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N° 285

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIXIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 octobre 2022.

AVIS

 PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
sur le projet de loi de finances pour 2023 ( 273)

TOME I

PREMIÈRE PARTIE

PAR Mme Nicole LE PEIH

Députée

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 Voir le numéro : 273.

 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

CommentaireS d’article

Article 6  Prorogation du volet fiscal du « bouclier tarifaire » sur l’électricité

Article 7  Adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique

TRAVAUX de la commission

liste des ACTEURS auditionnÉs

 


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   Introduction

La commission des affaires économiques s’est saisie pour avis des articles 6 et 7 de la première partie du projet de loi de finances pour 2023.

L’article 6 prévoit la prorogation du volet fiscal du bouclier tarifaire sur l’électricité, via le maintien à son plus bas niveau de l’accise sur cette énergie.

L’article 7 procède au « verdissement » de six dispositifs fiscaux.

Votre Rapporteure, dans des délais très contraints, a réalisé deux auditions pour compléter ses travaux. Elle a entendu le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

En guise d’introduction, votre Rapporteure souhaite insister sur trois remarques concernant le projet de loi de finances pour 2023, et plus spécifiquement les articles 6 et 7.

Les Français ont une attente forte et légitime, vis-à-vis des pouvoirs publics, concernant la protection de leur pouvoir d’achat. Les mesures mises en œuvre dans le cadre de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022 ont apporté de premières réponses à la situation inédite que nous connaissons, tant sur le plan économique (inflation) que géopolitique (conflit en Ukraine). Le projet de loi de finances pour 2023 doit continuer d’intégrer cet enjeu de préoccupation pour nos concitoyens. De ce point de vue, le maintien d’un bouclier tarifaire sur l’électricité, tel que prévu par l’article 6 pour son volet fiscal, est une excellente initiative.

Plus que jamais, la transition écologique est une nécessité et une urgence. Les manifestations croissantes du changement climatique, qui ont pris cet été des formes parfois tragiques, nous le rappellent : toutes nos politiques publiques doivent être orientées et innervées par cette question. Face à la « fin de l’abondance », pour reprendre les termes du Président de la République, il nous trouver un consensus pour transformer nos modes de vie. Sur ce sujet, votre Rapporteure considère qu’il faut faire front ensemble pour avancer encore plus vite vers une transition énergétique et écologique réussie.

Enfin, votre Rapporteure souhaite apporter une attention toute particulière à la question des collectivités territoriales. Celles-ci sont en effet en première ligne des transformations à conduire et les interlocuteurs de proximité de nos concitoyens. Dans le cadre des travaux menés pour réaliser cet avis, un soin particulier a été apporté pour s’assurer de l’impact des mesures concernées sur ces collectivités. C’est en ce sens, aussi, que votre Rapporteure interroge l’opportunité d’élargir le bouclier tarifaire sur l’électricité aux collectivités de taille intermédiaire, afin de participer à l’allégement de leur facture énergétique. Elle relève, en même temps, que plusieurs mesures d’ampleur ont déjà été mises en œuvre par le Gouvernement, qu’il s’agisse de la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) (gain de 400 millions d’euros pour le bloc communal), de l’augmentation du volume de l’ARENH (réduction de moitié de la hausse du prix de l’électricité pour les collectivités territoriales), sans oublier la remise sur les carburants et la création d’un filet de sécurité de 568 millions d’euros pour leur permettre de faire face au contexte inflationniste. Elle souhaite que les débats à venir relatifs au projet de loi de finances pour 2023 permettent de trancher cette question.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

   CommentaireS d’article

Article 6
Prorogation du volet fiscal du « bouclier tarifaire » sur l’électricité

 

L’article 6 du projet de loi de finances pour 2023 prévoit la prorogation du volet fiscal du « bouclier tarifaire » mis en place par le Gouvernement, via la prorogation de la réduction des tarifs d’accise sur l’électricité à leur niveau minimal, conformément aux exigences du droit européen.

I.   LE DROIT EXISTANT

A.   Un bouclier tarifaire mis en place pour protéger le pouvoir d’achat des Français face à la hausse des coûts de l’énergie

Afin de préserver le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises face à la hausse brutale des prix du gaz et de l’électricité, le Premier ministre avait annoncé le 30 septembre 2021 la mise en place d’un « bouclier tarifaire », comprenant un volet tarifaire et un volet fiscal.

1.   Un volet fiscal : une forte baisse de l’accise sur l’électricité

Cette annonce s’est traduite par le dépôt d’un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances pour 2022, devenu, après son adoption par l’Assemblée nationale et le Sénat, l’article 29 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

Cet article prévoit une baisse de l’accise sur l’électricité, à savoir sur la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TIFCE), intervenant concomitamment à la hausse, hors taxe, des tarifs réglementés de vente de l’électricité prévue le 1er février 2022. Le tarif de l’accise a été fixé de manière à ce qu’en moyenne, le tarif réglementé de vente aux particuliers en France continentale n’excède pas 4 % d’augmentation par rapport à son niveau du 1er août 2021 ([1]).

Cette baisse s’est appliquée de manière uniforme dans l’ensemble des territoires où la taxe est prélevée, en métropole comme en outre-mer, et à l’ensemble des consommations d’électricité des personnes physiques, des entreprises et des autres personnes morales, indépendamment du taux d’accise applicable aux différentes consommations.

Les redevables de la TICFE sont les fournisseurs d’électricité, c’est-dire les personnes qui produisent ou achètent de l’électricité en vue de la revendre à un consommateur final, et les personnes qui produisent de l’électricité et l’utilisent pour leurs propres besoins.

2.   Un volet tarifaire : un blocage des tarifs par le Gouvernement

En parallèle, l’article 181 de la loi de finances pour 2022, issu d’un amendement déposé par le Gouvernement, est venu préciser la mise en œuvre du bouclier tarifaire et prévoir un accompagnement des fournisseurs d’électricité, complétant ainsi l’accompagnement prévu pour les fournisseurs de gaz.

Cet article prévoit notamment la faculté pour le Gouvernement de s’opposer aux propositions motivées de tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui auraient conduit, en l’espèce, à ce que « les tarifs dits "bleus" applicables aux consommateurs résidentiels définis à l’article R. 337-18 du même code, majorés des taxes applicables après application de l’article 29 de la présente loi, excèdent de plus de 4 % ceux applicables au 31 décembre 2021, majorés des taxes applicables à cette date ».

Dans sa délibération du 18 janvier 2022, la CRE avait en effet proposé aux ministres de l’énergie et de l’économie de faire évoluer les TRVE au 1er février 2022 à hauteur de + 44,5 % hors taxes pour les consommateurs résidentiels et de + 44,7 % hors taxes pour les consommateurs professionnels. Ces hausses importantes étaient, pour l’essentiel, nourries par l’augmentation forte du coût du complément d’approvisionnement en énergie et en capacité consécutif à l’écrêtement ([2]) de l’ARENH (+ 41,6 % hors taxes) ([3]).

Synthèse de l’évolution des coûts d’approvisionnement en énergie et en garanties de capacité

Source : CRE

Le Gouvernement s’est donc opposé aux demandes de hausse formulées par la CRE. Plusieurs arrêtés en date du 28 janvier 2022 sont intervenus en conséquence pour encadrer la hausse des tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE) ([4]).

Sans cette disposition, les hausses prévues selon les calculs de la CRE auraient été de 35,4 % TTC pour les tarifs bleus résidentiels et de 35,9 % TTC pour les tarifs bleus professionnels.

3.   Une mesure complémentaire : l’attribution d’un supplément d’ARENH aux fournisseurs d’électricité

Le Gouvernement a pris, en outre, une deuxième mesure pour cantonner la hausse du niveau moyen des TRVE à un niveau de l’ordre de 4 % en 2022. Par décret, il a en effet attribué 20 TWH supplémentaire d’ARENH aux fournisseurs alternatifs, de manière à contenir la hausse de leur coût d’approvisionnement sur le marché de gros. Le coût de cette mesure pour EDF est estimé à 8 milliards d’euros.

Dans le cadre des débats relatifs à la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, les parlementaires ont néanmoins entrepris de limiter le risque, pour EDF, de connaître de nouvelles pertes financières en lien avec le bouclier tarifaire. Deux mesures ont été adoptées en ce sens : un gel du plafond maximal légal de l’ARENH à hauteur de 120 TWh par an jusqu’en 2025 et le rehaussement de la valeur d’achat d’un mégawatt/heure dans ce cadre, à 49,5 euros contre 46 euros précédemment.

B.   Un bilan positif pour le pouvoir d’achat des ménages, ET LES FINANCES des petites entreprises et collectivités

1.   Un dispositif efficace grâce à un champ d’application relativement large

Le bouclier tarifaire sur l’électricité a permis de contenir significativement la facture d’électricité des Français.

Le blocage des prix à 4 % a bénéficié à tous les clients au TRVE, résidentiels (65 % des ménages environ) et « microentreprises » (TPE et petites collectivités notamment) et à tous les consommateurs en zones non interconnectées (ZNI). La création d’un mécanisme de compensation pour les fournisseurs alternatifs a, en outre, permis de s’assurer que tous les clients résidentiels pourraient en bénéficier.

Pour les entreprises ne pouvant bénéficier des TRVE, un dispositif d’aide d’urgence a été mis en place par le ministère de l’économie et des finances. Il vise à compenser les surcoûts de dépenses de gaz ou d’électricité des entreprises grandes consommatrices d’énergie, afin de soutenir leur compétitivité et éviter les arrêts de production, notamment des sites assurant des productions essentielles. Instauré par le décret publié le 2 juillet 2022, il fait suite à la décision d’autorisation de la Commission européenne du 30 juin 2022 et prend la forme de subventions, dans le respect de l’encadrement temporaire de crise pour les mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie à la suite de l’agression de la Russie contre l’Ukraine, publié par la Commission européenne le 23 mars 2022.

2.   Des hausses de coût plus significatives pour les autres acteurs, qui ont néanmoins bénéficié des effets de la mesure ARENH

Pour les collectivités ne bénéficiant pas des TRVE et les entreprises non électro-intensives, la hausse « moyenne » entre 2021 et 2022 des prix aurait été de l’ordre de 35 % à 50 % sans les mesures gouvernementales ; elle est limitée à environ 20 % en moyenne avec la baisse de fiscalité et la mesure sur l’ARENH.

Pour les entreprises électro-intensives et sans la mesure sur l’ARENH, la hausse aurait été comprise entre 100 et 130 % ; avec la mesure, elle sera comprise entre 60 et 100 % (hors cas particuliers). Par ailleurs, ces entreprises bénéficient en loi de finances pour 2022 d’une avance de 150 millions d’euros au titre de la compensation des coûts indirects du CO2 dans l’électricité.

3.   Un coût important pour les finances publiques

Le bouclier mis en place par le Gouvernement a eu un coût important pour les finances publiques.

La perte de recettes consécutive à la baisse de la TICFE pour tous les consommateurs est estimée à 8 milliards d’euros (Md€) en 2022. En pratique, en effet, la quasi-totalité de l’accise sur l’électricité est annulée pour l’ensemble des consommateurs : elle est portée aux minima communautaires (1 €/MWh) pour les particuliers et assimilés et à 0,5 €/MWh pour les autres consommateurs.

Cette mesure a permis, d’après les calculs de la CRE, de ramener les hausses des TRVE à 20,0 % TTC pour les tarifs bleus résidentiels et 20,9 % TTC pour les tarifs bleus applicables aux consommateurs professionnels éligibles.

Concernant la hausse exceptionnelle, en 2022, de 20 TWh du volume d’ARENH mis à la disposition de tous les consommateurs au tarif de 46,2 €/MWh (à comparer à 550 €/MWh, prix actuel du marché), l’impact financier pour EDF a été de l’ordre de 8 Md€ (montant équivalent au gain réciproque pour les consommateurs). La distribution de 20 TWh d’ARENH supplémentaires aux fournisseurs à compter du 1er avril 2022 réduira l’ampleur du rattrapage à réaliser sur les TRVE en 2023 de l’ordre de 7 % d’après les estimations de la CRE.

