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N° 285

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 octobre 2022.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
sur le projet de loi de finances pour 2023 (n° 273)

TOME IV

COHÉSION DES TERRITOIRES

LOGEMENT ET URBANISME

PAR M. Bastien Marchive

Député

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 Voir les numéros : 273 (Tome III, annexe 8).


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SOMMAIRE

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  Pages

Introduction

PremiÈRE PARTIE :  des crÉdits dynamiques face À la hausse  des coÛts du logement

I. LE PROGRAMME 109 « AIDE À L’ACCÈS AU LOGEMENT »

A. l’APL en temps rÉEL, une rÉforme utile, qui prÉfigure la solidaritÉ À La source

1. L’APL, une prestation très solvabilisatrice dont l’adéquation a été améliorée avec le versement en temps réel

2. L’APL en temps réel, première étape vers la solidarité à la source

B. UN SOUTIEN AUX locataires MAINTENU ET UNE accession À la propriÉtÉ À PROTÉGER

1. Une stabilité du nombre d’impayés malgré la crise grâce au soutien apporté aux locataires

2. La nécessaire adaptation du calcul du taux d’usure pour protéger l’accession à la propriété

II. LE PRogramme 135 « urbanisme, territoires et amÉlioration de l’habitat »

A. La montÉe en puissance de l’Anah au service de la transformation de l’habitat

1. Des aides à la rénovation énergétique consolidées et amplifiées

2. La transformation du « Louer abordable » en « Loc’Avantages » pour toucher un public plus large

3. « MaPrimeAdapt’ », une réponse volontariste à venir au besoin d’adaptation du parc au vieillissement des occupants

B. Action logement et l’Anru en soutien À la transition Écologique et sociale de l’habitat

1. La participation d’Action Logement au renforcement du FNAP

2. La sécurisation nécessaire des financements à destination de l’Anru

SECONDE PARTIE : La nÉcessaire adaptation de la chaÎne de production pour garantir l’AccÈs de tous À un logement de qualitÉ et un urbanisme en phase avec les impÉratifs environnementaux

I. La production de logements face À une sÉrie de dÉfis majeurs

A. le bÂtiment est CONFRONTÉ À une gageure Économique et sociale

1. Une conjoncture compliquée, source de préoccupations sur la situation du BTP

2. À plus long terme, les défis structurels du recrutement et de la conversion de la filière

B. des opÉrations qui se heurtent À des difficultÉs territoriales accrues

1. Un renchérissement foncier qui s’accentue, devant susciter une réflexion sur la taxation du foncier

2. Les collectivités et l’acte de construire à l’heure de la densification et de la sobriété foncière

II. L’obligation de repenser nos pratiques d’amÉnagement et de logement À l’heure de la transition Écologique

A. la rÉnovation ÉnergÉtique du logement, une opportunitÉ pour la filiÈRE

1. « MaPrimeRénov’ » : mieux financée et réalisée mais toujours limitée face au défi de la rénovation globale

2. Des solutions à trouver pour mieux accompagner les copropriétés

3. Une réponse adaptée aux besoins de financement de la rénovation thermique du parc social grâce à une enveloppe dédiée dans le PLF

4. L’horizon des rénovations massives et de la « seconde vie » du logement social

B. des outils financiers amplifiÉs pour accompagner la transition Écologique des territoires

1. Le fonds friches, un dispositif couronné de succès

2. Le fonds de renaturation des villes, une initiative à saluer

C. des outils fiscaux À repenser pour mieux parer À la raréfaction foncière et accompagner les transitions

1. Accompagner l’extinction du « Pinel » et préparer sa succession

2. Repenser le « Denormandie dans l’ancien » pour mieux l’adapter à nos enjeux

3. Mieux soutenir l’accession à la propriété par le prêt à taux zéro

4. Réviser la fiscalité des meublés de tourisme pour rétablir l’attractivité de l’investissement locatif de longue durée

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes


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   Introduction

Premier poste de dépenses de nos concitoyens, le logement n’est pas épargné par les difficultés liées au contexte international que nous traversons actuellement. La crise de l’énergie, la hausse généralisée de l’inflation et le ralentissement de la croissance économique liés à la guerre en Ukraine ont un impact direct sur les perspectives futures d’urbanisation et de construction ou réhabilitation de logements.

Ces effets néfastes sont d’autant plus préoccupants qu’ils pourraient se prolonger à moyen terme et avoir des conséquences majeures sur les deux objectifs prioritaires de notre majorité en la matière : l’accès à un logement pour tous et l’accélération de la transition écologique.

L’accès à un logement pour tous les Français demeure en effet le fondement de notre action et concerne chaque étape du parcours résidentiel, depuis les études jusqu’au troisième âge en passant par la vie professionnelle et les difficultés que chacun peut rencontrer. Il suppose de permettre à chacun de bénéficier de la location d’un logement, mais également de favoriser l’accession à la propriété, tout en portant une attention majeure à la mixité et au logement social. Il impose enfin de garantir à chacun un habitat décent. Ces thématiques ont marqué les grandes lois de la précédente législature, du combat mené contre les marchands de sommeil lors de la loi Elan en 2018, au déploiement du programme « Logement dabord » tout au long du quinquennat, jusqu’à la pérennisation du dispositif SRU en faveur du logement social, à loccasion de la loi 3DS, en 2022.

Le changement climatique et la crise énergétique nécessitent également que le logement prenne toute sa part dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, auxquelles il contribue à hauteur de 11% en France selon le Haut Conseil pour le Climat. Cet effort passe largement par la rénovation énergétique de l’habitat, qui verra à nouveau augmenter de manière significative en 2023 le budget qui lui est consacré. Il suppose en outre de faire évoluer les méthodes et les matériaux de construction, de penser l’habitat de demain ainsi que d’endiguer l’étalement urbain et l’artificialisation des sols en suivant le chemin tracé par la loi Climat et Résilience adoptée en 2018.

Ces enjeux, notre majorité les traite avec ambition et détermination depuis 2017. Le projet de loi de finances pour 2023 illustre à nouveau ce volontarisme, en accroissant considérablement les moyens budgétaires qui y sont dédiés.

Ainsi, les crédits du programme 109 « Aide à laccès au logement » continuent de connaître une dynamique forte, notamment grâce à la revalorisation anticipée des aides personnelles au logement en juillet dernier. Avec 13,37 milliards deuros (Mds€) budgétés, le programme enregistre une progression de 290 millions deuros (M€) par rapport aux 13 Mds€ de la loi de finances initiale (LFI) de lan dernier, qui était elle-même en progression de près de cinq points par rapport à lannée précédente. Notons à cette occasion que les politiques relatives à l’hébergement, distinctes de celles du logement, ne relèvent pas des deux programmes dont il est ici question et, en toute logique, ne sont donc pas abordées au sein du présent rapport.

Les grands défis précédemment mentionnés reposent également sur la création dun environnement favorable à la production de logements. Cest pourquoi nous demeurons si fortement attachés au secteur de l’habitat social, qui demeure le cœur battant de la construction neuve en France.

La création de nouveaux logements en zone déjà urbanisée, le recyclage urbain, la construction de la ville sur la ville, la réhabilitation de logements bien situés et bien desservis ; ces dynamiques sont au cœur dune politique en faveur de la ville à taille humaine et économe en foncier.

Les crédits du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de lhabitat » connaissent également une très forte hausse. Limpulsion apportée depuis 2020 à la rénovation énergétique des logements se poursuit, avec une forte montée en puissance du dispositif « MaPrimeRénov’ ». Si son financement ne repose que partiellement sur le programme 135, lAgence nationale de l’habitat (Anah), qui en est l’opérateur, connaît néanmoins une augmentation de plus de moitié de son budget, en progression à plus de 803 M€, après des crédits de 530 M€ lan dernier. Cette augmentation massive de crédits traduit toute l’attention portée à la rénovation énergétique et la volonté de massifier les rénovations globales, source d’économies d’énergie considérables.

Ces crédits contribuent en outre à créer les conditions d’un urbanisme d’avenir plus sobre, plus durable et source de développement qui, comme lont souvent rappelé les auditionnés, implique que la ville de demain est constituée à 80 % de celle d’aujourd’hui. La clef de voûte de lurbanisme de demain se situe ainsi dans la planification de la consommation des espaces, mieux ciblée, et la sobriété foncière, qui supposent toutes deux une révision en profondeur de notre modèle urbanistique, marqué depuis les années 1980 par l’étalement urbain et le mitage des territoires.

C’est afin d’accompagner cette transition urbaine et environnementale de nos territoires qu’est créé, sous la forme d’un guichet unique à la disposition des collectivités, un « fonds vert » abondé de 1,5 Md€ au nouveau programme 380. Une nouvelle fois l’État, volontariste, apporte son soutien aux collectivités pour assurer une réponse cohérente et collective aux défis qui se dressent devant nous.

Le contexte actuel de l’urbanisation est en effet marqué par un double défi : une construction neuve qui se heurte à nos impératifs collectifs de préservation des sols et la plus difficile acceptabilité sociale des projets immobiliers en densification.

Alors comment garantir l’accès de tous à un logement de qualité et garantir le développement de nos territoires à l’heure où ces impératifs mettent en péril l’équilibre économique des opérations ?

L’importance de ces défis et l’horizon temporel auxquels ils se posent mettent en évidence l’ampleur des changements nécessaires pour y répondre. Ils supposent en effet de faire évoluer en profondeur les outils juridiques, budgétaires et fiscaux dont nous disposons. Leur impact sur notre quotidien et sur notre organisation collective suppose en outre une réponse globale, de l’État mais également de l’ensemble des acteurs concernés.

Ces enjeux touchent avant tout les Françaises et les Français qui aspirent légitimement à un habitat de qualité et seront nécessairement impactés par les effets du changement climatique sur leur mode de vie et leur environnement.

Les mutations à venir font également figures de révolution copernicienne pour le secteur de la construction et de l’urbanisme, qui devra impérativement faire évoluer ses métiers, son modèle économique, les matériaux qu’il utilise et ses pratiques afin d’intégrer ces changements économiques et environnementaux.

Les territoires, enfin, seront à la fois objets et acteurs de ces transformations. Ce sont eux qui sont dès à présent amenés à mettre en œuvre, de manière progressive mais ambitieuse, les objectifs nationaux de lutte contre l’artificialisation des sols et de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. La physionomie de nos villes, de nos centres-bourgs, de nos campagnes s’en trouvera modifiée, tout comme les usages que nous en avons. Si cet objectif représente un défi pour les collectivités locales, il illustre aussi la confiance placée en elles pour le relever, avec le soutien de l’État.

 

Au terme de son analyse, votre rapporteur émet un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 109 et 135 de la mission « Cohésion des territoires ».

Numéro et intitulé du programme et de l’action

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2022/2023

(AE en M€)

(AE en M€)

(en %)

109  Aide à l’accès au logement

13 079

13 371

+ 2,2

01 – Aides personnelles

13 070

13 362

+ 2,2

02 – Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté

9

9

135  Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

530

803

+ 51,5

01 – Construction locative et amélioration du parc

17,5

43

+ 150

02 – Soutien à l’accession à la propriété

4,1

4,1

03 – Lutte contre l’habitat indigne

15,5

15,5

04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction

217

455

+ 109

05 – Soutien

29,4

35

+ 19

07 – Urbanisme et aménagement

 246

 250

+ 1,6

 

 


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   PremiÈRE PARTIE :
des crÉdits dynamiques face À la hausse
des coÛts du logement

I.   LE PROGRAMME 109 « AIDE À L’ACCÈS AU LOGEMENT »

Le programme « Aide à l’accès au logement » finance les aides accordées directement ou indirectement aux personnes qui rencontrent des difficultés pour accéder à un logement décent ou s’y maintenir durablement. En 2023, le programme devrait contribuer à hauteur de 13,4 Md€ de crédits budgétaires à cette politique publique dont le financement comprend, outre les financements de l’État, une participation des employeurs et les aides des collectivités territoriales en faveur de l’accès et du maintien des ménages dans leur logement. Ces crédits abondent le Fonds national d’aide au logement (FNAL), qui perçoit également environ 3,6 Md€ d’autres sources.

Pour accompagner les dépenses des locataires et renforcer les parcours résidentiels face à la hausse de l’inflation, le programme 109 connaît une progression forte, qui résulte essentiellement du dynamisme des aides au logement. En juillet dernier, notre Parlement a décidé de revaloriser par anticipation certaines composantes des APL pour mieux accompagner les ménages modestes face à la crise, tout en limitant l’évolution à la hausse des loyers ([1]).

L’évolution globale de l’enveloppe du programme 109 correspond à la hausse de l’action 01 (« Aides personnelles »), presque exclusivement constituée des dépenses d’intervention que constituent les APL.

(en euros)

 

LFI 2022

PLF 2023

ÉCART

AE=CP ([2])

AE=CP

AE=CP

Action 01 – Aides personnelles

13 079 400 000

13 362 000 000

+ 282 600 000

Action 02 – Information sur le logement et accompagnement des locataires

9 400 000

9 300 000

- 100 000

TOTAL PROGRAMME 109

12 439 300 000

13 079 400 000

+ 282 500 000

Source : Projet de loi de finances pour 2023, projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires ».

A.   l’APL en temps rÉEL, une rÉforme utile, qui prÉfigure la solidaritÉ À La source

1.   L’APL, une prestation très solvabilisatrice dont l’adéquation a été améliorée avec le versement en temps réel

Comme le rappelle la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), les aides personnelles au logement (APL), qui comprennent à la fois les aides personnalisées au logement (APL) et les allocations de logement familiale et sociale (AL), jouent un rôle essentiel pour solvabiliser les ménages modestes face aux dépenses de logement qui peuvent atteindre 25 % du revenu, et qui connaissent une augmentation du fait de l’inflation actuelle des charges récupérables.

Selon la Cnaf, le taux d’effort net de l’ensemble des ménages allocataires a été relativement stable entre 2020 et 2021. La ventilation de l’indicateur de performance 1.1 du programme 109 ([3]) permet d’observer la diversité des situations. Ainsi, en 2021, après perception des aides personnelles au logement, les ménages allocataires consacrent en moyenne 20,0 % de leurs revenus au paiement du loyer et des charges.

Simulations DE revenus (dont aides) depuis la revalorisation de juillet 2022

 

Zone I. Couple 2 enfants, 15 000 

Zone I. Isolé 1 enfant, 13 500 

Zone II. Couple sans enfant, 10 000 

 

APL locative

AL locative

APL locative

AL locative

APL locative

AL locative

Revenus d’activité nets

1 250 €

1 250 €

1 125 €

1 125 €

833 €

833 €

Prestations familiales

321 €

321 €

182 €

182 €

0 €

0 €

Prime d’activité

355 €

355 €

175 €

175 €

468 €

468 €

Total de ressources mensuelles

1 926 €

1 926 €

1 482 €

1 482 €

1 301 €

1 301 €

Loyer hors charges

449 €

757 €

407 €

680 €

354 €

500 €

Réduction de loyer de solidarité

non éligible

 

- 67 €

 

- 53 €

 

Forfait de charges

82 €

82 €

69 €

69 €

56 €

56 €

Taux d’effort brut

27,5 %

43,5 %

27,6 %

50,5 %

27,5 %

42,7 %

Base ressources

13 500 €

13 500 €

12 200 €

12 200 €

9 000 €

9 000 €

APL actuelle

           265 €

        369 

       241 €

      321 

         219 

         272 

Taux d’effort net

13,8 %

24,4 %

15,8 %

28,9 %

14,7 %

21,8 %

Source : ministère de la transition écologique, réponse au questionnaire budgétaire.

Ce taux d’effort net médian diminue lorsque la taille du ménage augmente : pour chaque type de famille (couple ou non), l’effort net des ménages décroît avec le nombre d’enfants. Par exemple, en 2021, le taux d’effort net médian s’élève à 27,5 % pour une personne isolée contre 8,9 % pour les familles monoparentales avec 3 enfants ou plus.

L’aide est également marquée par son caractère très peu stigmatisant et un taux de non-recours très faible, de l’ordre de 5 %. La réforme se traduisant par un versement contemporain des APL, qui a abouti en 2021, permet de limiter encore davantage le non-recours et d’adapter le versement des aides afin qu’elles évoluent plus rapidement en fonction de la variation des capacités financières des ménages allocataires.

La réforme du versement contemporain des APL, intervenue en janvier 2021 (voir encadré), a également permis de mieux cibler les ménages bénéficiaires en repérant plus promptement les hausses de revenus qui permettent la sortie du dispositif. Tout en préservant les ressources de certains publics vulnérables, comme les étudiants, la réforme a également permis une économie de l’ordre de 1,1 Md€.

La réforme alimente aussi la connaissance par les divers acteurs de l’état du parc de logements et des conditions de vie de ses locataires, ce qui peut être utile notamment en vue de la lutte contre l’habitat indigne par la mise en place de l’autorisation préalable de mise en location (APML, dite « permis de louer »), à laquelle la CAF participe. La CAF peut en outre recevoir des signalements sur l’indécence des logements, et un travail est en cours avec le ministre chargé du logement sur un signalement partagé quant à la décence des logements.

La réforme du versement en temps réel des APL, une réussite

La mise en œuvre de la réforme du versement contemporain des aides au logement, dite réforme des « APL en temps réel », a eu lieu au 1er janvier 2021. Cette réforme, qui se situe dans la lignée de la réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu et qui devait initialement entrer en vigueur en 2020, a consisté à ajuster la méthode de calcul des aides au logement afin que les revenus pris en compte pour déterminer leur niveau soient ceux de l’année n et non plus ceux de l’année n  2.

Cette réforme permet ainsi d’actualiser de manière automatique, tous les trimestres, les ressources des bénéficiaires afin de déterminer de façon plus juste le montant d’APL à verser en fonction de la réalité des ressources perçues. Le versement en temps réel des APL permet donc des versements au plus près des droits des allocataires.

La réforme a fait l’objet de plusieurs ajustements visant à mieux prendre en compte la situation des personnes les plus fragiles :

– les ressources des étudiants sont prises en compte sur la base d’un forfait, de sorte que la réforme ne modifie pas leur APL à situation inchangée et améliore l’APL des étudiants salariés (en d’autres termes, quel que soit le montant de leur rémunération, leur APL ne varie pas, contrairement au système précédent) ;

– les apprentis ont bénéficié d’un abattement sur leurs ressources ;

– les titulaires d’un contrat de professionnalisation ont bénéficié également de cet abattement en septembre, avec effet rétroactif pour les nouveaux allocataires ;

– pour les jeunes actifs, par ailleurs, le groupe Action Logement a proposé une aide gratuite de 1 000 euros pour aider ceux dont les revenus bruts sont compris entre 30 % (467 euros) et 110 % (1 711 euros) du SMIC brut (1 554,58 euros au 1er janvier 2021) à s’installer dans leur logement ;

– la conservation pendant un an des droits pour les allocataires voyant leur allocation baisser du fait d’une hausse de leurs revenus entre n  2 et n.

2.   L’APL en temps réel, première étape vers la solidarité à la source

La Cnaf a souligné que le niveau d’anomalies aujourd’hui constaté est inférieur à celui qui prévalait avant la réforme. Au-delà des difficultés, notamment informatiques, connues au moment de la mise en œuvre de la réforme, la qualité du service n’a donc pas été affectée sur le long terme, au point d’être même meilleure aujourd’hui, ce dont se réjouit votre rapporteur.

La caisse a aussi souligné que cette réforme avait permis d’éprouver la capacité de la branche Famille à mettre en œuvre le dispositif de connaissance des ressources mensuelles (DRM), qui sera un fondement de la future réforme de la solidarité à la source.

Pour l’heure, les retours d’expérience de la réforme des APL servent à la Cnaf pour mieux préparer l’avenir de ces prestations, avec notamment l’expérimentation dans cinq départements du versement des deux autres aides qu’elle gère dans les mêmes modalités. Cette réforme doit permettre de diminuer nettement, voire d’éliminer, le non-recours aux aides qui seraient à terme versées automatiquement, et inversement de limiter les cas de fraude ou d’erreur. Des problématiques concernent la difficulté de connaître les publics visés, qui ont des ressources irrégulières ou composites rendant difficile la connaissance native de celles-ci, ce qui est le cas des travailleurs indépendants et des sommes versées au titre des pensions alimentaires, par exemple.

La solidarité à la source permettra également de mettre fin aux alertes qui demeurent sur l’exactitude des simulations d’APL proposées dans les simulateurs en ligne, et il importe que les usagers aient conscience que ces simulations ne fonctionnent pas avec l’ensemble des facteurs pris en compte dans la détermination de la somme à verser.

Votre rapporteur estime que la construction d’un modèle de solidarité à la source, véritable mesure de progrès social et de justice sociale constitue l’occasion d’optimiser l’adéquation des aides au logement à leurs différents publics en corrigeant des situations parfois injustes. En particulier, il semble nécessaire de s’interroger, en ce qui concerne l’APL, sur le cas des étudiants bénéficiaires, dont la prestation dépend du montant forfaitaire représentatif des ressources des étudiants, alors que leurs parents appartiennent aux déciles supérieurs de la distribution des revenus.

Il pourrait être plus cohérent avec la structure de l’aide, qui est d’ores et déjà conditionnée aux ressources des allocataires, que les ressources des parents des étudiants bénéficiaires soient également pris en compte dans le calcul de l’aide qui leur est versée. Les éventuelles économies budgétaires générées par un tel dispositif pourraient par exemple être mises à profit pour mieux accompagner ces mêmes ménages des déciles supérieurs dans leurs chantiers d’amélioration énergétique (voir partie sur la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ ») et de participer à renforcer les aides attribuées aux étudiants boursiers, voire à augmenter les plafonds de ressources conditionnant l’attribution desdites bourses.

