N° 462

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2024.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324)

TOME II

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

AGRICULTURE ET ALIMENTATION

PAR M. Jean-Luc FUGIT

Député

——

 

 

 

 

 

 Voir les numéros : 324 (Tome III, Annexe 3).


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

PREMIÈRE PARTIE : ANALYSE BUDGÉTAIRE

I. En 2025, un SOUTIEN FINANCIER POUR L’agriculture et la forÊt En repli

II. PrÉsentation des crÉdits de la mission « agriculture, alimentation, forÊt et affaires rurales »

A. le programme 149 « compÉtitivitÉ et durabilitÉ de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forÊt »

1. L’action n° 21 « Adaptation des filières à l’évolution des marchés »

2. L’action n° 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole »

3. L’action n° 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles »

4. L’action n° 24 « Gestion équilibrée et durable des territoires »

5. L’action n° 25 « Protection sociale »

6. L’action n° 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois »

7. L’action n° 27 « Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions »

8. L’action n° 29 « Planification écologique »

B. le programme 206 : « sÉcurité et qualitÉ sanitaires de l’alimentation »

C. le programme 215 « conduite et pilotage des politiques de l’agriculture »

D. le programme 381 « allÈgements du coût du travail en agriculture (tode-ag) »

III. le compte d’affectation spÉciale « dÉveloppement agricole et rural » (CASDAR)

seconde partie : L’accompagnement des filières d’élevage face aux crises sanitaires

I. Un accompagnement public des filières d’élevage face aux crises sanitaires indispensable et coûteux

A. L’indemnisation des pertes directes est indispensable pour assurer la résilience des filières

1. L’accompagnement de l’État face à l’influenza aviaire hautement pathogène

2. L’accompagnement de l’État face à la maladie hémorragique épizootique

3. L’accompagnement de l’État face aux fièvres catarrhales ovines

B. Les limites à l’indemnisation des pertes

1. La question de la fiscalité applicable aux indemnités perçues par les éleveurs

2. La difficile évaluation des pertes indirectes

3. Des conséquences en cascade dans les filières

II. La nécessité d’un État stratège pour Renforcer notre souveraineté sanitaire

A. La politique de vaccination doit reposer sur une stratégie d’anticipation pilotée par l’état et en lien avec nos partenaires européens

1. La France doit être à l’initiative d’une mobilisation européenne en matière de recherche sur les pathogènes et pour la constitution de banques de vaccins, d’antigènes et de souches

2. La doctrine d’intervention de l’État pour le financement de la vaccination doit être clarifiée et ambitieuse

B. La gouvernance sanitaire dans le domaine animal doit être élargie pour aboutir à une doctrine de financement partagée

C. la question sanitaire ne peut être pensée indépendamment d’une réflexion sur nos modèles d’exploitation

examen en commission

Liste des propositions

LISTE DES PERSONNES auditionnÉes

 

 

 


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   introduction

Dans un contexte marqué par la succession des crises sanitaires et des aléas climatiques et alors que la question du revenu des agriculteurs reste centrale, l’agriculture doit continuer à s’engager dans une transition lui permettant de s’adapter au changement climatique, tout en assurant le renouvellement des générations. Ce défi nous concerne tous, c’est celui de notre souveraineté alimentaire.

Pour faire face à cet enjeu considérable, les moyens consacrés à l’agriculture demeurent conséquents dans le projet de loi de finances pour 2025. Ils sont néanmoins en diminution par rapport à ceux de l’année en cours et les crédits de la planification écologique sont ceux qui supportent cette réduction.

La première partie de cet avis budgétaire est consacrée à l’analyse des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d’affectation spécial « Développement agricole rural ».

Au terme de cette analyse, votre rapporteur ne peut émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales » que sous plusieurs réserves :

 le Gouvernement doit s’engager à définir une trajectoire de progression des moyens alloués à la planification agro-écologique pour retrouver à un horizon de trois ans un engagement d’un milliard d’euros par an pour accompagner les filières agricoles et agroalimentaires dans la transition agro-écologique,

 les crédits alloués au plan de souveraineté de la filière Fruits et légumes doivent être sanctuarisés en 2025, en dépit de la diminution des crédits alloués à la planification écologique,

 toute diminution du plafond d’emplois de l’Office national des forêts doit être exclue.

Par ailleurs, parce qu’il s’agit d’un sujet au cœur de l’actualité, qui mérite une réflexion sur la stratégie menée par l’État et qui revêt une dimension budgétaire importante, votre rapporteur a souhaité mettre en avant, dans une seconde partie thématique, la problématique de l’accompagnement par l’État des filières d’élevages face aux crises sanitaires. Il formule des préconisations reprises en annexe au présent rapport dont, à court terme, l’accompagnement financier par l’État d’une campagne de vaccination contre la FCO 8, pour les bovins et les ovins, afin d’éviter une reprise de l’épidémie au printemps 2025.

 

 


 —  1  —

   PREMIÈRE PARTIE :
ANALYSE BUDGÉTAIRE

I.   En 2025, un SOUTIEN FINANCIER POUR L’agriculture et la forÊt En repli

Les crédits de l’enveloppe allouée à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » s’élèvent dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 (PLF 2025) à 4,6 milliards d’euros (Md€) en autorisations d’engagement (AE) et 4,4 Md€ en crédits de paiement (CP). Le soutien financier aux politiques agricoles dans ce projet de loi de finances se traduit également par des crédits inscrits au sein d’autres missions budgétaires, dont il est utile de faire rapidement état pour mesurer l’effort global en soutien à l’agriculture. Ainsi, au côté de la mission « Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales », le soutien budgétaire aux politiques publiques agricoles passe également par :

– les crédits consacrés à l’enseignement agricole, avec le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricole », doté de 433,6 M€ en autorisations d’engagement et 431,5 M€ en crédits de paiement, et le programme 143 « Enseignement technique agricole », qui enregistre 1,73 Md€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement, soit un total de près de 2,1 Md€ ;

– le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar), qui bénéficie d’une enveloppe de 146 M€ ;

– le plan « France 2030 », qui finance le fonds entrepreneur du vivant destiné à créer un effet de levier pour accélérer la transition vers l’agroécologie des exploitations agricoles et des filières agricoles, comprend un montant prévisionnel de 195 M€ en crédits de paiement pour couvrir la seconde tranche de souscription.

Enfin, pour 2025, il faut également mentionner les financements européens qui s’élèvent à 9,4 Md€ et l’ensemble des dispositifs d’allégements sociaux et fiscaux et de dépenses fiscales évalués à 9 Md€.

Ainsi, au total, les moyens alloués au développement de l’agriculture, de la forêt et de l’agroalimentaire mis en place par le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire atteignent 25,3 Md€, dont 15,9 Md€ de crédits nationaux. Ce montant n’intègre pas l’action des collectivités territoriales, notamment des celle des régions qui ont vu leurs prérogatives renforcées dans le cadre de la mise en œuvre de la politique agricole commune (PAC) sur la période 2023-2027.

Dans le projet de loi de finances pour 2025, sur l’ensemble du périmètre du ministère de l’agriculture (mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », Casdar et programmes des enseignements techniques et supérieurs agricoles), la baisse de crédits représente 288 M€ (- 4 %). Cette diminution mesurée des crédits budgétaires s’accompagne de mesures fiscales en faveur des agriculteurs qui avaient été promises par le précédent Gouvernement au moment de la crise agricole du début de l’année 2024.

CrÉdits nationaux du ministÈre de l’agriculture et de la souverainetÉ alimentaire pour l’annÉe 2025

(En euros)

Numéro de programme et intitulé

AE

CP

149

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

 2 511 950 264

 2 458 472 665

206

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

 926 923 512

 860 481 527

215

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

 732 254 065

 668 189 597

381

Allègements du coût du travail en agriculture

 448 500 000

 448 500 000

Sous-total Mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

 4 619 627 841

 4 435 643 789

142

Enseignement supérieur et recherche agricoles

 433 619 971

 431 527 757

143

Enseignement technique agricole

 1 732 853 134

 1 731 053 134

775 & 776

Compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural »

 146 000 000

 146 000 000

TOTAL

 6 932 100 946

 6 744 224 680

II.   PrÉsentation des crÉdits de la mission « agriculture, alimentation, forÊt et affaires rurales »

Dotée de 4,6 Md€ en autorisations d’engagement et 4,4 Md€ en crédits de paiement, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » connaît une diminution de ses crédits par rapport aux ouvertures en loi de finances initiale pour 2024 (- 13 % en autorisations d’engagement et - 6 % en crédits de paiement). Ces crédits demeurent à un niveau sensiblement supérieur (de l’ordre de 15 %) à celui du budget 2023, avant leur nette augmentation dans le budget 2024.

Cette diminution s’explique principalement par la réduction significative des crédits consacrés à la planification écologique au sein des programmes 149 « Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt » et 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation ».

A.   le programme 149 « compÉtitivitÉ et durabilitÉ de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forÊt »

CrÉdits du programme 149
« compÉtitivitÉ et durabilitÉ de l’agriculture, de l’agroalimentaire, et de la forÊt »

(En euros)

Numéro et intitulé
du programme et de l’action

AE

CP

Ouvertes en LFI
2024

Demandées pour
2025

Ouverts en

LFI
2024

Demandés pour
2025

149

Compétitivité et durabilité
de l’agriculture, de
l’agroalimentaire et de la
forêt

 3 167 360 200

 2 511 950 264

 2 726 587 303

2 458 472 665

Variation (en %)

- 20,7 %

- 9,8 %

21

Adaptation des filières à
l’évolution des marchés

 264 847 420

 251 564 254

 265 989 648

 252 169 648

22

Gestion des crises et des aléas
de la production agricole

 284 310 502

 304 010 503

 282 172 527

 302 872 528

23

Appui au renouvellement
et à la modernisation
des exploitations agricoles

 111 404 993

 110 904 993

 123 194 993

 126 525 487

24

Gestion équilibrée et durable
des territoires

 548 371 551

 520 671 551

 526 494 297

 519 431 876

25

Protection sociale

 155 420 000

 163 920 000

 155 420 000

 163 920 000

26

Gestion durable de la forêt
et développement de la
filière boit

 294 164 024

 295 431 309

 301 474 128

 303 803 814

27

Moyens de mise en œuvre des
politiques publiques et gestion
des interventions

 477 841 710

 492 838 807

 477 841 710

 492 838 807

29

Planification écologique

1 031 000 000

 372 608 847

 594 000 000

 296 910 505

Le programme 149 relève de la responsabilité de la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE). Il vise à structurer et soutenir les filières agricoles et forestières, sécuriser la chaîne alimentaire et son approvisionnement ainsi qu’à développer l’activité économique et l’emploi. Il porte les cofinancements nationaux des mesures relevant du second pilier de la politique agricole commune (PAC) dont l’État est responsable : la gestion des interventions du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) de nature non surfacique, notamment les aides à l’investissement et à l’installation, a été transférée aux régions en 2023.

Les crédits du programme 149 représentent 2,51 Md€ en autorisations d’engagement et 2,46 Md€ en crédits de paiement dans le budget 2025. Il s’agit du programme le plus important en termes de dotation financière de la mission. Ces montants sont en diminution marquée par rapport à l’année dernière (- 20 % en autorisations d’engagement et - 9,9 % en crédits de paiement), après une forte augmentation en 2023 (+ 50 % en autorisations d’engagement et + 29,79 % en crédits de paiement).

Le fait le plus notable de ce programme réside dans la réduction très importante des crédits de l’action n° 29 « Planification écologique » dotée de 372,6 M€ en autorisations d’engagement et 296,9 M€ en crédits de paiement en 2025 (contre respectivement 1,03 Md€ et 594 M€, en 2024).

1.   L’action n° 21 « Adaptation des filières à l’évolution des marchés »

L’action n° 21 représente 10 % du budget du programme, avec 251,6 M€ en autorisations d’engagement et 252,2 M€ en crédits de paiement (en baisse de 5 % par rapport à l’année 2023). Cette action vise à favoriser l’adéquation de l’offre française avec la demande des marchés.

Les dépenses les plus importantes concernent les territoires ultramarins. Elles concernent d’abord les aides à la filière canne à sucre (143,40 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), notamment dans le contexte de la libéralisation du marché du sucre et de la suppression des quotas sucriers au sein de l’Union européenne (UE) en 2017.

Par ailleurs, l’action 21 finances diverses interventions en faveur des filières ultramarines (62,4 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit - 1,5 % par rapport à 2024). Ces crédits permettent essentiellement de compléter le financement des mesures concernant les primes animales, les importations d’animaux vivants, la structuration de l’élevage et la diversification des productions végétales dans le cadre des plans de souveraineté alimentaire des territoires.

Les évènements survenus récemment en Martinique rappellent que la vie chère est toujours une préoccupation de premier plan pour nos concitoyens ultramarins. Dans ce contexte, votre rapporteur est convaincu que l’effort doit être accentué sur la structuration des filières locales. Ainsi, il proposera d’augmenter les crédits de cette action afin d’abonder par des crédits nationaux un régime d’aide européen, le « régime spécial d’approvisionnement », qui permet de prendre en charge partiellement le coût du fret pour l’alimentation animale pour renforcer la compétitivité de l’élevage local.

Cette action alimente également le budget de FranceAgriMer, à hauteur de 20,5 M€ en autorisations d’engagement et 20,6 M€ en crédits de paiement (en baisse de près de 16 %) pour le financement d’actions de soutien à l’organisation et au développement des filières et de la connaissance des marchés.

L’action n° 21 permet également d’alimenter le Fonds Avenir Bio, doté de 13 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, auxquels s’ajoute un abondement de 5 M€ par l’action 29 « Planification écologique », afin de permettre à l’Agence Bio d’atteindre l’objectif, entériné par le Gouvernement précédent lors du lancement du programme Ambition bio 2027, de 18 % de surface agricole utile bio à l’horizon 2027.

Le fonds pour les industries agroalimentaires, doté de 1,9 M€ en autorisations d’engagement et 2,4 M€ en crédits de paiement (stable) émarge également à cette action.

Il faut également noter le soutien à diverses actions internationales, pour un montant cumulé de 10,3 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Elles financent notamment des conventions annuelles avec Business France, la promotion de l’exportation de produits français ou la coopération internationale dans les domaines de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux.

2.   L’action n° 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole »

L’action n° 22 correspond à 12,1 % du budget du programme 149, avec 304 M€ en autorisations d’engagement et 302,9 € en crédits de paiement. Les crédits de cette action augmentent de 7 % par rapport à l’année en cours, ce qui correspond à la montée en charge de la réforme de l’assurance récolte en application de la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d’orientation relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

En 2023, des crédits budgétaires à hauteur de 255,5 M€ ont financé le nouveau système assurantiel, en parallèle des 60 M€ de recettes supplémentaires de la taxe affectée au Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) par rapport au rendement de 2021. En 2024, ces crédits nationaux ont été abondés de 20 M€ supplémentaires et ils le sont à nouveau en 2025 pour atteindre 295,5 M€, afin de permettre le financement de la montée en charge de la réforme.

Ces ressources viennent compléter l’enveloppe annuelle de crédits Feader (185 M€) pour atteindre un niveau de financement du FNGRA maximal de 600 M€ en 2025. Cette enveloppe permet de financer l’assurance récolte mais également la participation de l’État aux programmes du Fonds de mutualisation des risques sanitaires et environnementaux (FMSE).

De façon plus subsidiaire, des crédits sont également accordés au dispositif de soutien des exploitations en difficulté Agridiff, à hauteur de 6,8 M€ en autorisations d’engagement et 5,6 M€ en crédits de paiement (montants quasiment stables). Enfin, le Fonds d’allègement des charges (FAC) est abondé à hauteur de 1,70 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un montant similaire au projet annuel de performance (PAP) de l’année précédente. Ce fonds finance un dispositif payé par FranceAgriMer de soutien des agriculteurs dont l’exploitation est fragilisée par une crise conjoncturelle.

3.   L’action n° 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles »

L’action n° 23, qui représente 4,4 % du budget du programme 149, avec 110,9 M€ en autorisations d’engagement et 126,5 M€ en crédits de paiement, est principalement constituée de la compensation du transfert des aides non surfaciques de la PAC dans le cadre de la programmation 2023-2027. Il s’agit principalement de la « dotation aux jeunes agriculteurs » (DJA) et des aides à la modernisation des exploitations pour lesquelles l’État ne prend en charge que le versement à Mayotte et les restes à payer pour les engagements pris avant 2023. Les régions bénéficient donc d’une compensation de 100 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement, budgétée dans le cadre d’une sous-action « Transfert aux collectivités » de la présente action n° 23.

4.   L’action n° 24 « Gestion équilibrée et durable des territoires »

Visant à favoriser l’attractivité et la durabilité des territoires ruraux, l’action n° 24 représente 20,7 % du budget du programme 149, avec 520,6 M€ en autorisations d’engagement et 519,4 M€ en crédits de paiement. Ces montants reflètent des baisses respectives de 5 % et 1,3 % par rapport à l’année précédente.

Le premier poste de dépenses concerne les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), qui représentent 384,50 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un montant stable par rapport au PAP de l’année précédente.

Les crédits des mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) et aides à l’agriculture biologique atteignent 90,1 M€ en autorisations d’engagement et de 87 M€ en crédits de paiement. Cela revient à une baisse de 23 % en autorisations d’engagement et de 6,5 % en crédits de paiement par rapport au PAP de l’année dernière.

Les Maec sont principalement financées par les régions et les agences de l’eau dans le cadre de la PAC 2023-2027. Pour cette deuxième année de programmation une « légère baisse du niveau de contractualisation en Maec est à anticiper comparée au PLF 2023 », indique le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2025.

La sous-action Animation Maec et Bio dotée de 6,60 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement permet de financer pour les Maec la construction, l’animation, le suivi et l’évaluation des projets agroenvironnementaux et climatiques (Paec) par les opérateurs. Les diagnostics agroécologiques des exploitations, plans de gestion et formations prévus dans les cahiers des charges des Maec peuvent également être pris en charge.

S’agissant de l’agriculture biologique des actions de formation et de mise en réseau des acteurs de la filière sont financées par cette sous-action.

La sous-action « Pastoralisme et lutte contre la prédation » demeure soutenue à hauteur de 14,4 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

La sous-action « Autres soutiens aux syndicats » est dotée à hauteur de 14,50 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un niveau stable depuis plusieurs années.

L’action n° 24 prévoit également les crédits relatifs aux « Actions nationales en faveur du cheval » (3,9 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un montant en léger recul).

L’action n° 24 permet enfin le financement de crédits pour le soutien à la politique foncière (2,10 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un montant stable), l’hydraulique agricole (1,80 M€ en autorisations d’engagement et 3,70 M€ en crédits de paiement) et l’animation et le développement rural national et régional (1,8 M€ en autorisations d’engagement et 3,7 M€ en crédits de paiement, un montant en augmentation).

5.   L’action n° 25 « Protection sociale »

Avec 163,9 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, l’action n° 25 a pour objectif de financer des mesures d’exonérations de charges sociales ainsi que des actions relatives à la réglementation et la sécurité au travail. Son budget est en hausse de 5,4 % par rapport à l’année en cours.

Les exonérations de charges sociales patronales pour les employeurs qui embauchent des travailleurs occasionnels sont financées à hauteur de 163,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Il s’agit d’une compensation par l’État des moindres recettes perçues par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) et par l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (Unedic). Plus précisément, il s’agit du surplus d’exonération (« plateau » d’exonération totale entre 1 et 1,25 Smic contre 1,2 Smic précédemment, ce qui explique la hausse de crédits alloués) qui est financé par ces crédits. Une autre partie plus significative de l’exonération est compensée dans le cadre du programme 381 (voir infra).

Les crédits concernant la réglementation et la sécurité au travail atteignent 420 100 € en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Ils financent la réalisation d’études prospectives et la mise en œuvre de mesures d’améliorations techniques et organisationnelles afin d’améliorer la prévention des risques professionnels des actifs agricoles. Ces mesures sont intégrées au quatrième plan « santé au travail » (2021-2025) du ministère du travail.

6.   L’action n° 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois »

L’action n° 26 dispose d’un budget de 295,4 M€ en autorisations d’engagement et de 303,8 M€ en crédits de paiement, stable par rapport à 2024.

La principale ligne budgétaire contribue au versement compensateur et à la contribution exceptionnelle au profit de l’Office national des forêts (ONF), avec 178,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ce budget est stable. Des crédits sont également destinés aux missions d’intérêt général (MIG) confiées à l’ONF, représentant 50,2 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (stable). Les MIG sont les missions prescrites par l’État à l’ONF au-delà de la gestion courante des forêts publiques afin d’amplifier son action sur des sujets prioritaires, notamment ceux en lien avec le changement climatique (défense des forêts contre les incendies, restauration des terrains en montagne, adaptation des forêts, défense de la biodiversité, etc.). Leur niveau est maintenu en 2025 après une nette revalorisation en 2024 pour adapter la forêt au changement climatique.

En revanche, la réduction de 95 ETPT appliquée au plafond d’emploi de l’ONF est inacceptable. Alors que le précédent Gouvernement avait décidé de maintenir le plafond d’emploi de l’ONF sur les deux derniers exercices en écartant l’application du contrat État-ONF, la Cour des comptes vient de saluer cette stabilité mise en place en 2023 et 2024, constatant que les effectifs de l’établissement étaient désormais insuffisants pour lui permettre de mener ses missions, après vingt ans de baisse continue, passant de 12 500 ETPT en 2000 à 7 600 en 2022.

L’application de la réduction de 95 ETPT viendrait faire peser un risque important sur la capacité de l’ONF à agir pour la transition écologique. L’ONF ne pourra plus supprimer d’emplois sans dégrader sa capacité à mener ses missions prioritaires confiées par l’État, d’une part, ainsi que le service attendu par les collectivités, d’autre part. Le maintien des effectifs est indispensable pour que l’ONF puisse faire face aux crises climatiques, exploiter et valoriser un volume croissant de bois issus de dépérissements, préserver son maillage territorial et garantir l’approvisionnement de la filière. Votre rapporteur soutiendra donc les amendements visant à faire obstacle à l’application de cette réduction du plafond d’emploi de l’ONF.

La gestion forestière est par ailleurs soutenue à travers diverses sous-actions : le financement du Centre national de la propriété forestière (CNPF) à hauteur de 17 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (en légère hausse) ; le financement de la restauration des terrains en montagne à hauteur de 8,3 M€ en autorisations d’engagement et de 9,4 M€ en crédits de paiement (stable par rapport à l’année en cours) ; la défense des forêts contre les incendies (DFCI) à hauteur de 16,10 M€ en autorisations d’engagement et de 17,40 M€ en crédits de paiement (stable par rapport à l’année en cours).

Enfin, le développement de la filière bois est financé, en premier lieu, via l’alimentation du fonds stratégique forêt bois à hauteur de 17 M€ en autorisations d’engagement et de 23 M€ en crédits de paiement (en légère baisse par rapport à l’année en cours). En outre, les études et recherches, notamment menées par l’Institut technologique Forêt cellulose bois‑construction ameublement (FCBA), sont dotées de 7,1 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (stable par rapport à l’année en cours).

7.   L’action n° 27 « Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions »

Cette action dispose d’une dotation de 492,8 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, c’est‑à-dire 19,6 % du budget du programme. Ce montant est en hausse de 3,1 % par rapport à 2024.

Les crédits de cette action consistent principalement en des subventions pour fonctionnement et pour investissement aux opérateurs de l’État : 142,3 M€ + 46,2 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour l’Agence de services et de paiement (ASP) (+ 11,7 % par rapport à 2024 pour financer d’important développement informatique dans le système de gestion de la PAC) ; 95,8 M€ + 8,1 M€ ([1]) en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour FranceAgriMer (stable) ; 33,70 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) (stable) ; 18,20 M€ pour l’Institut national de l’origine et de la qualité (Inao) (stable) ; 5,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour l’Office de développement de l’économie agricole outre-mer (Odeadom) (stable) et 2,9 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour l’Agence Bio (stable dès lors que les 5 M€ en moins correspondant aux actions de communication de l’Agence bio sont transférés sur l’action 29).

Par ailleurs, des dotations sont consacrées à l’apurement communautaire (125 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, stable), qui vise à gérer les dépenses imprévisibles du programme, en particulier les refus d’apurement communautaires susceptibles d’être notifiés à la Commission européenne, et à « d’Autres moyens alloués à la mise en œuvre des politiques publiques » qui sont destinés à l’Institut géographique national (IGN) pour l’actualisation du registre parcellaire graphique (14,90 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, stable).

8.   L’action n° 29 « Planification écologique »

Cette action, créée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, regroupe les crédits consacrés à la planification écologique. Elle est dotée de 372,6 M€ en autorisations d’engagement et 296,9 M€ en crédits de paiement, ce qui représente une diminution de 64 % en autorisations d’engagement et 50 % en crédits de paiement.

De l’aveu même du ministère chargé de l’agriculture la maquette de cette action n’a pas pu être retravaillée dans le délai imparti pour reconfigurer la répartition de ces crédits lourdement amputés. La répartition inscrite dans le projet annuel de performance n’est donc pas fiable, mais elle laisse néanmoins apparaître quelques tendances.

La sous-action « Planification écologique Forêt » demeurerait la plus substantielle malgré des moyens divisés par deux par rapport à 2024 (228 M€ en autorisations d’engagement et 195 M€ en crédits de paiement). Elle doit financer des actions qui concernent tous les maillons de la filière bois et qui sont relatives à la prévention des incendies, à la reconstitution des forêts touchées par des sinistres tels que les attaques de scolytes ou les incendies, à l’adaptation des forêts identifiées comme vulnérables face aux effets du changement climatique, à l’amélioration de la qualité des peuplements forestiers pour améliorer leur potentiel de puits de carbone ou encore à l’optimisation des procédés de transformation pour une industrie du bois plus compétitive. Des actions spécifiques pour la structuration de la filière bois outre‑mer sont également prévues.

Le « Fonds en faveur de la souveraineté alimentaire et des transitions » verrait également ses moyens quasiment divisés par deux avec 104,6 M€ en autorisations d’engagement et 61,6 M€ en crédits de paiement. Ces crédits sont destinés à la mise en œuvre des plans de souveraineté des filières et à l’accompagnement des agriculteurs face au changement climatique.

À ce stade, le pacte en faveur de la haie verrait son enveloppe très fortement réduite. Alors qu’il était doté de 110 M€ en autorisations d’engagement et 45 M€ en crédits de paiement en 2024, seuls 30 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sont prévus en 2025.

L’action « Planification écologique » finance également à hauteur de 5 M€ les campagnes de communication menées par l’Agence bio et consacre 5 M€ à l’abondement du Fonds avenir bio (action n° 21) qui vise à soutenir des projets collectifs de développement des filières biologiques françaises.

Le projet annuel de performance ne fait plus mention ni du « Plan protéines », qui était doté de 100 M€ en autorisations d’engagement et 65 M€ en crédits de paiement en 2024, ni du diagnostic carbone. De même, en lien avec l’abandon de la réduction de l’avantage fiscal sur le gazole non routier, la sous-action « Décarbonation en agriculture », dotée de 80 M€ en 2024, a disparu.

La lisibilité de l’action publique en matière d’accompagnement des filières pour la transition agro-écologique pâtit de cette évolution erratique de l’action « Planification écologique ». Les acteurs économiques des filières amont et aval prêts à s’engager dans cette transition ont pourtant besoin de visibilité. C’est notamment le cas des acteurs de la filière Fruits et légumes qui se sont engagés dans un Plan de souveraineté dont les moyens ne peuvent être amputés un an seulement après son lancement. Au titre du programme 149, le dispositif en faveur de la rénovation des vergers devrait même être amplifié pour renverser la tendance de baisse de la production française au profit des importations.

L’enveloppe définie en 2024 pour l’action n° 29 du programme 149 était destinée à envoyer un signal fort aux filières et une dynamique a incontestablement pu être créée. Certes, le temps nécessaire pour monter les dispositifs de soutiens et mobiliser les acteurs rendait impossible la consommation de l’ensemble des crédits ([2]) et l’enveloppe de la planification écologique a permis au ministère chargé de l’agriculture de piloter les crédits de la mission notamment pour alimenter les fonds de crise. Mais les coupes opérées sur cette action, sans que le projet annuel de performances ne donne d’indication sur la manière dont pourront être déployés ces crédits, créent un climat d’anxiété pour les filières qui risque d’être néfaste à la conduite des transitions indispensables.

La nécessité d’avancer rapidement dans la transition agro-écologique est largement partagée par l’ensemble des acteurs. La diminution drastique des crédits qui lui sont consacrés est inquiétante de ce point de vue. Elle doit conduire à revoir la doctrine d’emploi de ces crédits pour sortir d’une logique d’ouverture de guichets parfois concurrents et qui ne pourront en tout état de cause pas tous être abondés. Les dispositifs devront être reconfigurés pour s’assurer qu’ils financent efficacement l’accompagnement de projets de transition des systèmes d’exploitation.

Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales » ne peuvent recevoir un avis favorable qu’à la condition que le Gouvernement s’engage sur une trajectoire de progression des moyens alloués à la planification écologique pour retrouver à un horizon de trois ans un engagement d’un milliard d’euros par an pour accompagner les filières agricoles et agroalimentaires dans la transition agro-écologique et que les crédits alloués au plan de souveraineté de la filière Fruits et légumes soient sanctuarisés en 2025.

B.   le programme 206 : « sÉcurité et qualitÉ sanitaires de l’alimentation »

Le programme 206, conduit par la direction générale de l’alimentation (DGAl), poursuit trois objectifs : favoriser le changement de pratiques afin de préserver la santé publique et l’environnement ; évaluer, prévenir et réduire les risques sanitaires à tous les stades de la production ; s’assurer de la réactivité et de l’efficience du système du contrôle sanitaire.

CRÉDITS DU PROGRAMME 206
« SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L’ALIMENTATION »

(En euros)

Numéro et intitulé
du programme et de l’action

AE

CP

Ouvertes en LFI
2024

Demandées pour
2025

Ouverts en LFI
2024

Demandés pour
2025

206

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

 1 035 116 696

 926 923 512

 904 703 711

 860 481 527

Variation (en %)

- 10,5 %

- 4,9 %

01

Santé, qualité et protection des végétaux

 36 181 243

 34 473 200

 34 947 383

 34 304 200

02

Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal

 127 973 619

 122 920 670

 124 345 666

 122 920 670

03

Sécurité sanitaire de l’alimentation

 118 722 635

 112 272 579

 93 171 463

 108 272 579

04

Actions transversales

 101 008 557

 126 086 557

 101 008 557

 118 632 564

05

Élimination des cadavres et des sous-produits animaux

 4 000 000

 4 000 000

 4 000 000

 4 000 000

06

Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation

 391 320 142

 359 677 352

 391 320 142

 359 677 352

08

Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

 5 910 500

 6 810 500

 5 910 500

 6 810 500

09

Planification écologique - Stratégie de réduction de l’utilisation des produits

phytosanitaires

 250 000 000

 160 682 654

 150 000 000

 105 863 662

 

Le budget du programme 206 est en baisse de 10,5 % en autorisations d’engagement et de 4,9 % en crédits de paiement, avec des crédits à hauteur de 927 M€ en autorisations d’engagement et de 860 M€ en crédits de paiement. La baisse concerne principalement l’action 9 « Planification écologique – Stratégie de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires » (- 35 % en autorisations d’engagement et - 29 % en crédits de paiement).

L’action n° 01 « Santé, qualité et protection des végétaux » est financée à hauteur de 34,4 M€ en autorisations d’engagement et de 34,3 M€ en crédits de paiement, c’est-à-dire 3,7 % du budget de ce programme. La mise en œuvre de cette action s’appuie sur le droit européen et les dispositions du code rural et de la pêche maritime (notamment les réglementations relatives aux organismes génétiquement modifiés, aux produits phytopharmaceutiques et aux pesticides). Cette action finance la surveillance et la lutte contre les organismes nuisibles pour les végétaux, par exemple le Plum pox virus (sharka), maladie virale dévastatrice pour les arbres fruitiers du genre Prunus, la flavescence dorée (maladie de la vigne) ou encore l’ambroisie trifide.

L’action n° 02 « Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal » représente 13,3 % du budget du programme 206 avec 122,9 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. La baisse de 4 % en autorisations d’engagement et de 1 % en crédits de paiement des moyens consacrés à cette action s’explique par une mesure technique consistant à imputer l’ensemble des dépenses d’investissement relatives aux systèmes d’information de l’alimentation sur l’action n° 04 « Actions transversales », ce qui doit permettre un meilleur pilotage des projets informatiques.

Pour le reste, dans un contexte de crises sanitaires à répétition, les moyens consacrés à cette action demeurent à un niveau stable pour la gestion des maladies animales, la gestion des encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles, les plans d’urgence contre les épizooties et les visites sanitaires, le contrôle de l’alimentation animale et du médicament vétérinaire.

De même, comme en 2024, une ligne d’environ 30 M€ est prévue pour le paiement des indemnisations versées aux éleveurs dont les animaux font l’objet des abattages totaux ou partiels de troupeaux ordonnés par l’État, à la suite de la confirmation officielle d’un foyer d’une maladie réglementée.

Il ne fait néanmoins aucun doute que cette présentation est en trompe-l’œil au regard des épizooties qui sévissent actuellement sur le territoire ou qui le menacent. Elles impliquent une surveillance renforcée et surtout des campagnes de vaccination prises en charge en tout ou partie par l’État qui conduisent à amplifier largement l’enveloppe initialement prévue. Ainsi, en 2024, le coût de la campagne de vaccination contre la MHE (9,24 M€) a été couvert par des redéploiements au sein des actions du programme 206 (dé-priorisation des crédits relatifs à la planification écologique et redéploiement des reports de crédits généraux).

L’action n° 03 « Sécurité sanitaire de l’alimentation » dispose d’une enveloppe de 112,3 M€ en autorisations d’engagement et 108,3 M€ en crédits de paiement. Cette action finance des actions d’inspection sanitaire dans les abattoirs et les autres établissements de la chaîne alimentaire, de lutte contre les zoonoses dans la chaîne alimentaire, d’appui à la gestion des risques sanitaires liés aux aliments ou encore de surveillance des zones conchylicoles et de la contamination des denrées et la gestion des alertes.

L’action n° 04 « Actions transversales » représente 13,3 % des crédits du programme 206 avec 126 M€ en autorisations d’engagement et 118,6 M€ en crédits de paiement, traduisant une augmentation de 8,6 % afin de soutenir les moyens de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et de financer des investissements au profit du système d’information de l’alimentation (Sial).

L’Anses est une agence hautement stratégique et sans cesse plus sollicitée, non seulement dans le domaine de la santé animale, mais aussi par ses autres ministères de tutelle, notamment celui en charge de la santé. Le bon fonctionnement de l’Anses est indispensable à l’amélioration de la connaissance et à l’émergence de solutions pour la lutte contre les maladies animales.

Ses recettes sont constituées, à hauteur des deux tiers, par des subventions pour charges de service public (SCSP) versées à partir de quatre programmes budgétaires de ses différents ministères de tutelle ([3]). Le solde provient de recettes de fiscalité affectée pour ses activités d’évaluation et d’autorisation de produits avant leur mise sur le marché (produits phytopharmaceutiques, produits biocides et médicaments vétérinaires) et de recettes « fléchées ». Un travail sur l’amélioration du rendement de ces taxes est en cours et votre rapporteur encourage le Gouvernement à le faire aboutir rapidement.

S’agissant de la subvention pour charges de service public au titre du programme 206, elle reste fixée au même niveau qu’en 2024, à savoir 76,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. La SCSP du programme 206 représente deux tiers du total des SCSP alimentant l’Anses qui se trouverait alors confrontée à une problématique d’« effet de ciseau » entre ses dépenses et ses recettes si le projet de loi de finances était voté en l’état. De même, la réduction de 6 ETP du plafond d’emploi de l’Agence, envisagée dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances, n’est pas soutenable au regard des attentes exprimées par l’État et de la dynamique des missions qui lui sont confiées et qui devrait encore s’amplifier. Le rôle central de cette agence pour que l’État puisse avoir une approche plus stratégique de la prévention et de la lutte contre les maladies animales ([4]) incite votre rapporteur à proposer des amendements visant à donner à l’Anses les moyens de continuer à exercer ses missions.

S’agissant du développement du Sial, l’ensemble des crédits le concernant ayant été rapatriés dans cette action, l’action n° 4 voit mécaniquement sa dotation augmenter de manière sensible. Il n’en reste pas moins que les avancées du projet de système informatique national d’enregistrement des mouvements des animaux (Sinema), outil de traçabilité des animaux, que traduit le projet de budget (12,9 M€ en autorisations d’engagement et 2,1 M€ en crédits de paiement) est un élément positif pour le bon fonctionnement des dispositifs de prévention et de lutte contre les maladies animales. Le projet annuel de performance devrait toutefois être complété pour préciser si cette enveloppe permet de financer un système interconnecté entre tous les acteurs et entièrement dématérialisé ([5]).

L’action n° 05 « Élimination des cadavres et des sous-produits animaux » est dotée de 4 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un montant identique à l’année en cours. Cette action consiste en l’élimination de cadavres d’animaux à travers le service public de l’équarrissage.

L’action n° 06 « Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation » est dotée de 359,7 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Les effectifs du programme 206 sont regroupés dans cette action qui connaît une diminution de 8 % par rapport à 2024.

L’action n° 08 « Qualité de l’alimentation et offre alimentaire » enregistre une augmentation des moyens qui lui sont affectés, avec 6,8 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Mise en œuvre par le programme national pour l’alimentation (PNA), cette action porte principalement sur l’amélioration de la qualité de l’offre alimentaire, l’éducation à l’alimentation de la jeunesse, la lutte contre le gaspillage alimentaire et l’ancrage territorial et patrimonial de l’alimentation. L’achèvement de la construction de la plateforme ma‑cantine.agriculture.gouv.fr qui doit permettre d’accompagner les acteurs de la restauration collective dans la mise en œuvre les dispositions de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018, dite loi « Égalim », pour une alimentation plus saine et plus durable (servir 50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits issus de l’agriculture biologique) explique l’augmentation des crédits sur cette action.

Cette action finance également l’accompagnement des projets alimentaires territoriaux (PAT), grâce à des crédits finançant l’appel à projets national du programme national pour l’alimentation (PNA).

L’action n° 9 « Planification écologique - Stratégie de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires », créée par la loi de finances initiale pour 2024, voit ses crédits diminuer sensiblement. Elle est dotée de 160,6 M€ en autorisations d’engagement (- 35 %) et 105,5 M€ en crédits de paiement (- 29 %).

Cette action finance le plan « Ecophyto 2030 » et notamment le plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada), doté de 145 M€ en autorisations d’engagement et 73,6 M€ en crédits de paiement.

La sécurisation de l’enveloppe consacrée au Parsada au sein d’un budget de la planification écologique en net recul est indispensable. Ces crédits permettront de financer plusieurs appels à manifestation d’intérêt pour dégager le plus rapidement possible des solutions opérationnelles pour nos agriculteurs.

Le programme d’aide à l’investissement en matériels visant la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires et la transition agro-écologique ne fera pas l’objet de nouveaux engagements de crédits en 2025. L’appel à manifestations d’intérêts lancé en 2024 a connu un succès réel, qui témoigne de la volonté des agriculteurs de s’engager dans le renouvellement de leurs outils de production. À l’avenir, le soutien à l’investissement en agroéquipements devra d’une manière ou d’une autre, être pérennisé pour permettre à nos agriculteurs d’engager leurs exploitations dans la transition agro-écologique. Peut-être faudra-t-il redéfinir les paramètres de cet accompagnement pour réserver l’aide aux projets d’exploitations construits et accompagnés et éviter les effets d’aubaine ou d’optimisation qui ne servent pas la transition.

Comme pour l’action n° 29 du programme 149, outre l’inquiétude qui résulte de la baisse drastique des crédits de la planification écologique, le niveau de détail des mesures financées avec cette action reste insatisfaisant dans le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances.

C.   le programme 215 « conduite et pilotage des politiques de l’agriculture »

Le programme 215 intervient en appui à l’ensemble des services du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire consacrés à la mise en œuvre des politiques publiques portées par le ministère, à l’exception de celles relevant du programme 206 (sécurité sanitaire) et 143 (enseignement). Le programme 215 regroupe essentiellement les moyens en personnel et en fonctionnement de l’administration centrale et de certains services déconcentrés. Il est doté de 732,30 M€ en autorisations d’engagement et 668,2 M€ en crédits de paiement, ce qui représente une hausse de 2 % en autorisations d’engagement et une diminution de 4,2 % en crédits de paiement par rapport à 2024.

CRÉDITS DU PROGRAMME 215
« CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’AGRICULTURE »

(En euros)

Numéro et intitulé
du programme et de l’action

AE

CP

Ouvertes en LFI
2024

Demandées pour
2025

Ouverts en LFI
2024

Demandés pour
2025

215

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

 717 213 785

 732 254 065

 697 412 900

 668 189 597

Variation (en %)

+ 2 %

- 4,2 %

01

Moyens de l’administration centrale

 222 877 724

 182 370 570

 228 978 050

 183 722 523

02

Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique

 18 830 499

 13 468 347

 18 830 499

 12 468 347

03

Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (et de la mer)

 349 453 781

 380 581 476

 349 658 017

 380 785 714

04

Moyens communs

 126 051 781

 155 833 672

 99 946 334

 91 213 013

L’action  01 « Moyens de l’administration centrale » représente 24,9 % du budget du programme 215 avec 182,40 M€ en autorisations d’engagement et 183,7 M€ en crédits de paiement – soit une diminution de 18,4 % en autorisations d’engagement et de 19,7 % en crédits de paiement par rapport à l’année en cours.

Ces crédits concernent principalement des dépenses de personnel de l’administration centrale. Celles-ci diminuent du fait notamment d’une mesure de transfert appliquée dans le cadre de la mise en place des centres de gestion financière (CGF) (près de 3 M€ en moins) et de mesures de restructuration concernant essentiellement les services du ministère chargé de l’agriculture affectés par le transfert aux régions de l’instruction des mesures non surfaciques de la politique agricole commune (13,8 M€).

Les dépenses hors titre 2 de l’action n° 1 concernent les loyers, la formation continue et l’action sociale. Ces dernières sont en augmentation en raison notamment de mesures techniques ayant une influence sur la sous-action « Gestion immobilière ».

Les crédits de l’action  02 « Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique » s’élèvent à 13,5 M€ en autorisations d’engagement et 12,5 M€ en crédits de paiement. Par rapport à 2024, les crédits hors titre 2 de cette action n° 02 sont en augmentation de 2 M€ en autorisations d’engagement et 1 M€ en crédits de paiement afin d’engager le projet de changement des systèmes d’information de collecte de données, dans le cadre d’une démarche de mutualisation avec les outils de l’Insee.

L’action n° 03 « Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et des directions départementales des territoires (et de la mer) » est financée à hauteur de 380,6 M€ en autorisations d’engagement et de 380,9 M€ en crédits de paiement, en hausse de 8,2 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cette action, qui représente 52 % des crédits du programme, finance des actions sanitaires et sociales, la formation continue, la gestion immobilière et le fonctionnement courant des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et des directions départementales des territoires. Les crédits hors titre 2 de l’action n° 03 apparaissent stables par rapport à ceux ouverts en loi de finances initiale pour 2024.

Enfin, l’action n° 04 « Moyens communs » est dotée de 155,8 M€ en autorisations d’engagement et 91,2 M€ en crédits de paiement, en augmentation de 23,6 % pour les autorisations d’engagement et en diminution de 8,7 % pour les crédits de paiement. Elle représente 21,3 % du programme 215 et concerne l’ensemble des services du ministère. Les lignes budgétaires principales couvrent les dépenses informatiques, les frais judiciaires et réparations civiles, la politique immobilière et le fonctionnement de l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’agriculture (Infoma). En 2025, les crédits hors titre 2 de l’action n° 04 connaîtront une augmentation importante en autorisations d’engagement et une légère augmentation en crédits de paiement qui s’expliquent à titre principal par les moyens dévolus à la politique immobilière poursuivie par le ministère, en particulier le projet Maisons-Alfort.

D.   le programme 381 « allÈgements du coût du travail en agriculture (tode-ag) »

Le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture (TODEAG) est composé d’une unique action, l’action n° 01 « Allègements de cotisations et contributions sociales », qui dispose de crédits à hauteur de 448,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Le dispositif d’exonération applicable pour l’emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi (TO-DE) vise à soutenir la compétitivité des exploitations agricoles. Ce dispositif permet aux exploitations agricoles qui embauchent des travailleurs saisonniers d’obtenir une exonération des cotisations patronales. Environ 71 000 entreprises en bénéficient, soit la moitié de l’ensemble des entreprises du secteur de la production agricole employeuses.

Ce programme vise à compenser à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole et à l’Unedic une partie de l’exonération de charges patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels en agriculture. Il complète l’action n° 25 du programme 149 (voir 1.A.5) et permet ainsi une compensation intégrale par le ministère chargé de l’agriculture, à hauteur de 612 M€ au total.

En février 2024, le Premier ministre avait annoncé la pérennisation du dispositif TO-DE au-delà de la date butoir du 31 décembre 2025, ainsi que le relèvement du « plateau » d’exonération totale de 1,20 Smic à 1,25 Smic. Ce nouveau plateau d’exonération est appliqué sur les cotisations dues à compter du 1er mai 2024. Le surcoût associé à cette mesure est estimé à 13,50 M€ pour l’année 2024 et 17 M€ en année pleine à partir de 2025.

crÉdits du programme 381
« allÈgements du coût du travail en agriculture (tAUDIS) »

(En euros)

Numéro et intitulé
du programme et de l’action

AE

CP

Demandées pour
2025

Demandés pour
2025

381

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

 448 500 000

 448 500 000

01

Allègements de cotisations et contributions sociales

 448 500 000

 448 500 000

III.   le compte d’affectation spÉciale « dÉveloppement agricole et rural » (CASDAR)

Le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar) est alimenté par une fraction, égale à 100 %, du produit de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricole prévue à l’article 302 bis MB du code général des impôts. Il est porté à 146 M€ pour 2025, permettant au Casdar de bénéficier d’une dotation en augmentation de 3,5 % par rapport à l’année précédente.

Les moyens du Casdar sont répartis en deux programmes budgétaires :

● Le programme 775, doté de 67,9 M€ pour le volet « Développement et transfert en agriculture », et qui vise à orienter les structures chargées du conseil et de l’accompagnement des agriculteurs vers le développement, la diffusion et la mise en œuvre de systèmes de production innovants et triplement performants (performance économique, environnementale et sociale), en insistant particulièrement sur la mise en œuvre des principes agro-écologiques.

● Le programme 776, doté de 78 M€ pour le volet « Recherche appliquée et innovation en agriculture », et qui a pour objectif d’orienter les structures chargées de la recherche appliquée en agriculture vers la conception et la mise à disposition d’innovations finalisées pour la transition agro-écologique

 

 

 


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   seconde partie :
L’accompagnement des filières d’élevage face aux crises sanitaires

Dans la seconde partie de son avis budgétaire, votre rapporteur souhaite apporter un éclairage sur l’accompagnement des filières d’élevage face aux crises sanitaires.

Il s’agit d’un sujet d’actualité au regard du nombre d’épizooties auxquels nos éleveurs doivent faire face depuis quelques mois.

https://www.gdsfrance.org/wp-content/uploads/MHE-FCO_14_10_24-scaled.jpegAlors que l’épizootie d’influenza aviaire laisse un répit aux filières avicoles, qui l’ont combattue avec acharnement entre 2015 et 2022, les filières ovines, bovines et caprines font face depuis plus d’un an à la diffusion de la maladie hémorragique épizootique (MHE) et à celle de plusieurs sérotype de la fièvre catarrhale ovine (FCO).

Dans ce contexte, le rôle de l’État est d’abord d’être au côté des agriculteurs pour leur permettre de surmonter les situations dramatiques dans lesquelles les plongent ces maladies animales, ce qui représente une charge importante pour les finances publiques. Les conséquences de ces infections touchent les filières dans leur ensemble et les enjeux économiques sont considérables. Ces filières ne ressortent jamais indemnes d’une épizootie malgré la présence de l’État pour les accompagner.

Par ailleurs, le changement climatique et l’ouverture toujours plus importante de nos économies représentent des facteurs de risque accrus pour l’émergence et la circulation des maladies vectorielles. Ainsi, l’État doit également être stratège pour mieux prévenir et mieux organiser la lutte contre les épizooties. L’investissement dans la santé animale afin que les filières d’élevage soient mieux préparées et plus résilientes face aux crises sanitaires est un enjeu pour nos finances publiques. C’est aussi un enjeu de santé publique, la santé animale faisant partie intégrante de notre santé.

I.   Un accompagnement public des filières d’élevage face aux crises sanitaires indispensable et coûteux

A.   L’indemnisation des pertes directes est indispensable pour assurer la résilience des filières

Lorsqu’une crise sanitaire en élevage survient, l’État se retrouve nécessairement en première ligne.

L’indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l’ordre de l’administration, ainsi que la participation financière éventuelle de l’État aux autres frais obligatoirement entraînés par l’élimination des animaux, sont prévues à l’article L. 221-2 du code rural et de la pêche maritime. Ces indemnisations sont imputées sur l’action n° 02 du programme 206, qui est dotée chaque année, à titre de provision, de 30 M€. Cette provision sera insuffisante en 2024, puisqu’à date, le montant des indemnisations versées aux éleveurs à la suite d’abattages sur ordre atteint déjà 41,5 M€.

De plus, l’État intervient régulièrement au-delà de cette obligation légale par des aides de crise pour soutenir les filières confrontées à la survenance d’épizooties – et en particulier les éleveurs.

Ces dépenses de crise sont imputées sur la sous-action n° 02 « Crises économiques et sanitaires » de l’action n° 22 du programme 149 de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». Cette sous-action n’est pas abondée en loi de finances initiale. Elle est traditionnellement alimentée en loi de fin de gestion pour tirer les conséquences des plans d’urgence décidés en cours d’année par l’État.

En revanche, l’action n° 22 du programme 149 prévoit la subvention de l’État au Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA), dont la deuxième section finance le développement de l’assurance contre les dommages causés aux exploitations agricoles et la première section est relative à la mutualisation des risques sanitaires en environnementaux.

L’État intervient donc massivement pour répondre aux crises sanitaires, soit par des programmes d’indemnisation qu’il porte directement, soit par un abondement des programmes d’indemnisation mis en œuvre par le Fonds de mutualisation des risques sanitaires et environnementaux (FMSE).

L’État prend directement en charge les indemnisations dans le cadre de plans d’urgence lorsque les maladies sont dites « émergentes » et qu’elles ne font donc pas encore l’objet de plans de lutte. À l’inverse, lorsque la maladie est considérée comme endémique, la prise en charge de l’indemnisation des pertes relève en principe des filières dans le cadre du FMSE.

Lorsqu’ils concernent des maladies animales réglementées au sens de l’article L. 221-1 du code rural et de la pêche maritime, les programmes du FMSE sont abondés à hauteur de 65 % par des fonds publics ([6]) issus de la première section du FNGRA abondée par le budget de l’État et le Feader ; les 35 % restants sont financés par les cotisations des éleveurs au FMSE ([7]).

1.   L’accompagnement de l’État face à l’influenza aviaire hautement pathogène

Pour aider la filière du foie gras à surmonter les épisodes successifs d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) entre 2015 et 2022, l’État a versé plus de 1,1 milliard d’euros d’indemnisations – un montant qui n’inclut pas les aides versées directement par les collectivités territoriales. Il est indéniable que seul l’État était en mesure de porter cet effort pour indemniser l’ensemble des maillons de la filière, qui n’aurait pas survécu sans cet accompagnement.

Source : Interprofession du foie gras (SIPHONNE)

2.   L’accompagnement de l’État face à la maladie hémorragique épizootique

S’agissant de la maladie hémorragique épizootique (MHE), les professionnels saluent dans leur ensemble la prise en charge de 90 % de l’ensemble des pertes supportées par les éleveurs en 2023, incluant les frais vétérinaires et les pertes liées à la mortalité et à l’euthanasie des animaux pour raison de bien-être animal. L’État a ainsi financé plus de 60 M€ d’indemnisations consécutives aux pertes liées à la MHE ([8]).

Un premier programme du FMSE a pris le relais de l’État pour les pertes subies entre le 1er janvier et le 30 avril 2024, un deuxième programme a couvert les pertes jusqu’au 30 août et la ministre chargée de l’agriculture a annoncé, lors du Salon de l’élevage de Cournon d’Auvergne (3 octobre 2024), que ce programme serait prolongé jusqu’à la fin de l’année. Un peu plus de 2 M€ de fonds publics auront été mobilisés dans le cadre du FNGRA pour ces programmes relatifs à la MHE en 2024.

L’épidémie de MHE a nécessité, de surcroît, la création d’un fonds d’urgence doté d’un montant de 50 M€ dans le budget 2024 pour apporter une aide de trésorerie exceptionnelle aux acteurs professionnels, éleveurs et commerçants en bestiaux, durement touchés par la maladie.

3.   L’accompagnement de l’État face aux fièvres catarrhales ovines

Le Premier ministre a annoncé, le 4 octobre 2024 lors du Salon de l’élevage de Cournon d’Auvergne, une enveloppe de 75 M€ pour indemniser les éleveurs des pertes causées par la fièvre catarrhale ovine de sérotype 3 (FCO 3). Arrivée en France au mois d’août 2024 en provenance des Pays-Bas et de la Belgique, cette maladie vectorielle est présente depuis deux ans dans le nord de l’Europe. Le vecteur de diffusion est un moucheron appelé « culicoïde », qui pique les animaux.

Le Premier ministre a pris soin de justifier la prise en charge des indemnisations directement par l’État par le fait que cette nouvelle épizootie « est émergente et pas prise en compte dans les systèmes d’indemnisation existants ».

L’enveloppe de 75 M€ est considérée avec une relative satisfaction par les organisations professionnelles agricoles, qui la considèrent comme une première enveloppe appelée à être complétée en fonction des résultats du suivi qui sera effectué.

Le calibrage de cette enveloppe est un exercice difficile et l’enjeu est d’assurer un suivi rigoureux de l’évolution des pertes, ce qui est prévu dans le cadre d’un comité de suivi constitué sous l’égide de la direction générale de l’alimentation.

 

Zone régulée au 10 octobre 2024Les conditions d’indemnisation des pertes provoquées par la fièvre catarrhale ovine de sérotype 8 (FCO 8) sont beaucoup moins consensuelles.

L’État n’intervient pas par un plan d’urgence pour cette maladie considérée comme endémique. La FCO 8 circule en effet depuis 2008 en France et, depuis le 1er janvier 2018, ce sérotype est considéré comme endémique sur le territoire national continental (ainsi qu’en Corse). Les foyers doivent être déclarés, mais les animaux issus de ces foyers peuvent circuler librement. Un programme du FMSE est en cours et couvre les pertes subies jusqu’à la fin de l’année 2024.

Le niveau de couverture des pertes dans le cadre d’un plan d’urgence et dans celui d’un programme FMSE est identique, puisque l’État se fonde sur les paramètres des programmes FMSE pour définir les conditions d’intervention des fonds d’urgence.

Toutefois, les professionnels considèrent que le FMSE n’a pas les ressources suffisantes pour intervenir lorsque les crises deviennent majeures. Le FMSE dispose de réserves certes confortables, de l’ordre de 100 M€, mais il n’est pas envisageable de mobiliser excessivement ces réserves, inhérentes à la nature d’un tel fonds, pour un nombre limité de programmes, d’autant qu’elles sont à considérer sur le périmètre des onze sections du FMSE.

Par ailleurs, l’indemnisation par le FMSE ne peut intervenir qu’à la fin de la période de pertes définie par le programme d’indemnisation et au terme de vérifications administratives relativement lourdes, imposées par la mobilisation de fonds européens. Le ministère chargé de l’agriculture envisage, pour simplifier les démarches des éleveurs et raccourcir les délais d’indemnisation, de ne plus faire appel au cofinancement européen pour les fonds de mutualisation et de reporter ce cofinancement sur l’assurance récolte, qui émarge à la même enveloppe.

Surtout, s’agissant de la FCO 8, le caractère endémique de la maladie est discuté, car la souche du sérotype 8 apparue en France il y a un an est une nouvelle souche très différente de la FCO 8 présente depuis 2008 sur le territoire. L’origine de cette nouvelle souche est inconnue.

En tout état de cause, l’absence d’indemnisation des pertes provoquées par la FCO 8 est inenvisageable : elle conduirait à la disparition pure et simple de la filière ovine. L’État doit donc prolonger autant que possible le programme du FMSE et, si la situation devait encore empirer, il serait amené à prendre le relais. Depuis 2023, les deux programmes du FMSE successifs pour la FCO 8 ont conduit à engager 12,3 M€ de fonds publics dans le cadre du FNGRA.

L’indemnisation des pertes des éleveurs consécutive à la survenance de maladies animales représente donc une charge difficilement prévisible et de plus en plus lourde pour l’État. Malgré cet engagement indispensable, l’indemnisation présente des limites.

B.   Les limites à l’indemnisation des pertes

1.   La question de la fiscalité applicable aux indemnités perçues par les éleveurs

Les indemnités versées aux agriculteurs au titre des pertes de cheptel sont soumises à l’imposition. Or cette imposition vient amputer la capacité financière de ces agriculteurs à reconstituer leur cheptel. Les professionnels portent donc une demande d’exonération de ces indemnités à condition qu’elles soient réengagées dans les exploitations afin de reconstituer leur capital.