C.   Le Gouvernement souhaite proroger ce bouclier pour 2023 face au maintien d’un niveau élevé des prix de l’électricité

Le Gouvernement a décidé la poursuite du bouclier tarifaire actuel sur l’électricité en 2023, limitant la hausse des tarifs réglementés de vente de l’électricité à 15 %, alors qu’elle pourrait dépasser 100 % en l’absence de mesures. En d’autres termes, le nouveau bouclier tarifaire sur l’électricité de 2023 devrait éviter aux ménages un surcoût de 180 € par mois.

Cette prorogation se traduit par un maintien de l’abaissement de l’accise sur l’électricité à son taux minimum pour un coût budgétaire de 10 Md€ environ, ainsi que par la mise en place de mesures de soutien pour assurer la limitation de la hausse des prix de l’électricité. Le coût budgétaire de ces dernières mesures (sur le programme budgétaire 345) est estimé à 24,9 Md€, au bénéfice des clients résidentiels, des petites collectivités et microentreprises.

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

Le « bouclier » tarifaire » prévu par la loi de finances pour 2022 court, pour l’électricité, jusqu’au 31 janvier 2023 inclus. Or la crise énergétique laisse envisager de fortes augmentations du prix de l’électricité. Aussi Mme Elisabeth Borne, Première ministre, a indiqué le 14 septembre dernier souhaiter la prolongation de ce bouclier. La hausse des prix de l’électricité serait ainsi contenue à 15 %, avec la promesse que l’écart de prix ne sera pas reporté sur les consommateurs en 2024 mais qu’il sera pris en charge par l’État. L’augmentation moyenne s’élèverait à 20 euros par mois pour les ménages se chauffant à l’électricité, au lieu de 180 euros par mois sans le « bouclier tarifaire ».

L’article 6 du projet de loi de finances pour 2023 prévoit donc de déroger aux articles L. 312-37, L. 312-48, L. 312-64 et L. 312-65 du code des impositions sur les biens et les services afin de fixer à :

–  1 euro par mégawattheure le tarif normal de l’accise applicable aux ménages et assimilés, au lieu de 25,6875 euros ;

–  0,5 euro par mégawattheure le tarif applicable aux autres consommations, prévues aux articles L. 312-48 (tarifs réduits dans le secteur des transports), L. 312-64 (procédés et activités industriels) et L. 312-65 (entreprises industrielles électro-intensives) du code précité.

Ce dispositif serait applicable aux quantités d’électricité fournies entre le 1er février 2023 et le 31 janvier 2024.

Ainsi que le relève, en outre, l’exposé des motifs rattaché à cet article, les effets du bouclier tarifaire fiscal seront amplifiés par l’intégration de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE) à l’accise, dans le cadre du mouvement global de rationalisation des taxes sur l’électricité. Cette suppression devrait conduire à la diminution de la fiscalité sur l’électricité à hauteur de 6,76 MWh pour les ménages et très petites entreprises, et de 2,25 MW pour les petites et moyennes entreprises, pour un coût additionnel pour le budget de l’État de 1,5 Md€ d’euros.

III.   La position de votre rapporteure

Votre Rapporteure est favorable à l’adoption de cet article, qui proroge le volet fiscal du bouclier mis en place par le Gouvernement pour réduire l’impact de la hausse des prix de l’électricité sur la facture des ménages, des microentreprises et des petites collectivités territoriales aux capacités financières limitées.

Les auditions menées font apparaître que ce dispositif a produit les effets attendus et que sa prorogation est indispensable dans le contexte actuel. La réduction de l’accise sur l’électricité procède, en outre, à un rééquilibrage utile de la fiscalité entre les accises portant sur l’énergie décarbonée et celles relatives aux énergies fossiles.

Les échanges menés indiquent également que les collectivités territoriales ne seront pas impactées par cette mesure. La suppression de la TCCFE à compter du 1er janvier 2023, conséquence de la loi de finances pour 2021, sera compensée par l’attribution d’une dotation budgétaire de l’État aux collectivités à hauteur du manque à gagner lié à cette suppression.

Votre Rapporteure s’interroge, néanmoins, sur la nécessité de faire évoluer le périmètre d’application du bouclier sur l’électricité. En effet, les petites entreprises en sont partiellement exclues (lorsqu’elles emploient plus de 10 salariés), de même que les collectivités de taille plus importante. Elle prend acte des réflexions en cours au sein du Gouvernement sur ces deux sujets et souhaite insister sur la nécessité de lutter contre les « effets de seuil » inévitables, qui peuvent avoir des conséquences importantes sur les acteurs publics et privés dont les marges de manœuvre financières restent limitées.

La position de votre Rapporteure est identique sur l’opportunité de mettre en place un bouclier en faveur des logements collectifs (HLM, copropriétés) dans lesquels est en place un chauffage collectif électrique, avec une aide aux HLM ou copropriétés via une facturation moindre par les fournisseurs d’électricité qui recevraient une compensation par l’État. Ceci compléterait, en effet, utilement les dispositifs de bouclier pour les ménages puisqu’il existe des boucliers pour les consommateurs individuels de gaz et d’électricité, pour les consommateurs chauffés de manière collective au gaz, ainsi que – prochainement – une aide pour les ménages se chauffant au fioul et avec des pellets. Le cas des ménages alimentés par un chauffage électrique collectif n’avait pas, à ce stade, fait l’objet d’un traitement spécifique.

Enfin et d’une manière plus générale, votre Rapporteure relève que la réforme du système de l’ARENH, d’une part, et celle du marché de l’électricité au niveau européen, d’autre part, demeurent indispensables.

Article 7
Adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2023 prévoit l’adaptation de notre système fiscal à la transition énergétique. Il modifie en ce sens le régime juridique relatif à l’étalement de l’imposition des aides et subventions publiques, pour l’étendre aux certificats d’économies d’énergie, actualise le périmètre relatif au tarif réduit de TVA à 5,5 % pour encourager la réalisation de travaux de rénovation énergétique et aux travaux d’installation de bornes de recharge de véhicules électriques, actualise le régime d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour la construction de logements sociaux, adapte la taxe d’aménagement à la lutte contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain, porte à la hausse des droits d’accise sur les charbons et, enfin, ajuste la réduction d’impôt octroyée aux établissement de crédit et sociétés de financement en échange de l’octroi d’un poêt à taux zéro « mobilités ».

I.   LE DROIT EXISTANT

A.   Le régime d’étalement de l’imposition des aides et subventions publiques

1.   Le régime d’étalement de l’imposition des subventions publiques

L’article 42 septies du code général des impôts prévoit un dispositif d’étalement des subventions d’équipement versées par l’Union européenne, l’État, les collectivités publiques ou tout autre organisme public à raison de la création ou de l’acquisition d’immobilisations déterminées. Cet étalement optionnel consiste à reporter sur plusieurs exercices la recette imposable constituée par la subvention obtenue pour lisser l’imposition concernée et l’adapter au rythme de l’investissement consenti.

Les entreprises éligibles à ce dispositif sont celles dont les résultats sont imposables à l’impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), ainsi que celles qui sont soumises à l’impôt sur les sociétés (IS). Le législateur a étendu, par ailleurs, le bénéfice de ce régime d’amortissement des investissements à certaines catégories spécifiques de subventions n’entrant pas initialement dans le champ de cet article (dotation d’installation des jeunes agriculteurs, par exemple).

2.   Les certificats d’économies d’énergie (CEE)

Le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE) a été créé par les articles 14 et 17 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (loi « POPE »). Il consiste en une obligation triennale de réalisation d’économies d’énergies imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d’énergie (électricité, gaz, fioul, carburants, GPL, chaleur et froid). Il est codifié aux articles L 221-1 à L 221-13 du code de l’énergie.

Les fournisseurs d’énergie, aussi appelés les « obligés », dont la liste est fixée à l’article L 221-1 du code de l’énergie, se voient fixer des objectifs d’économies d’énergie. Ces objectifs correspondent à un volume de CEE à détenir à la fin d’une période donnée. Les obligés reçoivent un CEE pour chaque kWh cumac d’économie d’énergie réalisée du fait de cette incitation ([5]). En cas de non-respect de leurs obligations, ils sont tenus de verser une pénalité libératoire pour chaque kWhc manquant.

Périodes et objectifs d’économies d’énergie (2006-2025)

Les chiffres clefs de la quatrième période

Source : Bilan de la 4e période CEE – ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Les « obligés » disposent de trois manières d’obtenir des certificats d’économies d’énergie (article L 221-3 du code de l’énergie) :

– en effectuant des actions d’économies d’énergies sur le patrimoine des éligibles ou par incitation des consommateurs à investir dans des actions d’économies d’énergie (tous secteurs d’activités : résidentiel, tertiaire, industriel, agricole, transport, réseaux) ;

– par l’achat de CEE sur le marché à d’autres acteurs ayant mené des actions d’économies d’énergie, en particulier les éligibles non obligés ;

– par contribution financière à des programmes d’accompagnement éligibles.

L’aide peut être accordée sous différentes formes, selon le fournisseur d’énergie retenu : prime en chèque, bons d’achat, réductions, services gratuits… Son calcul tient compte de l’ampleur des économies d’énergie réalisées. Chaque fournisseur est libre de définir le prix qu’il pourra proposer au bénéficiaire. Certains fournisseurs peuvent proposer des aides bonifiées pour les ménages aux plus faibles revenus.

Plusieurs publics peuvent bénéficier de ce dispositif des certificats d’économies d’énergie :

– les ménages, en particulier lorsqu’ils sont en situation de précarité énergétique ;

– les entreprises ;

– d’autres publics « éligibles », que sont les collectivités, l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), les bailleurs sociaux, les sociétés d’économies mixtes (SEM) dans la construction ou la gestion de logements sociaux, ainsi que les SEM et sociétés publiques locales dans l’efficacité énergétique. Ces « éligibles » peuvent obtenir des CEE pour les actions qu’ils soutiennent et les revendre aux acteurs obligés. Les obligés peuvent également déléguer chacune de leurs obligations à un tiers, que l’on nomme « délégataire », soit totalement, soit partiellement au minimum d’1 TWhc.

Des contrôles sont effectués par le Pôle national des certificats d’économies d’énergie (PNCEE) afin de vérifier l’éligibilité des opérations donnant lieu à la délivrance de CEE.

B.   LEs taux rÉduits de TVA sur les travaux ÉnergÉtiques

1.   La TVA, une taxe sur les biens et services, première ressource fiscale de l’État.

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est un impôt indirect sur la consommation qui s’applique aux livraisons de biens et services situés en France. Il est acquitté par le consommateur et collecté par le vendeur du produit ou du service concerné, qui la reverse ensuite à l’État. Un système de déductions de la TVA payée par les entreprises existe afin d’éviter qu’un produit ne soit taxé à plusieurs reprises lors d’opérations d’achat et de revente successives.

La TVA est la première ressource fiscale de l’État, devant l’impôt sur le revenu (IR) et la contribution sociale généralisée (CSG). Elle génère en effet plus du tiers du total de ses recettes fiscales. En 2021, elle a rapporté à l’État 92,4 Md€ d’euros.

Les règles de définition de la TVA sont harmonisées au niveau européen. Pour rappel, en France, il existe à l’heure actuelle plusieurs taux de TVA, qui correspondent respectivement au taux normal, ainsi qu’à des taux réduits, en fonction des objectifs de politique publique définis par le Gouvernement. Ces taux sont les suivants :

 un taux normal, fixé à 20 % (art. 278 du code général des impôts), qui s’applique à la majorité des ventes de biens et des prestations de services,
c’est-à-dire à ceux pour lesquels aucun autre taux n’est expressément prévu ;

 un taux réduit de 10 % (art. 278 bis, 278 quater, 278 sexies A, 278 septies et art. 279 du CGI) applicable aux produits agricoles non transformés, au bois de chauffage, aux travaux d’amélioration du logement qui ne bénéficient pas du taux de 5,5 %, à certaines prestations de logement et de camping, aux foires et salons, jeux et manèges forains, aux droits d’entrée des musées, zoo, monuments, aux transports de voyageurs, au traitement des déchets, à la restauration ;

– un taux réduit de 5,5 % (art. 278-0 bis, 278-0 bis A, art. 278 sexies du CGI) concernant l’essentiel des produits alimentaires, les produits de protection hygiénique féminine, les équipements et services pour handicapés, les livres sur tout support, les abonnements gaz et électricité, la fourniture de chaleur issue d’énergies renouvelables,la  fourniture de repas dans les cantines scolaires, la billetterie de spectacle vivant et de cinéma, certaines importations et livraisons d’œuvres d’art, les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des logements.