Afin de garantir qu’une telle réforme ne cause pas d’effets indésirables pour certains ménages situés dans les déciles intermédiaires des revenus, où le foyer parental est situé au-dessus du plafond de ressources des bourses de l’enseignement supérieur sur critères sociaux, sans pour autant pouvoir subvenir à la dépense de logement de l’étudiant en l’absence de l’APL. Votre rapporteur propose d’étudier la possibilité de compenser ces pertes grâce aux économies réalisées par un élargissement en direction de ces ménages des bourses de l’enseignement supérieur et par un rétablissement du statut du boursier situé à l’échelon 0 de la bourse, qui, sans percevoir d’aide financière directe, bénéficiait de diverses exonérations de frais au titres dépenses étudiantes.

L’échelon 0 des bourses de l’enseignement supérieur

Durant l’année universitaire 2020-2021, près de 750 000 étudiants ont perçu une bourse sur critères sociaux (BCS) du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Délivrée en fonction de leur situation financière et familiale, la part de boursiers parmi les étudiants présents au sein des formations éligibles a augmenté de 1,6 point entre les années universitaires 2019-2020 et 2020-2021, pour atteindre 38,4 %. Pour l’année 2021, le montant annuel total des BCS s’établit à 2,25 Md€.

Le montant des bourses est fixé annuellement par arrêté en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation, et s’échelonne de 1 084 euros à l’échelon 0 bis (1 301 euros en outre-mer) à 5 965 euros à l’échelon 7 (7 158 euros) ([4]).

L’échelon 0, qui existait jusqu’à l’année universitaire 2016-2017, année qui a vu sa fusion avec l’échelon 0 bis ([5]), n’ouvrait pas droit à la perception d’une bourse mais permettait une exonération des droits d’inscription et de contribution vie étudiante et de campus (CVEC) et accordait une priorité pour l’attribution d’un logement universitaire du centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous).

B.   UN SOUTIEN AUX locataires MAINTENU ET UNE accession À la propriÉtÉ À PROTÉGER

Le programme 109 porte également les actions de connaissance du parc locatif, notamment par le réseau des associations départementales d’information sur le logement (Adil) et d’autres actions de soutien pour les locataires et les bailleurs. La garantie des loyers impayés auparavant inscrite à ce programme est désormais prise en charge par le groupe Action Logement au titre du visa pour le logement et l’emploi (Visale).

1.   Une stabilité du nombre d’impayés malgré la crise grâce au soutien apporté aux locataires

Le contexte de hausse de l’inflation a fait craindre à de nombreux acteurs une augmentation du nombre d’impayés de loyers et de charges, ces postes représentant un pourcentage important du budget des ménages. À ce jour, ces appréhensions ne semblent pas avoir été étayées par les données provenant des différentes autorités concernées.

Pour sa part, la Caisse nationale des allocations familiales, dont les estimations sont fondées sur les flux d’information émanant du réseau des CAF, a évoqué auprès de votre rapporteur un niveau d’environ 280 000 foyers en situation d’impayés dans le parc locatif social et privé. À titre de comparaison, ces chiffres s’étaient élevés au-delà de 300 000 en 2020 avant de descendre à 290 000 en 2021. En réaction, après avoir déployé 20 M€ en 2020 et 40 M€ en 2021 pour des aides individuelles d’urgence aux locataires en difficulté, la caisse a maintenu ces dispositifs ponctuels.

Selon le ministère chargé du logement en avril 2022, aucune alerte spécifique n’avait été faite par le réseau des CAF ou celui des Adil sur ce sujet. L’observatoire des impayés, mis en place il y a peu par la ministre Emmanuelle Wargon, se tient prêt à se réunir en cas de difficulté, notamment sur les charges et les factures.

2.   La nécessaire adaptation du calcul du taux d’usure pour protéger l’accession à la propriété

L’environnement macroéconomique actuel, qui a vu de fortes hausses des taux directeurs de la Banque centrale européenne qui seront amenées à se poursuivre en 2023 ([6]), a soulevé la question de l’effet de ces hausses, après une décennie de taux très bas, sur l’accès au crédit et sur l’accession à la propriété.

De l’avis général des personnes interrogées, la hausse du taux d’usure ([7]) décidée au 1er juillet 2022 a été insuffisante au regard de la hausse des taux dont doivent s’acquitter les institutions bancaires pour emprunter, qui sont appuyés sur les taux des obligations assimilables du Trésor à dix ans. La faiblesse de l’écart entre ces taux engendre dès lors pour les institutions bancaires une réticence croissante à octroyer des prêts immobiliers, ce qui a pour effet à son tour de restreindre l’accès au crédit pour les accédants, et notamment les primo-accédants, en particulier ceux d’origine modeste.

Le taux d’usure est une protection majeure pour les emprunteurs, qui permet d’éviter en France les situations parfois vues à l’étranger, où des emprunteurs fragiles empruntent à des taux très élevés. À ce titre, il ne saurait être question de remettre en cause l’efficacité de cette protection. Votre rapporteur rappelle toutefois qu’il ne faudrait pas pour autant qu’il devînt, involontairement, un facteur de raréfaction du crédit. C’est cependant, à en croire de nombreux acteurs, ce qui se produit actuellement, y compris pour des profils d’emprunt solides, qui n’atteignent pas le taux d’endettement maximal. Selon les notaires ou encore les promoteurs, cette situation créerait un risque de blocage du marché immobilier dans les prochains mois.

La direction générale du Trésor, interrogée, ne disposait pas de données précises sur le nombre de refus de prêts qui résulteraient directement du mode de calcul taux d’usure mais a invité à considérer avec précaution les estimations circulant à ce sujet dans la presse. Elle a rappelé que la production de crédit immobilier est restée stable en juillet 2022, tandis que la remontée des taux se poursuivait. L’encours de crédit immobilier s’élevait alors à 1 259 Md€, ce qui représente une hausse de + 6,4 % sur un an, après + 6,6 % en juin, avec 18,8 Md€ de crédits nouveaux (hors renégociations) accordés en juillet. En revanche, les estimations avancées pour le mois d’août prévoyaient une baisse de la production.

La part des primo-accédants dans l’accès au crédit reste à ce jour élevée (47 % à la fin juin, pour une moyenne de 46 % depuis 2014). An sein des primo‑accédants, la part des primo-accédants modestes, au revenu annuel inférieur à 30 000 euros, diminue toutefois de façon plus nette (21 %, pour une moyenne depuis janvier 2020 moyenne de 24 %).

Il convient toutefois de souligner qu’en dépit de la hausse des taux des crédits et des pertes de pouvoir d’achat éprouvées dues à l’inflation, le marché immobilier reste dynamique. À fin juin 2022, on compte 1,15 million de transactions sur les douze derniers mois ([8]). Si le volume de transactions est en léger repli par rapport au pic historique du troisième trimestre de 2021, le marché de l’ancien reste néanmoins très dynamique en 2022.

Afin de s’assurer que le calcul du taux d’usure ne conduise pas à exclure les Français, notamment modestes, de l’accession en raréfiant leur accès à l’emprunt, votre rapporteur a écrit, avec Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques, un courrier au gouverneur de la Banque de France pour exprimer cette préoccupation.

Au-delà de la question du mode de calcul du taux d’usure, d’autres questions se posent lorsqu’il s’agit d’apprécier l’accession à la propriété des personnes modestes. Les dispositifs fiscaux, notamment le prêt à taux zéro (PTZ), constituent les outils principaux pour l’atteinte de cet objectif depuis la suppression de l’APL accession en 2017 (voir commentaire sur les dispositifs fiscaux en seconde partie du présent rapport).

Les sociétés coopératives d’Hlm ont également invité à réfléchir à des adaptations permettant de mieux inciter à l’accession sociale à la propriété. Ils proposent notamment de pondérer de manière différenciée les prêts octroyés dans le portefeuille des établissements de prêt. Ceux-ci ont en effet le droit de déroger aux règles de solvabilité, et notamment à la règle prévoyant que le taux d’emprunt ne peut dépasser un seuil prudentiel de 35 % des ressources, pour 15 % de leur portefeuille de prêts. Il est ainsi proposé de comptabiliser les prêts en accession sociale pour un demi-prêt, de façon à inciter les banques à en prendre en charge une plus grande quantité. S’il convient évidemment de demeurer vigilant quant à la solvabilité des ménages emprunteurs, votre rapporteur considère qu’un tel assouplissement contribuerait à soutenir l’accession sociale à la propriété en en augmentant le nombre de bénéficiaires, sans remettre pour autant en cause les mécanismes de protection qui existent en matière de financement.

II.   LE PRogramme 135 « urbanisme, territoires et amÉlioration de l’habitat »

Le programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat », qui regroupe les crédits relatifs au logement, à la construction, à l’urbanisme et à l’aménagement, est un des outils majeurs de la mise en œuvre opérationnelle des politiques du logement et de l’urbanisme. Il comporte notamment les crédits d’aménagement et d’accompagnement des collectivités pour un développement durable des territoires, les crédits dits d’aides à la pierre, dont l’utilisation fait intervenir le Fonds national des aides à la pierre (FNAP), et les crédits d’aide à l’amélioration et à la rénovation énergétique des logements, via les programmes de l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Ces crédits sont complétés par des aides fiscales ciblées.

Au total, les crédits du programme connaissent une hausse significative, aux alentours de 50 %, principalement due à une hausse des crédits de l’Anah (voir tableau ci-dessous).

(en euros)

 

LFI 2022

PLF 2023

ÉCART

ÉCART

FdC et AdP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

 %

AE

Action 01 – Construction locative et amélioration du parc (dont FNAP)

17 500 000

17 500 000

42 988 760

17 988 760

+ 25 488 760

+ 488 760

+146 %

+3 %

2022 535M
2023 764M

Action 02 – Soutien à l’accession à la propriété

4 100 000

4 100 000

4 100 000

4 100 000

-

-

-

-

0

Action 03 – Lutte contre l’habitat indigne

15 500 000

15 500 000

15 500 000

15 500 000

-

-

-

-

0

Action 04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction (dont Anah)

217 400 000

217 400 000

455 303 800

455 303 800

+ 237 903 800

+ 237 903 800

+ 109 %

+ 109 %

0

Action 05 – Soutien

28 693 401

28 693 401

35 308 401

33 008 401

+ 6 615 000

+ 4 315 000

+ 23 %

+ 15 %

0

Action 07 – Urbanisme et aménagement

246 347 932

246 347 932

249 874 909

254 874 909

+ 3 526 977

+ 8 526 977

+ 1 %

+ 3 %

0

Programme 135

529 541 333

529 541 333

803 075 870

780 775 870

+ 273 534 537

+ 251 234 537

+ 52 %

+ 47 %

764 000 000

Source : Projet de loi de finances pour 2023, projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires ».

La mise en œuvre du programme 135, si elle est pilotée par la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), est largement déconcentrée, s’appuyant sur un grands nombre d’opérateurs, notamment les établissements publics d’aménagement (EPA) et les établissements publics fonciers (EPF) de l’État, qui connaissent une augmentation de leurs ressources du fait de la hausse de 15 M€ du plafond de taxe spéciale d’équipement (TSE), pour atteindre 310 M€ ([9]).

Deux autre opérateurs, qui en dépendent, connaissent une action dynamique qui justifient des trajectoires en hausse de la subvention pour charge de service public : la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), l’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols). Le prélèvement effectué sur la trésorerie du groupe Action Logement ([10]) a permis toutefois d’exempter la CGLLS d’un abondement supplémentaire du FNAP, cette opération constituant à cet égard un transfert financier entre bailleurs sociaux.

A.   La montÉe en puissance de l’Anah au service de la transformation de l’habitat

L’Agence nationale de l’habitat (Anah) est un opérateur du programme 135 placé sous la tutelle de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP). Elle déploie, dans le cadre de son mandat historique, un grand nombre d’actions en faveur de la requalification de l’habitat dégradé, à l’instar des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH), ou encore le conventionnement du logement locatif en faveur des personnes modestes.

Le programme 135 verse à l’Anah une subvention pour charge de service public qui prend en charge ses dépenses de fonctionnement et de personnel, ainsi qu’une partie des primes qu’elle verse aux ménages.

1.   Des aides à la rénovation énergétique consolidées et amplifiées

Depuis 2020, l’Anah est chargée du déploiement de la prime de transition énergétique à destination des ménages qui engagent des travaux de rénovation thermique de leur logement, distribuée sous l’appellation « MaPrimeRénov’ » (MPR). Cette augmentation de l’activité de l’Anah, qui se poursuivra dans les exercices à venir, induite par la massification des aides à la rénovation énergétique, la mise en place du service public de la rénovation de l’habitat « France Rénov’ » et la création à venir de « MaPrimeAdapt’ » (MPA) nécessite la mobilisation de moyens opérationnels adaptés.

La prime de transition énergétique, qui s’élèvera en 2023 à 2,4 Md€ ([11]) est abordée plus longuement dans la seconde partie du présent rapport. Toutefois, il faut noter que l’abondement principal de MPR au titre du programme 174 est complété par l’intégration au programme 135 de la dépense précédemment portée au titre du programme 382 « Plan de relance », qui n’existe plus. C’est pourquoi la contribution du programme 135 à l’Anah est rehaussée pour atteindre 368,9 M€ en 2023 afin de porter l’ambition sur l’ensemble des aides à la rénovation énergétique globale délégables portées par l’agence.

La contribution augmentée du programme 135 à l’Anah doit également permettre de sécuriser la trajectoire financière globale de l’opérateur, notamment concernant les enveloppes de fonctionnement, de personnel et d’investissement. Là où l’agence aidait 75 000 ménages par an en 2019, elle en a aidé 750 000 en 2021. C’est aussi le bilan qu’en a tiré le ministre chargé de la ville et du logement, qui s’est réjoui lors de son audition par votre rapporteur de la montée en charge du dispositif MPR, qui a permis, sur deux ans, de contribuer à la réhabilitation de 1,5 million de logements. Votre rapporteur tient à saluer la réussite du dispositif, permettant de constituer un socle important de propriétaires et de logements qui sera déterminant pour parvenir à la rénovation globale des logements.

Total des crÉdits de l’Agence nationale de l’habitat

(en euros)

 

LFI 2022

PLF 2023

Écart

P 174 – Action 02 – ligne MPR

1 700 000 000 AE

1 390 000 000 CP

2 450 000 000 AE

2 300 000 000 CP

+ 44 %

+ 65 %

P 135 – Action 04 – ligne SCSP Agence nationale de l’habitat

170 000 000 AE

170 000 000 CP

369 000 000 AE

369 000 000 CP

+ 117 %

P 362 – Action 01 – ligne MPR

565 000 000 CP

213 000 000 CP

– 62 %

Total des crédits

2 435 700 000 AE

2 325 700 000 CP

2 819 000 000 AE

2 882 000 000 CP

+ 16 %

+ 24 %

Source : Projets de lois de finances pour et 2022 et 2023, projets annuels de performance des missions « Écologie, développement et mobilité durables », « Cohésion des territoires » et « Plan de relance ».

2.   La transformation du « Louer abordable » en « Loc’Avantages » pour toucher un public plus large

En parallèle de la forte montée en charge de l’aide à la transition énergétique de l’habitat, l’Anah a poursuivi son action historique avec des moyens sécurisés. Comme l’a souligné sa directrice générale lors de son audition par votre rapporteur, le budget de l’agence a été multiplié par cinq lors de la précédente législature, tandis que ses effectifs ont été multipliés par deux et son action par dix.

En janvier 2022, l’Anah a fait évoluer le dispositif de conventionnement pour l’investissement locatif appelé « Cosse » ou « Louer abordable », créé en 2017 ([12]). Ce dispositif est un levier important pour permettre des parcours résidentiels. Pour les bailleurs, selon l’agence, l’étude des taux de rentabilité montre que les opérations de conventionnement fonctionnent, même dans les grandes villes. La bonne rentabilité de ces projets, et donc leur faisabilité, provient ainsi de l’addition de la prise en charge des travaux, de l’avantage fiscal, et de la hausse de la valeur vénale du logement.

Au 1er janvier 2022, le dispositif a été transformé, et s’appelle désormais « Loc’Avantages ». Cette nouvelle version vise à réduire la durée de conventionnement pour mieux attirer les investisseurs, et à simplifier le dispositif fiscal en passant par un crédit d’impôt plutôt qu’un amortissement du revenu annuel. Votre rapporteur se réjouit de ces évolutions et souhaite que la notoriété de cet instrument, qui fournit une alternative dans les parcours résidentiels pour les moins aisés et un investissement sécurisé pour les propriétaires, s’améliore.

3.   « MaPrimeAdapt’ », une réponse volontariste à venir au besoin d’adaptation du parc au vieillissement des occupants

L’Anah apporte aussi son concours à l’adaptation du logement au vieillissement, une thématique de plus en plus importante au sein du parc privé comme social compte tenu de l’évolution démographique et avec elle de l’enjeu du maintien à domicile. Dans le parc privé, l’adaptation des logements au vieillissement doit être mise en avant et gagne à être pensée en même temps que l’adaptation du logement au changement climatique.

C’est pourquoi votre rapporteur s’est réjoui de l’avancée des travaux préparatoires de l’Anah en vue du déploiement d’une nouvelle prime d’adaptation du logement aux personnes âgées ([13]), qui sera distribuée à compter de 2024 sous le nom « MaPrimeAdapt’ ». L’actuelle aide « Habiter facile » à destination de ces travaux a permis en moyenne d’accompagner 20 000 ménages par an, ce qui ne suffit pas, selon la directrice générale, à répondre à une demande de plus en plus dynamique. L’ambition de l’agence au cours des dernières années a donc été de massifier cet apport, ce qui a permis de toucher 26 000 ménages en 2021, avec un objectif de 50 000 ménages en 2023 et de 100 000 ménages par an en 2024.

À son lancement, comme MPR lors de son lancement en 2020, « MaPrimeAdapt’ » ne concernera que les quatre premiers déciles de revenus, le taux de prise en charge se situant à 50 % pour les ménages modestes et 70 % pour les ménages très modestes. Contrairement à MPR, il s’agira d’une aide à la pierre, et l’Anah souligne qu’un grand nombre de départements et d’intercommunalités se sont déjà engagées à accompagner financièrement cette démarche de mise en accessibilité. Un partenariat a été mis en place entre l’Anah et la Caisse nationale d’assurance vieillesse pour avancer sur ce sujet.

En ce qui concerne le parc social, l’Union sociale pour l’habitat a rappelé que le modèle Hlm n’a pas été originellement conçu pour que les habitants y vieillissent, ni en termes réglementaires ni dans son organisation physique. Or les statistiques montrent que dans leur grande majorité, les personnes qui ont plus de cinquante ans et résident dans le parc social ne le quitteront pas, car leurs ressources sont peu dynamiques – en-dehors du cas de l’héritage – et leur accès au crédit limité. Il importe donc de penser de façon massive l’adaptation des logements sociaux au vieillissement de leurs occupants. Cela d’autant plus que les personnes âgées souhaitent souvent demeurer dans leur quartier.

Les résidences pour personnes âgées ne constituent pas toujours la réponse appropriée à ce phénomène car elles peuvent ne pas être adaptées aux publics du parc social, à la fois en termes d’âge d’accueil, de revenus, et de quartiers d’implantation. Pour cette raison, votre rapporteur estime qu’il est essentiel de lancer une réflexion sur les moyens de mieux adapter le parc social traditionnel en permettant de maintenir sur les lieux les occupants à mesure qu’ils vieillissent, ce qui exige de repenser l’adaptation des lieux et l’accès aux services. De ce point de vue, les bailleurs interrogés assurent que, bien qu’incapables de se substituer à la médicalisation proposée dans un établissement pour personnes âgées dépendantes, ils sont en mesure de proposer un accompagnement et des services de qualité.

B.   Action logement et l’Anru en soutien À la transition Écologique et sociale de l’habitat

1.   La participation d’Action Logement au renforcement du FNAP

Le Fonds national des aides à la pierre a pour mission d’orienter la construction neuve là où elle est nécessaire. Dans le cadre du protocole d’accord signé par les organismes Hlm, le Gouvernement, le groupe Action Logement et la Banque des territoires qui détaille les modalités du financement de l’objectif de production de 250 000 logements sociaux en deux ans, le FNAP avait mobilisé en 2021 plus de 1 Md€ de subventions sur la période 2021-2022, intégrant 700 M€ de contribution exceptionnelle d’Action Logement et 20 M€ d’euros issus du plan de relance, dont 565 M€ pour la seule année 2021 (budget d’intervention en hausse de 16 % par rapport à 2020).

L’article 18 du présent PLF prévoit une nouvelle mise à contribution du groupe Action Logement, afin d’abonder, à hauteur de 300 M€, le Fonds national des aides à la pierre (FNAP). Pour rappel, il a été décidé en 2018 que la CGLLS verserait au FNAP une fraction des cotisations collectées, s’élevant à 375 M€.

Conformément au pacte d’investissement conclu en avril 2019 entre l’État, les bailleurs sociaux, la Caisse des dépôts et consignations et Action Logement, le versement de la CGLLS au FNAP a été réduit à 75 M€ en 2020, 2021 et 2022, Action Logement versant par ailleurs 300 M€ pour compenser cette perte. En contrepartie, la CGLLS perçoit 300 M€ de la part des bailleurs. Cette disposition est reconduite en PLF 2023, constituant à ce titre un transfert entre bailleurs sociaux.