Par ailleurs, les indemnités, notamment celles du FMSE, sont versées en moyenne douze à dix-huit mois après la fin de la période des pertes. Cela conduit dans certains cas à les comptabiliser sur un exercice fiscal postérieur à celui de la réalisation des pertes, qui peut s’avérer être un exercice exceptionnel. Les professionnels plaident donc pour un dispositif spécifique d’étalement pour ces indemnités.

Ces deux pistes méritent d’être étudiées par le Gouvernement.

Proposition n° 1 : Étudier la possibilité d’exonérer de l’impôt les indemnités versées aux agriculteurs pour compenser leurs pertes.

2.   La difficile évaluation des pertes indirectes

La première conséquence de la survenance d’une épizootie est un surcroît de travail et d’anxiété pour l’éleveur. La fatigue et la souffrance psychologique ne peuvent pas faire l’objet d’une indemnisation, mais elles doivent être reconnues et elles justifient à elles seules que tous les efforts soient entrepris pour prévenir ces maladies.

D’un point de vue économique, lorsqu’une maladie menace ou touche le troupeau, d’autres conséquences vont être supportées par l’éleveur au-delà de la perte d’animaux : les frais vétérinaires sont accrus, le coût de la mise en place de mesures de protection et de surveillance également.

Le sujet le plus complexe et difficile à appréhender est l’évaluation les pertes de production pour les animaux infectés qui ne meurent pas. L’affaiblissement des animaux conduit à des avortements, une stérilité temporaire ou encore des chutes de rendement. La valorisation de ces pertes s’avère difficile, d’autant qu’elles peuvent se prolonger sur des périodes très variables.

Ces risques ne peuvent être considérés comme inhérents à l’activité d’élevage lorsque l’on connaît les difficultés des professionnels de ces filières à valoriser suffisamment leurs produits pour obtenir une rémunération satisfaisante. Le moindre aléa devient rapidement la source de graves difficultés mettant en péril les exploitations.

L’impossibilité de couvrir les pertes indirectes pour les éleveurs rend d’autant plus indispensable la couverture complète de leurs pertes directes.

Une autre conséquence indirecte majeure de la survenance d’épizooties réside dans le risque de perte de la génétique dans les filières. Une attention toute particulière doit donc être portée à la prévention et à la protection dans les centres d’insémination artificielle, dans les stations d’évaluation des reproducteurs et chez les éleveurs sélectionneurs qui possèdent les meilleures génétiques. À titre d’exemple, en 2022, lorsque près de 85 % des canards reproducteurs de la filière Foie gras ont été décimés par l’influenza aviaire hautement pathogène, la filière a été en grand danger faute de pouvoir se fournir en canetons à l’étranger – puisque la génétique des canards à foie gras se trouve en France.

Cette préservation de la génétique est un défi qu’il faut relever en ce moment dans la filière ovine.

3.   Des conséquences en cascade dans les filières

Au-delà de l’amont agricole, les épizooties ont des conséquences tout au long des filières concernées : les enjeux économiques sont donc colossaux.

L’aval des filières peut faire l’objet de plans d’aide, mais ceux-ci ne peuvent pas être de même nature que ceux prévus pour l’amont agricole.

Entre 2015 et 2022, la filière Foie gras a perdu 50 % de sa production et elle aurait pu disparaître sans l’aide de l’État. Les entreprises dont les pertes ont été couvertes à hauteur de 40 % à 60 % restent fragilisées par la succession des crises.

Les épizooties peuvent en particulier fragiliser le positionnement des filières françaises d’élevage sur les marchés d’exportation.

En 2023, le chiffre d’affaires de la ferme France à l’export s’élevait à 9 Md€ pour les produits laitiers, 5,6 Md€ pour les viandes et produits carnés et 2,6 Md€ pour les animaux vivants et la génétique ([9]).

La bonne maîtrise de la situation sanitaire des élevages est nécessaire à ces exportations, dès lors que la présence de certaines maladies sur le territoire national peut engendrer des restrictions à l’export, en particulier en ce qui concerne les animaux vivants.

L’action n° 02 du programme 206, et en particulier ses cinq premières
sous-actions dont les crédits étudiés dans la première partie du présent avis s’élèvent à 106,50 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement, contribue à obtenir ou à préserver le statut indemne de la France vis-à-vis des maladies animales réglementées.

La préservation du statut indemne de la France est ainsi une préoccupation majeure de la filière porcine face à la peste porcine africaine (PPA). Alors que la maladie est présente dans plus de la moitié des pays de l’Union européenne et notamment chez nos voisins belges, allemands et italiens, la menace d’introduction sur le territoire national, en particulier par le sanglier, est élevée. Le ministère a relevé en septembre la surveillance de la PPA au niveau 2B du réseau de surveillance de la santé de la faune sauvage (réseau Sagir) dans les départements du Bas-Rhin et de la Moselle. Cette décision permet de mobiliser davantage d’acteurs de terrain pour augmenter les signalements de cadavres de sangliers, leur collecte et leur analyse. Les services du ministère sont en relation avec les représentants des chasseurs pour atteindre une régulation optimale des sangliers à la frontière. Sur le plan budgétaire, un marché public relatif à la pose d’une clôture anti sangliers empêchant le passage de suidés en plaine et en montagne en France métropolitaine est prévu en 2025. De plus, dans le cadre du plan de souveraineté « Élevage » présenté par le précédent gouvernement début 2024, un marché relatif à la réalisation d’audits de biosécurité en élevages de porcs est en cours de passation.

Enfin, au titre des conséquences indirectes des épizooties, figure bien entendu le risque de zoonoses, qui doit faire l’objet d’une attention toute particulière de la part des pouvoirs publics.

Alors que la prise en charge des conséquences des crises sanitaires représente pour l’État une responsabilité à la fois lourde, difficilement prévisible et indispensable, elle ne permet pas d’éviter des difficultés à long terme pour les acteurs. Votre rapporteur formule donc un certain nombre de préconisations visant à renforcer l’effort budgétaire en faveur de la prévention des crises et de l’anticipation de leur gestion.

II.   La nécessité d’un État stratège pour Renforcer notre souveraineté sanitaire

La politique de vaccination doit être au cœur de la stratégie de l’État pour prévenir la diffusion des épizooties et limiter les conséquences qui viennent d’être étudiées. Cette réflexion doit aller de pair avec une rénovation de la gouvernance et surtout du financement de la politique de santé des animaux, avec pour objectif d’aboutir à des règles partagées et stables. Plus largement, ces épisodes et leurs conséquences invitent à continuer et approfondir les réflexions sur nos modèles d’exploitation et les pratiques d’élevage. La recherche scientifique irrigue l’ensemble de ces questions et sa place doit être centrale sur un tel sujet.

A.   La politique de vaccination doit reposer sur une stratégie d’anticipation pilotée par l’état et en lien avec nos partenaires européens

1.   La France doit être à l’initiative d’une mobilisation européenne en matière de recherche sur les pathogènes et pour la constitution de banques de vaccins, d’antigènes et de souches

Avoir un État stratège en matière de vaccination pour prévenir les crises liées aux épizooties implique de penser la vaccination en dehors de la crise.

Cela suppose d’abord d’amplifier les moyens consacrés à la recherche, en particulier sur les pathogènes, et à la surveillance de la santé animale. C’est, par exemple, le travail de recherche mené par l’Anses en association avec ses partenaires privés à partir de 2016 – alors même que la vaccination était interdite dans l’Union européenne – qui a permis de mettre en place une vaccination efficace des canards contre l’influenza aviaire hautement pathogène en 2023.

Un travail commun entre les autorités étatiques et européennes et leurs agences sanitaires, l’industrie du médicament vétérinaire, les vétérinaires et les éleveurs doit être institutionnalisé, afin d’aboutir à la constitution d’une banque européenne de vaccins, d’antigènes ou de souches vaccinales.

Proposition n° 2 : Impulser et accompagner la mise en place, à l’échelle européenne, d’un système de banques de vaccins, d’antigènes ou de souches vaccinales.

L’échelle européenne est pertinente pour cet effort de recherche et de coordination. L’enregistrement de vaccins ou d’antigènes pour les maladies existantes ou de souches vaccinales pour les nouvelles maladies permettrait de réagir rapidement pour élaborer et produire des vaccins en cas d’émergence ou de réactivation de maladies. Une telle collaboration européenne permettrait aussi de limiter les risques de concurrence entre pays pour l’approvisionnement en vaccins.

À cet égard, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » commentée en première partie du présent rapport doit, à court terme, préserver les moyens de l’Anses.

Proposition n° 3 : Définir une trajectoire de renforcement des moyens de l’Anses afin de renforcer l’investissement dans la recherche sur la santé animale et d’accompagner une politique de vaccination animale stratégique.

2.   La doctrine d’intervention de l’État pour le financement de la vaccination doit être clarifiée et ambitieuse

La gestion de la question vaccinale face aux crises sanitaires a été marquée par certains succès ces dernières années, que l’on pense à la vaccination des canards contre l’IAHP ou au développement rapide du vaccin contre la FCO 3.

La politique de vaccination mérite néanmoins d’être pensée et partagée avec les professionnels. Elle doit reposer sur une doctrine d’intervention de l’État qui soit claire et qui donne de la visibilité à l’ensemble des acteurs, au premier rang desquels les éleveurs et les industriels du médicament vétérinaire.

Cette doctrine doit être ambitieuse et l’effort budgétaire qu’implique la mise en œuvre de cette politique de vaccination doit être mis en perspective avec le coût pour les finances publiques et pour notre économie des épizooties non maîtrisées.

Cette doctrine doit faire l’objet d’une concertation, notamment pour en déterminer les paramètres précis et les modalités pratiques, mais certains grands principes semblent déjà pouvoir être dégagés.

  1.   En cas d’émergence d’une maladie, l’État doit prendre à sa charge le plus rapidement et le plus largement possible la commande des vaccins et le déploiement de campagnes de vaccination.

La vaccination des canards ([10]) contre l’IAHP est l’illustration parfaite d’une campagne vaccinale couronnée de succès. La première campagne de vaccination, débutée en octobre 2023, avait été estimée à 112,50 M€, dont 85 % à la charge de l’État (soit 95,60 M€) ; 61 millions de canards auront été vaccinés. Combinée aux autres mesures mises en place, cette campagne de vaccination aura permis de passer de 1 383 foyers en 2022 à 402 foyers en 2023 et seulement 4 cette année. La filière Foie gras n’a eu à déplorer aucun foyer.

S’agissant de la FCO 3, la campagne de vaccination volontaire ciblée a été lancée à compter du lundi 12 août pour une mise en œuvre jusqu’au 31 décembre 2024. L’État a été réactif pour passer les commandes de vaccins aux laboratoires et les fournir gratuitement aux éleveurs. Le coût de cette campagne de vaccination est estimé, à date, à 32,70 M€.

En revanche, s’agissant de la MHE, la stratégie vaccinale mise en œuvre vise à limiter la progression de la maladie par la mise en place d’une zone tampon vaccinale de 50 km de largeur. Deux millions de doses de vaccins ont été commandées et prises en charge à 100 % par l’État pour un montant de plus de 9,24 M€ (achat du vaccin, stockage, acheminement et frais vétérinaires liés à la vaccination), soit la quantité suffisante pour protéger un million de bovins, afin de stabiliser la zone indemne. Les ovins également touchés par la maladie ne sont pas couverts par cette campagne vaccinale.

Cette stratégie de vaccination en zone tampon a certainement sa justification technique. Elle est toutefois difficilement lisible, d’autant que l’État avait, dans un premier temps, indiqué qu’il n’achèterait pas de vaccins. D’une part, elle ne permet pas d’envoyer un signal clair aux laboratoires, qui rechignent donc à lancer leurs lignes de production. D’autre part, elle incite à l’attentisme les éleveurs situés en dehors de la zone de prise en charge de la vaccination par l’État.

À l’instar de la vaccination FCO 3, les dépenses nécessaires à la mise en place de la vaccination contre la maladie hémorragique épizootique (MHE) n’ont pas fait l’objet d’un financement en loi de finances initiale. La soutenabilité de ces dépenses a été rendue possible par des redéploiements au sein des actions du programme 206 (priorisassions des crédits relatifs à la planification écologique et redéploiement des reports de crédits généraux en 2024, dont le niveau était exceptionnel).

En matière de vaccination, l’État doit passer d’une gestion de crise à une gestion stratégique. Cela devrait se traduire dans la maquette budgétaire par une provision renforcée sur l’action n° 02 du programme 206, pour la prise en charge systématique de la vaccination contre les maladies émergentes.

La France compte 24 des 71 sites de production de médicaments vétérinaires en Europe et demeure le premier pays producteur de médicaments vétérinaires. Il n’y a donc pas problème de souveraineté industrielle en la matière.

Pour autant, outre ce qui vient d’être évoqué en matière de recherche et de coordination, cet outil industriel ne peut être réactif pour produire des vaccins en réponse à l’émergence d’une maladie animale que s’il dispose de perspectives sûres quant à l’écoulement des vaccins produits. Seul l’État est en mesure d’apporter la visibilité nécessaire aux laboratoires pour orienter leurs arbitrages de production.

La passation de commandes massives par l’État permet également d’optimiser les coûts d’approvisionnement.

  1.   L’État doit accompagner financièrement la vaccination contre les maladies endémiques lorsqu’il est établi que la vaccination présente un intérêt en raison du niveau de circulation de la maladie

L’évolution de la prise en charge de la vaccination contre l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP), avec un reste à charge pour la filière qui passe de 15 % à 30 % pour la deuxième campagne de vaccination, lancée le 1er octobre 2024, répond à cette logique.

Une diminution progressive de la prise en charge par l’État peut se justifier. Le vaccin doit intégrer progressivement les coûts de production des éleveurs. Pour autant, l’État ne doit pas se désengager trop rapidement, surtout lorsque la maladie circule activement, ce qui relève d’une appréciation purement scientifique.

En l’occurrence, pour l’IAHP, il ne fait aucun doute que la deuxième campagne de vaccination présente un intérêt majeur pour la filière. De plus, cette vaccination récente revêt encore une dimension expérimentale et permet d’acquérir des connaissances, avec par conséquent des coûts élevés car non optimisés. L’État se doit de l’accompagner et de dissiper toute incertitude quant à son engagement à hauteur de 70 % des coûts de la vaccination pour la totalité de l’année 2025. Ces dépenses devraient être prévues l’action n° 02 du programme 206.

S’agissant de la FCO 8, l’État, s’il ne décide pas de la prendre en charge temporairement, devrait au moins accompagner financièrement les éleveurs pour déployer rapidement une campagne de vaccination hivernale. Le doute déjà évoqué quant à la souche de ce sérotype et l’ampleur prise par l’épizootie dans des filières fragiles économiquement doivent conduire le Gouvernement à accompagner l’utilisation massive d’un vaccin dont l’efficacité sur la nouvelle souche a été confirmée par l’Anses. Une prise en charge publique à 70 % des coûts de cette vaccination, sur le modèle de ce que l’État pratique aujourd’hui pour l’IAHP, semble constituer une solution équilibrée.

Proposition n° 4 : Organiser dans les meilleurs délais et accompagner financièrement une campagne de vaccination contre la FCO 8, pour les bovins et les ovins, afin d’éviter une reprise de l’épidémie au printemps 2025.

Le critère ne doit pas être de savoir si la maladie est une maladie réglementée ou une maladie à éradication volontaire. Seul l’intérêt scientifique d’une vaccination, compte tenu de l’évolution de la situation, doit conduire l’État à s’engager sans tergiverser.

L’un des moyens pour permettre l’engagement financier de l’État en faveur de la vaccination au côté des professionnels pourrait être d’élargir le périmètre d’intervention du FMSE. Actuellement, le champ d’intervention du fonds ne prend pas en compte les coûts de prévention des maladies, la Commission européenne ayant confirmé que les textes européens en vigueur s’y opposaient. Ce sujet mériterait d’être réexaminé au niveau de l’Union européenne.

  1.   Lorsque l’État prend à sa charge ou accompagne financièrement la vaccination, les pertes engendrées par la maladie concernée pourraient ne plus être éligibles à l’indemnisation par l’État ou par le FMSE

Le débat n’est pas de savoir si la vaccination doit être obligatoire ou non, dès lors que celle-ci doit être instaurée lorsque la situation le justifie (comme dans l’exemple de l’IAHP).

En revanche, la contrepartie à l’engagement financier de l’État dans une campagne de vaccination pourrait être d’écarter la possibilité d’une indemnisation pour l’éleveur qui fait le choix de ne pas vacciner, en laissant bien entendu un temps suffisant pour procéder à la vaccination une fois le vaccin rendu disponible.

Une telle doctrine contribuerait à sécuriser les acteurs, à limiter l’incertitude et à diffuser la culture du vaccin chez les éleveurs.

Proposition n° 5 : Négocier avec les filières et définir une doctrine de l’accompagnement de la vaccination animale par l’État, avec des schémas de financement précis et adaptés à chaque filière (proposition incluse dans le champ des propositions n° 7 et 8).

B.   La gouvernance sanitaire dans le domaine animal doit être élargie pour aboutir à une doctrine de financement partagée

Le ministre chargé de l’agriculture a demandé à ses services, en juin 2023, un rapport sur la rénovation du financement du sanitaire dans le domaine animal. Ce document a été présenté à la nouvelle ministre, qui doit désormais en autoriser la publication.

Proposition n° 6 : Rendre public rapidement le rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux relatif à la rénovation du financement du sanitaire dans le domaine animal.

Ce rapport devrait permettre de dresser une cartographie des actions sanitaires menées pour la recherche, la surveillance, la prévention ou la lutte contre les maladies animales. À ces actions devraient pouvoir être rattachés des coûts et l’identification des acteurs qui les supportent.

S’il est certain que l’État et les éleveurs engagent des sommes très importantes sur ces sujets, il n’existe pas d’état des lieux du financement du sanitaire en France. Il s’agit pourtant là d’une étape indispensable pour penser la rénovation de ce financement. Ce travail permettrait à l’État de faire prendre conscience à l’ensemble des acteurs des filières du niveau de son engagement, qui est certainement sous-estimé. Il permettrait également de rapprocher le coût du sanitaire des enjeux financiers de la santé animale.

Cette objectivation d’un certain nombre de réalités constitue un préalable à la définition d’une doctrine globale sur le financement du sanitaire dans le domaine animal. Cette doctrine doit être négociée et partagée entre tous les acteurs dans le cadre des « Parlements du sanitaire » que constituent le Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (Cnopsav) et ses déclinaisons régionales.

Proposition n° 7 : Négocier une doctrine du financement du sanitaire dans le cadre des « Parlements du sanitaire ».

Cette doctrine devra déboucher sur la définition de schémas de financement précis pour chaque action, à tout le moins pour celles qui impliquent des financements publics.

Proposition n° 8 : Définir des schémas de financement des actions sanitaires.

Dans le cadre de ces réflexions, tous les sujets devraient être mis sur la table sans a priori. Il en va ainsi, par exemple, de la possibilité d’une mise à contribution de l’aval des filières. Les conditions de mobilisation des financements européens ne devront pas être négligées, y compris celles dans lesquelles l’État sollicite la réserve agricole (ex-réserve de crise).

C.   la question sanitaire ne peut être pensée indépendamment d’une réflexion sur nos modèles d’exploitation

La connaissance des maladies, notamment des maladies vectorielles, est indispensable pour comprendre les conditions de leur apparition et de leur circulation, pour définir les moyens de prévention (dont la vaccination) ou encore pour mesurer les conséquences à long terme des contaminations.

Les enseignements tirés de la recherche doivent être diffusés par la formation initiale et continue des éleveurs pour s’adapter à ces maladies animales dont l’éradication n’est pas toujours envisageable.

Les méthodes d’élevage, la génétique ou les conditions de transport doivent être adaptées pour rendre les exploitations plus résilientes face aux risques sanitaires.

Il n’existe pas de réponses univoques et simples aux questions de l’élevage en plein air et du confinement, de la densité des élevages, de la tropicalisation des cheptels ou de l’organisation de filières qui nécessitent plus ou moins de transports. Mais, en tout état de cause, la science peut apporter des éléments de réponse qui doivent être mis à disposition des acteurs.

Les éleveurs doivent être accompagnés techniquement et, le cas échéant, financièrement, notamment à l’occasion de l’indemnisation de leurs pertes, pour adapter leurs exploitations et leurs pratiques.

 

 


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   examen en commission

Au cours de sa réunion du mercredi 23 octobre 2024, la commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Luc Fugit, les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous reprenons cet après-midi l’examen de nos avis sur la seconde partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, en nous penchant sur la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, pour laquelle notre commission a désigné comme rapporteur M. Jean-Luc Fugit. Cette mission comprend les quatre programmes 149, 206, 215 et 381, qui représentant au total 4,43 milliards d’euros (Md€) de crédits de paiement, un montant en baisse d’un peu plus de 6 %.

Le sujet de l’agriculture m’est particulièrement cher et il l’est également à l’ensemble des membres de notre commission, comme le prouvent les travaux en cours sur la viticulture, les abattoirs et le suivi de la loi « Egalim 2 ». Cette discussion budgétaire est d’autant plus importante que les agriculteurs affrontent une crise certes durable, mais particulièrement aiguë cette année. Ils subissent des prix qui ne les rémunèrent pas dignement et qui ne couvrent bien souvent pas les coûts de production, prix désormais alignés sur des cours mondiaux de plus en plus instables. En outre, nos agriculteurs sont soumis à une concurrence internationale déloyale et intenable. Cette année, les rendements sont particulièrement faibles et les calamités climatiques se multiplient. Enfin, les pertes de pouvoir d’achat qu’essuient les citoyens depuis quelques années conduisent ces derniers à consommer moins de produits alimentaires bio ou sous signe de qualité : ce contexte explique les difficultés que rencontrent les producteurs sous signe de qualité, alors que cette agriculture est essentielle à nos territoires.

Notre discussion s’inscrit dans une actualité toute particulière, celle des épizooties, notamment la fièvre catarrhale ovine (FCO), qui frappent les élevages et les troupeaux depuis plusieurs mois. L’État et le législateur se doivent apporter des réponses rapides à cette situation.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’ai l’honneur de vous présenter mon avis budgétaire sur la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales (Aafar).

Nous demandons beaucoup à nos agriculteurs : nous nourrir avec des produits sains et durables, se montrer résilients face aux conséquences multiples du changement climatique, affronter des concurrents internationaux qui ne sont pas toujours soumis aux mêmes contraintes, prendre en compte les exigences de la société et, en plus de tout cela, préparer l’avenir en investissant dans la transition agroécologique.

Pourtant, nos agriculteurs répondent toujours présents. À peine ont-ils exprimé leur colère qu’ils retournent travailler dans leurs exploitations. Ils le font parce que la cause est noble et parce qu’en dépit de toutes les difficultés, le métier est beau. Ils savent pouvoir compter sur la reconnaissance de nos concitoyens. Je salue les agriculteurs de ma circonscription, située dans le sud du département du Rhône.

Ils répondent aussi présents grâce à l’accompagnement de l’État, de l’Union européenne à travers la politique agricole commune (PAC) et des collectivités territoriales.

Ces dernières années, l’État a particulièrement soutenu l’agriculture dans sa transition écologique et son adaptation aux changements climatiques. La PAC couvrant les années 2023 à 2027 est entrée en vigueur, la réforme de l’assurance récolte a été déployée et les moyens consacrés à l’agriculture dans le budget de l’année 2024 ont atteint un niveau historique, avec plus de ‘1 Md€ consacré à la planification écologique.

L’année 2024 a également été marquée par les questions du renouvellement des générations et des conditions de préservation de notre souveraineté alimentaire, dans le cadre d’un grand débat sur l’orientation de notre politique agricole. Ce débat devrait se poursuivre en 2025 ’’dans le cadre de l’examen du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture (PLOA) : rappelons que notre assemblée l’a adopté en première lecture en mai dernier.

Pour 2025, dans un contexte budgétaire contraint par la nécessité de maîtriser notre niveau d’endettement, le projet de loi de finances n’aura pas la même ambition qu’en 2024. Notre responsabilité est de veiller à ce qu’il ne brise pas l’espoir et la volonté de voir notre agriculture relever les défis qui se présentent à elle. Les moyens consacrés à l’agriculture, en diminution par rapport à ceux de l’année en cours, demeurent néanmoins élevés dans ce projet de loi de finances.

La première partie de l’avis budgétaire est consacrée à l’analyse des crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural (Casdar).

Au terme de mon analyse, je ne peux émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission que sous plusieurs réserves.

Le Gouvernement doit s’engager à définir une trajectoire de progression des moyens alloués à la planification écologique pour retrouver, d’ici trois ans, le niveau de 2024 – à savoir, un investissement annuel de 1 Md€ pour accompagner les filières agricoles et agroalimentaires dans la transition agroécologique. Les crédits alloués au plan de souveraineté de la filière des fruits et légumes doivent être sanctuarisés en 2025, en dépit de la diminution du financement de la planification écologique. Enfin, toute baisse du plafond d’emplois de l’Office national des forêts (ONF) doit être exclue.

Pour 2025, les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales s’élèvent à 4,6 Md€ en autorisations d’engagement (AE) et 4,4 Md€ en crédits de paiement (CP). Ces montants excèdent d’environ 15 % ceux du budget 2023, même s’ils se contractent après la nette augmentation de la loi de finances pour 2024. Cette mission n’accueille qu’une partie du soutien que les pouvoirs publics apportent au secteur agricole : il faut en effet y ajouter plus de 2 Md€ pour l’enseignement et la recherche agricole, 146 millions d’euros (M€) pour le Casdar, 195 M€ de reste à payer sur le programme « France relance », 9,4 Md€ de financements européens et 9 Md€ pour l’ensemble des dispositifs sociaux et fiscaux – ces deux derniers chiffres datant de 2024. L’effort global reste soutenu et son repli est limité à 4 %.

Le projet d’avis qui vous a été transmis présente une analyse détaillée des évolutions des programmes et des actions de la mission. J’insisterai donc ici sur les points qui me paraissent les plus saillants.

Le fait marquant de ce budget a trait à la planification écologique. En 2024, une nouvelle action 29 « Planification écologique », dotée de 1 Md€ en autorisations d’engagement et 594 M€ en crédits de paiement, a été créée dans le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt », et une action 09 « Planification écologique – Stratégie de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires », dotée de 250 M€ en autorisations d’engagement et 150 M€ en crédits de paiement, a été insérée dans le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation ».

Dans le projet de loi de finances, les crédits de la planification écologique diminuent de 64 % en autorisations d’engagement et 50 % en crédits de paiement dans le programme 149 et de 35 % en autorisations d’engagement et 29 % en crédits de paiement dans le programme 206. On peut donc parler d’une baisse de moitié des crédits de la planification écologique.

Le projet annuel de performances (PAP) du programme 149 et les explications du ministère chargé de l’agriculture nous ont permis de comprendre que les crédits de la planification écologique n’ont pas encore pu être répartis entre les différents dispositifs qu’ils financent. Le Gouvernement effectuera ce travail une fois qu’il aura pu faire un bilan plus précis de l’exécution du budget de 2024. À ce stade, il apparaît que seuls trois volets subsistent : celui pour les haies, celui de l’agriculture (dont le Fonds en faveur de la souveraineté et des transitions) et celui de la forêt. De nombreux amendements portent sur la planification écologique ; j’y apporterai ma contribution sur les haies et sur le plan de souveraineté de la filière des fruits et légumes.

Le programme 206 comporte également une action « Planification écologique – Stratégie de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires », créée en 2024. Il finance la stratégie « Écophyto 2030 », notamment le plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada), doté de 145 M€ en autorisations d’engagement et 73,6 M€ en crédits de paiement. La sécurisation de l’enveloppe consacrée au Parsada au sein d’un budget de la planification écologique en net recul est indispensable. Ces crédits financeront plusieurs appels à manifestation d’intérêt pour dégager le plus rapidement possible des solutions opérationnelles pour les agriculteurs.

Enfin, un sujet semble faire consensus sur nos bancs : le plafond d’emplois de l’ONF ne doit pas subir la baisse de 95 équivalents temps plein travaillé (ETPT) inscrite dans le projet de loi de finances. L’ONF ne réclame pas de dotation budgétaire supplémentaire pour financer ces emplois indispensables à la continuation de l’exercice de ses missions.

Vous le voyez, mes chers collègues, la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales est relativement préservée en 2025, à l’exception notable de la planification écologique. Ce budget continue de traduire une volonté de soutenir l’agriculture et d’accompagner le monde agricole face aux transitions en cours, en dépit du contexte budgétaire contraint.

J’en viens désormais à l’accompagnement des filières d’élevage face aux crises sanitaires, question à laquelle j’ai consacré la partie thématique de l’avis budgétaire.