– un taux particulier de 2,1 % (art. 281 quater et suivants du CGI), réservé aux médicaments remboursables par la sécurité sociale, aux ventes d’animaux vivants de boucherie et de charcuterie à des non-assujettis, à la redevance télévision, à certains spectacles et aux publications de presse inscrites à la Commission paritaire des publications et agences de presse.

Il existe, en outre, des taux particuliers applicables en Corse et aux départements d’outre-mer.

2.   Des taux de TVA réduits, depuis 2014, sur les travaux et actions en faveur de la transition énergétique.

Le taux réduit de TVA sur les travaux de rénovation des logements anciens a été initialement créé en 1998 pour le logement social. Le taux réduit a été étendu en 1999 à l’ensemble des logements. La mesure, provisoire dans un premier temps est devenue pérenne (depuis 2009) et non bornée dans le temps.

Le taux réduit de TVA a été relevé de 5,5 % à 7% en 2013 puis 2014 à 10 %. Afin de ne pas pénaliser la rénovation énergétique, la loi de finances pour 2014 a ajouté un nouveau dispositif pour les travaux d’équipements avec un périmètre calé sur le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) avec le bénéfice d’un taux de 5,5 %.

Depuis 2014, deux taux de TVA réduits s’appliquent donc aux travaux réalisés dans des logements achevés depuis plus de deux ans, en fonction de la nature des modifications effectuées.

– Un taux réduit à 5,5% s’applique en effet aux travaux réalisés dans ce cadre avec un objectif d’amélioration de la qualité énergétique. Ce dispositif est prévu par l’article 278-0 bis A du code général des impôts.

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, cet article prévoit que les travaux concernés portent sur « la pose, l’installation et l’entretien des matériaux et équipements mentionnés au 1 de l’article 200 quater, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, sous réserve que ces matériaux et équipements respectent des caractéristiques techniques et des critères de performances minimales fixés par arrêté du ministre chargé du budget ». L’article 200 quater du CGI comprend en effet une liste de travaux éligibles intégrant notamment l’isolation thermique du logement, ainsi que l’acquisition et la pose d’un système de recharge des véhicules électriques.

L’article 278-0 bis A du code général des impôts fixe également les modalités de calcul de ce crédit d’impôt, qui ne peut excéder, pour un même logement dont un contribuable est propriétaire et qu’il affecte à son habitation principale, toutes dépenses éligibles confondues « au titre d’une période de cinq années consécutives comprises entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2020, la somme de 2 400 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et de 4 800 € pour un couple soumis à imposition commune. Cette somme est majorée de 120 € par personne à charge au sens des articles 196 à 196 B ». Il précise, en outre, que « la somme de 120 € est divisée par deux lorsqu’il s’agit d’un enfant réputé à charge égale de l’un et l’autre de ses parents ».

– Un taux réduit à 10 % s’applique, en outre, aux travaux « ’’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien autres que ceux mentionnés à l’article 278-0 ter portant sur des locaux à usage d’habitation, achevés depuis plus de deux ans ».

Sont exclus de l’application de ces taux réduits les travaux qui entraînent la production d’un immeuble neuf au sens de la TVA et les travaux tels que ceux où la surface de plancher des locaux existants est augmentée de plus de 10%. Dans ces cas, le taux plein s’applique.

C.   la taxe fonciÈre sur les propriÉtÉs bâties – TFPB)

1.   La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB)

La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) est un impôt local qui concerne les propriétaires d’un bien immobilier ou les usufruitiers situés en France. Son régime est prévu par les articles 1381 à 1391 E du code général des impôts.

Il est établi pour l’année entière dans la commune où est situé le bien imposable et d’après la situation au 1er janvier de l’année d’imposition.

La base d’imposition à la TFPB correspond à 50 % de la valeur locative cadastrale, afin de tenir compte des frais de gestion, d’assurance, d’amortissement, d’entretien et de réparation.

Il s’agit de l’une des principales ressources de la fiscalité locale directe.

Le produit de cette taxe était, en 2021, de 34,3 milliards d’euros. Il est réparti entre le bloc communal (20 Md€) et les départements (14 Md€). Son taux moyen en France était de 38,4 % en la même année. Il est désormais attribué exclusivement aux communes et à leurs groupements. La loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a en effet prévu, en lien avec la suppression progressive de la taxe d’habitation, le transfert aux communes de la part départementale de la TFPB.

L’exonération (totale ou partielle) destinée à encourager les économies d’énergie est temporaire (CGI, art. 1383-0 B à 1383-0 B bis du CGI).

2.   La réglementation environnementale des bâtiments neufs 2020 (RE2020)

La loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) du 23 novembre 2018 a créé une nouvelle réglementation portant sur la performance environnementale des bâtiments neufs. Il s’agit de la réglementation environnementale des bâtiments neufs 2020 (RE 2020), qui est venue prendre la suite de la réglementation thermique mise en place sur ce sujet en 2012.

Cette réglementation doit permettre de respecter la loi de transition énergétique pour une croissance verte (LTECV) de 2015, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) ainsi que la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui fixent des orientations pour les filières afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050.

Cette réglementation s’articule autour de trois principaux axes :

– la poursuite de l’amélioration de la performance énergétique et la baisse de consommations des bâtiments, en insistant sur la performance de l’isolation ;

– la réduction de l’impact sur le climat des bâtiments neufs en prenant en compte l’ensemble des émissions du bâtiment sur l’ensemble de son cycle de vie ;

– le suivi d’un objectif de « bien vivre » et de confort pour les occupants des logements, notamment en été. Les bâtiments concernés doivent ainsi mieux résister aux épisodes de canicule, qui seront plus fréquents et intenses du fait du changement climatique.

La RE2020 repose sur une transformation progressive des techniques de construction, des filières industrielles et des solutions énergétiques, afin de maîtriser les coûts de construction et de garantir la montée en compétence.

3.   Les exonérations de la taxe foncière sur les propriétés bâties relatives aux économies d’énergie

Il existe un certain nombre d’exonérations relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Les logements locatifs sociaux bénéficient, au moment de leur construction ou de leur rachat, de différents régimes d’exonération de longue durée de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), au profit des propriétaires bailleurs.

Conformément aux dispositions de l’article 1384 A du code général des impôts, les constructions neuves de logements sociaux, peuvent bénéficier d’une exonération de TFPB de longue durée à compter de l’année suivant celle de leur achèvement, sous certaines conditions :

– avoir bénéficié d’une décision favorable de subvention ou d’agrément de la part de l’État ;

– avoir bénéficié d’un financement aidé représentant plus de 50 % du prix de revient ;

– ou faire l’objet d’un conventionnement APL.

La durée de l’exonération est de 15 ans si la décision de subvention ou de prêt aidé a été obtenue avant le 1er juillet 2004 et de 25 ans pour les décisions obtenues entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2022. Une prolongation de cinq ans supplémentaire est possible dans le cas d’une certification CERQUAL ([6]) ou BEE+ ([7]) par exemple, attestant du respect de certains critères environnementaux.

D.   La taxe d’aménagement

La taxe d’aménagement (TA) est un impôt local prévu aux articles L. 331-1 et suivants du code de l’urbanisme portant sur les opérations d’aménagement, de construction, de reconstruction et d’agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature soumises à un régime d’autorisation d’urbanisme. Elle a été institué par la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité locale relative aux opérations d’urbanisme. La taxe d’aménagement est en effet venue remplacer plusieurs taxes locales ([8]). Elle s’applique, depuis 2012, lors de la délivrance de permis de construire ou d’aménager et de déclaration préalable de travaux.

Son assiette est constituée par la valeur déterminée forfaitairement par mètre carré de la surface de la construction. Une valeur unique est fixée par mètre carré (660 € en province et 748 € en région Île-de-France).

Plusieurs réductions et exonérations sont prévues par le code de l’urbanisme. Il existe notamment un abattement unique de 50 % qui est appliqué au bénéfice des sociétés HLM, des résidences principales pour les 100 premiers mètres carrés et des constructions abritant des activités économiques, ainsi qu’un certain nombre de cas d’exonérations spécifiques (petits arbis de jardin, reconstruction d’un bâtiment à l’identique etc.).

La taxe d’aménagement est constituée de plusieurs parts revenant respectivement aux communes, intercommunalités, départements et régions. Ces dernières disposent d’un pouvoir de fixation des taux encadré par la loi. Ces taux sont fixés par délibération de l’organe exécutif local, pour une période d’une année.

La part communale ou intercommunale de la TA, dont le taux est compris entre 1 % et 5 %, et peut être majoré jusqu’à 20 %, dans certains secteurs où, en raison de l’importance des constructions nouvelles à édifier, finance des travaux substantiels de voirie ou de réseaux ou la création d’équipements publics généraux.

La part départementale, dont le taux ne peut excéder 2,5 %, finance des politiques de protection des espaces naturels sensibles (ainsi que le fonctionnement des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement).

Enfin, la part régionale de la taxe d’aménagement, dont le taux ne peut excéder 1 % sert à financer les infrastructures de transport rendues nécessaires par l’urbanisation, en lieu et place de la taxe locale d’équipement.

Une réforme importante de cette taxe est intervenue en loi de finances pour 2021 concernant notamment ses modalités de définition et de gestion (transfert des directions départementales des territoires au profit de la direction générale des finances publiques, décalage de sa date d’exigibilité etc.).

E.   Les droits d’accise sur les Énergies

La fiscalité des énergies est encadrée par le droit européen, en particulier par les directives 2003/96/CE du 27 octobre 2003 et (UE) 2020/262 du 19 décembre 2019. Son régime a été codifié au sein du nouveau code des impositions sur les biens et services (CIBS), puis corrigé des erreurs de transposition de la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 consécutivement à l’adoption de l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021.

Le régime des droits d’accise sur les énergies est fixé à l’article L 312-1 du CIBS. Ces accises sont dues exclusivement pour les usages de produits énergétiques en tant que carburant, ou combustible. La liste des produits concernés est fixée à l’article L 312-3 du CIBS.

Pour mémoire, l’accise sur les énergies comprend cinq fractions :

– une fraction perçue sur l’électricité (ex TICFE, soit la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité)

– une fraction perçue sur les gaz naturels (ex TICGN, soit la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel) ;

– une fraction perçue, en métropole, sur les produits énergétiques, autres que les gaz naturels et les charbons (il s’agit de la nouvelle dénomination de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) ;

 une fraction perçue en outre-mer sur les produits énergétiques, autres que les gaz naturels et les charbons : il s’agit de la nouvelle dénomination de la taxe spéciale de consommation (TSC) applicable dans les cinq départements et régions d’outre-mer ;

 enfin, une fraction perçue sur les charbons : il s’agit de la nouvelle dénomination de la TICC (taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et coques).

L’article L 312-36 du CIBS en prévoit les tarifs de droit commun.

Il existe néanmoins un certain nombre de tarifs réduits concernant notamment certains types d’installations soumises au système européen d’échange des quotas d’émissions de gaz à effets de serre. Ces tarifs réduits sont prévus par l’article L 312-75 du CIBS.

L’article L 312-76 du même code fixe, à ce sujet, les conditions à remplir pour que les installations précitées bénéficient desdits tarifs réduits.

F.   l’ÉCO-prêt À taux zÉro

Créé par l’article 99 de la loi de finances pour 2009 (n° 2008-1425 du 27 décembre 2008) l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) a pour objectif d’aider au financement des travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements achevés depuis plus de deux ans à la date de début d’exécution des travaux et utilisés comme résidence principale. Ce prêt est accessible à tous (propriétaires, bailleurs et sociétés civiles non soumises à l’impôt sur les sociétés), sans condition de ressources. L’éco-prêt à taux zéro permet de bénéficier d’un prêt compris entre 7 000 € et 50 000 € selon les travaux financés.