En plus de cette contribution, la stratégie de financement d’Action Logement Services s’est adaptée pour participer à titre exceptionnel, à hauteur de 1,8 Md€, aux financement de certaines politiques publiques, dont 1,5 Md€ pour financer le Fonds national d’aide au logement (FNAL). À ce titre, le président du groupe a rappelé au rapporteur, à l’occasion de son audition, que le déséquilibre entre les emplois et les ressources génère pour le groupe plusieurs conséquences préoccupantes :

– la consommation de sa trésorerie, dont le montant a été divisé par deux entre 2019 et 2021 ;

– l’augmentation de son degré d’endettement, qui est aujourd’hui de l’ordre de 11 Md€, par voie d’émissions obligataires (voir schéma), sujet d’autant plus sensible que l’Insee a récemment requalifié le groupe en l’intégrant au sein des administrations publiques au sens de Maastricht ;

– un déficit d’exploitation (subventions et intérêt de la dette), qui consomme ses fonds propres.

Le financement obligataire du groupe Action Logement

Source : Action Logement Groupe, réponse au questionnaire du rapporteur.

Le plan d’investissement volontaire du groupe Action Logement

Dans le cadre de la convention quinquennale 2018-2022 qui lie l’État et le groupe Action Logement, le groupe s’est engagé en 2019 à un plan d’investissement volontaire (PIV) de ses ressources. Le PIV représente 9 Md€ d’investissement sur la période 2019-2022. Un investissement équilibré pour le logement des salariés du parc privé (3,6 Md€), du parc social (4,4 Md€) et du parc intermédiaire (1 Md€).

Le 15 février 2021, les partenaires sociaux d’Action Logement ont signé avec les ministres chargés du logement et du budget, un avenant à la convention quinquennale et au PIV. Cet accord comporte quatre axes, dont le soutien supplémentaire à la production de 250 000 logements sociaux et abordables en deux ans pour 1,17 Md€, dont 250 M€ en prêts et 450 M€ en subventions, pour la production de logements abordables.

Parmi les autres actions de l’avenant, l’élargissement de la garantie Visale à l’ensemble des salariés du secteur privé et agricole de plus de trente ans, gagnant moins de 1 500 euros nets par mois pour favoriser leur accès à un logement locatif dans le secteur privé.

Enfin, l’avenant a permis la mobilisation de 1,4 Md€ supplémentaires pour intensifier les opérations de rénovation urbaine et de mixité sociale portées par l’Anru dans les quartiers prioritaires, qui permettra avec la contribution de l’État et du mouvement Hlm de porter le montant du NPNRU de 10 à 12 Md€ de concours financiers.

Le déploiement du PIV a été en partie financé par quatre émissions obligataires réalisées dans le cadre du programme EMTN 100 % durables de 6,2 Md€, pour un montant total de 4,25 Md€ sur des maturités de 10 à 20 ans.

L’Équilibre emplois-ressources d’ALS sur la pÉriode 2021-2022

Source : Action Logement Groupe, réponse au questionnaire du rapporteur.

L’ensemble des dépenses budgétaires de l’État en faveur de la production du logement social passent depuis 2016 par le FNAP. Ces dépenses n’intègrent pas les abandons de recettes conséquents, notamment les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée et l’exonération de taxe foncière. Le FNAP est financé en ressources propres par la majoration du prélèvement effectué au titre des obligations SRU, par des cotisations de la CGLLS, et historiquement par une ligne budgétaire du programme 135. Progressivement, cette ligne s’est éteinte, remplacée par une majoration de la cotisation des OLS puis par un prélèvement opéré sur Action Logement en 2020-2022, qui permet de minorer le montant doté par les bailleurs sociaux. Ce système est privilégié à nouveau pour 2023.

En 2023, le FNAP bénéficiera d’un abondement de 537 M€ d’offres nouvelles et d’un supplément de 200 M€, consacré à la rénovation énergétique du parc social, cette dotation nouvelle provenant pour sa part de l’État. Cette enveloppe poursuit l’initiative lancée dans le cadre du plan de relance de 2020, qui avait vu un fonds de réhabilitation du parc social abondé de 500 M€ pour les années 2021 et 2022, dans l’attente de la prochaine convention quinquennale 2023-2027 entre l’État et Action Logement, dans le cadre de laquelle la question du financement des aides à la pierre constituera un enjeu important.

Selon la direction du budget, les crédits du FNAP augmentent depuis 2016, passant de 300 M€ à 530 M€ en offre nouvelle. Les aides du FNAP sont fléchées pour la production en prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) et en PLAI adapté. Pour les logements en prêt locatif à usage social (PLUS), seule peut être prise en charge une part de la surcharge financière de l’opération liées à des coûts fonciers.

2.   La sécurisation nécessaire des financements à destination de l’Anru

Dans le cadre de la dernière convention quinquennale entre l’État et le groupe Action Logement, amendée par voie d’avenant en 2022, les ressources de l’Anru sur la totalité de la période du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) doivent s’élever à 10,8 Md€ en équivalent-subvention. Sur la durée du programme (jusqu’en 2031), le groupe Action Logement abondera à hauteur de 6,8 Md€, les bailleurs sociaux par l’entremise de la CGLLS de 2,7 Md€, le solde (1,3 Md€) devant provenir de versements du programme 147 de l’État.

La directrice générale de l’agence a souligné qu’après une période de programmation et conception qui s’est déroulée depuis 2018 ayant nécessité peu de décaissements, se joue actuellement le passage en phase opérationnelle qui nécessitera, à échéance de 2024-2025, des décaissements de l’ordre de 1 Md€/an, avec un décaissement total attendu d’entre 4,5 Md€ et 5,3 Md€ sur la période 2023‑2027. Le ministre chargé de la ville et du logement a affirmé que les versements de l’État augmenteraient dans cette perspective.

La trésorerie actuelle de l’agence étant de l’ordre de 1 Md€, le besoin global de financement par l’ensemble des financeurs pour le quinquennat à venir est d’entre 3,5 et 4,3 Md€. Votre rapporteur estime qu’une bonne visibilité est absolument indispensable sur la provenance et la régularité de l’arrivée de ces fonds, afin de poursuivre l’habitude institutionnelle à l’Anru qui est de ne pas se trouver en défaut (sachant que l’agence n’emprunte pas).

À ce jour, le groupe Action Logement a versé 1,2 Md€, tandis que l’État a apporté 92 M€ (par rapport à une attente en 2018 de 300 M€), dont 15 M€ au titre du présent exercice budgétaire (ces crédits étant portés au programme 147). La direction du budget, interrogée à ce sujet, a assuré que la trajectoire d’abondement se redresserait en 2024 et 2025, lors de l’entrée en phase opérationnelle, pour permettre la pérennité structurelle de l’agence. Il importe ainsi de veiller à ce que ce sous-abondement régulier ne se systématise pas et d’être vigilant à ne pas prendre de retard dans ce financement. À cet effet, votre rapporteur estime qu’il serait préférable, pour tenir les engagements de l’État, de redresser le montant de ses apports à l’Anru dès le prochain budget. Il s’agirait là d’un signal positif à l’attention de la politique de la ville dans un contexte où les résidents des quartiers prioritaires sont les plus affectés.


—  1  —

 

   SECONDE PARTIE :
La nÉcessaire adaptation de la chaÎne de production pour garantir l’AccÈs de tous À un logement de qualitÉ et un urbanisme en phase avec les impÉratifs environnementaux

Dans une période marquée par de nombreuses difficultés pesant sur le pouvoir d’achat des Français, l’État reste fermement engagé en faveur de l’accompagnement des parcours résidentiels, de la création d’une offre adaptée à chaque étape de ces parcours et de l’augmentation de l’offre de logements abordables pour tous. Cet effort repose au premier chef sur une mutation de la production de logements, au-delà des défis qui marquent aujourd’hui la filière, pour s’adapter à la transition écologique.

I.   La production de logements face À une sÉrie de dÉfis majeurs

Le besoin de logements restera élevé sur la décennie qui vient. De manière plus générale, les besoins en logements sont corrélés en premier lieu à des facteurs démographiques qui, en France, ne laissent pas penser à une baisse des besoins nouveaux à moyen terme. Les déterminants mesurables, notamment les soldes naturel et migratoire et le desserrement des ménages, se maintiendront encore à moyen terme à un niveau élevé, dans des territoires déjà marqués par une tension immobilière prononcée.

Selon la plupart des acteurs rencontrés, les résultats des dernières années en matière de production de logements ne sont pas à la hauteur des besoins, situation qui est d’autant plus grave dans les zones tendues. Cette observation avait déjà mené la commission Rebsamen à faire un certain nombre de préconisations en fin d’année 2021 ([14]).

Un certain nombre d’acteurs auditionnés ont mis l’accent sur l’augmentation significative du nombre de demandeurs de logement social depuis une dizaine d’années, atteignant aujourd’hui 2,3 millions de demandeurs, comme l’a souligné le porte-parole de l’association Droit au logement. Le président d’Action Logement, de son côté, a cité les huit ans d’attente nécessaires pour obtenir un logement social en Île-de-France, contre 5,5 ans encore il y a quelques années.

L’évolution de l’offre de logements, malgré les efforts du législateur et des gouvernements successifs, continue de sembler insuffisante pour répondre à cette évolution qui s’accentue du fait du contexte.

A.   le bÂtiment est CONFRONTÉ À une gageure Économique et sociale

Depuis trois ans, l’actualité est très défavorable à la santé du secteur du bâtiment. Ayant réussi à résister même aux conséquences à l’arrêt des chantiers au moment du confinement de mars 2020, le secteur a montré sa résilience mais la hausse des coûts de l’énergie et des matériaux de construction le met à nouveau en difficulté. À plus long terme, des problèmes de recrutement qui renvoient à une absence d’attractivité du secteur doivent aussi être résolus.

1.   Une conjoncture compliquée, source de préoccupations sur la situation du BTP

La perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales en 2021, renforcée ensuite par le déclenchement de la guerre en Ukraine, a occasionné des difficultés dans le secteur du bâtiment. Ainsi, en septembre 2022, 31 % des entreprises du bâtiment déclarent des difficultés d’approvisionnement et de hausses des coûts ([15]). Ces difficultés conjoncturelles s’ajoutent aux difficultés de recrutement, plus structurelles pour le secteur.

Dans une note de conjoncture mensuelle publiée en juillet de cette année, l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (IEIF) a indiqué que le choc des prix de l’énergie est couvert au moins partiellement en 2022 par des contrats à terme, mais qu’en 2023, le choc pourrait être plus important. Selon la DHUP, dans le bâtiment en général, la transmission du choc de coûts aux prix des devis se fait de façon très progressive.

Au mois d’août, l’indice BT01 a augmenté de + 8,3 % sur un an et de + 12,4 % sur deux ans. L’indice BT01 progresse donc 1,7 fois plus vite que l’inflation générale depuis la fin 2020, cette hausse affectant les prix pour les clients finaux via l’indexation des contrats. L’inflation réglementaire, notamment liée à la RE 2020 et, au 1er janvier 2023, à la responsabilité élargie des producteurs (REP), vient s’ajouter au contexte macroéconomique.

Du fait de la volatilité des prix de certains matériaux, la variation des indices reste forte selon le sous-secteur d’activité, avec par exemple des augmentations très prononcées pour les travaux nécessitant des matériaux métalliques.

indices de l’Évolution des prix dans le BTP

Indice

Évolution entre juin 2021 et juin 2022

BT01 : Bâtiment, tous corps d’état

+ 8,3 %

BT07 : Bâtiment, ossatures métalliques

+ 31,2 %

BT34 : Bâtiment, couverture en zinc et en métal

+ 14,2 %

BT54 : Bâtiment, ossatures en bois

+ 11,7 %

BT50 : Bâtiment, rénovation, tous corps d’état

+ 5,5 %

TP01 : Travaux publics, tous travaux

+ 12,5 %

Source : Insee, août 2022.

Ces contraintes ont pour effet que, si le prix des logements continue à augmenter dans tous les secteurs, il augmente plus fortement dans le neuf que dans l’ancien ([16]). Par ailleurs, l’inflation pourrait à moyen terme freiner le lancement des projets via le canal de la demande. Les baisses éventuelles de pouvoir d’achat ainsi que les hausses des taux d’emprunt freineraient alors les achats dans l’ancien avec travaux ou le neuf, avec un effet sur l’activité du secteur.

 Selon la DHUP, l’impact macroéconomique sur le secteur est modéré à ce jour, les difficultés n’ayant pas encore freiné de manière significative le rythme de la construction neuve sur la première moitié de l’année 2022. Ainsi, les délivrances de permis de construire pour des logements ont été élevées au premier semestre 2022 ([17]). Les mises en chantier sont quant à elles relativement stables : sur douze mois, 385 200 logements ont été mis en chantier, soit + 0,4 % par rapport à l’année précédente. Ces volumes restent néanmoins légèrement inférieurs à la période précédant la crise sanitaire (- 4 % par rapport aux douze mois précédant le premier confinement) ([18]).

Toujours d’après les services du ministère de la transition écologique, les chiffres agrégés cachent toutefois de nettes disparités territoriales. Pour les logements, le segment de l’individuel est nettement plus dynamique que le collectif ([19]), et la construction est plus dynamique depuis la crise sanitaire en zone détendue, là où l’accès au foncier est plus facile, que dans les zones tendues. Par conséquent, on peut conclure à ce stade et à titre provisoire que la hausse du coût des matériaux et des tarifs de l’énergie n’entraîne pas encore d’effet visible sur le nombre de mises en chantier de logements et de locaux non résidentiels.

Le secteur du bâtiment est donc concerné à la fois par une inflation générale qui affecte les clients et les fournisseurs, une inflation propre à la construction, et un environnement général peu favorable aux investisseurs de long terme.

La Fédération française du bâtiment rapporte pour sa part que si la construction neuve de logements est encore résiliente du fait des délais de production, en revanche les ventes s’effondrent à l’amont de la filière : en glissement annuel sur le premier semestre 2022, de gros reculs sont enregistrés à la fois dans l’individuel diffus et dans la promotion immobilière, avec un total d’offre nouvelle en baisse à – 14,6 %. Au deuxième trimestre 2022, les promoteurs rapportent de leur côté avoir vendu 24 % de logements en moins qu’au deuxième trimestre 2021 ([20]). Pour la FFB, il y a donc lieu à de fortes craintes sur l’activité du bâtiment en 2023 et au-delà. Les acteurs locaux de la construction et du bâtiment que votre rapporteur a pu rencontrer attestent également de cette diminution significative du nombre de demandes de construction de logements neufs, en particulier depuis la guerre en Ukraine. Toutefois, la construction neuve de non-résidentiel rebondit après deux années de marasme.

Du côté des entreprises de l’amélioration-entretien, un progrès modéré est à constater (+ 1,9 %), y compris dans son volet énergétique, mais la dynamique apportée par la massification de la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ » se trouve contrecarrée par le recul du marché des certificats d’économies d’énergie (CEE). Toujours selon la FFB, constitue aussi un frein la suppression trop rapide du crédit d’impôt en faveur de la rénovation énergétique des locaux des TPE-PME après six mois d’existence réelle.

Pour l’avenir, de fortes craintes réapparaissent à la suite de la crise de l’énergie subie au mois d’août 2022. La hausse très prononcée des prix de marché du gaz naturel et de l’électricité (respectivement + 166 % et + 142 % entre juin et août) pèsera nécessairement sur les prix des matériaux et a déjà provoqué des fermetures de lignes de production (aluminium, zinc, acier, produits verriers et tuiles) qui risquent de se traduire par de nouvelles difficultés d’approvisionnement. Cette conjoncture s’ajoute à une situation de trésorerie des entreprises, notamment des artisans, en nette dégradation depuis le printemps.

Du côté des promoteurs, le président de la FPI a fait valoir que pour un promoteur, le coût de construction étant équivalent à 50 % du prix de revient, et la marge du promoteur s’élevant 5 % après impôt, si le coût de la construction augmente de 10 %, il n’y aura plus de marge. Ces marges sont encore plus réduites du côté des filières de chantier. C’est pourquoi les différentes fédérations demandent la transparence des prix, proposition portée notamment par la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) ou l’indexation générale des marchés.

Il est important aussi de garder à l’esprit l’effet potentiellement déstabilisant de la montée en charge d’un dispositif comme la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ ». Si les phénomènes massifs de fraude aux travaux d’isolation observés en 2019-2020 ont été résolus, il demeure nécessaire de bien contrôler l’usage des fonds consacrés à ces travaux.

La question d’un effet d’aubaine de MPR sur les entreprises de travaux de rénovation, qui en tireraient avantage en augmentant leur marge, doit être posée, et une évaluation au fur et à mesure du déploiement du dispositif, afin d’examiner ses conséquences sur les prix des travaux, doit accompagner ce déploiement, plutôt que d’être mise en place tardivement et de ne pouvoir que constater l’excès de dépense.

2.   À plus long terme, les défis structurels du recrutement et de la conversion de la filière

Les divers acteurs rencontrés ont tous alerté votre rapporteur quant aux difficultés de recrutement rencontrées dans le secteur, qui s’intensifient depuis la reprise d’activité dans le sillage de la crise sanitaire de 202-2021.

Selon un sondage réalisé par la Fédération française de bâtiment auprès de ses adhérents, 80 % des entreprises de plus de dix salariés font état de telles difficultés, et 60 % des artisans. Ce phénomène serait attribuable en large part, selon la fédération, aux fortes créations d’emplois observées dans le secteur en 2020 et 2021 : le « vivier naturel » de candidats serait d’ores et déjà largement consommé, expliquant le tassement des créations d’emplois depuis la fin 2021.

Cette carence de main-d’œuvre, si elle concerne tous les postes et tous les métiers, reflète principalement un besoin de personnel dit « qualifié », ayant éventuellement une certification mais surtout quelques années d’expérience professionnelle dans le métier ou le type de chantier. Ce personnel n’étant pas dans les fiches de Pôle emploi, il est nécessaire de trouver des profils différents.

Un problème de recrutement continue également de caractériser tout le secteur du BTP, dont les acteurs concernés ont fait état auprès de votre rapporteur.

Les acteurs avancent divers facteurs explicatifs pouvant expliquer les difficultés rencontrées dans le recrutement et la formation de nouveaux effectifs :

– une disponibilité très diverse des profils selon les territoires : chômage résiduel, proximité frontalière qui engendre une concurrence des salaires, offre de formation pour un métier pas nécessairement disponible sur l’ensemble du territoire ;

– la concurrence entre les métiers et secteurs professionnels du fait de la pyramide des âges serait peu favorable pour la classe d’âge entre vingt et quarante ans, qui est le cœur de cible du secteur ;

– les métiers du bâtiment souffrent de stéréotypes négatifs : le BTP continue à ce jour encore de pâtir de problèmes d’image et de notoriété, associés notamment à la pénibilité et à d’autres idées reçues ; et un travail s’impose dans le sens d’une meilleure attractivité, notamment vis-à-vis des femmes et des jeunes. Le recours à l’immigration pour pallier le manque de main d’œuvre est également abordé.

Selon les professionnels rencontrés, en ce qui concerne la rénovation énergétique, les compétences liées à ce domaine sont intégrées dans les référentiels de formation du secteur depuis de nombreuses années. Cependant, pour travailler dans ce secteur, il convient de maîtriser au préalable les fondamentaux d’un métier, ce qui limite le vivier potentiel.

Selon la directrice générale de l’Anah, le tissu d’entreprises n’est pas encore pleinement organisé pour les chantiers de rénovation énergétique, notamment globale. La saturation actuelle de la filière signifie une difficulté pour les particuliers à engager des travaux qui ne pourront pas être réalisés avant une attente de douze mois. Il est impératif que le nombre d’entreprises spécialisées dans la maîtrise d’œuvre globale de ces chantiers augmente, et que les artisans qui constituent la filière s’approprient la planification pluriannuelle pour faire face à la demande.

Votre rapporteur estime que les orientations nationales de la transition écologique, qui modifient la nature des travaux de construction et d’aménagement que recherchent nos territoires, emporteront à terme la transformation de certains métiers, dont l’adaptation doit être pensée pour mieux accompagner cette transition. Un grand nombre de filières du BTP, à l’instar des entreprises du génie climatique, des plombiers et des électriciens, peuvent s’adapter sans trop de difficulté à un basculement vers un marché plus dynamique en rénovation. C’est moins le cas des entreprises de maçonnerie, tout comme pour les constructeurs de maisons et les promoteurs immobiliers, dont le modèle économique devra nécessairement s’adapter.

B.   des opÉrations qui se heurtent À des difficultÉs territoriales accrues

1.   Un renchérissement foncier qui s’accentue, devant susciter une réflexion sur la taxation du foncier

La recherche de foncier disponible permettant la réalisation de projets de construction, qu’il s’agisse de logements ou d’entreprises, fussent-ils respectueux de l’environnement quant aux matériaux et aux modes de construction ou d’énergie choisis, devient de plus en plus complexe.

Du fait de cette raréfaction, le principal problème que rencontrent les organismes de logement social comme les promoteurs privés dans la production de logements est le coût du foncier. Ce coût en hausse systématique depuis plusieurs années, phénomène déjà souligné par Jean-Luc Lagleize dans un rapport de novembre 2019 ([21]), représente en moyenne 25 % du coût de revient d’un projet, montant qui peut s’élever à 50 % dans certaines zones tendues.

