et loggias ([42]).

Le rapport préconise la création d’un référentiel qui établit la surface minimale possible par typologie de logement. Ces surfaces de référence seraient, selon les rapporteurs, la garantie d’une polyvence accrue dans l’agencement du logement, d’un meilleur confort de vie et d’une gestion de l’espace mieux maîtrisée.

II.   Dans ce cadre, l’action des acteurs institutionnels continue de compter fortement pour l’avenir du secteur

Dès le début de la crise sanitaire (mars 2020), la Caisse des dépôts et consignations et le groupe Action Logement, acteurs institutionnels majeurs de l’économie du logement, ont pris des mesures pour soutenir le secteur. Ces actions se sont poursuivies en 2021 et seront renouvelées dans les années à venir.

A.   les deux acteurs majeurs du secteur continuent d’Être des soutiens prÉcieux pour l’action de l’État

1.   Le groupe Action Logement augmente encore son engagement dans les quartiers prioritaires

Après les inquiétudes de l’an dernier, période durant laquelle votre rapporteure a fermement soutenu le groupe Action Logement dans son action, celui-ci a encore renouvelé et augmenté ses interventions. Le 15 février 2021, le président d’Action Logement et les ministres compétents ont signé un nouvel avenant à la convention qui lie le groupe à l’État, qui s’oriente vers quatre objectifs :

– accélérer la production de logements abordables par un soutien supplémentaire à la production de 250 000 logements sociaux et abordables en deux ans, à hauteur de 1,17 Md€ dont : 250 M€ en prêts et 450 M€ en subventions, pour la production de logements abordables ; 145 M€ de prêts et 65 M€ de subventions pour financer 14 000 places en résidences et logements pour jeunes actifs et étudiants, auxquels s’ajoutent 10 M€ de subventions pour financer des logements en colocation ; 250 M€ en prêts ou subventions, pour financer 2 000 logements et favoriser, par des interventions de l’Association foncière logement, la mixité sociale en zones détendues dans les quartiers prioritaires de la ville et dans les centres anciens marqués par l’habitat indigne ;

– répondre aux nouveaux besoins d’habitat exprimés à l’occasion de la crise sanitaire, par un accompagnement exceptionnel de vingt mille salariés accédant à la propriété d’un logement neuf à travers le versement d’une aide de 10 000 euros, sous conditions de ressources et de nature de l’acquisition ;

– soutenir les jeunes actifs et les ménages modestes dans leur parcours de logement en augmentant le montant de l’enveloppe destinée à l’accompagnement des salariés en difficulté (en plus de la poursuite du versement de l’aide à la prévention des loyers impayés), en étendant le bénéfice de l’aide mobilité de 1 000 euros à tous les jeunes de moins de 25 ans munis d’un bail locatif, entrant en emploi et rémunérés entre 0,3 et 1,1 SMIC, et en élargissant la garantie Visale à l’ensemble des salariés du secteur privé et agricole de plus de trente ans (cf. première partie du présent avis) et gagnant moins de 1 500 euros nets par mois, pour favoriser leur accès à un logement locatif dans le secteur privé ;

– conforter la dynamique de la rénovation urbaine dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, en mobilisant 1,4 Md€ supplémentaires pour intensifier les opérations de rénovation urbaine et de mixité sociale portées par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ce qui permettra, avec la contribution de l’État et du mouvement HLM, de porter le montant du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) de 10 à 12 Md€.

2.   Le groupe Caisse des dépôts et consignations soutient le marché par des prêts et subventions avantageux

À l’occasion de la crise sanitaire, la Banque des territoires a réagi de manière fortement contra-cyclique en mobilisant des financements conséquents pour soutenir le secteur, et doit poursuivre cette action. La Banque, qui gère le fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations (groupe CDC), constitue le principal financeur du logement locatif social. Le prêteur est adossé à l’épargne réglementée pour cette action (livret A et livret d’épargne populaire). Le dynamisme de ce stock de financement, à l’occasion de la crise, a permis à la Banque de déployer des prêts intéressants.

Le groupe CDC a également participé fortement, en conjonction avec l’État, à la relance du secteur du BTP, en pilotant un vaste programme d’investissement dans le logement. Dans le cadre du plan de relance impulsé par le groupe (26 Md€ en 2021 et 2022), 11 Md€ sont orientés vers des investissements dans le domaine du logement.

Les opérateurs du groupe CDC ont confirmé, lors de leur audition par votre rapporteure, que les actions engagées l’an dernier (cf. encadré) ont été menées à bien. Les quarante mille logements neufs promis en mars 2020 ont été intégralement commandés, avec 40 % des ordres de service délivrés à ce jour. En revanche, la ventilation initialement prévue n’a pas été tenue, du fait de la frilosité des promoteurs face au logement social. Le groupe CDC Habitat, entendu par votre rapporteure, s’est réjoui de la simplification des modalités d’agrément intervenu par décret en 2020, mais estime qu’un effort doit encore être fourni en vue de dynamiser le logement social (cf. deuxième partie).

Dès le 25 mars 2020, in’li, filiale du groupe Action Logement et CDC Habitat, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, ont annoncé des plans de soutien à l’économie de la promotion immobilière :

– CDC Habitat a annoncé la vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) de 40 000 nouveaux logements, avec un lancement dans la foulée des appels à projets. CDC Habitat a donc joué un rôle d’impulsion notable car, pour 4,5 Md€ de fonds propres investis, 4 Md€ proviennent de fonds d’investissement associés à ces projets.

– in’li a mené un programme d’achat de 10 000 logements intermédiaires durant l’année 2020. Pour soutenir la reprise d’activité du secteur, in’li a acquis des stocks achevés ou en cours de travaux et a sécurisé des opérations d’achat en bloc en cours de montage, tant en logements intermédiaires qu’en logements privés à loyers maîtrisés.

B.   le fonds national des aides À la pierre doit Être abondÉ pour promouvoir la production de logements

1.   La production de logements sociaux et intermédiaires doit être amplifiée pour résorber le décalage entre l’offre et la demande

La demande de logements sociaux reste fortement excédentaire par rapport à l’offre (cf. graphique). Au cours de l’année 2018, toutes catégories de demandeurs confondues, le taux de succès des demandeurs s’établit à 18 % ; il atteint 20 % pour les demandeurs disposant d’un revenu mensuel compris entre 1 000 et 1 499 euros, mais il n’est que de 13 % et 12 %, respectivement, pour les demandeurs avec un revenu de moins de 500 euros et de plus de 2 000 euros. En 2020, le taux a baissé de trois points de moyenne par rapport aux résultats de 2019, cette diminution étant intégralement attribuable à la baisse du nombre d’attributions réalisées au printemps 2020, au moment du premier confinement décidé par le Gouvernement. Le décalage structurel qui existe entre l’offre et la demande de logements sociaux, loin de se résorber, s’est donc creusé encore davantage.

En dehors des facteurs propres à la crise sanitaire, la baisse du taux de mobilité au sein du parc social contribue aussi à expliquer la diminution du nombre d’attribution de logements sociaux en France, malgré l’augmentation constante du stock de ces logements, ce dont se réjouit votre rapporteure. Cette baisse s’explique par le constat que dressent les ménages d’un très fort écart de loyers entre le parc privé et le parc social en France, notamment dans les zones tendues. Ainsi, les locataires du parc social sont bien souvent condamnés à y rester, malgré une amélioration de leur situation.