Depuis le 1er janvier 2014, les syndicats de copropriétaires peuvent bénéficier d’un éco-prêt à taux zéro pour financer la réalisation de certains travaux de rénovation énergétique. Cette ouverture avait été prévue par l’article 43 de la loi de finances rectificatives pour 2011, mais son entrée en vigueur nécessitait au préalable la publication des textes relatifs à l’emprunt collectif. L’éco-PTZ « copropriétés » permet de financer des travaux d’économies d’énergie réalisés sur les parties communes de la copropriété ou des travaux d’intérêt collectif sur les parties privatives. Cet éco-prêt « copropriétés » peut financer les mêmes catégories de travaux ([9]) que l’éco-prêt « individuel » et peut être utilisé pour financer une unique action. L’éco-PTZ « copropriétés » est souscrit uniquement par les copropriétaires qui souhaitent y participer, qu’ils soient propriétaires occupants ou propriétaires bailleurs.

Le dispositif a évolué 2019 afin de massifier sa mobilisation par les ménages. La loi de finances pour 2019 a prorogé le dispositif pour 3 ans (jusqu’au 31 décembre 2021). À l’occasion de cette prorogation, l’éco-PTZ est rendu plus opérationnel et est drastiquement simplifié, offrant ainsi de la lisibilité aux ménages, aux professionnels et aux banques. D’une part, le décret n° 2019-281 du 5 avril 2019 supprime la condition de bouquet de travaux, permettant ainsi le financement d’une seule action de travaux, ce qui facilite le financement du reste à charge des ménages, en particulier des ménages modestes et très modestes, qui n’ont pas la possibilité d’engager plusieurs travaux en même temps. D’autre part, le décret n° 2019-839 du 19 août 2019 simplifie les caractéristiques de l’éco-prêt à taux zéro.

La loi de finances pour 2022 a permis de proroger le dispositif jusqu’au 31 décembre 2023, ainsi que d’augmenter le plafond et la durée de l’éco-PTZ « performance énergétique globale », passant respectivement de 30 000€ à 50 000 € et de 15 ans à 20 ans. Elle a aussi permis la création d’un nouveau type d’éco-PTZ : Mon Eco-PTZ Prime Rénov’, dont le cadre de mise en œuvre a été complété par la publication du décret n° 2022-454 du 30 mars 2022.

Comme le prêt à taux zéro en accession à la propriété, l’éco-prêt à taux zéro est distribué par les établissements de crédit ayant conclu une convention avec l’État (le Crédit Agricole, la Banque postale, les Banques Populaires, les Caisses d’épargne, le Crédit mutuel, le CIC, la Société générale, Domofinance, Île-de-France Énergies, le SPEE des Hauts de France).

De plus dans le cadre de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, le Parlement a instauré une expérimentation de deux ans à compter du 1er janvier 2023, créant un nouveau mécanisme de prêt à taux zéro en faveur des particuliers et des entreprises qui acquièrent, sous conditions de ressources et de domiciliation, un véhicule léger non polluant.

En contrepartie de l’octroi du prêt à taux zéro (Eco PTZ ou PTZ véhicule), les établissements de crédit et les sociétés de financement bénéficient d’une réduction d’impôt dont le montant est égal à l’écart entre la somme actualisée des mensualités dues au titre du prêt et la somme actualisée des montants perçus au titre d’un prêt de mêmes montant et durée de remboursement, consenti à des conditions normales de taux à la date d’émission de l’offre de prêt.

Un décret en date du 22 avril 2022 ([10]) est venu préciser les contours de ce PTZ-mobilités expérimental.

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

L’article 7 procède à des modifications concernant le cadre juridique applicable aux six dispositifs suivants :

 le régime d’étalement de l’imposition des subventions publiques ;

 l’application d’un taux réduit de TVA pour les travaux de rénovation énergétique ;

 le régime d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;

 la taxe d’aménagement (TA) ;

 l’accise sur les charbons ;

 la réduction d’impôt consécutive à l’attribution d’un prêt à taux zéro « mobilités ».

A.   L’extension du régime d’étalement de l’imposition des aides et subventions publiques aux certificats d’économies d’énergie

Le A du I de l’article 7 du projet de loi de finances pour 2023 vient compléter l’article 42 septies du code général des impôts pour intégrer les aides relatives aux certificats d’économies d’énergie au sein du dispositif d’étalement de l’imposition des subventions publiques.

En effet, en l’état actuel du droit, seules les subventions publiques accordées par un organisme public entrent dans le champ de ce dispositif. Ce n’est pas le cas des certificats d’économies d’énergie, qui sont versés par une personne privée (les fournisseurs) à une autre personne privée (les entreprises), ainsi que l’avait rappelé le Gouvernement, le 25 février 2021, dans une réponse à une question écrite adressée par le sénateur Franck Menonville.

En 2021, dans le cadre des débats relatifs au projet de loi portant lutte contre le réchauffement climatique, le Gouvernement avait écarté à nouveau la possibilité d’étendre ce régime dérogatoire aux certificats d’économies d’énergie pour des raisons tenant à la fois au maintien de la cohérence du système actuel et à la nature très large du financement des économies d’énergie, qui excède la seule notion de « biens d’équipement ».

Le présent article vient donc étendre le régime actuel aux certificats d’économies d’énergie afin de renforcer l’incitation des entreprises à réaliser des travaux d’économies d’énergie, en permettant le lissage de l’imposition des aides et primes reçues dans ce cadre.

B.   L’actualisation et la rationalisation du champ d’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux travaux de rénovation énergétique des logements et aux travaux relatifs aux infrastructures de recharge des véhicules électriques

L’article 7 du PLF pour 2023 actualise le champ d’application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 5,5 % applicable aux travaux de rénovation énergétique des logements ainsi qu’aux travaux de pose, d’installation et d’entretien des infrastructures de recharge pour véhicules électriques dans les locaux d’habitation. Le cadre législatif actuel afférent correspond en effet à celui du crédit d’impôt en faveur de la transition écologique (CITE), dispositif supprimé depuis 2021, à la suite de la création du dispositif MaPrimeRénov.

Cette rationalisation (restriction du périmètre et actualisation des caractéristiques et niveaux de performance) s’effectuera d’ici le 1er janvier 2024, avec la prise d’un arrêté conjoint des ministres chargés du budget, du logement et de l’énergie.

C.   L’actualisation de l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) au profit de la construction de logements sociaux

L’article 7 procède à plusieurs modifications au sein de l’article 1384 A du code général des impôts, relatif à l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties portant notamment sur les logements sociaux.

Il procède, d’abord, à l’actualisation des critères de performance énergétique et de qualité environnementale exigés pour le bénéfice de l’allongement de 15 à 20 ans de la durée d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) au profit de la construction de logements sociaux. Il s’agit d’une actualisation du cadre juridique existant pour le rendre conforme à la RE2020, réglementation entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2022.

Il procède également à la prorogation, jusqu’au 31 décembre 2026, de l’allongement d’une durée de 10 ans de l’exonération de la TFPB au profit des constructions et acquisitions de logements sociaux ayant bénéficié d’une subvention ou de prêt aidé. Ainsi que le précise l’exposé des motifs relatif à cet article, l’exonération de TFPB pour ces logements sera ainsi portée de 25 à 30 ans pour les constructions dépassant les exigences de la RE2020.

D.   Le verdissement de la taxe d’aménagement

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2023, renforçant plusieurs dispositifs fiscaux favorables à la transition énergétique, procède à plusieurs modifications relatives au régime de la taxe d’aménagement dans un objectif de renforcement la lutte contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain.

Sa rédaction s’inscrit, de ce point de vue, dans la ligne dessinée par le rapport sénatorial intitulé Les outils financiers pour soutenir l’atteinte de l’objectif de zéro artificialisation nette, qui soulignait l’utilité de cette taxe pour lutter contre l’artificialisation des sols.

Cet article ouvre, d’abord, la possibilité pour les collectivités locales d’exonérer de taxe d’aménagement des constructions réalisées sur des sites qui ont fait l’objet d’une opération de dépollution (ou d’une renaturation) et effectuées dans des conditions permettant la réaffectation des sols à un usage conforme aux règles d’urbanisme applicables sur ces terrains.

Il prévoit également une actualisation des valeurs forfaitaires de cette taxe applicables aux aires de stationnement et servant au calcul de l’assiette de la taxe. Celles-ci n’avaient pas évolué depuis 2011. Elles font donc l’objet d’un rattrapage, et, pour l’avenir, d’une indexation annuelle sur le ICC.

Enfin, cet article procède à une réévaluation à la hausse du plafond de cette taxe dans la limite duquel les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes peuvent, par délibération, augmenter les valeurs forfaitaires des aires de stationnement.

E.   Le relèvement des droits d’accise sur les charbons

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2023 prévoit une évolution à la hausse des tarifs réduits concernant certaines installations intensives soumises au système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’UE. Cette augmentation concerne une énergie fossile, le charbon. Le projet de loi prévoit ainsi une hausse de ce tarif réduit de 3,2 € MWh sur deux ans à partir de 2024. Ainsi que le précise l’exposé des motifs de l’article 7 du projet de loi de finances pour 2023, cette modification vise à la fois à encourager l’électrification des usages et la sobriété énergétique.

Cet article modifie également l’article L 312-76 du CIBS, pour ajouter que seules les installations intégrées au sein du SEQE peuvent bénéficier des tarifs réduits sur les accises prévues à l’article L 312-75 du CIBS.

F.   L’ajustement de la réduction d’impôt relative au PTZ‑« mobilités »

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2023 vient compléter l’article 107 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets afin d’actualiser et de préciser les modalités de l’octroi d’un prêt à taux zéro en faveur des particuliers et des entreprises qui souhaitent acquérir, sous conditions de ressources et de domiciliation, un véhicule léger à faibles émissions.

La nouvelle rédaction de l’article 107 de la loi précitée précise notamment :

 les modalités du bénéfice de cette réduction d’impôt pour les sociétés de personnes qui ne sont pas soumises à l’impôt sur les sociétés ;

 les modalités relatives au bénéfice de ladite réduction d’impôt lorsque, pendant la durée du prêt, et tant que celui-ci n’est pas remboursé, les conditions initiales de sa délivrance ne sont plus respectées par la partie bénéficiaire ;

 les modalités relatives au reversement de cette réduction d’impôt en cas de cession ou de fin de contrat de la location du véhicule concerné avant la date de remboursement total du prêt, ou en cas de remboursement anticipé du prêt.

 les modalités de délivrance desdits prêts (convention entre l’État et les sociétés de financement et établissements de crédit concernés), et de contrôle des réductions d’impôt par l’État.

III.   LA POSITION DE VOTRE RAPPORTEURE

Votre Rapporteure est favorable à l’adoption de cet article, qui adapte un ensemble de dispositifs fiscaux aux nécessités de la transition écologique.

Sur l’extension du régime d’étalement de l’imposition des subventions publiques aux certificats d’économies d’énergie, elle estime que cette mesure technique de bon sens devrait permettre de renforcer l’incitation, pour les entreprises, à mettre en œuvre des travaux de rénovation énergétique. Elle salue donc ce changement de position du Gouvernement sur ce sujet.

Sur l’actualisation et la rationalisation du champ d’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux travaux de rénovation énergétique des logements et aux travaux relatifs aux infrastructures de recharge des véhicules électriques, votre Rapporteure considère que l’actualisation du régime juridique concerné était indispensable, compte tenu de la disparition du CITE. En outre, un effort est nécessaire concernant les infrastructures d’installation d’équipement de recharge des véhicules électriques puisque le dispositif fiscal afférent n’a connu, jusqu’ici, qu’un succès très limité (1200 demandes en 2021). Cette aide est de surcroît non négligeable pour l’achat d’une borne puisque la TVA réduite représente une économie d’environ 150 à 200 euros pour l’achat d’une borne de recharge (dont le coût varie entre 1 000 et 1 500 € TTC).

Sur les évolutions relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties, Votre Rapporteure considère que les modifications proposées vont dans le bon sens, en adaptant la réalité du cadre juridique actuel aux nécessités de la RE2020 et de la stratégie de transition écologique portée par le Gouvernement.