La conjoncture actuelle devrait contribuer à ce phénomène. L’injonction nécessaire à la sobriété foncière et à la limitation de l’artificialisation emporte en effet un renchérissement du foncier, en particulier en cœur urbanisé. Les solutions foncières permettant d’accueillir de nouveaux projets ne sont pas légion et les mécanismes permettant d’encourager à libérer du foncier disponible, tout en régulant leur coût, insuffisants.

Ainsi, pour les projets d’intérêt public comme pour ceux des bailleurs sociaux, si les collectivités n’ont pas amorcé une réserve foncière, la maîtrise des prix fonciers deviendra toujours plus difficile. Aux côtés des collectivités, les organismes de foncier solidaire ou établissements publics fonciers peuvent contribuer à réguler ces prix par la constitution de réserves foncières en utilisant le droit de préemption.

La concurrence avec les acteurs privés rend cependant l’équation particulièrement difficile. Par exemple, les bailleurs sociaux ayant souvent des marges opérationnelles moins importantes que les investisseurs institutionnels et les promoteurs, ils se trouvent incapables de rivaliser sur les prix d’achat des assiettes foncières. À ce titre, la prorogation du dispositif d’exonérations temporaires d’impôt sur le revenu des plus-values immobilières au bénéfice des bailleurs sociaux contribuerait à limiter ces effets qui freinent la production de logement social. Sans cela, les bailleurs sont tributaires de la capacité des élus locaux, lesquels doivent être propriétaires des terrains et ensuite souhaiter les céder, souvent à perte, pour la production de logement social, ce qui n’est pas toujours politiquement opportun, en plus d’être financièrement désavantageux. Les collectivités, dans le cadre de leurs projets de construction, voient également le budget de leurs projets grevés de manière significative et parfois rédhibitoire pour la réalisation de bâtiments ou espaces publics.

Comme il a été souligné lors de l’audition de l’Anru, les quartiers prioritaires semblent pouvoir présenter un intérêt foncier particulier, puisque dans ces secteurs la réhabilitation et la densification peuvent avoir un impact bénéfique sur la qualité urbaine, l’attractivité du quartier, la proximité des services et la sécurité. Des grands ensembles urbains réalisés en tours et barres, dont la propriété foncière est souvent municipale, au cours de leur recomposition, peuvent ainsi utilement contribuer à rendre du foncier disponible.

Il y a donc incontestablement un enjeu de libération foncière. À ce titre, l’imposition des plus-values foncières, qui frappe le propriétaire du bien lorsqu’il le met en vente a une influence considérable sur la décision de vendre ou de conserver le terrain. Son taux de droit commun, fixé à 36,2 % de la
plus-value réalisée, s’applique cependant de manière décroissante au fur et à mesure que la durée de détention s’allonge. Ce fonctionnement encourage la rétention foncière.

De l’existence de cet impôt peut découler un comportement d’évitement qui consiste à reculer la date de cession en comptant sur la baisse de l’impôt dû sur pour rentabiliser l’attente. Ce comportement est d’ailleurs amplifié si, comme c’est le cas actuellement, le contexte est marqué par une hausse du coût du foncier. Tant que les coûts de la détention, et notamment de la taxe foncière, sont inférieurs à l’abattement annuel de 6 % sur la plus-value, l’intérêt financier est dans la conservation du foncier, et ceci sans même prendre en compte les considérations d’ordre spéculatif qui vont bon train. Une réduction de la durée à partir de laquelle la plus-value réalisée ne serait pas imposée permettrait ainsi d’encourager la libération foncière sans pour autant créer un effet spéculatif supplémentaire et éviterait les phénomènes de rétention constatés.

En outre, dans un souci de sobriété foncière, hormis les dents creuses, les zones périphériques en continuité de l’espace urbain ou situés au sein des zones déjà urbanisées, les réserves foncières nues et constructibles se raréfient de manière drastique. Cela engendre ainsi parfois – et cela dans une proportion forcément plus limitée dans les années à venir avec l’objectif de « zéro artificialisation nette »
– la transformation de terrains à vocation agricole en terrains à urbaniser dont la constructibilité devient alors constitutive d’une rente qui contribue à la spéculation.

Il est donc important à cet égard d’examiner les leviers fiscaux qui peuvent être exploités pour mieux traiter ces situations sachant qu’à ce jour le niveau de fiscalité spécifiquement appliqué lors de ces mutations de destination est relativement faible compte tenu de l’ampleur des plus-values qui peuvent être réalisées dans ce cas précis. Une augmentation de la taxe forfaitaire sur les cessions de terrains nus devenus constructibles (aujourd’hui à 5 % lorsque le prix de cession est supérieur au prix d’acquisition entre 10 et 30 fois et à 10 % au-delà de 30) permettrait ainsi d’éviter ces hausses de coûts significatives et un phénomène de course au caractère constructible du terrain.

Votre rapporteur estime à ces égards qu’il est aujourd’hui impératif de réinterroger le régime des plus-values foncières afin d’aider au mieux les collectivités à mener leurs opérations constructives et les investisseurs privés à répondre à la demande de logements ou d’installations d’entreprises et notamment d’industries.

L’imposition des plus-values foncières

La plus-value réalisée à l’occasion de la vente de la propriété foncière bâtie ou non bâtie est imposable à l’impôt sur le revenu, auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux.

En ce qui concerne son taux, deux taux s’additionnent, comme c’est toujours le cas en matière d’imposition de revenus : un taux de 19 % au titre de l’impôt sur le revenu, qui constitue une recette de l’État, et un taux total de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux, recette des organismes de sécurité sociale. Des surtaxes peuvent s’appliquer, au nombre desquelles la taxe forfaitaire sur les cessions de terrains nus devenus constructibles et la taxe sur les plus-values immobilières élevées.

En ce qui concerne son assiette, la valeur imposée de la plus-value se calcule simplement en soutrayant du prix de vente du bien le prix qui était le sien à l’achat. Une valeur minorée est ensuite calculée  par application à la valeur imposée d’un abattement en fonction de la durée de détention du bien, au-delà de cinq ans de détention :

 au titre de l’impôt sur le revenu, abattement de 6 % supplémentaire de la valeur imposée tous les ans de la cinquième année jusqu’à la vingt-et-unième année ; abattement de 4 % pour la vingt-deuxième année de détention ; exonération totale au bout de la vingt-troisième année ([22]) ;

 au titre des prélèvements sociaux : abattement de 1,65 % supplémentaire de la valeur imposée de la cinquième année jusqu’à la vingt-et-unième année, abattement supplémentaire de 1,60 % pour la vingt-deuxième année, abattement supplémentaire de 9 % pour chaque année au‑delà de la vingt-deuxième année ; exonération totale au bout de la trentième année.

2.   Les collectivités et l’acte de construire à l’heure de la densification et de la sobriété foncière

La demande de logements est unanimement croissante, en particulier depuis la crise du Covid-19 qui a mis en exergue les envies d’un cadre de vie agréable partagés par les Françaises et les Français. Fin juin 2022, le volume de transactions de logements anciens en cumul sur les douze derniers mois en France atteignait en effet 1,15 million de transactions ([23]), traduction d’un début d’année dynamique. Inversement, le déclin de l’offre de logements, particulièrement remarqué dans les zones tendues depuis 2020, continue de marquer le secteur. Si l’appétit à l’achat est toujours là, et l’offre peine donc à s’élever au niveau du besoin.

Le déficit croissant de légitimité des opérations de construction et de l’acte de construire lui-même a été relevé par de nombreux observateurs, et avait occasionné fin 2021 la création de la commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par François Rebsamen.

Les acteurs auditionnés se sont inquiétés quant à la difficulté éprouvée à faire accepter politiquement et socialement les projets de production de logements. Les promoteurs, qui opèrent principalement en zone dense, sont particulièrement concernés par les refus opposés par les élus locaux. Si une telle tendance baissière est habituelle pour une période pré-électorale, il a été souligné que cet effet s’est exceptionnellement prolongé et renforcé après l’élection municipale de 2020, et qu’il s’observe dans l’ensemble des communes en-dehors de toute affiliation politique particulière.

Selon la Fédération des promoteurs immobiliers, les droits à construire ouverts dans les plans locaux d’urbanisme (PLU) ne sont exploités qu’à 65 ou 70 % : ce déficit marque notamment une carence d’autorisations en zones A et B1 ([24]). Selon ses chiffres, les deux dernières années auraient vu une baisse, sur deux ans, des autorisations, de 30 % au T1 2022, et de 10 % au T2 2022. En termes de pertes en logement, une telle évolution équivaut à une perte de 40 000 logements par an, par rapport à une production en année de référence de l’ordre de 140 000 logements. En outre, les statistiques du ministère de la transition écologique montreraient depuis quelques mois une baisse des projets commencés.

Votre rapporteur souligne toutefois l’importance de la distinction entre la position de principe hostile à la construction, qui peut être le fait de certaines familles politiques, et la crainte de la densification excessive des centres-bourgs ou de l’acceptabilité de projets en densification qui soulève de façon importante la question de l’habitabilité de la ville et de la qualité du cadre de vie, et qui doit dès lors faire l’objet de réponses à ce titre. Le directeur général de France Ville durable a évoqué à cet effet les gains réalisés en termes de projection foncière et de connaissance des impacts à la parcelle, qui permettent de mieux anticiper l’usage optimal d’une dent creuse.

Alors que les rapports entre collectivités et promoteurs se sont longtemps réglés à l’amiable, la fédération a rapporté un recours émergent au contentieux. Les promoteurs, par dépit, auraient de plus en plus recours à cette solution face à des refus de permis de construire pourtant considérés (et parfois même officieusement reconnus) comme conformes. La fédération déduit ainsi que certains maires préfèrent aller au contentieux, quitte à y perdre, plutôt que de s’exposer au risque politique que porte l’octroi d’une autorisation. Certains élus demanderaient également aux promoteurs de ne pas déposer de demande de permis.

Cette volonté politique de sobriété foncière, quel qu’en soit le fondement, semble louable. Pour autant, confrontée à une demande de logement excédentaire à l’offre, elle fait courir un risque avéré de pénurie engendrant des difficultés d’accès au logement pour tous et une forte inflation des coûts liés au logement, particulièrement dans l’accession, déjà constaté ces dernières années.

La hausse des prix de l’accession en France

Entre 1996 et 2016, les prix à la consommation ont augmenté de 31 %, le revenu disponible brut par ménage de 40 %, tandis que le prix des logements anciens était multiplié par 2,52 (2,67 en Île-de-France). Après une baisse consécutive à la crise de 2008, la reprise a été soutenue, notamment en Île-de-France. Les prix ont ensuite diminué légèrement à partir de 2012, mais connaissent une reprise en 2016.

Pour les primo-accédants, la hausse des prix freine l’achat. Elle a été en partie compensée par l’allongement de la durée des emprunts (19,6 ans entre 2009 et 2013, contre 17,2 ans entre 2002 et 2006 et 14,6 ans entre 1997 et 2001) et la baisse des taux d’intérêt (3,5 % entre 2009 et 2013, contre 4,1 % entre 2001 et 2006, 5,2 % entre 1997 et 2001). Pour les accédants récents, il a aussi fallu maintenir le taux d’apport personnel autour du tiers, c’est-à-dire consentir à une hausse de sa valeur absolue compte tenu de la hausse des prix.

L’accession est devenue plus dépendante des revenus : le revenu est devenu un déterminant plus important de l’accès à la propriété qu’il y a trente ans. Les chances d’accès à la propriété d’un ménage du premier quartile de revenu par unité de consommation sont de 33 % de celles d’un ménage du deuxième quartile en 2013 ; elles étaient de 71 % en 1984.

Former un couple avec deux apporteurs de ressources, plutôt qu’un, à quartile de revenu égal, est devenu une nécessité plus prégnante pour acquérir un logement. La stabilité de l’emploi est aussi une condition plus forte pour emprunter, les banques recherchant en priorité les personnes en contrat à durée indéterminée. L’aide des parents est devenue plus fréquente (un quart des accédants récents âgés de 25 à 44 ans ont reçu un don au moment de l’achat en 2013, contre un cinquième en 2001, et plus importante. Sa progression a accompagné celle de l’apport personnel, qui représente en 2013 comme en 2001 de l’ordre d’un tiers du montant de l’achat, alors que ce dernier équivaut aujourd’hui à quatre ans et demi de revenu, contre un peu plus de trois années au début de la décennie 2000. Même si l’aide des parents a toujours été importante, il est probable que les inégalités intragénérationnelles se sont accrues, entre ceux que leurs parents peuvent aider et les autres.

Source : Insee Références, édition 2017, « Le logement en France depuis trente ans » ([25]).

Les conséquences financières engendrées par ce phénomène concernent également le logement social : en audition, le directeur des prêts de la Caisse des dépôts et consignations a ainsi évoqué un accroissement des refus de garantir les prêts octroyés par la Caisse et qui doivent impérativement être garantis par une collectivité. Le refus d’octroyer cette garantie met en fragilité la pérennité du système de financement, sachant qu’en tant que garant des dépôts, l’État ne peut apporter sa garantie aux prêts.

Quant à l’éco-prêt, il est lui aussi concerné par des défauts de garantie, et la Caisse des dépôts souhaiterait que la CGLLS puisse garantir, non seulement de façon subsidiaire lorsque la collectivité refuse sa garantie, mais immédiatement, tout en sachant qu’elle manque de fonds propres à cet effet.

Au regard de ces éléments, votre rapporteur souhaite attirer l’attention sur le fait que du contexte financier, politique et économique auquel sont confrontées les collectivités, émane une forme d’inertie préjudiciable au développement d’une offre de logement à la hauteur des attentes et qui frappe le secteur de la promotion immobilière de plein fouet. À l’heure de la mutation des opérations d’urbanisme et de la transition écologique, il est à craindre que ce phénomène ne s’accentue dans les années à venir.

II.   L’obligation de repenser nos pratiques d’amÉnagement et de logement À l’heure de la transition Écologique

A.   la rÉnovation ÉnergÉtique du logement, une opportunitÉ pour la filiÈRE

Le parc privé et le parc social mettent en jeu des financements considérables sur un temps très long pour amener l’entièreté du parc d’habitat en conformité avec la stratégie nationale bas carbone en 2050. La rénovation énergétique des logements constitue ainsi un secteur d’avenir et une opportunité pour le bâtiment.

1.   « MaPrimeRénov’ » : mieux financée et réalisée mais toujours limitée face au défi de la rénovation globale

La directrice générale de l’Agence nationale de l’habitat, qui distribue la prime de transition énergétique « MaPrimeRénov’ » (MPR), a souligné la multiplication par dix de l’activité de l’agence depuis 2018. Cette massification a été souhaitée afin de susciter un éveil collectif sur le besoin impérieux de transformer le parc. Elle a été rendue possible par l’abandon de la doctrine historique de l’Anah, dans laquelle l’accompagnement était obligatoire, qu’il s’agît d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) ou d’une opération financée par l’un des programmes « Habiter mieux ». Cet accompagnement permettait de sécuriser le propriétaire, d’éviter les erreurs techniques et administratives, et de garantir la solvabilité de l’opération.

Le pari a été gagnant, puisque l’accélération des travaux a permis une véritable prise de conscience des Français sur cette question. L’Anah, auditionnée, a défendu l’arbitrage initial, à savoir la recherche de la massification des chantiers nécessitant l’abandon de l’exigence de rénovation globale. Cette décision a permis en 2021 à l’Anah de générer 8,5 Md€ de travaux.

Toutefois, comme l’a noté la Cour des comptes ([26]), il demeure une difficulté sur le gain de performance moyen dans chaque opération. Selon les chiffres transmis par l’Anah, 85 % des dossiers MPR concerne des opérations dites monogeste, le reste étant essentiellement constitué d’actions à deux gestes. Le ministre chargé du logement a réaffirmé lors de son audition qu’il est important de « quitter la logique du geste par geste », et votre rapporteur estime également qu’il s’agit d’une urgence. Le réseau « France Rénov’ » et « l’accompagnateur Rénov’ », dont la place et le rôle restent notamment à préciser auprès des associations départementales d’information sur le logement (Adil) et des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), doivent prendre plus de place pour informer les usagers quant aux impacts des opérations sur leur budget et sur l’environnement et mieux éclairer leurs arbitrages.

Les ouvertures successives du dispositif, d’abord aux déciles supérieurs de revenus dans le cours de l’année 2020, puis aux copropriétés et aux propriétaires bailleurs en janvier 2021, ont nécessité une nette augmentation de l’enveloppe initialement allouée. La transformation opérée en 2019 concernait seulement les quatre premiers déciles de revenus, passant d’une logique de financement d’un pourcentage du montant des travaux au forfait par geste.

Les acteurs rencontrés s’accordent sur la nécessité d’avancer vers le modèle proposé par Olivier Sichel dans le rapport qu’il a remis à la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, en mars 2021, notamment un accompagnement généralisé et obligatoire des ménages par un référent, et un parcours simplifié ([27]). Toutefois, les obstacles à la rénovation globale demeurent très conséquents, à commencer par le niveau d’investissement nécessaire et la nécessité de quitter son domicile durant les travaux.

Selon la directrice générale de l’Anah, les travaux actuellement les plus sollicités concernent l’installation d’une pompe à chaleur, d’une chaudière à granulés ou d’un poêle à granulés. De ce fait, touchant en majorité des propriétaires occupants de maisons individuelles, MPR finance surtout des changements de chaudière et non des travaux d’isolation ou des audits énergétiques. Paradoxalement, en 2020 la prime a également financé l’installation d’un grand nombre de chaudières à gaz pour les ménages souhaitant sortir du fioul. Si cela peut paraitre paradoxal dans le contexte imprévisible actuel, le gain énergétique du changement de la chaudière n’est pas négligeable, se situant autour de 35 %. La réalisation de travaux d’isolation permettrait, en allant plus loin, de diviser par d’eux la quantité d’énergie consommée en chauffage.

En ce qui concerne la nature des travaux sollicités, votre rapporteur estime donc qu’il est nécessaire de quitter le modèle du simple changement d’équipement de chauffage, fortement plébiscité mais qui, dans le cas où l’isolation thermique n’est pas améliorée, ne permet pas de changer de manière soutenable la dépense énergétique du logement. De ce point de vue, il semblerait opportun de repenser la structure des forfaits pour mieux valoriser la prise en charge des travaux d’isolation au détriment des simples changements d’équipement de chauffe.

Allant plus loin, l’Anah alerte sur le fait que la structure actuelle des aides incite davantage à la rénovation par geste qu’à la rénovation globale, les aides pour celle-ci étant moins intéressantes. Il semblerait donc également préférable, afin de mieux inciter les particuliers à entreprendre des chantiers pluri-gestes et tout en conservant la modulation des montants en fonction des revenus, de moduler les taux de prise en charge en fonction du montant total investi, de sorte qu’une opération globale puisse toujours avoir un meilleur rendement financier pour le particulier qu’une opération par geste.

Une alerte concerne de ce point de vue l’enchevêtrement des régimes de TVA lors des opérations de rénovation globale, les intervenants au titre des finitions ne pouvant pas bénéficier de la TVA réduite à 5,5 % qui est octroyée aux entreprises de la rénovation énergétique. Dans certains cas, ce phénomène peut inciter les ménages à abandonner les travaux de finition, voire l’ensemble du projet de rénovation. Il semble ainsi nécessaire de mener un travail de réflexion pour ne pas dissuader fiscalement les ménages d’entreprendre des travaux de rénovation globale.

Sur la base du constat partagé par l’Anah et la FFB que les déciles supérieurs n’enclenchent que peu un processus de rénovation énergétique, votre rapporteur estime qu’il est aussi nécessaire de mieux équilibrer entre eux les taux de prise en charge en fonction des revenus. Actuellement, les déciles supérieurs des revenus ne bénéficient d’une prise en charge qu’à hauteur de 13 %, ce qui s’avère bien souvent insuffisant pour les inciter à mener des travaux, en particulier au regard de la gêne occasionnée par des travaux réalisés chez l’habitant. Il semble alors nécessaire d’étudier l’opportunité d’augmenter les taux de prise en charge de ces déciles afin de renforcer l’attractivité des travaux en baissant le taux d’effort et en les amenant plus rapidement au seuil d’enclenchement des travaux qui pourrait être conditionné par une démarche de rénovation globale.

La prime de transition énergétique n’étant pas une aide à la pierre au sens du code de la construction et de l’habitation, elle n’est pas abondée par les collectivités. Selon le ministre chargé de la ville et du logement, certaines collectivités montrent l’exemple en la matière, comme la métropole de Lyon, mais les régions, par exemple, pourraient être plus présentes pour accompagner aussi les ménages.

Un autre sujet fréquemment évoqué concerne la fiabilité du diagnostic de performance énergétique (DPE), qui est devenu le socle de la mesure de la consommation d’un logement. Avec la loi Climat et résilience, le DPE est le principal critère du maintien ou non dans le parc locatif des logements à compter de l’interdiction échelonnée des passoires thermiques qui s’ouvrira avec l’interdiction à la location des logements G les plus énergivores en janvier 2023. Il importe de le fiabiliser impérativement pour que les acteurs puissent en toute connaissance de cause fonder leurs projections sur ses conclusions. De la même manière, le « DPE copropriété » doit être sécurisé.

Les échéances de la loi climat exigent d’amplifier l’effort. Selon les chiffres de la Fédération nationale de l’immobilier, le parc privé compte actuellement 7,2 millions de passoires, dont 5,2 millions de résidences principales et 0,8 million de logements vacants. En l’absence de travaux, 1,5 million de logements pourraient sortir du parc locatif longue durée en 2025 (673 000 logements classés G) ou en 2028 (900 000 logements classés F). La fédération sollicite ainsi un report du calendrier de mise en œuvre.

