N° 459
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2024
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),
TOME I
ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT
Action de la France en Europe et dans le monde ;
Français à l’étranger et affaires consulaires
PAR M. Nicolas FORISSIER
Député
——
Voir le numéro : 324
SOMMAIRE
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Pages
I. Les crÉdits relatifs À l’Action de la France en Europe et dans le monde, aux Français À l’Étranger et aux affaires consulaires pour 2025
A. L’évolution des crédits des programmes 105 et 151 de la mission action extÉrieure de l’État
1. Le programme Action de la France en Europe et dans le monde (programme 105)
2. Le programme Français à l’étranger et affaires consulaires (programme 151)
B. L’évolution des dépenses de personnel du quai d’orsay
1. La masse salariale et les emplois du MEAE
2. L’allocation des effectifs supplémentaires
II. La sécurisation des postes diplomatiques : un véritable impératif régalieN
A. L’accroissement des risques sécuritaires : des menaces réelles qui peuvent se concrétiser
1. Évaluer les risques : une coopération interservices en lien avec les pays d’accueil
a. Le recueil et l’échange d’informations
b. La catégorisation et la hiérarchisation des menaces
2. La multiplication d’incidents d’intensité variable
a. Des attaques particulièrement graves
b. Des actes hostiles désormais fréquents
B. Des moyens en augmentation constante dans un double objectif de prévention et de dissuasion
1. Les moyens humains consacrés à la surveillance des bâtiments
a. Le personnel français : le rôle pivot des gardes de sécurité diplomatique
b. Le personnel étranger : l’indispensable recours aux agents de droit local et aux vigiles prestés
2. Les moyens matériels pour garantir la sécurité des emprises et des personnels
a. L’augmentation des dépenses de sécurité passive
b. La protection des agents lors de leurs déplacements : l’exemple des voitures blindées
1. Le défi du numérique : entre risque sécuritaire et outil d’anticipation
a. La protection numérique des postes diplomatiques et consulaires
b. Le choix des prestataires de sécurité au regard de la souveraineté numérique
d. Un combat collectif contre la désinformation
2. Des enjeux multiformes qui impliquent des réponses « sur-mesure »
a. Les formations à la cybersécurité dont bénéficient les personnels du MEAE
b. La prise en compte des spécificités du parc immobilier
c. Le criblage et le suivi des agents de droit local
Annexe : liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis
Introduction
La mission Action extérieure de l’État regroupe les crédits visant à financer la plupart des dépenses de personnel, de fonctionnement, d’intervention, et d’investissement du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) réparties au sein de trois programmes : l’action de la France en Europe et dans le monde (programme 105), les Français à l’étranger et affaires consulaires (programme 151) et la diplomatie culturelle et d’influence (programme 185) ([1]).
Le projet de loi de finances pour 2025 s’inscrit dans un contexte budgétaire particulièrement dégradé au regard de la spectaculaire aggravation du déficit public, atteignant 6,1 % du produit intérieur brut (PIB), et de la volonté du Gouvernement de réaliser 60 milliards d’euros d’économies dont les deux tiers reposent sur une diminution des dépenses publiques.
S’élevant à près de 3,53 milliards d’euros, les crédits de la mission Action extérieure de l’État pour 2025 n’échappent pas à cette contrainte. Leur montant diminue d’environ 143 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Si l’essentiel des restrictions budgétaires s’applique au volume des contributions versées par la France aux organisations européennes et internationales au titre du programme 105, l’effort consenti par le MEAE n’est pas négligeable au regard du mouvement de « réarmement » de notre diplomatie engagé à la suite des états généraux conclus en mars 2023. Recueillant un vaste consensus, l’objectif fixé par le président de la République visait alors à renforcer durablement les moyens financiers, matériels et humains du Quai d’Orsay, mettant ainsi fin à deux décennies de coupes budgétaires préjudiciables à notre politique étrangère.
Le budget présenté par le Gouvernement infléchit la trajectoire ambitieuse dessinée dix-huit mois plus tôt. Les créations de postes prévues en 2025 se poursuivent mais à un rythme moins élevé que celui précédemment envisagé. La stagnation des crédits de fonctionnement et d’investissement révèle l’existence d’un statu quo que le rapporteur pour avis interprète comme un moindre mal : à défaut de rattraper les retards accumulés depuis les années 2000, la stabilisation de ces moyens préserve a minima la capacité d’action du MEAE, s’agissant notamment de l’action conduite par le réseau diplomatique et consulaire qui contribue, selon les mots du ministre Jean-Noël Barrot, à « porter la voix singulière de la France dans le monde » ([2]).
En outre, le rapporteur pour avis se félicite de la sanctuarisation des crédits dévolus à la direction du numérique du MEAE, soit près de 58 millions d’euros, et du renforcement, modeste mais bienvenu, des moyens relatifs à la sécurisation de nos emprises diplomatiques et consulaires qui bénéficient d’une hausse de 2,6 millions d’euros par rapport à l’année dernière, pour atteindre le niveau inédit de 70,1 millions d’euros en 2025.
Outre l’analyse de l’évolution budgétaire des programmes 105 et 151, le rapporteur pour avis a choisi de consacrer la partie thématique de ses travaux à la sécurisation du réseau diplomatique et consulaire. Souvent méconnu ou ravalé au rang de problématiques logistiques subsidiaires, ce sujet revêt pourtant une dimension régalienne majeure qui concerne aussi bien la vie de plusieurs milliers de nos agents – et de leurs familles – que l’aptitude de notre diplomatie à défendre et à promouvoir efficacement les intérêts de la France sur la scène internationale. Face à des menaces sécuritaires évolutives, le déploiement de personnels et de moyens matériels conséquents constitue un pré-requis indispensable à l’accomplissement de l’ensemble des missions qui incombent aux agents travaillant au sein des cent soixante-trois ambassades, des quatre-vingt-douze consulats généraux et des seize représentations permanentes de la France à l’étranger.
Ce rapport pour avis dresse un état des lieux des risques auxquels les emprises diplomatiques et consulaires sont confrontées, ainsi que des ressources dont elles disposent pour relever avec succès le défi sécuritaire. Les auditions et le déplacement à Tunis effectués par le rapporteur pour avis ont également permis de faire émerger plusieurs pistes de réflexion afin d’atteindre cet objectif, dans le respect des spécificités propres à notre action diplomatique à travers le monde.
I. Les crÉdits relatifs À l’Action de la France en Europe et dans le monde, aux Français À l’Étranger et aux affaires consulaires pour 2025
A. L’évolution des crédits des programmes 105 et 151 de la mission action extÉrieure de l’État
Le montant total des crédits de paiement dévolus à la mission Action extérieure de l’État s’élève à près de 3,53 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2025, soit une diminution de 3,89 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Cette baisse de 143 millions d’euros s’explique principalement par la réduction des dépenses relevant du programme 105 consacrées aux contributions versées par la France aux organisations internationales ([3]) et européennes ([4]).
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT
DE LA MISSION ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT EN 2025
(en millions d’euros)
Programme |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
Total pour la mission |
3 676 |
3 533 |
– 3,89 % |
dont P.105 Action de la France en Europe et dans le monde |
2 790 |
2 700 |
– 3,23 % |
dont P.151 Français de l’étranger et affaires consulaires |
165 |
157 |
– 1,88 % |
dont P.185 Diplomatie culturelle et d’influence ([5]) |
721 |
676 |
– 6,24 % |
Source : projet annuel de performances (PAP) Action extérieure de l’État, projet de loi de finances pour 2025.
1. Le programme Action de la France en Europe et dans le monde (programme 105)
Piloté par la direction générale des affaires politiques et de sécurité, le programme 105 se décline en dix actions regroupant les moyens de la politique diplomatique de la France en administration centrale et à l’étranger, selon un triple objectif : renforcer la sécurité internationale et celle des Français ; promouvoir le multilatéralisme et construire l’Europe ; assurer un service diplomatique efficient et de qualité.
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME 105 EN 2025
(en millions d’euros)
Action |
HT2 ([6]) LFI 2024 |
T2 ([7]) LFI 2024 |
Total LFI 2024 |
HT2 PLF 2025 |
T2 PLF 2025 |
Total PLF 2025 |
Évolution |
2024 |
FDC et ADP 2025 |
01– Coordination de l’action diplomatique |
43,6 |
80,0 |
123,6 |
52,9 |
82,0 |
134,9 |
+ 9,14 % |
0,14 |
0,15 |
02 – Action européenne |
200,0 |
11,9 |
212,0 |
160,0 |
12,0 |
172,0 |
– 18,87 % |
0 |
0 |
03 – Dépenses de personnel du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » |
0 |
84,8 |
84,8 |
0 |
90,6 |
90,6 |
+ 6,84 % |
0 |
0 |
04 – Contributions internationales |
728,9 |
0 |
728,9 |
659,6 |
0 |
659,6 |
– 9,51 % |
0 |
0 |
05 – Coopération de sécurité et de défense |
38,9 |
80,6 |
119,5 |
35,6 |
82,7 |
118,3 |
– 1,00 % |
0 |
0 |
06 – Soutien |
132,7 |
148,8 |
300,9 |
148,6 |
152,5 |
301,1 |
+ 0,06 % |
0,11 |
0,11 |
07 – Réseau diplomatique |
311,4 |
468,0 |
779,4 |
299,1 |
479,9 |
779 |
– 0,05 % |
5,05 |
5,00 |
08 – Dépenses de personnel du programme « Solidarité à l’égard des pays en développement » |
0 |
169,4 |
169,4 |
0 |
172,0 |
172,0 |
+ 1,53 % |
0 |
0 |
09 – Personnel concourant à l’action « Offre d’un service public de qualité aux Français à l’étranger » |
0 |
207,4 |
207,4 |
0 |
207,6 |
207,6 |
+ 0,10 % |
0 |
0 |
10 – Personnel concourant à l’action « Instruction et demandes de visa » |
0 |
64,3 |
64,3 |
0 |
64,4 |
64,4 |
+ 0,16 % |
0 |
0 |
Total |
1 474,5 |
1 315,1 |
2 789,7 |
1 355,9 |
1 343,8 |
2 699,6 |
– 3,23 % |
5,30 |
5,26 |
Source : projet annuel de performances (PAP) Action extérieure de l’État, projet de loi de finances pour 2025.
Les crédits dédiés au programme 105 dans le projet de loi de finances pour 2025 représentent 76,4 % des crédits de la mission Action extérieure de l’État, soit environ 2,7 milliards d’euros. Le montant des dépenses du programme 105 diminue d’environ 90 millions d’euros en 2025, en raison de la baisse corrélative du montant des contributions versées au titre de l’action n° 2 Action européenne et de l’action n° 4 Contributions internationales.
Trois objectifs sont assignés au programme 105 :
– en premier lieu, Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français par le biais d’actions de formation et de coopération menées par la direction de la coopération de sécurité et de défense (35,6 millions d’euros), d’actions en faveur de la protection des communautés françaises assurées par le centre de crise et de soutien (5,3 millions d’euros) et de la sécurisation des implantations françaises à l’étranger (70,1 millions d’euros) qui relève de la direction de la sécurité diplomatique et de la direction de l’immobilier et de la logistique ;
– en deuxième lieu, Promouvoir le multilatéralisme et construire l’Europe grâce au financement de plus de quatre-vingts organisations internationales et européennes ainsi que d’autres instruments internationaux. 820 millions d’euros sont ainsi consacrés à cet objectif visant à affermir la position de la France comme acteur de premier plan en faveur du multilatéralisme et dans le traitement des questions globales (sécurité, environnement, commerce, énergie) ;
– enfin, Assurer un service diplomatique efficient et de qualité via le financement des actions des directions conduisant notre diplomatie (directions politiques et direction de l’Union européenne) et des services qui soutiennent l’action diplomatique (presse et communication, protocole), ainsi que toutes les fonctions support assurant la bonne articulation des ressources humaines et des moyens (administration générale, systèmes d’information et de télécommunications, politique immobilière, logistique diplomatique…). Le programme 105 assure le fonctionnement du réseau diplomatique français composé de cent-soixante-trois ambassades, quatre-vingt-douze consulats généraux et seize représentations permanentes et dont l’extension se poursuit en 2025 grâce à l’ouverture de deux ambassades aux Samoa et au Guyana, ainsi que d’un consulat général à Melbourne.
b. Les actions
Le programme 105 comporte dix actions dont quatre d’entre elles financent les dépenses de personnel du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence, du programme 151 Français de l’étranger et affaires consulaires et du programme 209 Solidarité à l’égard des pays en développement.
L’action n° 1 regroupe les crédits correspondant, d’une part, aux dépenses dites d’état-major relatives notamment au fonctionnement des cabinets et, d’autre part, aux dépenses liées au protocole, à la communication, à la presse et à la protection de nos ressortissants à l’étranger par l’intermédiaire du centre de crise et de soutien. La hausse de près de 10 millions d’euros des dépenses de fonctionnement constatée par rapport à 2024 s’explique exclusivement par l’organisation de deux sommets internationaux de grande ampleur au premier semestre 2025 relatifs à l’action sur l’intelligence artificielle et à la conférence des Nations unies pour les océans (UNOC 3).
L’action n° 2 correspond essentiellement au financement des contributions françaises au Conseil de l’Europe (49 millions d’euros) et à l’Union européenne (110 millions d’euros). La très grande majorité des crédits concerne la Facilité européenne pour la paix (FEP) créée en 2021 et pour laquelle le montant des dotations du ministère de l’Europe et des affaires étrangères pour 2025, consacrées à la mise en œuvre de mesures d’assistance à caractère non létal, observe une baisse de 40 millions d’euros par rapport à 2024. Cette évolution s’explique par l’accroissement des mesures à caractère létal dont la prise en charge relève du ministère des armées.
Créée par le projet de loi de finances pour 2025 au sein du programme 105, l’action n° 3 regroupe les dépenses de personnel relevant du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence ([10]), pour un montant total d’environ 91 millions d’euros.
Les crédits de l’action n° 4 regroupent les dépenses réalisées au titre des opérations de maintien de la paix (220,2 millions d’euros) et des contributions obligatoires et volontaires versées par la France (439,4 millions d’euros) à diverses organisations internationales telles que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (48,5 millions d’euros), l’Organisation de coopération et développement économiques (23,4 millions d’euros) et, pour l’essentiel, l’Organisation des Nations unies et ses agences (324,6 millions d’euros).
Le montant des crédits de l’action n° 4 fait apparaître une baisse conséquente d’environ 69 millions d’euros, en raison de la diminution des dépenses consacrées aux opérations de maintien de la paix. Cette évolution se justifie principalement par la baisse prévisionnelle de la quote-part française ([11]) dont le calcul se fonde sur le revenu national brut des principaux États donateurs et par la fermeture de la mission de maintien de la paix des Nations unies au Mali (MINUSMA).
Dotée de 118,3 millions d’euros de crédits dont 82,7 millions consacrés à des dépenses de personnel, l’action n° 5 vise à financer les mesures de coopération que déploie la France avec les États partenaires afin de garantir la sécurité internationale et celle des ressortissants français à l’étranger. Pilotée par la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD), cette action comprend l’animation du réseau des 303 coopérants français placés auprès des autorités des États partenaires et des organisations régionales dans le but de leur fournir une aide logistique, une expertise, un conseil et des formations destinés à renforcer leur capacité opérationnelle en matière de défense et de sécurité.
S’élevant à un montant de 301,1 millions d’euros pour 2025, les crédits de l’action n° 6 financent notamment les frais de fonctionnement de l’administration générale à Paris et à Nantes ([12]), la gestion des ressources humaines, des réseaux numériques, du parc immobilier du ministère ([13]) et de sa sécurité.
L’action n° 7 regroupe les dépenses de fonctionnement, d’investissement et de personnel de l’ensemble du réseau diplomatique, soit un montant total de 779 millions d’euros pour 2025. Ces crédits permettent de financer l’entretien et la modernisation des postes diplomatiques, s’agissant notamment des travaux de rénovation immobilière (94,4 millions d’euros) et de sécurisation des bâtiments et du personnel (70,1 millions d’euros).
Créée par le projet de loi de finances pour 2025 au sein du programme 105, l’action n° 8 regroupe les dépenses de personnel relevant du programme 209 Solidarité à l’égard des pays en développement ([14]), pour un montant total d’environ 172 millions d’euros.
Créée par le projet de loi de finances pour 2025 au sein du programme 105, l’action n° 9 regroupe les dépenses de personnel relevant du programme 151 Français à l’étranger et affaires consulaires ([15]), pour un montant total d’environ 207,1 millions d’euros.
Créée par le projet de loi de finances pour 2025 au sein du programme 105, l’action n° 10 regroupe les dépenses de personnel relevant du programme 151 Français à l’étranger et affaires consulaires ([16]), pour un montant total d’environ 64,4 millions d’euros.
2. Le programme Français à l’étranger et affaires consulaires (programme 151)
Piloté par la direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire (DFAE), le programme 151 se compose de trois actions. Celles-ci ont pour objet de financer les principales missions de service public en faveur des ressortissants français à l’étranger – telles que la gestion de l’état civil, des titres d’identité, de l’aide sociale et des élections –, à octroyer des bourses scolaires en faveur des enfants des familles à revenus modestes et des élèves en situation de handicap, ainsi qu’à instruire les demandes de visa.
Le programme 151 vise deux objectifs : le renforcement de la qualité et l’efficience du service consulaire, s’agissant notamment de la réduction des délais de traitement des demandes et documents sollicités par les usagers, et la simplification des démarches administratives, à l’aide de la dématérialisation des procédures.
Les crédits dédiés au programme 151 dans le projet de loi de finances pour 2025 représentent 4,4 % des crédits de la mission Action extérieure de l’État, soit environ 157 millions d’euros. Le montant des dépenses du programme 151 diminue d’environ 7 millions d’euros en 2025, en raison de la baisse corrélative du montant des bourses scolaires principalement induite par la diminution du nombre d’élèves boursiers, au titre de l’action n° 2 Accès des élèves français au réseau AEFE et à la langue française.
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME 151 EN 2025
(en millions d’euros)
Action |
HT2 LFI 2024 |
T2 LFI 2024 |
Total LFI 2024 |
HT2 PLF 2025 |
T2 PLF 2025 |
Total PLF 2025 |
Évolution |
FDC et ADP 2024 |
FDC et ADP 2025 |
01– Offre d’un service public de qualité aux Français à l’étranger |
42,1 |
0 |
42,1 |
39,7 |
0 |
39,7 |
– 5,92 % |
0 |
0 |
02 – Accès des élèves français au réseau AEFE et à la langue française |
120,5 |
0 |
120,5 |
113,5 |
0 |
113,5 |
– 5,81 % |
0 |
0 |
03 – Instruction des demandes de visa |
2,6 |
0 |
2,6 |
3,8 |
0 |
3,8 |
+ 46,51 % |
0 |
0 |
Total |
165,2 |
0 |
165,2 |
156,9 |
0 |
156,9 |
– 5,02 % |
0 |
0 |
Source : projet annuel de performances (PAP) Action extérieure de l’État, projet de loi de finances pour 2025.
Deux objectifs sont assignés au programme 151 :
– tout d’abord, Renforcer la qualité et l’efficience du service consulaire grâce à l’amélioration continue de la qualité de service rendu aux quelque 2,5 millions de Français résidant à l’étranger ([17]) et aux demandeurs de visa par les agents des 209 postes consulaires et 525 agences consulaires, répartis dans près de 160 pays. Cet objectif consiste à augmenter le nombre de documents délivrés chaque année par les agents des services consulaires et à réduire les délais de traitement des documents administratifs, s’agissant aussi bien des demandes d’établissement et de transcription d’actes d’état civil que de visas ;
– ensuite, Simplifier les démarches administratives via la dématérialisation croissante des procédures applicables aux demandes d’actes d’état civil et d’inscription au Registre des Français à l’étranger, notamment grâce à la plateforme « www.service-public.fr ».
b. Les actions
Le programme 151 comporte trois actions.
L’action n° 1 regroupe 39,7 millions d’euros de crédits de paiement destinés à financer des dépenses de fonctionnement et d’intervention réparties en cinq pôles : la gestion de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), les missions du service public consulaire délivrant les documents administratifs aux ressortissants français (état civil, titres d’identité…), la modernisation de l’administration consulaire, les affaires sociales, ainsi que l’organisation des élections.
L’amélioration de la qualité du service public consulaire se traduit notamment par la montée en puissance du centre de contact « Service France consulaire », opérationnel depuis le 31 août 2024.
La mise en place du Service France consulaire
Déployé le 31 août 2024 dans soixante pays ([18]), le centre de contact consulaire « Service France consulaire » vise à offrir sans délai une réponse téléphonique de premier niveau aux questions générales des usagers, permettant ainsi aux consulats de se concentrer sur le traitement local des dossiers individuels, les urgences et la protection consulaire.
Lors de leur audition par le rapporteur pour avis, les responsables de la direction des Français à l’étranger ont considéré que le lancement de ce dispositif d’assistance présente un franc succès (30 000 appels au cours du mois de septembre 2024, 89 % de taux de satisfaction des usagers), préfigurant ainsi sa généralisation sur l’ensemble des continents en 2025. L’extension de « Service France consulaire » implique une hausse de 2,1 millions d’euros des crédits affectés à son développement, atteignant ainsi 5,9 millions d’euros en 2025.
Source : projet annuel de performances (PAP) Action extérieure de l’État, projet de loi de finances pour 2025.
Les projets de modernisation de l’administration consulaire s’appuient essentiellement sur la dématérialisation des procédures et la transformation des outils numériques, s’agissant aussi bien du vote par Internet ([19]), du registre de l’état civil électronique (RECE) ([20]) et de l’expérimentation du renouvellement des passeports à distance.
Si le rapporteur pour avis se félicite des opportunités qu’offre la transformation digitale afin de simplifier et d’accélérer le traitement des démarches administratives, il rappelle cependant la nécessité de préserver l’existence d’un contact humain entre les services consulaires et les usagers. Face au risque d’un « double isolement » résultant aussi bien de l’éloignement géographique que de la difficulté qu’éprouvent certains de nos compatriotes à manier ces outils ([21]), l’accessibilité des services publics consulaires doit être garantie, dans un souci légitime de proximité et d’assistance au bénéfice de l’ensemble des ressortissants français à l’étranger.
L’action n° 2 correspond, d’une part, à l’octroi de bourses scolaires en faveur des enfants des familles à revenus modestes dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger et, d’autre part, à l’accompagnement scolaire des élèves en situation de handicap (ASESH).
Les crédits consacrés à l’accès des élèves français au réseau scolaire de l’agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) et à la langue française s’élèvent à 113,5 millions d’euros en 2025 ([22]), soit une baisse de 7 millions d’euros par rapport à l’année précédente.
Affectant exclusivement l’enveloppe consacrée aux bourses scolaires, cette diminution se fonde sur la baisse de 17 % du nombre d’élèves boursiers entre 2022-2023 ([23]) et 2023-2024 ([24]) ainsi que sur celle de l’indice de parité de pouvoir d’achat (IPPA) constatée dans plusieurs pays.
Le pilotage de ces dépenses apparaît cependant complexe en raison des incertitudes entourant les prévisions du nombre de bénéficiaires potentiels des bourses scolaires et l’évolution des frais de scolarité dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger. Il en résulte un risque de déconnexion entre le budget provisionné par le ministère ([25]) et la réalité des besoins exprimés chaque année, dans un contexte de dérapage inflationniste insuffisamment anticipé. Le rapporteur pour avis considère que ces dépenses ne doivent pas faire l’objet d’une sous-budgétisation au regard de l’aide financière décisive que représentent ces bourses qui conditionnent, au moins partiellement, la présence à l’étranger de nombreuses familles françaises expatriées.
L’action n° 3, menée conjointement avec le ministère de l’intérieur, concerne l’instruction des demandes de visa, dont la gestion des frais de contentieux de refus de visa depuis le 1er janvier 2022. Le montant des crédits dévolus à cette action présente une hausse significative de 46,5 % en 2025, atteignant ainsi 3,8 millions d’euros. Cette augmentation doit permettre de résorber complètement le stock de dossiers non-traités et de faciliter le traitement du flux annuel de nouveaux dossiers.
Dans le sillage du rapport remis par Paul Hermelin aux ministres de l’intérieur et de l’Europe et des affaires étrangères en avril 2023, le rapporteur pour avis considère que le renforcement de la coopération interministérielle, européenne et bilatérale avec les pays d’origine constitue un objectif prioritaire à court terme, au regard des enjeux relatifs à la maîtrise de la politique migratoire et à l’attractivité de la France s’agissant de l’emploi dans des secteurs économiques stratégiques.
B. L’évolution des dépenses de personnel du quai d’orsay
1. La masse salariale et les emplois du MEAE
En 2025, les dépenses de personnel du MEAE représentent 1,16 milliard d’euros (hors contributions au compte d’affectation spéciale – CAS – Pensions), soit une hausse de 12,5 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2024. Après une première hausse de 100 équivalents temps plein (ETP) en 2023 et de 163 ETP en 2024, les effectifs augmenteront de 75 ETP en 2025. Le plafond d’emplois sera ainsi porté à 13 920 ETP. La poursuite de la hausse des effectifs du MEAE impulsée à la suite des états généraux de la diplomatie en 2023 s’inscrit dans l’objectif de création de 700 ETP supplémentaires d’ici 2027. Si elle semble ambitieuse compte tenu des contraintes budgétaires actuelles ([26]), cette trajectoire apparaît néanmoins nécessaire, au regard de la suppression de près de 3 000 ETP entre 2006 et 2021.
2. L’allocation des effectifs supplémentaires
Les 75 ETP supplémentaires attribués au MEAE par le projet de loi de finances pour 2025 correspondent à la création de postes dans les catégories d’emplois suivantes :
– 20 emplois supplémentaires de fonctionnaires ou d’agents sous contrat à durée indéterminée en administration centrale ;
– 23 emplois supplémentaires de fonctionnaires ou d’agents sous contrat à durée indéterminée dans le réseau diplomatique ;
– 21 emplois supplémentaires d’agents contractuels à durée déterminée et de volontaires internationaux ;
– 11 emplois supplémentaires relevant de la catégorie des agents de droit local employés au sein du réseau diplomatique.