Sur les évolutions relatives à la taxe d’aménagement, votre Rapporteure constate que l’actualisation des valeurs forfaitaires était indispensable au regard de l’absence de révision de ces dernières depuis plus d’une décennie. En outre, les modifications proposées permettront de renforcer l’incitation à réhabiliter les friches industrielles, tout en laissant aux collectivités, qui sont décisionnaires, les marges de manœuvre utiles sur ce sujet.

Sur l’augmentation des tarifs réduits d’accise concernant le charbon, à partir de 2024, votre Rapporteure estime que le bon équilibre a été trouvé, en termes de temporalité, entre les nécessités de la transition écologique et la réalité de la situation énergétique actuelle.

Enfin, sur l’ajustement de la réduction d’impôt dont bénéficient les établissements de crédit et les sociétés de financement attribuant des PTZ mobilités, votre Rapporteure considère que cette mesure est utile pour améliorer la dynamique à l’œuvre sur les PTZ tout en conservant un coût maîtrisé. D’après les éléments qui lui ont été transmis, cette dépense fiscale serait de l’ordre de 42 millions d’euros pour 2023, pour une prévision de PTZ accordés estimée à 90 000 contre 72 000 en 2022. Il convient donc de poursuivre l’amplification de la dynamique à l’œuvre sur ce sujet.

 

 


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TRAVAUX de la commission

Au cours de sa réunion du mardi 4 octobre 2022, la commission des affaires économiques a procédé à l’examen pour avis de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis).

M. le président Guillaume Kasbarian. Chers collègues, notre commission est saisie de l’examen, pour avis, des articles 6 et 7 de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. L’article 6 vise à prolonger le volet fiscal du bouclier tarifaire mis en place en février pour limiter l’impact de la hausse des prix de l’électricité sur le pouvoir d’achat des ménages. L’article 7 procède, quant à lui, à diverses adaptations du système fiscal aux exigences de la transition énergétique.

Compte tenu de la compétence de la commission des affaires économiques en matière énergétique, et dans le droit fil des travaux que nous avons engagés depuis le début de la législature sur la hausse des prix du gaz et de l’électricité, il m’a semblé nécessaire que notre commission se prononce sur les dispositions de la première partie du PLF portant sur l’énergie.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Monsieur le président, chers collègues, je me réjouis de vous présenter le résultat de mes travaux relatifs aux articles 6 et 7 du projet de loi de finances pour 2023.

L’article 6 proroge le volet fiscal du bouclier tarifaire sur l’électricité ; l’article 7, quant à lui, contient des mesures d’adaptation de notre système fiscal aux exigences de la transition énergétique. Il me semble important, en amont des débats qui auront lieu en commission des finances, puis dans l’hémicycle, que nous échangions sur ces sujets qui ont une importance cruciale dans le contexte actuel. En effet, nos concitoyens s’inquiètent à la fois de l’inflation, qui se traduit par une hausse de leurs factures d’énergie, et du réchauffement climatique, dont nous avons encore observé les effets cet été. Sur ces questions, tout l’enjeu est de maintenir un équilibre entre le court et le long terme.

Dans les délais contraints qui étaient les miens, j’ai procédé à deux auditions : j’ai entendu le directeur de la direction de la législation fiscale (DLF) et celui de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC). Ces échanges ont été d’autant plus utiles que nous n’avons reçu que très tardivement l’évaluation de l’impact des mesures contenues dans la première partie du projet de loi de finances – ce qui est regrettable.

L’article 6, relativement court, prévoit une baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) – désormais appelée « fraction sur l’électricité ». Le montant des recettes de cette taxe s’élevait à 7,35 milliards d’euros en 2020. Elle est recouvrée par la direction générale des finances publiques (DGFIP) depuis le 1er janvier 2022 ; elle l’était auparavant par la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Son produit revient directement au budget général de l’État.

Pour mémoire, il existait également deux taxes locales portant sur la consommation d’électricité : la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE) et la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité (TDCFE). Elles offrent aux collectivités territoriales concernées une recette d’un peu plus de 2 milliards d’euros. Il a été décidé, en loi de finances pour 2021, de supprimer progressivement ces deux taxes, dans le but de rationaliser la fiscalité sur les énergies et de réduire les coûts de gestion. Désormais, ces deux taxes prennent donc la forme d’une majoration de la TICFE, dont les recettes sont ensuite transférées aux collectivités concernées.

Les redevables de la fraction sur l’électricité sont les fournisseurs d’électricité, c’est‑à‑dire les personnes qui produisent ou achètent de l’électricité en vue de la revendre à un consommateur final, et les personnes qui produisent de l’électricité et l’utilisent pour leurs propres besoins.

L’article 6 maintient l’accise sur l’électricité aux niveaux minimaux permis par le droit européen, soit 1 euro – au lieu de 25,68 euros – par mégawattheure pour les ménages et assimilés, et 50 centimes pour les autres consommations, c’est-à-dire celles qui concernent le secteur des transports, les activités et procédés industriels, et les entreprises industrielles électro-intensives. Ce dispositif serait applicable aux quantités d’électricité fournies entre le 1er février 2023 et le 31 janvier 2024.

La prorogation du bouclier tarifaire sur l’électricité est une bonne chose, compte tenu de la situation actuelle du marché de gros de l’électricité et des tensions qui se maintiennent sur les énergies au niveau mondial. Ce dispositif a permis de contenir significativement la facture d’électricité.

Le blocage des prix de l’électricité par le Gouvernement a également permis de contenir significativement la hausse des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE). Sans cette disposition, les hausses prévues par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) auraient été de 35,4 % TTC pour les tarifs bleus résidentiels et de 35,9 % TTC pour les professionnels.

Je rappelle que les acteurs qui n’ont pas bénéficié de 1’encadrement des TRVE stricto sensu ont tout de même bénéficié d’une protection face à la hausse des coûts de l’électricité. Le bouclier tarifaire comprend en effet un volet tarifaire, avec le blocage des prix, mais aussi un volet fiscal, qui intègre le supplément d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) accordé aux fournisseurs alternatifs d’électricité en 2022 par EDF, à la suite de la décision du Gouvernement de leur octroyer 20 térawattheures (TWh) supplémentaires.

Pour les collectivités ne bénéficiant pas des TRVE et les entreprises non électro‑intensives, la hausse moyenne des prix a été limitée à 20 %, alors qu’elle aurait dû être de l’ordre de 35 à 50 % sans ces mesures gouvernementales. Les entreprises électro-intensives ont également vu leurs factures contenues.

En somme, le bouclier tarifaire sur l’électricité a atteint son objectif et la prorogation de son volet fiscal apparaît indispensable. Certes, il a un coût pour les finances publiques, de l’ordre de 8 milliards d’euros en 2022, mais il a un impact positif pour l’ensemble des acteurs économiques. Le bouclier sur le gaz et l’électricité a permis de réduire de 2 points l’inflation en France.

Dans la mesure où les modifications proposées ne porteront pas atteinte aux ressources des collectivités territoriales, je suis favorable à l’adoption de cet article dans sa rédaction actuelle. Je rappelle que ce bouclier permettra de limiter la hausse de la facture d’électricité des ménages à 20 euros en 2023, au lieu de 180 euros.

J’en viens à l’article 7, qui procède à diverses adaptations de notre système fiscal aux exigences de la transition énergétique.

Cet article patchwork renforce six dispositifs fiscaux favorables à la lutte contre le réchauffement climatique : le régime d’étalement de l’imposition des subventions publiques ; l’application d’un taux réduit de TVA pour les travaux de rénovation énergétique et d’installation de bornes de recharge pour les véhicules électriques ; le régime d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements sociaux ; la taxe d’aménagement (TA) ; l’augmentation des tarifs réduits d’accise sur le charbon ; la réduction d’impôt consécutive à l’attribution d’un prêt à taux zéro (PTZ) « mobilités ».

L’article 7 procède, premièrement, à l’extension aux certificats d’économies d’énergie du régime d’étalement de l’imposition des aides et subventions publiques. Il s’agit d’une mesure technique qui vise à faciliter, pour les entreprises, l’amortissement des investissements consentis en leur permettant de reporter le bénéfice de l’aide ou de la subvention accordée sur plusieurs exercices fiscaux. Son extension aux certificats d’économies d’énergie avait été envisagée à plusieurs reprises au cours de la précédente législature, notamment lors de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets. Le Gouvernement avait écarté cette option, par souci de maintenir la cohérence du système et compte tenu de la nature très large du financement des économies d’énergie, qui excède la seule notion de « biens d’équipement ». C’est une mesure de bon sens, qui incitera les entreprises à s’investir pleinement dans une logique d’économies d’énergie.

L’article 7, deuxièmement, étend le champ d’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux travaux de rénovation énergétique des logements ainsi qu’aux travaux de pose, d’installation et d’entretien des infrastructures de recharge des véhicules électriques. Le cadre législatif actuel correspond à celui du crédit d’impôt en faveur de la transition écologique (CITE), qui a été supprimé en 2021, à la suite de la création du dispositif MaPrimeRénov’. Cette rationalisation s’effectuera d’ici le 1er janvier 2024, par un arrêté conjoint des ministres chargés du budget, du logement et de l’énergie.

Cette actualisation est une bonne chose : les opérateurs demandaient une clarification de la loi et de la réglementation. Elle va favoriser la pose, l’installation et l’entretien des infrastructures de recharge pour véhicules électriques. Ce dispositif fiscal connaît un succès encore trop limité, avec seulement 1 200 demandes en 2021. Le soutien financier apporté grâce au taux réduit de TVA est pourtant significatif puisqu’il correspond à une économie d’environ 150 à 200 euros pour l’achat d’une borne de recharge, dont le coût varie entre 1 000 et 1 500 euros TTC.

Troisièmement, l’article 7 actualise les critères de performance énergétique et de qualité environnementale exigés pour le bénéfice de l’allongement de 15 à 20 ans de la durée d’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) au profit des constructions de logements sociaux, en cohérence avec la réglementation en vigueur à compter du 1er janvier 2022 (« RE2020 »). Il proroge également, jusqu’au 31 décembre 2026, l’allongement d’une durée de dix ans de l’exonération de la TFPB au profit des constructions et acquisitions de logements sociaux ayant bénéficié d’une subvention ou d’un prêt aidé. Pour ces logements, l’exonération de TFPB sera ainsi de 25 ans et portée à 30 ans pour les constructions dépassant les exigences de la réglementation environnementale 2020. Les évolutions proposées me semblent aller dans le bon sens, puisqu’elles adaptent notre cadre juridique aux nécessités de la RE2020, tout en réaffirmant la stratégie du Gouvernement en matière de transition écologique.

Quatrièmement, l’article 7 propose de verdir la taxe d’aménagement (TA). Cet impôt local a été institué par la loi de finances pour 2010, dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité locale relative aux opérations d’urbanisme. La taxe d’aménagement a remplacé plusieurs taxes locales et s’applique, depuis 2012, lors de la délivrance de permis de construire ou d’aménager et de déclaration préalable de travaux. Elle est composée d’une part communale, d’une part départementale et d’une part régionale. Les collectivités disposent d’un pouvoir de taux sur leurs parts respectives, dans les limites fixées par la loi.

Les modalités de définition et de gestion de cette taxe ont fait l’objet d’une réforme importante, consécutivement à l’adoption de la loi de finances pour 2021. L’article 7 procède à plusieurs modifications relatives au régime de la taxe d’aménagement, dans le but de renforcer la lutte contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain. Ces dispositions s’inscrivent dans la droite ligne du rapport sénatorial intitulé Les outils financiers pour soutenir l’atteinte de l’objectif de zéro artificialisation nette, qui soulignait l’utilité de cette taxe pour lutter contre l’artificialisation des sols.

D’une part, la possibilité est ouverte aux collectivités locales d’exonérer de taxe d’aménagement les constructions réalisées sur des sites qui ont fait l’objet d’une opération de dépollution, ou d’une renaturation, dans des conditions permettant la réaffectation des sols à un usage conforme aux règles d’urbanisme applicables sur ces terrains. D’autre part, les valeurs forfaitaires applicables aux aires de stationnement et servant au calcul de l’assiette de la taxe, qui n’ont pas évolué depuis 2011, font l’objet d’un rattrapage et, pour l’avenir, d’une indexation annuelle sur le coût de la construction. L’article procède enfin à une réévaluation du plafond de cette taxe dans la limite duquel les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes peuvent, par délibération, augmenter les valeurs forfaitaires des aires de stationnement.