Selon ses estimations, 25 à 30 % de ce parc sera mis en vente, 11 % des propriétaires bailleurs déclarant déjà souhaiter se déporter vers un modèle de meublé de tourisme sur plateforme, ce qui représente 400 000 logements potentiellement sortis à terme du parc privé locatif. À noter que le secteur du meublé de tourisme, lui, n’est pas soumis à cette obligation énergétique. Votre rapporteur considère ainsi urgent de soumettre les meublés de tourisme aux mêmes exigences énergétiques, avec par exemple l’obligation de réaliser un DPE tous les cinq ans, et d’aligner la fiscalité qui leur est appliquée concernant les revenus locatifs sur celle des logements non meublés de longue durée. La question du classement des meublés de tourisme pose également question au regard des critères prérequis, peu contraignants et offrant un avantage fiscal supplémentaire.

2.   Des solutions à trouver pour mieux accompagner les copropriétés

Le président de la Fédération nationale de l’immobilier, auditionné par votre rapporteur, a insisté sur ce qui constitue selon lui le principal obstacle à la rénovation énergétique, à savoir les copropriétés. Des efforts demeurent nécessaires pour mieux faire contribuer les 500 000 copropriétés du pays, qui représentent 10 millions de logements, au mouvement de rénovation. 37 % des logements parisiens, par exemple, qui sont dans leur grande majorité situés en copropriété, sont classés en passoire énergétique.

Le plan pluriannuel de travaux (PPT), outil de diagnostic de l’immeuble et de planification des travaux, est en cours de mise en place dans les copropriétés. L’actualisation des audits réglementaires doit permettre de faciliter la réalisation des travaux en les rendant plus prévisibles et en incitant les copropriétés à alimenter les fonds de travaux en conséquence.

Selon le Conseil supérieur du notariat, toutefois, seules 10 à 15 % des copropriétés se sont dotées des outils disponibles pour planifier les travaux de réhabilitation énergétique. En leur absence, elles ne connaissent pas la nature des travaux de rénovation nécessaires et la plupart peinent à évaluer ces travaux. Il convient de rappeler à cet effet que le législateur a prévu l’obligation de diagnostic entre 2024 et 2026 selon la taille de la copropriété.

Selon la DHUP, la majorité de vote en assemblée générale des travaux de rénovation énergétique ne constitue pas un frein. Si son assouplissement peut être de nature à déclencher les décisions de travaux, en revanche, il est souligné qu’il ne garantit pas que les travaux seront effectivement réalisés, faute de pouvoir être payés.

Certains outils sont insuffisants : le régime de l’emprunt bancaire des syndicats de copropriétaires est complexe et constitue un frein à l’accès aux financements bancaires classiques. Ce manque se ressent fortement dans les plans de financements des projets de rénovation énergétique, qui nécessitent un investissement important lors des travaux et une réduction de la facture énergétique étalée dans le temps.

La défaillance d’un ou plusieurs copropriétaires peut bloquer un processus global de rénovation. Or, la capacité des copropriétaires bailleurs les plus modestes à contribuer à des travaux massifs de rénovation énergétique pose également question, au même titre que pour des travaux d’amélioration ou de réfection plus classiques, et en particulier lorsque les logements concernés ne se trouvent pas dans le périmètre d’une OPAH ou que celle-ci, de par l’encadrement des loyers qu’elle implique, viendrait grever des niveaux de loyers qui constituent parfois pour eux une nécessité budgétaire.

Cette situation incite à trouver des solutions pour mieux accompagner les propriétaires bailleurs modestes et faciliter la gestion de la trésorerie des copropriétés et des copropriétaires. Sur ce dernier point, des travaux sont en cours auprès des partenaires du « plan Initiative copropriétés » (PIC) porté par l’Agence nationale de l’habitat (notamment le réseau Procivis et la Banque des territoires) pour étudier les moyens de faciliter le recours à ces solutions pour les copropriétés saines et en difficulté.

3.   Une réponse adaptée aux besoins de financement de la rénovation thermique du parc social grâce à une enveloppe dédiée dans le PLF

Votre rapporteur a auditionné la directrice générale de l’Union sociale pour l’habitat qui a souligné, comme d’autres acteurs, la bonne performance énergétique du parc social, dont 82 % des logements sont classés dans des étiquettes A à D. L’urgence climatique encadre en effet d’ores et déjà l’action des bailleurs depuis des années, les objectifs climatiques et la stratégie nationale bas carbone (SNBC) ayant déjà été pris en compte par les acteurs à compter de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Pour cette raison, le parc social est mieux placé que le parc privé en matière d’adaptation thermique, avantage illustré par une étude récente de l’Agence nationale de contrôle du logement social (voir encadré).

De ce point de vue, les acteurs auditionnés ont particulièrement salué l’efficacité des subventions du plan de relance pour la réhabilitation lourde du parc, qui ont permis un abondement de 500 M€ sur deux ans. Le présent PLF poursuit cette trajectoire en prévoyant le fléchage de 200 M€ du FNAP à destination de la rénovation énergétique du parc social.

De la même façon, le groupe Action Logement a assuré que les travaux sur l’intégralité des logements détenus par ses filiales d’habitat classés en F ou G seraient lancés d’ici la fin 2023. Le groupe demande ainsi à ses bailleurs, qui sont des sociétés anonymes d’Hlm, de faire passer les habitations en classe C au minimum, et souhaite que 25 % des opérations atteignent le niveau BBC-rénovation, qui les situent au niveau de l’étiquette A ou B.

L’Ancols a enquêté sur la rénovation thermique du parc social

L’Ancols a rapporté, à la suite d’une enquête réalisée en 2021 sur un échantillon de 300 organismes de logement social, qu’entre 2016 et 2020, 520 000 logements du parc social ont fait l’objet d’une rénovation thermique dont 340 000 pour lesquels les travaux avaient été finalisés au 31 décembre 2020.

Le résultat des travaux menés conduit à un saut d’1,5 étiquette de DPE en moyenne, 22 % atteignant un niveau de consommation inférieur ou égal au BBC-rénovation. En élargissant le périmètre, c’est entre 380 000 et 490 000 logements dont la performance énergétique s’est améliorée durant la période, via une rénovation ou bien un autre type d’intervention (changement de composants dans le cadre d’actions de gros entretien).

Plus de 80 000 logements voient leur performance énergétique s’améliorer chaque année depuis 2018, contre environ 40 000 en 2016, signe d’une accélération des interventions visant à réduire la consommation énergétique des logements.

Les bons résultats enregistrés par le parc social sont néanmoins insuffisants pour respecter les objectifs de la stratégie nationale bas carbone (SNBC), en particulier en matière de consommation énergétique des logements : pour les atteindre, 90 à 135 000 logements devraient être rénovés chaque année, dont plus de 90 % de logements avec un diagnostic de performance énergétique classé A ou B1 après travaux. Ce chiffre devrait atteindre 200 000 rénovations par an pour respecter à l’horizon 2030 les objectifs liés aux émissions de gaz à effet de serre (GES).

Selon l’Ancols, l’investissement total consacré aux rénovations dans le parc social a été estimé à 9 Md€ entre 2016 et 2020, dont 4,1 Md€ pour le seul volet thermique. Ramené au logement, le coût moyen des opérations de rénovation est compris entre 30 et 35 000 euros, dont 12 à 16 000 euros pour la partie spécifiquement thermique.

 

74 % du montant total investi dans la rénovation thermique proviennent d’emprunts (25 % provenant du seul éco-PLS de la Caisse des dépôts et consignations),12 % de fonds propres et 11 % de subventions. L’ensemble des financements éco-conditionnés représente 43 % des sommes engagées. Le recours aux hausses de loyer et à la contribution au partage de l’économie de charges – communément appelée la « troisième ligne de quittance » – est fréquent mais pas généralisé, les bailleurs ne souhaitant pas fragiliser leurs locataires.

Source : Agence nationale de contrôle du logement social, « La rénovation thermique des logements du parc social », juin 2022.

Les travaux actuellement engagés exigent une hausse de l’investissement pour faire face notamment à l’élévation du taux d’emprunt pour les bailleurs et à la hausse des coûts de construction. En effet, en l’absence d’une revalorisation effective de l’indice de référence des loyers – les bailleurs s’étaient, nombreux, engagés à ne pas appliquer la hausse permise à partir du mois de juillet dernier ([28]) – et étant donné que le taux du Livret A doit augmenter en février et en août 2023 en intégrant l’inflation et le niveau des taux du marché monétaire à trois mois, les capacités de financement des bailleurs pourraient rapidement s’amenuiser.

Pour faire face à cette situation, le directeur des prêts de la Caisse des dépôts et consignations, auditionné par votre rapporteur, a recommandé d’amplifier l’écoprêt et les autres financements concessifs disponibles. Le logement social s’inscrivant nettement dans le temps long, il importe de consolider les outils de prêt concessifs avec des maturités longues, de prolonger les subventions et de mieux corréler celles-ci avec le financement par éco-prêt.

En réponse à ce besoin et afin de prévenir l’attentisme des acteurs dans une période marquée par une forte hausse des taux d’emprunt, la Caisse des dépôts et consignations a annoncé, le 28 septembre dernier, après des réflexions menées avec le Gouvernement, une offre étayée pour accompagner les bailleurs :

– une offre « Plus Horizen », positionnée sur le secteur PLUS, nouvelle offre de prêt à taux fixe sur cinq ans puis indexé sur le taux du livret A, pour permettre aux organismes Hlm de maintenir leur effort de production neuve, avec une enveloppe globale d’1 Md€ jusqu’à fin 2023, bien accueillie par le secteur ;

– un rehaussement de l’enveloppe de l’éco-prêt, qui sera de 6 Md€ pour les années 2023-2027 et qui pourrait s’accompagner d’une élévation du plafond par logement, celui-ci étant susceptible de passer prochainement de 22 000 euros à 30 000 euros ;

– le lancement d’une expérimentation de la Banque des territoires et de l’USH en vue de « donner une seconde vie à 5 000 à 10 000 logements sociaux », alliant les financements du neufs aux bonifications de l’éco-prêt.

L’éco-prêt logement social (éco-PLS)

Issu du Grenelle de l’environnement de 2007, l’éco-prêt logement social est un prêt consenti par la Caisse des dépôts et consignations, d’un montant de 9 000 à 22 000 euros par logement (montant qui peut être majoré jusqu’à 27 000 euros en appliquant différents boni) en fonction du gain énergétique réalisé, accessible aux bailleurs sociaux pour des opérations de rénovation.

Outil de référence en matière de travaux de réhabilitation du parc social, il s’agit d’un prêt fortement bonifié, puisque son taux est celui du Livret A auquel on soustrait entre soixante-quinze (5-15 ans) et vingt-cinq (21-25 ans) points de base. Selon l’étude de l’Ancols précitée, 62 % des opérations de rénovation de logements sociaux y ont eu recours sur 2016-2020. Selon la CDC, en 2021, l’éco-prêt a représenté 30 % du plan de financement des opérations de rénovation thermique ([29])

Actuellement, pour être éligibles à l’éco-PLS, les opérations de réhabilitation doivent présenter un gain énergétique minimal de 40 %, une consommation énergétique conventionnelle inférieure à 230 kWh/m² par an (classe D de l’ancien DPE) et ne pas entraîner de dégradation des émissions de gaz à effet de serre. Enfin, l’éco-PLS peut être complété par un prêt avance mutation (PAM) à taux fixe, également distribué par la CDC et financé sur fonds de la Banque européenne d’investissement.

4.   L’horizon des rénovations massives et de la « seconde vie » du logement social

L’USH a soulevé une inquiétude quant à l’ampleur des travaux menés à ce jour, la majorité des transformations se faisant, pour des raisons financières, par l’évolution des logements considérés des passoires énergétiques vers une étiquette D, car les étiquettes A, B et C sont bien plus difficiles à atteindre. Le coût des opérations grimpe en effet très fortement dès lors qu’il s’agit de rendre pleinement performant le logement : pour faire passer un logement E en D, les travaux s’élèvent en moyenne à 27 000 euros, contre 40 000 euros pour un passage en étiquette C, ou 50 000 euros pour un passage en B, selon le groupe Action Logement.

En termes de planification, il est donc estimé que le parc social tiendra les échéances de la loi Climat et résilience, mais comportera en 2034 environ 2 millions de logement classés D, qui devront être adaptés pour se mettre en conformité avec la stratégie nationale bas carbone (SNBC) d’ici 2050.

En effet, si les rénovations entreprises ne permettent d’atteindre qu’une étiquette D ou C, comme c’est le cas dans la grande majorité des opérations actuellement menées, elles seront à peine amorties lorsqu’il faudra en 2040, pour atteindre les objectifs de la SNBC, relancer des travaux sur les mêmes logements dans ce sens. Pour cette raison, selon les acteurs entendus, la réhabilitation visant à faire entrer les logements sociaux dans les étiquettes énergétiques A ou B doit être pensée et financée dès aujourd’hui.

L’ampleur des travaux nécessaires pour mettre un logement en conformité avec ces étiquettes exige cependant un financement non sur quinze à trente ans comme la rénovation classique, mais sur cinquante ans, comme s’il s’agissait d’une construction neuve. Selon la Banque des territoires, la stratégie d’investissement du secteur sur les quarante prochaines années doit reposer sur l’accroissement de 25 % du volume de logements réhabilités tous les ans.

Or, les instruments financiers et juridiques manquent encore à ce jour pour entreprendre des travaux d’une telle ampleur, qui impliquent des sommes considérables, des temps de travaux allongés, et le déplacement systématique des habitants.

À cet égard, la « seconde » vie pourrait constituer un nouveau modèle pour le secteur Hlm, en ouvrant une voie alternative à la construction neuve et à la réhabilitation. Cette possibilité a récemment fait l’objet de nombreuses discussions, notamment au dernier congrès Hlm, et a souvent été abordée dans les auditions de votre rapporteur. Les opérations de réhabilitation visent actuellement, le plus souvent, à renouveler la durée de vie d’un bâtiment dans un horizon de quinze ans (réhabilitation légère) ou de trente ans (réhabilitation lourde). La seconde vie consisterait ainsi pour sa part à prolonger la durée de vie d’un bâtiment de cinquante ans ou plus.

Cette notion est tributaire de la prise en compte du bilan carbone des opérations. Le raisonnement en termes de cycle de vie plaide en faveur de la régénération des bâtiments et de leur emprise, en améliorant leur durée de vie et en les adaptant à nos attentes. Cette idée, qui a déjà mené le législateur à créer le « diagnostic déchets » en 2020 ([30]) et l’étude obligatoire sur la réversibilité des bâtiments en 2021 ([31]), a été reprise par le ministre chargé de la ville et du logement, qui a repris l’affirmation selon laquelle « 80 % de la ville de 2050 est déjà là », chiffre avancé dans le livre Réparons la ville ! de Sylvain Grisot et Christine Leconte ([32]) sur la base d’une production annuelle équivalente à 1 % du parc de logements.

La seconde vie offrirait, selon les acteurs auditionnés, des avantages à la fois administratifs, puisqu’elle évite le stade du permis de construire, urbains, permettant de réinvestir des ensembles en barres ou en briquettes considérées comme ne contribuant pas à l’espace urbain, et environnementaux, puisqu’elle permet d’éviter la démolition et de diminuer le bilan carbone des opérations.

La directrice générale de l’Anru a souligné que ces démarches s’inscrivent dans le cahier des charges de l’agence, qui vise depuis sa naissance à réparer la ville et à refaire la ville sur la ville. Elle a rappelé que, si les opérations sont plus chères, elles permettent toutefois d’éviter un faisceau d’externalités négatives dont des coûts humains et sociaux importantes. L’Anru favorise d’ores et déjà la rénovation en BBC (voir l’encadré, ci-après), faisant ainsi sortir 80 à 90 % des ménages concernés par des travaux de réhabilitation dans son parc, de la précarité énergétique. Elle continue d’adapter ses modèles aussi pour développer des méthodes favorables à l’émergence d’améliorations énergétiques compatibles avec la préservation de la qualité patrimoniale.

De telles réhabilitations ou « régénérations » fournissent également l’occasion d’aller au-delà des adaptations thermiques : mise à niveau de la cuisine et de la salle d’eau, ajout d’ascenseurs, pose de balcons en même temps que l’isolation par l’extérieur, réorganisation de l’emprise, amélioration du coefficient de biotope ou de pleine terre. Afin d’optimiser le bilan carbone de la production de logements, il est recommandé, quand cela est possible, de préserver la façade et la structure béton du bâtiment. Ces opérations peuvent permettre aussi de faire évoluer la typologie des logements proposés pour les adapter aux besoins de notre époque, en transformant par exemple des grandes surfaces en petites surfaces là où la demande pour ces dernières a augmentée.

En revanche, les coûts de ces opérations sont comparables à ceux de la production neuve (au-delà de 100 000 euros par logement) ([33]). À ce titre, l’opération ferait l’objet d’un nouvel agrément, d’une nouvelle exonération de dix ans de la taxe foncière, et pourrait bénéficier des prêts disponibles pour le financement du logement social neuf.

Le label BBC-rénovation

Les nouveaux logements sont tenus d’être conformes à la norme bâtiment basse consommation (BBC) correspondant à la dernière réglementation en vigueur. Depuis le 1er janvier 2022, il s’agit de la réglementation environnementale 2020 (RE2020).

Le label BBC est attribué aux bâtiments qui ont une basse consommation d’énergie pour cinq postes de consommation : le chauffage, la climatisation, l’eau chaude sanitaire, la ventilation et l’éclairage.

Le label BBC-rénovation est adapté aux bâtiments anciens. La consommation d’énergie primaire (CEP) des bâtiments à usage d’habitation doit être inférieure ou égale à 80 kWhep/m² par an, seuil modulé en fonction de la localisation et, le cas échéant, de la production locale d’électricité.

Pour rappel, fondée sur le respect de l’accord de Paris et introduite par loi de transition énergétique pour la croissance verte, la stratégie nationale bas-carbone s’appuie sur un scénario d’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050, et comprend les quatre orientations suivantes pour le bâtiment :

– orientation B 1 : guider l’évolution du mix énergétique sur la phase d’usage des bâtiments existants et neufs vers une consommation énergétique totalement décarbonée ;

– orientation B 2 : inciter à une rénovation de l’ensemble du parc existant résidentiel et tertiaire afin d’atteindre un niveau BBC équivalent en moyenne sur l’ensemble du parc ;

– orientation B 3 : accroître les niveaux de performance en matière d’énergie et de carbone sur les bâtiments neufs dans les futures réglementations environnementales ;

– orientation B 4 : viser une meilleure efficacité énergétique des équipements et une sobriété des usages.

B.   des outils financiers amplifiÉs pour accompagner la transition Écologique des territoires

Depuis 2020, l’État a créé des outils spécifiques pour accompagner les transitions urbaines et de l’habitat dans les territoires, et ainsi pour mieux inciter les décideurs locaux à entreprendre des projets. Les professions du bâtiment, de leur côté, sont également engagées dans la transition écologique : la Fédération française du bâtiment a signalé l’amélioration des pratiques d’un secteur où les approches environnementales et la sobriété foncière sont développées tant au niveau des opérations d’aménagement qu’à celui des parcelles dévolues à la construction.

Concernant la taille des parcelles, par exemple, qui constitue une préoccupation centrale dans la lutte contre l’étalement urbain, la surface moyenne des terrains dans le diffus est passée de 1 332 mètres carrés en 2007 à 924 mètres carrés en 2020, soit une évolution de - 31 % ([34]). Une plus large place est désormais consacrée à la pleine terre et à la végétalisation des espaces libres, ce qui accompagne les évolutions législatives en faveur du renforcement des obligations de biotope.

Ces évolutions, largement relayées, contribuent aux côtés des outils mis en place ces dernières années par les pouvoirs publics pour accompagner le changement de méthode dans les territoires.

1.   Le fonds friches, un dispositif couronné de succès

Dans le cadre du plan de relance adopté en 2020, le Gouvernement avait déployé un fonds exceptionnel pour le financement des opérations de recyclage des friches. Les acteurs auditionnés par votre rapporteur se sont globalement dits très satisfaits des résultats de cette initiative, qui a permis d’accompagner utilement les collectivités dans une période compliquée.

Le fonds reposait initialement sur une enveloppe de 300 M€, abondée une première fois de 350 M€ en mai 2021, puis une seconde fois de 100 M€ supplémentaires en janvier 2022, compte tenu du succès connu par les deux premières éditions du fonds et des besoins exprimés par les territoires. Au total, ce sont donc 750 M€ qui ont été alloués sur la période 2020-2022 pour le recyclage des friches en vue de permettre la réalisation de projets d’aménagement et de construction.

Selon les données transmises par la DHUP, les trois premières éditions du fonds ont accompagné un total de 1 382 projets lauréats, qui permettront de recycler, à horizon fin 2024, environ 3 375 hectares de friches, et de générer près de 6,7 millions de mètres carrés de surfaces de logements, dont plus d’un tiers de logements sociaux, ainsi que plus de 4,8 millions de mètres carrés de surfaces économiques (bureaux, commerces, industrie…) et plus de 4 millions de mètres carrés d’équipements publics.

Les sites lauréats concernent l’intégralité du territoire hexagonal et ultramarin, chaque département bénéficiant d’au moins un site lauréat. Le fonds participe puissamment à la revitalisation des territoires, puisque près de 50 % des projets lauréats sont inscrits dans les dispositifs « Petites villes de demain » (PVD) ou « Action Cœur de ville » (ACV) et près des deux tiers sont inscrits dans au moins un dispositif contractuel avec l’État (tel qu’une opération de revitalisation de territoire inscrite dans PVD ou ACV ou non, un projet partenarial d’aménagement ou le programme « Territoires d’industrie »). Une attention est portée à la qualité environnementale des projets, au travers de labels ou certifications en ce sens.