Au-delà de l’actualité du sujet, le changement climatique et l’ouverture toujours plus grande de nos économies représentent des facteurs de risque accrus pour l’émergence et la circulation des maladies vectorielles. L’État doit agir en stratège pour mieux prévenir et organiser la lutte contre les épizooties.

L’investissement dans la santé animale, dont le but est d’aider les filières d’élevage à être mieux préparées et résilientes face aux crises sanitaires, est un enjeu pour les finances publiques, notre économie et la santé publique, car la santé animale fait partie intégrante de notre santé.

Alors que l’épizootie d’influenza aviaire laisse un répit aux filières avicoles grâce à la vaccination et au travail des éleveurs, les filières ovine, bovine et caprine affrontent depuis plus d’un an la diffusion de la maladie hémorragique épizootique (MHE) et de plusieurs sérotypes de la FCO.

L’État répond toujours présent en cas de crise grave. Ainsi, entre 2015 et 2022, il a versé plus de 1,1 Md€ d’indemnisations pour aider la filière du foie gras à surmonter les épisodes successifs d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP). Les annonces du précédent et de l’actuel gouvernement sur le soutien à la vaccination et l’indemnisation des pertes dues à la FCO 3 confirment la constance de cet engagement.

L’État prend directement en charge les indemnisations dans le cadre de plans d’urgence lorsque les maladies sont dites « émergentes », à l’instar de la FCO 3 ; à l’inverse, lorsque la maladie est considérée comme endémique (FCO 8, par exemple), la prise en charge de l’indemnisation des pertes relève en principe des filières dans le cadre du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE). Mais, là encore, l’État est présent, puisque les programmes d’indemnisation du FMSE sont abondés à hauteur de 65 % par des fonds publics.

Outre leur coût élevé pour les finances publiques, ces indemnisations ne sont jamais satisfaisantes car elles ne couvrent pas l’ensemble des pertes pour les filières, à l’amont comme à l’aval. En effet, les pertes indirectes, pourtant bien réelles, sont très difficiles à évaluer : qu’en est-il de la vache ou de la brebis qui survit à la MHE ou à la FCO mais qui produit 30 % de lait en moins pendant des mois ? En outre, le risque de perte de la génétique est réel lorsque les épidémies sont massives.

C’est pour l’ensemble de ces raisons que nous avons besoin d’un État stratège. Le premier sujet sur lequel il convient d’adopter une approche stratégique, à l’échelle nationale mais aussi européenne – j’ai d’ailleurs posé une question sur ce sujet à la ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt, il y a quelques jours –, est celui de la vaccination. Je salue les annonces du conseil européen « Agriculture et pêche » de lundi dernier : les ministres des États membres, réagissant à un document présenté par la France et par l’Espagne, ont appelé à l’élaboration d’une stratégie coordonnée en matière de santé animale à l’échelle européenne, garantissant notamment la constitution de stocks suffisants de vaccins « sûrs et efficaces ». Cette position rejoint l’une des huit propositions de mon rapport, laquelle recommande d’impulser et d’accompagner la mise en place, à l’échelle européenne, d’un système de banques de vaccins, d’antigènes ou de souches vaccinales. Il y a également lieu de renforcer, à l’échelle nationale, les moyens de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) : des amendements ont été déposés sur le sujet.

J’ai aussi une pensée pour les éleveurs touchés par la FCO 8 : j’en rencontre régulièrement dans ma circonscription. Il faut les accompagner financièrement dans une campagne de vaccination contre cette maladie, afin d’éviter une reprise de l’épidémie au printemps.

De manière plus générale et pour le temps long, il faut négocier et définir avec les filières une doctrine sanitaire couvrant tous les aspects, de la recherche à la lutte contre les maladies, en passant par la vaccination et par l’élaboration de schémas de financement précis. Ces réflexions ne peuvent pas être séparées de celles sur les modèles d’exploitation.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Lionel Tivoli (RN). Le monde agricole traverse une crise humaine’ : la moitié des exploitants cesseront leur activité dans la décennie qui vient, souvent sans perspective de reprise. La crise est également commerciale, car la concurrence internationale est déloyale et toujours plus forte dans un contexte de libre échange généralisé. Elle touche la production à cause de la succession d’épisodes climatiques et épizootiques qui n’épargnent aucune filière.

Dans ce contexte, quel signal le projet de loi de finances pour 2025 envoie-t-il aux agriculteurs ? Celui du désengagement. La mission est amputée de 700 M€ : les autorisations d’engagement du programme « Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt », lequel rassemble l’essentiel des dispositifs de soutien aux exploitations, sont amputées de 600 M€, soit 20 % des crédits.

Cette austérité s’exerce en partie au détriment du fonds en faveur de la souveraineté et des transitions, que nous avons toujours critiqué car les agriculteurs expriment de plus en plus nettement un besoin de confiance et de liberté dans leurs relations avec l’État. Elle pèse également sur notre souveraineté alimentaire : ainsi, les 100 M€ investis en 2024 dans le plan « Protéines végétales », lequel visait à réduire notre dépendance à l’importation des protéagineux, sont supprimés. Tout aussi inquiétante est la baisse des crédits alloués à la lutte contre les maladies animales, alors que la crise de l’élevage ne cesse de s’aggraver.

Aussi soutiendrons-nous, dans le cadre de l’examen des crédits de la mission, toutes les mesures allant dans le sens de la politique agricole, alimentaire et forestière que nous souhaitons mener. Les acteurs publics sur lesquels repose l’administration des terres agricoles et forestières – je pense notamment à l’ONF – ne doivent plus subir chaque année une baisse de leurs moyens financiers. Nous souhaitons que ce budget intègre l’échec de la stratégie du « tout-biologique » promue durant la décennie précédente. La diminution de la production bio depuis 2022 a clairement montré que ce marché avait atteint son plein potentiel et que les objectifs, pourtant maintenus contre toute évidence pour 2027, sont inatteignables.

Alors que les finances publiques sont proches de la faillite, cette mission ne marque pas d’investissement majeur de l’État dans le développement de la ruralité. Faisons au moins en sorte qu’elle ne liquide pas le monde agricole français !

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le ton de votre intervention est assez négatif, alors que les crédits ne sont pas aussi amputés que vous le suggérez. Dans le contexte actuel de forte contrainte budgétaire, cette mission est l’une des plus préservées du projet de loi de finances.

Je suis d’accord avec vous pour refuser l’abaissement du plafond d’emplois de l’ONF. En revanche, vos propos sur le plan « Protéines végétales » m’étonnent : celui-ci ne disparaît pas malgré l’absence de mention dans le projet annuel de performance et le ministère nous a indiqué que le plan était maintenu. Enfin, vous opposez les agricultures entre elles ; je récuse cette démarche, car l’agriculture biologique a sa place au côté d’une agriculture plus conventionnelle, tout comme celle de conservation des sols. Selon les spécificités des territoires et les envies des agriculteurs, tout le monde a sa place. Nous sommes ici pour défendre toutes les agricultures, même si nous souhaitons que ce secteur effectue sa transition écologique comme l’ensemble de la société.

Mme Françoise Buffet (EPR). Je tiens à vous remercier pour la qualité de votre rapport, lequel traduit bien nos inquiétudes devant ce projet de loi de finances. Alors que les agriculteurs sont confrontés à une série de défis qui menacent notre souveraineté alimentaire, le budget accuse une légère baisse par rapport à 2024 après une hausse particulièrement forte l’année précédente.

Cette orientation pose question, d’autant que l’État s’est fortement mobilisé en début d’année pour répondre aux inquiétudes de la profession. J’avoue éprouver une certaine incompréhension en constatant que la baisse des crédits est largement supportée par le programme 149 – et plus particulièrement par l’action 29 relative à la planification écologique, dont les autorisations d’engagement baissent de 64 %. Cette diminution semble contredire le refus déclaré du Premier ministre de sacrifier le futur au présent. Certes, la totalité du milliard d’euros alloué par la loi de finances initiale pour 2024 à cette action n’aura pas été engagée au cours de l’exercice budgétaire, mais même en tenant compte de cette sous-consommation et du renforcement des missions de l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer), le compte n’y est pas.

Si le groupe Ensemble pour la République a pleinement conscience de la nécessité de dépenser moins et mieux, il s’interroge sur la répartition de l’effort. Tous programmes confondus, les autorisations d’engagement pour des dépenses d’intervention venant directement aider les agriculteurs reculent de près d’un quart quand les dépenses de fonctionnement augmentent de 10 %. Je proposerai donc des amendements visant à corriger ce déséquilibre et à favoriser l’adaptation au changement climatique et la structuration des filières.

Dans la seconde partie de votre rapport, vous évoquez à juste titre les épizooties qui se sont multipliées et qui frappent durement les éleveurs. L’État se tient à leurs côtés, mais il intervient souvent trop tard – alors qu’il est moins coûteux pour les producteurs, comme pour les finances publiques, de prévenir que de guérir. Ma région, l’Alsace, vit sous la menace de la peste porcine africaine : des solutions techniques, comme l’installation de clôtures, sont proposées par la profession pour endiguer ce risque, mais l’État a souhaité conserver une gestion centralisée de cette question qui ralentit le déploiement des dispositifs. Les services déconcentrés seraient tout à fait capables d’effectuer cette tâche, d’autant qu’ils feraient sans doute preuve d’une agilité supérieure à celle de l’État.

Ne faudrait-il pas que l’État confie aux préfectures le soin d’organiser la prophylaxie au sens large, afin d’améliorer la prévention des risques que vous appelez de vos vœux ? Elles pourraient notamment installer des barrières visant à empêcher l’introduction de la peste porcine africaine en France.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) mènent déjà des actions de lutte contre la peste porcine africaine, lesquelles portent leurs fruits puisque l’épidémie est pour l’instant contenue à nos frontières.

La baisse des crédits alloués à la planification écologique dans l’action 29 du programme 149 nous interroge. J’incite le Gouvernement à revenir progressivement, en trois ans, à l’enveloppe de 1 Md€ : je défendrai deux amendements allant en ce sens et il me semble que vous en avez vous-même déposé. Il faut remuscler cette ligne.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Le Gouvernement a le sens du moment ! Presque tous les secteurs agricoles enregistrent des pertes de rendement catastrophiques à cause des conditions climatiques et des épidémies FCO et MHE, dont les variants se multiplient à cause du changement climatique… et c’est ce moment-là que vous choisissez pour supprimer 63 % du budget du ministère de l’agriculture dédié à la transition écologique, soit 700 M€ en moins pour aider les agriculteurs et le secteur forestier !

Comment ces pertes exceptionnelles sont-elles justifiées dans le projet annuel de performances (projet annuel de performances) ? Pour le plan « Protéines végétales », censé aider cette filière à se structurer en France pour réduire la dépendance de notre pays à l’importation des produits nourrissant les élevages, le budget passe de 100 M€ en 2024 à 0 euro pour 2025 ! À la page 64 du PAP, l’explication de cette suppression est presque inexistante ! Quant au fonds en faveur de la souveraineté et des transitions, lequel aide les agriculteurs à adapter leurs cultures au changement climatique, l’explication de la baisse de 100 M€ de sa dotation tient en une page blanche…

Le niveau de mépris est très élevé ! Nous, nous avons un peu l’habitude, mais j’ai transmis ce document aux agriculteurs qui m’ont dit que le Gouvernement se fichait d’eux. Ils consentent à d’immenses d’efforts pour faire leur part de la transition écologique, ils ont souffert de baisses de rendement catastrophiques, ils ont vu leurs troupeaux être décimés jusqu’à 50 % des bêtes et vous leur répondez avec ce budget. Quand on sème ainsi les grains de la colère, on récolte la tempête. Ce budget est une honte !

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La page blanche sur le plan « Protéines végétales » est un raté qui sera corrigé. Des moyens seront redéployés vers le plan « Protéines végétales ». Je suis comme vous préoccupé par la baisse de 63 % des crédits alloués à la planification écologique. Cela vous paraîtra insuffisant, mais il faut retrouver l’enveloppe de 1 Md€ : je propose d’y parvenir progressivement, sur les trois budgets qui viennent, compte tenu de la contrainte budgétaire. J’ai déposé quelques amendements pour muscler cette ligne budgétaire et j’espère que nous irons dans le même sens.

M. Dominique Potier (SOC). Je salue votre travail : vous avez eu raison de pointer et de dénoncer l’affaissement du financement des fonds de transition écologique, ainsi que de mettre l’accent sur les épizooties FCO et MHE qui ruinent les exploitations d’élevage, menacent l’accélération – qui serait tragique – de la décapitalisation de l’élevage et minent le moral des éleveurs. Je vous remercie pour vos propositions : la jauge gouvernementale de 75 M€ n’est peut-être pas à la hauteur et il faudra appréhender globalement les questions liées à la fertilité.

L’effondrement des crédits écologiques constitue un virage : une contre‑révolution culturelle contre l’agroécologie avait déjà germé à droite, ce mouvement se concrétisant très nettement dans ce projet de loi de finances. Ces crédits sont au service de la santé humaine, en premier lieu des travailleurs de la terre, paysans et salariés agricoles, de l’eau, qui est un bien commun que nous partageons avec le monde agricole, et de la compétitivité : il n’y aura pas de production agricole demain sans protection des agrosystèmes. Je condamne fermement le virage du Gouvernement.

Dans le même temps, le Gouvernement se montre très généreux en matière d’allégements fiscaux qui atteignent 400 M€. Vous avez évoqué un total de 9 Md€ d’allégements fiscaux et sociaux : confirmez-vous ce chiffre, qui me semble très élevé – il équivaut aux aides de la PAC ? Pourrions-nous demander au ministère de l’agriculture, qui ne l’a jamais fait jusqu’à présent, de nous transmettre un document présentant les bénéficiaires de ces allégements par catégorie d’exploitation ? Pour la PAC, on sait que cela représente 20 % pour 50 % des aides, mais qu’en est-il à l’échelle nationale ? Il est très important de pouvoir évaluer l’efficacité sociale et économique en matière de production de cette politique fiscale.

Les résultats de la défiscalisation des plus-values pour la mécanisation sont pauvres : le dispositif profite principalement aux grands actionnaires du machinisme et provoque un surcoût de mécanisation dans les exploitations agricoles. Le projet de loi de finances étend le système : est-ce raisonnable et efficace économiquement ?

L’ancien ministre Marc Fesneau a affirmé qu’une étude du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) dressait la liste des meilleurs mécanismes d’allégement fiscal pour l’installation. Où est ce rapport ? On me dit que les Jeunes Agriculteurs (JA) et que le rapporteur général du budget, notre collègue Charles de Courson, l’ont obtenu ; mais l’Assemblée nationale en serait privée ? Il semble que Bercy bloque sa parution : je demande que ce rapport nous soit transmis avant l’examen du projet de loi de finances en séance publique, car nous avons besoin de cet éclairage. Cet allégement illimité est-il au service du renouvellement des générations ou constitue-t-il un nouveau privilège pour les plus grands détenteurs de patrimoine ?

Le groupe Socialistes et apparentés dénonce fortement ce budget gribouille, contre-révolutionnaire et contre-productif sur le plan économique et social. Notre groupe souhaite l’amender ; à défaut, il s’opposera à son adoption.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les chiffres des allégements fiscaux et sociaux que je vous ai communiqués et qui figurent dans le rapport m’ont été transmis par le ministère. Nous ne connaissons pas, en revanche, la ventilation de l’enveloppe de 9 Md€.

Madame la présidente, la commission pourrait demander le rapport du CGAAER.

Nous débattrons, lors de l’examen des amendements, des améliorations budgétairement soutenables pouvant être apportées aux crédits de la mission. Je l’évoque à la fin du rapport : les évolutions dans l’agriculture doivent intégrer les enseignements de la recherche et les changements sociétaux ; les prochains budgets devront tenir compte des engagements que prend le monde agricole en matière de transition écologique. Voilà pourquoi il me semble opportun d’augmenter les crédits affectés à la planification écologique : je répéterai ce credo à madame la ministre.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je retiens que nous aurions besoin d’un éclairage sur l’ensemble des exonérations sociales et fiscales. Plus les aides de la PAC diminuent – mouvement amorcé il y a quinze ans – et plus les montants d’exonérations sociales et fiscales progressent : cet effet ciseau aboutit au fait que les allégements sont maintenant comparables aux aides. Le législateur doit être éclairé sur l’ensemble de ces exonérations.

M. Julien Dive (DR). Aucun orateur n’a parlé de production et de compétitivité. Pourtant, la compétitivité agricole française est menacée sur les scènes européenne et mondiale. Le Gouvernement doit donc présenter un budget à même de redonner de la force à la « ferme France » et lui permettre de relever ces défis.

Nous souhaitons pérenniser le mécanisme d’exonération de cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (Tode) – cette mesure relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale – auquel tous les groupes politiques sont attachés. L’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties est relevée de 20 % à 30 %. L’exonération partielle de la reprise de la déduction pour épargne de précaution (DEP), instrument important en période d’aléas climatiques, atteindra 30 % des sommes engagées. La défiscalisation du gazole non routier (GNR) est maintenue.

L’objectif de ces mesures est de redonner de la force à la « ferme France » et de répondre aux revendications du monde agricole du début d’année, lesquelles sont toujours dans l’air du temps pour les agriculteurs qui attendent qu’un budget concrétise les annonces. Les crédits de la mission ont en effet progressé de près d’un tiers entre 2023 et 2024 et la baisse de 6 % pour 2025 correspond aux lettres plafonds communiquées par le précédent gouvernement au Premier ministre Michel Barnier, avant que madame Annie Genevard ne prenne ses fonctions rue de Varenne. Dans le cadre de ces plafonds, la nouvelle ministre a dû effectuer des choix et elle a privilégié les réponses aux attentes du monde agricole.

Les lignes budgétaires consacrées à la planification écologique n’existaient pas avant 2023. Ces actions sont utiles, mais le dispositif fonctionne très mal : il repose sur des appels à projets et peut-être conviendrait-il d’en changer la nature.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous qui êtes attaché aux questions de recherche et développement (R&D), j’aurais aimé que vous vous attardiez davantage sur la baisse des crédits affectant la R&D dans l’agriculture et que vous proposiez de les augmenter. C’est en effet par là que passera la planification écologique que vous défendez.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je vous précise que nous avons repris les chiffres des allégements sociaux et fiscaux donnés dans les réponses du ministère au questionnaire budgétaire.

La fiscalité du GNR ne relève pas des crédits de la mission que nous examinons. Nous reviendrons dans les amendements sur le mécanisme de Tode, que j’évoque dans le rapport. Je n’en ai pas fait état dans ma présentation, car j’ai choisi de mettre en lumière sur la question sanitaire : depuis la mi-août, je vois la crise s’enflammer dans mon territoire et nous devons aux agriculteurs une recherche approfondie de moyens leur permettant de résister.

Je suis entièrement d’accord avec vous sur la R&D : les enseignements tirés de la recherche doivent être diffusés dans la formation initiale et continue, aspect que j’évoque dans le rapport. Les questions sanitaires touchent autant l’élevage que la production végétale et elles doivent bénéficier des avancées de la recherche.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie de vos précisions sur l’enveloppe de 9 Md€ d’exonérations sociales et fiscales. Il est d’autant plus pertinent de s’interroger sur ce montant, quelles que soient nos positions politiques, qu’il atteint désormais le même niveau que celui des aides de la PAC.

M. Benoît Biteau (EcoS). Lorsque l’on parle de crise, il me semble opportun d’identifier les causes pour les traiter plutôt que de tenter de réduire les conséquences. Or la logique de ce budget étant de s’attaquer aux conséquences de la crise, celui-ci ne fait que mettre des pansements sur une jambe de bois. La crise agricole est structurelle et non conjoncturelle. Il est donc nécessaire de modifier en profondeur certaines politiques publiques pour combattre les causes de la crise.

Alors que ce sont le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité qui menacent la productivité de l’agriculture, la souveraineté alimentaire et le revenu des agriculteurs – ce n’est pas moi qui le dis, c’est le commissaire européen à l’agriculture –, sacrifier la planification écologique, instrument de lutte contre les causes de la crise, est irresponsable pour le monde agricole. Le lien entre les crises sanitaires et le dérèglement climatique n’est plus à démontrer : bien sûr qu’il faut immédiatement mettre des vaccins à la disposition des éleveurs… mais on doit s’attaquer frontalement au dérèglement climatique pour empêcher la résurgence de tels épisodes.

Le refus de financer la planification écologique est une erreur stratégique grave. Pierre Mendès France disait que « gouverner, c’est prévoir ». Compte tenu des projections des scientifiques concernant les effets du dérèglement climatique, y compris pour l’agriculture, c’est tout simplement suicidaire.

Certains collègues opposent les modèles agricoles et veulent sacrifier l’agriculture biologique. Or c’est elle qui apporte les meilleures réponses, y compris sur le plan économique et en matière de compétitivité, les résultats des centres de gestion le montrent. Nous devons donc continuer les efforts.

Des expérimentations ont lieu. Je viens d’une région où on expérimente, depuis des années, une baisse des pesticides sur plusieurs milliers d’hectares, avec des centaines d’agriculteurs. La démonstration a été faite que cela permet une stabilisation des rendements et une amélioration des revenus. Quand on réduit de 200 euros par hectare et par an les coûts de production liés aux pesticides, dans une structure céréalière d’une centaine d’hectares, ce sont 20 000 euros par an qui restent « dans les fouilles » de l’agriculteur. Lutter contre les pesticides n’est pas contraire à l’économie.

Je viens, par ailleurs, d’une circonscription dans laquelle un problème de santé se pose, pour les riverains et les gens exposés aux pesticides, et d’une assemblée, le Parlement européen, où il a été démontré que le principal risque au travail des agriculteurs était l’exposition aux pesticides. Il va donc falloir travailler sur une réduction de leur utilisation dans l’agriculture.

M. Pascal Lecamp (Dem). En tant qu’ancien rapporteur spécial des crédits de la mission Aafar à la commission des finances, je sais combien ce budget est complexe. L’année 2024 est marquée par un contexte très particulier, celui d’une crise agricole suivie d’une crise politique, ce qui n’a pas permis de répondre de manière satisfaisante à la première de ces crises. Certaines mesures sont néanmoins prévues dans le projet de loi de finances, à la suite des promesses du précédent gouvernement. C’est une bonne chose, mais ce budget n’a pas la cohérence dont nous avons besoin pour avancer.

Comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, ainsi que d’autres collègues, il ne faut pas revenir sur la stabilité des emplois à l’ONF. L’évolution prévue pour l’an prochain est inacceptable au vu des difficultés que les agents de l’ONF ont connues dans le passé et de leur rôle dans la gestion durable des forêts. Nous sommes donc plusieurs à avoir déposé des amendements tendant à maintenir ces effectifs.

S’agissant de la planification écologique, la situation n’était pas assez mûre l’an dernier pour que les crédits très importants qui étaient inscrits soient fléchés. De ce fait et à cause de la crise politique – la dissolution et le retard qui a suivi –, les crédits n’ont pas été décaissés. Ce n’est pas une raison pour revoir aussi brutalement à la baisse nos ambitions, même s’il est vrai qu’il ne sert à rien d’inscrire dans le projet de loi de finances des crédits que nous ne sommes pas capables de dépenser. Je suis prêt à participer à l’exercice de « musculation » de la planification écologique dont vous avez parlé. Je pense en particulier aux crédits relatifs au diagnostic décarbonation. Ce n’était peut-être pas le bon outil, mais des moyens seront nécessaires pour soutenir le diagnostic transmission prévu dans le projet de loi d’orientation agricole (PLOA).

Il faudra que l’examen de ce texte avance très vite, en complément du budget pour 2025. Le PLOA, qui me tient à cœur ainsi qu’à notre collègue Nicole Le Peih, contient des mesures attendues. Nous devrons aussi donner rapidement des suites au rapport de nos anciens collègues Anne-Laure Babault et Alexis Izard au sujet des lois « Egalim ». Au-delà de la question des négociations commerciales, la prochaine loi Egalim devra permettre de revoir la politique du « 50-20 » (50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques) dans la restauration collective, notamment afin de mieux valoriser le « label rouge » par rapport à d’autres labels moins exigeants, qui sont presque entrés par effraction dans le système. Par ailleurs, il faudra soutenir financièrement la mise en œuvre réelle des projets alimentaires territoriaux, qui couvrent maintenant 100 % du territoire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je pense que tous les députés de la commission – et au-delà – ont le PLOA à cœur : l’agriculture concerne les 577 députés que nous sommes, puisqu’il s’agit de notre alimentation.

Je suis d’accord avec vous en ce qui concerne la planification écologique : la baisse des crédits de 63 % est brutale. Je ne cherche pas à la défendre, mais le milliard d’euros initialement prévu était peut-être surdimensionné. Nous pourrions essayer de trouver un juste milieu en y allant progressivement sur une période de trois ans. Les très nombreux amendements qui ont été déposés nous permettront de revenir sur ce point.

M. Henri Alfandari (HOR). Vous avez donné la priorité aux aspects sanitaires dans votre rapport, ce que je salue. La question est en effet urgente et nos agriculteurs ont besoin qu’on soit à leur écoute et qu’on les accompagne. Il faut redonner du sens aux métiers agricoles – c’est l’objet du PLOA. En matière de normes, il ne s’agit pas de faire moins mais mieux, pour aller vers moins de complexité et mieux accompagner. Avez-vous réussi à entrer suffisamment dans les détails pour voir où se trouvent, du côté des opérateurs, les vraies marges de réduction des dépenses de fonctionnement ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le PLOA était prévu avant la crise, mais elle a peut-être un peu influencé le contenu du texte – tant mieux si cela va dans le bon sens. Nous devrons reprendre le débat : je fais partie de ceux qui pensent qu’il est nécessaire de fixer une date butoir pour l’adoption définitive, par exemple le Salon de l’agriculture. Certaines mesures, notamment en ce qui concerne l’installation et la formation, sont très attendues.

Il est difficile d’entrer suffisamment dans le détail des dépenses de fonctionnement des opérateurs. Je ne cherche pas d’excuses, mais nous avons un peu manqué de temps. J’ai souhaité faire un « gros plan » sur la crise sanitaire, parce qu’elle est importante et qu’il fallait écouter les acteurs des différentes filières – celles qui sont actuellement en crise et celles qui ont eu précédemment des difficultés – afin de voir quels enseignements pouvaient être tirés. Ce travail passionnant m’a conduit à faire huit propositions. Je compte sur notre collègue Manon Meunier pour m’aider à faire en sorte que le ministre s’en saisisse. Nous avons besoin d’une approche sanitaire différente, qui tienne compte de la recherche, comme l’a souligné monsieur Dive.

M. Henri Alfandari (HOR). Comme tout le monde, je suis très favorable à la préservation des effectifs de l’ONF, mais a-t-elle vraiment besoin, si on entre dans les détails, d’avoir des bûcherons ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous sommes nombreux à avoir échangé avec l’ONF. Il faut distinguer la question des emplois et celle des moyens de fonctionnement. Il est extrêmement important de protéger nos forêts et de faire en sorte qu’elles soient en bon état, car c’est notre puits de carbone. Je rappelle que 45 % du CO2 émis n’est pas capté. Il faut réduire les émissions et nous avons besoin des forêts pour capter plus de CO2.

M. David Taupiac (LIOT). La crise agricole atteint un point critique en France. En l’absence de réponses rapides, nous nous exposons à une nouvelle vague de colère et de manifestations de la part des agriculteurs.

Le projet de loi de finances pour 2025 contient de premières dispositions, promises en février dernier dans le sillage des manifestations hivernales. Le secteur agricole est ainsi l’un des seuls à déroger aux mesures de rigueur généralisées et à bénéficier de nouveaux allégements fiscaux. Une partie va dans le bon sens, comme l’abandon du relèvement de la fiscalité sur le gazole non routier, mesure qui était injuste parce que les agriculteurs ne disposent pas, à ce stade, de réelle alternative. De même, la pérennisation du Tode correspond à une demande de longue date qui vise à garantir la compétitivité des filières à haute intensité de main-d’œuvre – arboriculture, maraîchage ou encore viticulture. Quant aux aménagements relatifs aux déductions pour épargne de précaution, ils permettront de mieux amortir les crises économiques et les aléas climatiques qui se multiplient, en compensant la volatilité des revenus.

Néanmoins, ces quelques améliorations ne suffisent pas à nous faire oublier les trop nombreuses lacunes de ce budget. La première est le manque de mesures conjoncturelles pour les exploitants qui font face à des aléas climatiques et à des épizooties. Alors que les difficultés se sont multipliées cet été, en particulier des baisses de rendement et des prix souvent trop bas, pas un euro de plus n’est provisionné. Le Premier ministre avait pourtant annoncé, début octobre, l’instauration d’un fonds d’urgence contre la fièvre catarrhale ovine (FCO 3) de 75 M€ d’euros. Cette mesure, trop faible compte tenu des enjeux, ne s’est même pas concrétisée. Par ailleurs, nous constatons l’absence de dispositif spécifique pour aider la filière bio, en grande difficulté face au déclin de la demande, et la viticulture, elle aussi en grande difficulté tant en matière de production que sur le plan de la commercialisation – notamment à l’export. L’armagnac et le cognac sont grandement menacés dans leurs principaux marchés, les États-Unis et la Chine. À plus long terme, force est de constater que ce projet de loi de finances renonce à préparer l’avenir : il confirme la baisse du budget de la planification écologique dans l’agriculture, de 10 % en crédits de paiement et de 21 % en autorisations d’engagement. Les rares dispositions qui ont été sauvées, comme le plan « haie », subissent aussi des coupes drastiques.