L’augmentation des effectifs prévue en 2025 contribuera essentiellement à renforcer les personnels affectés aux missions relevant des actions n° 7 (Réseau diplomatique) et n° 6 (Soutien) du programme 105, consolidant ainsi les efforts mis en œuvre depuis 2023, notamment afin d’étoffer les secrétariats généraux des postes diplomatiques les plus mobilisés.
II. La sécurisation des postes diplomatiques : un véritable impératif régalieN
Dotée du cinquième réseau diplomatique mondial après celui des États-Unis, de la Chine, du Japon et de la Turquie ([27]), la France dispose de 271 postes diplomatiques ([28]) répartis dans près de cent soixante pays. À ce maillage conséquent s’ajoutent plus d’un millier d’agences, de missions économiques ainsi que d’établissements culturels ou d’enseignement ([29]) qui témoignent de l’influence française sur la scène internationale. Bien que présentant une certaine hétérogénéité selon les continents, le contexte sécuritaire dans lequel les personnels du MEAE exercent leur activité à l’étranger s’est globalement détérioré depuis une quinzaine d’années. L’aggravation des menaces terroristes et les répercussions de conflits meurtriers à l’Est de l’Europe et au Moyen-Orient se conjuguent au développement d’actes hostiles à l’encontre des intérêts français, notamment sur le continent africain.
Face à la diversité de ces situations, la sécurisation des postes diplomatiques constitue un impératif régalien désormais incontournable afin de garantir à nos agents les moyens d’accomplir leurs missions dans les conditions les plus sûres ([30]), conformément à la protection dont ils doivent bénéficier au titre des conventions de Vienne de 1961 et de 1963 sur les relations diplomatiques et consulaires ([31]). La prise en compte de cet enjeu s’est traduite par un accroissement continu du budget consacré aux dépenses de fonctionnement, d’investissement et de personnel relatives à la sécurité du réseau diplomatique, passant de 44,8 millions d’euros en 2020 à 70,1 millions d’euros selon le projet de loi de finances pour 2025, soit une hausse de 56,5 % sur les cinq dernières années ([32]).
ÉVOLUTION DU BUDGET CONSACRÉ AUX DÉPENSES DE SÉCURISATION DES POSTES DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES
(en millions d’euros)
Année |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
PLF 2025 |
Montant des crédits de paiement |
44,8 |
52,2 |
55 |
61 |
67,5 |
70,1 |
Source : MEAE
La nécessité d’appréhender et d’anticiper les risques sécuritaires s’avère aujourd’hui d’autant plus forte que les incidents affectant les postes diplomatiques français se sont multipliés au cours des dernières années. Le rapporteur pour avis approuve le renforcement subséquent des moyens matériels et humains opéré par le MEAE. Il souligne cependant la persistance de fragilités et esquisse plusieurs pistes d’amélioration des dispositifs visant à sécuriser les locaux et les personnels déployés à l’étranger.
A. L’accroissement des risques sécuritaires : des menaces réelles qui peuvent se concrétiser
L’identification des menaces sécuritaires auxquelles le réseau diplomatique est aujourd’hui confronté suppose un travail préalable de recueil et d’échanges d’informations afin d’anticiper les risques, à l’épreuve de la multiplication d’incidents d’intensité variable recensés au cours de la dernière décennie.
1. Évaluer les risques : une coopération interservices en lien avec les pays d’accueil
a. Le recueil et l’échange d’informations
L’évaluation de la menace résulte du croisement de nombreuses sources d’information que permet le contact régulier entretenu avec les différents partenaires, internes ou externes, de la direction de la sécurité diplomatique (DSD) du MEAE.
À l’échelle ministérielle, les directions géographiques et politiques, la correspondance diplomatique, les échanges réguliers avec les chefs de poste, les officiers de sécurité et les chefs de détachement alimentent un flux régulier d’informations que complète le nombre important de missions ([33]) effectuées dans les postes par les « conseillers techniques sûreté » en charge des infrastructures et des systèmes de sécurité. Une grille d’analyse de la menace, élaborée par la DSD, devrait être mise en place au cours de l’année 2025. Elle a vocation à être adressée aux postes en vue de recueillir, selon des critères objectifs et uniformisés, leur appréciation sur le niveau et la nature de la menace locale.
La veille informationnelle réalisée par les agents de nos ambassades, fondée sur l’analyse de la presse locale et des réseaux sociaux, se révèle essentielle afin de décrypter les signaux faibles susceptibles de se transformer en potentielles menaces sécuritaires à l’encontre des intérêts français. Ce travail en source ouverte constitue le premier niveau d’anticipation des risques, qu’il convient ensuite d’approfondir avec le concours des services de renseignement.
À l’échelle interministérielle, des échanges permanents sont organisés avec la direction générale des relations internationales et de sécurité (DGRIS) du ministère des armées mais aussi avec l’ensemble des services de renseignement ([34]), dont les notes sont transmises à la DSD. Des consultations ponctuelles peuvent également avoir lieu avec des entreprises de services de sécurité et de défense (ESSD) particulièrement bien implantées dans le pays d’accueil, à l’instar de l’Algérie.
Enfin, la coopération avec les partenaires étrangers, au premier rang desquels figurent les administrations des pays d’accueil, s’avère souvent fructueuse. Les auditions conduites par le rapporteur pour avis ont notamment fait apparaître le caractère régulier et positif du dialogue qu’entretient la France avec les autorités algériennes et tunisiennes afin de déceler les menaces sécuritaires susceptibles de viser les représentations françaises.
Au-delà de la sécurisation des postes diplomatiques stricto sensu, les informations relatives à la sécurité de la communauté française sont communiquées par le personnel diplomatique des ambassades et des consulats aux représentants élus des Français de l’étranger, comme le rappelle la réponse ministérielle publiée le 21 mars 2024.
L’information effective des conseillers des Français de l’étranger en matière de sécurité
D’une manière générale, l’information des conseillers des Français de l’étranger en matière de sécurité est assurée grâce à la relation étroite que les postes diplomatiques et consulaires entretiennent avec eux, dans le cadre des comités de sécurité, d’une part, et des conseils consulaires sur les questions de sécurité, d’autre part. À la différence du conseil consulaire, qui peut être compétent pour plusieurs circonscriptions consulaires (art. 18 du décret n° 2014-144 du 18 février 2014) et dont l’organisation nécessite une coordination entre les postes concernés, le comité de sécurité est mis en place par chaque ambassade ou consulat pour examiner et traiter les questions sécuritaires de leur circonscription. Il est convoqué à l’initiative du chef de poste au moins une fois par an et chaque fois que la situation sécuritaire dans le pays le nécessite.
Le chef de poste est libre d’adapter le format du comité de sécurité, en fonction des conditions de sécurité et de la sensibilité des sujets abordés. Il s’assure, dans la mesure du possible, de la présence des membres qui ne résident pas nécessairement dans le pays. Il peut faire intervenir des experts, dont il juge la présence utile, sur des points à l’ordre du jour. Les réunions peuvent se tenir sous différents formats (présentiel ou distanciel), en prenant en compte les impératifs de sécurité (accessibilité de l’ambassade, sécurité des communications). S’agissant de la transmission des comptes rendus de réunion, les mêmes impératifs s’appliquent. S’agissant des plans de sécurité, ils sont élaborés afin de prendre en compte l’ensemble des risques identifiés dans un pays donné et non pour un risque particulier (comme les séismes). Ils permettent ainsi d’apporter à tout moment une réponse adaptée en fonction du type de crise et des moyens disponibles. Ils peuvent faire l’objet d’une présentation globale et orale lors des comités de sécurité, dans le cadre de la bonne information des élus, sous réserve des exigences de confidentialité.
Source : réponse ministérielle du 21 mars 2024 à la question écrite n° 09688 de la sénatrice Mme Olivia Richard.
Depuis 2017, le MEAE définit une doctrine de sécurité qui repose notamment sur une catégorisation des pays selon la nature des risques. Elle établit les standards en termes d’objectifs de sécurisation dans les domaines techniques, humains et organisationnels, et répartit les pays en cinq catégories : pays en crise ; pays à menace terroriste ([35]) ; pays à instabilité politique économique et sociale ; pays à risques modérés ; pays à risques concernant la sécurité de l’information.
À chaque catégorie correspond un standard de sécurisation et une posture basée sur un socle commun de sécurité renforcé en fonction des différents niveaux de risque. La répartition des postes au sein de ces catégories de pays fait l’objet de mises à jour régulières, selon l’évolution du contexte sécuritaire et géopolitique.
Les menaces présentent, par nature, une dimension protéiforme. Si leur catégorisation fournit une grille de lecture utile à l’adaptation des réponses sécuritaires pour chaque emprise diplomatique, elle ne doit pas occulter l’existence de passerelles entre le terrorisme, la criminalité organisée, la manipulation de l’information et des problématiques plus classiques de maintien de l’ordre. Les auditions et le déplacement réalisés par le rapporteur pour avis à l’ambassade de France à Tunis ont permis de cerner les principales menaces sécuritaires pesant sur nos représentations diplomatiques en Afrique du Nord et au Moyen-Orient :
– les facteurs endogènes propres aux sociétés maghrébines depuis les révolutions arabes de 2011 – marqués par la radicalisation d’une partie de la jeunesse et accentués par la résurgence du conflit-israélo palestinien depuis les attaques terroristes du 7 octobre 2023 –, susceptibles de provoquer des manifestations incontrôlées et potentiellement motivées par un sentiment anti-français ;
– la persistance de menaces terroristes liées à l’action de groupuscules affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou à l’État islamique (EI) ;
– l’instabilité politique en Libye qui favorise le développement de réseaux de criminalité transfrontalière tels que le trafic d’êtres humains ou d’armes ;
– la gestion complexe des combattants terroristes de retour de la zone irako-syrienne.
De façon générale, la direction générale des affaires politiques et de sécurité considère que les menaces sécuritaires dépendent aussi de la politique étrangère de la France, en lien avec sa politique de défense. Les interventions françaises (Libye, Mali, Irak) provoquent des répercussions sur les intérêts français à l’étranger et font de la France une cible privilégiée. Les changements institutionnels intervenus dans plusieurs pays du Sahel et la tolérance voire l’encouragement d’un sentiment anti-français par les nouvelles autorités de certains États africains participent également d’un niveau de menace accru. Plus récemment, le contexte de la guerre d’agression russe en Ukraine a conduit, dans la zone européenne, à une tension renforcée même si elle se limite à ce stade à des actes de provocation ou d’intimidation tels que des tags de têtes de mort constatés sur les grilles de l’ambassade de France à Moscou en avril 2024.
Lors de son audition par le rapporteur pour avis, l’ambassadeur de France en Éthiopie, M. Alexis Lamek, a ainsi mis exergue la diversité des risques sécuritaires à Addis-Abeba. S’il estime leur intensité « moyenne » eu égard à celle observée dans d’autres pays voisins, la situation demeure particulièrement volatile, à l’épreuve de la guerre du Tigré déclenchée en novembre 2020 ([36]), des fortes tensions socio-économiques et politiques auxquelles la population éthiopienne est soumise.
En outre, les risques identifiés à Addis-Abeba sont également liés à la délinquance opportuniste ou ordinaire (vols, agressions) pouvant ainsi porter atteinte à la sécurité des personnels au sein du campus diplomatique ou à l’extérieur de celui-ci, le quartier environnant étant considéré comme dangereux la nuit. Enfin, d’autres types de risques, plus insolites, concourent à relever le niveau de vigilance, telle que les secousses sismiques ou la présence de panthères et de chacals aux alentours du site.
2. La multiplication d’incidents d’intensité variable
Depuis une dizaine d’années, les représentations de la France à l’étranger, tant diplomatiques que consulaires ou culturelles, ainsi que les personnels qui y travaillent, ont fait l’objet de diverses menaces, passages à l’acte ou attaques de nature et d’intensité diverses. Bien que l’ensemble du réseau soit concerné, la plupart des incidents les plus graves se concentrent sur le continent africain.
a. Des attaques particulièrement graves
Le 23 avril 2013, l’ambassade de France en Libye a fait l’objet d’une importante attaque à la voiture piégée. L’explosion a partiellement détruit les locaux de l’ambassade et blessé grièvement le gendarme présent sur le site. À l’issue de cette attaque, la chancellerie a dû être provisoirement relocalisée dans un hôtel de Tripoli avant de rouvrir au sein d’un campus diplomatique à haut niveau de sécurité en mars 2022.
L’atteinte la plus grave subie par le réseau français au cours de ces dernières années correspond à l’attaque terroriste du 2 mars 2018 contre l’ambassade de France à Ouagadougou, menée par quatre assaillants munis de fusils d’assaut et de grenades explosives. La résistance des dispositifs de sécurité passive et la bonne réaction des personnels de sécurité ont permis de neutraliser les terroristes avant leur entrée dans l’enceinte. Le 2 octobre 2022, à la suite du coup d’État du capitaine Ibrahim Traoré, l’ambassade de France a de nouveau été attaquée par des centaines d’individus hostiles, en l’absence de toute présence des forces de sécurité locales. Les instituts français de Ouagadougou et de Bobo Dioulasso ont ainsi été saccagés et partiellement incendiés.
Les situations de conflit, ou de crise grave, ont conduit à la fermeture de l’ambassade et à l’évacuation en urgence des personnels dans plusieurs pays : en Libye en 2014 puis en 2019 ; au Yémen en 2015 ; en Afghanistan en 2021 ([37]), en Ukraine en 2022 ([38]) ; au Soudan et au Niger ([39]) en 2023. Les conditions de fermeture des postes sous mesure d’urgence, comme à Kaboul, ne permettent pas toujours la mise en sécurité de l’ensemble des équipements, s’agissant notamment des véhicules blindés.
D’autres postes ont été maintenus en activité, mais dans le cadre d’un fonctionnement dégradé assorti d’un renfort du dispositif de sécurisation, à l’image de l’ambassade de France à Haïti en 2023 et 2024. La situation de nos emprises au Liban, en Israël, dans les territoires palestiniens, à Jérusalem et à Gaza fait l’objet d’un suivi particulier depuis les attaques terroristes du 7 octobre 2023. L’institut français de Gaza, lieu d’un attentat en 2014, a ainsi été détruit par des bombardements dans le contexte de l’opération militaire israélienne conduite en 2024 en réaction à l’attaque du Hamas.
b. Des actes hostiles désormais fréquents
Présentant un degré de gravité moindre, d’autres types d’atteintes au réseau diplomatique français ont été répertoriés au cours des dernières années.
En premier lieu, des dégradations faisant apparaître des slogans hostiles à l’encontre de la France sont régulièrement constatées sur les murs d’enceinte des ambassades, des consulats ou des instituts français, à l’image des incidents ayant affecté les emprises françaises à Barcelone en 2014 et 2015, à Genève en 2015, à Zürich en 2019 et 2020 ou encore à Tunis depuis 2023.
Les actes de dégradation commis le 7 octobre 2024 devant l’entrée de l’Institut français de Tunisie
Depuis le 7 octobre 2023, l’Institut français de Tunisie (IFT) est régulièrement la cible de dégradations lors de manifestations pro-palestiniennes. À ce jour, aucune tentative d’intrusion n’a abouti.
Le dernier incident s’est produit lors de la manifestation organisée le 7 octobre 2024. Malgré le déploiement d’un important dispositif de sécurité mobilisant plus d’une trentaine de policiers tunisiens devant l’entrée principale, la porte du parking de l’IFT ne faisait l’objet d’aucune surveillance particulière. Des manifestants ont alors tenté d’y pénétrer par la force, endommageant la caméra extérieure ainsi que le feu de signalisation contrôlant l’accès.
Par ailleurs, des insultes et menaces écrites en arabe, dont « Vous n’êtes à l’abri nulle part », ont été peintes sur les murs à proximité de l’IFT. Dès le lendemain matin, le matériel dégradé a été réparé et les inscriptions effacées.
Source : Institut français de Tunisie, à la suite du déplacement du rapporteur pour avis à Tunis les 10 et 11 octobre 2024.
En second lieu, des dégradations volontaires ciblées sur nos implantations diplomatiques ou consulaires ont été recensées dans l’actualité récente, à l’image du poste d’Athènes à la suite de la manifestation de groupuscules d’ultragauche revendiquant leur soutien au mouvement des gilets jaunes. Au cours de l’été 2024, une tentative d’incendie volontaire a aussi été commise, de nuit, contre les locaux du consulat général à Genève. L’origine et la motivation de cet acte, également perpétré contre une autre représentation étrangère, demeurent inconnues à ce jour. En outre, des dégradations volontaires relevant d’une forme de délinquance d’opportunité se sont déroulées en Équateur en marge de mouvements de contestations politiques au cours de l’année 2022.
De façon potentiellement plus sensible, le MEAE déplore des intrusions de forcenés, notamment dans des consulats, du fait de leur rôle et de leur mission d’accueil du public. Ces actes demeurent le plus souvent commis par des individus isolés. Susceptibles d’intervenir dans tous les contextes, ils sont donc particulièrement difficiles à prévenir, à l’instar de la tentative d’intrusion à la résidence de France à Téhéran en septembre 2024, l’individu ayant été rapidement repoussé par les gardes de sécurité diplomatique. Ces comportements présentent parfois une dimension crapuleuse, dans le but de dérober des biens de valeur appartenant à l’ambassade ou aux personnels y travaillant, comme ce fut récemment le cas à Gaborone et à Kinshasa. En outre, le MEAE considère que certaines tentatives d’intrusion consistent à réaliser des repérages à visée éventuellement terroriste, plusieurs cas en ce sens ayant été signalés en Libye, en Mauritanie, en Turquie et au Togo.
D’autres actes hostiles ont également été dénombrés au cours de la dernière décennie, qu’il s’agisse de comportements agressifs à l’endroit de véhicules et convois diplomatiques ([40]) ou du survol des emprises françaises par des drones ([41]).
Le nombre et la diversité des atteintes subies démontrent la nécessité de ne pas négliger la sûreté du réseau diplomatique, y compris en Europe et dans le monde occidental en général. Cet objectif est intégré dans la doctrine de sécurité qui prévoit un socle de sécurité commun susceptible d’être rehaussé de mesures de protection additionnelles en fonction du niveau de menace. Ces mesures peuvent être provisoires, prenant ainsi la forme de renforts temporaires de personnels ou d’interdictions de déplacements, mais elles peuvent aussi s’inscrire sur le long terme.
Le rapporteur pour avis estime que la multiplication des crises internationales exige d’adapter nos capacités opérationnelles à l’évolution de l’état de la menace, ce qu’atteste l’augmentation constante des moyens consacrés à la sécurisation du réseau diplomatique et consulaire depuis 2020.
B. Des moyens en augmentation constante dans un double objectif de prévention et de dissuasion
Les évolutions budgétaires prévues par le projet de loi de finances pour 2025 ont pour objectif de poursuivre la mise à niveau des installations de sécurité des emprises diplomatiques françaises. Malgré un contexte budgétaire dégradé, les crédits dévolus à la sécurité à l’étranger progressent de 2,6 millions d’euros et franchissent pour la première fois le seuil de 70 millions d’euros de crédits de paiement.
Cette évolution témoigne de la volonté affichée par le MEAE de maintenir un haut niveau de sécurité active, s’agissant des prestations de gardiennage des bâtiments, et de sécurité passive au titre des dépenses consacrées au fonctionnement et à l’investissement dans les installations et dispositifs matériels garantissant la sécurité des emprises (murs d’enceinte, postes de gardes, vitrages pare-balles, systèmes de vidéoprotection…).
DÉCOMPOSITION DU BUDGET CONSACRÉ AUX DÉPENSES DE SÉCURISATION DES POSTES DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES (PLF 2025)
(en millions d’euros)
Dépenses |
Montant des crédits de paiement (PLF 2025) |
Contrats de gardiennage |
24,4 |
Sécurité passive (fonctionnement et investissement) |
32,1 ([42]) |
Missions d’audit et de sécurité |
5,0 |
Frais de déménagement |
2,6 |
Véhicules blindés |
6,0 |
Total |
70,1 |
Source : MEAE
1. Les moyens humains consacrés à la surveillance des bâtiments
Le gardiennage des emprises diplomatiques et consulaires s’appuie sur deux types de personnel : d’une part, le personnel régalien français constitué de gendarmes et de policiers agissant sous la responsabilité de l’officier de sécurité du poste ([43]) et, d’autre part, des agents de droit local salariés par des prestataires de sécurité privée, dont l’activité est supervisée par le personnel français.
a. Le personnel français : le rôle pivot des gardes de sécurité diplomatique
Sous l’autorité hiérarchique de l’officier de sécurité du poste, assisté le cas échéant par un chef de sécurité opérationnelle, quatre cent soixante-seize gardes de sécurité diplomatique (GSD) permanents, composés de trois cent quatre gendarmes ([44]) et cent-soixante-quinze policiers ([45]), sont actuellement affectés à la surveillance des locaux diplomatiques et consulaires ([46]). En augmentation depuis les années 2010 ([47]), cet effectif est complété par un volant d’une centaine de GSD dits « temporaires » ([48]) déployés ([49]) pour renforcer en tant que de besoin le gardiennage des postes et la protection des diplomates dans des régions exposées à un fort risque sécuritaire.
Le volume des effectifs de GSD s’adapte à la complexité des missions de gardiennage propres à chaque emprise ainsi qu’au contexte sécuritaire des pays concernés. Si l’ambassade de France à Beyrouth bénéficie du concours de trente-et-un GSD, les postes d’Alger, de Tunis et d’Addis-Abeba disposent respectivement de dix-sept, cinq et quatre GSD. Interrogés par le rapporteur pour avis lors de leur audition, les agents des postes précités considèrent que le calibrage des GSD s’avère globalement satisfaisant compte tenu de l’évaluation des risques et de la taille des emprises à surveiller, bien que le renfort d’un cinquième GSD permanent à Addis-Abeba apparaisse opportun. Certaines représentations ne disposent que d’un seul GSD, à l’image de l’ambassade de France en Albanie, voire d’aucun GSD ([50]).
En dépit du rattachement opéré en 2009 de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) au ministère de l’intérieur et de la création en 2010 d’une direction de la coopération internationale et de sécurité (DCIS) commune à la DGGN et à la direction générale de la police nationale (DGPN), les GSD font l’objet d’une sélection et d’une formation distinctes selon qu’ils appartiennent aux corps de la police ou de la gendarmerie.
Au sein de la police nationale, le recrutement de GSD s’opère par un appel à candidatures organisé tous les deux ans. Sélectionnés à l’issue d’entretiens conduits par la DCIS, les agents suivent une formation de quinze jours et intègrent un vivier composé de cinq cents policiers dont les profils illustrent la diversité des parcours ([51]). Ce vivier est ainsi mobilisé selon les besoins exprimés par le MEAE.
La gendarmerie nationale réalise des appels à volontaires chaque année. Provenant majoritairement des escadrons de gendarmes mobiles, les militaires sélectionnés à l’issue de tests et d’une formation suivie à Saint-Astier sont ensuite directement affectés en tant que GSD à l’étranger ([52]). La durée d’affectation des GSD à l’étranger s’élève en moyenne à quatre ans ([53]).
Le rapporteur pour avis s’interroge sur l’absence de mutualisation des processus de recrutement, de formation et de gestion des GSD entre la DGPN et la DGGN, alors même que la DCIS, direction commune à la police et à la gendarmerie, semble naturellement désignée pour prendre en charge l’ensemble de ces missions. Il en résulte un fonctionnement en silos quelque peu anachronique compte tenu du rattachement de la DGGN au ministère de l’intérieur depuis quinze ans. Si elle ne semble pas porter préjudice à la qualité des missions accomplies par les GSD à l’étranger, cette situation freine le développement d’une culture commune entre policiers et gendarmes, alors même que les spécificités du travail de surveillance effectué par les GSD ne diffèrent pas selon que ces fonctions relèvent de policiers ou de gendarmes.
En outre, la mobilisation de personnels français pour sécuriser les ambassades et consulats implique le recours, souvent ponctuel et parfois permanent, à des forces d’intervention spécialisées de la police et de la gendarmerie. Ainsi, les policiers du RAID ([54]) composent actuellement l’intégralité de l’unité appelée en renfort pour protéger l’ambassade de France à Beyrouth. De façon plus pérenne, une cinquantaine de militaires du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) prennent en charge la protection des hautes personnalités, principalement les ambassadeurs ([55]).
b. Le personnel étranger : l’indispensable recours aux agents de droit local et aux vigiles prestés
À l’occasion de ses missions dans les postes diplomatiques, l’inspection générale des affaires étrangères a recommandé ([56]) l’externalisation des missions de gardiennage afin « de limiter le nombre d’ETP, mais aussi l’agilité de l’organisation, la professionnalisation et l’encadrement de ces effectifs prestés » ([57]). Le MEAE précise que cette orientation était à l’origine conçue pour accompagner les postes dotés d’un seul GSD. Amorcé depuis plusieurs années, ce mouvement s’inscrit dans une démarche plus large d’externalisation de certaines tâches. Selon le MEAE, la mise en œuvre de cette préconisation « présente des résultats qui nécessitent d’être encore mieux analysés et évalués, n’ayant pas porté, à ce stade, les fruits escomptés » ([58]).
Une centaine d’agents de droit local directement employés par les ambassades et consulats et près de mille cinq cents vigiles salariés par des sociétés de sécurité locales dans le cadre de trois cent trente-deux contrats de prestations de services conclus avec le MEAE complètent les effectifs de GSD. Ils assurent la gestion du dispositif de contrôle extérieur ([59]), des entrées, des véhicules et de la circulation des flux. Selon la nature du pays et des risques, ces personnels étrangers disposent d’un certain niveau d’autonomie bien que l’ensemble des commandes des systèmes de sécurité soit le plus souvent dirigées par un GSD.
Les contrats sont passés et signés localement par les postes diplomatiques, après une procédure de mise en concurrence préalable. Leur durée, le régime juridique et les clauses de dénonciation varient selon le cadre réglementaire local. Ces contrats sont majoritairement conclus auprès d’entreprises situées dans le pays d’accueil. Le recours à des sociétés internationales ou à des sociétés de services de sécurité et de défense françaises est plus rare et concerne quelques pays confrontés à des risques sécuritaires majeurs tels que la Libye, l’Irak, le Burkina Faso, la République démocratique du Congo, la Birmanie et peut-être prochainement le Yémen.