Le fonds friches finance également des outils numériques de connaissance des gisements fonciers mis à la disposition des collectivités : Cartofriches, un inventaire national des friches porté par le ministère de la transition écologique, UrbanSimul, un outil d’appui à la définition d’une stratégie foncière et UrbanVitaliz, un outil d’aide au montage des projets de recyclage.

Compte tenu du succès de ce fonds et des enjeux liés à lutte contre l’artificialisation des sols, sa pérennisation a été annoncée dès septembre 2021. Dans le cadre du présent PLF, il sera intégré au fonds d’accélération à la transition écologique dit « fonds vert », ce que votre rapporteur salue.

2.   Le fonds de renaturation des villes, une initiative à saluer

Votre rapporteur estime que l’action en faveur d’un urbanisme sobre et à taille humaine, ne doit pas se faire en négligeant la qualité de vie en ville, qui passe notamment par l’encouragement de la présence d’espaces verts et la lutte contre les îlots de chaleur, problématique d’autant plus pressante que l’inadaptation des centres urbains aux mutations climatiques s’accentue.

À cet effet, le rapporteur salue l’annonce par le Gouvernement, le 14 juin dernier, et l’inclusion dans le PLF, de la création d’un fonds de renaturation des villes, doté de 100 M€ par an. Celui-ci doit permettre de cofinancer des solutions d’adaptation au changement climatique, fondées sur la présence de la nature en ville (lutte contre les îlots de chaleur ou les inondations) aux côtés des collectivités volontaires.

Le fonds de renaturation des villes financera exclusivement des projets situés dans l’emprise urbaine des communes et portant sur :

– la renaturation des sols et des espaces urbains : création, restauration, gestion écologique de parcs et jardins, végétalisation des espaces publics (alignement et végétalisation des pieds d’arbres), projets d’agriculture urbaine favorables à la biodiversité, restauration écologique (stabilisation et renaturation des sols, etc.) ;

– la présence de l’eau et des milieux aquatiques en ville : restauration du réseau hydrographique (réouverture ou renaturation de cours d’eau, reméandrage, stabilisation et reprofilage de berges), des zones humides, des zones d’expansion des crues, création de noues (fossés) et de zones d’infiltration des eaux pluviales (et de désimperméabilisation des sols) ;

– la végétalisation des bâtiments et équipements publics par l’installation de toitures et façades végétalisées.

Votre rapporteur se réjouit de la création d’une enveloppe consacrée à ce besoin impérieux, et les acteurs auditionnés ont salué cette étape. Le Cerema et France Ville durable, acteurs spécialistes du domaine, ont souligné aussi le besoin d’accompagner en ingénierie et en expertise les collectivités sur ces problématiques émergentes.

Ces initiatives sont regroupées dans le présent PLF au sein d’un nouveau programme 380 qui porte un abondement de 1,5 Md€ en autorisations d’engagement du fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, dit « fonds vert ». La création de ce programme et de ce fonds ainsi que leur dotation très importante illustrent la priorité accordée à la transition écologique et territoriale et répond au besoin de doter ces accompagnements de la plus grande visibilité, ce qui est essentiel pour que les collectivités s’en saisissent pleinement.

Le nouveau programme 380 et le fonds d’accélération de la
transition écologique dans les territoires

Ce nouveau programme porte le « fonds vert » et vise à ce titre à encourager et accompagner l’action des collectivités selon trois axes :

– axe « performance environnementale » : cette action vise à encourager les démarches de performance environnementale et notamment énergétique. Les collectivités pourront accélérer la rénovation énergétique de leurs bâtiments. En fonction de l’intérêt des porteurs de projet, de l’efficacité attendue et de la disponibilité des crédits, le fonds pourrait également soutenir des projets urbains (ex. modernisation de l’éclairage public) ;

– axe « adaptation des territoires au changement climatique » : cette action, qui concrétise notamment l’annonce de la Première ministre du 14 juin dernier relative à la renaturation des villes pour réduire les îlots de chaleur urbains, recouvre un ensemble de mesures destinées à la prévention des risques naturels, comme le recul du trait de côte en territoire littoral ;

– axe « amélioration du cadre de vie » : cette action soutient notamment des projets de sobriété foncière grâce au renouvellement de l’usage des friches (suite du fonds friche) et à la restructuration des locaux d’activité, engagés dans le cadre du plan France relance ; elle soutient aussi l’accompagnement des collectivités territoriales dans le déploiement des zones à faibles émissions (ZFE-m) ou encore des actions de préservation de la biodiversité.

Le fonds est abondé à hauteur de 1,5 Md€ en AE et 375 M€ en CP.

C.   des outils fiscaux À repenser pour mieux parer À la raréfaction foncière et accompagner les transitions

Les dispositifs d’incitation à l’investissement locatif dans le logement neuf représentent depuis 1984 ([35]) une dépense fiscale importante qui constitue un pilier de la politique du logement et de l’accompagnement public du BTP en France. Ces dispositifs sont actuellement dans une phase de transition suscitée au premier chef par la disparition programmée du dispositif Pinel, et par la volonté de trouver un instrument qui crée une incitation en faveur d’un logement durable et adapté aux exigences de la transition écologique.

1.   Accompagner l’extinction du « Pinel » et préparer sa succession

L’avantage fiscal « Pinel », outil d’investissement dans le logement locatif intermédiaire (LLI) neuf, avec un coût estimé de 1,4 Md€ en 2021, a fait l’objet de deux recentrements successifs qui préparent la sortie du dispositif :

– en premier lieu, depuis le 1er janvier 2018, le dispositif ne bénéfice qu’aux seules acquisitions ou constructions de logements réalisées dans les zones A, A bis et B1 du territoire ainsi qu’aux logements situés dans des communes dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de site de défense (CRSD) ou l’a été dans un délai de huit ans précédant l’investissement ;

– en second lieu, à compter du 1er janvier 2021, afin de mettre en cohérence l’investissement locatif avec l’objectif de lutte contre l’artificialisation des sols, le dispositif ne bénéficie plus à l’habitat individuel ([36]), son avantage étant donc réservé aux investissements dans les bâtiments d’habitation collectifs.

L’extinction progressive à compter de 2023 est décidée depuis 2020 ([37]), avec une diminution des taux de déduction à compter de 2023, à l’exception des investissements réalisés à destination de logements situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) et de ceux qui remplissent des critères de qualité, à la fois en matière de confort (surface minimale, espaces extérieurs, caractère traversant), et de performance énergétique et environnementale.

 

La réduction d’impôt « Pinel »

Le dispositif « Pinel » est une réduction d’impôt en faveur du logement locatif neuf à loyer plafonné, dit « intermédiaire », introduite par la loi de finances pour 2015 ([38]) dans la lignée des réductions d’impôt pour l’investissement locatif (voir note page 47). Cette mesure s’inscrit dans la volonté du gouvernement de l’époque de poursuivre quatre objectifs :

– soutenir l’investissement dans l’immobilier locatif en accompagnant une offre de logements neufs de qualité à un prix inférieur de 20 % aux prix du marché ;

– soutenir la construction de logements, particulièrement dans les zones tendues, l’outil constituant un levier majeur de l’appui de l’État au secteur du BTP, ciblant les zones de tensions immobilières dans le but de maintenir une offre locative dans les centres urbains caractérisés par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logement ;

– proposer une offre de logement intermédiaire pour les ménages qui n’ont pas accès au logement social, diversifiant ainsi la qualité de l’offre locative et participant à l’objectif de mixité sociale et d’équilibrage territorial ;

– offrir une possibilité d’investissement aux ménages fortement fiscalisés.

Le dispositif Pinel accorde aux particuliers qui investissent dans un logement neuf en état futur d’achèvement (VEFA) ou dans le capital d’une société civile de placement immobilier (SCPI) entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2024 ([39]), une réduction d’impôt sur le revenu calculée à partir du prix d’achat du bien.

Pour les biens acquis entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2022, la réduction d’impôt s’étale sur 6 ans à hauteur de 2 % du prix de vente par an, soit un total de 12 %. A la fin de cette période, si le logement est toujours loué, deux prolongations de trois ans peuvent être consenties. Durant la première prolongation, la réduction reste de 2 % par an, lors de la seconde (18 % après neuf ans), celle-ci tombe à 1 % par an (21 % après 12 ans([40]). Deux limites s’appliquent à cette réduction : le montant de l’investissement ne peut dépasser les 300 000 euros par an et les 5 500 euros par mètre carré. Le dispositif Pinel entre dans le cadre du plafonnement des niches fiscales à 10 000 euros par an.

Concernant les biens acquis entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2024, la loi de finances pour 2021 prévoit une baisse de la réduction d’impôt. Pour l’année 2023, elle s’élèvera ainsi à 10,5 % sur 6 ans, 15 % sur 9 ans et 16,5 % sur 12 ans. Pour l’année 2024, elle sera plafonnée à 9 %, 12 % et 14 %, respectivement.

Le dispositif Pinel est soumis à des conditions d’éligibilité. Les logements doivent être situés dans une commune classée en zone tendue. Pour bénéficier du dispositif, il faut également respecter un plafonnement des loyers au mètre carré et un plafonnement des revenus du locataire, précisés par décret ([41]).

La mise en extinction de cette aide, qui structure en partie la production de l’habitat privé en France, puisqu’elle correspond à 50 % de l’activité des promoteurs selon la Fédération des promoteurs immobiliers, a été recommandée par une mission d’évaluation interministérielle en 2019 ([42]). Cette préconisation reposait sur une évaluation mitigée des effets d’une dépense fiscale dont les avatars successifs ont vu leur poids multiplié par quatre entre 2005 et 2018, parvenant en fin de période à une dépense annuelle de 2,2 Md€ (voir schéma).

CoÛts budgÉtaires des dispositifs d’investissement locatif 2005-2018

Source : données issues des tomes II des annexes « Voies et moyens » des projets de lois de finances des exercices concernés ; représentation CGEDD-IGF.

En effet, les inspections ont estimé que cette dépense publique n’engendre pas de recettes fiscales suffisantes pour que le bilan en soit positif. Plusieurs hypothèses concernant l’effet d’aubaine des investisseurs, la part des locataires qui auraient pu décohabiter et la part des sommes investies que l’investisseur aurait consommées ont été testées, aucune combinaison n’ayant abouti à un surplus pour les finances publiques.

En application des préconisations du rapport d’évaluation interministérielle de novembre 2019, le législateur a prévu en 2020 une sortie progressive du dispositif à compter de 2023, avec une extinction définitive à la fin de l’année 2024. Cette sortie s’accompagne d’une diminution significative des taux de réduction d’impôt à partir de 2023 (voir encadré), à l’exception toutefois des investissements réalisés pour des logements situés en quartier prioritaire ou des logements correspondants à des critères environnementaux exigeants.

L’extinction du dispositif d’investissement locatif principal représente la fin d’une politique vieille de quarante ans. À ce titre, la disparition des investisseurs particuliers Pinel doit être palliée par le retour des investisseurs institutionnels, globalement peu présents sur le marché de l’habitat privé en France. C’est pour cette raison que l’agrément préalable auparavant nécessaire pour une personne morale afin de pouvoir investir dans le logement intermédiaire a été supprimé en 2020 ([43]), évolution assortie d’une obligation de déclaration sur les opérations de logements ([44]).

Votre rapporteur propose de maintenir le rythme de suppression prévu, de lier l’avenir de ce dispositif et des crédits qui lui sont consacrés à celui du « Denormandie dans l’ancien » et d’envisager un nouveau dispositif fiscal de soutien à la construction et la réhabilitation, en phase avec les objectifs environnementaux et urbanistiques fixés.

2.   Repenser le « Denormandie dans l’ancien » pour mieux l’adapter à nos enjeux

Le dispositif « Denormandie dans l’ancien » n’a pas encore connu la montée en charge espérée. Un millier d’investisseurs en ont bénéficié en 2021 pour un coût total estimé de 1 million d’euros. Les projections transmises à votre rapporteur font état d’une attente à 3 M€ en 2023. Ce dispositif devant s’éteindre en décembre 2023, une évaluation interviendra avant cette date et votre rapporteur souhaite qu’elle soit menée conjointement avec un travail sur le Malraux dont les objectifs sont similaires et qui a fait ses preuves depuis de nombreuses années. Cette évaluation devait d’ailleurs être remise au Parlement avant le 30 septembre 2022 ([45]).

Ce travail devrait être mené comme partie d’un travail d’évaluation global sur les aides à la pierre dans l’ancien, qui pourrait donc intégrer dans son champ le dispositif dit Malraux mis en œuvre par le ministère de la culture et de la communication. À noter que ce rattachement, s’il est fondé sur la nécessaire préservation architecturale et patrimoniale de nos centres anciens, n’est pas sans poser des difficultés de mises en œuvre, en particulier dans les sites patrimoniaux remarquables où les avis conformes des architectes des bâtiments de France, qui ne tiennent compte que des enjeux patrimoniaux, sont parfois incompatibles avec les objectifs de rénovation énergétique des bâtiments.

L’objectif du « Denormandie dans l’ancien » est d’améliorer la qualité du parc immobilier des centres urbains et de répondre au besoin de logement des populations en rénovant l’ancien plutôt qu’en construisant du neuf. Il s’agit donc d’un instrument fiscal particulièrement adapté aux exigences de la qualité urbaine et de la sobriété foncière. Ce dispositif est ciblé sur des territoires en cours de revitalisation et couverts par les programmes de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (programmes « Action Cœur de ville » et « Petites villes de demain »).

Votre rapporteur estime que compte tenu des objectifs de construction de logement, des impératifs environnementaux et urbanistiques ainsi que du nécessaire soutien à apporter au secteur du bâtiment en pleine transition, le faible succès de ce dispositif et la suppression progressive du dispositif « Pinel » encouragent à repenser un nouveau dispositif fiscal politiquement réorienté et plus globalement la fiscalité immobilière bâtie ou non bâtie comme cela a commencé à être fait avec la suppression de la taxe d’habitation et les évolutions desdits dispositifs fiscaux précités.

La réduction d’impôt « Denormandie dans l’ancien »

La réduction d’impôt « Denormandie dans l’ancien » ([46]) ouvre droit à une réduction fiscale pour tout achat d’un logement ancien, situé dans les villes faisant l’objet d’une opération de revitalisation de territoire (ORT) et confrontées à un habitat dégradé, sous condition de réhabilitation (performance énergétique, modernisation, assainissement, aménagement des surfaces habitables), que le contribuable acquiert entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2023 ([47]) et qui fait ou a fait l’objet de travaux de rénovation.

Les travaux de rénovation engagés après l’achat doivent représenter au moins 25 % du coût total de l’opération, dans l’optique d’une réhabilitation du bien acheté, et l’acquéreur s’engage à louer le logement rénové pour une durée comprise entre 6 et 12 ans. Le dispositif « Denormandie » bénéficie à ce titre des mêmes taux de réduction d’impôt que le dispositif « Pinel » (voir encadré précédent). Reconduit en 2021 jusqu’au 31 décembre 2023, il n’est pas concerné par la réduction progressive des taux du Pinel en 2023 et 2024.

Pour les biens acquis entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2024, la réduction d’impôt s’étale sur 6 ans à hauteur de 2 % du prix de vente par an, soit un total de 12 %. À la fin de cette période, si le logement est toujours loué, deux prolongations de trois ans peuvent être consenties. Durant la première prolongation, la réduction reste de 2 % par an, lors de la seconde (18 % après neuf ans), celle-ci tombe à 1 % par an (21 % après 12 ans([48]). Deux limites s’appliquent à cette réduction : le montant de l’investissement ne peut dépasser les 300 000 euros par an et les 5 500 euros par mètre carré. Le dispositif « Denormandie dans l’ancien » entre dans le cadre du plafonnement des niches fiscales à 10 000 euros par an.

3.   Mieux soutenir l’accession à la propriété par le prêt à taux zéro

Le prêt à taux zéro (PTZ) est en transition, la dernière loi de finances ne l’ayant prorogé que jusqu’au 31 décembre 2023 ([49]). Après avoir atteint près de 115 000 prêts versés en 2017, 66 000 prêts ont été versées en 2020. Au même titre que le « Pinel », il a fait l’objet de recentrements successifs. Dans le neuf, le PTZ a été prorogé et recentré à compter de 2018 sur les zones A et B1, de manière à encourager la production dans les secteurs reconnus comme les plus tendus ([50]). Cependant, le Gouvernement souhaitant accompagner cette transition, le PTZ neuf avait été conservé pour 2018 et 2019 en zones B2 et C, avec une quotité de prêt abaissée à 20 % du coût de l’opération.

Le prêt à taux zéro

Le prêt à taux zéro (PTZ) est un dispositif d’accession à la propriété destiné aux
primo-accédants, en particulier les plus modestes, qui permet de financer l’acquisition de logements dans l’ancien. Il prend la forme d’un prêt à 0 %, ouvrant droit à un crédit d’impôt sur l’impôt sur les sociétés pour les banques distributrices. Il peut représenter jusqu’à 40 % du montant de l’opération financée.

Le PTZ est destiné aux personnes physiques qui n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux années précédant l’offre de prêt. Cette condition est réputée respectée pour les personnes en invalidité ou victimes d’une catastrophe naturelle ayant conduit à rendre inhabitable leur précédent logement. L’éligibilité est soumise, à compter du 1er janvier 2012, au respect de plafonds de ressources, calculés en fonction de la localisation du logement et de la composition du ménage (à titre d’exemple, ce plafond est de 37 000 euros annuels pour une personne seule en zone A, ou de 51 000 euros annuels pour un ménage de trois personnes en zone B1,

Le montant du PTZ est égal à une quotité du coût total de l’opération retenue dans la limite d’un plafond et du montant du ou des autres prêts (d’une durée supérieure ou égale à deux ans) concourant au financement de l’opération. La quotité est définie en fonction de la nature du logement et de la zone géographique (A, B1, B2, C).

Dans ces mêmes zones B2 et C, reconnues comme moins tendues, la remise sur le marché de logements anciens constitue l’enjeu majeur. C’est pourquoi le PTZ ancien a été prolongé dans ces zones avec une quotité de 40 %, afin de promouvoir notamment la revitalisation des centres-villes ([51]). Son bénéfice est également conditionné à la réalisation de travaux d’économie d’énergie ou d’amélioration représentant, comme pour le « Denormandie dans l’ancien », au moins 25 % du coût total de l’opération à financer, ce qui en réduit fortement le champ. En soutenant les ménages dans leur projet d’acquisition et de rénovation de biens existants, le dispositif contribue à la réduction de la consommation de l’espace. Plus de 15 000 PTZ dans l’ancien, soit 20,5 % de l’ensemble des PTZ, ont été distribués en 2021 en France métropolitaine.

Globalement, les aides à l’accession, si elles sont mieux inscrites dans des démarches de sobriété foncière, doivent être maintenues ou renforcées dans un contexte de hausse des coûts d’acquisition, de réhabilitation et d’emprunt. Elles demeurent un vecteur essentiel de mixité sociale, et peuvent contribuer décisivement à la maîtrise de la qualité des projets de construction. Ainsi, le prêt à taux zéro, tout en voyant son accès élargi, pourrait voir son obtention subordonnée à un indice de sobriété foncière.

4.   Réviser la fiscalité des meublés de tourisme pour rétablir l’attractivité de l’investissement locatif de longue durée

Une difficulté souvent pointée concerne le statut des meublés de tourisme, en particulier ceux qui sont mis en location par l’intermédiaire d’une plateforme électronique, notamment Airbnb et Abritel. Ces pratiques sont largement perçues comme ayant drainé une partie du parc locatif du logement, et contribué de ce fait à la hausse des coûts du logement locatif dans les communes concernées, surtout des communes touristiques au marché locatif souvent tendu ([52]).

Selon un rapport rendu en juin 2022 par une mission interministérielle sur l’attrition des résidences secondaires dans les zones touristiques, dans les communes tendues caractérisées comme touristiques par cette mission, on observe une faible part de logements proposés à la location de longue durée non meublée à vocation de résidence principale, ainsi qu’une part de propriétaires occupants moins élevée que dans les autres communes (59,9 % dans les communes tendues caractérisées comme touristiques, contre 66,7 % dans les autres communes). La mission a également relevé une proportion de primo-propriétaires et de primolocataires dans ces communes très inférieure par rapport au reste du territoire.

Ainsi, plus le meublé de tourisme est développé, moins le marché locatif de longue durée est dynamique et moins l’accès à la propriété ou plus globalement au logement est facilité, en particulier pour les primo-accédants ou primo-loueurs.

En plus d’une rentabilité plus élevée offerte à l’investisseur, cela s’explique notamment par le fait que la fiscalité des revenus de la location est plus avantageuse pour les meublés de tourisme classés : en effet, la location d’un logement nu bénéficie d’un abattement forfaitaire de 30 % dans le cadre du régime micro-foncier si les revenus fonciers sont inférieurs à 15 000 euros, alors que les locations meublées bénéficient dans le régime micro-BIC d’un abattement forfaitaire de 50 % et même de 71 % si le bien est classé meublé de tourisme, avec un seuil de recettes de 72 600 euros, et un seuil de 176 200 euros pour les meublés de tourisme et les chambres d’hôte.