En résumé, ce projet de loi de finances tient en partie les promesses faites au début de l’année 2024, mais ne répond ni aux besoins actuels ni à ceux à venir.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises ces questions. Vous avez pointé des dispositifs fiscaux relevant de la première partie du budget qui, même si je partage certains éléments de votre analyse, n’entrent pas dans le cadre de notre examen. Des amendements ont été déposés, y compris par vous, pour essayer de remuscler un peu les crédits, ce qui me paraît une nécessité – je donnerai donc des avis favorables.

M. André Chassaigne (GDR). Je dénonce les fortes baisses des autorisations d’engagement (718 M€) et des crédits de paiement (311 M€) : ces arbitrages budgétaires affecteront lourdement l’agriculture et la gestion forestière, deux secteurs pourtant confrontés à des crises majeures sur les plans économique, sanitaire et climatique.

Le problème prioritaire est l’inconsistance et l’insincérité budgétaires concernant les moyens destinés à répondre aux crises sanitaires à répétition que subit l’élevage. Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez eu raison de consacrer la seconde partie de votre travail aux incohérences et insuffisances de l’accompagnement des filières d’élevage face à ces crises. Non seulement les moyens sont très loin d’être à la hauteur – ils seront donc mécaniquement revus en cours d’année –, mais surtout le cadre pour prévenir et accompagner les éleveurs face aux risques est totalement éclaté et illisible – je le dis depuis longtemps. Nous avons besoin d’un vrai régime public de prévention et de protection contre tous les risques et aléas, c’est-à-dire un régime universel pour les éleveurs, et non de mesures partielles qui se juxtaposent – les moyens insuffisants du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), les moyens de l’action 22 fléchés vers l’assurance récolte, les moyens affectés à ce qui reste du fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA), les enveloppes exceptionnelles aux conditions d’accès limitées et qui se promènent entre les programmes et les soutiens de l’action 2 « Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal » du programme 206… Un tel « micmac » ne permet pas de répondre aux besoins et, en fin de compte, on laisse périr beaucoup d’exploitations au fil de l’eau.

En ce qui concerne la filière ovine, la priorité doit être d’intégrer dans les mesures budgétaires la prise en charge publique de la vaccination contre tous les variants de la FCO, y compris la FCO 8 qui provoque des ravages dans les exploitations ovines. C’est le seul moyen d’éviter la reprise de l’épidémie. J’ai donc déposé un amendement d’appel en ce sens. Ne pensez-vous pas qu’il faudrait également obtenir l’activation de la réserve européenne de crise pour accompagner durablement les éleveurs touchés ? Nous avons besoin d’une aide à la recapitalisation pour compenser les pertes de production et la déstabilisation à venir des marchés, sinon nous basculerons dans une crise structurelle qui se traduira par une production en berne et laissera la porte ouverte à toujours plus d’importations.

Je ne peux terminer mon intervention sans dire un mot du mauvais tour qu’est en train de prendre la négociation de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Les agriculteurs attendent que l’engagement pris soit tenu : pas de signature sans réciprocité des normes, sous couvert d’un énième mécanisme de compensation qui finirait d’amputer les capacités productives de notre pays.

J’aurais aussi voulu vous parler de l’ONF, mais nous y reviendrons par la suite.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Monsieur le président Chassaigne, la baisse de 700 M€ que vous avez évoquée concerne la ligne budgétaire consacrée à la planification écologique et non l’ensemble des crédits. Nous sommes plusieurs à regretter cette évolution et à avoir déposé des amendements à ce sujet.

Vous souhaitez un régime public et universel d’accompagnement contre les aléas. Je crois qu’il conviendrait plutôt de travailler sur une stratégie de financement, notamment dans le domaine sanitaire – cela fait partie des propositions que je fais dans mon rapport et des questions que j’ai posées, il y a deux semaines, à la ministre. Nous devrons revenir sur ce sujet auprès du Gouvernement : il faudrait faire beaucoup plus de prévention pour éviter d’avoir ensuite à constater des dégâts et à les indemniser. Nous avons besoin, y compris pour la compétitivité de nos exploitations, d’une approche différente.

Je répondrai à votre appel concernant la stratégie vaccinale, mais en vous demandant de retirer votre amendement au profit de celui, mieux-disant, que j’ai déposé. Nous aurons plus de chances de marquer un essai si nous agissons en pack. S’agissant de la FCO 8, il faut éviter que l’épidémie redémarre l’année prochaine et que nos éleveurs ovins et bovins se retrouvent complètement à plat.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons à une autre série de questions.

M. Julien Dive (DR). Le projet de loi d’orientation agricole permettra de répondre à une partie des enjeux et des revendications. Je le soutiendrai donc, même si j’étais plutôt pour une loi de programmation pluriannuelle beaucoup plus large, qui permette d’apporter des réponses financières. Comme l’a dit notre collègue Biteau, il faut s’attaquer aux causes, ce qui implique d’avoir réellement une vision à moyen et à long termes. Ce qui nous est proposé est un budget d’urgence et non un texte de planification.

M. Pascal Lecamp (Dem). Vous avez souligné à juste titre, monsieur le rapporteur, que l’État a été au rendez-vous s’agissant de l’influenza aviaire. Je salue également la décision du Premier ministre d’étendre jusqu’à la fin de l’année les indemnisations pour la maladie hémorragique épizootique. Sans cela, mon département, où les premiers cas se sont produits mi-septembre, aurait été exclu.

Je vous rejoins aussi à propos de la filière ovine, qui est extrêmement fragile : elle a les plus bas revenus de toute la profession agricole et ne dispose d’aucune marge de manœuvre. L’accompagnement doit être total et sans hésitations, sans quoi les fermes ovines risquent de disparaître. J’ai participé, il y a une quinzaine de jours, à une réunion du groupe de défense sanitaire (GDS) « Ovins » de mon département, où la FCO 3 et la FCO 8 sont également apparues. Face à ces problèmes dont la nature et l’ampleur sont imprévisibles, notre approche consiste à faire de la gestion de crise. Je propose de lancer une mission d’information afin de creuser les propositions très intéressantes que vous avez faites et les idées que plusieurs collègues viennent d’évoquer.

M. Benoît Biteau (EcoS). Je reviens sur la question, urgente, de l’installation : on ne pourra la traiter que lorsqu’on saura offrir des perspectives. On peut instaurer des aides à l’installation, comme les dotations jeunes agriculteurs et, parfois, les prêts bonifiés, mais c’est ce que j’appelle vulgairement un « piège à mouches ». C’est one shot, on attire des jeunes, mais on ne leur donne pas de perspectives, de visibilité ou de lisibilité sur la durée. Il faudrait le faire, même si nous sommes en période de crise et que nous devons aussi trouver des solutions immédiates : c’est la seule façon de susciter des vocations et de faire en sorte que des jeunes s’installent dans les dix prochaines années, au cours desquelles tout va se jouer.

M. Dominique Potier (SOC). Nous sommes tout aussi attachés que Julien Dive à la productivité et à la compétitivité, mais nous pensons qu’il faut réaliser des investissements d’avenir, aussi bien en matière de recherche que d’accompagnement du monde paysan. Sinon, il sera l’une des premières victimes des impacts environnementaux et sanitaires qu’il va produire contre son gré.

S’agissant des exonérations de cotisations, nous devons travailler – et cela pourrait être également l’objet d’une mission d’information – sur la manière de les déployer, à périmètre constant, au service de l’ensemble du monde paysan afin de produire le maximum de justice sociale et d’efficacité économique. Je suis dubitatif sur le montant – je tablerais plutôt sur 4 Md€ ou 5 Md€ – mais il est de toute manière suffisamment élevé pour qu’on se penche sur la question de l’efficacité de cet argent public.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis d’accord avec l’idée qu’il faut s’attaquer aux causes. C’est le sens de la trajectoire sur trois ans que je propose, très modestement, pour faire remonter la ligne de crédits consacrée à la planification écologique. J’aurais pu vous faire plaisir intellectuellement en disant qu’il fallait tout faire tout de suite, mais cela n’aurait pas été très responsable compte tenu de la situation budgétaire.

La proposition de créer une mission d’information s’inscrit dans la continuité de mes propositions : il faut changer de braquet.

En ce qui concerne l’installation, nous devons passer à une autre logique en raisonnant moins en termes d’appels à projets que de planification et d’accompagnement de long terme. Nous pourrons y revenir lorsque nous reprendrons l’examen du projet de loi d’orientation agricole.

 

Article 42 et état B : Crédits du budget général

 

Amendements II-CE181 de M. Dominique Potier, II-CE160 de Mme Manon Meunier, II-CE53 de M. Anthony Brosse, II-CE113 de M. André Chassaigne et amendements identiques II-CE39 de M. Anthony Brosse, IICE196 de M. Pascal Lecamp et II-CE213 de M. Julien Dive (discussion commune)

M. Dominique Potier (SOC). S’attaquer au budget consacré aux équivalents temps plein (ETP) de l’Office national des forêts (ONF) – même « à la marge », comme vous le direz peut-être pour défendre le Gouvernement – est une faute majeure. Ces crédits mériteraient au contraire d’être renforcés. Un recours au secteur privé a été évoqué, mais on souffre en réalité d’une carence d’entreprises de qualité pour faire le travail. Sans les ouvriers de l’ONF, on ne peut plus entretenir la forêt dans certains coins et les agents font un travail de planification, de recherche et de mise en œuvre de politiques extrêmement importantes pour l’économie forestière et le puits de carbone. La contribution de ce dernier a été revue à la baisse de 30 % à cause des crises sanitaires et des effets du dérèglement climatique. Nous sommes confrontés à une urgence forestière pour laquelle il faut des bras, de l’intelligence et des cœurs. Nous devons donc absolument remuscler l’ONF. Une baisse des ETP serait une provocation dans la période actuelle.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Les forêts subissent des feux et sont décimées par le changement climatique et la perte de biodiversité : elles sont au cœur de la crise environnementale que nous traversons et pourtant cela fait des années que l’on s’acharne sur l’organisme public chargé de les gérer. Ses effectifs sont passés de 12 800 emplois en 2000 à 7 500 cette année. De fortes coupes budgétaires visant les ETP de l’ONF ont eu lieu en particulier sous la présidence d’Emmanuel Macron. Si nous voulons nous tourner vers la sylviculture irrégulière, qui peut être très intéressante économiquement grâce au bois noble, qui rémunère correctement, qui entretient les paysages et la biodiversité et qui peut s’adapter au changement climatique, la solution ne peut être qu’humaine. Il faut revenir à l’échelle écosystémique et, pour cela, avoir des ETP supplémentaires. C’est ce que nous proposons par l’amendement II-CE160.

M. Anthony Brosse (EPR). Mon premier amendement s’inscrit dans la même logique que les précédents, mais propose des crédits un peu moins élevés, dont le calcul repose sur des éléments communiqués par l’ONF. Je vous invite, pour corroborer tout ce qui a été dit, à lire le rapport de la Cour des comptes qui a été publié en septembre. Il ne faut pas prolonger la trajectoire de baisse des effectifs.

M. André Chassaigne (GDR). C’est incroyable ! Quand on sait les besoins pour assurer une gestion durable de la forêt, face au réchauffement climatique, alors même que les effectifs de l’ONF sont passés en vingt ans de 12 500 agents à 7 600, comment peut-on se permettre d’envisager la suppression de 95 ETP supplémentaires ? Je n’arrive pas à comprendre, compte tenu de l’importance de la forêt dans notre pays, qu’on hypothèque ainsi l’avenir. Ce budget est une honte !

M. Anthony Brosse (EPR). L’amendement de repli II-CE39 vise à augmenter les crédits de 1 euro symbolique. L’ONF, dont le budget est composé à 70 % de ressources propres résultant de la vente de bois, pourrait lui-même subvenir au maintien des 95 ETP concernés.

M. Pascal Lecamp (Dem). La préservation des effectifs permettra d’assurer le maintien des missions de l’État, sans coût budgétaire, car 70 % du travail de l’ONF est financé par sa propre activité. Une hausse des effectifs nécessiterait une augmentation du budget, mais pas leur maintien. Je ne comprendrais donc pas qu’on les réduise.

M. Julien Dive (DR). Mon amendement vise aussi à stabiliser les effectifs de l’ONF, qui mérite bien d’être soutenu. Je rappelle que des milliers d’hectares de forêt ont été ravagés par de terribles incendies en 2022, notamment dans la région Nouvelle-Aquitaine : heureusement que l’ONF était là ! Son action est précieuse dans beaucoup de territoires. Je rappelle aussi que les incendies étaient en partie liés à des militants qui refusaient l’entretien des forêts.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il est rassurant de voir que nous militons tous pour nos forêts et que la question des effectifs de l’ONF est assez consensuelle au sein de cette commission. Il faut au moins les stabiliser, comme en 2023 et 2024, après vingt années de baisse drastique. La suppression de 95 ETP supplémentaires empêcherait l’établissement d’accomplir ses missions au service de la transition écologique.

L’ONF ne demande pas que la stabilisation de son plafond d’emplois se traduise par une augmentation de dotation budgétaire. Plus de 70 % de son budget provient, en effet, de ressources propres. Je suis donc favorable aux amendements II-CE39, II-CE196 et II-CE213, mais défavorable aux précédents.

M. Benoît Biteau (EcoS). Je vous invite à réfléchir au modèle économique dont vous vous réclamez. Pour produire les 70 % de ressources propres dont vous parlez et justifier les effectifs de l’ONF, il faut abattre des arbres. Or on ne pourra pas continuer ainsi : on a besoin d’abattre moins, de replanter et d’entretenir les forêts existantes.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Je ne comprends pas : monsieur Brosse nous a dit, pour défendre son amendement II-CE53, qu’il fallait plus d’argent pour le maintien des 95 ETP menacés à l’ONF ; puis, lorsqu’il a présenté son second amendement, que ces effectifs pouvaient être autofinancés. Je ne vois pas comment on pourrait maintenir des postes de fonctionnaires correctement rémunérés et préserver le rôle joué par l’ONF étant donné les défis écologiques que nous affrontons et les pertes que l’ONF va subir. Pour une fois, l’argument de l’argent magique se retourne un peu contre vous.

M. André Chassaigne (GDR). Je dirai, au risque d’avoir la dent dure, que c’est débile : avoir à vendre du bois pour garder les postes nécessaires est complètement contraire à l’objectif même de l’ONF. C’est une approche insensée qui ne tient pas compte des enjeux. On pousse depuis des années à vendre, par exemple les biens sectionaux, mais ce n’est pas de cette manière qu’on peut gérer durablement la forêt.

M. Alexandre Allegret-Pilot (UDR). Les amendements II-CE39, II-CE196 et II-CE213 concernent les plafonds d’ETP, qui ne sont pas forcément voués à être atteints. Il s’agit plutôt de laisser une liberté de gestion à l’ONF et cela n’implique donc pas d’« argent magique ».

M. Pascal Lecamp (Dem). Je n’ai pas parlé d’argent magique. Les forêts se régénèrent et croissent tous les ans. L’ONF, qui fait bien son travail, arrive à dégager une marge et à financer son modèle économique. C’est tout : il ne faudrait pas penser, je le dis en toute amitié à monsieur Biteau, que l’ONF détruit des forêts avec ses ventes. Regardez l’évolution des surfaces.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’ajoute que les 95 ETP dont nous parlons existent aujourd’hui et sont financés. Il s’agit simplement de refuser une baisse du plafond d’emplois.

La commission rejette successivement les amendements II-CE181, IICE160, II-CE53 et II-CE113, puis adopte les amendements II-CE39, IICE196 et II-CE213.

 

Amendements identiques II-CE150 de Mme Manon Meunier et IICE199 de M. Benoît Biteau

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Malgré les grandes déclarations d’Emmanuel Macron, qui avait promis à l’occasion de la COP15 que l’on préserverait 30 % des terres et mers de la planète, et alors qu’une partie de la forêt amazonienne, réservoir de biodiversité fondamental, se trouve sur notre territoire, les budgets consacrés à la gestion de la forêt ultramarine sont intégralement supprimés. C’est absolument scandaleux !

La forêt est un enjeu majeur. Pour maintenir le budget de la sous-action « Forêt en outre-mer » au niveau de 2024, l’amendement vise donc à rétablir les 15 ’M€ de crédits annulés, afin d’assurer la surveillance du foncier et de prendre un minimum soin des forêts outre-mer.

Discuter de l’affectation des crédits ou les réorienter, d’accord ; supprimer les budgets, c’est hors de question.

M. Benoît Biteau (EcoS). Effectivement, l’objectif est de rétablir les crédits de la sous-action consacrée à la forêt outre-mer.

On est tous en train de s’émouvoir du sort de nos petites forêts, mais la forêt guyanaise est plus grande que toutes les forêts de France hexagonale réunies ! Supprimer les 15 ’M€ qui lui étaient jusqu’à présent consacrés, c’est mettre en péril les poumons de la planète.

Si on n’est pas capables de prendre en charge et d’accompagner la préservation d’un massif forestier aussi vaste et déterminant que celui de la Guyane, à quoi bon continuer à parler de climat et de protection de la biodiversité ? Avec cette annulation de crédits, on fait vraiment fausse route.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Comme je l’ai dit, l’importante baisse des crédits alloués à l’action 29 du programme 149 a entraîné des ajustements et une révision de la ventilation entre les différentes sous-actions.

Interrogé sur la suppression des crédits consacrés à la forêt outre-mer, le ministère nous a assuré qu’à défaut d’apparaître dans le projet annuel de performances, la ligne budgétaire afférente n’avait pas disparu : elle sera bien abondée, mais d’un montant qui ne sera déterminé qu’après évaluation de l’avancement des dispositifs lancés en 2024 et des retours de terrain.

Je suis donc défavorable à ces amendements.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Vous rendez-vous seulement compte de ce que vous dites ? Nous sommes censés nous prononcer sur un budget sans savoir quel sera le montant des crédits alloués à la protection de la forêt en outre-mer ou à la planification écologique de l’agriculture : on ne peut quand même pas voter à l’aveugle !

On nous demande de faire confiance, de nous contenter de supposer que quelques millions d’euros seront bien alloués à la protection de la forêt amazonienne en Guyane : ce n’est pas possible ! Moi, je ne fais pas confiance à la prétendue volonté du Gouvernement de préserver les forêts.

Le Gouvernement a rendu une copie à moitié terminée : en arriver à ce piètre niveau de travail à l’Assemblée nationale est proprement honteux. Je propose que nous fassions notre propre budget, ici, à l’Assemblée. Et en l’occurrence, les forêts ultramarines méritent bien au moins 15 M€.

M. Benoît Biteau (EcoS). Que risque-t-on à adopter ces amendements ? Au pire, ils ne serviront à rien ; mais si, finalement, la ligne n’est pas abondée, ils auront permis de sanctuariser des crédits.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Chacun prendra ses responsabilités au moment du vote.

Je répète que des crédits seront bel et bien alloués à la forêt outre-mer, même si, à ce stade, leur montant n’est pas encore connu. Par ailleurs, les moyens alloués à l’Office national des forêts dans le cadre de l’action 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois », qui avaient fait l’objet d’une nette revalorisation l’an dernier, restent stables. Pour la sincérité du débat, ne laissons pas croire à ceux qui nous écouteraient que les crédits consacrés à la forêt ont disparu, parce que ce n’est pas vrai.

La commission adopte les amendements.

 

Amendements II-CE149 de Mme Mathilde Hignet et II-CE38 de M. Anthony Brosse (discussion commune)

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Alors que le risque d’incendie devrait fortement augmenter dans les prochaines années en raison du changement climatique, le Gouvernement décide de supprimer intégralement les crédits alloués à la défense des forêts contre les incendies. C’est incompréhensible !

La période à fort risque d’incendie devrait tripler, les feux hivernaux sont amenés à se multiplier et des zones jusqu’alors épargnées sont désormais menacées. Par exemple, en 2022, pas moins de trois mille hectares de landes et forêts avaient été touchés par les incendies en Bretagne.

Le coût des incendies survenus dans l’Union européenne en 2022 a été estimé à 2 ’Md€. Et selon une étude de la Banque mondiale, investir un euro dans la prévention des incendies de forêts permet d’économiser deux euros de dommages.

Nous souhaitons donc rétablir l’intégralité des crédits consacrés à la défense des forêts contre les incendies.

M. Anthony Brosse (EPR). La loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque d’incendie prévoyait la création de 51 emplois à temps plein (ETP) au Centre national de la propriété forestière (CNPF) en trois ans. Seize ont déjà été créés l’an dernier. Conformément à cette trajectoire, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit la création de 16 ETP supplémentaires. L’amendement vise donc à augmenter de 967 286 euros les crédits correspondants.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je le répète, aucun crédit n’est supprimé : toutes les lignes seront abondées. Je rappelle aussi que les moyens de l’ONF sont sanctuarisés à l’action 26. Je suis donc défavorable à l’amendement II-CE149, d’autant qu’il prévoit un budget important de 34 Md€.

Je serai en revanche favorable à l’amendement II-CE38, qui prévoit une somme raisonnable pour nous permettre de tenir les engagements pris en 2023 pour le Centre national de la propriété forestière.

M. Julien Dive (DR). Nous ne pouvons pas voter des amendements ici sans tenir compte de ce qui se passe à la commission des finances et à la commission des affaires sociales.

Alors qu’à l’initiative de son rapporteur général, cette dernière a adopté hier soir un amendement visant à étendre aux travaux forestiers, notamment d’entretien, le dispositif d’exonération de cotisations patronales pour l’emploi des travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (Tode), l’amendement II‑CE149 propose de grignoter ces crédits pour abonder une autre ligne. Non seulement cela va à l’encontre du choix fait par nos collègues hier soir, mais en plus, cela pénalise l’extension du dispositif Tode, très attendue par la profession. Je serai défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CE149.

Elle adopte l’amendement II-CE38.

 

 

Amendement II-CE57 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Par effet d’aubaine, le fonds de renouvellement forestier a pu financer des actions contre-productives, comme des coupes rases abusives.

L’amendement vise donc à réorienter les fonds qui lui sont alloués vers de nouvelles lignes, comme le fonds de soutien au renouvellement forestier par amélioration – afin de soutenir une sylviculture plus durable –, le fonds d’aide aux travaux d’amélioration forestiers – pour financer des travaux de sylviculture mélangée à couvert continu – ou encore le fonds de soutien aux petites et moyennes scieries de feuillus.

Une partie des fonds est également redistribuée à l’ONF et au CNPF, afin d’augmenter leurs effectifs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je ne comprends pas la logique de cet amendement.

Vous proposez de redéployer plus de la moitié des crédits du volet « Forêt » de la planification écologique, inscrits à l’action 29 du programme 149, pour créer pas moins de neuf nouveaux programmes relatifs à la forêt, qui s’ajoutent à ceux déjà existants dans le programme 149.

Aux termes de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), le pilotage des programmes relève de la responsabilité du Gouvernement. Comme je l’ai expliqué, la répartition des moyens entre les différents dispositifs, notamment sur le plan de renouvellement forestier, n’est pas encore arrêtée à ce stade. Si l’exécution 2024 montre que les crédits alloués à ce dispositif ne peuvent pas être consommés, ils seront sans aucun doute redéployés vers d’autres dispositifs, à condition qu’ils fassent partie du même programme.

Il me semble donc préférable de concentrer les 228 M€ de crédits alloués au plan de renouvellement forestier, plutôt que d’en ventiler 135 M€ entre neuf nouveaux programmes, ce qui ne sera sans doute pas sans difficultés pour le pilotage et l’exécution. Avis défavorable.

Mme Chantal Jourdan (SOC). L’objectif était d’utiliser plus utilement les crédits en les conditionnant aux besoins de demain : en l’état, le projet de loi de finances ne fait aucune mention de la sylviculture durable – c’était l’autre objectif de l’amendement…

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. … sauf que les 135 M€ alloués aux nouveaux programmes, certainement très intéressants, sont pris au programme 149, menant à un éparpillement de ses crédits : voilà ce que je conteste. Pour être le plus efficace possible, ne rigidifions pas inutilement l’exécution du programme.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE200 de M. Benoît Biteau

M. Benoît Biteau (EcoS). Créée l’an passé, la ligne « Graines et plants, et travaux forestiers » vise à soutenir, d’une part, les pépiniéristes et entreprises de reboisement, et, d’autre part, les entreprises spécialisées dans les travaux d’installation et d’entretien des plantations et la régénération naturelle des forêts.

Face aux conséquences du dérèglement climatique sur les peuplements forestiers, il est nécessaire de travailler avec les pépiniéristes pour garantir un approvisionnement en végétaux et semences d’origine locale (VOL), bien adaptés à l’entretien et au reboisement des massifs forestiers, sans quoi le risque est grand d’homogénéiser et standardiser la ressource génétique et de s’appuyer sur des ressources inadaptées à leur préservation.

Pour accompagner ce travail essentiel des pépiniéristes et réussir la préservation de nos massifs forestiers, l’amendement vise à rétablir la ligne « Graines et plants, et travaux forestiers » et à la doter de 10 M€.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Encore une fois, ne laissons pas croire que ces crédits auraient été supprimés, alors qu’ils ont seulement été intégrés dans l’enveloppe du volet « Forêt » de la planification écologique, dotée, je le rappelle, de 228 ’M€ en autorisations d’engagement. Avis défavorable.

M. Benoît Biteau (EcoS). Dans le doute, il me semble préférable de garantir l’existence de cette ligne.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CE137 de M. Nicolas Meizonnet

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE214 de M. Jean-Luc Fugit, amendements identiques II-CE42 de Mme Lisa Belluco et II-CE59 de Mme Chantal Jourdan, amendements II-CE144 de Mme Manon Meunier et II-CE60 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les crédits de la planification écologique, prévus à l’action 29 du programme 149, sont répartis en trois blocs consacrés respectivement aux haies, à l’agriculture – on y trouve notamment les sous-actions « Fonds de souveraineté et transition » et « Soutien à l’agriculture biologique » – et à la forêt.

Avec un ambitieux pacte en faveur de la haie, le précédent Gouvernement visait un gain net de cinquante mille kilomètres de haies d’ici à 2030. Or les moyens de ce pacte sont divisés par trois, passant de 110 M€ en autorisations d’engagement en 2024 à seulement 30 M€ pour 2025 : il n’y a aucune raison qu’ils subissent des coupes plus sévères que les autres dispositifs de la planification écologique, qui ne sont, eux, réduits que de moitié.

Par cet amendement, je propose donc de porter ces crédits à 50 M€. Les autres amendements de la discussion commune s’inscrivent dans le même esprit, mais ils me semblent moins soutenables d’un point de vue financier. J’appelle donc à leur retrait au profit de mon propre amendement.

M. Benoît Biteau (EcoS). Je suis très surpris de l’effondrement de ces crédits.

De la restructuration des sols à travers l’agroforesterie à la préservation de la biodiversité qui nous permettrait d’être moins dépendants des pesticides, les haies sont un partenaire incontournable de la compétitivité de l’agriculture. Pourtant, aujourd’hui, on en détruit deux fois plus qu’on en replante : sachant que les haies vieilles de plusieurs dizaines d’années sont déjà difficilement remplaçables en termes de fonctionnalités offertes, c’est la double peine.

Alors que nous sommes déjà trop peu attentifs au respect de la législation en matière de destruction des haies, voilà maintenant que le budget permettant d’en replanter est diminué ! Je ne comprends pas.

L’amendement vise donc à sanctuariser 80 M€ en faveur de la replantation et de l’accompagnement à la restauration des haies.

Mme Mélanie Thomin (SOC). L’intérêt des haies n’est plus à démontrer. Outil agronomique, levier de la transition énergétique, préservation des paysages : les fonctionnalités des haies sont nombreuses – comme celles des talus, d’ailleurs, et il y en a beaucoup dans mon territoire.

Nous ne pouvons donc que déplorer la baisse du budget alloué au pacte en faveur de la haie, véritable rupture au regard des engagements pris par le Gouvernement en 2023. Afin de fixer la trajectoire de cette politique, l’amendement vise à abonder l’enveloppe qui lui est consacrée à hauteur de 80 M€.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Cette suppression serait presque drôle si la situation n’était si dramatique, car la protection des haies était bien la seule proposition de l’ancien ministre Marc Fesneau en matière d’agroécologie ! Les 110 M€ de crédits ont été intégralement consommés l’an dernier, mais vous réduisez quand même ce budget à néant en ne lui allouant plus que 30 M€. Je souscris aux propos de monsieur Biteau : la préservation des haies existantes doit être notre priorité.