Ces modifications me semblent favorables à la fois à la transition écologique et aux finances des collectivités locales. En outre, les évolutions proposées renforceront l’incitation à réhabiliter les friches industrielles, tout en laissant une marge de manœuvre aux collectivités, qui sont décisionnaires.

L’article 7 prévoit, cinquièmement, une augmentation des tarifs réduits concernant certaines installations intensives soumises au système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’Union européenne. Cette augmentation concerne le charbon. Le projet de loi prévoit ainsi une hausse de ce tarif réduit de 3,20 euros du MWh sur deux ans à partir de 2024. Il s’agit d’encourager à la fois l’électrification des usages et la sobriété énergétique. Il me semble qu’un bon équilibre a été trouvé entre les nécessités de la transition écologique et la réalité de la situation énergétique actuelle.

L’article ajuste, enfin, la réduction d’impôt dont bénéficient les sociétés de financement et les établissements de crédit en contrepartie de l’octroi d’un prêt à taux zéro pour l’achat d’un véhicule léger à faibles émissions (PTZ « mobilités »). L’article actualise et précise les modalités de son octroi en modifiant l’article 107 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

La nouvelle rédaction de l’article 107 de la loi précitée précise ainsi : les modalités du bénéfice de cette réduction d’impôt pour les sociétés de personnes qui ne sont pas soumises à l’impôt sur les sociétés ; les modalités du bénéfice de ladite réduction d’impôt lorsque, pendant la durée du prêt, et tant que celui-ci n’est pas remboursé, les conditions initiales de sa délivrance ne sont plus respectées par la partie bénéficiaire ; les modalités du reversement de cette réduction d’impôt en cas de cession ou de fin de contrat de la location du véhicule concerné avant la date de remboursement total du prêt, ou en cas de remboursement anticipé du prêt ; les modalités de délivrance desdits prêts (convention entre l’État et les sociétés de financement et les établissements de crédit concernés) et de contrôle des réductions d’impôt par l’État.

Ces ajustements me paraissant de nature à renforcer la dynamique des PTZ « mobilités » et le coût de cette dépense fiscale me semble maîtrisé. D’après les éléments qui m’ont été transmis, elle serait de l’ordre de 42 millions d’euros pour 2023, pour une prévision de PTZ accordés estimée à 90 000 dossiers, contre 72 000 en 2022.

En conclusion, je suis favorable à l’adoption des articles 6 et 7 du projet de loi de finances pour 2023, dans leur rédaction actuelle.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Paul Midy (RE). Cet été, nous avons voté une enveloppe de 20 milliards d’euros pour renforcer le pouvoir d’achat des Français et les aider à faire face à l’inflation.

Les articles 6 et 7 du PLF montrent une nouvelle fois que la majorité présidentielle agit pour le pouvoir d’achat, mais également pour la transition écologique. Dès septembre 2021, le Gouvernement avait annoncé l’instauration d’un bouclier tarifaire sur l’énergie, notamment l’électricité. Cette mesure sociale aura coûté 10,5 milliards aux finances publiques sur l’année 2022.

Grâce au bouclier tarifaire et à l’action du Gouvernement, le prix de l’électricité est deux fois moins élevé en France qu’en Italie et trois fois moins qu’en Allemagne. La prolongation du dispositif est donc une bonne chose. En 2023, nous limiterons la hausse des coûts de l’électricité à 15 %, alors qu’elle pourrait atteindre 120 % en l’absence de bouclier. Cette mesure a un coût important pour les finances publiques ; c’est d’ailleurs pour cela que nous avons admis une hausse légèrement supérieure en 2023. Mais elle représentera, en moyenne, un gain de 180 euros par mois et par ménage. Le groupe Renaissance soutient fortement cette mesure et je partage, à titre personnel, les questionnements de Mme la rapporteure quant au périmètre du bouclier.

L’article 7, plus technique, témoigne de l’engagement de notre majorité en faveur de la transition énergétique. Mme la rapporteure en ayant fait un exposé clair et détaillé, je me contenterai d’en rappeler les principales avancées : le renforcement de l’incitation à réaliser des travaux d’économies d’énergie ; l’application d’une TVA réduite sur les travaux d’installation et d’entretien des infrastructures de recharge pour les voitures électriques ; l’ouverture de la possibilité, pour les collectivités locales, d’exonérer de taxe d’aménagement les constructions réalisées sur des sites qui ont fait l’objet d’une opération de dépollution ou de renaturation ; le relèvement des droits d’accise sur le charbon ; enfin, le renforcement du dispositif permettant l’octroi d’un prêt à taux zéro en faveur des particuliers ou des entreprises souhaitant acquérir un véhicule léger à faibles émissions.

Nous sommes favorables à l’adoption de ces deux articles, qui illustrent deux priorités de notre mandat : la défense du pouvoir d’achat des Français et l’accélération de la transition écologique.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. La prorogation du bouclier tarifaire est une bonne chose pour les ménages, pour les entreprises et pour les collectivités. En tant que cheffe d’entreprise, je mesure chaque jour combien ce bouclier, parce qu’il garantit la pérennité de mon entreprise, me permet aussi de me projeter dans l’avenir.

Mme Florence Goulet (RN). L’article 6 du PLF vise à proroger la réduction du tarif de l’accise sur l’électricité. Son exposé des motifs s’ouvre ainsi : « Le “bouclier tarifaire”, mis en œuvre entre le 1er février 2022 et le 31 janvier 2023, a permis de préserver le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises des hausses des prix de l’électricité constatées sur la même période. » Je suis en total désaccord avec cette affirmation, qui est très éloignée de la réalité vécue par les Français.

Le Gouvernement démontre, une fois encore, son incapacité à se remettre en cause, puisqu’il propose de prolonger une politique qui a échoué. Dans nos circonscriptions, chacun peut constater l’effondrement du pouvoir d’achat des Français et de la compétitivité de nos entreprises. L’urgence serait de sortir d’une fausse écologie qui aggrave la fracture sociale et territoriale, et qui provoque de puissants mécanismes d’exclusion et de discrimination par l’argent, au détriment notamment des habitants des zones rurales, des indépendants, des PME et des collectivités locales sur lesquels le Gouvernement fait peser les conséquences de ses choix dogmatiques. C’est une politique de fuite en avant, car le système est vicié.

L’État a introduit un bouclier tarifaire, mais si le prix de l’électricité est si élevé en France, c’est parce qu’il est soumis à l’Arenh. Autant dire que c’est la double peine pour la France et les contribuables français. Nous le répétons, il faut sortir de l’Arenh, donc du marché européen de l’énergie pour retrouver notre souveraineté, comme l’ont fait nos voisins espagnol et portugais. Nous réclamons aussi une baisse de la TVA à 5,5 % sur les produits énergétiques afin de redonner ce pouvoir d’achat à nos compatriotes.

Quant à l’article 7, il vise à procéder à diverses adaptations du système fiscal aux exigences de la transition énergétique, notamment en favorisant l’essor de la voiture électrique. Les aides à l’achat d’une voiture électrique permettent, en façade, d’économiser plusieurs milliers d’euros, mais on sait que ce type de véhicules est plus onéreux qu’une voiture thermique, qu’elle soit essence ou diesel. D’ailleurs, on s’interroge déjà sur de futures taxes sur les véhicules électriques. Le taux zéro pour l’acquisition de ces voitures est bien loin de compenser le surcoût, notamment pour les revenus modestes. Ces incitations se transforment en contraintes pour un grand nombre de nos concitoyens, notamment dans les territoires ruraux.

Les articles 6 et 7 du PLF sont malheureusement l’illustration parfaite d’une politique dépourvue de fondement. Malgré tout, comme lors de l’examen du texte sur le pouvoir d’achat, notre groupe fera preuve de responsabilité. Nous voterons l’article 6, afin de ne pas priver les Français des quelques améliorations que vous daignez leur proposer, même si nous les jugeons insuffisantes. En revanche, nous nous opposerons à l’article 7, car nous refusons les montages complexes et inaccessibles de subventions qui trompent et excluent un grand nombre de nos concitoyens.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Le Gouvernement a institué le bouclier tarifaire pour nous permettre de nous adapter, pour rassurer et accompagner. La hausse des tarifs de l’électricité a été limitée à 4 % alors qu’elle aurait pu atteindre 35 %.

M. Matthias Tavel (LFI-NUPES). L’article 6 est clairement un artefact. Vous nous dites que le bouclier tarifaire est prolongé, alors qu’en réalité, ce n’est pas le cas, puisque les prix vont augmenter de 15 %. Pour les Français, cela s’apparentera à un coup de matraque tarifaire, puisque la hausse atteindra 250 à 300 euros par an pour le gaz et l’électricité. Il n’y a donc absolument pas de quoi se réjouir. Malgré l’urgence, on est loin du blocage des prix de l’énergie – lequel était déjà nécessaire avant l’application du bouclier précédent – et du retour au tarif réglementé pour l’ensemble des opérateurs – ménages, entreprises, collectivités locales. Certes, pour appliquer ces mesures, il faut accepter de remettre en cause les dogmes du marché européen de l’énergie. Cela étant, même le ministre de l’économie, M. Le Maire, dit que les prix du marché sont délirants. Que faisons-nous encore dans un système délirant ? N’est-il pas de la responsabilité de notre assemblée et du Gouvernement de revenir à la raison ?

Même si vous proposez de limiter la hausse des prix par une baisse des taxes assumée par l’État, ce n’est pas satisfaisant car c’est encore une fois le Trésor public qui sera mis à contribution pour venir en aide aux Français. De son côté, le trésor privé continuera à encaisser les superprofits et les dividendes : Total a ainsi annoncé qu’il allait verser 2,6 milliards d’euros supplémentaires à ses actionnaires. Il y a là quelque chose qui ne va pas. Vous nous proposez des rustines, un moindre mal, mais vous ne vous attaquez pas à la cause de la hausse du prix de l’énergie. Vous n’apportez que des réponses partielles et insuffisantes, que nous ne soutiendrons pas.

L’article 7 acte la réduction des dépenses de l’État et institue des exonérations. Après, on viendra nous dire qu’il n’y a plus d’argent pour investir dans la transition énergétique et que ce sont les opérateurs privés qui, à l’aide d’incitations, devront accomplir cette transition. Or, ce système n’avance pas au rythme qu’exige l’urgence climatique. Là encore, nous ne pouvons pas soutenir ces logiques, qui aboutissent à faire des cadeaux à certains établissements bancaires ou à soutenir le remplacement de véhicules par d’autres véhicules. Cette dernière pratique est discutable sur le plan écologique car on doit apprécier le bilan carbone de l’automobile à une échelle globale, de la construction à la destruction, mais pas seulement en fonction de sa consommation en cours d’utilisation. Vous faites l’impasse sur ces questions.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Il est vrai que depuis quelques années, nous recevons quelques coups de matraque économiques, mais nous avons su, à chaque fois, contenir les factures, en particulier en matière énergétique. Les milliards d’euros engagés pour réduire la facture des Français ne sont pas des rustines mais constituent un accompagnement complet et pérenne. Le projet de réforme du marché européen de l’électricité et du gaz offrira la possibilité d’effectuer des achats groupés, qui devraient nous permettre, d’ici cinq à six ans, d’éviter ces « coups de matraque », pour reprendre vos termes.

M. Jérôme Nury (LR). Nos concitoyens sont inquiets devant la hausse des prix de l’énergie, qui affecte fortement leurs dépenses quotidiennes, notamment dans les territoires ruraux, que ce soit pour le chauffage ou les déplacements. Cette augmentation a également des conséquences importantes dans de nombreux secteurs, où les prix s’accroissent de manière vertigineuse. Elle est terrible pour certaines entreprises : je pense aux artisans et aux commerçants, notamment aux boulangers, et de manière générale à tous ceux qui dépendent fortement de l’électricité ou du gaz et qui ne bénéficient ni du bouclier, ni des aides beaucoup trop compliquées imaginées par Bercy.