À l’échelle ministérielle, la DSD supervise l’ensemble de ces contrats et intervient à plusieurs niveaux. En premier lieu, elle fournit une expertise technique afin de s’assurer que le dispositif défini contractuellement correspond bien aux besoins concrets exprimés par les postes, s’agissant par exemple de la répartition des factions, des astreintes et des amplitudes horaires couvertes ([60]).
En second lieu, la DSD veille également à ce que le contrat de prestation préserve les droits humains, sociaux et les conditions de travail des vigiles, en particulier sur les continents africains et asiatiques. Ces impératifs se conjuguent pleinement à l’objectif d’accroître la sécurité, aucun personnel ne pouvant être pleinement concentré sur une vacation d’une durée trop longue, ce qui peut entraîner des conséquences sérieuses tant en termes de sûreté que d’accidents ([61]).
Enfin, la DSD vérifie que ces contrats locaux respectent les grands principes administratifs et comptables français, tels que la remise en concurrence régulière, ainsi que les standards de bonne gestion.
Les exigences de « bonne gestion » des contrats de gardiennage conclus avec les sociétés de sécurité locales
Les postes sont encouragés à faire jouer la concurrence à travers des procédures nouvelles et régulières d’appels d’offres.
La mise en concurrence régulière (au plus tard tous les cinq ans), la passation et le suivi des contrats de gardiennage de nos emprises diplomatiques et consulaires à l’étranger relèvent exclusivement de chaque poste, dont le chef de poste est ordonnateur secondaire et responsable des engagements et contrats signés au sein de son périmètre.
À l’instar des règles de conventions collectives françaises dans le domaine de la sécurité et du gardiennage, lors d’un renouvellement de contrat et d’un changement de prestataire, tout ou partie des vigiles sont, dans certains pays, repris par le nouveau prestataire, ce qui permet de garantir une continuité de l’activité, une transition efficace et de réduire le taux de rotation du personnel.
Source : réponses du MEAE au questionnaire budgétaire du rapporteur pour avis.
Une rationalisation et une mutualisation ont ainsi été mises en place depuis plusieurs années afin de parvenir au regroupement dans un contrat unique des prestations de gardiennage de plusieurs sites ([62]) situés dans la même ville ou le même pays. Afin d’exercer sa mission transversale de supervision, la DSD mobilise les conseillers techniques de la gendarmerie et de la police, les « conseillers techniques sûreté » et son bureau administratif et comptable.
Les dépenses consacrées à l’externalisation des prestations de gardiennage observent une forte augmentation ces dernières années, passant ainsi de 17,1 millions en 2020 d’euros à 24,4 millions d’euros en 2025, soit une hausse de 42,6 %. Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs :
– le respect du plafond maximal d’heures de travail annuel par vigile, dans le but de garantir l’efficacité de chaque agent presté ;
– la nécessité de proposer des rémunérations attractives ([63]) aux vigiles afin de les fidéliser, d’assurer une qualité élevée du service et de favoriser les relations avec les divers interlocuteurs tout en facilitant une intégration et un fonctionnement optimal du dispositif de sécurité active au sein des emprises ;
– le redéploiement vers les pays les moins sûrs des effectifs de GSD au détriment des postes situés dans les « pays à risques modérés », impliquant corrélativement une compensation par un recours accru au gardiennage externalisé ;
– l’élévation globale du niveau de la menace, ce qui motive le recours à des prestataires particulièrement qualifiés, et du coût de la vie dans de nombreux pays ([64]).
L’externalisation du gardiennage à des sociétés de sécurité étrangères s’inscrit parfois dans une stratégie globale de sécurisation des accès des emprises diplomatiques, à l’instar du contrat conclu par l’ambassade de France à Alger afin de contribuer à la sécurité active mais aussi passive des emprises, ce qui démontre l’importance vitale que revêtent les moyens matériels destinés à assurer la sécurité des locaux et des personnels.
2. Les moyens matériels pour garantir la sécurité des emprises et des personnels
Le montant des dépenses de fonctionnement et d’investissement consacrées à la sécurité passive des postes diplomatiques et consulaires a presque doublé depuis 2020. Cette évolution illustre la nécessité de mettre à niveau les dispositifs de sûreté au sein des emprises. En outre, si la modernisation du parc de véhicules blindés constitue une priorité du MEAE afin de sécuriser le déplacement des personnels diplomatiques, la situation actuelle du parc automobile apparaît plus contrastée.
a. L’augmentation des dépenses de sécurité passive
Les dépenses de fonctionnement de sécurité passive des postes concernent, pour l’essentiel, la maintenance des équipements garantissant la sûreté des emprises, tels que les scanners à rayon X, les caméras de vidéoprotection et les systèmes anti-intrusion, ainsi que l’achat et la mise en service de nouveaux matériels plus performants. Plusieurs dizaines d’opérations de sécurisation sont ainsi lancées chaque année dans l’ensemble du réseau.
PRINCIPALES OPÉRATIONS CONDUITES À L’ÉTRANGER EN 2023 et 2024
(en millions d’euros)
Année |
Lieu |
Poste concerné |
Montant des crédits (en autorisation d’engagement) |
2023 |
Ottawa |
Campus diplomatique |
0,75 |
2023 |
Bangui |
Consulat général |
0,77 |
2023 |
Ouagadougou |
Campus diplomatique |
3,32 |
2023 |
Résidence |
Tunis |
0,33 |
2023 |
Tel-Aviv |
Consulat général |
1,19 |
2023 |
Chicago |
Consulat général |
0,32 |
2023 |
Berlin |
Ambassade |
0,55 |
2023 |
New Delhi |
Campus diplomatique |
0,47 |
2023 |
Islamabad |
Ambassade |
0,96 |
2023 |
Oran |
Consulat général |
2,76 |
2024 |
Alger |
Campus diplomatique |
1,74 |
2024 |
Brazzaville |
Ambassade |
1,51 |
2024 |
Londres |
Consulat général |
1,20 |
2024 |
Sao Paulo |
Consulat général |
0,47 |
2024 |
Tanger |
Consulat général |
0,84 |
2024 |
Fès |
Consulat général |
0,95 |
2024 |
Conakry |
Campus diplomatique |
0,53 |
2024 |
Francfort |
Consulat général |
0,63 |
2024 |
Conakry |
Consulat général |
0,46 |
Source : MEAE
À la suite des attaques perpétrées en 2018 et 2022 contre les emprises françaises à Ouagadougou, des travaux de grande envergure ont été diligentés par le MEAE en 2023 afin de renforcer la sécurisation de l’ambassade de France, de la résidence et de l’Institut français.
Opérations de sécurisation des locaux réalisées à Ouagadougou depuis 2023
Les travaux réalisés à l’ambassade, à la résidence et à l’institut français de Ouagadougou ont porté sur la remise en état des postes de gardes extérieurs, le rehaussement des murs d’enceinte et la pose de barbelés, l’installation de portes et de fenêtres pare-balles, l’installation et la modernisation des systèmes de vidéoprotection, la création de zones de repli, la mise en place de dispositifs d’éclairage et de sonorisation de sécurité, la sécurisation des tourniquets et des sas d’accès ou encore l’installation de générateurs de fumée
Selon les éléments communiqués par le directeur général des affaires politiques et de sécurité du MEAE au rapporteur pour avis, les principales opérations envisagées en 2025 concernent la remise à niveau des dispositifs de sécurité passive des ambassades et campus diplomatiques d’Addis-Abeba, de Bamako, de Brazzaville, d’Abuja, de Lomé, de Santiago, de Brasilia, de Bogota et de Yaoundé ainsi que des consulats généraux de Douala et Lomé, pour un montant total prévisionnel avoisinant 20 millions d’euros ([65]).
Lors de son audition, l’ambassadeur de France à Addis-Abeba a souligné la complexité des opérations de travaux à réaliser au cours des prochaines années, compte tenu la superficie du campus diplomatique qui s’étale sur près de trente-cinq hectares. La réalisation d’une nouvelle étude d’évaluation des besoins, dont le coût atteint déjà 100 000 euros, doit permettre de mieux cerner les priorités du site afin d’identifier ses principaux points de vulnérabilité, qu’il s’agisse des angles morts du système de vidéoprotection ou de la hauteur insuffisante de certains murs d’enceinte.
L’audition de l’ambassadeur de France en Algérie, M. Stéphane Romatet, et le déplacement réalisé par le rapporteur pour avis à l’ambassade de France à Tunis ont permis de constater la réussite des travaux récemment mis en œuvre afin de moderniser, d’une part, le poste de contrôle et de sécurité (PCS) de l’ambassade d’Alger située au parc Peltzer ([66]) et, d’autre part, l’ensemble des dispositifs de contrôle d’accès de l’ambassade de France à Tunis.
Le bon fonctionnement des installations et des matériels de sécurité passive implique un haut niveau de maintenance, ce qui suppose une forte réactivité de la part des sociétés avec lesquelles les postes diplomatiques et consulaires ont conclu un contrat, ainsi qu’une qualité élevée des prestations.
La DSD du MEAE dénombre à ce jour 414 contrats de maintenance des dispositifs de sécurisation des emprises. Ces contrats sont passés et signés localement par les chefs de postes, qui en sont les titulaires, suivant une procédure préalable de mise en concurrence. Leur durée, le régime juridique et les clauses de dénonciation peuvent varier même si un modèle de contrat standard élaboré par la DSD est proposé à chaque poste.
Ces contrats prévoient classiquement une à deux visites annuelles, selon le type et la quantité de matériels déployés. En raison du caractère sensible des missions de maintenance, de la technicité de certains équipements et de la localisation de leur commande, les ambassades et consulats sont incités à recourir à des sociétés françaises habilitées, ce qui renchérit considérablement le coût des prestations. Ainsi, le coût prévisionnel des frais de maintenance des nouveaux dispositifs de sécurité passive du campus de Tunis atteindra 121 000 euros en 2025, soit un montant cinq fois supérieur à celui constaté les années précédentes.
Toutefois, dans le but d’améliorer le temps de réaction en cas de pannes ou de dégradations de certains éléments de sécurisation (portails, renforcement, obstacles de concertina ([67]) ou piques), le MEAE demande aux postes d’inclure dans les contrats une clause de sous-traitance de la maintenance de premier niveau par une entreprise locale bénéficiant des qualifications requises et dont le titulaire du contrat demeure responsable.
b. La protection des agents lors de leurs déplacements : l’exemple des voitures blindées
Le MEAE possède cent quatre-vingt-seize véhicules blindés qui servent à assurer la protection des autorités et des personnels diplomatiques lors de leurs déplacements à l’étranger. Le renouvellement du parc de véhicules blindés fait l’objet d’un budget de 6 millions d’euros en 2025.
Dans les zones les plus exposées, où les déplacements nécessitent un convoi de plusieurs véhicules blindés, le renforcement de ce segment du parc a été opéré. Les tensions croissantes dans certaines zones telles que le Sahel, Haïti, et le Moyen-Orient ou encore la guerre en Ukraine ont conduit la DSD du MEAE à déployer en urgence de nouveaux véhicules pour assurer la sécurité des agents travaillant dans ces postes.
Le rapporteur pour avis considère que cette ligne budgétaire doit être revalorisée. D’une part, si la sécurité des locaux diplomatiques et consulaires fait l’objet d’une remise à niveau régulière visant à prévenir et dissuader les attaques dont ils peuvent faire l’objet, les déplacements des personnels constituent des points de vulnérabilité majeurs. D’autre part, le vieillissement du parc automobile ([68]) et l’usure des véhicules utilisés dans certaines zones sensibles constituent potentiellement des failles de sécurité dont les conséquences peuvent s’avérer dangereuses.
Malgré des moyens en hausse constante depuis 2020, le MEAE précise que les commandes ([69]) réalisées ces deux dernières années ([70]) ne permettent pas de renouveler le parc à hauteur de 10 % par an, comme cela devrait pourtant être le cas afin de maintenir, au cours des prochaines années, l’âge moyen de la flotte sous la barre des dix ans. Les frais annexes à l’achat de ces véhicules, qu’il s’agisse de leur maintenance ([71]) ou de la formation des chauffeurs, pèsent lourdement sur les dotations budgétaires.
Pour autant, il convient de renforcer les moyens affectés à l’achat et à l’entretien des véhicules blindés qui représentent l’un des principaux vecteurs de sécurité des personnels lors de leurs déplacements, notamment dans les pays exposés à de forts risques sécuritaires.
C. Un effort essentiel qu’il convient de poursuivre, à l’épreuve de défis géopolitiques et technologiques évolutifs
Au-delà des moyens humains et matériels mobilisés pour sécuriser les bâtiments et les personnels à l’étranger, la sécurité des systèmes d’information du réseau diplomatique représente un enjeu décisif, soulignant la place centrale qu’occupent les outils numériques dans la diplomatie contemporaine.
1. Le défi du numérique : entre risque sécuritaire et outil d’anticipation
a. La protection numérique des postes diplomatiques et consulaires
Face à l’intensification de la menace numérique ([72]) sur les emprises diplomatiques, disposer de l’ensemble des outils nécessaires au traitement et à la protection des informations sensibles demeure indispensable à l’exercice des missions de politique étrangère. Le MEAE s’est doté d’une direction du numérique (DNUM) et d’un plan de transformation numérique en juin 2021 pour répondre aux spécificités de l’action diplomatique et consulaire.
La DSD définit la politique de sécurité des systèmes d’information du ministère et de ses emprises et veille à sa mise en œuvre par la DNUM. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) réalise les audits et certifie la sécurité des systèmes et solutions informatiques développées par la DNUM. Elle contribue à la détection, à l’analyse et à la remédiation des cyberattaques sur l’ensemble des emprises diplomatiques.
Le paysage et les outils de la protection numérique des postes diplomatiques
Les services français à l’étranger sont reliés à un réseau spécifique géré par le Quai d’Orsay. Les postes sont équipés de dispositifs de liaisons satellites. L’ensemble des données circulant sur ces réseaux est préalablement chiffré. Les ambassades à l’étranger disposent de serveurs locaux, à l’exception des postes de présence diplomatique (PPD), pour lesquels il a été́ décidé d’héberger les serveurs en administration centrale.
Pour les communications officielles, le MEAE dispose d’une application « Diplomatie » accessible en interministériel, permettant les échanges d’informations et d’instructions entre l’administration centrale et les emprises diplomatiques. Ces communications sont protégées jusqu’au niveau « diffusion restreinte ». Pour des communications officielles de niveau « confidentiel défense », le MEAE s’appuie sur le réseau de stations ISIS déployé dans toutes les ambassades ayant à traiter de sujets sensibles nécessitant une protection élevée.
Le réseau de téléphonie à l’étranger repose sur une infrastructure de téléphonie classique qui s’appuie sur des autocommutateurs. La téléphonie mobile est aussi largement utilisée au sein des postes. En ce qui concerne la téléphonie fixe, le ministère dispose, outre les moyens disponibles via les opérateurs locaux, d’un réseau « privé » protégé par des équipements de chiffrement de niveau « diffusion restreinte » et d’un réseau de communications protégées de niveau « confidentiel défense ». Les postes disposent également de moyens de téléphonie de crise (Irridium, etc.) gérés par le Centre de crise et de soutien (CDCS).
Le dispositif de la DNUM à l’étranger repose sur un réseau de 22 centres régionaux d’assistance des systèmes d’information et de communication (CRASIC) situés à l’étranger. Les CRASIC constituent des pôles d’assistance technique auprès des postes diplomatiques et consulaires situés dans une aire régionale donnée. Les agents des CRASIC exercent des missions polyvalentes : assurer maintenance préventive ou dépannage d’urgence, délivrer des formations et des actions de sensibilisation à l’usage des outils numériques, garantir la supervision des infrastructures, etc.
Source : Avis budgétaire de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale portant sur les crédits de la mission Action extérieure de l’État, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, pages 21-29 et annexe III.
b. Le choix des prestataires de sécurité au regard de la souveraineté numérique
La souveraineté numérique repose sur notre capacité à analyser l’information, à garantir la confidentialité des communications, à assurer la résilience de nos échanges en situation de crise, ainsi qu’à utiliser des outils pour renforcer notre influence mondiale. D’un point de vue stratégique, sécuritaire et juridique, la transformation numérique du MEAE et la sécurisation numérique des postes diplomatiques ne sauraient par nature reposer essentiellement sur les innovations conduites par des puissances étrangères.
Aujourd’hui, l’une des principales vulnérabilités des emprises diplomatiques en matière de sécurité informatique porte, selon l’ANSSI, sur les réseaux internet de certaines ambassades. Il arrive que certains postes fassent appel à des prestataires externes pour la gestion du réseau local, avec parfois l’intention de connecter ce réseau aux infrastructures plus sécurisées de l’ambassade, ce qui aboutit ainsi des failles de sécurité ([73]). Le choix des prestataires de sécurité et des équipements numériques s’effectue de manière autonome par les postes, en fonction des spécificités de chaque contexte. Néanmoins, l’évaluation rigoureuse des risques associés et la fiabilité des dispositifs de protection doivent toujours constituer des priorités absolues. En Algérie, par exemple, la présence de l’opérateur chinois Huawei appelle à une vigilance accrue. Cependant, une analyse équilibrée entre le coût et la gestion des risques peut faciliter la conclusion de contrats locaux avec certains États hôtes, réduisant ainsi les coûts liés à la protection et aux équipements numériques tout en établissant des partenariats bilatéraux en matière de sécurité numérique.
Une attention particulière doit également être portée aux personnels de droit local quant à leur utilisation des outils numériques dont disposent les ambassades et consulats. Si certains agents de droit local peuvent se voir octroyer un accès limité au système informatique de l’ambassade et restreint à des tâches spécifiques, une évaluation continue est réalisée afin de garantir la conformité de ces accès aux protocoles de sécurité en vigueur, sans compromettre la protection des informations hautement sensibles. Cette approche vise à assurer un équilibre entre l’efficacité opérationnelle et la sécurité des systèmes diplomatiques.
c. Les emprises diplomatiques françaises sont les premières cibles prioritaires des cyberattaques dirigées contre la France
La menace informatique sur les emprises diplomatiques est beaucoup plus forte que sur la plupart des autres administrations étatiques. Le MEAE traite beaucoup d’informations politiques ou de sécurité́ potentiellement sensibles, tels que les télégrammes diplomatiques, ainsi que des informations à caractère économique et scientifique pouvant représenter un intérêt et une vulnérabilité particuliers. De surcroît, en raison de leur architecture décentralisée, les systèmes d’information des ambassades et consulats sont confrontés à une surface d’attaque d’envergure mondiale
Le groupe russe Nobelium et les attaques menées contre les postes diplomatiques français
L’ANSSI a observé un niveau élevé d’activités liées à groupe russe Nobelium dans le contexte récent de tensions géopolitiques, notamment en Europe, en lien avec l’agression de la Russie contre l’Ukraine. Les activités de Nobelium contre nos emprises diplomatiques représentent une préoccupation de sécurité nationale et mettent en danger les intérêts diplomatiques français et ses emprises.
Dès 2021, les emprises diplomatiques françaises ont été ciblées à plusieurs reprises par des courriels de phishing envoyés par des institutions étrangères précédemment compromises par les opérateurs de Nobelium. Les opérateurs de Nobelium ont tenté d’installer l’outil Cobalt Strike sur le système d’information de certaines emprises diplomatiques, ce qui aurait pu permettre de prendre le contrôle à distance des machines compromises. Cette attaque n’a cependant pas abouti.
En mars 2022, une ambassade européenne en Afrique du Sud a reçu un courriel malveillant dont l’émetteur prétendait agir au nom d’une ambassade française et annonçait la fermeture en raison d’un acte terroriste non spécifié. Les courriels d’hameçonnage ont été envoyés à partir d’un compte compromis appartenant à un diplomate français. En avril et mai 2022, des dizaines d’adresses électroniques appartenant au MEAE ont été ciblées par des courriels de phishing liés à Nobelium. En mai 2023, l’ambassade de France à Kiev a été l’une des cibles de cette campagne.
Source : ANSSI, rapport sur les intrusions du Groupe Nobelium, 2024.
d. Un combat collectif contre la désinformation
Dans une période où notre rapport à l’information est profondément bouleversé par des phénomènes tels que l’instrumentalisation de l’information, développer les outils numériques au service de la diplomatie est essentiel pour que celle-ci puisse continuer à jouer son rôle de clarification des enjeux et de désamorçage des conflits ([74]). À la nécessité d’un travail de veille s’ajoutent la détection et l’analyse des phénomènes informationnels à l’étranger susceptibles de contribuer à mettre en cause l’action de la France. La structuration progressive de la sous-direction veille et stratégie (VS), placée au sein de la direction de la communication et de la presse (DCP) du MEAE, a permis de renforcer les capacités de riposte du Quai d’Orsay et de ses emprises. Dans le prolongement de ses activités de veille, le service analyse les éléments constitutifs de la manœuvre informationnelle pour élaborer des éléments de réponse, en coordination avec les représentations diplomatiques françaises concernées.
Dans une logique plus préventive, la sous-direction VS exerce également une mission de formation des personnels des ambassades aux enjeux liés à la désinformation. Ces mesures se conjuguent à un renforcement des capacités de veille et de riposte dans les postes diplomatiques. Lors de son déplacement à l’ambassade de France à Tunis, le rapporteur pour avis a été sensibilisé à cette question cruciale, au regard des risques avérés de débordement de manifestations se déroulant habituellement à proximité des sites de l’ambassade et de l’Institut français de Tunisie.
2. Des enjeux multiformes qui impliquent des réponses « sur-mesure »
Le renforcement de la formation des agents du MEAE aux enjeux numériques, l’adaptation du parc immobilier à l’étranger le meilleur criblage et suivi des personnels de droit local constituent des pistes de réflexion afin de garantir de manière pérenne la sécurité de notre réseau diplomatique.
a. Les formations à la cybersécurité dont bénéficient les personnels du MEAE
Si la prise de conscience des risques sécuritaires affectant l’usage des outils numériques a fortement augmenté grâce à la médiatisation des cyberattaques ciblant les systèmes d’information des ambassades, l’effort de formation et de sensibilisation des agents du MEAE doit se poursuivre.
Au sein de l’ambassade de France en Algérie, dans le cadre du mois de la cybersécurité, des formations ont ainsi été dispensées aux agents de l’ambassade et aux personnels de droit local afin de stimuler la capacité collective de réponse face aux cyberattaques, tout en garantissant une meilleure protection des infrastructures et des données sensibles. En outre, lors de leur audition par le rapporteur pour avis, les représentants de la direction générale de l’administration et de la modernisation du MEAE ont rappelé l’effort budgétaire consacré aux formations en matière de cybersécurité ([75]), s’élevant à 460 000 euros en 2025, contre 370 000 euros en 2024 et 345 000 euros en 2023.
Le rapporteur pour avis considère que la création de l’académie diplomatique et consulaire en juin 2024 constitue une opportunité afin de développer un tronc commun d’apprentissage pour l’ensemble des agents du MEAE, de façon à la fois transversale et adaptée aux spécificités propres aux fonctions exercées en France et à l’étranger.
b. La prise en compte des spécificités du parc immobilier
Bien qu’indispensable au regard de l’amplification des menaces sécuritaires, la sécurisation accrue des emprises diplomatiques et consulaires ne doit pas non plus occulter le rôle particulier et la nécessaire latitude d’action dont nos agents doivent disposer afin d’exercer leurs missions. Les auditions et le déplacement à Tunis réalisés par le rapporteur pour avis ont fait état d’une recherche d’équilibre, forcément subtile et complexe, entre la préservation de la sécurité des locaux et des personnels, et la dimension ouverte, accueillante et vivante de toute action diplomatique.
Le risque d’une « bunkérisation » de la diplomatie française imitant le modèle américain pourrait ainsi exposer nos ambassades et consulats à des critiques tenant au supposé manque de confiance de la France à l’égard des autorités des pays d’accueil. Si ces reproches sont sans objet dans les zones à risques, elles ne sauraient être balayées dans des pays avec lesquels les relations bilatérales se développent de façon fructueuse et apaisée.
De manière analogue, les réflexions quant au déménagement ou au regroupement de postes sur un même campus doivent appréhender l’ensemble des enjeux entourant ces décisions. Essentielles, les dimensions budgétaires et sécuritaires doivent se conjuguer à la préservation de la valeur patrimoniale de certains sites emblématiques, qui, s’ils peuvent apparaître coûteux à entretenir et à sécuriser, contribuent symboliquement au rayonnement et à l’influence de la France à l’étranger, à l’instar du campus d’Addis-Abeba.
Les difficultés de sécurisation des emprises ne peuvent justifier à elles seules des déménagements ou des regroupements de postes. Cependant, elles doivent donner lieu à une adaptation au cas par cas des dispositifs de protection. À Tunis, le développement de constructions immobilières de grande envergure aux abords de l’ambassade fait émerger de nouveaux risques quant à la sécurité des personnels circulant à découvert entre les différents bâtiments du site. De même, l’externalisation des résidences et logements dans lesquels habitent les diplomates les éloigne en conséquence des sites sur lesquels se trouvent les bureaux de l’ambassade et du consulat. Cet enjeu doit faire l’objet d’une attention particulière, au regard des menaces d’agression auxquelles les agents peuvent être confrontés dans leurs trajets quotidiens.
c. Le criblage et le suivi des agents de droit local
Le recours accru à des agents de droit local afin d’assurer les prestations de gardiennage des emprises soulève des risques qu’il convient de cerner avec acuité, aussi bien en amont de leur recrutement qu’au terme de leurs fonctions.
D’une part, le recrutement de vigiles étrangers, que celui-ci procède directement du poste diplomatique en tant qu’employeur ou indirectement sur la base de la prestation de services conclue avec une société de sécurité qui les salarie, implique de systématiser le criblage préalable de ces personnels en cas d’élévation des menaces sécuritaires. Si le rapporteur pour avis a pleinement conscience de la difficulté de mener des enquêtes approfondies sur chaque vigile presté avant sa prise de fonctions, la vigilance de l’ensemble des services de renseignement et du MEAE est requise afin d’identifier d’éventuels profils problématiques.
D’autre part, la forte rotation des personnels de droit local affectés aux missions de gardiennage des emprises peut favoriser l’apparition de failles de sécurité au regard des connaissances du réseau et des dispositifs de protection acquises par ces agents au cours de leurs fonctions. Là encore, selon l’évaluation de l’état des menaces propres à chaque pays, le suivi de certains de ces personnels – notamment ceux ayant eu accès à des informations considérées comme sensibles – pourrait être utilement renforcé.