La mission propose de supprimer cet avantage, voire d’aligner l’ensemble des dispositions fiscales entre les locations meublées (touristiques ou non) et non-meublées. En effet, la distinction fiscale entre meublé et non meublé se justifiait lors de sa mise en œuvre par une pénurie d’offre de logements meublés sur le marché locatif. Les dynamiques étant désormais inversées, une régularisation fiscale semble s’imposer.

Par ailleurs, la mission a fait le constat qu’un certain nombre de dépenses fiscales incitent, depuis des années, à l’investissement dans la production de meublés de tourisme. Ces dispositifs ([53]) sont éteints ou en voie d’extinction, mais continuent néanmoins de produire des effets, puisqu’ils financent des opérations dont la réalisation prend généralement plusieurs années. La mission préconise d’accélérer leur extinction, et votre rapporteur soutient cette proposition.

Votre rapporteur estime en outre qu’il serait opportun de réviser les critères de définition des communes relevant d’une « zone tendue » faisant face à des difficultés particulières d’accès au logement et pour lesquelles deux dispositifs fiscaux incitatifs frappant la sous-occupation des logements sont applicables : d’une part, la taxe annuelle sur les logements vacants et, d’autre part, la majoration de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, instituée sur délibération communale.

Au-delà des interrogations sur le régime fiscal de ces biens, des questions majeures se posent concernant leur régime au regard des obligations de décence et notamment des obligations de rénovation énergétique. La loi Climat et résilience ayant établi une obligation de rénovation énergétique de tous les logements du parc locatif, l’absence d’une obligation analogue concernant les meublés de tourisme serait de nature à précipiter la conversion de logements locatifs en biens touristiques, contraignant encore davantage le marché locatif. Il semble impératif d’agir rapidement pour remédier à cette différence de traitement et votre rapporteur propose ainsi d’imposer l’exigence d’un DPE pour les meublés de tourisme qui seraient alors soumis aux mêmes obligations de performance énergétique que tout autre logement loué.


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   EXAMEN EN COMMISSION

 

Au cours de sa réunion du mardi 11 octobre 2022, la commission a procédé à l’examen pour avis, sur le rapport de M. Bastien Marchive, des crédits de la mission « Cohésion des territoires », en ce qui concerne le logement et l’urbanisme.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Cette année, le PLF est incontestablement marqué par la guerre en Ukraine, qui dure depuis maintenant huit mois et engendre une inflation jamais vue depuis le milieu des années 1980. Et encore, faut-il le rappeler, la France est le pays d’Europe qui résiste le mieux à l’inflation, notamment grâce à l’État, qui a très vite pris ses responsabilités. En effet, en application de la loi de finances rectificative et de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, adoptées pendant l’été, 20 milliards d’euros ont été débloqués et un bouclier tarifaire a été instauré afin de soutenir le pouvoir d’achat des Français.

Ce PLF a la même ambition et le logement, qui constitue le premier poste de dépenses de nos concitoyens, est largement soutenu. Pour autant, les difficultés ne sont pas encore derrière nous, en particulier pour ce secteur qui a déjà été lourdement frappé par la crise du covid-19. Qu’il s’agisse de la démétropolisation au bénéfice des villes moyennes et de la périurbanité ou du développement du télétravail, nous avons tous pu constater une évolution significative des attentes de nos compatriotes en matière de logement et de cadre de vie.

Victime de l’inflation et de la pénurie qui concerne particulièrement les matériaux de construction, la demande de logement est aujourd’hui très élevée alors que l’offre s’amenuise. Si le nombre des transactions a atteint des niveaux records, c’est également le cas pour leur montant.

Un constat s’impose. Le logement et l’urbanisme sont confrontés à des défis de grande ampleur et doivent se réinventer en visant deux objectifs majeurs : l’accès au logement pour tous et la réussite de la transition environnementale. Telle est l’ambition que traduisent les crédits que je vous présente.

L’accès au logement pour tous est l’un des piliers de la promesse républicaine d’émancipation, de solidarité et de dignité. Il suppose d’accompagner les Français aux différents âges de la vie et tout au long de leur parcours résidentiel.

Les aides au logement, qui constituent la plus grande partie du budget de l’État en la matière, prennent toute leur part dans cet effort. Avec la revalorisation de 3,5 % votée cet été, près de 300 millions d’euros supplémentaires sont prévus, ce qui porte les crédits à 13,3 milliards et permet de maintenir les impayés à un niveau constant. Quant à la réforme du versement en temps réel, elle constitue une réussite selon le directeur de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), puisqu’elle a permis d’ajuster le versement des prestations au plus près des ressources des bénéficiaires et de l’accélérer.

Voilà qui est de bon augure avant la grande mesure de justice sociale qu’est la solidarité à la source. En cours d’expérimentation, cette réforme mettra fin au non-recours par nos concitoyens à l’ensemble des prestations sociales auxquelles ils ont droit. Elle se traduira également par une baisse drastique des erreurs de versement et des fraudes, toujours au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin, ce dont on ne peut que se réjouir.

Si les aides concourent à garantir aux locataires l’accès à un logement, l’objectif est bien de leur permettre de devenir propriétaires. Le renforcement du prêt à taux zéro (PTZ) et de l’accompagnement à l’accession à la propriété ou encore la prime de transformation de l’habitat « MaPrimeAdapt’ » sont des outils à notre disposition pour y contribuer. Il en est de même pour le taux d’usure, nécessaire à la protection des Français les plus modestes, sur lequel notre président et moi avons alerté la Banque de France. L’évolution du mode de calcul proposée par l’Union sociale de l’habitat (USH), en vue de comptabiliser l’accession sociale de manière différenciée, pour permettre son accès à un plus grand nombre, semble une piste intéressante.

Néanmoins, avoir un logement ne fait pas tout. Encore faut-il qu’il soit digne et décent. Tel était déjà l’objet de la loi Elan et des mesures de résorption de l’habitat indigne qu’elle contenait, notamment pour lutter contre les marchands de sommeil. Tel est aussi l’objet de notre politique de rénovation énergétique, qui améliore le confort de vie des Français à mesure qu’elle réduit l’impact environnemental du logement.

Là aussi, le budget traduit nos ambitions en augmentant de plus de 15 % les crédits consacrés au dispositif « MaPrimeRénov’ », lesquels avaient déjà doublé l’an dernier et atteindront 2,8 milliards d’euros en 2023. L’Agence nationale de l’habitat (Anah) a, depuis la création du dispositif qu’elle gère, doublé ses effectifs et multiplié par dix son activité, passant de 75 000 logements rénovés en 2017 à 750 000 l’an dernier. Ces chiffres traduisent le succès du dispositif. Certes, tout n’est pas encore parfait puisque selon l’Anah, 85 % des chantiers financés concernent des opérations monogestes, mais la transition énergétique est en marche.

« MaPrimeRénov’ » est une porte d’entrée inédite dans le logement de tous les Français. L’essentiel de la hausse des crédits du programme est destiné à renforcer le dispositif « MaPrimeRénov’ Sérénité » afin d’amplifier la rénovation énergétique globale des logements.

Des pistes d’amélioration demeurent, notamment pour mieux corréler le montant de la prime à celui de l’investissement réalisé. Il ressort également des auditions que le faible taux d’accompagnement des ménages relevant des déciles supérieurs nuit à l’attractivité du dispositif. Enfin, les modalités d’accompagnement des copropriétés, qui représentent 10 millions de logements en France, devront être renforcées car du retard est pris en raison de la complexité des situations.

Si « MaPrimeRénov’ » s’adresse au parc privé, le logement social est lui aussi partie intégrante de cet effort de sobriété. Comme l’a souligné Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH, le parc social fait déjà office d’exemple en matière de performance énergétique puisque 82 % des logements sociaux sont classés de A à D. Pour atteindre nos objectifs en matière de décence, l’effort doit être poursuivi et le renfort de 200 millions d’euros du Fonds national des aides à la pierre (Fnap) est à la hauteur des enjeux.

L’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) joue également un rôle essentiel dans le renouvellement urbain des quartiers prioritaires et la rénovation du parc social. Après une phase de conception de cinq ans, le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) commence à décaisser les sommes nécessaires et les chantiers débutent.

À côté de l’accompagnement social, l’effort en faveur de la transition écologique et de la décence des logements constitue un des piliers de notre politique. Cette transition nécessite toutefois une réflexion globale sur nos modes d’habitat, de développement urbain et d’aménagement du territoire.

Dans une perspective de sobriété et de souveraineté alimentaire, l’un des axes majeurs de notre politique urbanistique est la protection des sols, en particulier lorsqu’ils sont naturels ou agricoles. L’objectif de réduction de l’artificialisation nette des sols, adopté de manière transpartisane dans le cadre de la loi « Climat et résilience », traduit cette ambition. La sauvegarde de la biodiversité mais aussi la lutte contre les îlots de chaleur et, à terme, contre les catastrophes naturelles y contribuent également.

Les élus locaux ont un rôle considérable à jouer. Vous n’êtes pas sans savoir que des discussions sont en cours pour parvenir à une mise en œuvre de l’objectif de réduction de l’artificialisation nette des sols dans les meilleures conditions possibles.

Préserver les sols ne signifie pas renoncer à toute nouvelle construction, loin de là. Cela suppose en revanche de revoir notre modèle de développement, historiquement fondé sur l’étalement urbain et le mitage des territoires, qui font de la France l’État européen le plus consommateur de foncier. L’heure est désormais au renouvellement urbain, à la construction de la ville sur la ville et à la densification du bâti. Cela fait des années que l’on en parle, et cela doit maintenant devenir une réalité.

Le Fonds vert, annoncé dès le mois de juillet par la Première ministre et abondé à hauteur de 1,5 milliard d’euros, voire de 2 milliards selon les dernières déclarations, est une preuve de notre engagement en la matière. Il vise à financer les projets qui concourent à la réhabilitation des friches urbaines, poursuivant ainsi le travail du fonds friches, qui a connu un tel succès depuis son lancement en 2020 qu’il a dû être réabondé à deux reprises.

L’amélioration du cadre de vie suppose enfin de réhabiliter nos centres-villes et nos centres-bourgs pour penser le développement à l’échelle du bassin de vie. Telle est la logique des programmes « Action Cœur de ville » et « Petites villes de demain », qui font appel aux notions de centralités structurantes et de projets de territoires.

Face à ces mutations, nous devons également repenser la fiscalité.

En ce qui concerne le foncier, les terrains constructibles non bâtis, qui iront nécessairement en se raréfiant, sont essentiels pour que nos territoires puissent poursuivre leur développement tout en protégeant les sols. Ils ne sauraient ainsi faire l’objet de rétentions foncières.

Une réforme fiscale est également nécessaire pour favoriser l’investissement locatif et répondre à une demande croissante des locataires. Cette réforme a commencé par la transformation du dispositif « Louer abordable » en « Loc’Avantages », qui vise à assouplir les conditions de l’investissement locatif. Les dispositifs « Pinel » et « Denormandie » dans l’ancien » devraient aussi évoluer : le premier, même s’il ne donne pas entière satisfaction et doit s’éteindre bientôt, reste à ce jour la principale source d’activité pour les promoteurs et aménageurs, qui voient le nombre de programmes prévus s’amenuiser ces dernières semaines ; quant au second, il n’a pas vraiment trouvé sa place.

La réflexion sur nos dispositifs fiscaux doit aussi intégrer la question du fort développement des meublés de tourisme, en particulier dans certains territoires côtiers ou montagneux. Ces logements bénéficient d’abattements fiscaux préférentiels par rapport aux locations de longue durée, alors que leur essor contribue à entretenir la spéculation immobilière dans la mesure où le marché locatif se tend. Dans certains secteurs, les résidents sont privés de logement parce que les biens jusqu’alors affectés à la location de longue durée sont transformés en meublés de tourisme. Un rééquilibrage des conditions de la concurrence entre le marché locatif et celui des meublés de tourisme semble nécessaire, par exemple en ce qui concerne les obligations de rénovation énergétique, auxquelles l’un est soumis et l’autre non. Je ne doute pas que nous nous doterons bientôt d’un instrument législatif en la matière.

Les changements à venir sont colossaux. Ils auront un impact majeur sur notre capacité à produire des logements abordables, économes en énergie et peu consommateurs de foncier. Le défi est immense, en particulier pour les acteurs de la construction, dont le modèle économique et les compétences devront être adaptés, tout comme pour les bailleurs sociaux qui, sans le soutien de l’État et des collectivités, ne pourraient faire face à la hausse des coûts de construction et à l’augmentation des prix du foncier.

J’insiste sur l’effort considérable fourni dans le PLF pour faire face aux défis qui nous attendent. La mobilisation en faveur de l’accès au logement pour tous et les moyens alloués pour adapter nos modèles urbains à la transition écologique sont importants, en particulier dans le contexte que nous traversons. J’émets donc un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Cohésion des territoires pour ce qui concerne le logement et l’urbanisme.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Thibault Bazin (LR). Les crédits de la mission Cohésion des territoires s’élèvent à 17,85 milliards d’euros en autorisations d’engagement, contre 17,2 milliards en 2022, soit une hausse de 3,84 %.

Je note des points positifs : l’amorce du déploiement du dispositif « MaPrimeAdapt’ », la hausse de 100 millions d’euros des crédits dédiés à « MaPrimeRénov’ » ou encore le plan contre le sans-abrisme.

Néanmoins, certains points suscitent une forte inquiétude, comme la ponction de 300 millions sur Action Logement, qui a été qualifiée de « décision inacceptable » et d’« affront au paritarisme ». Destinée à financer le Fnap, cette mesure, qui n’a pas fait l’objet de concertations, est vivement contestée. Près de 26 000 logements intermédiaires ne seront pas produits par sa faute.

Je pense aussi à la suppression de 7 000 places d’hébergement d’urgence. Quant à la construction de logement neuf, les annulations de réservations augmentent, et les acteurs anticipent une chute brutale du marché. L’accès au crédit devient problématique, et les inquiétudes sont renforcées par la mise en œuvre du zéro artificialisation nette (ZAN). Je conteste l’idée selon laquelle l’adoption de cette mesure aurait fait consensus. Il faudra absolument faire preuve de réalisme.

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est également une source d’inquiétude pour les propriétaires de logements.

Je salue la pérennisation du fonds friches mais les mesures en faveur du logement neuf sont insuffisantes. Un rapport préconisait en septembre 2021 la construction de 500 000 logements par an pour éviter une crise majeure de l’offre.

Le dispositif « Pinel » est encore raboté tandis que le PTZ prendra fin d’ici un an.

Les moyens consacrés au logement ne sont pas à la hauteur des ambitions que vous affichez, qu’il s’agisse de rénovation ou de construction.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Je vous remercie d’avoir tout de même reconnu des points positifs dans ce PLF.

Je n’aurai pas le temps de répondre à toutes vos remarques. S’agissant du ZAN, des discussions sont en cours pour préciser les modalités de sa mise en œuvre et les adapter aux territoires. Aucune des associations d’élus locaux que j’ai rencontrées n’est opposée au ZAN, dont je rappelle qu’il avait été validé en commission mixte paritaire.

Oui, la construction de nouveaux logements est indispensable mais nous avons à inventer un nouveau modèle. La hausse des coûts de construction et la raréfaction du foncier compliquent l’équation, et ce n’est évidemment pas à l’État de dicter les équilibres économiques.

Mme Anaïs Sabatini (RN). La politique du logement a été la grande perdante du quinquennat précédent. Le Gouvernement s’est contenté de mesures fiscales, là où les Français attendaient un plan massif de rénovation énergétique des logements afin de diminuer leur facture énergétique et de leur redonner du pouvoir d’achat. Ils auraient ainsi été mieux à même d’affronter la crise actuelle.

Un plan ambitieux et rapide de soutien à la rénovation des logements serait également bénéfique pour les petites entreprises françaises qui effectuent des travaux et créerait des emplois non délocalisables.

Le PLF pour 2023 renforce quelque peu les dispositifs d’aide à la rénovation énergétique, mais c’est un peu tard alors que nous nous enfonçons dans une crise énergétique majeure. La hausse du montant des aides doit nécessairement s’accompagner d’un choc de simplification et d’un meilleur accompagnement des bénéficiaires. En la matière, espérons que le dispositif « Mon Accompagnateur Rénov’ » ne sera pas une énième gesticulation de communication.

Malheureusement, il est peu probable que « MaPrimeAdapt’ », qui a vocation à remplacer plusieurs dispositifs au 1er janvier 2024, apportera les simplifications tant attendues : de nombreux Français qui souhaitent réaliser des travaux et sont éligibles aux aides renoncent, rebutés par la lourdeur administrative et la complexité des dispositifs. Il est urgent de simplifier ces usines à gaz.

La construction neuve est la grande absente du budget pour 2023 alors même qu’une crise de l’offre s’annonce. Le déficit de logements dans certains territoires fait l’objet d’un constat unanime. L’augmentation de 2 millions d’euros des crédits du Fnap n’apparaît clairement pas à la hauteur des attentes des jeunes salariés et des ménages français qui n’ont plus accès à un logement social ou doivent attendre plusieurs années pour en obtenir un. Alors que le logement est le premier poste de dépenses des ménages, la flambée des prix de l’énergie rend la situation insupportable pour un grand nombre de nos compatriotes. Dans ce contexte, il est regrettable que le projet de loi de finances pour 2023 ne reflète pas une prise de conscience de l’urgence et de la gravité de la situation du logement en France.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Vous réclamez un plan massif de rénovation énergétique des logements. Je ne sais pas si, à vos yeux, les 2,8 milliards d’euros attribués à « MaPrimeRénov’ » sont une paille mais c’est le plus grand plan qui ait jamais été lancé en la matière, et il a trouvé son public puisque 750 000 Français en ont bénéficié l’année dernière. « MaPrimeRénov’ Sérénité » vient le compléter en encourageant la rénovation globale.

Les mécanismes de soutien au logement social sont nombreux : le Fnap et le NPNRU se sont ainsi ajoutés aux dispositifs historiques d’accompagnement. La présidente de l’USH, que l’on ne peut pas soupçonner d’accointances avec le Gouvernement, précise que le parc social est le parc le plus propre sur le plan énergétique : 82 % des logements sont classés entre A et D en ce qui concerne leur performance énergétique ; quant aux logements restants, les bailleurs sociaux ont élaboré des plans pour les mettre à niveau. C’est un signe de la volonté de l’État, manifeste depuis plusieurs années, de proposer des logements sociaux dignes et décents.

Par ailleurs, les bénéficiaires des logements sociaux reçoivent une partie des 13 milliards d’euros alloués aux aides personnelles au logement (APL). Cela participe de l’accès au logement pour tous.

M. Philippe Naillet (SOC). Je n’évoquerai pas, même si elle nous heurte, la baisse des moyens de l’hébergement d’urgence, puisque ce n’est pas dans le champ de votre rapport.

Vous y rappelez à juste titre le rôle solvabilisateur et redistributif de l’APL. Pourtant, au cours du premier quinquennat du président Macron, pas moins de 12 milliards d’euros d’économies ont été réalisées sur elle – baisse de cinq euros, sous-indexations successives par rapport à l’inflation et mesures visant les bailleurs sociaux. Face à la crise du pouvoir d’achat causée par l’inflation, un effort de rattrapage substantiel sur le montant de l’APL n’est-il pas nécessaire ?

Vous consacrez une partie de votre rapport à la relance de la production de logements, dont la dynamique avait été brisée en 2017 par la politique fiscale du Président de la République. Notre groupe avait, dès la discussion de la loi Alur, esquissé une solution consistant à dissocier le bâti du foncier par le biais du bail réel solidaire (BRS). Notre ancien collègue Jean-Luc Lagleize avait proposé d’amplifier la dynamique dans une proposition de loi en 2019. Qu’en pensez-vous ?

Enfin, notre groupe s’inquiète comme vous du retard pris par l’État dans le financement de l’Anru et du NPNRU. Cela nous préoccupe d’autant plus que la réponse qui vous a été faite concernant un éventuel rattrapage est la même que celle qu’avait reçue M. Laqhila lorsqu’il était rapporteur spécial. Seriez-vous ouvert à un amendement visant à procéder dès à présent à un rattrapage ?

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Pour répondre à votre première remarque, je souligne que les crédits du programme Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables sont passés de 1,7 milliard d’euros en 2017 à 2,8 milliards pour 2023.

Les places d’hébergement d’urgence ouvertes pendant la crise du covid-19 visaient à répondre à une situation exceptionnelle. Le niveau auquel nous revenons est sensiblement supérieur à celui de 2017, à l’issue du mandat de François Hollande.

En ce qui concerne le NPNRU, je partage votre constat sur le retard dans les engagements de l’État – 92 millions d’euros ont été versés sur le 1,2 milliard promis d’ici à 2031. Le ministère, que nous avons alerté, fait état de discussions avec l’Anru et affirme que celle-ci verra son budget abondé lorsqu’elle sera pleinement en phase opérationnelle – cette phase commence seulement. L’Anru dispose aujourd’hui d’une trésorerie de 1 milliard d’euros, ce qui lui permet de continuer à avancer. La participation de l’État montera en puissance à mesure que les opérations se réaliseront.

M. Max Mathiasin (LIOT). L’ambition de la mission Cohésion des territoires en matière de logement est double : d’une part, favoriser l’accès de tous les citoyens à un logement décent et accompagner les parcours résidentiels ; d’autre part, réduire les multiples fractures qui traversent notre pays.