Nous pouvons débattre de l’usage qui doit être fait des 110 M€, mais pas réduire à 30 M€ cette ambition phare du ministère Fesneau. Franchement, ça me rend triste pour lui !

M. Dominique Potier (SOC). On va finir par le regretter !

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement de repli propose d’abonder le pacte en faveur de la haie de 40 M€.

N’oublions pas que les annonces de monsieur Marc Fesneau, l’an dernier, ont donné lieu localement à des créations d’emploi en lien avec le Pacte : abaisser drastiquement les crédits pourrait les remettre en cause. Nous devons vraiment mener une réflexion stratégique sur ce sujet.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Si j’ai proposé de rehausser les crédits en faveur des haies de 20 M€, c’est parce que ça me semblait nécessaire, mais aussi parce que ce montant me paraissait soutenable d’un point de vue financier. Les autres montants proposés me semblent non pas déraisonnables, mais plus difficilement acceptables au regard de la situation des finances publiques. Il faut faire un effort pour rétablir l’équilibre budgétaire.

En réponse à Madame Meunier et pour la sincérité des débats, je précise que seuls 78 M€ des 110 M€ ont été consommés cette année.

Je vous invite à retirer vos amendements au profit du mien, qui permettra de porter le total des crédits à 50 M€ et de continuer à préserver les haies.

M. Dominique Potier (SOC). Comme l’a souligné madame Thomin, ces stop and go sont terribles pour l’organisation des filières.

Monsieur Biteau a indiqué qu’on arrachait deux fois plus de haies qu’on n’en plantait. Pouvez-vous nous confirmer ce chiffre, monsieur le rapporteur ? C’est une donnée importante, qui nous amène au sujet que nous aborderons ensuite, celui de la régulation du foncier. En effet, la dynamique foncière est profondément destructrice des infrastructures écologiques comme les haies.

M. Jérôme Nury (DR). Nous sommes tous attachés à la protection des haies, moi le premier, qui viens d’une région bocagère. Mais je constate que finalement, de nombreux intervenants s’investissent dans la plantation des haies : les agriculteurs, mais aussi les agences de l’eau et les différentes collectivités territoriales, qui mènent des plans de replantation, qui peuvent obtenir jusqu’à 80 % d’aides.

Ces crédits sont importants, mais ne sont-ils pas un peu psychologiques ? L’essentiel, c’est qu’on replante des haies – et c’est le cas aujourd’hui ! N’oublions pas que l’État n’est pas le seul à investir dans les haies.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Une fois l’enveloppe créée, l’objectif est de la faire monter en puissance, afin de permettre aux intervenants dans les territoires de se saisir à nouveau pleinement de ce sujet important, notamment dans le Grand Ouest.

Face à la multiplication des aléas climatiques, il est essentiel de créer des postes dans ce domaine et de renforcer les synergies entre les propriétaires privés, les organismes publics et les pépiniéristes, car chez moi, en Bretagne, on ne peut pas toujours s’approvisionner localement en plants. Tout cela appelle une réflexion et un investissement dans le temps.

La commission adopte l’amendement II-CE214.

En conséquence, les amendements II-CE42, II-CE59, II-CE144 et IICE60 tombent.

 

Amendement II-CE138 de M. Nicolas Meizonnet

M. Lionel Tivoli (RN). Pour renforcer la compétitivité des agriculteurs, l’amendement vise à abonder de 40 M€ l’action 23 du programme 149 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » en minorant d’autant l’action 09 du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation ».

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends l’intention, mais votre amendement est contre-productif, puisque cet abondement se fait au détriment d’une autre action visant justement à financer du matériel pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires et encourager la transition agroécologique. Je proposerai d’ailleurs un amendement pour renforcer le plan national de souveraineté pour la filière des fruits et légumes.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Amendements II-CE194 de Mme Françoise Buffet et II-CE187 de M. Dominique Potier (discussion commune)

Mme Françoise Buffet (EPR). Comme le souligne le rapport Izard‑Babault sur la rémunération des agriculteurs, ceux-ci doivent se regrouper au sein d’organisations de producteurs (OP) pour peser davantage dans les négociations.

Pour soutenir l’effort de structuration des filières, cet amendement vise à abonder le budget de FranceAgriMer à hauteur de 5 M€ supplémentaires

M. Dominique Potier (SOC). C’est cocasse, parce qu’en ne prévoyant de l’abonder que de 1 M€ supplémentaire, j’ai l’air plus soucieux des équilibres budgétaires que notre collègue de la majorité ! Je suis sûr qu’en cohérence, le rapporteur privilégiera mon amendement.

Cet amendement d’appel est très important, car, à ce jour, la France ne s’est toujours pas saisie de la nouvelle possibilité ouverte par la politique agricole commune (PAC) de mettre en place des organisations de producteurs (OP) et des associations d’organisations de producteurs (AOP). C’est pourtant essentiel pour rééquilibrer le rapport de force dans les négociations avec les multinationales, comme Lactalis, sur les volumes, les prix et la durée des contrats. Cette structuration en filière permet aussi de renforcer le partage de la valeur et la solidarité au sein du monde paysan.

Aujourd’hui, l’offre est trop fragmentée pour peser face à la concentration des acheteurs. Il faut donc absolument adopter l’un ou l’autre de ses amendements et nous voterons évidemment en faveur de l’amendement II-CE194.

Madame la présidente, pouvez-vous nous confirmer que Lactalis a répondu favorablement à notre demande d’audition ?

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Pas encore, mais nous allons les relancer.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il est effectivement nécessaire de faire progresser le revenu des agriculteurs. Cela passe notamment par le rééquilibrage des rapports de force entre les producteurs agricoles et les acheteurs : au-delà des dispositifs des lois Egalim, la structuration en filières est nécessaire et doit être soutenue.

Je demande le retrait de l’amendement II-CE187 au profit de l’amendement II-CE149, qui prévoit un budget plus important pour FranceAgriMer et auquel je suis favorable. Ne vous inquiétez pas, monsieur Potier, je donnerai très bientôt un avis favorable à l’un de vos amendements !

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Il faut soutenir le regroupement en organisations de producteurs, qui permettent effectivement de peser davantage dans les négociations commerciales. J’en veux pour preuve ce qui s’est passé avec Savencia, qui a refusé de renouveler le contrat de l’AOP Sunlait, jugée trop puissante.

Il faut s’assurer que les industriels ne puissent pas entraver cette structuration. C’est un sujet sur lequel il faudra absolument se pencher dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi « Egalim 2 ».

M. Dominique Potier (SOC). Dans un esprit constructif, nous retirons notre amendement. L’important est d’en adopter un.

Le vrai rendez-vous politique, c’est le plan stratégique national (PSN) qui doit être présenté en 2025. Les socialistes le disent depuis longtemps et l’épisode Lactalis l’a confirmé : il faut absolument renforcer les AOP et trouver leur bonne articulation avec le mouvement coopératif, ce qui n’a rien d’évident. Penser cette double structuration horizontale et verticale des organisations de producteurs sera un véritable défi. Il faudra probablement créer un groupe de travail.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je me permets de préciser qu’une mission d’évaluation de la loi « Egalim 2 » est en cours, sous la houlette de nos collègues Julien Dive, Harold Huwart, Richard Ramos et Mathilde Hignet. Elle traite spécifiquement de la structuration des filières, des OP et des AOP.

L’amendement II-CE187 est retiré.

La commission adopte l’amendement II-CE194.

 

Amendement II-CE185 de M. Dominique Potier

M. Dominique Potier (SOC). Je profite de l’occasion pour saluer les propositions formulées par le rapporteur en matière de prophylaxie.

Mon amendement, directement issu des travaux de la commission d’enquête sur les pesticides, tend à ce que l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM) documente non seulement la partie « aval », mais aussi la partie « amont » de l’agriculture. En effet, les pratiques du secteur amont – explosion du prix des machines, de l’énergie, des intrants chimiques, fiscalité des entreprises et capacité à pratiquer l’optimisation fiscale – et le rôle qu’elles jouent dans la formation du revenu ont été trop négligés.

La présidente de l’OFPM y est favorable ainsi que l’ensemble des syndicats, que mon groupe a récemment reçus.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CE168 de Mme Manon Meunier

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Nous proposons d’augmenter le financement des syndicats agricoles pour suivre l’inflation.

C’est en fait un amendement d’appel concernant le mode actuel de répartition du financement entre les syndicats, qui dépend du nombre non de voix mais de sièges, ce qui crée des dysfonctionnements, identifiés notamment par la Cour des comptes, et des inégalités de traitement : des syndicats qui ont recueilli plus de voix que d’autres bénéficient d’un moindre financement et les agriculteurs et agricultrices qui votent pour eux ne sont pas correctement représentés.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Lors des auditions, aucun syndicat ne m’a parlé de ce sujet. Le gel du financement public ne me semble pas un effort démesuré dans le contexte budgétaire que nous connaissons.

Quant à la question que vous soulevez, c’est au Gouvernement de répondre à votre appel. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE178 de M. Dominique Potier

M. Dominique Potier (SOC). Il est symbolique et très peu coûteux : il s’agit d’allouer un ETP par département à la surveillance du marché foncier.

La régulation du foncier est un de nos combats, à gauche, mais aussi au centre et, parfois, à droite. Elle est vitale pour le renouvellement des générations et la performance de l’agriculture. Au-delà des mesures législatives qui fixent les règles du jeu, il faut un minimum de moyens en fonctionnaires pour les mettre en œuvre, animer les commissions départementales d’orientation de l’agriculture et piloter les instruments permettant de lutter contre l’accaparement des terres et la dérégulation, aux effets économiques, sociaux et écologiques dévastateurs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je salue votre combat constant pour la préservation du modèle familial d’exploitation. Nous savons tous qu’il faut favoriser les installations pour limiter l’agrandissement excessif des exploitations existantes et le risque d’une baisse de la production nationale. C’est un objectif majeur du projet de loi d’orientation agricole, dont la discussion devrait reprendre début 2025 – j’espère que votre groupe sera de la partie pour contribuer à son aboutissement.

S’agissant de la régulation du foncier, la France peut être fière de ses outils de contrôle des structures. Il est évident qu’ils nécessitent des contrôleurs, mais nous en avons dans les services déconcentrés de l’État à travers les directions départementales des territoires (DDT) et les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM). Il est d’ailleurs cocasse, même si c’est pour assurer la recevabilité de votre amendement, que vous préleviez les crédits sur le programme dont relèvent les dépenses de personnel du ministère de l’agriculture. Avis défavorable.

M. Dominique Potier (SOC). Vous savez bien que l’on gage comme on peut les dépenses que l’on demande : soyez indulgent !

Il n’y a plus de moyens dans les DDT pour contrôler le marché foncier : tous les acteurs le disent, dans une indifférence totale. Les formules de distraction par le démembrement de propriété explosent. Sans de l’intelligence territoriale et des capacités de contrôle, tous les discours sur l’installation ne seront que littérature : il faut changer la loi et allouer des moyens humains pour ne pas trahir le pacte Pisani qui a fait la prospérité de la France.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-172 de Mme Manon Meunier

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Seules 10 000 à 15 000 personnes s’installent chaque année, au lieu des 20 000 à 25 000 qu’il faudrait pour assurer la relève agricole. En cause, un parcours administratif démentiel et le prix du foncier, d’autant que l’agrandissement des fermes complique de plus en plus leur reprise.

L’association Terre de liens estime que le portage foncier, s’il était doté de 1,4 Md€ par an, permettrait l’installation de sept mille personnes supplémentaires chaque année et, ainsi, la couverture de 75 % des besoins. C’est le sens de cet amendement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Dans le cadre de cet exercice budgétaire, 1,4 Md€ rapportés aux 2,5 Md€ du programme 149, c’est vraiment beaucoup.

En outre, le foncier agricole a toujours été porté par des propriétaires privés qui le mettent à disposition d’agriculteurs non propriétaires dans le cadre d’un bail rural ; ces agriculteurs fermiers sont majoritaires.

Dans le contexte de renouvellement des générations et d’installation massive de jeunes agriculteurs, la solution au défi du portage du foncier ne passera pas par la nationalisation des terres agricoles. Il faudra imaginer un ou plusieurs cadres pour un portage privé au service de l’agriculture. L’État ou d’autres personnes publiques pourraient y jouer le rôle de force d’appoint ou d’entraînement, mais ce n’est pas l’objet du projet de loi de finances. Avis défavorable.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Je suis ravie d’apprendre que vous êtes favorable au portage du foncier par les agriculteurs : lors de l’examen du projet de loi d’orientation agricole, votre groupe avait proposé qu’il relève des assurances et des banques privées dans le cadre du groupement foncier agricole d’investissement (GFAI), dont nous avions heureusement rejeté la création. L’agrandissement des fermes empêche les jeunes d’accéder au foncier, alors qu’une division permettrait à chacun de s’approprier la terre, comme le portage associatif du foncier, sans recherche de profit – à la différence de l’intervention des banques et assurances que vous protégez.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE173 de Mme Mathilde Hignet

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Cet amendement vise à augmenter le budget alloué au programme d’accompagnement à l’installation-transmission en agriculture (AITA). La loi d’orientation agricole fixait l’objectif de cinq cent mille agriculteurs installés en 2035. Pour l’atteindre et compte tenu du rythme actuel des départs à la retraite, il faudrait que le nombre d’installations double chaque année dès 2025. L’un des moyens d’y parvenir est de mieux accompagner l’installation des personnes candidates.

Le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) estime dans son rapport d’avril 2023 que l’État doit engager 10 M€ supplémentaires en ciblant notamment l’accompagnement des personnes non issues du milieu agricole (Nima) et la phase d’émergence des projets. Début 2024, le gouvernement de l’époque avait annoncé une augmentation de 50 % des fonds versés par l’État au programme AITA, une promesse que ne tient pas le projet de loi de finances.

L’amendement vise à confirmer cette augmentation dès 2025 en s’alignant sur les recommandations du CGAAER.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il est exact que, pour relever le défi du renouvellement des générations en agriculture, il faudra un effort supplémentaire d’accompagnement des parcours d’installation et de cession d’exploitations.

Cette question est au cœur du projet de loi d’orientation agricole, notamment grâce à la création de France Services agriculture. Je l’ai dit, mon souhait est que nous puissions adopter le texte avant le prochain Salon international de l’agriculture. Les travaux préparatoires à la mise en œuvre du dispositif pourront ainsi débuter courant 2025 et le nouveau dispositif devra être déployé largement en 2026.

Il me semble donc prématuré de définir le montant de l’enveloppe nécessaire. Si des crédits doivent être engagés en 2025, ils pourront éventuellement l’être dans le cadre d’un projet de loi de finances rectificative.

Le sujet devra aussi et surtout être traité en première partie du projet de loi de finances, puisque le programme AITA est financé par une taxe affectée, la taxe « Jeunes agriculteurs ». Demande de retrait, sinon avis défavorable.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Vu l’urgence, je suis surprise que vous jugiez notre démarche prématurée. Après une loi d’orientation destinée à permettre le renouvellement des générations, la mesure serait un marqueur fort, notamment pour les Nima, dont l’installation est encore plus compliquée que celle des jeunes issus du milieu agricole.

M. Dominique Potier (SOC). Il y a, dans ce budget, 400 M€ d’allégements de cotisations sociales – la Mutualité sociale agricole nous alerte sur la perte de protection sociale qu’ils représentent à terme – et vous refusez que 10 M€ soient alloués à un programme absolument indispensable au renouvellement des générations. C’est stupéfiant ! Nous n’avons pas le commencement d’un éclairage sur l’impact économique de ces 400 M€. Le volet transmission devait être documenté – c’était une promesse du ministre Marc Fesneau – par un rapport du CGAAER aujourd’hui bloqué par Bercy. Comment peut-on refuser un amendement comme celui-ci (et les précédents) et accorder un allégement pour transmission en roue libre, sans limite ni évaluation ? Comment peut-on délibérer et bâtir un projet pour l’avenir de l’agriculture dans ces conditions ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les allégements fiscaux sont un autre débat.

Pour ce qui est de l’amendement, je le répète : procédons par étapes en adoptant le projet de loi avant d’abonder le dispositif AITA. J’espère que nous en reparlerons dans le cadre du prochain projet de loi de finances. Je comprends l’intention, mais la démarche est prématurée : elle sera vraiment d’actualité dans un an.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CE155 de Mme Mathilde Hignet, amendements identiques II-CE56 de Mme Chantal Jourdan et II-CE202 de M. Benoît Biteau, amendement II-CE169 de Mme Mathilde Hignet (discussion commune)

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Dans l’amendement II-CE155, nous proposons la création d’un fonds de soutien à la diversification agricole. Doté de 50 M€, il permettrait de soutenir l’émergence de filières alimentaires de proximité, notamment par les initiatives visant à déspécialiser les territoires excédentaires en activités d’élevage. Il s’agit d’amener de l’élevage dans les territoires plutôt céréaliers afin de rétablir la complémentarité entre production végétale et animale.

M. Karim Benbrahim (SOC). L’amendement II-CE56 vise à créer un réseau d’expérimentation afin de soutenir la création et la diffusion de projets de restructuration-diversification au sein d’exploitations agricoles volontaires, pour un montant de 5 M€.

D’ici à 2030, plus d’un tiers des agriculteurs partiront à la retraite. Mais la transmission des exploitations agricoles est de plus en plus difficile, notamment à cause de l’inadéquation entre l’offre d’exploitations à céder et les attentes et projets des nouveaux agriculteurs. L’une des solutions est la restructuration-diversification des exploitations agricoles. Elle implique la transition de la spécialisation et de la monoproduction vers une production plus diversifiée et s’oriente vers des pratiques agroécologiques.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Dans une étude réalisée par la Fondation pour la nature et l’homme, Terre de liens et la Fédération nationale d’agriculture biologique, l’évaluation de douze fermes restructurées et diversifiées confirme les multiples bénéfices socio-économiques et environnementaux de cette modalité de transmission.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le financement de l’expérimentation de projets de restructuration et de diversification d’exploitations agricoles trouve toute sa place dans le volet « Agriculture » de l’action 29 « Planification écologique » du programme 149. À plus long terme, l’accompagnement de telles démarches pourrait entrer dans le cadre rénové de l’accompagnement à l’installation et à la transmission des exploitations agricoles. La création d’un nouveau programme ne se justifie donc pas.

Avis défavorable à l’ensemble des amendements, compte tenu de la contrainte budgétaire.

La commission rejette l’amendement II-CE155.

Elle adopte les amendements II-CE56 et II-CE202.

En conséquence, l’amendement II-CE169 tombe.

 

Amendement II-CE164 de Mme Manon Meunier

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). L’élevage durable, sur prairie, n’a malheureusement pas le vent en poupe, alors qu’il pourrait servir de modèle : il fournit des emplois, il préserve les paysages et la biodiversité. Mais une concurrence déloyale le fait reculer – nous avons déjà parlé du traité Union européenne-Mercosur à propos duquel on ignore ce que le Premier ministre Michel Barnier compte faire, mais dont nous veillerons à ce qu’il ne soit pas ratifié – et les politiques en vigueur ne vont pas dans le sens de sa préservation.

Nous proposons donc de créer un fonds d’aide à l’installation et à la transmission en élevage durable.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le soutien à la transition agroécologique de nos filières d’élevage et à l’installation de nouveaux éleveurs est évidemment important, mais votre proposition à 100 M€ n’est pas soutenable budgétairement. En effet, l’action 21 du programme 149 permet les interventions en faveur des filières ultramarines ou le financement d’actions de soutien à l’organisation et au développement des filières par l’intermédiaire de FranceAgriMer : elle ne peut supporter une ponction de près de la moitié de ses crédits.

Sans créer de programme spécifique, il faut continuer à accompagner nos filières d’élevage dans la transition, ainsi que l’installation et la transmission de toutes les exploitations agricoles, notamment en élevage. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CE166 de Mme Manon Meunier

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). L’aide complémentaire « Jeune agriculteur » (ACJA), une aide ’destinée à tout nouvel installé, quel que soit le modèle qu’il choisit, nous paraît fondamentale pour relever le défi de l’installation d’un grand nombre d’agriculteurs et agricultrices. L’aide « Jeune agriculteur » du plan stratégique national (PSN) est malheureusement très faible : il s’agit de la part minimale légale de budget qu’il est possible d’allouer à l’installation des jeunes agriculteurs. En attendant de modifier le PSN pour donner l’impulsion à de nombreuses installations, nous proposons donc de consacrer 60 M€ supplémentaires à l’ACJA.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Dans le PSN 2023-2027, l’ACJA mobilise une enveloppe de 116 M€ par an d’aides européennes, en hausse par rapport à l’enveloppe allouée au paiement « Jeunes agriculteurs » (PJA) de l’ancienne programmation ; le montant unitaire prévu s’élève à 4 469 euros par jeune agriculteur.

Il ne nous est pas possible d’ajouter des aides nationales aux crédits européens prévus dans ce cadre : ce dispositif ne relève pas du programme 149. C’est au moment de la prochaine PAC qu’il faudra se battre dans le cadre de l’élaboration du PSN, notamment au niveau du Parlement, pour rehausser ce type d’aides. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Contre l’avis du rapporteur, elle adopte successivement les amendements II-CE171 et II-CE165 de Mme Mathilde Hignet.

 

Amendement II-183 de M. Dominique Potier

M. Dominique Potier (SOC). Les amendements qui suivent sont directement issus des travaux de la commission d’enquête sur l’échec des politiques publiques en matière de maîtrise des pesticides.

Le présent amendement vise à réinvestir 70 M€ pour tisser un réseau d’agronomes capables d’accompagner les agriculteurs, à raison de deux demi-journées par an, dans la démarche de réduction des intrants, notamment de la phytopharmacie. Il répond à l’échec massif de la politique gouvernementale en matière de séparation du conseil et de la vente. Nous proposons le rétablissement des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques ainsi qu’un conseil agronomique piloté publiquement par les chambres d’agriculture, afin de nous affranchir de la dépendance aux pesticides et d’améliorer notre compétitivité, notre résilience écologique et la santé de nos agriculteurs.

En lieu et place du gage ici indiqué, nous souhaiterions fonder la mesure sur une augmentation – tout à fait raisonnable – de la redevance pour pollutions diffuses.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avant d’être budgétaire, le sujet est réglementaire ou législatif. Il nous faudra rapidement trouver un véhicule pour traiter la question de la séparation entre vente et conseil, hors projet de loi d’orientation agricole. Madame Agnès Pannier-Runacher, alors ministre déléguée auprès du ministre de l’agriculture, avait engagé une démarche en ce sens.

Quant au fait d’allouer 70 M€ supplémentaires à l’action « Planification écologique » du programme 206 pour recruter mille ingénieurs chargés du conseil stratégique, je ne suis pas sûr que l’imputation budgétaire soit la bonne, dès lors qu’il s’agit de placer ces derniers dans les chambres d’agriculture. Mais, surtout, la proposition n’est pas soutenable budgétairement. Il faudra s’appuyer sur les structures existantes, en les accompagnant et en les libérant de contraintes réglementaires, pour offrir enfin aux agriculteurs un conseil à la hauteur des enjeux. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE182 de M. Dominique Potier

M. Dominique Potier (SOC). Il s’agit de renforcer le réseau de fermes « Démonstration, expérimentation et production de références dans les systèmes économes en phytosanitaires » (Dephy) en portant leur nombre à trois mille comme initialement prévu.

Il est démontré qu’elles permettent de réduire de 40 % à 50 % la quantité d’intrants en maintenant le revenu et la productivité. Ce véritable laboratoire vivant a été fragilisé par le Gouvernement, notamment ces dernières années. C’est pourtant une formidable force d’entraînement de l’ensemble des écosystèmes, qui permet de trouver des solutions pratiques, adaptées à l’économie des systèmes agricoles, et de diffuser les bonnes pratiques dans les filières et les territoires.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je vous propose de retirer l’amendement afin de le redéposer en vue de la séance. Il faudrait en effet le déplacer : vous proposez d’abonder le programme 149, alors que tout ce qui concerne les produits phytosanitaires relève de l’action 09 du programme 206 ; nous pourrions discuter de votre proposition si vous l’imputiez sur cette action.

M. Dominique Potier (SOC). Au point de désordre où en est l’Assemblée... Lors de l’examen en commission, c’est l’intention politique qui compte. Adoptons cet amendement, il pourra être examiné au sein du programme 206 en séance publique.

Il faut poursuivre la recherche-action en matière phytosanitaire, pour trouver des solutions économiques et écologiques au plus près des fermes. Ce programme a été négligé, alors qu’il fait consensus. L’ordonnancement administratif ne doit pas nous freiner. Il en va de la santé du sol, de l’eau et du monde paysan.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). « Pas d’interdiction sans solution alternative », nous demande-t-on souvent. Le réseau de fermes Dephy fait précisément partie des solutions pour accompagner les agriculteurs et agricultrices dans la réduction des pesticides, voire dans leur suppression.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques II-CE180 de M. Dominique Potier et II-CE203 de M. Benoît Biteau, amendement II-CE151 de Mme Mathilde Hignet (discussion commune)

M. Dominique Potier (SOC). Nous proposons de rétablir à leur niveau de 2024 les crédits de la stratégie de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, à l’action 09 du programme 206. En l’état, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de les réduire de 35 %.

Le sujet est sensible, comme l’a montré notre commission d’enquête sur l’usage des produits phytopharmaceutiques. En nous appuyant sur des documents scientifiques certifiés par les autorités sanitaires et environnementales, en exhumant des rapports gouvernementaux, nous avons montré qu’il était possible, à productivité égale et à revenus égaux pour le monde paysan, de diminuer l’empreinte des produits phytosanitaires en suivant une cinquantaine de propositions. Mais cette stratégie demande des crédits, qui seront amortis grâce aux gains de productivité et à la réduction des risques pour l’environnement et la santé.

M. Benoît Biteau (EcoS). Comment demander aux agriculteurs de réduire le recours aux pesticides si nous ne les accompagnons pas ? Ils souhaitent d’ailleurs cette réduction. D’après un sondage du début de l’année, 85 % des agriculteurs souhaitent poursuivre la transition agroécologique ; 23 % d’entre eux considèrent même qu’elle constitue une opportunité. Pour cela, ils nous demandent un accompagnement et nous souhaitons les aider, mais nous supprimons les crédits nécessaires : c’est presque une forme de schizophrénie.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Même si je comprends votre préoccupation, nous faisons face à des contraintes budgétaires – le programme 206 n’est d’ailleurs pas le plus touché par la réduction des crédits. Je suis donc partagé ; je m’en remets à la sagesse des commissaires.

La commission adopte les amendements identiques II-CE180 et II-CE203.

En conséquence, l’amendement II-CE151 tombe.

 

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CE179 de M. Dominique Potier.

 

Amendements II-CE212 de M. Jean-Luc Fugit, II-CE153 de Mme Mathilde Hignet et II-CE193 de Mme Françoise Buffet (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. À ce stade, les crédits de l’action 29, « Planification écologique » du programme 149, qui ont été lourdement amputés, sont répartis en trois blocs : haies, agriculture et forêts. De l’aveu du ministre, la répartition des crédits entre les différentes sous-actions n’est pas stabilisée. La lisibilité de l’action publique d’accompagnement de la transition agroécologique en pâtit.

Il est en tout cas indispensable de préserver les acteurs de la filière « Fruits et légumes » engagés dans un plan de souveraineté depuis mars 2023, alors qu’ils sont confrontés à des difficultés croissantes – impasses dans la recherche de solutions alternatives aux produits phytosanitaires, aléas climatiques et, parfois, difficultés à trouver du personnel – et que la production française de fruits et légumes ne couvre plus que 50 % de notre consommation.

Il y a urgence. Nous proposons donc d’abonder les crédits de l’action 29 de 35 M€. Cette somme, déterminée après l’audition de professionnels, permettra de maintenir notre soutien au plan de souveraineté de la filière des fruits et légumes. Il s’agira notamment de rénover les vergers et d’aider aux investissements dans le matériel des agriculteurs engagés dans la transition agroécologique.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Nous proposons la création d’un fonds pour le financement et, le cas échéant, la systématisation des contrats de transition agroécologique, en nous inspirant des contrats territoriaux d’exploitation expérimentés entre 2000 et 2002.

De tels contrats permettraient d’accompagner le financement de la conversion en 100 % bio, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation au changement climatique, l’aménagement ou la réhabilitation d’installations, la transition d’élevages du hors-sol au plein air et l’évolution vers des pratiques culturales plus lentes.