Au cours de sa réunion du mercredi 23 octobre 2024, la commission examine le présent avis budgétaire.
M. le président Bruno Fuchs. Les crédits de la mission Action extérieure de l’État, dans le PLF 2025 s’élèvent à 3,34 milliards d’euros, soit un niveau inférieur de 150 millions d’euros par rapport à 2024. Les rapporteurs pour avis ont respectivement choisi d’insister plus particulièrement sur la sécurisation de nos postes diplomatiques à l’étranger, s’agissant de M. Nicolas Forissier, et sur la diplomatie d’influence en zone de guerre, pour ce qui concerne M. Frédéric Petit.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis (Action de la France en Europe et dans le monde ; Français à l’étranger et affaires consulaires). Les crédits de la mission Action extérieure de l’État visent à financer la plupart des dépenses de personnel, d’investissement, de fonctionnement, d’intervention du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Ces crédits sont répartis au sein de trois programmes : les programmes 105 et 151 relatifs à l’action de la France en Europe et dans le monde, ainsi qu’aux Français de l’étranger et aux affaires consulaires ; le programme 185, qui concerne la diplomatie culturelle et d’influence.
Le PLF 2025 intervient dans un contexte budgétaire particulièrement dégradé, dans le cadre d’un déficit prévu de 6,1 % du produit intérieur brut (PIB). Les crédits de la mission Action extérieure de l’État n’échappent pas à la volonté du Gouvernement de réaliser 60 milliards d’euros d’économies, dont les deux tiers reposent sur une diminution des dépenses publiques.
Doté de 2,7 milliards d’euros, le programme 105 voit son budget diminuer de 90 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, soit une baisse de 3,2 %. Quant au programme 151, il enregistre également une diminution d’environ 1,9 % du montant de ses crédits par rapport à 2024, pour atteindre 157 millions d’euros.
Depuis dix-huit mois, à la suite des états généraux de la diplomatie, le mouvement de « réarmement » du Quai d’Orsay apparaissait à la fois aussi légitime qu’indispensable, après plusieurs décennies de réductions très prononcées des moyens, et notamment des effectifs. À ce titre, le budget 2025 marque malgré tout une forme de coup d’arrêt, de stabilisation. Ainsi, 75 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires seront créés l’année prochaine mais cette augmentation est moitié moindre par rapport à ce qui était prévu dans les lettres plafonds pour 2024. Dans les lettres plafonds pour 2025, le rythme d’augmentation, qui avait pour objectif de parvenir à 700 postes supplémentaires par rapport à 2023, se voit réduit de moitié.
Personnellement, j’interprète ce statu quo comme un moindre mal puisque, par un heureux concours de circonstances, la réduction des contributions que verse la France aux organisations internationales telles qu’elles sont calculées au titre du programme 105 s’établit également à 90 millions d’euros : d’une part, en raison d’une révision du mode de calcul de la quote-part française et, d’autre part, en raison de la fermeture de la mission de maintien de la paix des Nations unies au Mali. Il faut également évoquer la baisse des crédits consacrés aux mesures d’assistance à caractère non létal qui sont prévues par la Facilité européenne pour la paix mais qui sont compensées par la hausse des dépenses consacrées aux mesures à caractère létal relevant du budget du ministère des armées.
En ce qui concerne le programme 151, la baisse des crédits de 8 millions d’euros correspond essentiellement à la diminution corrélative du montant budgété pour les bourses scolaires versées en faveur des enfants des familles à revenus modestes dans le réseau de l’enseignement scolaire à l’étranger. Selon les représentants de la direction des Français de l’étranger et des affaires consulaires du ministère, cette évolution s’explique par la baisse prévisionnelle du nombre d’élèves boursiers en 2025, au regard de la baisse constatée entre les deux années scolaires 2022-2023 et 2023-2024. Je ne dispose pas, à ce stade, d’éléments susceptibles d’invalider a priori les prévisions du ministère sur ce plan mais je voudrais simplement attirer l’attention de la commission sur un point : si le pilotage de ce type de dépenses est très compliqué par nature, il convient d’éviter une sous-budgétisation de ce poste, lequel est absolument nécessaire pour pouvoir répondre à tout moment au besoin de ces aides financières, qui sont décisives pour beaucoup de familles françaises expatriées.
Je me félicite également de la sanctuarisation des crédits qui sont dévolus à la direction du numérique du ministère, soit 58 millions d’euros, et à la légère progression du budget consacré à la sécurisation de nos emprises diplomatiques et consulaires à l’étranger, qui franchit pour la première fois la barre inédite de 70 millions d’euros, soit une hausse de 2,6 millions d’euros. La sécurité des locaux et des personnels déployés par la France à l’étranger représente un impératif régalien auquel aucune économie d’envergure ou coup de rabot opportuniste ne doit porter préjudice. Il en va de la crédibilité de notre politique étrangère à travers le monde. Il s’agit aussi de préserver la capacité opérationnelle de notre diplomatie à agir efficacement au service de la France et de la défense de ses intérêts dans des contextes qui sont, sur le plan sécuritaire, parfois tendus.
Il m’a donc semblé important d’attirer l’attention sur cette question sensible qui ne peut pas être résumée à un simple problème logistique. La réelle prise en compte de cet aspect s’est traduite par l’accroissement très important et continu du budget consacré aux dépenses de fonctionnement, d’investissement et de personnel relatives à la sécurité du réseau diplomatique. Nous sommes ainsi passés de 44,8 millions d’euros en 2020, à 70,1 millions d’euros dans le PLF 2025.
Outre les directions compétentes et plusieurs représentants syndicaux du ministère, j’ai également pu auditionner les ambassadeurs de France en Algérie, en Éthiopie, au Burkina Faso. Confrontés à des risques différents, ils m’ont néanmoins fait part de leur satisfaction globale quant au renforcement des moyens matériels et humains dont ils disposent pour assurer la sécurité de leurs personnels. J’ai pu moi-même le vérifier sur le site de l’ambassade de France à Tunis, où j’ai pu très concrètement constater le perfectionnement des dispositifs de sécurité passive qui ont été installés ces derniers mois sur le site de l’ambassade. Au-delà des ambassades et consulats, il ne faut jamais oublier les sites dans lesquels la France dispose d’une représentation, à l’image des instituts culturels, qui peuvent être l’objet de dégradations importantes, lesquelles expriment parfois des sentiments anti-français qu’il ne faut pas négliger.
Nous sommes donc confrontés à de multiples défis pour garantir un niveau de sécurité optimal, sans pour autant sombrer dans une quelconque paranoïa qui aboutirait à une logique plutôt contre-productive, une « bunkerisation » des emprises. Les diplomates que j’ai pu rencontrer ont toujours insisté sur la nécessité de garder un équilibre entre la nécessaire sécurité des personnels et des sites, mais aussi le fait de conserver, dans la tradition française, une diplomatie accueillante et ouverte. L’évaluation du risque sécuritaire et son évolution très rapide nécessitent un recueil et un partage d’informations à l’échelle interministérielle. Les retours dont je dispose indiquent que la coopération avec les États partenaires est bien réelle.
Deuxièmement, les moyens humains affectés au gardiennage des emprises diplomatiques et consulaires portent sur la mobilisation de 476 gardes de sécurité diplomatique et de près de 1 500 vigiles de droit local, salariés par des sociétés de sécurité étrangères. Cette gestion est complexe et m’amène à formuler plusieurs observations. Je pense qu’il faut simplifier et mutualiser la sélection et la formation de ces gardes de sécurité diplomatique. Leur gestion souffre encore d’un fonctionnement en silos entre la police et la gendarmerie. Ensuite, il faut également renforcer le criblage préalable et le suivi a posteriori des vigiles qui sont prestataires de services. En effet, le turn-over peut parfois conduire à des failles de sécurité, compte tenu des informations auxquelles ces agents peuvent avoir accès.
Enfin, je voudrais souligner aussi quelques points d’attention, qui concernent la nécessité de poursuivre le renouvellement du parc de véhicules blindés, afin de conserver une moyenne à moins de dix ans. Il faut également développer les formations à la cyber-sécurité dont bénéficient les agents du ministère, à l’heure où les outils numériques peuvent faire l’objet de piratages et d’attaques massives.
Vous trouverez naturellement plus de détails dans mon rapport. Malgré les réserves et les points d’attention mentionnés, je tiens à prononcer un avis favorable sur l’adoption des crédits des programmes 105 et 151 dans la mesure où j’estime honnêtement, et malgré les contraintes budgétaires, qu’ils préservent les capacités de notre diplomatie à remplir ses missions, au service de la France et de nos compatriotes.
M. le président Bruno Fuchs. M. Frédéric Petit, notre rapporteur pour avis sur la diplomatie culturelle et d’influence et sur la francophonie, va évoquer notamment la question de l’influence en zone de guerre. Pour ma part, j’ai pu me rendre en début d’année en Moldavie, où les dirigeants de ce pays m’ont fait part de leur très grande inquiétude face aux moyens massifs que les Russes déploient pour désinformer ou créer de la propagande dans leur pays. Or nous voyons bien que le référendum sur l’inscription dans la Constitution moldave de l’objectif d’adhésion à l’Union européenne s’est joué à quelques milliers de voix.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis (Diplomatie culturelle et d’influence – Francophonie). En tant que député des Français à l’étranger, je souhaite d’abord revenir brièvement sur les propos de notre collègue Nicolas Forissier. La numérisation des services est en bonne voie, notamment grâce à la plateforme France consulaire. Ensuite, la sécurisation des écoles françaises, qui ne sont généralement pas des emprises françaises, est réalisée par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE).
Globalement le budget 2025 est en recul par rapport au budget prévisionnel 2024, qui bénéficiait d’une très grande progression au titre du « réarmement » de notre diplomatie. Ainsi, dans le programme 185, nous sommes en progression sur toutes les lignes par rapport au réalisé 2023. À titre d’exemple, l’AEFE bénéficiait de 353 millions d’euros en 2017, contre 450 millions d’euros de subventions pour charges de service public aujourd’hui.
En 2017, nous dressions le constat d’une influence française éparpillée car elle était financée par des ministères complètement différents, qui ne se parlaient pas. De 2019 à 2022, nous avons conduit des travaux de mise en cohérence, notamment de l’aide publique au développement, avec la loi du 4 août 2021. Nous avons également accompagné le Gouvernement dans l’évolution du dispositif des fonds spéciaux de projets innovants (FSPI), qui s’appelle désormais « Fonds Équipe France » (FEF). Ces nouveaux outils sont à disposition des ambassadeurs pour conduire des projets cohérents.
Enfin, depuis 2022, j’ai présenté deux rapports en mettant en exergue la question suivante : cette diplomatie d’influence est-elle « une diplomatie du dessert » ou la plaçons-nous au cœur de notre stratégie du XXIe siècle ?
Ayant eu la chance d’avoir l’assurance d’être désigné rapporteur pour avis dès la fin juillet, j’ai pu partir en Ukraine le 19 août, notamment à Tchernihiv, où nous reconstruisons le théâtre. De la même manière, des conservateurs français sont allés à Soumy pour aider à la cache des œuvres du musée. Je me suis rendu ensuite en Cisjordanie et en Israël.
Lorsque la guerre sévit et que la culture se « planque », il faut encore plus faire œuvre d’influence. Mon rapport comporte à ce titre des exemples très précis sur les moyens nous permettant d’être plus utiles.
M. le président Bruno Fuchs. Je cède à présent la parole aux représentants des groupes.
M. Jérôme Buisson (RN). En 2023, le président de la République avait esquissé, lors de son discours de clôture des états généraux de la diplomatie, une sorte de programmation budgétaire jusqu’en 2027 prévoyant une hausse de 20 % des moyens du ministère, soit près de 1,5 milliard d’euros, et la création de 700 postes. La loi de finances 2024 a tenu cet objectif en consacrant une hausse de 11 % des crédits et la création de 165 postes, tandis qu’en 2025, les crédits sont en légère baisse et la création de postes au nombre de 75.
Force est de constater que le Gouvernement a sacrifié les engagements du président de la République sur l’autel de sa gestion budgétaire calamiteuse. Mais nous reconnaissons que, dans ces temps de crise, il est nécessaire de consentir à un effort pour le redressement de nos comptes publics. Dans le détail de ce budget, les dépenses afférentes aux contributions européennes, bien qu’en baisse, représentent tout de même plus de 150 millions d’euros, alors que le budget de l’ensemble de notre réseau diplomatique représente 780 millions d’euros. Ces contributions équivalent donc à 20 % du budget de notre réseau d’ambassades et de consulats. Nous continuons de défendre un réseau diplomatique national fort car seule une diplomatie nationale sera à même de défendre nos intérêts nationaux.
Mais, plus inquiétant encore, les prévisions de dépenses de 2026 et 2027 laissent présager une stagnation, en termes absolus, des moyens de notre diplomatie, tandis que les aides aux pays en développement devraient augmenter de près de 1,2 milliard d’euros. Au-delà des chiffres globaux de ce budget, nous ne cautionnons pas le fléchage des moyens. Comment ce Gouvernement peut-il prévoir une augmentation substantielle du programme de solidarité à l’égard des pays en développement quand le budget de l’appareil diplomatique est, quant à lui, en stagnation ?
Enfin, nous ne pouvons que déplorer la destruction du corps diplomatique entreprise par le président de la République, auquel nous sommes farouchement opposés. Les diplomates ont, à juste titre, exprimé leur colère et les états généraux de la diplomatie, qui devaient y apporter une réponse, n’ont pas été au rendez-vous. Au regard de la situation budgétaire catastrophique laissée par les macronistes, nous proposons d’amender cette mission de façon responsable en suggérant des pistes d’économies raisonnables. Reconnaissant l’urgence financière de notre pays d’une part, mais protestant, d’autre part, contre un fléchage irresponsable des fonds de cette mission, nous nous abstiendrons en l’état pour le vote de ces crédits.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. La baisse des contributions versées par la France est automatique et accompagnée des transferts budgétaires entre ministères ; elle contribue à une stabilisation de l’effort budgétaire, avec des choix et des fléchages qui me semblent équilibrés. En revanche, j’ai souligné dans mon rapport le ralentissement de la trajectoire telle qu’elle était prévue après les états généraux de 2023, qui se matérialise dans les 75 créations de postes quand 150 étaient nécessaires cette année pour tenir cette même trajectoire. De la même manière, quand 200 postes devaient voir le jour chaque année lors des deux exercices suivants – 2026 et 2027 –, la lettre plafond fait état d’une prévision de 100 postes par an, compte tenu des contraintes budgétaires. Cependant, l’esprit et les moyens demeurent quand même très largement maintenus.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Nous avons déjà évoqué le sujet dans cette commission : la synchronisation des contrats d’objectifs et de moyens (COM) et des contrats d’objectifs et de performance (COP) doit être l’outil d’une éventuelle programmation du ministère. En effet, plus de 60 % des dépenses du ministère ne sont pas programmables, puisqu’elles concernent des cotisations que nous ne maîtrisons pas, ainsi que des dépenses de personnel.
Ensuite, il faut comparer les exécutions, et non se concentrer uniquement sur les budgétisations. Nous avons connu un choc de budgétisation en 2024 et nous demeurons sur une trajectoire ascendante. En matière d’embauches, cela n’est pas parce que 150 postes sont budgétés que les personnes sont immédiatement recrutées. Regardons donc également l’évolution sur l’exécuté. Or nous ne disposons pas encore de l’exécution budgétaire de l’exercice 2024.
Mme Amélia Lakrafi (EPR). Je vous remercie pour ces deux rapports extrêmement détaillés et éclairants. La sécurité de nos agents, de nos employés locaux et de nos emprises à l’étranger constitue une priorité absolue.
Je soutiens évidemment tout effort budgétaire en faveur du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, en particulier pour la création de nouveaux postes dans le réseau consulaire et au sein du centre de crise et de soutien. Comme je l’ai souligné ici la semaine dernière, ce ministère a été trop longtemps frappé par des réductions budgétaires, au point où certains l’ont décrit comme étant « à l’os ».
Ce constat est particulièrement pertinent dans le contexte actuel, notamment compte tenu de la situation au Liban. Nous ne pouvons que constater l’importance vitale du rôle joué par ces agents dévoués pour assurer la sécurité de nos compatriotes à l’étranger, en temps de crise. Il est donc impératif que le ministère dispose de moyens nécessaires pour continuer à fonctionner de manière efficace. Je me réjouis donc de la création de ces 75 ETP supplémentaires, tant en centrale que dans le réseau, permettant de prolonger la dynamique amorcée depuis 2023. Cette nouvelle allocation représente un pas dans la bonne direction.
Je comprends également la nécessité, dans le contexte actuel, de demander un effort à toutes les administrations, y compris le ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Cependant, parmi les amendements que nous allons examiner, plusieurs, notamment ceux de nos collègues de La France Insoumise, bien qu’animés de bonnes intentions, révèlent une certaine méconnaissance de la réalité du terrain. Ils me semblent inopportuns dans certains contextes actuels.
Enfin, si l’on veut faire preuve de cohérence, on ne peut pas à la fois plaider pour le renforcement des aides sociales, des bourses scolaires et l’accompagnement des enfants à besoins spécifiques, tout en stigmatisant les Français à l’étranger et en les accusant d’être des privilégiés ou des fraudeurs, et en réclamant la réintroduction d’un impôt sur le passeport. Ce discours n’est ni juste, ni tenable, dans les faits.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. La sécurisation de nos postes constitue un enjeu majeur. Lorsque j’ai entamé l’étude de cet aspect, je redoutais de constater des insuffisances mais, en réalité, j’ai pu observer que le ministère a effectué un très grand effort budgétaire – et aussi culturel et organisationnel – dans ce domaine. Le ministère témoigne d’un très grand souci accordé à la sécurité des personnels, des visiteurs des ambassades ou des consulats. Depuis 2006, les moyens dévolus à la sécurisation de nos postes diplomatiques ont quintuplé. Naturellement, il convient également de demeurer vigilants.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Nous avons évoqué la nécessité de rester accueillants dans les écoles françaises. Je connais une école française à Sarajevo, une école que nos amis de La France Insoumise appelleraient « néolibérale » parce qu’elle est associative. Cette école souhaitait aussi être une école américaine et, à ce titre, devait disposer d’une panic room dans la maternelle. Or cette panic room a été conçue de manière accueillante, tout en respectant les caractéristiques de ce genre de pièce : elle se ferme en trente secondes et comporte le nécessaire pour pouvoir résister trois semaines à un siège.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Monsieur Petit, je me permets de réagir non pas à vos petites provocations, dont nous avons l’habitude, mais à vos propos, qui ne sont pas justes concernant le budget.
L’austérité est à l’œuvre, depuis plusieurs années concernant les crédits de l’action extérieure. Vous vous référez à une hausse de crédits de 5,3 % depuis 2021 mais vous oubliez qu’elle a été plus qu’absorbée par l’inflation, entraînant une diminution nette des crédits sur la période évoquée. Depuis 2011, les bourses et aides à la scolarité ont considérablement chuté. Les crédits de paiement et autorisations d’engagement pour 2025 reculent de 3 % – 100 millions d’euros –, six mois à peine après avoir annulé 175 millions de crédits en mars 2024. De même, si 75 ETP sont créés, nous sommes très loin des 700 postes promis par Emmanuel Macron en mars 2023. Les promesses ne sont donc pas tenues. L’austérité est là, les recrutements et l’attractivité sont considérablement affaiblis et notre représentation à l’extérieur s’en trouve profondément affectée.
Monsieur Forissier, vous évoquez la sécurité de notre représentation à l’étranger. Le directeur de la sécurité diplomatique lui-même indique que 25 % des sites ne bénéficient pas d’un niveau de sécurité adapté, dont 40 % de nos Instituts. Il existe donc un problème important en matière de sécurité, notamment dans les zones où le risque géopolitique est élevé, comme au Moyen-Orient ou encore dans le Sahel.
Je tiens aussi à attirer votre attention sur le projet Cap 2030 annoncé par le président de la République. Ce projet constitue en réalité une privatisation du réseau d’enseignement, où l’on demande à l’AEFE d’organiser les conditions de sa propre concurrence. Les agents se plaignent que deux tiers de leur temps y soient consacrés.
Notre groupe votera naturellement contre ce budget et proposera un certain nombre d’amendements pour essayer d’en rectifier la direction.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Le réseau des lycées français n’a jamais été composé d’écoles d’État et c’est très bien ainsi. Que diriez-vous si un État étranger venait organiser des écoles en France ? Nous ne sommes plus au temps du colonialisme : nous n’avons pas à organiser nos propres écoles, avec nos propres règles, avec nos fonctionnaires, sans coopérer. Lorsque Michel Rocard a créé l’Agence pour mettre un peu d’ordre dans ce réseau il y a trente ans, il a fait figurer la coopération bilatérale au titre des trois objectifs statutaires.
La résolution du conflit que nous connaissons en ce moment avec la Turquie sur les lycées français dans ce pays ne pourra intervenir qu’en coopération, et nous disposons des réponses. M. Blanquer avait parfaitement raison de dire qu’il n’y aurait pas d’écoles de droit turc sur notre sol ; en revanche, il est possible de créer des filières turques dans nos écoles, dans nos filières internationales. Nous disposons déjà d’une dizaine de filières de ce type en France, avec des fonctionnaires chinois qui sont payés par la France pour enseigner, à Saint-Germain-en-Laye et dans la banlieue parisienne, dans une dizaine de filières. Il est possible d’en faire de même avec la Turquie.
Vous nous indiquez que nous vivons une période d’austérité. Je vous rappelle qu’en ces temps de guerre, en gérant notre réseau comme il se doit et non comme une espèce de projection systématique de notre modèle idéal français, nous avons sauvé l’école de Ramallah qui, selon votre vocabulaire, n’est pas une école de l’État français. Il s’agit d’une école privée, faite par des Palestiniens de Ramallah, qui veulent une école française. Elle est aussi bonne que toutes les autres parce qu’elle est contrôlée par notre ministère de l’éducation nationale et la France a dépensé 500 000 euros pour la sauver alors qu’elle était en difficulté.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Pour l’instant, en 2027, au rythme actuel, il manquera 200 postes supplémentaires, à moins de fournir un effort plus important sur les deux exercices 2026 et 2027.
Je rejoins par ailleurs les propos de Frédéric Petit : il faut tenir compte de l’exécuté, dans le temps. En dépit de la contrainte budgétaire, l’effort demeure important. Peu de ministères voient le nombre de leurs ETP augmenter. Je serai personnellement très vigilant à ce que les engagements pris soient respectés et rattrapés.
Ensuite, le ministère reconnaît lui-même que des efforts de sécurisation restent à accomplir. Cependant, les actions dans ce domaine ont été bien pensées et sont réalisées de manière très complète. Elles prennent du temps et certaines emprises nécessitent des investissements très importants. Par exemple, le site d’Addis-Abeba se déploie sur 38 hectares, ce qui nécessite des travaux de grande envergure.
M. le président Bruno Fuchs. Je rappelle que les 75 nouveaux postes font partie de la proposition budgétaire du Gouvernement mais que des discussions ne sont pas closes. Je l’espère en tout cas.
M. Stéphane Hablot (SOC). Vos rapports ont le mérite de la transparence. Ils sont exhaustifs mais, pour reprendre exactement vos termes, il s’agit effectivement d’un contexte budgétaire « dégradé » au regard des déficits publics. La seule et vraie question consiste à savoir si certaines actions fondamentales ne sont pas réduites au point d’être dénaturées et si nous restons encore crédibles sur la scène internationale. La voix de la France est-elle encore entendue face à la nécessité absolue de sécurité internationale ?
Est-il prudent, par exemple, de réduire de 10 % notre contribution aux opérations de maintien de paix ? Membre du conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU), la France doit peser beaucoup plus pour porter un cessez-le-feu immédiat au Moyen-Orient. De ce point de vue, il n’y a vraiment pas de quoi se satisfaire. Au total, nous aurions besoin de 140 millions d’euros.
Vous mettez également en avant les priorités en matière de sécurité de nos agents. Ces efforts financiers sont certes nécessaires mais ils ne doivent pas nous faire oublier la chute de 20 %, au vu des besoins grandissants, y compris dans des actions que vous dites « non létales », pour les populations civiles en Ukraine, en Somalie, au Bénin, au Togo, dont les besoins vont grandissants. Êtes-vous vraiment convaincus que les moyens financiers consacrés à ces actions extérieures de l’État sont suffisants, afin que nous restions crédibles ? Nous avons des doutes et nous voterons contre ce budget.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Une fois encore, la diminution de la quote-part française aux dépenses consacrées aux opérations de maintien de paix (programme 105) ne relève pas d’une décision de la France mais d’un calcul fondé sur le revenu national brut, qui a été établi au niveau international, avec nos partenaires. Par ailleurs, la fermeture de la mission de maintien de la paix au Mali entraîne de facto des économies. Au total, la baisse s’établit à 69 millions d’euros, auxquels il faut ajouter la diminution de la quote-part du concours non létal à la Facilité européenne pour la paix.
Ces réductions « mécaniques » nous permettent de conserver un effort budgétaire à peu près stable au regard de ce dont nous disposions l’année dernière, qui nous permet même de progresser dans certains domaines, notamment sur la sécurisation des postes.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. La voix de la France est-elle entendue ? Je conduis ce travail depuis sept ans et peux affirmer que la réponse à cette question ne relève pas que d’éléments budgétaires. Il s’agit également d’un enjeu de réforme et de réorganisation, de remise en cohérence. Il existe désormais des outils, dont la feuille de route de l’influence, qui n’existait pas auparavant. Je rappelle par ailleurs que les crédits de France Médias Monde n’ont pas toujours fait l’objet d’une réflexion par notre commission, ce qui est le cas désormais. Enfin, la voix de la France est entendue : nous sommes les seuls à être encore présents, en diplomatie culturelle, en Israël, en Palestine, dans les villes de province d’Ukraine. Là-bas, les gens en sont parfaitement conscients. Nous finançons des mobilités d’artistes à Bethléem aujourd’hui, soit un dispositif peu coûteux correspondant à quelques dizaines de milliers d’euros.
M. Michel Herbillon (DR). Je souhaite tout d’abord remercier nos collègues rapporteurs pour leurs apports respectifs de grande qualité, qui nous permettent d’évaluer ce matin les crédits de la mission Action extérieure de l’État dans le cadre du PLF 2025.