Cette tendance à la baisse des attributions a pour effet concret d’allonger les délais d’attente moyens des ménages après une demande d’entrée dans le parc social. Or, l’offre ne progressant pas au même rythme que le nombre de demandeurs, ce décalage semble condamné à se creuser. Selon les chiffres communiqués par l’USH lors du 81e congrès HLM, qui a porté sur cette thématique (Bordeaux, 28-30 septembre 2021), 70 % des demandeurs ont des ressources situées en-dessous du plafond du prêt locatif aidé d’intégration (PLA-I), qui est de 1 200 euros nets pour un célibataire en Île-de-France.

Il faut néanmoins considérer cette diminution des attributions de logements sociaux avec prudence. Il convient en effet de garder à l’esprit que les 2,2 millions de demandeurs de logements sociaux en France ne sont pas dans des situations identiques. En France, le dépôt d’une demande de logement social est ouvert à tous. Le chiffre de 2,2 millions de demandeurs inclut ainsi une centaine de milliers de personnes qui ne se verront jamais attribuer un logement, pour la raison qu’ils ne répondent pas aux critères permettant d’en bénéficier. Ce chiffre comprend également les demandes de mutation qui, même si elles sont légitimes, ne présupposent pas la même urgence pour les locataires qui en font la demande, puisqu’ils bénéficient déjà d’un logement digne.

Taux de succès et répartition des demandeurs et attributaires en 2020, selon leur revenu mensuel par unité de consommation
 

Source : système national d’enregistrement au 23/04/2021 ; retraitement USH

2.   Le Fonds national des aides à la pierre, sous employé, doit voir sa gouvernance et son mode d’action évoluer

Le financement du Fonds national d’aide à la pierre (FNAP) fonctionne selon une méthodologie concertée et planifiée. Afin d’assurer le financement des opérations d’aides à la pierre – c’est-à-dire, à titre principal, le développement de l’offre nouvelle, et, dans une moindre mesure, la démolition et la réhabilitation du parc social ancien en territoires détendus – et de programmer le montant des nouvelles opérations et actions à engager par l’État, le FNAP sollicite l’ouverture d’autorisations d’engagement préalables au programme 135, via la conclusion d’une convention précisant les modalités de financement de ces nouveaux engagements financiers.

Comme l’a demandé le Premier ministre, le FNAP doit orienter la construction neuve là où elle est nécessaire et il ne peut réussir qu’avec la pleine et entière implication des organismes HLM. Ainsi, dans le cadre du protocole d’accord signé par les organismes HLM, le Gouvernement, le groupe Action Logement et la Banque des territoires et qui détaille les modalités du financement de l’objectif de production de 250 000 logements sociaux en deux ans, le FNAP mobilise plus de 1 Md€ de subventions sur 2021-2022, intégrant 700 M€ de contribution exceptionnelle d’Action Logement et 20 M€ d’euros issus du plan de relance, dont 565,2 M€ pour la seule année 2021 (budget d’intervention en hausse de 16 % par rapport à 2020).

Il semble nécessaire à votre rapporteure que les aides directes soient distribuées dans les territoires où les prix de production les rendent indispensables. Il faut également engager une simplification d’ampleur des agréments. Dans les territoires où la production de logements sociaux est prioritaire, l’agrément ne doit plus être un frein, mais une formalité. Les préfets dans les zones tendues se mobilisent dans ce sens pour agir dans une logique d’accompagnement des organismes constructeurs, à l’instar de ce qui se fait en Île-de-France.

Le PLF 2022 porte ainsi les ressources prévisionnelles du FNAP à 485,21 M€ par le biais :

– d’une contribution d’Action Logement, telle que mentionnée dans la convention quinquennale État-Action Logement (350 M€) ;

– d’une fraction des cotisations des bailleurs sociaux mentionnées aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l’habitation (75 M€) ;

– des versements en tant que bénéficiaire de dernier rang du produit des prélèvements en carence exercés au titre de la loi SRU (4 M€) ;

– de la majoration du prélèvement « SRU » (28 M€) ;

– de l’annulation-restitution de crédits non engagés sur les fonds de concours du programme 135 (23,12 M€ de crédits non fléchés et 8,6 M€ de crédits fléchés).

Une augmentation forte des crédits du FNAP est à constater sur la législature. Il résulte de cette organisation partenariale que la participation de l’État au financement du FNAP est assez faible, mais compensée par des exigences toujours croissantes placées sur le financement par le groupe Action Logement, d’une part, et sur celui transitant par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), d’autre part. En 2017, les crédits du FNAP étaient de 367 M€ et, en 2021, de 485 M€. En 2022, le chiffre est du même ordre de grandeur, ce qui aboutit à une augmentation globale, depuis 2017, de 100 M€ des crédits du FNAP.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 12 octobre 2021, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Stéphanie Do (Logement), les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Pour la cinquième fois de la législature, vous m’avez fait confiance pour rapporter les crédits d’une mission fondamentale de l’État. Ce fut un honneur et un plaisir de revoir tous les ans les acteurs de ce secteur très important. En 2020, nous nous livrions à l’exercice budgétaire dans un contexte marqué par la crise sanitaire. Depuis, l’action décisive de notre majorité et du Gouvernement a permis de redresser la barre et d’envisager l’avenir avec confiance.

Le projet de loi de finances pour 2022 conforte largement cette confiance. L’effort historique consenti par notre majorité en faveur du logement se confirme, avec des crédits en hausse de plus de 1,1 milliard d’euros, soit une augmentation de 7 %. Le PLF a su tirer les leçons de la période éprouvante que nous venons de traverser, notamment en poursuivant la mise en œuvre du plan de relance, qui se concentre sur deux ans.

D’abord, nous apportons des moyens massifs – 2 milliards d’euros de crédits – à la rénovation énergétique des logements. En 2021, l’aide MaPrimeRénov’ a été élargie à tous les propriétaires occupants, propriétaires bailleurs et copropriétaires, de façon à massifier l’adaptation thermique du parc de logements. La transformation du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime a permis de réorienter l’aide vers les plus démunis, puisque 65 % des bénéficiaires sont des ménages modestes et très modestes, issus des quatre premiers déciles de revenus.

De façon tout à fait impressionnante, l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) a su remplir de nouvelles missions, tout en continuant à assumer son cœur de mission historique. En plus d’apporter MaPrimeRénov’ à plus de 700 000 foyers, elle a massifié son aide Habiter mieux et accompagné 100 000 foyers, soit 20 000 de plus. Ce programme n’a pas été vampirisé par le succès de MaPrimeRénov’. Au contraire, il permet à de plus en plus de ménages parmi les plus fragiles de réaliser d’importants travaux de rénovation globale, essentiels pour maîtriser leur budget. Je salue l’investissement des personnels de l’ANAH, dont l’activité a été multipliée par dix en trois ans.

Cette année, nous poursuivons et menons à son terme le changement historique de méthode que notre majorité a introduit pour traiter le sans-abrisme, qui passe par l’augmentation des crédits pour l’hébergement : une nouvelle hausse de plus de 20 % les portera de 1,7 milliard en 2017 à 2,8 milliards en 2022, soit une hausse de 65 % durant la législature.

Plusieurs réformes majeures ont marqué 2021 dans ce domaine. En pérennisant 190 000 places d’hébergement qui avaient été créées lors de la crise sanitaire, la ministre chargée du logement a mis fin à la gestion en fonction des températures enregistrées au thermomètre – le gain de 50 000 places ainsi obtenu par rapport aux 145 000 qui étaient mobilisées avant la Covid, permet de mieux planifier l’effort pour les années à venir. La gouvernance de l’hébergement d’urgence a évolué vers un pilotage mieux maîtrisé et plus efficace. Les compétences en matière d’hébergement et d’accès au logement ont ainsi été regroupées au sein de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL). Je salue son action infatigable en faveur de la mise à l’abri des personnes et d’un véritable service public « de la rue au logement ».