La prolongation du bouclier tarifaire sur l’électricité et le gaz est indispensable car les décisions prises depuis dix ans n’ont pas été les bonnes et ne protègent pas les Français : abandon de la filière électronucléaire, fermeture de Fessenheim, maintien du dispositif de l’Arenh, acceptation du traité européen sur la charte de l’énergie, fin du tarif réglementé du gaz au 30 juin 2023. Cela étant, le bouclier ne protège pas tous les Français de la même manière. Nous avons obtenu de l’Assemblée nationale, cet été, par un amendement que j’ai défendu, une ligne budgétaire de 230 millions pour aider les foyers se chauffant au fioul, lesquels avaient été laissés totalement livrés à eux-mêmes alors que les prix avaient été quasiment multipliés par deux.

Comme s’y était engagé le Gouvernement, une concertation avec les parlementaires impliqués a bien eu lieu pour dégager des pistes permettant d’élaborer un dispositif rapide et ciblé non seulement sur les foyers modestes mais aussi sur les classes moyennes. Toutefois, depuis un mois, nous n’avons plus de nouvelles précises sur la déclinaison de l’aide. Il est temps que le Gouvernement confirme précisément l’accompagnement, à savoir une aide de 200 euros en plus du chèque énergie classique de 200 euros pour les foyers des déciles 1 à 3, soit un chèque global de 400 euros, et une aide de 100 euros pour les foyers des déciles 4 et 5, le tout devant être déployé en novembre, ce qui est très tardif et bien insuffisant au regard du coût et des quantités à livrer pour passer l’hiver.

Madame la rapporteure, avez-vous des informations ou des précisions à nous communiquer à la suite de la réponse apportée par Mme la Première ministre à une question posée par une de nos collègues ?

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Je n’ai pas de réponse immédiate à vous apporter, mais je voudrais rappeler que le bouclier tarifaire a permis de réduire l’inflation de 2 points, ce qui a rassuré les Français sur l’état de notre économie.

M. Charles Fournier (Écolo-NUPES). L’article 6 constitue le volet fiscal du bouclier tarifaire, qui n’en est pas vraiment un : en effet, le montant de la facture énergétique va continuer d’augmenter – 25 euros par mois pour le gaz et 20 euros par mois pour l’électricité –, ce qui est évidemment insupportable pour une partie des Français. Le dispositif n’est pas non plus efficace du point de vue de la souveraineté et de la sobriété énergétique, dans la mesure où l’aide est accordée de manière indifférenciée, tant à ceux qui sont en ébriété énergétique qu’à ceux qui satisfont leurs besoins immédiats. D’autres mesures sont possibles, tels le blocage des prix ou la tarification progressive. Nous présenterons un amendement visant à instituer un bouclier dont le coût serait beaucoup plus prévisible pour l’État et qui garantirait l’accès à de l’énergie en deçà des tarifs à venir. Cela répondrait aux besoins vitaux de la plupart de nos concitoyens, tandis que ceux dont la consommation irait au-delà paieraient les prix du marché. Ce serait une mesure de justice sociale.

Concernant l’article 7, il conviendrait de retravailler en profondeur la fiscalité pour qu’elle soit juste socialement et écologiquement pertinente – on sait que la TVA est un impôt foncièrement injuste. Certaines mesures, telles la lutte contre l’artificialisation et la transformation des mobilités vont dans le bon sens, en participant du verdissement, mais le texte n’est pas dépourvu de risques. Ainsi, la réduction de la TVA sur les équipements fonctionnant aux énergies fossiles doit s’accompagner d’une aide massive pour permettre aux Français de changer d’équipements – cela fait partie des mesures que l’on repousse d’année en année. Pour revenir sur l’exemple qui a été cité, nous n’étions pas favorables à l’amendement visant à réduire les factures de fioul car nous considérons que c’est maintenant qu’il faut aider les Français à changer de mode de chauffage. Les réponses d’urgence qui sont apportées ne sont pas suffisantes pour assurer une transition efficace. Nous avons pris beaucoup de retard et nous en payons aujourd’hui lourdement l’addition.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Les mesures prévues par les deux articles s’inscrivent dans un double horizon, de court terme et de long terme. Nous pouvons, grâce à cet équilibre, apporter les corrections qui se révéleraient nécessaires – nous devrons certainement opérer des ajustements dans les mois à venir en matière de verdissement. En France, nous avons une électricité relativement décarbonée mais nous devons encore accomplir des efforts en la matière. L’équilibre entre le court terme et le long terme devra être préservé.

M. Éric Martineau (Dem). Qu’il s’agisse de la prolongation du volet fiscal du bouclier tarifaire sur l’électricité ou du verdissement des outils fiscaux, le groupe MODEM et indépendants soutient l’adoption de ces deux articles.

L’article 7 adapte la taxe d’aménagement à la lutte contre l’artificialisation des sols, réajuste le régime fiscal en vue de la création du prêt à taux zéro pour l’acquisition de véhicules propres, ou encore permet la réalisation de travaux de rénovation énergétique. Nous sommes particulièrement soucieux de ces mesures car nous considérons que la dette climatique et la dette publique sont les deux faces d’une même crise. Ce sont deux urgences pour préparer une société sûre et juste. Aucune de ces deux faces ne peut être ignorée. En ce sens, nous considérons que ce budget est équilibré et ambitieux. Au-delà de l’incitation fiscale au service de la transition énergétique, la question du financement de cette dernière par la fiscalité est également centrale.

Par l’article 6, le Gouvernement réaffirme sa volonté de protéger le pouvoir d’achat des Français en plafonnant à 15 % la hausse des tarifs de l’électricité alors que ceux-ci auraient pu doubler.

Ce sont deux articles équilibrés, représentatifs de la ligne de conduite que se sont fixée le Gouvernement et la majorité, à savoir protéger les Français tout en poursuivant la transition environnementale.

Nous encourageons le Gouvernement à poursuivre ses travaux sur l’accompagnement des entreprises de plus de dix salariés et de l’ensemble des collectivités locales face à la hausse globale des prix de l’énergie. De la même manière, nous entendons trouver des solutions pour renforcer l’accompagnement des habitats collectifs et des copropriétés face à la hausse des coûts de l’énergie.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Les PTZ – dont le coût atteindra 42 millions d’euros en 2023 – et les réductions d’impôts témoignent d’un effort significatif de l’État. Il s’agit d’accélérer une prise de conscience dans tous les foyers, de nous faire réfléchir sur notre façon de nous déplacer et en particulier sur l’achat de véhicules électriques.

La baisse de la TICFE, qui représente un coût de 8 milliards pour 2022, contribue aussi à cette prise de conscience et nous conduit à réfléchir sur la façon d’accompagner les Français sur la voie du verdissement et de la transition énergétique.

M. Paul Molac (LIOT). Alors que nous faisons face à une inflation de 4,3 %, l’article 6 me paraît bienvenu car il maintient un bouclier tarifaire, même si celui-ci sera un peu moins protecteur, puisque la hausse des tarifs atteindra 15 % en 2023. Ce dispositif ne coûtera pas moins de 45 milliards d’euros, dont 16 milliards seront pris en charge par le budget de l’État. Les producteurs d’énergies renouvelables, pour leur part, reverseront une partie de leurs bénéfices à l’État. Il est regrettable, à cet égard, que nous ayons pris tant de retard – parfois cinq ans – dans la construction des parcs d’éoliennes offshore – je pense en particulier à Saint‑Nazaire, Saint-Brieuc et Quiberon. Ces technologies nous offrent la possibilité de dégager des marges de manœuvre de long terme et de ne plus être dépendants du gaz – en l’occurrence du gaz russe, dont il n’est pas si aisé de se passer.

Nous approuvons globalement l’article 7, qui prévoit une évolution de la fiscalité dans un sens favorable à la transition énergétique.

Enfin, j’exprimerai un regret : nous aurions souhaité que la commission se saisisse de l’article relatif à la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises).

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Je me réjouis que vous approuviez le choix du Gouvernement d’accompagner les Français par le maintien du bouclier tarifaire. J’étais présente à Saint-Nazaire pour l’inauguration du parc éolien. J’accompagnais la société Lhyfe, qui travaille sur la production d’hydrogène vert à partir de l’énergie éolienne. Il nous faut accélérer en matière de production d’énergies renouvelables. Quant à la CVAE, nous pourrions en effet travailler en synergie avec d’autres commissions.

M. le président Guillaume Kasbarian. La construction du parc éolien de Saint‑Nazaire a donné lieu à une procédure administrative tentaculaire, à la conduite d’investigations très étendues entre 2007 et 2015. Nous venons d’inaugurer notre premier champ éolien en mer alors que d’autres pays se sont déjà massivement engagés dans cette voie. Il serait intéressant de se rendre dans les États côtiers de la mer du Nord pour comprendre comment ils peuvent aller aussi vite. Ce n’est pas seulement une question de moyens : la procédure entre aussi en ligne de compte. Par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) du 7 décembre 2020, nous avons réussi à raccourcir un peu les procédures en matière d’éolien en mer. On nous a d’ailleurs reproché d’avoir supprimé un degré de juridiction et d’avoir confié au Conseil d’État la compétence en premier et dernier ressort pour connaître des litiges sur ce sujet.

La crise énergétique le montre et toutes les auditions que nous avons menées le confirment : on a besoin de produire plus d’électricité, plus rapidement. On ne peut pas se permettre d’être en sous-production électrique, car cela entraîne un déséquilibre entre l’offre et la demande. Les textes que nous examinerons bientôt – en particulier le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables – permettront d’accélérer sur ces sujets. Nous partageons un constat : il faut produire plus d’énergie renouvelable et plus d’énergie nucléaire, et donc – conséquence logique – nous devons accélérer les procédures. Les autres pays progressent et développent déjà des technologies plus avancées. Notre pays a connu des périodes industrielles fastes, marquées par la création rapide d’équipements électriques. Je suis certain que nous pouvons emprunter le même chemin aujourd’hui.

M. Matthias Tavel (LFI-NUPES). Imputer notre retard à la longueur des recours, en plaçant de surcroît dans un même ensemble recours et concertation, c’est poser un diagnostic erroné, ce qui conduira à administrer un mauvais remède.

Article 6 : Prorogation du volet fiscal du « bouclier tarifaire » sur l’électricité

Amendement I-CE6 de M. Julien Dive.

M. Vincent Rolland. Il vise à faire bénéficier les associations d’utilité publique du bouclier tarifaire car elles se retrouvent en difficulté du fait de l’augmentation des tarifs de l’électricité.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Ces associations bénéficient déjà du tarif bleu pro d’EDF, sous certaines conditions. Le coût du bouclier tarifaire étant élevé pour les finances publiques – 24 milliards d’euros pour la seule partie électricité –, il faut être vigilant quant à son périmètre. Avis défavorable.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Nous sommes favorables à cet amendement. J’ai rencontré la semaine dernière la Banque alimentaire, dont les factures explosent. De même, un centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de ma circonscription doit faire face à des coûts de fonctionnement très importants pour son atelier d’insertion pour les travailleurs. Ces deux exemples ne sont pas isolés et illustrent la nécessité de trouver une solution pour les associations.

M. William Martinet. Je n’ai pas la même lecture de cet amendement. Selon la rédaction actuelle de l’article 6, les associations relèvent de la catégorie « autres consommations », avec une taxation à 0,5 euro par mégawattheure. L’amendement, en les associant à la catégorie « ménages et assimilés », les soumettrait à une taxation de 1 euro. J’ai donc du mal à comprendre comment il pourrait répondre à son objectif.

Sur le fond, toutefois, il y a un vrai sujet concernant les trous dans le bouclier tarifaire, qui concernent les collectivités, une partie des entreprises, les associations et surtout le logement collectif, dont les locataires subissent des hausses de charges très importantes. Je partage donc l’objectif d’intégrer dans le bouclier tarifaire davantage d’acteurs afin de les protéger.

M. Paul Midy. La catégorie fiscale « ménages et assimilés », qui bénéficie de la réduction de TICFE, comporte non seulement les ménages mais aussi tous les acteurs économiques dont la consommation est inférieure à 36 kilovoltampères. C’est le cas de la très grande majorité des associations. L’amendement étant déjà quasi satisfait, nous y sommes défavorables.