Mme Françoise Buffet (EPR). L’amendement du rapporteur pour avis étant mieux-disant, je retire le mien.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Madame Hignet, le fonds dont vous proposez la création trouverait sa place à l’action « Planification écologique ». Malheureusement, celle-ci souffre d’une réduction importante – et même excessive, nous sommes d’accord – de ses crédits, qui nous impose de rééquilibrer les sous-actions existantes. Il faut faire des propositions raisonnables. Je vous demande de retirer votre amendement au profit du mien, construit en toute transparence avec les acteurs de la filière des fruits et légumes.

M. Pascal Lecamp (Dem). La proposition du rapporteur pour avis me semble très raisonnable, car elle satisfait les attentes des professionnels tout en prenant en compte le contexte budgétaire contraint.

L’amendement II-CE193 est retiré.

La commission adopte l’amendement II-CE212.

En conséquence, l’amendement II-CE153 tombe.

 

Amendements II-CE148 et II-CE146 de Mme Manon Meunier, amendement II-CE201 de M. Benoît Biteau (discussion commune)

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). L’amendement II-CE148 vise à rétablir les crédits alloués à la décarbonation de l’agriculture, que le présent texte prévoit de supprimer. Ils permettent pourtant d’investir dans du matériel décarboné ou moins émissif, qu’il s’agisse d’engins agricoles et forestiers, de serres ou de dispositifs de stockage et d’épandage des effluents d’élevage.

L’amendement II-CE146 vise à rétablir les crédits dédiés au diagnostic carbone, qui permet aux agriculteurs qui s’installent de planifier la réduction des émissions de leur exploitation.

Nous pouvons discuter des dispositifs, afin qu’ils soient les plus efficaces possible et répondent aux attentes des agriculteurs et agricultrices, mais la suppression de ces crédits dans ce projet de budget est incompréhensible, vu la nécessité d’une planification écologique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Compte tenu de la diminution globale des crédits de l’action 29, le ministère attend de pouvoir tirer le bilan des différents dispositifs qui la composent, à l’issue du second semestre de 2024, pour allouer les crédits correspondants.

Il m’a été confirmé que des crédits seront de toute façon alloués au diagnostic carbone. Avant d’en déterminer le montant, il est d’autant plus nécessaire de tirer un bilan de l’année écoulée que, lors de sa création, ce dispositif avait bénéficié de crédits importants.

Selon moi, les crédits alloués à la planification écologique doivent augmenter au cours des trois prochaines années, pour retrouver le niveau de 1 Md€ ’par an. Nous avons déjà adopté des crédits supplémentaires en ce sens ; nous devons pouvoir en adopter d’autres. Au vu des contraintes budgétaires, j’émets donc un avis défavorable sur vos amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CE147 de Mme Mathilde Hignet

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Le présent projet de loi de finances prévoit une réduction des crédits du fonds en faveur de la souveraineté alimentaire et des transitions. Monsieur le rapporteur pour avis fera sans doute remarquer qu’il n’a pas été supprimé et il nous demandera d’attendre une allocation plus précise des crédits. Mais nous souhaitons connaître l’avenir que vous réservez à la planification écologique ; il n’est pas normal que le Parlement travaille les yeux bandés.

Le fonds visé ici permet, par exemple, d’accompagner la transition des agriculteurs vers des cultures qui nécessitent moins d’eau, car les sécheresses affectent de plus en plus les rendements. Il permet de répartir le coût de la transition écologique sur l’ensemble de la société et d’éviter qu’il ne retombe sur les épaules des agriculteurs, qui ne sont pas les seuls responsables de la crise écologique. Nous proposons de rétablir au moins ses crédits à leur niveau de 2024.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avec l’amendement II-CE212, nous venons de voter en faveur d’une hausse de 35 M€ des crédits du plan de souveraineté pour la filière des fruits et légumes. Sans vouloir jouer au marchand de tapis, j’avais déposé cet amendement, entre autres, pour satisfaire votre amendement II-CE147. De fait, il répond en partie à votre demande – en partie seulement, car il ne serait pas soutenable de dépenser 85 M€ supplémentaires, comme vous le demandez.

M. Jérôme Nury (DR). La transition et l’innovation agricoles sont à chaque fois financées par la région et les fonds européens. Dans l’Orne, je ne connais aucun agriculteur qui ait perçu le moindre euro du fonds en faveur de la souveraineté alimentaire et des transitions du budget de l’État. C’est à se demander où sont allés les millions investis dans ce domaine au cours des dernières années ! Il est bien beau d’inscrire des crédits, mais il faut savoir où ils vont.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). C’est votre parti qui est au Gouvernement et rend une copie blanche en matière de transition écologique. Si vous estimez que les agriculteurs n’ont pas besoin d’aide pour réduire leur consommation d’eau, c’est que vous n’en avez pas rencontré beaucoup.

Accordons-nous du moins sur le besoin d’accompagner financièrement la transition des agriculteurs, car nous ne pouvons les laisser seuls face aux défis. Nous pourrons ensuite discuter concrètement de l’allocation des fonds.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Monsieur Nury, les budgets prévus pour la restauration des vergers et l’agroéquipement, par exemple, ont été consommés. Dans mon territoire, les arboriculteurs vous confirmeront qu’ils ont bénéficié des crédits délégués par l’État à FranceAgriMer’.

Lors des auditions que j’ai menées pour préparer, entre autres, l’amendement II-CE212, les représentants de la filière des fruits et légumes m’ont même indiqué que les programmes de l’État destinés aux agroéquipements sont consommés en quelques heures. Ils existent bien et nous ne pouvons pas dire que l’État ne fait rien en la matière ! Ces crédits arrivent dans les cours de ferme. Le problème est qu’ils sont insuffisants ; je souhaitais donc au moins rétablir leur niveau de 2024, conformément aux engagements de l’État.

Je croyais autrefois que les régions faisaient tout, pour tout le monde, partout et tout le temps. Ce n’est pas tout à fait vrai. Et les fonds qu’elles gèrent viennent aussi de l’Union européenne, même si elles font par ailleurs beaucoup. Quoi qu’il en soit, félicitons-nous de ce que le monde agricole reçoive le soutien conjoint de l’Europe, de l’État et des collectivités territoriales.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE191 de M. Dominique Potier, II-CE152 de Mme Manon Meunier et II-CE190 de M. Dominique Potier (discussion commune)

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous proposons de créer une aide forfaitaire afin d’aider les exploitations labellisées en agriculture biologique à affronter la crise conjoncturelle, pour 910 ’M€.

La consommation des produits bio diminue, leurs prix baissent. Ils sont déréférencés dans les commerces. Dans ma circonscription, les producteurs de lait bio sont en outre les premiers visés par l’annonce, par Lactalis, d’un arrêt des collectes dans certains territoires.

Alors que nous avons fixé l’objectif que 18 % des surfaces agricoles soient consacrées à l’agriculture biologique en 2027, nous risquons de régresser. L’aide forfaitaire proposée nous permettrait de retrouver nos ambitions et d’investir au service d’une agriculture résiliente.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). En effet, le bio traverse une crise liée à la baisse de la consommation et à l’inflation de ces dernières années. L’État doit soutenir ces filières.

L’un des problèmes principaux est que la grande distribution prélève des marges trop importantes – c’est vrai pour tous les produits agricoles, mais particulièrement pour le bio. Ces produits deviennent inaccessibles aux consommateurs les plus modestes.

Nous proposons donc d’allouer 220 M€ supplémentaires à l’agriculture bio, pour faire face à la crise, en attendant des mesures permettant d’accroître le pouvoir des agriculteurs face à la grande distribution.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous proposons d’accroître les aides en faveur des pratiques agronomiques favorables au climat et à l’environnement, à travers l’écorégime.

La politique en la matière est insuffisamment ambitieuse et trop peu accessible aux agriculteurs. Le montant de l’écorégime, fixé à 110 euros par hectare dans le PSN, a été annoncé à 92,05 euros pour la campagne 2024. Il faut le porter à 145 euros par hectare, grâce à une enveloppe supplémentaire de 50 ’M€.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE191 vise à accorder 910 M€ à l’agriculture biologique. La somme me semble démesurée. De plus, il n’est pas certain que la Commission européenne jugerait légale une telle aide exceptionnelle attribuée par l’État en dehors de la PAC.

Évitons de donner l’impression que nous voulons favoriser l’agriculture biologique au détriment des autres filières. Laissons les choses évoluer, étant entendu qu’il faudra réduire notre empreinte environnementale par des actions tant individuelles que collectives, dans le milieu agricole comme ailleurs.

L’agriculture biologique bénéficie de soutiens spécifiques, mais également des soutiens destinés à l’ensemble des exploitations, afin notamment d’alléger le coût du travail. À ce titre, elle bénéficiera du relèvement, promis par le précédent gouvernement, du plafond d’exonération du Tode ’’à 1,25 Smic. Cet effort est fondamental pour les agriculteurs, les maraîchers, les arboriculteurs et les viticulteurs. Or vos amendements gagent la création d’une aide à l’agriculture biologique sur une réduction des crédits alloués au Tode.

Ne laissons pas dire que rien n’est fait pour la filière bio. Le programme 149 prévoit ainsi près de 30 M€ d’aides pour celle-ci : 13 M€ à l’action 21, 7 M€ à l’action 24, 3 M€ à l’action 27 et 10 M€ à l’action 29.

Quant à l’amendement II-CE190 et comme nous l’avons déjà dit, il n’est pas possible de substituer des aides nationales aux aides de la PAC fixées dans le PSN pour 2023-2027. Nous ne pouvons donc pas revaloriser le montant de l’écorégime comme vous le demandez.

Nous nous accorderons sur un point : le Parlement devra être étroitement associé au travail de définition du prochain PSN, qui devrait débuter en 2025. Avis défavorable sur les trois amendements.

M. Jérôme Nury (DR). Je ne peux que partager le souhait de soutenir la filière bio. Tous les territoires souffrent de la baisse de la demande des produits de cette filière.

Toutefois, je doute que la solution consiste à distribuer des millions d’euros d’aides. Le vrai problème est que, cette année, les aides en faveur de l’agriculture biologique et les fonds alloués au titre des mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) n’ont été versés qu’en juillet, alors qu’ils sont normalement versés en début d’année. Ces délais ne sont pas corrects et posent des problèmes de trésorerie.

Plutôt que de tenter d’augmenter les crédits, le Parlement devrait s’assurer que les aides arrivent dans les temps.

M. Pascal Lecamp (Dem). Alors que les crédits alloués à la transition écologique diminuent de 1 Md€, il n’est pas réaliste de demander 1 Md€ pour l’agriculture biologique.

En tant que relais avec l’échelon local, nous pouvons en revanche veiller à l’application des projets agricoles territoriaux. En janvier, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Gabriel Attal s’était engagé à ce que les produits bio représentent 20 % de l’approvisionnement des cantines de toutes les collectivités – départements, régions, communes – à travers ces projets agricoles territoriaux. C’est par là qu’il faut commencer.

Mme Mélanie Thomin (SOC). La conjoncture demande que nous aidions le bio. Les éleveurs laitiers de la filière bio, qui sont souvent les premiers visés par le retrait de Lactalis, s’entendent dire que, s’ils veulent que cette entreprise poursuive ses collectes chez eux, ils doivent renoncer à leur conversion au bio.

Nous devons accompagner les agriculteurs qui se sont engagés dans le projet de vie de l’agriculture biologique face à ces décisions brutales, sans quoi certains d’entre eux cesseront toute activité agricole.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CE154 de Mme Manon Meunier

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Le taux d’endettement des exploitations agricoles françaises dépasse 40 %, selon les informations publiées par le ministère de l’agriculture en février 2022. C’est l’une des causes de la souffrance du milieu agricole.

Nous reprenons ici la proposition de certains agriculteurs de créer une caisse de défaisance. L’État pourrait ainsi reprendre la dette des agriculteurs qui s’engageraient, à travers un contrat de transition, à se convertir à l’agriculture biologique.

Vous évoquez la soutenabilité budgétaire, mais n’oubliez pas la soutenabilité écologique. L’environnement est le premier outil de travail des agriculteurs. Le consensus scientifique insiste sur l’importance de la biodiversité, qui fait partie intégrante de l’agriculture, et que l’agriculture biologique préserve au mieux.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Vous proposez un outil pour le moins original, mais sa légalité est hasardeuse. Comment s’articulera‑t‑il avec la PAC et les aides d’État ? En outre, le sérieux budgétaire me conduit à m’opposer à cette aventure.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE156 de Mme Manon Meunier, II-CE44 de M. David Taupiac et II-CE189 de M. Dominique Potier (discussion commune)

M. David Taupiac (LIOT). Le plan stratégique national a fixé l’objectif de 18 % de surface agricole utile (SAU) en agriculture biologique en 2027. Cet objectif ne sera pas atteint. La crise du bio, liée à la baisse de la demande, a conduit à une diminution de la SAU consacrée à ce mode d’agriculture de 2 % en 2023. L’année 2024 a confirmé la tendance ; des déconversions et reconversions nuisent à la structuration de la filière.

Pour accompagner les agriculteurs dans le changement de modèle, de 2023 à 2027, la PAC flèche une enveloppe de 340 ’M€ par an en moyenne vers des aides à la conversion en agriculture biologique.

Nous proposons ici qu’une partie de cette enveloppe serve à créer une nouvelle catégorie de Maec dédiée à l’agriculture bio, dotée de 150 ’M€. Nous soutiendrions ainsi l’agriculture biologique existante, afin d’éviter les déconversions et les reconversions.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous proposons, par cet amendement, d’allouer 100 M€ pour favoriser les Maec, qui sont l’outil majeur des transitions dans nos territoires. L’application de ces mesures suppose un changement des pratiques de nos agriculteurs et de nos éleveurs, car les Maec rémunèrent les surcoûts et la prise de risque. Les sommes engagées sont en recul par rapport aux objectifs fixés en 2020. La France est l’État européen au sein duquel la part du second pilier dédiée aux Maec est la plus faible. Nous proposons d’allouer à ces pratiques un montant plus élevé. Dans une région comme la mienne, la Bretagne, l’ensemble de la profession agricole encourage ces mesures.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE156 vise à créer un programme spécifique pour les Maec, qui sont actuellement financées dans le cadre du programme 149. D’un point de vue financier, cela ne me paraît pas soutenable.

Le plan « Ambition bio » fixe deux objectifs, qui ont été présentés par le ministre Marc Fesneau au printemps dernier et que je partage : atteindre 18 % de la surface agricole utile en bio en 2027 et 25 % de cette même surface en 2030. Toutefois, on sait qu’il règne une certaine inquiétude due au ralentissement de la filière biologique ; il y a même eu un peu de déconversion l’année dernière. Votre proposition, monsieur Taupiac, ne me semble pas applicable, car elle revient à transformer l’aide à la conversion en agriculture biologique de la PAC, décrite dans le PSN de la France, en une augmentation de la participation nationale aux Maec bio. La fongibilité entre aides à la conversion et Maec que vous proposez n’est pas opérante. Une discussion à ce sujet aura lieu dans le cadre de l’élaboration de notre futur PSN – les Maec se traduisant par une contractualisation sur cinq ans. En tout état de cause, il ne me paraît pas soutenable de prévoir 250 ’M€ de dépenses nouvelles.

S’agissant de l’amendement II-CE189, je rappelle que l’action 24 du programme 149 représente la part de l’État dans le financement des Maec ; elle devrait s’élever à 90 M€ en 2025, ce qui sera suffisant pour couvrir la demande de contractualisation nouvelle. En effet, les conventions Maec, qui ont été massivement conclues en 2023, au début de la programmation quinquennale, sont moins nombreuses cette année. En outre, les Maec sont un outil parmi d’autres pour accompagner la transition agroécologique de nos exploitations. Il n’est en tout état de cause pas soutenable d’engager 100 M€ de crédits supplémentaires. Avis défavorable sur les trois amendements.

M. David Taupiac (LIOT). Mon amendement est aussi un amendement d’appel. Le PSN flèche un budget annuel moyen de 340 M€, qui connaît une évolution ascendante. On ne pourra pas atteindre l’objectif fixé pour l’année prochaine, à savoir le doublement de la surface en bio, ni celui défini pour 2027. Comment obtenir le versement des fonds européens sans changer la règle ? Autrement dit, est-il possible de percevoir ces sommes pour assurer le maintien des exploitations bio et non pour engager la conversion ? Nous savons en effet qu’en matière de conversion, nous serons loin du compte. Il serait dommage de devoir restituer ces fonds à l’Europe.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Dans certains territoires, on a le sentiment de devoir quémander les Maec ; à tout le moins, les agriculteurs doivent demander que leur versement se fasse dans de meilleures conditions et qu’ils puissent en bénéficier de droit. Lors de la crise agricole du début de l’année, un certain nombre d’entre eux demandaient, entre autres choses, à pouvoir bénéficier de ces mesures, ce qui confère une vraie dimension politique à ce sujet. Il nous appartient de promouvoir les Maec. Dans la conjoncture actuelle, étant donné tous les renoncements budgétaires en matière de planification écologique, il serait souhaitable de faire bénéficier une grande partie des agriculteurs de ces mesures.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je partage les constats qui viennent d’être dressés et dont me font part également les agriculteurs de mon territoire, dans le sud du Rhône. Cette question a partie liée à la contractualisation et au PSN. Je ne suis pas certain que tous les crédits Maec soient utilisés : il faudrait regarder les chiffres de plus près. Il conviendra de déterminer comment gérer ces crédits dans le prochain PSN. En tout état de cause, si l’on s’en tient à ces constats année après année, on ira droit à l’échec. Peut-être faudrait-il que notre commission se saisisse du sujet – j’ignore sous quelle forme. À écouter les acteurs locaux, on comprend que l’utilisation des Maec est compliquée, ce qui peut expliquer une certaine sous-consommation. Il faudra améliorer la fluidité dans le cadre du PSN, qui constitue la déclinaison nationale de la PAC. Si cela n’évolue pas, l’efficacité du dispositif s’en trouvera compromise et nous manquerons notre objectif, qui est d’accompagner la transition et, notamment, la conversion, par exemple pour les Maec bio. Nous devrons interroger rapidement la ministre sur cette question et, peut-être, envisager d’être force de proposition pour le prochain PSN.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Ce souhait est partagé par un certain nombre de groupes. Jusqu’à présent, l’Assemblée nationale n’était pas impliquée dans l’élaboration du PSN. Je vous propose que le Bureau de la commission examine la manière dont nous pourrons y contribuer.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements identiques II-CE145 de Mme Mathilde Hignet et IICE197 de M. Benoît Biteau

M. Charles Fournier (EcoS). Cet amendement vise à rétablir les crédits du volet « Protéines » du plan de relance et, ce faisant, à soutenir la stratégie nationale en faveur des protéines végétales. C’est doublement nécessaire pour, d’une part, sortir de la dépendance à l’importation des protéines et, d’autre part, parce que les protéines sont utiles à la transition agroécologique, car elles permettent de fixer naturellement l’azote atmosphérique et de réduire la dépendance à l’égard des intrants chimiques.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le ministère nous a indiqué que le plan Protéines a été abondé, cette année, à hauteur de 72 M€. Il n’est pas prévu de supprimer ces crédits : une ligne est affectée à ce plan. Toutefois, les crédits seront ventilés une fois que l’ensemble des crédits de l’action 29 du programme 149 auront été adoptés. Le montant de 100 M€ me paraît trop élevé au regard des 72 M€ engagés cette année et des contraintes budgétaires. Faisons confiance au ministère. Avis défavorable.

M. Charles Fournier (EcoS). Il nous paraît hasardeux de faire confiance au ministère à l’aveugle, pour ainsi dire. Rien ne garantit que l’on retrouvera une ligne budgétaire du même montant que celui de 2024, ce dont on pourrait se satisfaire. Au surplus, l’augmentation que nous demandons n’est pas si élevée, puisqu’on passerait de 72 M€ à 100 M€. De manière générale, lorsque nous proposons des crédits, ce n’est pas uniquement pour gérer la crise, mais aussi pour fixer une ambition – c’est valable pour le bio, par exemple.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il nous faudra débattre de ce point avec le Gouvernement, en séance publique.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement II-CE211 de M. Jean-Luc Fugit

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à financer l’abondement par l’État du régime spécifique d’approvisionnement (RSA) pour l’alimentation animale en outre-mer. Le coût du fret pour l’alimentation animale est partiellement pris en charge par le RSA, qui constitue une aide spécifique. Compte tenu du poids de l’alimentation dans le coût de revient des volailles et des porcs, qui sont très consommés outre-mer, la compétitivité de la viande produite localement demeure très dépendante de cette aide à l’alimentation animale. Celle-ci est plafonnée depuis près de dix ans, ce qui pose de graves problèmes dans les filières de la viande, des œufs et du lait. Les autorités communautaires, interrogées sur la possibilité pour l’État d’abonder ce fonds communautaire par des crédits nationaux, ont confirmé il y a plusieurs mois que cela ne se heurtait à aucun obstacle juridique. Les collectivités territoriales n’ayant pas les moyens de procéder à cet abondement, nous proposons – avec les membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, qui ont déposé un amendement identique – d’augmenter de 8 M€ ’les crédits de l’action 21 « Adaptation des filières à l’évolution des marchés » du programme 149. Nous devons nous attacher à préserver les capacités locales de production et agir pour le pouvoir d’achat de nos concitoyens ultramarins. Les événements récents en Martinique ne rendent que plus impérieuse cette nécessité.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Amendement II-CE198 de M. Antoine Golliot

M. Antoine Golliot (RN). Nous proposons d’abonder de 2 M€ le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l’agriculture » pour renforcer les moyens de l’Office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (Odeadom) et ainsi soutenir le développement de l’agriculture en Martinique. L’île traverse en effet une période très difficile, marquée par des tensions sociales dues notamment au niveau exorbitant des prix alimentaires, qui sont supérieurs de 40 % à ceux pratiqués en métropole. Cette crise appelle des mesures urgentes, mais aussi durables. Cet amendement vise à apporter une réponse économique autant que sociale. En favorisant l’investissement dans l’agriculture locale, nous entendons soutenir l’emploi, revitaliser les campagnes et garantir un avenir aux agriculteurs. Nous devons agir maintenant, car la stabilité économique et sociale de la Martinique en dépend. Les mesures proposées seraient un levier de développement du territoire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les 8 ’M€ que nous venons d’adopter pour soutenir le RSA apportent une contribution concrète et ciblée au problème du prix de l’alimentation. Ces crédits constituent une aide plus précise et mieux ciblée, me semble-t-il, que celle que vous proposez. De surcroît, l’amendement du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, qui était identique à mon amendement II-CE211, était cosigné par un grand nombre de députés ultramarins ; nous aurons apporté, par notre vote, une réponse à leurs revendications. Aussi, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, mon avis serait défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendements II-CE209 de M. Jean-Luc Fugit, II-CE139 de M. David Taupiac, II-CE161 de Mme Mathilde Hignet et II-CE46 de M. David Taupiac (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’ai insisté, tout à l’heure, sur l’importance de la vaccination contre les maladies animales, en particulier les maladies vectorielles – la MHE et la FCO de sérotypes 3 et 8, ainsi que, dans une moindre mesure, de sérotype 4 (sans oublier le sérotype 1, qui est émergent en Espagne). Ces maladies touchent nos éleveurs depuis de longues semaines.

Notre pays peut s’enorgueillir de ce qu’il est capable de faire en matière de vaccination animale : c’est ainsi que la filière du foie gras a été sauvée depuis 2022, face à l’influenza aviaire. À la suite de l’apparition de la FCO 3, l’État a été très réactif, puisqu’il a acheté des vaccins dès juillet et a fait récemment une annonce relative à la prise en charge de la perte d’animaux. La doctrine en matière de vaccination doit être ambitieuse, à mes yeux, ce qui appelle un effort budgétaire substantiel. On doit passer de la gestion de crise à une gestion beaucoup plus stratégique, par le développement de la prévention. J’ai auditionné, à ce sujet, de nombreux éleveurs et associations, un peu partout en France, et me suis rendu dans divers salons. Par ailleurs, mon département du Rhône est, hélas, fortement touché, lui aussi.

Par cet amendement, je vous propose d’augmenter de 150 M€ les crédits de l’action 02 « Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal » du programme 206 pour financer la stratégie vaccinale contre les maladies animales. Ce montant est nécessaire pour financer les campagnes de vaccination contre l’influenza aviaire, la MHE et la FCO 3, auxquelles s’ajoute la campagne contre la FCO 8, que le Gouvernement ne semble pas pouvoir prendre en charge à ce stade. La FCO 8 pose pourtant des problèmes croissants. Il est possible qu’elles se renouvellent au printemps, car ces maladies sont souvent liées à des moucherons qui pourraient être seulement engourdis par l’hiver. Il faut accompagner financièrement les éleveurs, car ils peinent à faire face aux conséquences de ces maladies. En adoptant cet amendement, nous enverrions un signal fort à nos éleveurs comme au Gouvernement. L’amendement a été rédigé en lien avec de nombreuses filières et pourrait, me semble-t-il, susciter un consensus.

M. David Taupiac (LIOT). Le département du Gers a été l’un des plus affectés par les crises sanitaires (MHE, FCO et influenza aviaire) qui ont touché notre pays. Par l’amendement II-CE139, je propose d’abonder de 350 M€ les actions en faveur de la santé animale afin de financer les campagnes vaccinales, de définir une véritable stratégie vaccinale et d’indemniser les éleveurs. Comme vous l’avez dit, l’État doit être stratège, ce qui implique d’anticiper les crises, en particulier par une activité de veille. On doit pouvoir agir rapidement, en développant les vaccins et en indemnisant efficacement les éleveurs touchés. Il conviendrait, à ce propos, de mensualiser les indemnités, comme le proposait le rapport d’information de la commission du développement durable sur la grippe aviaire de 2023.

L’amendement II-CE46 porte plus spécifiquement sur l’influenza aviaire, qui a mis à mal la filière du foie gras, notamment dans le département du Gers, mais aussi, plus largement, dans le Sud-Ouest et au-delà. Les aides de l’État au titre de la vaccination se sont arrêtées fin septembre. Elles ont été reconduites, à compter du début du mois d’octobre jusqu’au 31 décembre, mais la prise en charge de l’État est passée de 85 % à 70 %. Par cet amendement, je souhaite vous alerter sur la nécessité de pérenniser les aides à la vaccination au‑delà du 31 décembre. En outre, je propose de revenir au taux de 85 %. J’ajoute que, dans le Gers, les éleveurs doivent intégrer l’ovosexage, une pratique favorisant le bien-être animal, dans le coût des canetons.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’indemnisation des éleveurs au titre des pertes qu’ils ont subies relève du programme 149, dont l’action 02 comporte une sous-action consacrée aux crises économiques et sanitaires. Cette dernière n’est traditionnellement pas abondée en loi de finances initiale mais alimentée en loi de fin de gestion, pour tirer les conséquences des plans d’urgence décidés en cours d’année par l’État. S’agissant de dépenses de crise difficiles à anticiper, cette pratique n’est pas choquante.

Il faut distinguer cette question de celle de la vaccination. Pour ce qui est de l’influenza aviaire, je vous rejoins sur le fait que l’État doit s’engager à accompagner financièrement la filière pour l’ensemble de l’année 2025 – c’est peu ou prou le sens de mon amendement. En revanche, la prise en charge de l’État à hauteur de 70 % me semble appropriée pour une deuxième campagne de vaccination. Lorsque la maladie est émergente, il faut apporter un soutien massif aux agriculteurs, car ils ne savent pas quelles mesures prendre et ignorent le coût que représentera la vaccination. Par la suite, l’aide de l’État, même ramenée à 70 %, demeure substantielle, et l’éleveur, qui supporte 30 % des coûts, assume la responsabilité de vacciner ou de ne pas vacciner.

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous propose de retirer vos amendements au bénéfice de mon amendement II-CE209.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). À la suite des crises que nous avons connues et dans le contexte des épidémies qui frappent actuellement l’élevage, nous devons porter une attention particulière à ces amendements. Je lance un nouvel appel à la ministre Annie Genevard concernant la FCO 8, dont on sous-évalue les dégâts qu’elle peut engendrer dans les territoires. Il faut indemniser correctement les éleveurs en souffrance et les accompagner pour qu’ils suivent un parcours de vaccination complet – ce qui, pour l’heure, n’est pas le cas. La FCO 3 commence à être gérée convenablement, mais il faut avoir à l’esprit que la FCO 8 peut décimer la moitié d’un troupeau ovin. L’adoption de ces crédits serait un premier pas en faveur de nos éleveurs et de la protection des animaux.

M. Charles Fournier (EcoS). Au-delà de la vaccination, les maladies animales soulèvent un certain nombre d’enjeux. L’un d’eux est la surveillance, qui a partie liée avec la prévention, l’anticipation et l’adaptation des élevages – je pense, par exemple, à la modification des pratiques et à la dédensification des élevages.