Le PLF 2022 consacre aussi notre détermination à accompagner les Français vers un logement abordable. L’accent reste mis sur la sécurisation des rapports locatifs, avec la poursuite de la garantie Visa pour le logement et l’emploi (VISALE), notamment à destination des jeunes et des salariés modestes. Le budget des aides personnelles au logement (APL) reste stable, à 15,5 milliards d’euros, contribuant à soulager les dépenses de loyer pour 6 millions d’allocataires. Les effets de la réforme du versement des APL en temps réel se conjuguent à ceux de tous les dispositifs déployés par le Gouvernement pour soutenir l’économie dans cette période, tels que le chômage partiel. Il s’agit bien d’une réforme de justice et d’efficacité. Le conditionnement des APL au revenu contemporain n’a entraîné aucune modification pour 52 % des allocataires ; pour 18 % d’entre eux, il a conduit à une hausse des APL perçues ; pour 29 %, à une baisse. Des adaptations ont été apportées : les ressources des étudiants ont été prises en compte sur une base forfaitaire, et les apprentis et les personnes en contrat de professionnalisation ont bénéficié d’un abattement sur leurs ressources. Malgré quelques difficultés techniques, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et les caisses d’allocations familiales (CAF) ont donc mené à bien une réforme ambitieuse.

L’état de la construction de logements neufs est l’objet de la partie thématique de mon rapport. L’an dernier, j’avais soulevé la nécessité de soutenir le secteur avec des aides fiscales et budgétaires. Cette année, en dépit du soutien du Gouvernement, la production de logements est encore insuffisante pour satisfaire la forte croissance de la demande. Dans un rapport récent, la commission pour la relance durable de la construction de logements, dite « Rebsamen », a relevé les résultats décevants dans les zones tendues, attribuables notamment aux réticences des élus à engager des opérations de construction et d’aménagement ainsi que des populations, qui associent parfois l’art de construire au bétonnage méthodique. La défiance de l’opinion publique et des élus vis-à-vis de la construction s’illustre par le net ralentissement de la délivrance des permis de construire, notamment dans les métropoles. Je rejoins la position du Premier ministre : continuer à y créer des emplois tout en freinant la construction revient à accepter l’éviction des plus pauvres des métropoles.

Le dispositif d’incitation à l’investissement locatif doit être repensé pour mieux accompagner un urbanisme et une construction durables, notamment pour atteindre nos objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Ceux-ci ne signifient pas la fin de la construction neuve ; ils appellent à une construction raisonnée, inscrite dans la sobriété foncière. Il faut massifier la construction, mais pas à n’importe quel prix. Le logement de demain sera durable et de qualité.

Tous les acteurs du logement partagent la nécessité de telles évolutions. Ils sont enthousiastes à l’idée d’inventer de nouveaux modes d’habitat qui répondront aux contraintes que nous nous fixons. Je me réjouis des avancées en cours, telles que l’annonce par le Premier ministre de la compensation totale de l’exonération de taxe foncière pour les nouvelles constructions – une mesure qui devrait beaucoup aider les collectivités. Il s’agit d’un investissement majeur, dont le montant pourrait atteindre 4 milliards d’euros sur quinze ans, soit 300 millions par an.

Plusieurs des dispositions qui relèvent des programmes relatifs au logement seront reconduites. Dans l’ancien, le dispositif Denormandie continuera d’accompagner le plan Action Cœur de ville, lui-même prolongé jusqu’en 2026. Ces instruments renforçant l’investissement locatif doivent faire l’objet d’une discussion parlementaire approfondie pour rationaliser leur emploi : prolongation, pérennisation, extinction progressive sont autant de paramètres à intégrer dans une vision globale de la politique du logement.

C’est une action de grande ampleur que le Gouvernement a menée pour dynamiser la production de logements neufs. Un grand nombre d’appels à projets régionaux ont été lancés, pour un montant de 259 millions d’euros. Les projets en faveur du recyclage foncier, pilotés par les préfets de région, pourraient produire 37 000 logements sociaux et 64 000 logements privés sur des secteurs en friche ainsi que près de 5,6 millions de mètres carrés de surface d’activité économique. Je salue, à cet égard, la création du fonds pour le recyclage des friches, et encourage à le pérenniser.

La construction de logements sociaux, qui constitue une des réponses à apporter à la crise du logement, sera également stimulée par l’abondement du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), qui atteint près de 500 millions d’euros. Action Logement travaille également activement, avant et après la crise, à soutenir des millions de Français dans l’accès au logement, et a encore augmenté sa participation au budget de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

Le PLF 2022 consent un effort considérable en faveur de l’accès des Français au logement et à l’hébergement, effort qui se prolonge dans le soutien à l’économie du bâtiment pour lui permettre de répondre aux besoins.

J’émets donc un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Cohésion des territoires consacrés au logement.

M. Mickaël Nogal (LaREM). Voir ce dernier budget de la législature accorder un effort aussi important en faveur du logement fait de moi un député heureux. Il marque l’action que nous menons depuis cinq ans et, sur des volets tels que la rénovation énergétique, l’aide à la construction ou même les friches, il est souhaitable que les prochains se montrent aussi ambitieux.

En matière de rénovation, grâce à « MaPrimeRénov’ », l’objectif de 500 000 logements rénovés par an a été dépassé, il atteindra 700 000 à 800 000 en 2021. Le succès du dispositif est tel que les crédits prévus dans le plan de relance pour les années 2021 et 2022 ont été consommés ; 2 milliards d’euros supplémentaires ont été alloués pour conserver cette dynamique. Cette révision à la hausse envoie un très bon signal alors même que la loi « climat et résilience » vient d’être promulguée.

La politique du « logement d’abord » est celle qui nous a animés depuis le début de la législature. Il s’agit de faire du logement le premier facteur d’inclusion dans la société et d’émancipation, en mettant fin à la logique de l’hébergement d’urgence. Grâce au logement, 280 000 personnes ont pu être sorties de la rue et intégrer un parcours d’intégration. Ce sont autant de familles qui peuvent se reconstruire après avoir traversé bien des difficultés. Nous pouvons être fiers de notre bilan, même si on ne peut évidemment pas résoudre toutes les situations. Zéro sans-abri reste l’objectif et la gestion de l’hébergement et du flux ne sera désormais plus fonction de la météo et de la saison : les personnes qui ne peuvent pas encore bénéficier d’un logement pérenne seront mises à l’abri même après la trêve hivernale.

Sur le même principe que le prélèvement à la source pour l’impôt sur le revenu, la réforme de l’APL a adapté les aides au logement en fonction des revenus de l’année, non de ceux perçus deux ans auparavant. C’est une réelle avancée, l’idée étant, non pas de faire des économies, comme on nous en a accusés, mais de s’adapter aux besoins et à la situation de chaque Français. C’est, je pense, ce que l’on peut retenir de l’action du Gouvernement et de la majorité en matière de logement. Qu’un concitoyen n’ait plus de logement, qu’il cherche à acquérir une propriété ou qu’il ait besoin d’un logement social, à chaque fois nous avons répondu présent.

Ce budget logement atteste de notre ambition et de nos efforts, qui s’inscrivent dans le temps long. Je le voterai avec fierté.

M. Thibault Bazin (LR). Chiffres à l’appui, je veux mettre plusieurs bémols au tableau parfait de la rénovation et de la construction que vous venez de dresser.