M. Charles Fournier. L’amendement créerait une forme d’inégalité avec les associations non reconnues d’utilité publique. Elle s’ajouterait aux inégalités existant déjà, le bouclier n’étant pas applicable à tout le monde. Celui-ci doit évoluer pour favoriser la maîtrise des consommations, même si cela ne concerne pas particulièrement les associations. Il est nécessaire de trouver une nouvelle formule permettant de répondre à l’urgence sociale tout en incitant à la sobriété énergétique.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Il est difficile d’opérer une distinction entre les associations selon qu’elles sont ou non reconnues d’utilité publique. Avis défavorable.

M. Mathias Tavel. On comprend la difficulté technique mais il faut parvenir à déterminer quelles sont les associations qui peuvent être mises en difficulté par l’augmentation des prix de l’énergie. Il convient de travailler à une nouvelle rédaction d’ici la séance. Mme Battistel évoquait les associations caritatives d’aide alimentaire qui, du fait de la nécessité de conserver les aliments dans le froid, sont particulièrement sensibles au prix de l’électricité. Peut-être cet amendement n’est-il pas le meilleur outil pour régler cette question mais il faut faire mieux que ce qui est actuellement prévu.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Je suis sensible à ce sujet et nous pourrons l’évoquer prochainement, par exemple en séance.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 non modifié.

Article 7 : Adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique

Amendement I-CE4 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand. Il s’agit d’appliquer le taux réduit de TVA de 5,5 % aux travaux de rénovation énergétique visant à mettre en place des équipements recourant à des sources d’énergie à émission bas-carbone. Trop peu ambitieuse, la proposition initiale du Gouvernement écarterait d’office les installations alimentées par des sources d’énergie non renouvelables mais pas pour autant polluantes, comme l’énergie nucléaire. Celle-ci est pourtant l’énergie la plus propre relativement à l’efficacité de sa production, et la ressource en uranium peut être prélevée sur le long terme et consommée durablement. C’est pourquoi nous vous demandons d’étendre la réduction de TVA à l’ensemble des dispositifs de production d’énergie.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Il n’y a pas de lien entre les travaux de rénovation énergétique et l’énergie nucléaire stricto sensu. Avis défavorable.

M. Paul Midy. L’amendement est déjà satisfait, le texte précisant que sont éligibles tous les travaux d’installation ou de rénovation permettant d’économiser de l’énergie, par exemple des travaux de remplacement d’une chaudière au fioul par un chauffage électrique. Le nucléaire est déjà éligible dès lors qu’il permet une amélioration de la consommation d’énergie.

La commission rejette l’amendement

Amendements identiques I-CE9 de M. Vincent Rolland et I-CE11 de M. Nicolas Meizonnet.

M. Vincent Rolland. Il a pour objet d’étendre le taux de TVA de 5,5 % pour les travaux de rénovation énergétique à tous les groupements momentanés d’entreprises (GME) de plus de trois corps de métier, afin d’inciter les entreprises artisanales de proximité à se regrouper pour réaliser des travaux plus globaux.

M. Nicolas Meizonnet. Il s’agit d’encourager la réalisation de travaux de rénovation globale. C’est bon pour l’écologie car cela entraînera mécaniquement une incitation à la rénovation. De plus, cela apportera un soutien aux très petites entreprises (TPE) du bâtiment en leur permettant d’accéder à un plus grand nombre de chantiers et en valorisant leur savoir-faire. Enfin, c’est avantageux pour le particulier, qui n’aura affaire qu’à un seul interlocuteur.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Si je partage l’objectif énoncé dans ces amendements, leur rédaction soulève toutefois un problème de compatibilité avec le droit européen. En effet, la TVA doit être appliquée opération par opération, et non sur un ensemble global de travaux. Or les amendements tendent à inverser le principe : les travaux de rénovation seraient éligibles au taux réduit de TVA dès lors qu’ils seraient réalisés par un GME. Il est important de conserver une exigence de qualité dans la réalisation des travaux de rénovation énergétique. Avis défavorable.

M. William Martinet. L’une des difficultés de la rénovation énergétique tient à la qualité des travaux, dont l’efficacité dans la réduction de la consommation d’énergie est discutable. La preuve en est le très faible nombre de logements sortis de la catégorie « passoire thermique » au regard du nombre de travaux financés, en particulier par MaPrimeRénov’. L’assouplissement des critères ne peut pas être la réponse à un problème de qualité des travaux. Il faut des entreprises certifiées et qualifiées pour réaliser la transition énergétique.

Nous devons agir sur un autre terrain : celui de la formation des professionnels de ces entreprises. Il y a en effet un problème de pénurie de main-d’œuvre dans le BTP et si nous voulons former des travailleurs qualifiés dans la rénovation énergétique, il faut y mettre les moyens.

M. Charles Fournier. L’opération « Isolation à 1 euro » a montré que la rénovation pouvait donner des résultats de mauvaise qualité, voire délictueux, occasionnant de nombreux conflits. Toutefois, pour favoriser la constitution de groupements d’artisans, je serais plutôt d’avis de soutenir le déploiement des plateformes territoriales de la rénovation énergétique et de remplacer le service d’accompagnement pour la rénovation énergétique (SARE), dispositif financé par des certificats d’économies d’énergie et qui va bientôt prendre fin, par des financements publics pérennes.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CE13 de M. Nicolas Meizonnet.

M. Nicolas Meizonnet. L’article 7 augmente les tarifs réduits du charbon pour les activités relevant du système d’échange de quotas d’émission dans l’Union européenne. En raison des choix politiques faits par M. Emmanuel Macron – réduction de la part du nucléaire dans notre production énergétique, recours accru à de l’énergie intermittente non pilotable –, nous sommes désormais dans l’obligation de remettre en route des centrales à énergie fossile, comme c’est le cas avec la centrale à charbon de Saint-Avold. En attendant une situation plus favorable, il ne nous paraît pas opportun d’augmenter la fiscalité sur les énergies fossiles.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. L’équilibre trouvé à l’article 7 est pertinent : hausse des tarifs réduits et obligation de soumission des entreprises concernées au système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne, avec une temporalité adaptée à partir de 2024. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CE5 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand. Le Gouvernement envisage de réserver l’accès au tarif réduit de l’accise sur les produits combustibles aux entreprises énergo‑intensives soumises au système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne, au détriment des entreprises qui ne sont pas soumises à ce système d’échange alors qu’elles en bénéficiaient jusque-là.

Le Gouvernement n’a pas compris qu’une crise énergétique ne justifie pas de choisir qui meurt ou non : toutes les entreprises énergo-intensives doivent être soutenues, et pas seulement celles qui font la une des journaux. Le présent amendement vise donc à ouvrir cette disposition à l’ensemble des entreprises, qu’elles soient ou non soumises au système d’échange de quotas d’émission.

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement I-CE12 de M. Nicolas Meizonnet.

M. Nicolas Meizonnet. L’article 7 proroge le dispositif du PTZ « mobilités » créé par la loi « climat et résilience ». Si la volonté de favoriser des moyens de déplacement plus respectueux de l’environnement est louable, miser sur le tout électrique, comme le fait le Gouvernement, atteint ses limites lorsque le prix de l’électricité explose ou quand les capacités d’approvisionnement diminuent. Ces questions très importantes devraient nous appeler à un peu de pragmatisme et de prudence. Il convient donc de mettre fin aux financements des véhicules électriques.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. Le PTZ « mobilités » doit être encouragé car la réduction fiscale accordée en contrepartie semble efficace. Le nombre de PTZ octroyés est en hausse et devrait continuer de croître : c’est une preuve de l’adhésion au projet. La dépense fiscale est de l’ordre de 42 millions d’euros pour 2023 pour une prévision de 90 000 PTZ accordés. Enfin, l’article 7 vise à assurer la conformité de ce dispositif au droit européen concernant le respect des règles relatives aux aides de l’État. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques I-CE8 de M. Vincent Rolland et I-CE10 de M. Nicolas Meizonnet.

M. Vincent Rolland. L’article 7 envisage l’actualisation et la rationalisation du champ d’application du taux réduit de la TVA sur les travaux de rénovation énergétique des logements. Un arrêté sera pris pour rendre la définition du périmètre des travaux plus lisible pour les opérateurs. Il risque toutefois d’exclure certains travaux de rénovation énergétique du champ d’application. Afin de sécuriser les opérations en cours, il est proposé d’étendre le maintien à titre dérogatoire du taux de TVA de 5,5 % à l’ensemble des opérations acceptées par les clients et ayant fait l’objet d’un acompte versé avant l’entrée en vigueur de l’arrêté d’application. Cela éviterait de faire peser sur les seules entreprises la variation du taux de TVA.

M. Nicolas Meizonnet. L’amendement vise à éviter que certains travaux de rénovation énergétique soient exclus du champ d’application de la TVA au taux réduit, en maintenant à titre dérogatoire le taux de 5,5 % pour l’ensemble des opérations acceptées par les clients et ayant fait l’objet d’un acompte versé avant l’entrée en vigueur de l’arrêté d’application.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour avis. L’objectif est louable : sécuriser les entreprises et les artisans et ne pas exclure certains travaux de rénovation énergétique du champ d’application de la TVA à taux réduit de 5,5 %. Néanmoins, la signature d’un devis est indifférente en matière de TVA. Le fait générateur correspond au versement d’un acompte. Le droit européen est de surcroît contraignant à ce sujet. Enfin, il est difficile d’anticiper le coût d’une extension éventuelle du bénéfice de ce taux réduit au champ souhaité par les auteurs de ces amendements. Il convient donc de maintenir la rédaction actuelle, d’autant qu’un arrêté concerté avec des acteurs du secteur devrait permettre de préciser le sujet. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 non modifié.

Après l’article 7

Amendement I-CE7 de M. Julien Dive.

M. Vincent Rolland. Il s’agit d’ouvrir le dispositif MaPrim’Rénov aux sociétés civiles immobilières (SCI).

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption des dispositions dont elle a été saisie pour avis.

 


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   liste des ACTEURS auditionnÉs

Direction de la législation fiscale (DLF), ministère de l’économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique

M. Christophe Pourreau, directeur

Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

M. Laurent Michel, directeur

 


([1]) Le calcul de la moyenne est du ressort de la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

([2]) Les demandes d’ARENH ont atteint 160,05 TWH en 2022 contre 146,2 TWH en 2021, ce qui a conduit à un niveau d’écrêtement supérieur à celui de l’année précédente.

([3]) En d’autres termes, l’écrêtement de l’ARENH consécutif à un niveau de demandes plus élevé que le plafond attribué conduit les fournisseurs à s’approvisionner davantage sur le marché de gros, à des prix très élevés, qui se répercutent logiquement ensuite auprès du consommateur final.

([4]) Pour mémoire, les TRVE s’appliquent aux consommateurs résidentiels et microentreprises en métropole, et à tous les consommateurs en ZNI.

([5]) Le terme « cumac » provient de la contraction de « cumulé » et « actualisé » car les kWh économisés sont cumulés sur la durée de vie du produit et actualisés, l’économie d’énergie réalisée à court terme étant plus certaine et mieux valorisée. Les opérations d’économies d’énergie qui conduisent à une hausse des émissions de gaz à effet de serre ne peuvent pas donner lieu à la délivrance de CEE.

([6]) Organisme certificateur de l’association Qualitel.

([7]) Bâtiment Énergie Environnement +.

([8]) Il s’agit de la taxe locale d’équipement, de la taxe départementale des espaces naturels sensibles, et de la taxe départementale pour le financement des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement.

([9]) Les travaux éligibles sont regroupés en 6 actions, à savoir : l’isolation thermique performante de la totalité des toitures, l’isolation thermique performante d’au moins la moitié de la surface des murs donnant sur l’extérieur, l’isolation thermique performante d’au moins la moitié des parois vitrées, l’installation ou le remplacement de systèmes de chauffage ou de production d’eau chaude sanitaire performants, l’installation d’équipements de chauffage utilisant une source d’énergie renouvelable et l’installation d’équipements de production d’eau chaude sanitaire utilisant une source d’énergie renouvelable.

([10]) Décret n° 2022-615 du 22 avril 2022 relatif à l’expérimentation d’un prêt ne portant pas intérêt pour financer l’acquisition d’un véhicule dont les émissions de dioxyde de carbone sont inférieures ou égales à 50 grammes par kilomètre.