Sur ces deux enjeux majeurs, le budget est insuffisant. En ce qui concerne l’hébergement, je m’associe à la déception des associations quant à la suppression des 14 000 places créées pendant la crise du covid-19 et maintenues à l’issue de la trêve hivernale, alors que 300 000 personnes restent sans abri en France. Vous vous seriez honorés à maintenir cet accueil d’urgence. J’entends les arguments sur la nécessité de privilégier un accueil pérenne au lieu des nuitées d’hôtel. Mais à l’heure où la pauvreté explose, nous avons besoin des deux leviers : accueillir dans l’urgence ceux qui n’ont pas de logement et développer le logement accompagné.

Quant au logement social, il n’est pas vraiment un recours puisqu’il est lui aussi notoirement insuffisant. Je ne veux pas faire le procès du quinquennat précédent, mais il faut reconnaître que certaines décisions ont été très défavorables aux bailleurs sociaux. La baisse du montant de l’APL et la réduction de loyer de solidarité (RLS), bien que tempérée par le pacte d’investissement, ont pesé à hauteur de 1,3 milliard d’euros sur les finances des bailleurs sociaux et à terme, c’est leur capacité à investir qui s’en ressent.

J’en profite pour alerter sur la ponction de 300 millions d’euros sur la trésorerie d’Action Logement. Ce nouveau prélèvement pourrait représenter jusqu’à 26 000 logements abordables de moins à proposer aux salariés. Ce n’est pas en retranchant aux uns pour donner aux autres que nous parviendrons à fluidifier le parcours résidentiel et à donner un logement à tous.

Quant à la hausse des crédits alloués à l’aménagement du territoire, elle traduit une volonté de diminuer la fracture territoriale. Pour autant, elle ne saurait suffire à apporter une réelle amélioration au quotidien des Français qui vivent dans les territoires oubliés. Aussi, nous appelons tout particulièrement à avancer dans l’exécution des contrats de plan État-région (CPER), lesquels ont subi jusque-là une sous-exécution chronique de leurs crédits, notamment en matière de transport. Ne perdons pas de vue, non plus, les négociations à venir sur les contrats de convergence et de transformation qui concerneront des grands projets d’aménagement déterminants pour nos territoires ultramarins.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Nous sommes passés de 140 000 hébergements d’urgence en 2017 à 190 000 aujourd’hui. D’autre part, le dispositif de la RLS, malgré toutes les critiques dont il peut être l’objet, n’a pas de conséquence pour les locataires. Quant à la santé financière des bailleurs sociaux, l’Union sociale pour l’habitat n’est pas inquiète. Enfin, je vous remercie d’avoir reconnu notre objectif de lutte contre la fracture territoriale. Le plan « Action Cœur de ville » et le programme « Petites villes de demain » commencent à être opérationnels.

 

Article 27 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CE59 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. L’amendement tend à réévaluer le montant des APL de 1,3 milliard d’euros. Rappelons que plus de 12 milliards ont été économisés sur les APL durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, ce qui a pénalisé les opérations de rénovation et de réhabilitation des bailleurs sociaux.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE61 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Il s’agit de supprimer le mois de carence pour le bénéfice des APL.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Avis défavorable. La mise en place de la solidarité à la source doit permettre d’aller plus loin.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE62 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. L’amendement vise à supprimer le seuil de non‑versement des APL. Cette mesure ne coûterait que 10 millions d’euros.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Vous dites dans l’exposé sommaire qu’il n’y aurait plus de coût de gestion. Or il reste des agents dans les caisses d’allocations familiales, chargés de veiller au bon versement des sommes dues. De surcroît, les dernières revalorisations des APL ont permis d’augmenter, en moyenne, les montants versés de 10 à 15 euros pour chaque bénéficiaire.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE63 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Cet amendement, suggéré par l’USH, vise à revaloriser de 25 % le forfait charges, qui s’élève à 68,84 euros depuis juillet 2022. Ce montant ne suffira pas à compenser la hausse des charges – les factures énergétiques ont augmenté de 15 %.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. La hausse des prix de l’énergie ne saurait suffire à justifier une telle augmentation. En effet, le Gouvernement a pris de nombreuses mesures, qu’il s’agisse de la baisse de la TICFE, de la hausse exceptionnelle du volume de l’Arenh, du blocage de la hausse des tarifs réglementés de vente d’électricité ou des diverses dispositions de la loi de finances rectificative et de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, adoptées cet été. De surcroît, les ménages modestes sont éligibles au chèque énergie. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE64 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. L’amendement vise à harmoniser les barèmes des allocations de logement applicables en outre-mer et en métropole pour la prise en compte du nombre de personnes à charge, afin de mettre fin à une inégalité de traitement. L’évolution que nous proposons ne coûterait que 1 million d’euros.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Votre question est légitime. Si le critère que vous citez n’est pas favorable aux outre-mer, d’autres le sont. En l’espèce, le problème tient au zonage. Je vous invite donc à retirer votre amendement au bénéfice de celui de M. Peu qui aborde aussi la question de la révision des zonages.

M. Max Mathiasin. M. Naillet a présenté un amendement de justice qui ne peut qu’être adopté. Quels sont les autres critères favorables aux outre-mer que vous évoquez sans les citer ? Je serais curieux de les connaître. Le taux de chômage oscille entre 18 et 30 % dans les outre-mer et 37 % de la population y vit en dessous du seuil de pauvreté.

M. Philippe Naillet. L’amendement de M. Peu tend à modifier les zonages, mais le mien vise à accorder des crédits supplémentaires. Je le maintiens donc.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Vous prévoyez de débloquer 1 million d’euros mais on ne sait pas combien coûtera cette disposition, une fois les zonages revus. Mieux vaut procéder par étapes, correctement.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Cohésion des territoires non modifiés.

 

Après l’article 41

 

Amendements identiques II-CE10 de M. Stéphane Peu et II-CE57 de M. Philippe Naillet.

M. Stéphane Peu. Des décalages peuvent intervenir entre l’évolution des APL et l’application de la RLS, ce qui nécessite des régularisations. Les sommes en jeu peuvent paraître infimes, mais cela rend les quittances illisibles. Il est donc proposé de caler la RLS sur l’APL du locataire.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. La raison de ce décalage est d’éviter que le montant de la réduction des APL soit supérieur à celui de la réduction des loyers. Certes, le mécanisme est complexe mais il est dans l’intérêt des locataires du parc social. Avis défavorable.

M. Stéphane Peu. Après la création de la RLS, la contemporanéisation des APL a encore aggravé les décalages. Je ne suis pas sûr que cela soit dans l’intérêt des locataires car cela engendre des charges de gestion supplémentaires, qui finissent toujours par être répercutées sur les loyers, et cela nuit à la lisibilité des quittances.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement II-CE12 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. Il s’agit de mettre fin à une inégalité de traitement entre l’outre‑mer et la métropole qui limite le nombre de personnes à charge à six en outre-mer. La proportion de familles de plus de six enfants en outre-mer ne justifie plus une telle mesure. Par ailleurs, il faut que les pouvoirs publics examinent la possibilité de classer les territoires d’outre-mer en zone géographique I et non plus en zone II. En effet, le prix des loyers en outre-mer se rapproche des prix franciliens, ce qui justifie à nos yeux la modification du zonage.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Cet amendement va dans le sens d’une meilleure équité territoriale, en particulier concernant les APL. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CE18 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. S’agissant des bailleurs sociaux, la consommation d’électricité dans les parties communes – digicodes, portes automatiques, portes de garage, ascenseurs, éclairage – n’est pas couverte par le bouclier tarifaire, alors qu’elle ne cesse d’augmenter et peut représenter jusqu’à 20 % de la consommation électrique de chaque ménage. Cela va se traduire par une explosion des quittances, alors même que le forfait charges retenu pour le calcul de l’APL ne bouge pas.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis. Tout d’abord, cela ne concerne que les parties communes. Ensuite, le droit européen n’a toléré le maintien des tarifs réglementés que pour les consommateurs particuliers ; il ne permet pas d’appliquer le bouclier tarifaire aux organismes de logement social, qui sont juridiquement considérés comme des entreprises.

Par ailleurs, les bailleurs ne facturent pas toujours l’entièreté des factures. Ainsi, un grand nombre d’entre eux ont fait le choix de ne pas répercuter les augmentations de charges et de les absorber eux-mêmes. L’objectif peut être rempli : c’est à la discrétion des bailleurs. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 


—  1  —

 

   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes

 

M. Olivier Klein, ministre chargé de la ville et du logement, accompagné de :

M. Stéphane Crémel, conseiller budgétaire

Mme Marie Perdoux, conseillère parlementaire

Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (MTECT/DGALN/DHUP)

M. François Adam, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

M. Emmanuel Rousselot, sous-directeur du financement du logement

Direction du budget (MEFSIN/DB)

M. Ulric de La Batut, chef du bureau de la ville et du logement (4B)

M. Jean-Baptiste Le Vert, adjoint au chef de bureau

Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf)

Mme Isabelle Sancerni, présidente du conseil d’administration

M. Nicolas Grivel, directeur général

M. Damien Ranger-Martinez, directeur des relations avec le Parlement

M. Jérôme Lepage, directeur adjoint des politiques familiales et sociales

Agence nationale de l’habitat (Anah)

Mme Valérie Mancret-Taylor, directrice générale

Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru)

Mme Anne-Claire Mialot, directrice générale

M. Maxance Barré, directeur de cabinet

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema)

M. Pascal Berteaud, directeur général

France Ville durable

M. Sébastien Maire, directeur général

Banque des territoires (groupe Caisse des dépôts et consignations)

M. Kosta Kastrinidis, directeur des prêts

M. Philippe Blanchot, directeur des relations institutionnelles

Mme Selda Gloanec, conseillère relations institutionnelles

Union sociale pour l’habitat (USH) *

Mme Marianne Louis, directrice générale

M. Dominique Hoorens, directeur des études économiques et financières

Mme Francine Albert, conseillère pour les relations avec le Parlement

Action Logement Groupe (ALG) *

M. Bruno Arcadipane, président

M. Philippe Lengrand, vice-président

Mme Nadia Bouyer, directrice générale

Mme Akila Mat, responsable des relations institutionnelles

M. Grégoire Fauconnier, professeur agrégé, auteur, Loi SRU et mixité sociale : le vivre ensemble en échec ?, Omniscience, 2020

Association Droit au logement (DAL)

M. Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole

Mme Micheline Unger, conseillère relations institutionnelles

Fondation Abbé Pierre pour le logement des défavorisés (FAP)

M. Manuel Domergue, directeur des études

Mme Noria Derdek, chargée d’études

Union nationale des aménageurs (Unam) *

M. François Rieussec, président

M. Paul Meyer, délégué général

Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

M. Pascal Boulanger, président

Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles

M. Didier Bellier-Ganière, délégué général

Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) *

M. Jean-Marc Torrollion, président

Mme Bénédicte Rouault, directrice de cabinet

Fédération française du bâtiment (FFB) *

M. Loïc Chapeaux, directeur des affaires économiques

Mme Léa Lignères, chargée d’études

Table ronde des collectivités territoriales :

Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF)

M. Alain Chrétien, maire de Vesoul, président de la communauté d’agglomération de Vesoul, président des maires de Haute-Saône, vice‑président de l’AMF

Mme Nathalie Fourneau, responsable du département de l’aménagement du territoire

Mme Charlotte de Fontaines, responsable des relations institutionnelles

France urbaine

Mme Annette Laigneau, vice-présidente de Toulouse Métropole chargée de l’urbanisme et des projets urbains

M. Alexis Arras, chargé de mission pour le développement urbain au cabinet du président de Toulouse Métropole

Intercommunalités de France (AdCF)

M. Christophe Degruelle, président de la communauté d’agglomération de Blois et vice-président d Intercommunalités de France

Mme Carole Ropars, responsable du pôle urbanisme, aménagement et transition écologique

Fédération nationale des schémas de cohérence territoriale (Fédé SCoT)

Mme Françoise Rossignol, première vice-présidente de la Fédé SCoT, présidente du SCoT de l’Arrageois

Mme Stella Gass, directrice

Fédération nationale des agences d’urbanisme (FNAU)

Mme Annette Laigneau, présidente de l’Agence d’urbanisme et d’aménagement de l’aire métropolitaine de Toulouse (AUAT)

Mme Brigitte Bariol-Mathais, déléguée générale

Mme Karine Hurel, déléguée générale adjointe

Mme Zoé Chaloin, chargée de mission

 

 

En outre, votre rapporteur a recueilli les contributions écrites des acteurs suivants :

Direction générale des patrimoines et de l’architecture (MCC/DGPA)

Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) *

Conseil supérieur du notariat (CSN) *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Article 12 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. Dans le même temps, le décret du 29 juillet 2022 relatif au calcul des aides personnelles au logement a dérogé à deux dispositions du code de la construction et de l’habitation. D’une part, il a permis la revalorisation anticipée des forfaits étudiants et du forfait R0 (prévues initialement au 1er janvier 2023) au 1er juillet 2022. D’autre part, il a fixé la revalorisation du « R0 » à 4 % et celle du forfait étudiant à 3,5 %.

([2]) AE : autorisations d’engagement ; CP : crédits de paiement.

([3]) Taux d’effort net médian des ménages en locatif ordinaire ou en accession selon la configuration familiale et le type de parc (projet annuel de performance, page 1).

([4]) Arrêté du 18 juillet 2022 relatif aux taux des bourses d’enseignement supérieur du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pour l’année universitaire 2022-2023.

([5]) L’échelon 0 bis est un échelon de bourse d’enseignement supérieur sur critères sociaux, le deuxième sur une nomenclature allant de 0 à 7. Mis en place à la rentrée 2013, il a depuis été élargi. Il ouvre certains droits aux étudiants issus des classes moyennes, dont les parents déclarent un revenu annuel de moins de 33 100 euros en 2021

([6]) Les taux continuent de remonter et se situaient autour de 1,45 % en juillet (contre 1,10 % fin 2021), avec une estimation de 1,57 % pour le mois d’août. Compte tenu des annonces récentes de la Banque centrale européenne, ils devraient continuer d’augmenter dans les mois à venir.

([7]) Le taux d’usure (ou taux de l’usure) correspond au taux d’intérêt maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils vous accordent un prêt.

([8]) Chiffres du Conseil supérieur du notariat (France hors Mayotte).

([9]) Cette augmentation doit permettre de financer l’EPF Occitanie pour la réalisation de la nouvelle opération de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national (ORCOD-IN) du quartier Pissevin à Nîmes, l’EPF Grand Est à la suite de son extension récente à l’ex-région Champagne-Ardenne et les EPFA de Guyane et Mayotte (projet annuel de performances, page 71).

([10]) Article 18 du présent PLF.

([11]) 2,45 Md€ en autorisations d’engagement et 2,3 Md€ en crédits de paiement (projet annuel de performances du programme 174 « Énergie, climat et après-mines »).

([12]) Ce dispositif est l’héritier des dispositifs « Besson ancien » (1996-2006) et « Borloo ancien » (2006-2017).

([13]) À partir de 70 ans.

([14]) Rapport de la commission pour la relance durable de la construction de logements, septembre 2021 (tome I sur les mesures fiscales, tome II sur les mesures législatives).

([15]) Enquête de conjoncture de l’Insee.

([16]) Au premier trimestre 2022, l’Insee indiquait une hausse des prix sur un an de 4,6 % pour les logements neufs, une hausse significative mais néanmoins moins marquée que pour les logements anciens (+ 7,3 % sur la même période).

([17]) Entre août 2021 et juillet 2022, 506 900 logements ont été autorisés, soit + 11,8 % par rapport aux douze mois précédents (453 600 logements). Cette hausse est liée aux nombreux dépôts de permis de construire enregistrés fin 2021 en anticipation des normes RE 2020. Concernant les mises en chantier, 28 300 logements ont été commencés en juin. Sur douze mois, 385 200 logements ont été mis en chantier, soit + 0,4 % par rapport à l’année précédente.

([18])La construction de locaux non résidentiels est en revanche plus dynamique, avec 27,5 millions de m² mis en chantier entre août 2021 et juillet 2022, soit une hausse de 12,1 % par rapport aux douze mois précédents.

([19]) Le segment de l’individuel pur reste le segment porteur du marché avec 131 500 mises en chantiers sur douze mois (+ 10,6 % par rapport à l’année précédente).

([20]) Communiqué de presse de la FPI, 15 septembre 2022.

([21]) Jean-Luc Lagleize, « La maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction », rapport remis au Premier ministre, novembre 2019.

([22]) Article 150 VC du code général des impôts.

([23]) Chiffres du Conseil supérieur du notariat (France hors Mayotte).

([24]) Les zones B2, qui ne sont pas éligibles à la réduction d’impôt Pinel, voient une diminution de 50 % à ce titre.

([25]) Institut national de la statistique et des études économiques, « Les conditions de logement en France », coll. « Insee Références », édition 2017, « Le logement en France depuis trente ans ».

([26]) Cour des comptes, Premiers enseignements du déploiement du dispositif « MaPrimeRénov’ », septembre 2021.

([27]) Olivier Sichel, « Rapport pour une réhabilitation énergétique massive, simple et inclusive des logements privés », mars 2021.

([28]) Article 12 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([29]) Banque des territoires, Perspectives 2022, septembre 2022.

([30]) Article 51 de la loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

([31]) Article 224 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([32]) Sylvain Grisot et Christine Leconte, Réparons la ville ! Propositions pour nos villes et nos territoires, Apogée, mars 2022.

([33]) Un exemple serait l’opération menée à Rennes dans le cadre du programme Anru 2, sur deux tours de logements, dans le quartier Maurepas (atelier Robain-Guieysse avec BMC2, architectes).

([34]) Service des données et études statistiques (SDES) du ministère de la transition écologique, « Les prix des terrains et du bâti pour les maisons individuelles en 2020 », décembre 2021.

([35]) Dispositifs « Méhaignerie » (1984-1993), « Quilès-Méhaignerie » (1993-1996), « Périssol » (1996-1999), « Besson » (1999-2003), « Robien classique » (2003-2006), « Robien recentré » et complément « Borloo neuf » dit « Borloo populaire » (2006-2009), « Scellier » (2009-2012), « Duflot » (2012-2014), « Pinel » (2014-2024). Ces dispositifs ne doivent pas être confondus avec ceux qui visent l’investissement locatif dans l’ancien dans le cadre du conventionnement avec l’Agence nationale de l’habitat (voir première partie de ce rapport) : « Besson ancien » (1996-2006), « Borloo ancien » (2006-2017), « Cosse » aussi appelé « Louer abordable » (2017-2022), « Loc’Avantages » (2022-). À distinguer également, les dispositifs disponibles dans le cadre d’opérations d’acquisition-réhabilitation : « Malraux » en secteur sauvegardé (1962-), « Denormandie dans l’ancien » en périmètre d’opération de revitalisation de territoire (2018-2023). Enfin, des outils d’investissement locatif existent pour des segments de marché spécifiques, notamment le logement accompagné ou avec services : « Demessine » (1999-2010), « Censi-Bouvard » (2012-2022).

([36]) Article 161 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([37]) Article 168 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([38]) Article 5 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, introduisant le Pinel à l’article 199 novovicies du code général des impôts.

([39]) Le prolongement du dispositif jusqu’à la fin 2024 a été consacré par l’article 168 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([40]) Ces taux sont respectivement portés à 23 % et à 29 % pour les investissements réalisés en outre-mer.

([41]) Le site de l’administration service-public.fr précise les plafonds pour l’année 2021 (lien).

([42]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, « Évaluation du dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel », rapport, novembre 2019. Il ressort des évaluations réalisées que la réduction de loyers ne représente que 9,3 % du coût de la réduction d’impôt. C’est‑à-dire, inversement, que 90 % du coût du dispositif Pinel n’a donc comme seul effet que la construction de logements locatifs. Il doit également être noté que les réductions de loyers ne sont pas homogènes entre les différentes zones, pas plus qu’entre les communes d’une même zone. Ainsi, si 66 % des logements Pinel dans la zone B1 ont des plafonds inférieurs au loyer de marché moyen, calculé par les observatoires locaux des loyers, ils ne sont que 20 % dans la zone A bis. Du reste, dans certaines villes, les plafonds du Pinel ne sont pas contraignants puisqu’ils se trouvent dans la moyenne des loyers de marché (Nancy ou Clermont-Ferrand).

([43]) Article 50 de la loi de finances pour 2021.

([44]) Obligation codifiée à l’article L. 302-16-1 du code de la construction et de l’habitation.

([45]) Article 75 de la loi de finances pour 2022.

([46]) 5° du B de l’article 199 novovicies du code général des impôts.

([47]) Prorogation du dispositif à l’article 75 de la loi de finances pour 2022.

([48]) Ces taux sont respectivement portés à 23 % et à 29 % pour les investissements réalisés en outre-mer.

([49]) Il est également prévu que la condition de ressources du dispositif doit être vérifiée sur la base des ressources de l’année en cours et non plus sur la base du revenu fiscal de référence de l’année n  2. Cette dernière mesure devait entrer en vigueur au 1er janvier 2022, selon des modalités à définir par décret, mais s’avère difficile à mettre en œuvre.

([50]) Projet de loi de finances pour 2018.

([51]) Par ailleurs, le PTZ neuf a été conservé dans les communes dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de site de défense.

([52]) Il faut noter que les meublés de tourisme ne correspondent pas à un statut défini réglementairement, mais à une modalité de location, ce qui rend leur chiffrage particulièrement délicat, car ils recouvrent une grande diversité de situations (résidences principales louées moins de 120 jours, ou résidences secondaires ayant obtenu une autorisation de changement d’usage, ou autres locaux – constructions dédiées, locaux commerciaux, anciens bureaux ou ateliers).

([53]) « Demessine », « Périssol », « Censi-Bouvard », crédit d’impôt pour l’investissement en Corse.