Depuis 2017, vous aviez affiché la volonté d’un élan pour la construction : vous vouliez construire plus et moins cher. En 2017, on dénombrait 437 781 logements commencés ; en 2018, il y en avait 399 966 ; 387 435 en 2019 ; 357 026 en 2020. C’est le déclin du logement en marche ! Du côté du prêt à taux zéro (PTZ), 123 000 avaient été accordés en 2017 ; 87 000 en 2018 – avant la Covid ; 90 000 en 2019 ; 66 732 en 2020. C’est autant de baisse de soutien à l’accession à la propriété.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis 2017, bien avant la crise sanitaire, la production de logements diminue – elle est passée sous les 400 000 logements commencés par an en 2018 et 2019. La baisse du nombre de PTZ est plus inquiétante encore : ce sont autant de foyers empêchés d’accéder à la propriété, autant de mobilités impossibles pour des personnes du parc social. Malgré de fortes progressions au premier semestre 2021, les niveaux de la demande et de l’offre demeurent plus bas qu’en 2019, à - 13 % et - 12 %. Pire, ils sont plus bas qu’en 2017. Avez-vous construit plus et moins cher ? Non et non.

De plus, les baisses ne sont pas homogènes dans le territoire. Les coups de rabot et l’exclusion de 95 % du territoire français du bénéfice des dispositifs de soutien à l’accession à la propriété – quotité finançable du PTZ, investissement locatif en zone B2 avec l’agrément prévu dans le dispositif Pinel – ont aggravé les fractures territoriales. Il en résulte moins de mixité dans les opérations et moins de mobilité du parc social. Dans les zones détendues – qui occupent 95 % du territoire –, l’accession à la propriété, l’investissement locatif et l’investissement des bailleurs sociaux ont été bien moindres ; la réforme de l’APL y a davantage pénalisé les bénéficiaires, plus nombreux. À nouveau, vous semblez les exclure des aides aux maires bâtisseurs. C’est profondément injuste !

Quant à « MaPrimeRénov’ » son succès ne peut masquer le retard à l’allumage en matière de rénovation. Là encore, tout n’a pas été parfait dans le dispositif, avec des délais de versement qui s’allongent et pénalisent les artisans et les bénéficiaires. L’élargissement que vous mettez en avant exclut encore des classes moyennes, pénalisées par la complexité du bouquet à réaliser.

J’émets donc un avis défavorable à la stratégie défaillante et injuste du Gouvernement en matière de logement. Elle n’a que mépris pour la pierre, les propriétaires et 95 % du territoire français.

M. Jean-Luc Lagleize (Dem). Le rapport pour avis de Mme Stéphanie Do permet de saisir l’engagement du Gouvernement pour accompagner l’ensemble de nos concitoyens vers un meilleur accès au logement, et nos collectivités, vers la nécessaire transition écologique et énergétique des bâtiments. Avec une nouvelle augmentation de 1 milliard d’euros des moyens alloués à la mission Cohésion des territoires, le Gouvernement poursuit un effort intensif en réponse à la crise sanitaire, qui a fortement touché les secteurs du logement et de l’aménagement du territoire. Cette hausse permettra de poursuivre nos efforts de rénovation des logements, d’améliorer les programmes de lutte contre le sans-abrisme et d’aller vers un logement plus abordable pour tous. Le logement est une politique publique qui doit satisfaire à la fois les nécessités sociales et les exigences environnementales. Les unes ne vont plus sans les autres, ce que le Gouvernement a très bien compris.

L’année 2021 a marqué un tournant de l’action environnementale du Gouvernement dans le domaine du foncier, notamment avec le fonds « friches » et l’objectif de zéro artificialisation nette. Le fonds a été créé par le plan de relance dès septembre 2020. J’avais soutenu la mesure dans mon rapport sur la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l’offre de logements accessibles aux Français, votée à l’unanimité en 2019. Elle est essentielle à l’heure de la lutte contre l’étalement urbain. D’abord doté de 300 millions d’euros, le fonds « friches » a financé 544 projets de réhabilitation et de valorisation des friches urbaines et industrielles. Il a été augmenté de 350 millions supplémentaires puis, début septembre 2021, le Président de la République en a annoncé la pérennisation, preuve que la mesure est désormais indispensable pour valoriser le foncier à recycler.

L’adoption de la loi « climat et résilience » a formellement engagé la France dans les objectifs ambitieux de diviser par deux le rythme de l’artificialisation des sols d’ici à 2030 et d’atteindre zéro artificialisation nette d’ici à 2050. Parce qu’une telle lutte doit s’accorder à la nécessité de continuer à produire des logements neufs, la loi a permis d’adapter les règles d’urbanisme, notamment en matière de surélévation des bâtiments. La mesure, que j’avais également défendue, répond aux exigences de la lutte contre l’étalement urbain.

Si l’ensemble des engagements pris par la majorité parlementaire et le Gouvernement permet d’adapter notre foncier aux besoins des populations et à notre environnement, force est toutefois de reconnaître que la situation n’est pas optimale du point de vue de la construction des logements. La crise sanitaire a réduit drastiquement le rythme des constructions, alors que le secteur du bâtiment et de la construction connaît, depuis quelques années déjà, un ralentissement marqué de son activité. Une autre explication réside dans la réticence des élus locaux à délivrer de nouveaux permis de construire, une frilosité liée à l’inacceptabilité sociale de l’acte de construire, mentionnée par Mme Stéphanie Do. Ce statu quo laisse libre cours à l’étalement urbain, avec ses conséquences – pollution, allongement des temps de trajet domicile-travail, difficulté d’accès aux services publics tels les transports en commun. La situation, délétère, doit évoluer. Afin de rendre les projets de construction en zone tendue plus consensuels, il est urgent d’inventer de nouveaux modes de dialogue entre les populations et leurs élus. Quelles pistes peuvent être explorées ?

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Le rapport pour avis met en lumière quelques avancées mais aussi quelques déceptions.

Du fait de la contemporanéisation des ressources, le nombre des bénéficiaires de l’APL avait baissé de 580 000 personnes au 1er janvier 2021. La baisse s’est poursuivie jusqu’en juillet pour tomber, d’après le dernier rapport dont nous disposons, au plus faible nombre de bénéficiaires depuis 2010. Les données ne permettent pas d’analyser en détail ceux qui ont vu leur APL baisser mais qui demeurent éligibles. Quel est le profil des sortants et le nombre de perdants parmi ceux qui sont restés bénéficiaires ?

Du fait de la réduction du loyer de solidarité, qui a réduit les capacités d’investissement des bailleurs, la production de logements, notamment sociaux, connaît une dégradation pérenne et reste très en dessous des besoins. Si l’ampleur de l’investissement de l’État dans « MaPrimeRénov’ » est à saluer, c’est avec quelques réserves cependant. Les moyens mobilisés, quoique substantiels, paraissent insuffisants rapportés au coût moyen d’une rénovation complète et performante, estimé à 38 000 euros. Les volumes ont augmenté en nombre de dossiers, à 300 000, mais la somme engagée par dossier représente moins de 2 000 euros par logement. Un effort supplémentaire est donc requis pour mener à bien des rénovations plus complètes.

Pour finir, il est incompréhensible que le PLF 2022 ne prévoie pas de prolonger les échéances de l’éco-PTZ et du nouveau crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des TPE-PME, actuellement fixées au 31 décembre 2021.