Autre enjeu : la gestion de la crise en direct, qui entraîne des coûts élevés. Je comprends votre raisonnement, monsieur le rapporteur pour avis, quant à la prise en charge de 70 % des coûts par l’État, lors de la deuxième campagne de vaccination ; mais, pour beaucoup de petits élevages, la gestion de la crise s’ajoute à d’autres dépenses. Lorsqu’on a connu plusieurs crises et autant de vides sanitaires, cette aide ne suffit pas. Pendant une période de transition, la vaccination ou, à tout le moins, le soutien financier sont absolument nécessaires.

Je préférerais aller un peu au-delà de ce que vous proposez dans votre amendement, qui est moins-disant, même si son adoption serait déjà un premier pas.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je voudrais revenir sur la stratégie à déployer en direction de nos éleveurs. Lorsqu’un élevage a été contaminé par l’influenza aviaire, il faut apporter à l’éleveur un soutien qui lui permette non seulement de procéder à la désinfection et à l’équarrissage, mais également de reconstruire les infrastructures. Par ailleurs, les normes sanitaires ne sont pas adaptées, en général, aux petits élevages ; il y a de fortes attentes d’évolution en ce domaine.

Dans mon territoire, trois cas d’influenza aviaire se sont succédés depuis septembre, ce qui a eu des conséquences en aval sur l’agroalimentaire local : du fait de la présence de la maladie dans le département, un certain nombre d’exportations de poulets – en l’occurrence, vers l’Arabie Saoudite – sont bloquées. Il faudrait adapter la réglementation sanitaire et mener une réflexion diplomatique.

M. David Taupiac (LIOT). À la suite de la destruction d’un élevage, par exemple en raison de l’influenza aviaire, il faut compter un certain temps avant que l’agriculteur ne soit indemnisé. À l’heure actuelle, dans le Sud-Ouest, l’agriculture, la polyculture-élevage et, plus largement, l’ensemble des cultures sont en difficulté ; près de la moitié des agriculteurs sont au bord du dépôt de bilan. Le versement de l’indemnisation doit être plus efficace. Il faut veiller à ne pas pénaliser les agriculteurs par des paiements trop tardifs, à l’instar de ceux décidés à la suite de la loi de fin de gestion, auxquels vous faisiez référence, monsieur le rapporteur.

Vous estimez que la prise en charge des coûts par l’État à hauteur de 70 % est suffisante lors d’une deuxième campagne de vaccination. Pour ma part, je considère qu’une aide de 85 % est indispensable. À l’heure actuelle, seule la filière du canard gras vaccine, ce qui profite à l’ensemble de la filière avicole. Cette contribution doit être reconnue par l’État et donner lieu à une indemnisation supérieure, dans le cadre de la solidarité nationale.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. C’est une question essentielle. Nous devons avoir une pensée pour nos éleveurs, qui souffrent particulièrement en ce moment. Je rappelle, au risque d’enfoncer une porte ouverte, que, lorsque les animaux sont malades, les agriculteurs le sont également, car ils sont très touchés psychologiquement par ce qui leur arrive.

Je donnerai un avis favorable sur l’amendement II-CE47, que nous examinerons juste après, qui traite des modalités de versement de l’indemnisation de l’État.

Nous devons réfléchir, plus largement, à la rénovation de la gouvernance et du financement de la sécurité sanitaire dans le domaine animal. Le ministère de l’agriculture a commandé, en juin 2023, un rapport au CGAAER au sujet de la rénovation de ce financement. J’ai demandé qu’il soit rendu public, mais il semble que ce document se trouve toujours sur le bureau de la nouvelle ministre.

Je suis d’accord avec monsieur Fournier sur le fait qu’il nous faut anticiper, ce qui implique de vacciner et de surveiller. Cela doit nous amener à réfléchir au modèle des exploitations, qu’elles se trouvent dans le secteur avicole, caprin, ovin ou bovin. Il faudra tenir compte du changement climatique. Dans ma circonscription, par exemple, on constate que l’altitude ne protège plus de ces maladies. Il y a encore un certain temps, à 900 mètres, on était protégé ; aujourd’hui, ce n’est plus le cas.

Mon amendement II-CE209 est peut-être moins-disant que d’autres, mais il propose tout de même des crédits substantiels. Ce serait un premier signal important envoyé aux éleveurs et au Gouvernement. Sur ce sujet, nous ne devons pas lâcher.

La commission adopte l’amendement II-CE209.

En conséquence, les autres amendements tombent.

 

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CE176 de Mme Hélène Laporte.

 

Amendement II-CE47 de M. David Taupiac

M. David Taupiac (LIOT). Cet amendement a pour objet de mensualiser le versement des indemnisations afin de ne pas dégrader davantage la trésorerie des exploitations agricoles, qui est déjà bien à plat.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis très favorable à cet amendement. Cette mesure doit s’inscrire dans le cadre d’une rénovation globale du financement du volet sanitaire.

La commission adopte l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette les amendements II-CE170 de Mme Manon Meunier et II-CE167 de Mme Mathilde Hignet.

 

Amendements II-CE210 de M. Jean-Luc Fugit et II-CE186 de M. Dominique Potier (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE210 vise à augmenter les moyens de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), dont le rôle est de plus en plus stratégique. En effet, cette agence est sollicitée de manière croissante, non seulement par le ministère de l’agriculture, dans le domaine de la santé animale, mais aussi par ses autres ministères de tutelle, notamment le ministère de la santé. Le bon fonctionnement de l’Anses est indispensable à l’amélioration de la connaissance et à l’émergence de solutions, par exemple pour lutter contre les maladies animales, en particulier dans le domaine de la vaccination. Or, la baisse de son plafond d’emplois n’est pas soutenable compte tenu des attentes de l’État. Je vous propose donc d’augmenter de 2,5 M€ les crédits de l’action 04 « Actions transversales » du programme 206, qui porte sur les moyens des opérateurs, et de diminuer à due concurrence les crédits de l’action 01 du programme 215.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Par l’amendement II-CE186, nous proposons d’allouer 10 ’M€ supplémentaires afin de renforcer les moyens de l’Anses.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Compte tenu du contexte budgétaire et des amendements de crédits que nous avons adoptés cet après‑midi, il me paraît plus raisonnable que nous nous en tenions à un abondement de 2,5 M€, dont nous avons d’ailleurs discuté avec l’Anses. Je vous propose de retirer cet amendement au bénéfice de l’amendement II-CE210.

La commission adopte l’amendement II-CE210.

En conséquence, l’amendement II-CE186 tombe.

 

Amendements II-CE157 de Mme Mathilde Hignet, II-CE158 de Mme Manon Meunier et II-CE159 de Mme Mathilde Hignet (discussion commune)

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Nous souhaitons, par l’amendement II-CE157, instituer une aide à la restauration collective pour l’encourager à utiliser des produits locaux et durables, notamment produits par les éleveurs et les agriculteurs de nos territoires. Cette proposition est issue du rapport L’injuste prix de notre alimentation du Secours catholique, du réseau des centres d’initiative pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam) et de la Fédération française des diabétiques, qui a été publié en septembre. Cette étude propose d’encourager les efforts de la restauration collective pour rendre accessible une alimentation durable et de qualité, tant par un soutien financier que par la formation du personnel de cuisine, en particulier dans le secteur médico-social. La restauration collective plébiscite l’approvisionnement en produits locaux et durables. Cette mesure permettrait de valoriser l’agriculture locale et d’encourager le développement des filières locales d’approvisionnement.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). « Déléguer notre alimentation est une folie », ce n’est pas moi qui le dis, mais M. Emmanuel Macron. Pour une fois, nous sommes d’accord ! Si l’on regarde les plats servis dans les collectivités territoriales, dans les cantines et les hôpitaux, on constate à quel point nous importons encore de la viande, alors que nous avons des filières d’élevage structurées et que nous pourrions aider les éleveurs à se maintenir dans les territoires. Pour ce faire, les collectivités territoriales pourraient recourir à la commande publique. L’amendement II-CE158 propose que l’on serve 100 % de viande française dans les établissements gérés par les collectivités territoriales.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Il s’agit, par l’amendement II‑CE159, de soutenir les investissements en équipements et en formation dans la restauration collective. En effet, l’un des freins à l’achat de produits bruts locaux est l’inadaptation des cuisines à leur transformation.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. On ne peut pas dire que l’État se désintéresse du sujet, puisqu’il met en œuvre les orientations de la loi Egalim. La direction générale de l’alimentation anime un réseau et a développé une véritable ingénierie au service de cette politique, qui se matérialise notamment par la plateforme « ma-cantine.agriculture.gouv.fr ». Les aides nationales, régionales et européennes en faveur des projets alimentaires territoriaux, qui ancrent localement l’alimentation et la restauration collective, permettent aussi de structurer les filières d’approvisionnement. Une série de dispositifs accompagnent donc les collectivités. L’État ne peut toutefois pas se substituer à ces dernières dans un domaine qui relève, au premier chef, de leur responsabilité.

Par ailleurs, je ne reviendrai pas sur la nécessité de faire preuve d’une certaine sobriété budgétaire.

Je rappelle enfin que, dans le cadre du plan de relance, l’État a financé, en 2022, un plan de soutien de 50 M€ aux cantines scolaires des petites communes. Or, les collectivités n’ont pas consommé l’enveloppe cette année-là. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Françoise Buffet (EPR). Le budget de l’État n’est pas très efficace en cette matière du fait de la pérennité des marchés publics. L’État ne peut pas assurer un financement permanent. Le coût revient en principe aux familles mais, en général, elles ne souhaitent pas l’assumer, ce qui conduit la commune à ne pas répercuter le prix. L’opposition des parents se manifeste même lorsque la commune a investi au départ. C’est la raison pour laquelle le bio a beaucoup de difficultés à s’imposer dans nos cantines.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). La cantine devrait être le lieu où tous les enfants ont accès à au moins un repas de qualité par jour. On doit y proposer de la viande française, locale et parfois bio. C’est la moindre des choses que nous puissions faire pour les enfants. Si cela permet, de surcroît, de créer des filières pour nos agriculteurs, c’est un bénéfice supplémentaire. Aujourd’hui, on ne sert pas 100 % de viande française dans nos collectivités, compte tenu de la contrainte du prix. Les collectivités locales doivent avoir un budget équilibré en fin d’année, contrairement à l’État, qui doit prendre sa part à l’effort.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CE163 de Mme Mathilde Hignet

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Cet amendement vise à abonder l’enveloppe des projets alimentaires territoriaux. Lorsque la gouvernance est efficace dans les territoires, cet instrument se révèle utile, d’où notre volonté d’appuyer cette dynamique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’État soutient déjà les projets agricoles territoriaux : vous proposez de décupler cette aide, mais les contraintes budgétaires m’obligent à donner un avis défavorable à votre amendement.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Les collectivités locales sont libres de déployer certains dispositifs destinés à améliorer la qualité de l’alimentation des enfants dans les écoles. Il est de la responsabilité de l’État d’encourager ces actions, car le sujet est important. Les communes rurales sont très en demande de systèmes capables d’assurer une alimentation de qualité dans les écoles et souhaitent financer des petits camions frigorifiques ou des bacs en inox : l’État a un rôle d’accompagnement à jouer pour favoriser ces initiatives. La volonté existe sur le terrain ; reste à donner l’élan.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Amendement II-CE177 de Mme Hélène Laporte

M. Antoine Golliot (RN). Cet amendement propose d’abonder de 8 M€ en autorisations d’engagement l’action 03 « Sécurité sanitaire de l’alimentation » du programme 206. La baisse des moyens de cette action est incompréhensible. La situation des finances publiques ne justifie pas que l’on fasse des économies sur la santé des Français. Tâchons d’éviter que ne se reproduisent des scandales sanitaires comme ceux de Buitoni, Andros ou Kinder.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le système français de sécurité sanitaire de l’alimentation est reconnu comme l’un des meilleurs au monde. Nous pouvons en être fiers et faire crédit à la direction générale de l’alimentation pour sa capacité à piloter les moyens alloués à l’action 03 du programme 206. Ceux-ci ont été multipliés par cinq dans la loi de finances initiale pour 2024, à l’occasion du déploiement de la police sanitaire unique. Les autorisations d’engagement baissent légèrement dans le projet de loi de finances pour 2025, de 118 M€ à 112 M€, mais les crédits de paiement progressent de 93 M€ à 108 M€. Aucune économie n’est réalisée, encore moins sur le dos des Français. L’avis est défavorable.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Le Rassemblement national échoue à déposer plus de dix amendements sur l’ensemble de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, mais il veut augmenter, sans justification, le budget de l’action qui bénéficie de la deuxième plus forte progression de crédits. Voilà une nouvelle preuve d’amateurisme.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE162 de Mme Manon Meunier et II-CE192 de M. Charles Fournier (discussion commune)

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Cet amendement vise à allouer 10 M€ aux expérimentations sur la sécurité sociale de l’alimentation. Nous soutiendrons néanmoins l’amendement de monsieur Fournier plutôt que le nôtre, car il propose 15 M€.

M. Charles Fournier (EcoS). La sécurité sociale de l’alimentation constitue l’une des plus belles idées de ces dernières années. Elle offre une réponse à la précarité alimentaire et à celle des agriculteurs, car elle garantit un accès universel à l’alimentation ainsi que les revenus des producteurs. Elle repose sur un principe de conventionnement et son financement est assuré par tous grâce à la cotisation socialisée.

Une trentaine d’expérimentations sont actuellement menées dans le pays. J’ai déposé avec plusieurs collègues, dont Manon Meunier et Mathilde Hignet, une proposition de loi visant à déployer une expérimentation reprenant le principe de la loi sur les « Territoires zéro chômeur ». Nous proposons de créer un fonds d’expérimentation, doté de 15 M€, pour soutenir ces initiatives et accompagner la montée en puissance de la sécurité sociale de l’alimentation, dispositif à même de répondre à de nombreuses difficultés de ces dernières années.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’émergence des caisses locales de sécurité sociale de l’alimentation mérite bien entendu d’être soutenue, ce que fait l’État en appuyant les projets agricoles territoriaux, lesquels participent le plus souvent aux initiatives qui sont lancées. En revanche, il ne me semble pas soutenable de créer un programme budgétaire spécifique parce que le programme 206 comporte déjà une action 08 « Qualité de l’alimentation et offre alimentaire ».

Si votre proposition de loi venait à prospérer, peut-être faudrait-il alors abonder les crédits de l’action 08 pour soutenir l’expérimentation, voire la pérenniser en cas de succès. L’avis est défavorable.

M. Charles Fournier (EcoS). Je vous soumettrai la proposition de loi si vous voulez la cosigner… Au reste, des expérimentations ont déjà lieu. La plupart ne sont pas aidées et celles qui le sont bénéficient davantage des crédits régionalisés de « France 2030 » que des projets agricoles territoriaux, à l’instar d’un projet montpelliérain, à ce jour le plus avancé en France. Débloquer des financements dans le projet de loi de finances pour 2025 est essentiel pour soutenir ces expérimentations sans attendre la promulgation d’un texte législatif, même si le Parlement devra se saisir de la proposition de loi que je lui soumettrai.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CE51 de M. David Taupiac

M. David Taupiac (LIOT). Les difficultés de production liées au renforcement des aléas climatiques ont plongé la viticulture dans la crise depuis trois ou quatre ans, notamment dans le Sud-Ouest. En outre, les marchés, principalement celui du vin rouge, se sont restreints au fil des années et la filière rencontre des problèmes d’exportation vers certains pays comme la Chine et les États-Unis, par exemple sur les distillations d’armagnac et de cognac.

Il est nécessaire de déployer des prêts garantis par l’État (PGE) pour alimenter la trésorerie des viticulteurs. En quatre ans, la viticulture est passée du rôle de locomotive des territoires à une crise la projetant vers le dépôt de bilan.

L’amendement a pour objet de créer un nouveau programme finançant des PGE à destination des viticulteurs et doté de 200 M€.

Les viticulteurs adressent d’autres demandes portant sur des fonds d’indemnisation d’urgence et sur des aides aux entreprises à l’aval des coopératives et des exploitations agricoles : je proposerai des mesures allant en ce sens en séance publique. L’état de la viticulture est très préoccupant et les aides à l’arrachage ne régleront pas définitivement les difficultés du secteur.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation concernant la crise profonde que traverse la filière vitivinicole. Les garanties apportées par l’État relèvent du programme 114 de la mission Engagements financiers de l’État et ce sont des crédits évaluatifs au sens de l’article 10 de la loi organique relative aux lois de finances. Votre amendement n’a pas sa place dans la mission budgétaire que nous examinons.

Je rappelle aussi que l’État a instauré, en lien avec Bpifrance, un dispositif de PGE pour l’ensemble des agriculteurs. Par ailleurs, le ministère de l’agriculture vient de créer un dispositif pour l’arrachage définitif de vignes, valable partout en France et qui a reçu le feu vert de la Commission européenne : 120 M€ seront mobilisés pour apporter une aide de quatre mille euros par hectare. Il faudra aussi que l’État accompagne la restructuration de la filière, qui vient de finaliser son plan stratégique.

Je vous propose de retirer cet amendement pour voir comment vous pourriez le retravailler d’ici à l’examen de la mission Engagements financiers de l’État par la commission des finances ou pour la séance. Sinon, avis défavorable.

M. David Taupiac (LIOT). Les prêts proposés par l’État en lien avec Bpifrance ne permettent pas de répondre à la situation des viticulteurs : ils ne sont pas assez étalés dans le temps et ils sont trop coûteux et difficiles à mettre en place. Soyons pragmatiques : il faudrait des PGE de plus de cinq ans et plus accessibles. C’est urgent : les agriculteurs ne passeront pas une année de plus et les enjeux pour la viticulture et l’économie de nos territoires sont importants.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’aurais également pu évoquer les coopératives viticoles qui devront, elles aussi, mettre en place un vaste plan de restructuration. La situation de la viticulture, vous avez raison de le souligner, est un véritable sujet de préoccupation, dont nous devrons parler avec la ministre. Différents vignobles français sont en difficulté et pourraient même disparaître. Je soutiens les démarches visant à préserver la très belle diversité de notre viticulture, mais cet amendement n’est pas placé au bon endroit.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE188 de M. Dominique Potier

Mme Mélanie Thomin (SOC). Le monde agricole doit cohabiter avec d’autres acteurs économiques, comme les ostréiculteurs et les mytiliculteurs. Cet amendement vise à allouer 1 ’M€ au développement d’espaces de gouvernance pour organiser le partage de l’eau sur des bases scientifiques et dans le cadre de projets de territoire spécifiques.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je mesure bien l’importance de la question de l’eau et la nécessité d’une approche scientifique en la matière, ainsi que d’une gouvernance pour assurer un partage équilibré entre les différents usages. J’ai du mal à voir ce que financerait ce million d’euros, mais je donne un avis favorable à votre amendement d’appel.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

 

Amendement II-CE174 de Mme Hélène Laporte

M. Antoine Golliot (RN). La part de la surface agricole consacrée à l’agriculture biologique est en baisse, mais les cibles restent élevées pour les années à venir – une hausse de 18 % est notamment prévue pour 2027. Si la part de l’agriculture biologique dans l’alimentation des Français recule, c’est notamment en raison des coûts de production et de la forte inflation des années 2022 et 2023. Il nous paraît nécessaire d’introduire un nouvel indicateur relatif à la part des produits issus de l’agriculture biologique dans l’alimentation des Français afin de juger de la pertinence des cibles pour les surfaces agricoles.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les indicateurs ont toujours un lien direct avec les objectifs, en l’occurrence la performance économique et environnementale de la production. L’indicateur que vous proposez pourrait servir à mesurer l’efficacité des campagnes de communication en faveur de la consommation de produits bio, mais cela ne correspond pas à un objectif du projet annuel de performances. Par conséquent, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE175 de Mme Hélène Laporte

M. Robert Le Bourgeois (RN). Ce n’est un secret pour personne : l’interdiction dans le droit national d’un produit phytosanitaire pourtant autorisé au niveau européen a parfois des conséquences catastrophiques pour nos agriculteurs, qui subissent d’importantes pertes de récolte. C’est le cas d’une centaine de substances actives autorisées par le droit européen, comme l’acétamipride, seule solution pour lutter contre le puceron, le ver de la noisette ou la punaise diabolique. Il nous semble pertinent d’ajouter un sous-indicateur visant à contextualiser la trajectoire de baisse de l’utilisation des produits phytosanitaires au moyen d’une évaluation du coût de leur interdiction lorsqu’elle relève d’une décision souveraine de la France. Cela permettra tout simplement de savoir combien gagneraient les agriculteurs si la France n’interdisait pas des produits que l’Europe autorise.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Pour mesurer l’objectif tendant à favoriser un changement des pratiques afin de préserver la santé publique et l’environnement, vous proposez un nouvel indicateur relatif au coût de la surtransposition en matière d’interdiction de produits phytosanitaires. Il n’existe pas de lien direct entre l’objectif visé et l’indicateur que vous proposez et surtout, ce que vous demandez serait difficilement mesurable. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le travail que nous avons mené cet après-midi a permis de lever les réserves que j’avais émises au début de l’examen des crédits. Je vous propose donc d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales modifiés.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales modifiés.

 

 

Article 48 : Plafond des emplois des opérateurs de l’État

 

Amendement II-CE184 de M. Dominique Potier

Mme Mélanie Thomin (SOC). La masse salariale est un élément stratégique pour permettre à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail d’assurer ses nombreuses missions.

L’amendement vise donc à augmenter de 16 ETP le plafond des autorisations d’emploi des opérateurs du programme 206, dont l’Anses est le seul bénéficiaire.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.

 

 

Après l’article 59

 

Amendement II-CE58 de Mme Chantal Jourdan

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement demande au Gouvernement de procéder à un examen des conditions d’attribution des aides du plan de renouvellement forestier, afin de proposer des critères plus ciblés permettant de garantir à la fois la non-détérioration des puits de carbone, la non-régression de la biodiversité et l’absence d’incitation aux coupes rases dans des peuplements améliorables par des travaux de sylviculture mélangée à couvert continu.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les demandes de rapport n’ont pas leur place dans l’examen pour avis des crédits. Par principe, mon avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 


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   Liste des propositions

Proposition n° 1 : Étudier la possibilité d’exonérer de l’impôt les indemnités versées aux agriculteurs pour compenser leurs pertes.

 

Proposition n° 2 : Impulser et accompagner la mise en place, à l’échelle européenne, d’un système de banques de vaccins, d’antigènes ou de souches vaccinales.

 

Proposition n° 3 : Définir une trajectoire de renforcement des moyens de l’Anses afin de renforcer l’investissement dans la recherche sur la santé animale et d’accompagner une politique de vaccination animale stratégique.

 

Proposition n° 4 : Organiser dans les meilleurs délais et accompagner financièrement une campagne de vaccination contre la FCO 8, pour les bovins et les ovins, afin d’éviter une reprise de l’épidémie au printemps 2025.

 

Proposition n° 5 : Négocier avec les filières et définir une doctrine de l’accompagnement de la vaccination animale par l’État, avec des schémas de financement précis et adaptés à chaque filière (proposition incluse dans le champ des propositions n° 7 et 8).

 

Proposition n° 6 : Rendre public rapidement le rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux relatif à la rénovation du financement du sanitaire dans le domaine animal.

 

Proposition n° 7 : Négocier une doctrine du financement du sanitaire dans le cadre des « Parlements du sanitaire ».

 

Proposition n° 8 : Définir des schémas de financement des actions sanitaires.

 

 

 


 

   LISTE DES PERSONNES auditionnÉes

Confédération paysanne *

Mme Sylvie Colas, secrétaire nationale

Mme Aurélie Bouton, animatrice technique

Coordination rurale *

Mme Amélie Rebiere, membre du Comité directeur

Mme Agathe Lecoulant, chargée de mission gouvernance

Interprofession bétail et viande (Interbev) *

M. Jean-François Guihard, président

M. Patrick Benezit, premier vice-Président d’Interbev et président de la Fédération nationale bovine (FNB)

Réseau des groupements de défense sanitaire (GDS France)

Christophe Moulin, président

Association Nationale interprofessionnelle de la VOLaille de chair (ANVOL) *

M. Jean-Michel Schaeffer, président

M. Yann Brice, directeur adjoint

M. Yann Nédélec, directeur

Comité National pour la Promotion de l’Œuf (CNPO)*

M. Yves-Marie Beaudet, président

Mme Alice Richard, directrice

Interprofession nationale porcine (Inaporc) *

M. Philippe Bizien, président

Mme Anne Richard, directrice

Mme Caroline Tailleur, directrice adjointe

Mme Mylène Petit, Sanitaire ANSP & Inaporc

Fédération nationale ovine (FNO) *

Jean Paul Rault, membre du bureau

Xavier Denis, vétérinaire conseil Races de France

CFDT Agri Agro

M. Franck Tivierge, secrétaire national

Annabel Foury, secrétaire fédérale

Compassion in World Farming France (CIWF France) *

Mme Agathe Gignoux, chargée d’affaires publiques

Mme Myriam Boudali, chargée de plaidoyer et campagne

Mme Estelle Guérin, chargée de recherche Elevage et BEA

Fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE)

M. Christophe Chambon, président

Comité Interprofessionnel des Palmipèdes à Foie Gras (CIFOG) *

Fabien Chevalier, président

Marie-Pierre Pé, directrice

Mathieu la Fay, directeur associé de Com’Publics

Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (Cgaaer)

M. Benoît Bonnefoi, inspecteur général des ponts, des eaux et des forêts

M. Hervé Lejeune, inspecteur général de l’agriculture

Chambres d’agriculture France *

M. Sébastien Windsor, président

M. Étienne Bertin, chargé d’affaires publiques

Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (Fnsea) *

M. Luc Smessaert, vice-président, président de la commission fiscale-sociale

M. Laurent Saint Affre, membre du bureau et référent FNSEA sanitaire animale

Mme. Romane Sagnier, responsable des affaires publiques

Mme Eva Lemee, chargée de mission élevage

Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES)

M. le Professeur Benoit Vallet, directeur général

Mme Agathe Denéchère, directrice générale adjointe

M. Gilles Salvat, directeur général délégué pour le pôle Recherche et référence

Mme Sarah Aubertie, chargée de relations institutionnelles

Syndicat de l’Industrie du Médicament et diagnostic Vétérinaires (SIMV) *

M. Jean-Louis Hunault, président

Mme Marie-Anne Barthélémy, secrétaire générale

M. Arnaud Deleu, directeur des Affaires économiques et de la formation

Mme Géraldine Kutas, directrice Corporate affairs et communication Ceva

M. Rémy Petitot, responsable des affaires publiques Boehringer Ingelheim

 

 

Jeunes agriculteurs *

Mme Manon Pisani, trésorière adjointe

Mme Claire Colombani, conseillère productions animales

La coopération agricole *

M. Dominique Chargé, président

M. Thibaut Bussonnière, chargé des relations publiques

Ministère de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt

Cabinet de la ministre

M. Tom Michon, conseiller budgétaire, gestion des risques, protection sociale et dialogue social

M. Jean-François Lepage, conseiller filières animales, santé et bien-être animal

Services du ministère

Mme Maud Faipoux, directrice générale de l’alimentation

M. Philippe Duclau, directeur général de la performance économique et environnementale des entreprises

Mme Fanny Dufumier, sous-directrice adjointe du pilotage des ressources et des services

Mme Marie-Aude Stofer, sous-directrice filières et forêt-bois, cheval et bioéconomie

M. Rémi Masson, sous-directeur gouvernance et pilotage

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 

 


([1]) L’ASP et FranceAgriMer sont les deux opérateurs à bénéficier d’une subvention pour investissement en plus de la subvention de fonctionnement.

([2]) Au 18 septembre 2024, seuls 370 M€ avaient été engagés sur le milliard d’autorisations d’engagement voté en loi de finances initiale et 135 M€ avaient été consommés sur les 594 M€ de crédits de paiement.

([3]) Programme 206 pour le ministère chargé de l’agriculture, programme 204 pour le ministère chargé de la santé, programme 111 pour le ministère chargé du travail, programme 181 pour le ministère chargé de l’écologie.

([4]) Cf. supra, partie 2.

([5]) Les boucles plastiques avec le numéro d’identification doivent pouvoir être remplacées par des puces électroniques donnant accès aux données sur les mouvements et sur le passeport sanitaire de l’animal (aujourd’hui matérialisé par la carte jaune, la carte verte ou le laissez-passer sanitaire).

([6]) Les professionnels réclament une saturation du plafond d’intervention publique autorisé par le droit européen, qui est de 70 %.

([7]) La section commune prend en charge 30 % de la part professionnelle du programme et la section spécialisée concernée 70 %.

([8]) Communiqué de presse du 30 août 2024 - Maladies animales vectorielles : de nouvelles mesures pour accompagner les éleveurs et lutter contre la fièvre catarrhale ovine (FCO) et la maladie hémorragique épizootique (MHE).

([9]) FranceAgriMer, « Les performances à l’export des filières agricoles et agroalimentaires françaises : situation en 2023 ».

([10]) Hors canards reproducteurs dont les produits sont destinés à l’exportation.