La France est dotée du cinquième réseau diplomatique mondial, avec 271 postes répartis dans 160 pays à travers le monde. À cela s’ajoutent les milliers d’agences, de missions économiques, des établissements culturels et d’enseignement qui permettent à notre pays, à notre langue, de rayonner à travers le monde. Je remercie Nicolas Forissier d’avoir mis en exergue la question de la sécurisation des postes diplomatiques face à l’augmentation des actes hostiles. Au nom du groupe de la Droite Républicaine, je souhaite saluer et remercier l’ensemble des agents du Quai d’Orsay et des opérateurs, qui réalisent un travail remarquable, parfois malgré les risques sécuritaires majeurs qui pèsent sur eux et leurs familles.
À ce sujet, vous exprimez, cher rapporteur, votre satisfaction de constater l’augmentation constante des moyens alloués à la sécurisation de notre réseau diplomatique. Néanmoins, vous soulignez quelques fragilités, comme le vieillissement du parc de véhicules blindés. Quelles sont les autres préconisations prioritaires que vous pourriez formuler pour améliorer la sécurité de nos locaux et des personnels déployés à l’étranger ?
Plus globalement, cette proposition de budget intervient dans un contexte très difficile pour nos finances publiques. Malgré cela, il est proposé un budget de 5,7 milliards d’euros, soit un montant légèrement supérieur à celui de la loi de finances initiale de 2023. Ainsi, il est proposé la création de 75 ETP supplémentaires.
Le groupe de la Droite Républicaine votera donc en faveur de ces crédits, qui permettent au ministère de poursuivre son action, bien que nous puissions regretter que certains efforts engagés ces dernières années ne puissent pas être maintenus, compte tenu du contexte. Mais surtout, au-delà des moyens, il est urgent de redéfinir la politique diplomatique de la France. Loin des discours grandiloquents, il nous faut retrouver une méthode pour que la voix de la France soit de nouveau écoutée dans le concert des nations.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Les véhicules blindés sont une nécessité pour les déplacements dans les zones à risque. J’ajoute que des membres du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) sont fréquemment présents pour protéger les ambassadeurs ou les personnels en déplacement. Le renforcement de notre parc de véhicules blindés est long et onéreux.
Ensuite, la sécurité passive – le périmétrique, la surélévation des murs, la vidéoprotection – est renforcée de manière régulière et volontariste, en commençant par les ambassades les plus à risque. Mais elle doit être complétée par des personnels. L’administration et les ambassadeurs m’indiquent que pour le moment, les 476 gardes de sécurité diplomatique (GSD) et la centaine de GSD affectés en fonction des besoins apparaissent suffisants. Ce dispositif est complété par des prestataires de services locaux.
Cependant, deux fragilités doivent être mentionnées. Tout d’abord, il serait pertinent de mettre en place une véritable culture commune entre la police et la gendarmerie, notamment en matière de recrutement. Deuxièmement, un problème de criblage et de surveillance doit être mentionné. Les personnels des sociétés de prestataires peuvent recueillir des informations sur le dispositif de sécurité.
Enfin, l’accent doit être mis sur la cyber-sécurité. Les ambassades constituent des cibles prioritaires en matière de désinformation et de hacking. Des efforts sont entrepris par le ministère mais également par les chefs de poste pour développer une culture de protection plus affirmée.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je souhaite pour ma part rendre hommage aux îlotiers, ces citoyens français bénévoles qui sont coordonnés par chaque ambassade et qui s’engagent pour la sécurité de nos concitoyens.
M. Jean-Louis Roumégas (EcoS). Le rapport de notre collègue Frédéric Petit montre que le programme Diplomatie culturelle et d’influence de la mission Action extérieure de l’État voit son budget passer de 805 millions d’euros à 675 millions d’euros entre la loi de finances 2024 et le PLF 2025. Dans votre rapport, vous vous efforcez de minimiser la baisse et de la présenter comme une « contribution mesurée » au redressement de nos comptes publics. Mais, en réalité, les coupes budgétaires sont importantes et affectent quasiment toutes les actions du programme 185. Par exemple, l’AEFE voit sa dotation fondre de 14 millions d’euros. Le budget dédié à la coopération culturelle, universitaire et scientifique diminue de 10 % par rapport à 2024, forçant les Instituts français et les Alliances françaises à se serrer la ceinture.
Par ailleurs, vous comparez les subventions en 2025 pour l’AEFE avec celle de 2017 mais cette comparaison nous semble peu appropriée car elle ne prend pas en compte l’explosion de l’inflation ces dernières années. Or les établissements scolaires français à l’étranger, comme les Instituts français, sont essentiels à la diplomatie culturelle et à l’influence de la France.
Ces coupes budgétaires mettent à mal le rayonnement de notre pays hors de ses frontières à un moment où il est déjà fragilisé. Je pense notamment à la zone du Sahel. Ces coupes budgétaires effritent aussi le statut des enseignants, à un moment où le Gouvernement devrait chercher à les revaloriser. Vous suggérez par exemple de transformer les postes d’enseignants détachés en emplois de droit local, en estimant que les conditions de rémunération peuvent être comparables, voire meilleures qu’en France, ce qui n’est pas le cas dans la plupart des pays du monde. Il ne faut pas oublier qu’être embauché en droit local signifie renoncer aux droits à l’avancement et à la retraite.
Ces coupes budgétaires pèsent aussi sur les familles de Français installés à l’étranger. La hausse continue des frais de scolarité n’est plus tenable et vient compromettre même l’accès à l’éducation. Il nous semble primordial de sanctuariser, au contraire, les budgets de l’AEFE et de les maintenir au moins au niveau de 2024. Enfin, l’objectif de développement durable voit son budget diminuer de presque 30 % mais vous ne l’abordez quasiment pas dans votre rapport.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. La comparaison que vous effectuez au début de votre intervention est à périmètre différent. Nous sommes un peu en diminution par rapport aux montants budgétés de 2024 mais en hausse par rapport à ceux exécutés en 2023, dans toutes les lignes du budget que je couvre.
Ensuite, les bourses étudiantes sont maintenues et le nombre de bourses complètes a été augmenté. Par ailleurs, je ne souhaite pas faire passer les fonctionnaires en personnels de droit local. Néanmoins, j’estime que les 5 000 enseignants envoyés à l’étranger par la France doivent l’être dans les endroits les plus compliqués, sur des critères diplomatiques. Le lycée de Vienne a une couverture de 85 % d’expatriés. À Ramallah, nous disposons de trois enseignants venus de France, parce qu’ils l’ont accepté. En outre, dès 2018, j’avais écrit qu’il fallait doubler le nombre de ces enseignants au cours des dix années à venir.
Enfin, la subvention pour charges de service public de l’AEFE n’a rien à voir avec les écolages. Nous l’avons augmentée de 100 millions d’euros mais cela ne se répercute pas sur les écolages. En effet, 85 % des établissements ne sont pas gérés par l’Agence. En outre, dans ma circonscription, ce sont les établissements gérés par l’Agence qui sont les plus chers.
Mme Maud Petit (Dem). Conflit entre la Russie et l’Ukraine, entre Israël et le Hamas, guerre au Soudan : la situation internationale actuelle est particulièrement instable et tendue. Dans ce contexte de multiplication des crises, la voix de la France doit pouvoir continuer de se faire entendre pour œuvrer et accompagner à la paix, promouvoir le multiculturalisme, dans une démarche de coopération diplomatique, culturelle et dans la perspective de surmonter les conflits et mieux préparer l’après.
Après une décennie de délaissement, nos services et personnels diplomatiques ont pu bénéficier, tout au long de ces cinq dernières années, d’une hausse régulière du budget alloué à l’action extérieure de l’État. Néanmoins, étant donné la situation actuelle des finances publiques de notre pays, nous comprenons fort bien que cette mission doive, elle aussi, contribuer au redressement de nos comptes publics. Le soutien fort de ces dernières années aura permis d’avoir des services de diplomatie d’influence de mieux en mieux pilotés et de plus en plus agiles. Il faudra réussir à maintenir cette belle dynamique pour permettre au ministère de l’Europe et des affaires étrangères de poursuivre l’agenda de cette transformation dans le prolongement de ce qui avait été acté lors des états généraux de la diplomatie.
Dans ce contexte, pouvez-vous nous indiquer, Messieurs les rapporteurs, comment l’action de notre ambassade à Kiev, dans une Ukraine en guerre, peut se prolonger aux niveaux culturel, éducatif, audiovisuel et universitaire ? Dans quelle mesure la diminution annoncée de 6,2 % des moyens destinés au programme 185 va-t-elle affecter l’action de notre pays dans les zones de conflit, comme en Israël et la Palestine ? La diplomatie dans ces pays en guerre étant entravée, comment la diplomatie culturelle et d’influence de la France peut-elle participer à favoriser la paix et soutenir, par la suite, la reconstruction de ces pays, malgré un moindre budget affiché ? Pour conclure, je précise que le groupe Les Démocrates votera en faveur des crédits de cette mission.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il convient également de mentionner la feuille de route de l’influence, aboutissement d’un travail mené au sein de cette commission à l’automne 2021 et qui a précédé les états généraux de la diplomatie.
Ensuite, la diplomatie culturelle est première à Kiev. Comme je l’ai rappelé précédemment, des Français sont allés mettre en sécurité dans des musées des villes de banlieue, des tableaux de maître qui pourront être réintroduits intacts après la guerre. De mémoire, nous formons et finançons chaque année 500 professeurs de français ukrainiens dans ce pays en guerre, qui rencontrent leurs homologues français à Lublin, en Pologne.
Par ailleurs, je suis favorable à l’envoi en Ukraine d’experts français des collectivités territoriales. En effet, les collectivités territoriales d’Ukraine, qui ont été réformées en 2015-2016 dans un cadre décentralisateur, ne sont pas encore suffisamment équipées pour gérer les subventions qu’elles recevront pour mener à bien la reconstruction du pays.
En résumé, la diplomatie d’influence et la diplomatie culturelle sont au premier plan, y compris en Palestine.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. L’ambassade de France à Kiev a déménagé pendant deux mois à Lviv, avant d’y revenir une fois les travaux de renforcement de sécurisation effectués.
Ensuite, la diplomatie d’influence doit aussi passer, parfois, par des symboles. L’Institut culturel français est ainsi situé dans le cœur de Tunis et dispose d’un patrimoine particulièrement intéressant et rénové.
M. Jean-François Portarrieu (HOR). Monsieur le rapporteur Frédéric Petit, vous consacrez la deuxième partie de votre rapport très documenté à la diplomatie de la France dans les pays en guerre. En analysant la situation en Ukraine, vous soulignez qu’en dépit de la situation évidemment dramatique que traverse ce pays, la France a renforcé des coopérations culturelles en faveur du patrimoine et de l’usage de la langue, par exemple. Vous insistez également sur un fait assez intéressant : la coopération universitaire s’est même développée durant cette période de guerre.
Ce renforcement des coopérations entre la France et l’Ukraine s’avère être une exception, puisque la quasi-totalité des autres pays ont réduit leur présence. Comment expliquez-vous cette situation, si ce n’est inédite, du moins originale ?
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je crois que l’explication tient à la compétence et à l’ouverture ces dernières années de postes diplomatiques. En Ukraine, au consulat général à Jérusalem ou auprès de l’ambassade à Tel-Aviv, nous disposons de personnalités qui portent la diplomatie culturelle, en apportant une expérience beaucoup plus large que leur expérience diplomatique.
Je me suis rendu à Nazareth avec le nouveau consul général de Haïfa, qui est l’ancien conseiller de coopération et d’action culturelle (Cocac) de Tel-Aviv. Il porte quelque chose qui va bien au-delà de ce qu’on attend d’un consul général dans un poste diplomatique. Cet exemple illustre les débats qui ont eu lieu sur la notion de « bon » diplomate, qui est en réalité un chef d’orchestre faisant jouer ensemble un certain nombre d’acteurs.
M. Laurent Mazaury (LIOT). Messieurs les rapporteurs, je souhaite tout d’abord vous remercier pour la qualité de vos rapports. Je suis notamment tout à fait d’accord avec votre analyse concernant la nécessité de travailler sur l’envoi d’agents publics et de personnes relevant de missions de service public en zones référencées comme rouge et orange par le Quai d’Orsay.
Par ailleurs, je tiens ici à saluer les actions françaises de coopération culturelle en Ukraine, alors que d’autres pays ont fermé leurs Instituts culturels. Nous regrettons en revanche que le budget alloué à l’action extérieure de l’État subisse des coupes budgétaires, notamment dans un contexte géopolitique incertain, et alors que les influences russes et chinoises sont de plus en plus ciblées et violentes. Nous l’avons notamment constaté très récemment en Moldavie lors du référendum sur l’Union européenne, dans la mesure où des éléments démontrent que la Russie a tenté de déstabiliser ce vote.
Dans ce contexte, la réduction des crédits du programme 105 suscite des préoccupations légitimes quant à la capacité de la France à continuer d’assurer la sécurité de ses ressortissants à l’étranger. La coopération de sécurité, tout comme notre participation aux missions de maintien de la paix, pourraient être ainsi mises en péril, risquant de fragiliser notre engagement international. Cependant, nous saluons le maintien du réseau diplomatique avec un budget de 121,3 millions d’euros.
Par ailleurs, la diplomatie culturelle et éducative constitue une pierre angulaire de l’influence française à l’étranger et la baisse de 6,27 % des crédits du programme 185 interpelle. L’AEFE et l’Institut français, qui jouent un rôle crucial dans la diffusion de notre culture et notre langue, devront faire face à des moyens par conséquent réduits. Même si vous avez indiqué, Monsieur le rapporteur Petit, que la contribution attendue de la part de l’AEFE au redressement des finances publiques paraît raisonnable et susceptible d’être absorbée en gestion, nous déplorons cette diminution. Nous espérons surtout qu’elle ne deviendra pas une tendance longue.
De plus, cette baisse de crédits pour l’AEFE, combinée à celle des subventions culturelles, pourrait affaiblir notre diplomatie d’influence à long terme. Le rayonnement culturel est un levier stratégique pour notre pays et il est impératif que nous préservions, voire renforcions, notre capacité à promouvoir la langue française et les valeurs qui y sont attachées. Il s’agit ici de parler de l’avenir de notre diplomatie, de la protection de nos concitoyens et de l’influence de la France à travers le monde. Il est de notre responsabilité, maintenant et pour l’avenir, de veiller à ce que ces réductions budgétaires ne compromettent pas les objectifs fondamentaux que nous nous sommes fixés. Il nous faut, ensemble, rester vigilants sur ce point. Sur cet engagement commun, nous voterons donc favorablement.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Comme je l’ai déjà évoqué, la baisse de 90 millions d’euros sur le programme 105 est en réalité une baisse d’opportunité car elle est liée à la réduction mécanique de nos contributions et à un transfert vers le ministère des armées. Les 8 millions d’euros de baisse du programme 151 émanent d’une prévision du ministère, qui tient compte de la diminution du nombre de bourses.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. S’agissant de l’influence, il faut rappeler que l’on ne défend pas la démocratie avec des moyens non démocratiques. Je ne suis pas favorable à ce que nous imitions les Russes ou les Chinois sur ce terrain.
S’agissant de l’AEFE, la réforme interne est essentielle pour séparer ses deux métiers : le métier de gestion des soixante-quatre lycées que nous devons continuer à gérer et celui du développement du réseau, quel que soit le statut des établissements. J’ajoute que l’Institut français a, pour sa part, réalisé une réforme exemplaire ces dernières années. Aujourd’hui, il travaille avec Business France pour appuyer les industries culturelles et créatives. L’AEFE doit entreprendre une démarche semblable et se lier avec le programme mondial de l’éducation, avec France Éducation International, le Centre national d’enseignement à distance (Cned).
M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Je suis assez surpris que les rapporteurs estiment que tout va bien. La France a décidé qu’être femme en Afghanistan revient à vivre en situation de risque. Je salue cette décision mais, quand ces femmes arrivent à Islamabad, au Pakistan, elles n’obtiennent leur visa qu’au terme de longs mois, notamment en raison du manque d’effectifs. À un moment donné, il faut mettre en place les moyens à la hauteur de nos choix politiques. Je salue le travail de nos diplomates qui tâchent de mettre en œuvre la politique bien que celle-ci soit parfois contradictoire.
Par ailleurs, il doit être compliqué d’être diplomate français en Azerbaïdjan en ce moment. Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, nous sommes passés par ce pays pour acheter notre gaz. Aujourd’hui, l’ONU organise la COP29 en Azerbaïdjan, où de nombreux pays africains se rendront. Mais la France a choisi de ne pas y aller, de même que notre commission des affaires étrangères. Comment les pays du Sud vont-ils comprendre cette décision, alors qu’ils pourraient attendre de la France qu’elle les défende à l’occasion de cette COP ?
Enfin, le week-end dernier a été organisé un festival sur le Sénégal au Havre. La moitié des stands sont demeurés vides parce que les entreprises sénégalaises, qui étaient invitées à venir présenter, notamment à la diaspora, les investissements qui avaient eu lieu dans le pays, n’avaient pas obtenu les visas nécessaires. Comment parvenir à faire de la diplomatie dans ces situations-là ?
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Compte tenu de la situation de contrainte actuelle, je suis plutôt d’accord avec les propos que le premier ministre a tenu récemment, en incitant à faire mieux avec moins. Sur les budgets 105 et 151, la baisse du montant de nos contributions nous permet de poursuivre l’effort, même s’il faudra rattraper le ralentissement de l’augmentation du nombre d’ETP. Enfin, un effort budgétaire de 3,8 millions d’euros est spécialement consenti pour les visas et le ministère m’indique qu’il devrait porter ses fruits dans les prochains dix-huit mois.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je suis plutôt d’accord avec les remarques de Jean-Paul Lecoq. Je suis le premier à déplorer la non-délivrance de visas. Par exemple, un grand spécialiste indien s’est vu refuser un visa pour assister à un colloque scientifique sous prétexte qu’il était déjà venu dans l’espace Schengen moins d’un an auparavant. Il n’y a pas là de problème budgétaire mais un problème d’organisation de nos moyens. Le service des visas à Dakar doit produire 30 000 visas d’étudiants en un mois et demi, alors que le nombre de personnels reste inchangé tout au long de l’année alors qu’il faudrait adapter les moyens aux besoins de façon plus fine.
Par ailleurs, je ne dis pas que tout va bien. Nous débutons l’examen du budget et nous devons nous assurer que les crédits ne subiront pas de réduction supplémentaire : un coup de Trafalgar peut toujours survenir. De la même manière, nous devons suivre l’exécution du budget et être présents lors du Printemps de l’évaluation. Nous devons poursuivre notre travail, de manière récurrente, en permanence.
M. le président Bruno Fuchs. En matière de visa, il faut distinguer deux aspects. Le premier est d’ordre mécanique et concerne notre capacité de délivrance et le second est d’ordre politique, stratégique et d’influence. Il n’y a pas si longtemps, les visas étaient rattachés au ministère chargé des affaires étrangères dans une vision d’influence. Désormais, ils relèvent du ministère de l’intérieur, dans une vision migratoire.
Je cède la parole aux députés intervenant dans cette discussion générale à titre individuel.
M. Alain David (SOC). L’influence de la France passe évidemment par l’excellence reconnue de nos diplomates et l’étendue de notre réseau diplomatique. Notre influence passe également par la coopération dans les domaines culturel, scientifique, économique, militaire, par le réseau d’enseignement, par la promotion de la francophonie, par le travail des Français expatriés, par les échanges universitaires ou par le travail remarquable de notre audiovisuel extérieur.
La tonalité de notre influence, malgré l’investissement de tous les acteurs publics ou issus de la société civile, est néanmoins grandement tributaire d’un facteur plus incontrôlable : la parole et la constance – ou plutôt le manque de constance – de la France à l’étranger. Or, cette parole est portée le plus souvent par le chef de l’État. Ne trouvez-vous pas qu’il existe un écart préoccupant entre les ambitions partagées sur tous les bancs de notre commission et certaines décisions ou déclarations récentes ?
M. le président Bruno Fuchs. Je ne suis pas certain que ces observations s’adressent à nos rapporteurs et appellent une réponse de leur part.
Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Initialement sous-évalué à 5,1 % par les précédents gouvernements, le déficit public devrait finalement atteindre 6 % du PIB. Alors que le budget du gouvernement Barnier devait constituer un budget de rupture, l’absence de propositions d’économies structurelles le place dans la continuité des politiques irresponsables menées par Emmanuel Macron.
Sur le programme 185, la baisse de 6,27 % des crédits est en trompe-l’œil et compense à peine la hausse importante des crédits alloués en 2024. En effet, comme l’indique le rapporteur, à périmètre constant, des crédits de ce programme sont en réalité en hausse de 66 millions d’euros depuis 2021.
À travers divers amendements, nous proposerons 21 millions d’euros d’économies supplémentaires, en ciblant l’effort sur le financement de projets culturels. Monsieur le rapporteur, les ajustements budgétaires présentés dans ce programme vous paraissent-ils à la hauteur de la situation de nos finances publiques ?
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Oui, ils me paraissent à la hauteur. Une fois encore, dans le cadre de la diplomatie d’influence, il nous reste à accomplir un travail de mise en cohérence, un travail de réflexion et notre commission doit y contribuer.
Mme Dieynaba Diop (SOC). Notre diplomatie culturelle et d’influence passe aussi par tout le travail que nous réalisons en matière de coopération culturelle et de promotion du français. Or je constate quand même une baisse assez importante des crédits alloués, notamment sur la langue française et la diversité linguistique. Nous savons bien que l’apprentissage du français recule. À l’heure où la France inaugure la Cité internationale de la langue française ou accueille le sommet de la Francophonie, je m’interroge sur la diminution de ces crédits. Pourquoi un tel choix a-t-il été opéré ?
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il faut envisager la question de manière globale. L’opérateur France Éducation International forme des milliers de professeurs de français sur la planète. Faisant partie de l’éducation nationale, il se finance quasi exclusivement à partir de ressources propres liées aux inscriptions aux diplômes d’études en langue française (Delf) et aux frais d’équivalences de diplômes. Les dotations FEF appartiennent désormais au programme 209, afin que les ambassadeurs puissent gérer les projets d’influence de manière homogène.
M. Michel Guiniot (RN). Vos rapports sont très instructifs sur la situation matérielle, nos postes consulaires et les impératifs de sécurisation. J’ai été surpris d’apprendre que l’Institut français de Tunisie faisait l’objet de dégradations régulières et de menaces, notamment depuis le 7 octobre 2023, dont une atteinte particulièrement grave et marquante, la veille de votre séjour sur place. On constate bien que l’on ne peut pas toujours se fier à la population locale, qui peut parfois être hostile à la présence française.
Vous indiquez, dans votre rapport, que la sécurité du bâti peut être assurée par des sociétés locales qui fournissent du personnel et que ces sociétés font l’objet d’une mise en concurrence tous les cinq ans, même si le personnel passe généralement d’une société à une autre. Savez-vous si les appels d’offres sont jugés quant aux moyens pouvant être mis sur place pour sécuriser notre présence diplomatique ou s’il s’agit simplement d’une affaire financière ?
Toujours dans votre rapport, vous indiquez que la direction de la sécurité diplomatique (DSD) incite les postes diplomatiques à avoir recours à des sociétés françaises pour la réalisation des travaux pour des raisons de sécurité ; puis, le ministère demande aux postes de faire appel à des sous-traitants. Pensez-vous que le ministère ait raison de s’opposer à la DSD sur un sujet aussi sensible que la protection matérielle nos agents ?
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Le poste de Tunis n’est pas situé dans une zone considérée comme particulièrement dangereuse. Les manifestations passent le long de l’Institut français avant de rejoindre l’ambassade. Il y a eu, effectivement, de façon relativement isolée, une tentative d’effraction et des tags sont régulièrement dessinés sur les murs. Les services français ont très bien réagi pour protéger et sécuriser les lieux. Je ne pense pas qu’il faille stigmatiser les populations mais, en revanche, il faut être conscient que le risque peut survenir n’importe où, y compris sur notre territoire national. En conséquence, il faut en être conscient et continuer de protéger nos bâtiments.
Ensuite, il est effectivement fait appel à des prestataires locaux qui fournissent des vigiles, soit un total de 1 520 personnes, qui ne font pas partie du dispositif de sécurité à l’intérieur des enceintes. Ces personnes opèrent les filtrages à l’entrée, vérifient les voitures. Comme je l’ai indiqué, il est nécessaire, selon moi, d’augmenter le criblage de ces personnes même si un contrôle est déjà effectué. En revanche, les prestations technologiques sont effectivement confiées à des prestataires français, notamment en matière informatique.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Je souhaite revenir un instant sur la Francophonie car votre réponse, cher rapporteur Petit, ne m’a pas convaincu. Un sommet s’est réuni à Villers-Cotterêts il y a trois semaines et la France vient de prendre la présidence de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement des pays ayant le français en partage pour deux ans. Mais ce sommet de Villers-Cotterêts s’est soldé par un échec politique. Le président de la République démocratique du Congo, pays francophone le plus peuplé, est parti avant le huis clos des chefs d’État, tandis que les documents finaux ne mentionnent pas le génocide à Gaza.
La baisse des crédits se constate partout : diminution de 3,10 % pour l’AEFE et baisse au total de 12,48 % sur l’action de coopération culturelle et de promotion du français. Ne dites pas que ces crédits n’ont pas été consommés cette année, puisque vous savez que Bercy les gèle.
S’agissant de l’AEFE, vous avez formulé un plaidoyer sur les écoles privées. Hier, en compagnie de ma collègue Sophia Chikirou, nous avons entendu les syndicats de professeurs de l’AEFE qui nous ont indiqué que ce genre de mesure conduira les professeurs à ne plus aller enseigner le français à l’étranger, en raison des conditions défavorables. À cause de cette politique, des écoles sont menacées dans de grands pays francophones, notamment à Bamako. En conséquence, je m’étonne de la conclusion de votre rapport.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. À Bamako, il s’agit d’un établissement en gestion directe (EGD). Il est effectivement vrai que des fonctionnaires ne veulent pas aller à Bamako aujourd’hui, alors que je pense qu’il est plus utile qu’ils y aillent plutôt qu’à Vienne.