Mme Sylvia Pinel (LT). Une politique d’accès au logement plus juste et plus solidaire, la rénovation des logements et la construction de logements neufs, telles sont les trois priorités que s’est fixées la ministre du logement en janvier dernier, et j’y souscris. Cependant, le projet de loi de finances pour 2022 n’est pas à la hauteur, pas plus d’ailleurs que ne l’a été la politique du Gouvernement depuis le début du quinquennat.

Le développement de l’offre de logement social n’a jamais été aussi limité. En 2020, le nombre de logements sociaux agréés s’élève à 48 000 unités contre 75 000 en 2016. Les causes du déclin ne sont pas à chercher bien loin : un quinquennat de mesures financières et fiscales portant préjudice aux finances des bailleurs locaux. Ainsi, la baisse du montant des APL et de la réduction du loyer de solidarité (RLS), bien que tempérée par le pacte d’investissement pour le logement social, ont pesé à hauteur de 1,3 milliard d’euros sur les finances des bailleurs sociaux. Quant au protocole en faveur de la relance de la production de logements sociaux en 2021 et 2022, il aurait pu, comme les annonces du Premier ministre lors du congrès du mouvement HLM à Bordeaux, redonner du souffle au secteur, à condition toutefois que l’un et les autres se concrétisent dans le projet de loi de finances.

Il y a un problème de méthode. La commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par François Rebsamen, a présenté plusieurs propositions, dont la compensation de l’exonération de la taxe foncière sur les logements sociaux agréés entre 2021 et 2026. Non seulement elles ne sont pas reprises dans le texte initial mais elles ne font pas non plus l’objet d’amendements.

S’agissant de la construction, elle suit à peu de chose près la même évolution que le logement social. C’est la conséquence d’un manque de vision stratégique, que nous avions pourtant dénoncé et sur lequel nous avions alerté à plusieurs reprises le Gouvernement et la majorité. Nombre de décisions prises ont porté atteinte aux outils d’accession à la propriété : la suppression de l’APL accession en 2017 ; la réduction de la quotité du PTZ – celui-ci étant néanmoins prolongé jusqu’en 2023 – dans les zones B et C, qui a fortement freiné la construction dans les zones rurales ; le recentrage du dispositif portant mon nom, même si celui-ci est également prolongé, qui risque d’exclure un très grand nombre de biens. Il ne faudrait pas que, sous couvert de respect de critères environnementaux et de qualité d’usage, Bercy cherche à réaliser des économies.

Quant à la lutte contre l’artificialisation des sols, elle implique un effort de densification de l’habitat, à rebours des attentes de nos concitoyens qui, au lendemain des confinements, rêvent avant tout de maisons avec des extérieurs. Les élus locaux éprouvent des difficultés à assumer face à la population un programme de maire bâtisseur. Il est urgent de leur donner les moyens de mener une véritable politique de construction en libérant du foncier. Il faut aussi réhabiliter l’acte de construire et améliorer son acceptabilité notamment dans les zones tendues. Sur le sujet, je ne peux que vous renvoyer au rapport de la commission Rebsamen.

Enfin, en ce qui concerne la rénovation énergétique, au-delà des 2 milliards d’euros additionnels prévus dans le projet de loi de finances, nous n’avons aucune visibilité sur la poursuite du dispositif « MaPrimeRénov ’ » à compter de 2023 – je rejoins les interrogations soulevées par ma collègue Marie-Noëlle Battistel. Or si la France veut respecter ses engagements, celui-ci devra s’inscrire dans la durée et s’accompagner d’un financement pérenne, tout comme la politique du logement d’ailleurs.

M. David Corceiro. La crise de la Covid-19 a accentué le risque de creuser les inégalités pour les populations les plus fragiles. Les prix de l’immobilier ont augmenté ces derniers mois, laissant une partie de la population en marge du marché, notamment la jeunesse, qui est souvent victime de la précarité en matière de logement. Le Gouvernement n’est pas resté inactif en la matière.

Madame la rapporteure, vous avez plaidé l’an dernier en faveur d’un élargissement des critères d’éligibilité à la garantie VISALE qui connaît un immense succès. Vous avez été entendue puisque, depuis le 1er juin 2021, le bénéfice de la garantie est étendu à tous les salariés gagnant moins de 1 100 euros nets par mois, quels que soient leur âge et la nature de leur contrat de travail. Cependant, ce plafond peut constituer un frein pour les jeunes étudiants – je vous remercie de l’avoir identifié dans votre rapport. Quelles autres mesures fiscales pourraient être prises pour aider plus et mieux les jeunes et les étudiants ?

M. Fabien Di Filippo. MaPrimeRénov’, ce dispositif est encensé mais connaît sur le terrain des problèmes de versement. D’un côté, les artisans sont parfois au bord de la faillite faute d’être payés alors qu’ils ont dû stocker des produits en quantité très importante, parfois pour plusieurs centaines de milliers d’euros ; de l’autre côté, les usagers, de bonne foi, sont amenés à avancer des sommes importantes car les dossiers sont kafkaïens. Qu’en est-il réellement ? Les difficultés sont-elles liées à un manque de financement ? Pourquoi les dossiers ne sont-ils pas traités beaucoup plus rapidement ?

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Monsieur Bazin, les constats doivent être exhaustifs. Dans le panorama que vous dressez, vous oubliez les difficultés à obtenir des permis de construire, que nombre de personnes auditionnées ont dénoncées. Quant au foncier, alors qu’il est le nerf de la guerre, il fait défaut. Les élections successives ont aussi compliqué la tâche des équipes municipales. Enfin, les habitants s’opposent aux maires bâtisseurs. Il faut avoir à l’esprit l’ensemble des termes du débat.

Madame Battistel, je vous renvoie à mon rapport, qui répond de manière détaillée à votre question. Pour 52,2 % des allocataires, la réforme des APL est sans impact sur le montant de leur allocation ; pour 29,8 % d’entre eux, la réforme donne lieu à une baisse des APL d’un montant moyen de 73 euros ; 6,6 % perdent leur droit à l’APL ; pour 18,2 %, la réforme conduit à une hausse des APL d’un montant de 49 euros en moyenne. Sans la réforme, 115 000 allocataires n’auraient pas bénéficié d’APL. Ce sujet a largement occupé mon audition de la Caisse nationale d’allocations familiales, ce qui m’a permis d’éclaircir de nombreuses zones d’ombre.

Madame Pinel, vous avez évoqué l’année 2022 en lieu et place de l’année 2021. Ce sont plus de 100 000 agréments de logement sociaux qui doivent être accordés en 2021.

Monsieur Corceiro, s’agissant du logement étudiant, l’année dernière, j’ai défendu l’extension du dispositif VISALE et j’ai obtenu satisfaction. J’attends toujours un retour du ministère sur un point que j’ai souligné dans mon rapport avant de déposer éventuellement un amendement ; je ne sais toujours pas quel sera le seuil de revenus retenu pour ouvrir aux étudiants le droit au dispositif.

Pour compléter, je mentionnerai deux sujets qui ont souvent été abordés lors des auditions. D’une part, l’avantage fiscal Censi-Bouvard, réduction d’impôt qui finance la construction dans les résidences, notamment étudiantes, sera prorogé cette année par un amendement du Gouvernement et évalué l’an prochain par un rapport d’inspection. D’autre part, l’avenant entre l’État et Action Logement, signé en février, prévoit un volet sur les résidences étudiantes, comprenant 145 millions d’euros en prêt et 65 millions en subvention pour financer 14 000 nouvelles places pour les jeunes actifs et étudiants.

Mme Sylvia Pinel. Les permis de construire, le foncier ou le calendrier électoral ne sont pas des arguments recevables. Lorsque j’étais ministre, des élections ont eu lieu : en 2014, élections municipales ; en 2015, élections départementales et régionales, dissociées. Il est vrai qu’elles ne favorisent pas la réalisation des projets, mais tous les gouvernements ont subi le calendrier électoral. S’agissant du foncier, une mission avait été confiée à M. Thierry Repentin sur la mobilisation du foncier public. Vous avez supprimé l’aide aux maires bâtisseurs que j’avais initiée. Pour encourager la construction, nous avions alourdi les sanctions de la loi SRU. Nous avions défini un plan de relance de la construction qui concernait tous les segments du marché de la construction.

Reconnaissez simplement, Madame la rapporteure, que les mesures que vous avez prises en 2017 ont brisé la confiance et créé de l’instabilité, ce qui a freiné la construction. C’était prévisible, ne vous abritez pas derrière des arguties.

M. Thibault Bazin. Je connais nombre de maires qui souhaiteraient accorder des permis de construire sur des terrains en plein centre-ville – des friches commerciales, scolaires ou agricoles –, mais ils se heurtent au manque de solvabilité des ménages puisque l’APL accession a été supprimé et la quotité du PTZ divisée par deux dans 95 % du territoire français.

Vous ne répondez pas à la question du rapport que vous entretenez avec les territoires. Cette mission porte mal son nom, car nous sommes très loin de la cohésion des territoires.

Je reviens aux chiffres parce que les paroles, c’est bien, mais les actes, c’est mieux. Combien de permis de construire ont été accordés avant la crise sanitaire et les élections municipales ? Le nombre de logements dont la construction a été autorisée a baissé de 32 000 entre 2017 et 2018, et de 14 000 entre 2018 et 2019. Ce sont donc 46 000 logements en moins, autant de ménages qui ne trouvent pas de solution dans notre pays.

 

Article 20 et état B

 

Amendement II-CE2 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Mes amendements sont autant d’appels que je vous lance. Le premier concerne la quotité que le PTZ finance. Lors de la première année du quinquennat, vous avez fait le choix de la diviser par deux pour 95 % du territoire français. Résultat : le nombre de prêts à taux zéro a diminué de 30 000. Ce sont autant de projets qui n’ont pas vu le jour pour des familles qui ne peuvent pas accéder à la propriété.

L’amendement vise à augmenter le nombre de PTZ dans les territoires ruraux en rétablissant la quotité antérieure.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Je suis favorable au maintien du PTZ. Je me réjouis de la prorogation du dispositif jusqu’en 2023 annoncée par Mme la ministre. Cette évolution très favorable rend votre amendement sans objet.

M. Thibault Bazin. Mon amendement ne vise pas à proroger le PTZ mais à rétablir à 40 % la quotité que vous avez abaissée à 20 % dans 95 % du territoire. La prorogation d’une injustice ne la rend pas plus juste.

Mme Sylvia Pinel. L’amendement a en effet pour objet de revenir au PTZ tel qu’il existait avant le coup de rabot de 2017. En 2016 et 2017, les chiffres étaient favorables à l’accession à la propriété pour les jeunes ménages. Aujourd’hui, la quotité pose un problème auquel l’amendement cherche à répondre. C’est la raison pour laquelle je le soutiens.

M. Mickaël Nogal. Lorsque la suppression du PTZ sur une partie du territoire a été envisagée, nous avons été plusieurs, sur tous les bancs, à défendre son maintien sur l’ensemble du territoire, même contre l’avis du Gouvernement dans un premier temps.

Le PTZ est prorogé. Pourquoi une quotité différente est-elle appliquée selon que la zone est tendue ou détendue ? Nous venons d’adopter des mesures pour lutter contre l’artificialisation des sols dans la loi « climat et résilience ». Notre objectif n’est pas d’empêcher les Français d’accéder à la propriété, bien au contraire, nous les encourageons. Mais les logements doivent être construits dans les bons endroits.

Vous pouvez avancer des chiffres qui montrent une baisse de la construction dans certains territoires, mais ces chiffres ne reflètent pas la réalité vécue par nos concitoyens. Ne devons-nous pas aider nos concitoyens à s’installer dans des territoires pourvus de transports et d’emplois ? C’est cette préoccupation qui doit nous guider et non les statistiques sur le nombre de PTZ.

Il faut prendre en considération les opérations de revitalisation des territoires que vous aviez soutenues, Monsieur Bazin, – le plan Action Cœur de ville ou l’opération de revitalisation de territoire – et pas seulement s’arc-bouter sur la quotité. Ce sont des détails techniques alors que le sujet est politique : où construit-on et quel type de logements ?

M. Thibault Bazin. La République en Marche veut dicter aux Français le lieu où ils doivent habiter. À vos yeux, certains territoires seraient sans avenir faute d’emplois. Je m’inscris en faux : en raison du vieillissement de la population et du phénomène de décohabitation, nous avons besoin de produire des logements partout, dans des proportions évidemment différentes selon les territoires.

Il faut garantir à un foyer qui souhaite accéder à la propriété une égalité des chances dans toutes les communes de France, même s’il ne s’agit pas d’une grande métropole et même si les emplois n’y sont pas très nombreux. Le rapport aux territoires est ce qui nous différencie.

M. Fabien Di Filippo. Après la crise des gilets jaunes puis la crise sanitaire, admettez que la métropolisation à marche forcée n’est pas bonne pour le pays ni souhaitée par nos concitoyens.

En concentrant les moyens et l’artificialisation des sols toujours dans certaines zones et en empêchant toute réhabilitation des logements dans d’autres, vous aggravez encore la fracture territoriale. Cet outil n’est sans doute pas suffisant, d’autres politiques d’accompagnement sont nécessaires, mais vous ne pouvez pas toujours aller dans le même sens sans créer de graves difficultés.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE4 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Il s’inscrit dans la même logique que le précédent, mais concerne le prêt social location-accession (PSLA).

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Le PSLA est un instrument au service de l’accession à la propriété auquel notre majorité tient. Dans la loi de finances de 2020, nous avons décidé de l’étendre à l’acquisition de logements existants à la condition que des travaux soient réalisés, et ce afin d’encourager la réhabilitation du bâti existant. C’est en privilégiant un urbanisme et une construction durables que nous parviendrons à favoriser une production de logements compatible avec nos autres objectifs. Avis défavorable.

M. Thibault Bazin. Quel talent ! Vous êtes capable de présenter un rétrécissement comme un élargissement.

Le dispositif était bien plus large précédemment. Cela aurait pu être pire, me direz‑vous, il aurait pu disparaître totalement ! Mais les acquéreurs, issus du parc social, rencontrent souvent des difficultés pour faire financer les travaux, ce qui peut les placer dans une grande précarité. Ils ont besoin de connaître le reste à charge lorsqu’ils s’engagent dans une démarche d’achat. Il est préférable de leur livrer un bien clé en main.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE3 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Il s’agit d’un amendement d’appel visant à rétablir l’APL accession. Votre politique depuis 2017 a abouti à une remise en cause de l’APL accession qui ne représentait pourtant que 2 % des crédits consacrés au logement. Ce sont 35 000 foyers qui ne peuvent désormais plus accéder à la propriété, faute de pouvoir bénéficier de l’APL accession.

En outre, dans une période où le sérieux budgétaire pourrait être de mise, l’APL accession coûte bien moins cher à l’État sur le long terme que les APL.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Depuis 2017, nous nous sommes battus pour défendre l’APL accession. Pour la première fois cette année, je ne présente pas d’amendement sur le sujet parce que les crédits de l’action 01 Aides personnelles du programme Aide à l’accès au logement sont passés de 12,4 milliards d’euros à 13,1, soit une augmentation de plus de 5 %. En dépit d’une économie estimée à plus de 1,1 milliard d’euros du fait de la réforme, le tendanciel de versement des APL reste très dynamique.