Ensuite, il faut cesser la confusion qui consiste à considérer que la Francophonie appartient à la France. Nous devons coopérer. L’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) soutient et vient aider certaines ambassades parce qu’elles montent des projets dans le cadre de groupes des ambassades, délégations et institutions francophones (Gadif).
*
Article 42 et état B : Crédits du budget général
M. le président Bruno Fuchs. La discussion générale est close. Nous allons débattre de trente-neuf amendements portant sur les crédits de la mission Action extérieure de l’État – un amendement de M. Stéphane Vojetta ayant été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution –, complétés par un amendement sur la liste des objectifs et des indicateurs de performance et par sept amendements créant un article additionnel.
Amendement II-AE50 de M. Kévin Pfeffer
M. Kévin Pfeffer (RN). Cet amendement est en fait un exemple du travail que nous devrions tous mener dans nos commissions respectives pour chercher des pistes d’économies sur les agences, les annexes, les comités, les instituts que nous finançons. Depuis 2008, par exemple, le Quai d’Orsay finance l’Institut du monde arabe (IMA) à hauteur de 12 millions d’euros annuels, ce qui représente presque la moitié du budget de cette fondation privée. Pendant ce temps, le ministère de la culture subventionne également l’IMA à hauteur de plus de 2 millions d’euros pour 2025.
Si l’IMA a augmenté la part de ses fonds propres, ses dépenses de fonctionnement sont nettement en hausse. Or, l’une des causes majeures de la hausse de ses dépenses est l’augmentation très importante du personnel. En 2023, l’IMA enregistre un effectif total record de 195 salariés, contre 150 en 2015. Cette augmentation de 30 % est totalement aberrante alors que l’établissement est grandement dépendant de l’argent des contribuables.
Quelle en est la justification ? Chaque institution financée avec l’argent public doit fournir des efforts, rationaliser ses dépenses, comme nous devrions d’ailleurs le faire dans tous nos ministères. Le but de cet amendement consiste donc à proposer une réduction raisonnable de 10 %, pour montrer l’exemple et contraindre l’IMA à améliorer sa gestion et à réduire sa dépendance aux fonds publics. Le budget du ministère de l’Europe et des affaires étrangères est contraint et ces fonds pourraient renforcer d’autres actions bien plus utiles à notre diplomatie.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je salue votre souci de réaliser des économies. Cependant, je suis défavorable à votre amendement pour une raison assez simple : vous proposez de raboter 10 % du montant des subventions allouées à l’IMA, or ces subventions, d’un montant de 12,4 millions d’euros, sont gelées depuis 2020, ce qui signifie que même l’inflation n’a pas été compensée. J’émets donc un avis défavorable.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il est logique que l’IMA soit considéré comme un objet diplomatique. Je rappelle que l’Institut a porté une exposition intitulée « Qu’est-ce que la Palestine amène au monde ? »
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE49 de M. Kévin Pfeffer
M. Kévin Pfeffer (RN). Cette année, 23,3 milliards d’euros seront prélevés sur les recettes de l’État français pour contribuer au budget de l’Union européenne (UE), soit un montant historique, encore en hausse de près de 8 % par rapport à l’an dernier. Ainsi, nous sommes les principaux financeurs de rabais dont bénéficient d’autres États membres. Nous subventionnons certains pays européens comme l’Allemagne, pour qu’ils payent moins, alors que notre propre situation budgétaire est pour le moins catastrophique. Nous avons proposé la semaine dernière des amendements pour abaisser cette contribution et nous poursuivrons en séance.
Dans ce contexte, il est totalement inconcevable de donner, en plus de ces 23,3 milliards d’euros, des contributions volontaires à la Commission européenne, d’autant plus qu’il s’agit ici de subventions pour des associations, des centres de recherche, des instituts qui ont pour mission de favoriser les échanges sur l’Europe, c’est-à-dire de la pure communication servant le plus souvent d’ailleurs les volontés d’élargissement et d’adhésion à l’UE. Ces financements supplémentaires ne constituent absolument pas des priorités. Ils ne répondent à aucun besoin de nos concitoyens et ils sont totalement injustifiables au moment où des efforts sont demandés de toutes parts aux Français.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. Le montant de ces crédits hors contribution européenne est déjà en diminution de 5,5 % par rapport à l’année dernière. Ils correspondent à des actions nécessaires.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE18 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement propose d’attribuer 15 millions d’euros supplémentaires au programme 105, afin d’augmenter les moyens pour la rénovation thermique des bâtiments à l’étranger. Un plan ambitieux a été adopté en 2018 pour la rénovation énergétique de 380 millions de mètres carrés de bâtiments publics mais les bâtiments de l’État à l’étranger ne figurent pas dans ce projet et leur rénovation thermique reste à l’ordre du jour, notamment pour des écoles.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Nous abordons une série d’amendements nombreux, qui proposent des augmentations de crédits. Je ne représente pas le Gouvernement ; je ne suis que le rapporteur et je ne peux lever le gage. À chaque fois qu’un de ces amendements serait adopté, cela se ferait au détriment du programme 105.
En réalité, un grand effort est déjà pratiqué en matière de rénovation thermique et de rénovation durable. Le programme « Ambassade verte » décline aussi la démarche de service public éco-responsable dans l’ensemble de notre réseau diplomatique et consulaire. Ainsi, 127 postes à l’étranger sont engagés dans une démarche éco-responsable, avec des investissements parfois très lourds comme à Libreville, à Djeddah, à Quito, à Séoul, à Tirana ou encore à Canberra, et le budget 2025 s’inscrit déjà dans cette démarche. J’émets un avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE42 de M. Aurélien Taché.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur, nous attendons évidemment que le Gouvernement lève le gage sur les amendements que nous présentons.
Je propose maintenant de renforcer la qualité des services consulaires en créant une centaine de postes. Nous avons été alertés – et j’imagine que vous aussi, chers collègues – par de très nombreux représentants des Français de l’étranger sur les difficultés croissantes qu’ils éprouvent pour accéder aux services consulaires. Par ailleurs, la dématérialisation des démarches ne peut pas non plus effectivement remplacer toute présence humaine.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Il faut continuer les efforts de renforcement, notamment dans les postes consulaires. Cette année, sur les 75 ETP supplémentaires, 17 postes concerneront les services consulaires. Votre amendement n’est pas soutenable budgétairement. J’émets un avis défavorable.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Nous avons voté l’année dernière une proposition de loi, qui devrait être prochainement à l’ordre du jour du Sénat, sur l’obligation de continuité d’accueil dans les services publics. Cette proposition de loi avait été portée par notre collègue Danièle Obono et elle avait été votée très largement par différents groupes ici présents. Elle a de fortes chances d’être votée au Sénat puisque nous sommes d’accord pour que nos concitoyens bénéficient d’un accueil physique dans tous nos services publics. Il en va de même pour nos services consulaires. La numérisation provoque une exclusion sociale pour nombre de nos concitoyens, à plus forte raison quand les distances à parcourir sont importantes. J’insiste afin que cet amendement soit adopté ici, en cohérence avec la proposition de loi que nous avons adoptée l’an dernier.
M. Pierre Pribetich (SOC). Je suis également favorable à une telle présence, l’e-administration ne suffit pas.
Mme Amélia Lakrafi (EPR). Cette présence existe ! Les Français sont reçus dans certains consulats sur rendez-vous ; d’autres consulats proposent une demi-journée par semaine sans rendez-vous.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE43 de M. Aurélien Taché.
M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Cet amendement propose de créer 80 postes consulaires d’attachés la sécurité des Français. Les zones de tension se multiplient dans le monde et nous promouvons une meilleure articulation entre les consulats, chaque ambassade et les Français de l’étranger via des attachés à la sécurité. La bonne capacité à évacuer nos ressortissants en cas d’urgence repose aussi sur une très bonne connaissance du tissu social des pays concernés. À Kaboul, les Français avaient réussi à développer un réseau qui leur a permis de voir les événements venir, à l’inverse des Allemands enfermés dans leur tour d’ivoire, mais aussi d’éviter de subir un attentat, ce qui n’avait pas été le cas des Américains.
Enfin, n’oublions pas que, pendant les décennies précédentes, le ministère chargé des affaires étrangères a été le ministère qui a dû subir le plus grand nombre de coupes budgétaires, perdant 30 % à 50 % de ses postes. Dès lors, même une légère baisse de son budget n’est pas acceptable ; il devrait encore progresser.
M. Michel Herbillon (DR). J’entends les propos de M. Le Gall. Le groupe Les Républicains sous la précédente législature était le premier à considérer que ce ministère ne devait plus être une variable d’ajustement. Mais en l’occurrence, les amendements incantatoires de LFI, qui cherchent à dépenser l’argent que nous n’avons pas et ne se soucient pas de la situation budgétaire du pays, sont totalement irresponsables.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Sous tous les gouvernements et toutes les majorités, il a un temps été considéré comme nécessaire de « dégraisser » le ministère des affaires étrangères. Une réaction est ensuite intervenue, à travers le plan de « réarmement » sur la période 2023-2027. Le contrat est respecté même s’il est un peu ralenti. S’agissant de votre amendement, il est cependant impossible, budgétairement, de créer 80 postes. Un très grand effort est effectué en matière de sécurisation et les syndicats partagent ce point de vue.
La sécurisation, notamment en cas de risques d’évacuation, se réalise non seulement avec les gardes et les responsables de sécurité à l’intérieur des ambassades mais aussi avec le réseau très efficace des responsables d’îlots de la communauté française. Je tiens d’ailleurs à rendre hommage, moi aussi, à nos compatriotes responsables d’îlots.
M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Nous partageons cet hommage. Cependant, je tiens à répondre à M. Herbillon. Nous ne sommes pas n’importe qui, nous ne faisons pas n’importe quoi ! Balayez devant votre porte pour savoir dans quel état était le Quai d’Orsay, avant que l’on ne prenne conscience qu’il allait mourir. C’est sous le gouvernement de l’UMP que la saignée a été la plus violente, que les coupes ont été les plus sévères, tout le monde le sait. Il faut assumer ces choix politiques au lieu de jeter l’opprobre sur les autres en les présentant toujours comme des irresponsables.
Soit dit en passant, si nous étions vraiment n’importe qui et proposions n’importe quoi, je n’en serais que plus étonné des démarches, visiblement hypocrites, que vous avez menées auprès de nous pour obtenir nos voix lors de votre élection.
M. le président Bruno Fuchs. Ne nous lançons pas dans des batailles personnelles ; la commission ne le mérite pas.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE19 de Mme Sophia Chikirou
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Ce matin, nous apprenons qu’un budget qui baisse devrait être décrit comme un budget à peu près stable. On en oublierait presque que lorsque le Parlement discute du budget, il est tout de même possible de discuter de nouvelles dépenses. Pas plus tard qu’hier, en séance, de nouvelles recettes ont été créées. Si l’on se prive de cette possibilité, on prive à la fois la France de ses services publics mais aussi d’une influence et d’une voix fortes à l’international.
Cet amendement porte sur le financement du multilatéralisme et de l’Organisation des Nations unies. Il s’agit d’abonder à hauteur de 10 millions d’euros le financement de l’ONU, dans un contexte où cette institution est profondément remise en cause au niveau international. La France ne peut pas uniquement se payer de mots en disant qu’elle soutient le multilatéralisme. D’une certaine façon, il n’y a pas d’amour du multilatéralisme ; il n’y a que des preuves d’amour du multilatéralisme. Il faut mettre de l’argent sur la table.
Lorsque le secrétaire général des Nations unies est déclaré persona non grata sur le territoire israélien, lorsqu’il est traîné dans la boue quand il cherche à défendre l’application du droit international humanitaire en Ukraine, à Gaza comme au Liban, la France doit se lever. La France doit financer cette organisation dans ce moment historique où elle est mise en cause et, à travers elle, les principes universels et républicains qu’elle défend et dont la France est particulièrement porteuse au niveau international.
Lorsqu’il avait reçu le prix Nobel de littérature, Jean-Marie Gustave Le Clézio ne disait pas autre chose : « Que dans ce troisième millénaire qui vient de commencer, sur notre terre commune, aucun enfant, quel que soit son sexe, sa langue ou sa religion, ne soit abandonné à la faim ou à l’ignorance. Cet enfant porte en lui l’avenir de notre race humaine. À lui la royauté, comme l’a écrit il y a très longtemps le grec Héraclite. ». En voyant les photos des enfants morts à Gaza, nous ne pouvons qu’y penser. Le multilatéralisme doit jouer son rôle.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. L’effort de la contribution française, tout sujet confondu, progresse dans le programme 105. Je rappelle que la France est le sixième contributeur mondial du budget régulier de l’ONU.
Deuxièmement, comme je l’ai indiqué, nous n’avons pas décidé de nous-mêmes de la baisse de notre contribution : elle est liée au mode de calcul, qui se fonde sur le revenu national brut.
Globalement, la France ne se désengage absolument pas du financement de l’ONU. Elle va augmenter de 10 millions d’euros le montant des crédits affectés à l’action n° 3 pour financer deux conférences internationales majeures, notamment l’une sur les océans.
M. Michel Herbillon (DR). Nous voterons contre cet amendement. Par ailleurs, je ne comprends pas l’inutile agressivité de notre collègue Le Gall, ou plutôt je la comprends parfaitement parce que je persiste et signe à penser que faire des amendements qui consistent à accroître les dépenses sans se préoccuper de la situation budgétaire de notre pays est absolument irresponsable. Je préfère entendre la citation de Le Clézio, qui est un très grand auteur, de la part de son collègue LFI.
M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Il faut répondre aux appels de l’ONU, lui fournir les crédits nécessaires mais également les payer en temps voulu, dès le mois de janvier. Malheureusement un grand nombre d’États ne versent ces crédits qu’en septembre ou en octobre et en récupèrent une grande partie dans la mesure où l’ONU rend aux pays contributeurs ce qui n’a pas été dépensé dans l’année. De fait, ces derniers entravent parfois le bon fonctionnement de l’organisation.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je rappelle aussi aux collègues que les contributions volontaires à l’ONU concernent le programme 209.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE31 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement vise à augmenter de 10 millions d’euros la contribution à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Vous connaissez le rôle de l’UNRWA, qui contribue au développement humain, qui gère des services d’éducation, de santé, de secours et de services sociaux. Il propose aussi des microcrédits et une assistance d’urgence aux personnes déplacées dans les zones de conflits. Vous êtes aussi informés largement du génocide qui est perpétré actuellement par Israël à Gaza et qui rend l’activité de cette agence absolument indispensable. Vous n’ignorez pas non plus que cette agence déplore à ce jour plus de 200 travailleurs assassinés lors de bombardements commis par Israël.
Récemment, au mois de septembre, l’école de Nuseirat a été bombardée et six travailleurs de l’UNRWA ont été tués. Vous n’ignorez pas non plus que la Knesset a voté deux lois pour mettre fin aux activités de l’UNRWA et que, selon le chef de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, l’un des buts de guerre d’Israël consiste à obtenir la disparition de l’UNRWA. Nous proposons que la France démontre son attachement à cette agence, à son action en faveur des réfugiés.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je rappelle que le financement de l’UNRWA dépend du programme 209 de la mission Aide publique au développement, qui sera rapporté par notre collègue Guillaume Bigot dans les prochains jours. Je vous propose donc de retirer votre amendement car il ne peut être porté sur le programme 105. J’ajoute que la France a maintenu son financement à l’UNRWA au premier semestre 2024, malgré les difficultés que nous avons connues.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement est maintenu.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Mon avis est défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE14 de M. Michel Guiniot
M. Michel Guiniot (RN). Cet amendement vise à faire coïncider la dotation allouée aux bourses du gouvernement français dans le cadre de la mission Diplomatie culturelle et d’influence avec le nombre effectif de bourses attribuées. Il ressort la stratégie interministérielle « Bienvenue en France » le souhait de doubler le nombre d’étudiants étrangers boursiers qui viennent étudier en France. Si le fait de valoriser l’excellence est tout à fait louable, il convient de se demander à quel prix. Nous devons diminuer le budget alloué aux bourses du gouvernement français, alors que ces bourses sont en baisse d’attribution de 10 % et que le budget pour l’enseignement supérieur de nos étudiants français, le programme 150, n’aura augmenté que de 0,65 %.
Pour autant, cela ne veut pas dire que nous devons cesser de promouvoir l’excellence de l’enseignement français. Je vous renvoie pour cela aux détails du sous-indicateur 7 de l’objectif 2, qui note que des entreprises françaises pourraient également avoir un intérêt stratégique à s’appuyer sur cet outil. Je ne suis absolument pas contre le fait que de plus nombreuses bourses d’excellence soient attribuées. Il faudrait juste qu’elles soient peut-être financées autrement qu’avec de l’argent public.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Dans le financement des bourses, il faut distinguer les bourses avec ou sans allocation de vie. Il n’est donc pas possible de réaliser un parallèle proportionnel comme vous le pratiquez entre le nombre de bourses et leur coût. En outre, quand bien même le calcul serait bon, il faudrait aussi retirer le stock de votre calcul. Nous avons versé plus de 8 300 bourses avec allocation de vie contre 3 200 autres bourses. Le calcul effectué est juste et il n’existe pas d’argent budgété inutilement.
Ensuite, je suis ravi que vous soyez d’accord avec nous. Avant « Bienvenue en France », il y avait 350 000 étudiants étrangers en France. Nous en sommes aujourd’hui au-delà de 400 000 et l’objectif est de un demi-million, y compris certains boursiers. C’est important pour le développement de notre propre recherche et de notre propre enseignement supérieur.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE53 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Par cet amendement, nous proposons de minorer d’un peu moins de 5 millions d’euros la sous-section 5 Coopération et diffusion culturelle, de l’action 2 Coopération culturelle et promotion du français du programme 185. L’amendement prévoit une ventilation de cette baisse et une réduction de 10 % de la subvention dont bénéficie l’Institut français, pour près de 2,5 millions d’euros, une réduction de 10 % des dotations pour opérations aux établissements à l’autonomie financière dans le domaine de la culture, pour un peu plus de 1 million d’euros, ainsi qu’une baisse de 10 % des crédits d’intervention dans les postes et en administration centrale dans le domaine de la culture, pour près de 1,5 million d’euros.
Cet amendement de diminution des crédits a pour objet de faire contribuer les secteurs de la culture au redressement des comptes publics, qui devront rationaliser leurs projets. Il est par exemple permis de douter de l’utilité de la création d’un Institut culturel franco-allemand en Cisjordanie. Une diminution de 10 % des crédits dans ce champ nous paraît raisonnable pour continuer les projets les plus importants tout en opérant des optimisations de dépenses.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il ne s’agit pas de créer en Cisjordanie un centre franco-allemand mais de faire en sorte que l’Institut français et l’Institut Goethe construisent une stratégie commune pour travailler ensemble. Cette maison commune est extraordinaire : c’est une voix franco-allemande qui parle en Cisjordanie.
Ces budgets vont dans des dotations aux ambassades et il ne faut pas se focaliser sur les étiquettes indicatives des sous-actions présentées sur le budget. Depuis les réformes que nous avons menées ces dernières années, ces budgets sont maintenant gérés de manière globale. Le travail de nos ambassadeurs dans le cadre de leur plan de coopération s’appuie sur des actions qui présentent plusieurs aspects indissociables.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE51 de Mme Laurence Robert-Dehault
Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Lors du précédent examen budgétaire, nous avions dénoncé l’absence de véritables contrôles menés sur les événements organisés par les Alliances françaises. Ce projet de budget prévoit par ailleurs une diminution des crédits alloués aux Alliances françaises par rapport à 2024. En l’absence de contrôle établi, ces diminutions sont bienvenues. Des actions organisées par les Alliances demeurent toujours sans rapport ni avec les langues, ni avec la culture française. Pour en citer quelques-unes, l’Alliance de Chiclayo, au Pérou, organise un théâtre itinérant promouvant des compagnies de spectacle du Nord du Pérou ; une Alliance du Honduras organise la promotion d’un livre de poésie d’un auteur espagnol écrit en espagnol ; l’Alliance au Panama tient à organiser une fête de l’environnement en proposant des activités telles que la vente de produits biologiques, l’observation d’oiseaux ou des balades à vélo.
Le site de la fondation des Alliances françaises indique que « L’activité culturelle des Alliances cherche à agir en faveur de la diversité culturelle et pour une mondialisation plus respectueuse des différences ». Libre aux Alliances de promouvoir ce genre d’initiatives mais l’impérieuse nécessité de rationaliser les dépenses publiques devraient conduire à épargner le contribuable français de subventionner ces actions. En conséquence, cet amendement d’économie propose de retirer 2,4 millions d’euros alloués pour le volet culturel des Alliances françaises.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis extrêmement défavorable, techniquement et philosophiquement, pour les mêmes raisons que le précédent amendement. En Amérique du sud, il y a très peu d’Instituts français. L’épine dorsale de notre action est portée par des acteurs « privés » comme le diraient certains à gauche. Laissons-les travailler ! Nous mettons un tout petit peu d’argent proportionnellement pour les coordonner, pour les contrôler, pour les former. Nous dépensons moins de 10 millions d’euros pour un réseau d’Alliances françaises qui est l’équivalent de 900 Instituts français dans le monde.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE52 de Mme Laurence Robert-Dehault
Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Cet amendement d’économie propose de supprimer totalement les crédits alloués aux objectifs de développement durable, déjà en baisse de 500 0000 euros par rapport à 2024. Les crédits de cette action ne s’élèvent désormais qu’à 1,7 million d’euros. Dans une optique de rationalisation de la dépense publique, nous privilégions le rayonnement de la France et la promotion de sa langue plutôt que le financement de projets culturels qui soutiennent des objectifs de développement durable déjà mondialement promus.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis extrêmement défavorable. Ces crédits modestes sont utiles, par exemple pour un petit volant de bourses pour des chercheurs et étudiants sur les thématiques ciblées.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE38 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Je souhaite m’adresser en préambule aux collègues qui s’inquiètent du fait que nos amendements proposent de créer quelques dizaines de millions de crédits supplémentaires. J’espère qu’ils étaient là hier pour voter la taxe Zucman, que nous avons proposée et qui rapporte 26 milliards d’euros. J’espère qu’ils seront là cet après-midi pour voter l’impôt universel qui ciblera les Français les plus fortunés.
Je suis aussi surpris d’entendre que le Rassemblement national s’en prend aux Alliances françaises et aux Instituts français. Pour pouvoir exercer un contrôle parlementaire et mener des débats intéressants dans cette commission sur ce sujet, il faut annuler effectivement le transfert de dépenses de personnels du programme 185 vers le programme 105. Nous voyons qu’il suscite un certain nombre de débats et, contrairement au rapporteur, je ne suis pas convaincu qu’il ne s’agisse que d’une question d’organisation.
Quand je vois, au contraire, le recul de l’influence de la France dans de très nombreuses régions du monde, quand j’observe que sa voix est inaudible au Moyen-Orient et à peu près partout aujourd’hui, je me dis que nous devons véritablement prendre ce sujet au sérieux et exercer un contrôle digne de ce nom sur ce programme.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Vous dites le contraire de ce que vous prônez. Il est beaucoup plus facile pour un Parlement de mener son rôle de contrôle quand la masse salariale de toutes les personnes est regroupée au même endroit que lorsqu’elle est éclatée. Certains consuls généraux sont directeurs de l’Institut français. Enfin, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est le dernier à effectuer ce regroupement, qui était nécessaire pour nous permettre de bien mieux contrôler.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-AE13 de M. Stéphane Vojetta et II-AE33 de Mme Sophia Chikirou, pouvant faire l’objet d’une discussion commune
M. Stéphane Vojetta (EPR). Je viens présenter une série d’amendements qui, tout en reconnaissant la nécessité d’efforts budgétaires et d’efficacité dans la dépense publique, demanderont quand même un ajustement vis-à-vis du plan budgétaire initial du Gouvernement, afin de prendre en compte la spécificité de notre réseau d’AEFE à l’étranger.
Ce réseau est un trésor pour la France et pour sa communauté expatriée mais il exerce aussi un rôle significatif dans le cadre de sa mission de diplomatie d’influence. Chaque année, ce réseau coûte 2,5 milliards d’euros, sur lesquels la France apporte généreusement 450 millions d’euros, le reste étant à charge pour les familles.
Même s’il n’existe pas de relation directe entre le budget de l’AEFE et l’augmentation ou pas des frais de scolarité, il y a des liens assez importants, puisqu’une grande partie du budget de l’AEFE est dédiée au portage des coûts salariaux, notamment des employés résidents ou expatriés dans le réseau. Chaque modification à la baisse du taux de remontée de ces portages finit par impacter les parents sous la forme de l’augmentation des frais de scolarité. C’est pourquoi je demande, non pas une augmentation du budget alloué à ce poste, mais simplement la sanctuarisation du montant de 2024, afin de protéger l’existant et de permettre ainsi à ce réseau de prendre sa part de l’effort budgétaire, ni plus ni moins.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Nous avons déposé au nom du groupe LFI un amendement visant à empêcher la réduction de 14 millions d’euros dédiés à l’AEFE. Nous avons eu le plaisir d’auditionner hier les syndicats de l’AEFE, qui nous ont expliqué quels étaient les logiques et les mécanismes en cours depuis 2018 et le projet Cap 2030 du président Macron. L’AEFE se retrouve désorientée par rapport aux missions qui étaient les siennes initialement.
Les syndicats nous ont indiqué que deux tiers du temps de travail des personnels de l’AEFE sont désormais consacrés au développement des partenariats plutôt qu’au réseau d’enseignement français à l’étranger et aux publics concernés. La réduction de 14 millions d’euros est importante et se traduit par une diminution du personnel et de la qualité du travail. Cette baisse impactera aussi les usagers et les bénéficiaires de ce réseau, qui verront leurs coûts augmenter mécaniquement.
Nous sommes partisans de la gratuité de l’école pour nos compatriotes à l’étranger, pour assurer la continuité du service public français et le maintien du lien qui devrait être indéfectible entre nos compatriotes à l’étranger et la mère-patrie, notre nation. Nous déplorons cette façon de voir l’éducation non plus comme un service public mais comme un bien de consommation, qui crée finalement de l’exclusion sociale. Aujourd’hui, certains de nos compatriotes français ne peuvent pas envoyer leurs enfants à l’école française. Il est indispensable de maintenir ces 14 millions d’euros.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Les syndicats que vous avez rencontrés hier représentent 5 000 enseignants sur 45 000 dans le réseau.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Ces 5 000 enseignants ne comptent-ils donc pas ?