Face à une telle dynamique de la dépense, il ne me semble donc pas opportun d’alourdir encore le poids de l’action.

M. Thibault Bazin. Pendant plusieurs années, vous avez soutenu le dispositif de l’APL accession contre votre majorité et le Gouvernement, et aujourd’hui, vous y renoncez.

Je ne comprends pas le lien avec la réforme des APL. Je le répète, l’APL accession, non seulement est moins coûteuse pour l’État, mais elle permet aussi à des personnes d’accéder la propriété et de leur apporter une plus grande sécurité lors de leur retraite, si un jour une réforme devait être adoptée.

M. Jean-Luc Lagleize. Je suis un peu mal à l’aise, car le groupe MODEM a toujours défendu l’APL accession. Il s’agit d’un outil qui assure aux familles une solvabilité qu’elles n’auraient pas sans lui. Néanmoins, les biens à vendre sont de plus en plus rares.

J’espère que l’APL accession reviendra un jour. Le groupe MODEM ne pourra pas voter contre l’amendement ; il s’abstiendra.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE5 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Malgré la promesse de couverture téléphonique mobile de l’ensemble du territoire à la fin de l’année 2022, certaines communes de ma circonscription ont pris du retard et risquent de rester en zone blanche ou grise. Cela explique sans doute que vous n’ayez pas reçu mon appel…

Je vous lance un nouvel appel s’agissant, cette fois, du dispositif Pinel. Je ne propose pas de le rétablir, mais de l’ouvrir à la rénovation ou la réhabilitation de logements dans le cadre du plan Action Cœur de ville ou de l’opération de revitalisation de territoire dans les zones B2 et C – même si, dans certaines friches urbaines, il est préférable de démolir et de reconstruire à cause des problèmes de vis-à-vis ou de la qualité des logements. Il faut rapidement prendre acte de l’échec du dispositif Denormandie dans l’ancien pour que les cœurs de ville puissent compter des logements privés destinés à la location et pas seulement des logements aidés.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. La réduction d’impôt pour investissement locatif dans l’ancien, dite Denormandie, permet précisément de financer les achats de logements avec un engagement à rénover, réhabiliter et réparer le bâti. Le dispositif est ciblé sur les opérations de revitalisation de territoire (ORT) et les zones faisant l’objet du plan Action Cœur de ville. Sa mise en place ne remontant qu’à 2018, on ne peut pas dire qu’il s’agit d’un échec ; nous n’avons pas assez de recul. La réduction sera pérennisée jusqu’en 2026, le Premier ministre ayant annoncé la prolongation d’Action Cœur de ville jusqu’à cette date.

Mme Sylvia Pinel. La réalité, c’est que le dispositif Denormandie ne fonctionne pas. Vous le prolongez car il ne coûte pas grand-chose aux finances publiques. Nous examinons un budget d’économies budgétaires et c’est la même logique qui prévaut avec le recentrage du dispositif d’investissement locatif qui porte mon nom. C’est également celle qui a prévalu, depuis 2017, dans vos choix de politique du logement, avec l’abaissement de la quotité du prêt à taux zéro de 40 % à 20 %, et le recentrage et l’exclusion de beaucoup de dispositifs – APL accession, APL logement social, PTZ. Je trouve très regrettable que vous balayiez d’un revers de la main les propositions qui fonctionnent sur le terrain.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE6 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. C’est encore un amendement d’appel, qui vise à maîtriser à la fois le risque budgétaire pour l’État et le risque pour les candidats à l’investissement locatif. Sous le précédent quinquennat, dans des zones B2 sous tension, des agréments dérogatoires étaient délivrés, après étude par les services de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL). Cela permettait d’établir un dialogue responsable et constructif.

À l’heure actuelle, dans certaines métropoles, des communes limitrophes sont classées, selon le côté d’une rue, en zone B1 ou en B2 – ces dernières étant inéligibles au dispositif Pinel. En conséquence, les projets de logements collectifs ne sortent plus, car on n’a plus d’investisseurs locatifs – ou alors, on ne fait plus que des logements aidés, ce qui pose problème en termes de mixité. Il est injuste que les communes ne soient pas toutes traitées de la même façon, sans parler de la fracturation infraterritoriale que crée une telle situation.

Je vous propose de rétablir la possibilité d’agrément, éventuellement avec un contingentement, dans un souci de maîtrise des finances publiques.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Je continue de regretter l’absence d’une évaluation systématique du zonage du dispositif Pinel, sur lequel je demande la remise d’un rapport depuis 2017. Mon amendement avait d’ailleurs été adopté en commission et en séance. Cette étude aurait permis une meilleure compréhension des forces et des faiblesses de l’existant et aurait été un outil précieux pour penser l’avenir du dispositif. J’ai relancé le Gouvernement sur ce rapport, mais aussi sur l’évaluation de l’expérimentation prévue en Bretagne par l’article 164 de la loi de finances de 2020, dite « Pinel breton ». En l’absence de telles évaluations, je ne peux pas appuyer votre demande d’extension des zones d’application du dispositif Pinel. Avis défavorable.

M. Thibault Bazin. Je vous sais gré de défendre ce sujet depuis 2017, et vous n’êtes pas la seule. Vous avez défendu, en séance, un amendement sur l’expérimentation bretonne. Certes, nous ne disposons pas encore de suffisamment de retours mais certains opérateurs en soulignent les effets positifs. Il faudrait aller plus loin.

Les contingentements existent pour les PSLA ou pour les prêts locatifs sociaux (PLS). Afin de mieux adapter les dispositifs aux territoires, nous pourrions expérimenter plus largement, puisque vous aimez les expérimentations ! Si vous ne votez pas mon amendement, reprenez-le au moins à votre compte.

M. Mickaël Nogal. Je salue la ténacité de M. Bazin sur ce sujet. Nous sommes d’accord, le dispositif Pinel est intéressant s’il est mieux ciblé. La Bretagne bénéficie en la matière d’une expérimentation que nous sommes plusieurs à vouloir reproduire. Le modèle breton fonctionne car une enveloppe budgétaire constante signifie que des maires qui sont en zone B1 – donc éligibles au dispositif Pinel 
– acceptent de passer en zone B2 – non éligible. Cela nécessite d’avoir toujours un consensus parmi les élus locaux et une discussion entre l’État et les collectivités.

Je défends la déconcentration et la décentralisation, mais cela ne se fait pas en un claquement de doigts. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Laissons l’expérimentation aller à son terme et les zonages évoluer avec leurs mesures d’application. Alors nous pourrons réexaminer votre proposition.

Mme Sylvia Pinel. Le dispositif d’investissement locatif Pinel est déjà zoné et le zonage a été révisé en 2014. Cette révision est uniquement entre les mains du Gouvernement puisqu’il s’agit d’un acte de l’exécutif, qui s’appuie sur les DREAL en concertation avec les élus locaux. Lorsque je l’ai fait en 2014, là où le décalage entre les prix du parc locatif social et du parc privé était particulièrement important, nous avons ouvert l’investissement intermédiaire. Il ne faut pas des années pour effectuer une telle révision : je suis arrivée au ministère du logement le 1er avril 2014 et la révision est intervenue en septembre 2014.