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. La subvention de 450 millions d’euros vient financer une agence, qui gère soixante-quatre des six-cents lycées français, pour un budget de 1,1 milliard d’euros.
Les autres lycées français sont financés, à hauteur de 4,5 milliards d’euros, par les autorités locales qui veulent un lycée français. Statutairement, le rôle de l’AEFE consiste aussi à développer le réseau. Nous avons 5 000 enseignants envoyés dans le monde pour 45 000 enseignants qui sont sur place et qui ont les mêmes diplômes que leurs collègues qui viennent de France. Dans tous les lycées, même les EGD, seulement 10 % des professeurs viennent de France.
Le budget de l’Agence en 2024 s’établit à 1,22 milliard d’euros…La direction n’est pas affolée et il n’y a aucune influence sur les écolages des soixante-quatre lycées français.
M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Soyez assurés qu’il n’y a aucune agression de notre part. Nous avons des positions différentes de M. Herbillon mais nous ne nous lançons pas dans des procès permanents en incompétence. Simplement, il faut arrêter de s’adresser à nous en employant un ton professoral pour nous expliquer que nous ne comprenons rien.
La commission adopte l’amendement de M. Stéphane Vojetta, l’amendement II‑AE33 de Mme Sophia Chikirou tombant par voie de conséquence.
Amendement II-AE35 de Mme Sophia Chikirou
Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Cet amendement vise à transférer 11 millions d’euros en crédits de paiement et autorisations d’engagement pour 2025 vers le programme qui concerne la diplomatie culturelle et d’influence, et en particulier la coopération culturelle et la promotion du français. Ce projet de loi de finances pour 2025 est bel et bien une cure d’austérité, qui n’épargne pas le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et, en particulier, le réseau d’établissements scolaires français, qui perd 11 millions d’euros.
Pourtant, ce projet annuel de performance est tissé de jolis mots qui n’hésitent pas à rappeler les grands objectifs du plan pour la langue française, pour le plurilinguisme de mars 2018, au premier rang desquels figurent la diffusion, la promotion et l’enseignement du et en français. Nous rappelons que le français est présent sur tous les continents et tous les océans. On estime à 350 millions le nombre de locutrices et de locuteurs du français dans le monde. Le français est d’ores et déjà la langue officielle de vingt-neuf pays et a le statut de langue officielle ou de langue de travail dans la quasi-totalité des grandes organisations internationales, dont l’ONU.
Il nous apparaît culturellement et politiquement nécessaire de préserver les crédits relatifs à la promotion du français, afin que nous ne soyons pas seulement dans les mots, mais bel et bien dans les actes.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. Vous ne pouvez pas isoler ces crédits. La coopération francophone passe également par France Éducation International, l’Agence française de développement (AFD) et par nos contributions aux organisations internationales.
Par ailleurs, je souhaite apporter une précision, parce que la situation commence à devenir pour moi douloureuse : je n’ai pas de vision néolibérale de l’éducation. J’ai travaillé dans la rue au Caire avec des enfants ; j’ai passé quinze ans de ma vie à diriger un projet d’action sociale avec des enfants, quand beaucoup d’entre nous n’étaient pas nés. Je ne fais que décrire le réseau tel qu’il est, aujourd’hui. En règle générale, sauf en Union européenne et quelques traces de notre colonialisme passé mises à part, le réseau de nos lycées français à l’étranger ne nous appartient pas. Il a toujours été géré par des organisations que nous avons coordonnées. Contrairement à ce que prétendent certains syndicats, une grande partie de l’argent que nous donnons doit venir coordonner six-cents lycées et non en faire vivre soixante.
M. Pierre Pribetich (SOC). Monsieur le rapporteur Petit, chacun a son propre parcours, qu’il faut respecter.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE41 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement vise à proposer des cours de français aux étrangers qui arrivent en France dans le cadre du regroupement familial depuis les Alliances françaises, quand cela est possible. Cette action avait lieu par le passé mais a disparu. Aujourd’hui, les cours de français interviennent uniquement dans le cadre du contrat d’intégration républicaine mais cela demeure encore insuffisant.
La maîtrise de la langue est le premier élément d’intégration. Nous sommes tous extrêmement attachés à l’intégration des étrangers qui arrivent dans notre pays, dans le cadre légal, par exemple le regroupement familial. Nous proposons uniquement 900 000 euros pour tester ce dispositif.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. L’idée est intéressante et nous l’avions travaillée au moment de la première loi sur l’immigration, lors du précédent mandat. La commission s’était saisie de cette loi justement pour travailler la question des visas allers-retours et parce que l’intégration ne pouvait pas systématiquement se limiter au temps de présence éventuelle sur le territoire français. Cependant, je vous demande de retirer votre amendement, dans la mesure où les Alliances françaises le font déjà. De plus, le financement devrait plus relever de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Je maintiens l’amendement. En effet, si on laisse uniquement ce budget à l’OFII, je crains que ces crédits ne soient pas utilisés pour cela, compte tenu des priorités actuellement données en matière de politique migratoire. En outre, ma proposition concerne une expérimentation.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE36 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement vise à apporter cette année un soutien exceptionnel à la fédération internationale des professeurs de français, qui risque malheureusement de devoir mettre la clé sous la porte. Il s’agit d’un réseau de 300 associations qui rassemble 220 000 professeurs de français à travers le monde, qui interviennent tous à titre bénévole dans le cadre de cette fédération.
Lorsque j’ai présenté, avec ma collègue Lakrafi, les orientations de notre rapport sur la Francophonie, j’avais donné l’exemple de ce professeur de français qui, au Pérou, marchait chaque jour durant quatre heures pour pouvoir donner ses cours. Il existe des personnes qui aiment vraiment notre langue et s’impliquent très fortement pour pouvoir continuer à l’enseigner dans tous les pays du monde. Or le seul accompagnement dont ils peuvent bénéficier provient d’une telle fédération.
Malgré tous les grands engagements qui ont été pris, notamment dans le cadre de la stratégie 2030 par le président Macron en 2018, cette fédération internationale est en grande difficulté et risque de fermer. L’amendement propose 250 000 euros pour financer ses frais de fonctionnement cette année, exceptionnellement.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je vous remercie de mettre à l’honneur cette fédération qui est absolument extraordinaire. Elle est subventionnée par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et le ministère de l’Europe et des affaires étrangères l’aide à réaliser des opérations. Je ne pense pas que nous soyons dans une bonne position pour décider maintenant si nous devons prendre en charge le fonctionnement d’une fédération qui émane de 294 associations régionales ou nationales avec 54 000 membres cotisants.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Vos propos sont vraiment choquants. Vous nous expliquez que l’on ne peut pas mener de choix politiques : puisque l’OIF doit financer cette fédération, la France ne pourrait pas opérer un choix supplémentaire, alors même que je vous explique qu’elle risque de fermer. Il n’y a aucune instrumentalisation ou récupération idéologique de ma part.
« Je suis favorable au multilatéralisme, aux cofinancements, (…) la francophonie n’appartient pas qu’à la France » ; merci beaucoup de toutes les leçons que vous nous prodiguez depuis ce matin. Si la France fournissait un effort de 250 000 euros pour éviter à la fédération de fermer, cela ne serait pas choquant.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE25 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Nous ressentons tous un niveau de tension élevé ce matin dans cette commission. Je crois que M. le rapporteur Petit a tendance à exaspérer un peu les collègues à qui il s’adresse souvent sur un ton qui, peut-être, pourrait être revu afin que la suite de cette réunion se déroule dans une meilleure ambiance.
Cet amendement vise à défendre l’AEFE. Depuis 2018 et le projet Cap 2030, il existait une volonté du président Macron de doubler les effectifs. Le choix stratégique a consisté à développer des partenariats au détriment de la gestion directe mais aussi des établissements conventionnés, dans des conditions inefficaces et insatisfaisantes. Les personnels s’en plaignent. Si nous voulons proposer un service public de qualité pour nos compatriotes à l’étranger, la gestion directe est indispensable.
Il ne s’agit pas d’une vision colonialiste ou néo-colonialiste. Il existe une véritable demande, non seulement de nos compatriotes mais aussi des binationaux – qui sont aussi nos compatriotes –, qui sont installés dans des pays à l’étranger. En résumé, nous demandons d’augmenter la part des établissements en gestion directe de l’AEFE.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je n’ai rien contre les établissements en gestion directe. J’ai accompagné la mise en gestion directe du lycée de Varsovie. Je n’y étais pas très favorable, et je pense que j’avais raison, mais je n’ai rien contre les établissements en gestion directe. Simplement, en trois ans, nous enregistrons cent lycées et 80 000 élèves supplémentaires. De très bons lycées, plébiscités par les parents d’élèves, sont gérés localement. Je ne vois pas en quoi le statut du lycée changerait quelque chose dans son excellence, qui est garantie par notre ministère de l’éducation nationale et non par l’AEFE, dans son budget et dans la validation de ses professeurs. Pourquoi entrer dans une telle démarche ? Cela serait absurde.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE26 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement vise à alerter sur la multiplication des contrats de droits locaux pour nos professeurs de français. Une telle démarche dissuade un grand nombre de nos enseignants de prendre un poste à l’étranger ou d’y faire une partie de leur carrière. Cet amendement d’appel permet la résidentialisation à tous les enseignants titulaires non-résidents de l’AEFE.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. Les enseignants en contrat local ne se déplacent pas ; ceux qui se déplacent sont forcément en contrat AEFE.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE12 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Cet amendement devrait satisfaire tout le monde, puisqu’il est à la fois très écologique tout en proposant de prendre notre part de responsabilité budgétaire. Il propose de supprimer les envois d’enveloppes électorales aux électeurs français de l’étranger. Lors de ces dernières élections législatives, nous avons pu constater que les envois effectués depuis la France sont systématiquement arrivés en retard, après le jour du vote, aussi bien au premier tour qu’au deuxième tour.
Par ailleurs, nous constatons également que 90 % des 1,7 million d’électeurs qui sont inscrits sur la liste électorale consulaire ont donné leur adresse électronique au consulat et donc sont à même de recevoir la propagande électorale d’une manière dématérialisée. En outre, plus de 85 % des Français de l’étranger ont recours au vote électronique. Je propose donc d’éliminer 3,5 millions d’euros de notre budget.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je souscris sur le fond à cette interrogation. Des réflexions ont déjà été menées et un rapport de nos collègues Jean-Michel Mis et Raphaël Schellenberger proposait que les électeurs puissent choisir la dématérialisation. Cependant, mon avis est partagé car je ne sais pas si, en réalité, l’examen du budget est le support approprié pour réformer le code électoral. Vous dites d’ailleurs vous-même qu’il s’agit d’un amendement d’appel.
Je suis très ouvert sur le fond mais vous demande le retrait de l’amendement. À défaut, j’émets un avis de sagesse.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE37 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement est défendu.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. Le transfert des crédits du programme 151 dans le programme 105 permet en réalité une meilleure lisibilité, y compris dans les documents de performance.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-AE28 et AE17 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Ces deux amendements portent sur la Caisse des Français de l’étranger (CFE), organisme de sécurité sociale de droit privé en charge d’une mission de service public, tout en ayant une obligation d’autonomie financière élevée. À ce titre, cette caisse ne bénéficie d’aucune taxe affectée, d’aucun soutien de l’État en dehors des 380 000 euros de la catégorie aidée et ne bénéficie pas non plus d’une fraction de contribution sociale généralisée (CSG), alors que les Français établis à l’étranger continuent de participer par leur assujettissement aux diverses contributions sociales au financement de la protection sociale en France. Il convient donc de rappeler que, dans sa mission de service public, cette caisse est dans l’obligation d’accepter tous les Français, quels que soient leur âge ou leur état de santé, faisant donc d’elle une caisse universelle. Cela entraîne naturellement des déséquilibres financiers coûteux qui rendent la caisse structurellement déficitaire.
Nous proposons donc de renforcer cette caisse, avec cet amendement qui augmente de 25 millions d’euros les crédits à l’action Offre d’un service public de qualité aux Français de l’étranger. Nous demandons évidemment au Gouvernement de lever le gage que nous proposons. Je rappelle que cet amendement provient du travail de M. Karim Ben Cheikh, rapporteur spécial sur la mission en commission des finances pour PLF 2024.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable sur les deux amendements pour des raisons budgétaires, même s’il revient au Gouvernement de lever le gage. En outre, cet aspect ne devrait pas être discuté dans le cadre actuel, puisqu’il concerne une redéfinition plus complète de la politique de protection sociale de nos compatriotes à l’étranger, en l’état actuel.
L’essentiel des ressources de la CFE se fonde sur des cotisations. Elle a récemment fait l’objet, pour la deuxième année consécutive, d’une certification de ses comptes qui montre au contraire de réels progrès en matière d’équilibre, de gestion des ressources. Je pense donc qu’il faut laisser les choses se faire. Vous avez peut-être raison de poser le débat mais je rappelle que, en l’état actuel, une dotation de 380 000 euros est destinée à permettre aux personnes les plus démunies d’accéder à la CFE.
La commission rejette les deux amendements.
Amendement II-AE6 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Cet amendement vise à revenir sur la réduction de 6,5 millions d’euros des bourses AEFE proposée par le Gouvernement. Je ne propose pas une augmentation de cette enveloppe, qui serait pourtant nécessaire, mais très raisonnablement de sanctuariser et de maintenir stable l’enveloppe par rapport au niveau de 2024. En effet, ces bourses sont particulièrement nécessaires pour la communauté française établie à l’étranger.
L’inflation et l’augmentation des frais de scolarité exercent une pression considérable sur les budgets des familles. En 2023, environ 24 000 bourses scolaires ont été attribuées à des enfants français scolarisés à l’étranger. Sans ces dernières, leur déscolarisation serait inéluctable. Nous devons les accompagner, notamment pour défendre une mixité sociale au sein de nos établissements scolaires à l’étranger mais aussi parce que cela fait partie de nos principes républicains.
L’AEFE, en étroite collaboration avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, gère ce dispositif essentiel grâce aux moyens budgétaires alloués en loi de finances. En tant qu’ancien président de l’association des parents d’élèves du lycée français de Madrid, j’ai eu l’occasion de participer à de nombreuses reprises aux commissions consulaires des bourses, qui permettent de réaliser que les familles bénéficiaires sont très souvent des familles monoparentales, des mères seules qui continuent à vouloir, malgré les difficultés, scolariser leurs enfants. Elles ont besoin de notre soutien et du maintien de cette enveloppe des bourses au niveau de 2024.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Ma réponse est identique à celles déjà formulées. La baisse de 7 millions d’euros est liée à l’évaluation, par les services du ministère, de l’évolution du nombre de demandes de bourses, qui diminue depuis quelques années. En l’état actuel, la maquette budgétaire me paraît équilibrée ; elle me paraît correspondre, sur des critères objectifs, à l’évolution du nombre de demandes probables de bourses. Cependant, il convient de rester vigilant, tant il est compliqué de prévoir les tendances futures. Il sera peut-être nécessaire de monter au créneau en cours d’année, au cas où certaines sommes manqueraient. Je vous propose de retirer cet amendement.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Notre commission devra par ailleurs absolument traiter le sujet de la mixité sociale de nos établissements français à l’étranger. En effet, la mixité sociale éducative est un sujet d’ordre diplomatique.
M. Stéphane Vojetta (EPR). Ayant participé à ces conseils consulaires, je confirme que les enveloppes sont trop faibles et ne répondent pas aux besoins. En 2024, il a ainsi été nécessaire d’appliquer un mécanisme de solidarité qui a réduit de facto, pour la grande majorité des familles bénéficiaires, de 5 % le montant des bourses allouées, accroissant le reste à charge. J’insiste et maintiens donc cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE21 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Nous demandons une augmentation de l’enveloppe des bourses, en raison de l’inflation qui impacte la grande majorité des pays du monde et nos compatriotes. En tant que présidente du groupe d’amitié France-Mexique, les familles que je rencontre m’exposent clairement à quel point l’inflation a réduit la bourse dont elles bénéficient. M. Vojetta a raison de dire qu’il s’agit souvent des familles les plus fragiles, de mères isolées, qui essayent de maintenir le lien avec la France.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable, dans la mesure où nous venons d’adopter l’amendement précédent.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE34 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement vise à transférer 5 millions d’euros de crédits et autorisations de paiement pour le programme Action de la France en Europe et dans le monde vers le programme Français à l’étranger et affaires consulaires. Il vise très clairement à attirer l’attention sur la situation de nos compatriotes au Moyen-Orient, dont la sécurité est en danger. Nous avons perdu plusieurs d’entre eux en Palestine. Deux enfants, Obeyda et Janna, ont été tués par un bombardement israélien fin octobre 2023 et quatre agents de l’Institut français sont morts dans la bande de Gaza. Il s’agit de Fathia Azaiza, professeure de français décédée en octobre, Rami Fayyad, professeur de français mort en février faute de médicaments, Ahmed Abu Shamla, agent administratif décédé le 16 décembre dans un bombardement et Mohamed Qreqa, animateur d’ateliers artistiques,
Au Liban également, le gouvernement israélien poursuit ses attaques meurtrières. Deux Français sont morts mais la France refuse toujours de mettre en œuvre des évacuations tant que l’aéroport de Beyrouth restera ouvert. Nous comptons près de 24 000 ressortissants sur place mais il y a seulement trois vols quotidiens. En conséquence, les prix explosent et les vols sont complets. Sachez par exemple que l’Allemagne, qui compte vingt fois moins de ressortissants au Liban, leur a demandé de quitter le pays et a affrété un avion militaire. À l’inverse, la France se contente de réserver quelques centaines de places dans deux vols supplémentaires.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’entends bien votre préoccupation, que je trouve légitime. Simplement, tout dépend du programme 105 et votre amendement n’est pas opérant dans la mesure où vous effectuez un transfert de crédits sur le programme 151. En outre, le centre de crise et de soutien (CDCS), qui gère ce genre de situations, voit ses crédits à nouveau augmenter en 2025. J’émets un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE15 de Mme Sophia Chikirou.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement est défendu.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE16 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement porte sur l’accompagnement des personnes en situation de handicap et dépasse les clivages politiques. Je rappelle que nous avions voté l’année dernière, à la quasi-unanimité, la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé. En l’espèce, il s’agit de mettre fin à une inégalité entre nos compatriotes à l’étranger en situation de handicap et ceux vivant en France.
En effet, pour obtenir l’allocation aux adultes handicapés (AAH) auprès des conseillers consulaires pour la protection et l’action sociale, un citoyen ou une citoyenne française doit aujourd’hui justifier d’un taux d’incapacité de 80 %, quand ce taux peut être abaissé à 50 % sur le territoire national. Il s’agit donc simplement de corriger cette inégalité douloureuse en abondant de 2 millions d’euros le programme 151.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Nous entrons dans une série d’amendements qui portent sur le volet social. Je rappelle que dans ce budget, les crédits en matière sociale sont stabilisés. Ils sont destinés à soutenir nos compatriotes à l’étranger disposant de faibles ressources ou souffrant d’un handicap, leur versement étant pris après avis des conseils consulaires pour la protection et l’action sociale (CCPAS). Le montant budgétaire 2025 correspond à celui ouvert en 2022, soit 15,2 millions d’euros, ce qui permet de garantir le niveau des aides versées à l’ensemble des publics en difficulté. Ce montant connaît une légère diminution par rapport à 2023 et 2024 mais elle est essentiellement liée à la fluctuation des taux de change. Dans ce contexte, je suis défavorable à cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE7 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Cet amendement vise à réaffecter une partie de la baisse budgétée des crédits dédiés aux aides sociales vers nos dispositifs de soutien au tissu associatif des Français à l’étranger (Stafe) et des organismes locaux d’entraide et de solidarité (Oles). Ces baisses de crédits sont budgétées pour répondre à une mise en œuvre de la norme européenne qui vise à éviter les doublons entre les aides sociales versées par les États de résidence et les États d’origine.
Si l’objectif est louable, cela présuppose une hypothèse selon laquelle il existerait une égalité dans tous les pays de l’Europe entre le niveau des aides sociales qui peuvent être versées. Or, dans certains pays européens, les aides sociales ne sont malheureusement pas aussi généreuses que celles qui existent en France. Je propose de réaffecter une partie de ces coupes budgétaires à nos associations, gérées par des gens compétents et dévoués, afin qu’elles puissent prendre, en responsabilité, la décision d’assister nos Français expatriés en difficulté sociale et économique, en fonction des aides locales qu’ils perçoivent ou non.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’entends bien cette préoccupation. Normalement, l’épure budgétaire, telle qu’elle existe, devrait permettre de répondre aux besoins. Cela étant, j’émets un avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE10 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Cet amendement est extrêmement important, puisqu’il répond à l’une des préoccupations principales des Français de l’étranger. Lorsque ces derniers veulent renouveler leurs documents d’identité, ils doivent se rendre à leur consulat. Pour certains d’entre eux, cela signifie se déplacer sur des milliers de kilomètres. En conséquence, les Français de l’étranger expriment une demande forte de se voir proposer une procédure dématérialisée.
Le Gouvernement et le président de la République ont entendu cette demande et ont procédé à la mise en place d’une phase de test d’une procédure dématérialisée de renouvellement des passeports, à travers un système de vérification d’identité et des vidéoconférences. Cette phase de test a cours actuellement au Canada et au Portugal, dans ma circonscription. Cette phase va être maintenant évaluée par un comité d’évaluation qui déterminera si nous allons généraliser cette technologie à l’ensemble des Français de l’étranger.
Nous avons constaté, lors de cette phase de test, que les agents consulaires concernés prennent un peu plus de temps pour réaliser cette procédure. Je propose donc une dotation budgétaire de 1 million d’euros, afin de permettre au ministère d’embaucher 10 personnes ou équivalents temps plein, qui pourraient se dédier à cette tâche.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’entends bien cette préoccupation mais trop de dépense finit par tuer la dépense. Je vous demande de retirer cet amendement, dans la mesure où le rapport définitif conduit par les deux inspections de l’administration et des affaires étrangères doit être rendu fin novembre 2024.
M. Stéphane Vojetta (EPR). Gouverner, c’est prévoir et je ne voudrais pas que l’on nous oppose la non-reconduction et la généralisation de ce dispositif très attendu, uniquement pour des raisons budgétaires. Je maintiens l’amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE23 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Je vous propose de consacrer un million d’euros aux conseils consulaires pour la protection et l’action sociale. Cet après-midi, vous aurez l’occasion de voter un amendement que nous proposons pour l’impôt universel sur les catégories de revenus les plus élevés de nos compatriotes établis hors de France. Dans un souci de solidarité nationale, nous proposons donc que 1 million de cet argent que nous allons récolter cet après-midi soit consacré aux conseils consulaires pour la protection et l’action sociale.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’ai déjà répondu à ces questions. Les crédits sociaux sont maintenus, j’émets donc un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE40 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement propose d’octroyer 1 million d’euros à l’ambassade de France au Liban. Comme vous le savez, les bombardements d’Israël sur le Liban sont quotidiens et les Libanais sont obligés de trouver refuge là où ils le peuvent, en Jordanie, aux États-Unis ou encore au Canada, mais nombre d’entre eux souhaitent également rejoindre la France. Beaucoup sont francophones et ont des attaches en France. Le devoir d’humanité et le lien particulier qui nous unit à ce pays nous obligent à leur venir en aide.
Nous devons aider ces familles à se réunir et je propose donc 1 million d’euros pour l’ambassade du Liban, afin de faciliter le traitement des démarches et des demandes qui vont évidemment augmenter.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable. En réalité, le montant des crédits dévolus à l’action n° 3 du programme 151, qui concernent précisément l’instruction des demandes de visas, présente une hausse significative de 46,7 % en 2025.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE8 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Je retire cet amendement car il s’agissait d’un amendement de repli concernant un amendement finalement adopté.
Amendement II-AE5 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Afin d’améliorer la prise en charge du handicap des Français établis hors de France, cet amendement prévoit l’allocation d’un montant symbolique de 100 000 euros afin d’accompagner budgétairement une revue des seuils d’incapacité requis pour l’éligibilité aux aides sociales des CCPAS, faisant passer ces seuils de 80 % à 50 %. Cette mesure vise donc à harmoniser les conditions d’accès à ces aides sociales avec celles en vigueur pour l’accès à l’AAH sur le territoire national.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Encore une fois, les crédits sociaux sont stabilisés mais je souscris à l’objectif à titre personnel. J’émets donc un avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE24 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cet amendement propose d’élargir l’accès à la protection universelle maladie (Puma). En effet, ce droit à la prise en charge médicale ne s’étend pas aujourd’hui aux Français de l’étranger, alors qu’ils font face à une précarité grandissante et à des difficultés pour accéder aux systèmes de santé dans leur pays d’accueil.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Il s’agit clairement d’un amendement d’appel. Je le trouve intéressant mais ce budget n’est pas le lieu pertinent pour évoquer ce sujet, même si je comprends la démarche. J’émets un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
M. le président Bruno Fuchs. L’amendement est rejeté mais l’appel a vraisemblablement été entendu.
Amendement II-AE32 de Mme Sophia Chikirou
Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). La France Insoumise souhaite présenter cet amendement pour créer un nouveau programme d’urgence à destination de la Palestine, intitulé Aide d’urgence pour les territoires palestiniens. Depuis soixante-seize ans, la situation du peuple palestinien est critique et, en une période d’un an, le bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies et l’UNRWA ont fait état de plusieurs centaines de nouveaux foyers de colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem Est.
Au moins 695 Palestiniens ont été tués à la suite d’opérations de colonisation. Les Palestiniens déplacés n’ont aucune autre option que de rejoindre les camps de réfugiés de la région, comme ceux qui les ont précédés depuis 1948. Cette situation, cumulée à la catastrophe humanitaire en cours à Gaza, qui a déjà coûté la vie à plus de 40 000 personnes et en a blessé 99 000 autres, et aux intentions affichées par de hauts responsables israéliens d’y éradiquer la présence palestinienne – au point que la Cour internationale de justice a reconnu un risque génocidaire – ne fait que cultiver un sentiment de haine qui contribue à plonger la région dans une spirale de violences sans fin.
Les efforts de la France vis-à-vis de la Palestine doivent être redoublés pour être à la hauteur des besoins du peuple palestinien et pour assurer la paix et le cessez-le-feu dans la région. La France a apporté son aide à la Palestine à 100 millions d’euros en 2023. Au vu des nécessités du peuple palestinien, nous proposons de doubler l’effort de la France en 2025, en créant un nouveau programme prévoyant une aide directe d’urgence à la Cisjordanie et à Gaza, à hauteur de 200 millions d’euros.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je suis tout à fait d’accord avec l’exposé des motifs. En revanche, j’émettrai un avis défavorable sur votre amendement. Sur un sujet aussi grave, on ne peut pas uniquement présenter des postures et les inscrire dans un amendement. Je m’explique : notre soutien aux Palestiniens passe aujourd’hui par le fonds d’urgence humanitaire et de stabilisation du centre de crise et de soutien, qui est augmenté de 20 millions d’euros par le budget pour atteindre 220 millions d’euros en 2025. L’aide que nous apportons aux Palestiniens à ce titre a atteint 100 millions d’euros en 2024 et pourra augmenter en fonction des besoins en 2025.
Je rappelle également que nous sommes toujours présents à Gaza. Nous avons permis, grâce à l’université de Naplouse, que les diplômés de Gaza soient diplômés de leur université, pourtant, bombardée, ce qui représente un acte politique majeur. De ce point de vue, votre amendement est satisfait. Il ne sert à rien de créer un programme dans le budget. Par ailleurs, nous avons augmenté notre contribution à l’UNRWA et des financements sont apportés à l’Autorité palestinienne dans le cadre de la coopération internationale et l’aide de l’Agence française de développement.
Je demande donc le retrait et émets, à défaut, un avis défavorable.
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Votre intervention est à l’image de la position française, incantatoire dans la forme, mais en pratique nous ne voyons rien venir. N’en n’avons-nous pas assez de financer un certain nombre d’actions en Palestine et de les voir totalement rasées par Israël ? Au-delà de l’humanité et du droit international, j’estime que la gestion des deniers publics est vraiment mal réalisée. Je rappelle que l’Institut français a été en partie réduit, sans susciter une réaction digne de ce nom de la part de la France. À un moment donné, la France doit se respecter, respecter les choix politiques élaborés par les budgets qu’elle flèche à destination de la Palestine, mais aussi respecter son rang au niveau international. La France, qui est membre du conseil de sécurité de l’ONU et membre fondateur de cette organisation, trahit ses engagements.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je suis tout à fait d’accord ; votre amendement est donc inutile.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE39 de M. Pierre-Yves Cadalen
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Nous sommes toutes et tous conscients de la situation particulièrement éprouvante et difficile que traverse aujourd’hui le Liban. Pour ma part, j’ai reçu le témoignage d’une famille brestoise qui vivait à Beyrouth et dont les enfants parlaient des explosions à chacun de leurs réveils. Alors que se réunit demain la conférence sur le Liban proposée par Emmanuel Macron, l’Assemblée nationale peut envoyer un signal positif en proposant la création d’une ligne spécifique de solidarité dédiée à l’appui et à l’aide à plus d’un million de réfugiés produits par l’invasion et les bombardements israéliens au Liban. Ce cadre large permet également d’envisager des opérations de reconstruction d’hôpitaux et d’écoles mais aussi un accompagnement psychosocial nécessaire pour celles et ceux qui font face à de tels traumatismes.
Cet amendement vise donc la création d’un fonds d’urgence et de solidarité avec les déplacés libanais. Nous sommes favorables à l’appui humanitaire mais, en réalité, si nous souhaitons que les Libanais cessent d’être déplacés, il faut un cessez-le-feu à Gaza et il faut que cette question soit à l’ordre du jour de la conférence, demain.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’entends bien la geste politique et l’objectif de votre amendement. En tant que rapporteur budgétaire, je considère qu’il n’est absolument pas nécessaire de créer un programme particulier sur un tel fonds. J’émets un avis défavorable.
Mme Amélia Lakrafi (EPR). Soixante-dix États ont d’ores et déjà répondu présents à cette conférence initiée par le président de la République, ainsi que les quinze plus grandes organisations non gouvernementales et des fondations de grandes entreprises. Je rappelle que, lors de la précédente conférence de soutien au Soudan, la France a collecté plus de 2 milliards d’euros. Espérons que nous obtiendrons demain un résultat identique, qui aidera bien plus les déplacés libanais que 100 ou 200 millions d’euros pour un fonds qui existe déjà.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). La situation politique dans le pays nous invite à ne pas laisser l’ensemble de l’initiative politique, y compris en matière de politique internationale, au président de la République. La commission des affaires étrangères peut, à travers le vote de cet amendement, envoyer un signal positif et constructif et signifier par là que les parlementaires ont un rôle plein et entier à jouer en matière de politique internationale, afin que la ligne erratique et incohérente d’Emmanuel Macron cesse de dicter au monde ce que serait la voix de la France.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je ne tiens pas à rentrer dans le débat des postures politiques. Techniquement, compte tenu des très grands efforts budgétaires, y compris à travers les contributions au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) ou de l’aide humanitaire dans le cadre du programme 209, il n’est pas utile de créer un programme particulier.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE29 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement est défendu.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE30 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement est défendu.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Puis, la commission émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Action extérieure de l’État ainsi modifiés.
M. le président Bruno Fuchs. Il nous faut maintenant débattre de huit autres amendements.
Article 45 et état G : Liste des objectifs et des indicateurs de performance
Amendement II-AE20 de M. Aurélien Taché.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Il s’agit par cet amendement de créer un nouvel indicateur pour mesurer l’effectivité de l’accès à l’éducation pour les élèves en situation de handicap à l’étranger.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je comprends et soutiens personnellement l’idée. Cependant, la création d’un nouvel indicateur de performance suppose de s’assurer au préalable de l’existence des outils à la disposition de l’État pour évaluer la réalisation de cet objectif. Il semblerait que la notion de parts d’heures d’accompagnement réellement effectuées citée dans l’amendement soit équivoque.
Peut-être faut-il retirer cet amendement pour le repréciser avant de le rediscuter en séance ?
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Je retire l’amendement.
Après l’article 59 :
Amendement II-AE54 de M. Frédéric Petit
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je m’excuse de m’être parfois un peu passionné aujourd’hui.
Je pense qu’il nous manque un document budgétaire, un « orange » consacré à l’influence de la France dans le monde, qui nous permette d’avoir un récapitulatif de toutes les actions concernées et une vision globale de tous les enjeux lorsque nous travaillons sur le budget. Tel est l’objet de l’amendement que je propose ici.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE55 de M. Frédéric Petit
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement demandant un rapport du Gouvernement au Parlement. Dans certaines circonstances, la France incite des ressortissants ou entreprises à aller dans un pays tout en leur interdisant ce déplacement. Par exemple, nous avons vendu onze locomotives récemment en Ukraine mais on ne peut pas les livrer. En effet, il leur est opposé la cartographie des zones à risque, zones rouges « formellement déconseillées » ou oranges « déconseillées sauf raison impérative ». Il faudrait que le Gouvernement réfléchisse à un outil à la fois assurantiel et de contrôle des missions, de façon que nous puissions répondre à nos actions partenariales sans être obligés de nous couper les ailes. À ce titre, le lycée de Kiev a rouvert mais les trois enseignants de l’AEFE n’ont pas le droit d’y aller. Je demande donc un rapport, afin que nous puissions avancer au cours de l’année qui vient.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE22 de M. Aurélien Taché.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Avec cet amendement, nous proposons une demande de rapport gouvernemental au Parlement visant à évaluer l’action des prestataires privés chargés des missions de service public dans le cadre du programme 151. Le réseau consulaire engage des prestataires de services extérieurs pour la sous-traitance de services et de nombreux compatriotes et élus des Français de l’étranger nous ont alertés sur la dégradation considérable des services consulaires.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable. Cette mission pourrait même être élargie, par exemple aux prestataires opérant en matière de sécurisation des postes diplomatiques.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je suis favorable à l’évaluation de ce genre d’éléments. J’estime néanmoins que l’évaluation devrait être conduite par les parlementaires et non par le Gouvernement.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Le Gouvernement peut également nommer un parlementaire en mission.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE9 de M. Stéphane Vojetta
M. Stéphane Vojetta (EPR). Cet amendement demande au Gouvernement de remettre au Parlement, pour éclairer les parlementaires, un rapport présentant les résultats d’un diagnostic indépendant de la situation comptable et des perspectives financières de la mission laïque française (MLF). Il s’agit d’une association de type loi de 1901 sans but lucratif mais qui sous-traite la gestion d’une centaine d’établissements, de nos lycées français de l’étranger, homologués AEFE.
Malheureusement, dans le cadre du réseau espagnol, cette gestion a créé une certaine détresse chez les familles et au sein des communautés éducatives de ces établissements, du fait de décisions prises sans concertation au cours des deux à trois dernières années et qui ont été imposées de manière brutale. Je pense notamment au déconventionnement forcé de deux établissements, à Alicante et Villanueva de la Cañada, puis à des augmentations tarifaires brutales – entre 10 % et 20 % – annoncées sans aucune concertation préalable en février dernier et imposées à des familles qui, souvent, faisaient déjà face à des difficultés dans leur économie familiale.
Je demande donc qu’un organisme indépendant réalise une étude approfondie de la situation financière et comptable de la MLF pour nous permettre d’obtenir une vision éclairée de la capacité de cette association à exercer cette mission d’importance. Le Gouvernement s’était déjà engagé au préalable à réaliser cette étude. Malheureusement, la dissolution a eu lieu entre-temps. C’est la raison pour laquelle je formule cette demande de rapport à travers le PLF.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. La MLF ne sous-traite pas ; elle a existé quatre-vingts ans avant l’AEFE. Une grande partie des cent-huit lycées ne fait pas partie du réseau de l’AEFE. Lors de la rédaction de mes rapports, je rencontre fréquemment la MLF, qui gère notamment 90 % du réseau homologué au Liban. Puisqu’il s’agit d’une association, le premier pas consiste à mon avis à ce que nous demandions un audit, par exemple à la Cour des comptes, puisqu’il s’agit d’une association d’utilité publique.
M. Stéphane Vojetta (EPR). Je serais ravi de retirer cet amendement mais j’ai trop vu de promesses non réalisées. Je pense qu’il est nécessaire d’obtenir, d’une manière ou d’une autre, un rapport indépendant sur cette situation.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-AE27 de Mme Sophia Chikirou
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement a pour objet la réalisation d’un rapport afin d’évaluer la possibilité pour l’AEFE de recourir à l’emprunt auprès d’un établissement de crédit, ainsi que l’évolution de ses capacités de financement. À l’heure actuelle, l’AEFE ne peut emprunter sur du long terme auprès d’un établissement de crédit. En conséquence, elle n’est pas en mesure de financer des investissements immobiliers. Même si elle peut recourir aux avances de l’Agence France Trésor, ce recours est assez inadapté et ne concerne que des courtes durées. Nous proposons que cette étude soit conduite par l’État ou par un organisme lié à l’État, par délégation, et non par une mission parlementaire, car nous considérons que cela pourrait être plus pertinent et plus efficient.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je pense également qu’il est absurde pour l’AEFE de ne pas pouvoir emprunter, dans le cadre d’un business aussi fiable et aussi stable que les lycées français à l’étranger. En revanche, votre amendement n’est pas clair.
Il faut distinguer, d’une part, l’AEFE gestionnaire de soixante-quatre lycées – qui n’a pas le droit d’emprunter mais n’est pas non plus soumise à de gros besoins – et, d’autre part, les cinq cent quarante lycées pour lesquels nous avons conduit l’étude que vous demandez. Nous avons créé l’outil grâce auquel les établissements homologués dans le réseau, en dehors des soixante-quatre mentionnés, ont pu emprunter à travers une commission d’emprunt. En gestion directe, il existe très peu de besoins.
Depuis très longtemps, je propose que nous isolions la compétence de gestion directe de lycées de l’AEFE, afin que cette partie dispose de la capacité d’emprunt. Il convient donc de développer l’outil que nous avons créé et qui satisfait 80 % du réseau aujourd’hui, mais également de restructurer l’AEFE, afin de pouvoir répondre aux besoins d’investissement immobilier dans les lycées qu’elle gère directement.
Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Monsieur Petit a la chance de tout savoir et d’avoir un avis très tranché sur tous les sujets. Pour ma part, je propose humblement de confier une mission pour évaluer la possibilité de l’AEFE à recourir à l’emprunt pour financer des investissements immobiliers, de la rénovation thermique ou architecturale. Il ne faut pas envisager uniquement la situation en Europe.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-AE44 M. Aurélien Taché.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Cette proposition d’amendement consiste à demander au Gouvernement d’évaluer la réforme du corps diplomatique décidée par le décret du 16 avril 2022. Cette réforme a prévu l’extinction des deux corps diplomatiques, le corps des conseillers des affaires étrangères et le corps des ministres plénipotentiaires, qui ont été progressivement dilués au sein des administrateurs d’État. À l’époque, la réforme du corps diplomatique avait provoqué de vives protestations.
Aujourd’hui, les retours dont nous disposons sont pour le moins négatifs. En conséquence, il conviendrait d’évaluer rapidement où nous en sommes. Il revient à notre commission d’accompagner nos diplomates dans l’organisation de leur travail et du ministère.
M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis. Je ne suis pas sûr qu’il soit pertinent de demander au Gouvernement de produire un rapport pour évaluer sa propre réforme. Honnêtement, il s’agit là du travail du Parlement. L’année dernière, nous avons d’ailleurs pris connaissance d’un rapport d’information de Vincent Ledoux et Arnaud Le Gall sur le sujet.
Il me semble nécessaire de retirer cet amendement. En revanche, d’ici mai 2026, il m’apparaît utile de prévoir une nouvelle mission d’information sur le sujet, pour pouvoir évaluer cet aspect, y compris au regard du plan de réarmement de notre diplomatie sur la période 2023-2027. Je propose le retrait de l’amendement et, à défaut, j’émets un avis défavorable.
M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’en profite pour rappeler que, lors de la législature de 2017 à 2022, nous avions adopté une règle éthique qui consistait à citer toute personne de l’extérieur, organisation non gouvernementale ou association, avec laquelle un parlementaire rédige et soumet un amendement. Il me paraît sain de nous y tenir.
M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Monsieur Forissier, il ne s’agit pas de dire que le travail parlementaire n’aurait pas de plus-value sur un sujet comme celui-ci. Je salue d’ailleurs le travail réalisé par nos deux collègues. Cependant, à un moment donné, le Gouvernement doit aussi pouvoir regarder ce qu’il a produit par lui-même et en tirer un certain nombre de conclusions. Je maintiens donc cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Annexe : liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis
(par ordre chronologique)
– Mme Pauline Carmona, directrice ;
– Mme Samantha Bonbayl, cheffe de la mission de gestion administrative et financière ;
– M. Louis Baroth, rédacteur.
– M. Julien Steimer, directeur général ;
– M. Thibaut Fourrière, directeur de la sécurité diplomatique ;
– M. Olivier Plançon, directeur des immeubles et de la logistique ;
– M. Alexandre Morois, directeur des affaires financières ;
– Mme Laurence Bernardi, sous-directrice de la stratégie et de la synthèse budgétaire.
– Mme Sophie Hatt, directrice de la coopération internationale et de sécurité.
– M. Franck Vermeulen, secrétaire général ASAM-UNSA ;
– M. David Ansquer, membre du bureau syndical de la CGT ;
– Mme Bérangère Lebecq, vice-présidente de la CFTC.
– M. Stéphane Romatet, ambassadeur.
– M. Alexis Lamek, ambassadeur.
– Mme Anne Guéguen, ambassadrice ;
– M. Manuel Bufala, chargé d’affaires de l’ambassade de France ;
– M. Paul Hemar, secrétaire général de l’ambassade ;
– M. Didier Plunian, attaché de sécurité intérieure ;
– Colonel Jean-Baptiste Vouilloux, attaché de défense ;
– M. Fabrice Rousseau, conseiller de coopération et d’action culturelle, directeur de l’Institut français de Tunisie ;
– Mme Nina Jean-Bouamar, secrétaire générale de l’Institut français de Tunisie.
– M. Frédéric Mondoloni, directeur général.
– M. Philippe Duporge, chargé d’affaires.
([1]) M. Frédéric Petit est le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur les crédits du programme 185 relatif à la diplomatie culturelle et d’influence de la France.
([2]) Audition du ministre de l’Europe et des affaires étrangères devant la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, 15 octobre 2024.
([3]) Diminution d’environ 69 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
([4]) Diminution d’environ 39 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
([5]) M. Frédéric Petit est le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur les crédits du programme 185 relatif à la diplomatie culturelle et d’influence de la France
([6]) Hors Titre 2, soit l’ensemble des dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention.
([7]) Titre 2, soit les dépenses de personnel.
([8]) Fonds de concours.
([9]) Attributions de produits.
([10]) Cette action se substitue à l’action n° 6 du programme 185.
([11]) Le barème du budget ordinaire des opérations de maintien de la paix est réévalué tous les trois ans.
([12]) Où se situent le service central d’état civil et le centre des archives diplomatiques.
([13]) En France.
([14]) Cette action se substitue à l’action n° 8 du programme 209.
([15]) Cette action héberge les dépenses de personnel financées jusqu’au 1er janvier 2025 par l’action n° 1 du programme 151.
([16]) Cette action héberge les dépenses de personnel financées jusqu’au 1er janvier 2025 par l’action n° 3 du programme 151.
([17]) 1,7 million d’entre eux sont inscrits au registre des Français établis hors de France.
([18]) Quarante-deux pays européens et dix-huit pays africains.
([19]) Près des trois quarts des électeurs français de l’étranger ont privilégié le vote par Internet lors des élections législatives de 2024.
([20]) La dématérialisation complète de la gestion des actes d’état civil des Français nés à l’étranger est prévue en 2027.
([21]) L’accès à Internet n’étant pas assuré de manière fiable et pérenne dans de nombreux États.
([22]) Soit 111,5 millions d’euros consacrés aux bourses scolaires et 2 millions d’euros fléchés en faveur de l’aide à la scolarisation des élèves en situation de handicap.
([23]) 24 810 élèves boursiers.
([24]) 20 575 élèves boursiers.
([25]) La « cagnotte » constituée des sommes non dépensées lors des exercices budgétaires précédents a été apurée en 2023.
([26]) La lettre plafond pour 2025 fixe désormais la trajectoire pluriannuelle suivante : + 100 ETP en 2026 et + 100 ETP en 2027. Cette trajectoire diffère de celle qui avait été fixée par la lettre plafond pour 2024 et qui prévoyait +150 ETP en 2025, +200 ETP en 2026 et +200 ETP en 2027.
([27]) Selon les représentants de la direction générale de l’administration et de la modernisation du MEAE, la rétrogradation du troisième au cinquième rang effectuée en février 2024 par le centre de réflexion australien The Lowy Institute s’explique par l’évolution de la méthodologie de calcul du nombre de postes diplomatiques, les consulats situés dans la capitale du pays où est implantée l’ambassade n’étant plus comptabilisés en tant que tels.
([28]) 163 ambassades, 92 consulats généraux et 16 représentations permanentes.
([29]) Soit environ 1 500 sites.
([30]) Le MEAE gère directement la sécurité des emprises à statut diplomatique et consulaire (ambassades, résidences, consulats) mais aussi celle des Instituts français. Il apporte son concours et son expertise aux réseaux des opérateurs (AEFE, Alliances françaises, Agence française de développement).
([31]) Il s’agit notamment de préserver l’inviolabilité des locaux et des personnes, selon les articles 22, 29 et 30 de la convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques et les articles 31 et 71 de la convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires.
([32]) Ce montant a quintuplé depuis 2006.
([33]) 240 en moyenne chaque année.
([34]) Direction générale de la sécurité extérieure, direction générale de la sécurité intérieure, direction du renseignement et de la sécurité de la défense.
([35]) Lors de son audition par le rapporteur pour avis, M. Philippe Duporge, chargé d’affaires de l’ambassade de France à Ouagadougou, a ainsi rappelé que le Burkina Faso était classé comme étant le premier pays au monde au regard du nombre de morts causées par le terrorisme.
([36]) Ce conflit oppose le gouvernement fédéral éthiopien au Front de libération du peuple du Tigré, au Nord du territoire éthiopien.
([37]) L’ambassade de France à Kaboul ayant été endommagée en mai 2017 à la suite de l’attaque terroriste menée contre d’autres emprises diplomatiques situées à proximité.
([38]) Déplacée à Lviv à la suite de l’invasion russe en février 2022, elle fut rouverte à Kiev deux mois plus tard.
([39]) Les dégradations, limitées, subies par l’ambassade de France à Niamey le 30 juillet 2023 lors d’une manifestation non interdite par les nouvelles autorités nigériennes, illustrent la nécessité de maintenir le niveau de sécurisation de nos emprises, notamment dans des pays où la situation politique peut évoluer de façon brutale. Au Niger, la fermeture de l’ambassade en décembre 2023 a été précédée d’une période de blocus assez longue durant laquelle les autorités ont rendu particulièrement difficile l’approvisionnement du poste, les déplacements et la relève des personnels. Dès 2015, l’Institut français situé à Zinder avait également été détruit par un incendie à la suite de l’intrusion d’une foule de manifestants.
([40]) Ces incidents ont notamment eu lieu à Bagdad, Beyrouth, Karachi et Tripoli.
([41]) À Jérusalem en 2015, Copenhague et Skopje en 2017 et Bangui en 2022 et 2023.
([42]) Le montant mentionné p. 65 dans le projet annuel de performances (PAP) du programme Action de la France en Europe et le monde annexé au projet de loi de finances pour 2025, soit 8,2 millions d’euros, est erroné. Sollicité par le rapporteur pour avis, le MEAE indique que le montant exact s’élève à 32,1 millions d’euros. De façon analogue, le montant exact des dépenses consacrées aux véhicules blindés s’élève à 6 millions d’euros et non à 23,9 millions d’euros comme mentionné dans le PAP.
([43]) Soit, le plus souvent, le diplomate exerçant les fonctions de n° 2 du poste.
([44]) Présents dans 80 ambassades et 11 consulats.
([45]) Présents dans 45 ambassades et 4 consulats.
([46]) À l’exception du Pakistan où la surveillance du consulat relève de la gendarmerie alors que celle de l’ambassade dépend de la police, l’ensemble des postes dans un même pays font l’objet d’une surveillance dévolue soit à la gendarmerie, soit à la police.
([47]) Selon la réponse ministérielle du 15 novembre 2011 à la question écrite n° 1173314 du député M. Jean-Jacques Urvoas, 432 GSD permanents étaient déployés à l’étranger en 2011.
([48]) Pour une durée moyenne de trois à quatre mois.
([49]) Dans ses réponses au questionnaire budgétaire transmis par le rapporteur pour avis, le MEAE précise que les dépenses relatives aux « missions d’audit et de sécurité » évaluées à 5 millions d’euros en 2025 correspondent essentiellement au déploiement des GSD temporaires.
([50]) C’est notamment le cas de l’ambassade de France à Malte.
([51]) Compagnies républicaines de sécurité, police judiciaire, renseignement, sécurité publique, brigades d’intervention.
([52]) Les frais de déménagement des GSD gendarmes budgétisés à hauteur de 2,6 millions d’euros en 2025 sont pris en charge par la gendarmerie selon ses règles propres, en raison de leur statut militaire qui implique la mise à disposition d’un logement par nécessité absolue de service. En contrepartie, l’obligation leur est faite de loger au plus près voire au sein même des emprises diplomatiques.
([53]) Pour les GSD issus de la police, il s’agit de missions d’une durée initiale de deux ans renouvelable une fois. Les GSD issus de la gendarmerie effectuent des missions de trois à cinq ans.
([54]) Recherche, assistance, intervention, dissuasion.
([55]) À titre d’exemple, deux militaires du GIGN assurent actuellement cette mission à Tunis.
([56]) Projet annuel de performances (PAP) du programme Action de la France en Europe et le monde annexé au projet de loi de finances pour 2023, p. 69.
([57]) Réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur pour avis.
([58]) Ibid.
([59]) Les autorités du pays hôte fournissent parfois une force de sécurisation, cantonnée à l’extérieur des emprises, statique ou mobile, permanente ou ponctuelle. Le dispositif est donc variable selon les pays et les situations rencontrées.
([60]) Une grille d’analyse présentant le volume, les coûts horaires et le temps de travail des vigiles est fournie aux postes lors de la phase d’élaboration du contrat. Des analyses annuelles des prestations sont ensuite réalisées par les postes en liaison avec la DSD.
([61]) S’agissant par exemple du maniement de portails lourds.
([62]) Ambassade, résidence, consulat voire instituts culturels.
([63]) Certaines législations nationales prévoient également des revalorisations annuelles obligatoires ce qui augmente mécaniquement le coût des prestations.
([64]) En 2024, sur 155 pays concernés, la somme des dix contrats les plus élevés atteint 8,8 millions d’euros et représente 38 % de l’ensemble du budget de gardiennage. À titre d’exemple, les États-Unis représentent le pays pour lequel les coûts de gardiennage externalisé (2,1 millions d’euros) sont les plus élevés. La Libye occupe le deuxième rang (1,5 million d’euros) malgré la couverture d’un seul site.
([65]) En autorisations d’engagement.
([66]) Le PCS du consulat d’Oran a également fait l’objet de travaux de rénovation.
([67]) Fils barbelés.
([68]) La moyenne d’âge des véhicules blindés atteint huit ans. Cinquante-trois véhicules ont plus de dix ans et huit d’entre eux ont plus de vingt ans.
([69]) Le délai moyen entre la commande et la livraison des véhicules s’élève à dix-huit mois.
([70]) Huit nouveaux véhicules ont été commandés en 2022 et cinq autres en 2023.
([71]) Soit 2,1 millions d’euros par an hors frais d’acheminement des pièces détachées.
([72]) Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, rapport sur le panorama de la cybermenace, 2023.
([73]) Avis budgétaire de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale portant sur les crédits de la mission Action extérieure de l’État, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021.
([74]) Audition de M. Jean-Noël Barrot, ancien ministre délégué de l’Europe, par la commission d’enquête sur les influences étrangères du Sénat, mai 2024.
([75]) Dans le cadre d’une hausse significative du budget que consacre le MEAE à la cybersécurité, passant de 1,9 million d’euros en 2023 à 3,3 millions d’euros en 2024.