Mal ciblé, le dispositif l’est tout simplement parce que les zonages A, B et C méritent d’être revus du fait des évolutions démographiques, économiques ou sociales. Ainsi, à Bordeaux, l’arrivée de la ligne à grande vitesse (LGV) nécessiterait probablement une telle révision. Ce travail est uniquement du ressort du Gouvernement.

La commission rejette l’amendement.

 

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. J’émets un avis favorable à l’adoption des crédits logement de la mission Cohésion des territoires.

 

Après avoir examiné l’avis « Logement » sur le rapport de Mme Stéphanie Do, et l’avis « ville », sur le rapport de M. Jean-Luc Lagleize, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Cohésion des territoires.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes

 

Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

Mme Isabelle Sancerni, présidente

M. Vincent Mazauric, directeur général

Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (MTE/DGALN)

M. François Adam, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

M. Emmanuel Rousselot, sous-directeur du financement et de l’économie du logement et de l’aménagement

Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (PM/DIHAL)

M. Sylvain Mathieu, délégué interministériel

Mme Laetitia Belan, directrice du pôle budgétaire

Direction du budget (MEFR/DB)

M. Mehdi Aouat, chef du bureau du logement, de la ville et des territoires

Mme Ingrid Barrat, adjointe au chef de bureau

Cabinet de la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement

M. Louis de Franclieu, conseiller budgétaire

Mme Lucy Kerckaert, conseillère parlementaire

Caisse nationale de garantie du logement locatif social (CGLLS)

Mme Marianne Laurent, directrice générale

M. Philippe Hourez, secrétaire général

Agence nationale de l’habitat (ANAH)

M. Grégoire Frèrejacques, directeur général adjoint

Action Logement Groupe

M. Bruno Arcadipane, président

M. Nadia Bouyer, directrice générale

Mme Marion Oechsli, secrétaire générale

 

Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA)

Mme Marjan Hessamfar, vice-présidente

Mme Valérie Flicoteaux, vice-présidente

Banque des territoires (groupe Caisse des dépôts et consignations)

M. Kosta Kastrinidis, directeur des prêts

Mme Selda Gloanec, chargée des relations institutionnelles

CDC Habitat (groupe Caisse des dépôts et consignations)

M. Vincent Mahé, secrétaire général

M. Thierry Laget, directeur général adjoint du groupe CDC, en charge du développement et du réseau CDC Habitat partenaires

Mme Anne Frémont, directrice des relations institutionnelles

Union sociale pour l’habitat (USH) *

Mme Marianne Louis, directrice générale

M. Dominique Hoorens, directeur des études économiques et financières

Mme Francine Albert, conseillère pour les relations avec le Parlement

Fédération des entreprises publiques locales (Fédé EPL) *

M. Philippe Clémandot, directeur du département de l’immobilier et du développement économique

M. Olivier Toubiana, directeur de l’aménagement urbain

Fédération française du bâtiment (FFB) *

M. Olivier Salleron, président

M. Benoît Vanstavel, directeur des relations institutionnelles

Fédération française des constructeurs de maisons individuelles (FFC) *

M. Damien Hereng, président

M. Olivier Burot, délégué général

Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

M. Pascal Boulanger, président

M. Alexis Rouque, délégué général

Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Cf. S. Do, avis n° 3400 pour le PLF de 2020 pour 2021, 9 octobre 2020, p. 10.

([2]) Cf. S. Do, avis n° 3400 pour le PLF de 2020 pour 2021, 9 octobre 2020, p. 13

([3]) Cf. la deuxième partie de cet avis

([4]) Décret n° 2017-761 du 4 mai 2017 relatif à l’agrément et au classement des communes pour l’application du quatrième alinéa du IV de l’article 199 novovicies

([5]) Article 161 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020

([6]) BOFIP 21/06/2021 : « Appréciation de la notion de bâtiment d’habitation collectif pour l’application de l’article 161 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 »

([7]) Article 199 novovicies du code général des impôts.  

([8]) Article 5 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

([9]) Article 80 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

([10]) Le prolongement du dispositif jusqu’à la fin 2024 a été consacré par l’article 168 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([11]) Les zones tendues sont des zones marquées par un déséquilibre fort entre l’offre et la demande de logements ; leur liste est fixée par décret et répartie selon le niveau de tension.

([12]) Le site de l’administration service-public.fr précise les plafonds pour l’année 2021 (lien).  

([13]) Cf. le IV de l’article 164 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020

([14])Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, « Évaluation du dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel », rapport, novembre 2019, p. 14

([15]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, « Évaluation du dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel », rapport, novembre 2019, p. 12

([16]) Deuxième alinéa du II. de l’article 199 sexvicies du code général des impôts

([17]) Article 69 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017

([18]) Article 71 de la loi n°2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances pour 2009

([19]) Résidences mentionnées à l’article L. 312 du code de l’action sociale et des familles

([20]) Résidences mentionnées au 3° de l’article 6143-5 du code de la santé publique

([21]) « Réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement pour les logements neufs destinés à la location meublée non professionnelle : dispositif Censi-Bouvard », rapport d’évaluation n° ETLL1526004X remis au Parlement, octobre 2015, p. 21

([22]) Amendement prorogeant le Censi-Bouvard jusqu’au 31 décembre 2021, adopté n° II-2240 au projet de loi de finances n° 1255 pour 2019.

([23]) Mme Bénédicte Peyrol, rapport n° 4195 fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi n° 4090 de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2020, annexe n° 23 « Engagements financiers de l’État », 26 mai 2021

([24]) Réponse écrite de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement à un questionnaire de votre rapporteure

([25]) Instruction du 26 mai 2021 relative au pilotage du parc d’hébergement et au lancement d’une campagne de programmation pluriannuelle de l’offre pour la mise en œuvre du Logement d’abord

([26]) État B annexé à l’article 16 de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021

([27]) Réponse écrite de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement à un questionnaire de votre rapporteure.

([28]) Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement, « Agir contre le sans-abrisme : feuille de route du service public de la rue au logement », 6 septembre 2021.

([29]) Fédération des promoteurs immobiliers, communiqué de presse du 16 septembre 2021

([30]) Commission pour la relance durable de la construction de logements, rapport, Tome I : Diagnostic et mesures phares, 22 septembre 2021, page 4

([31]) Données SDES des logements autorisés en Île-de-France par trimestre, par zones de tension (Sit@del2).

([32]) Les transactions ont été presque entièrement mises à l’arrêt lors du premier confinement, du 16 mars au 11 mai 2020

([33]) Cette stabilité tend à confirmer que l’ordre de grandeur annuel moyen pour les transactions dans l’ancien se situe, depuis 2017, autour de 1 million de transactions, contre 0,8 million jusqu’en 2015

([34]) Estimations du Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE).

([35]) M. Jean-Luc Lagleize, « La maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction », rapport remis au Premier ministre, novembre 2019.

([36]) Commission pour la relance durable de la construction de logements, rapport, Tome I : Diagnostic et mesures phares, 22 septembre 2021, page 4

([37]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, « Évaluation du dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel », rapport, novembre 2019, p. 6.

([38]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, « Développement de l’offre de logement locatif intermédiaire par les investisseurs institutionnels », rapport, avril 2021, p. 8.

([39]) https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport%20Mission%20Logement%20210904.pdf

([40]) Article 191 de la loi n°2021-1104 du 22 aout 2021 portant lutte contre le réchauffement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

([41]) Dossier de presse de la rencontre habiter la France demain, février 2021, p. 3 : la ministre évoque la création d’une « Task Force » piloté par MM. Girometti et Leclerc.  

([42]) Rapport de la mission sur la qualité du logement, septembre 2021, p. 45.