— 1 —
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 octobre 2024
AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LE PROJET DE LOI (n° 324)
de finances pour 2025
TOME V
RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
PAR Mme Blandine Brocard,
Députée
——
Voir le numéro : 468 –III –38
— 1 —
SOMMAIRE
___
Pages
INTRODUCTION............................................ 5
A. le programme 119 « Concours financiers aux collectivitÉs territoriales et À leurs groupements »
1. Les dotations d’investissement
2. Les dotations de décentralisation
B. Le programme 122 « Concours spÉcifiques et administration »
1. L’action n° 1 « Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales »
2. Les autres actions du programme
C. Les mesures prÉvues par les articles rattachÉs
II. Partie thÉmatique : la lisibilitÉ des dotations d’investissement aux communes
A. un manque de prÉvisibilité des dotations d’investissement allouÉes aux communes
1. Des dotations attribuées selon une logique de subvention de projets
2. Un manque de prévisibilité des dotations d’investissement pointé par les élus locaux
2. Le cadre pluriannuel instauré en 2024 doit être évalué et complété
3. Les efforts de simplification initiés doivent être fortement accentués
Annexe 1 : Récapitulatif des crédits de la mission
— 1 —
Les deux programmes de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT) représentent un total de 4,01 milliards d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 4,06 milliards d’euros de crédits de paiement (CP) dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Ces crédits se caractérisent par leur globale stabilité par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2024, le montant des dotations d’investissement et de décentralisation étant maintenu.
Évolution des crÉdits de la mission RElations avec les collectivitÉs territoriales
(en milliards d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » |
3,80 |
3,80 |
3,71 |
3,75 |
0,0 % |
+ 1 % |
Programme 122 |
0,30 |
0,25 |
0,21 |
0,31 |
– 29 % |
+ 26 % |
Total mission |
4,10 |
3,96 |
4,01 |
4,06 |
– 2 % |
+ 3 % |
Source : projet annuel de performances pour 2025.
Le soutien de l’État aux collectivités territoriales ne saurait cependant être réduit à la seule mission RCT : il passe en effet en premier lieu par le versement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) dont le montant est fixé à 27,24 milliards d’euros par l’article 29 du présent PLF. Par ailleurs, il faut souligner que le fonds vert, créé en 2023, financera à hauteur de 1 milliard d’euros en 2025 les projets d’investissement dans la transition écologique des collectivités territoriales.
Si les crédits alloués à la mission « RCT » sont maintenus en 2025, le Gouvernement demande aux collectivités territoriales de participer à l’effort de redressement des comptes publics, indispensable pour assurer la crédibilité de la France auprès de nos partenaires européens et des marchés financiers. Cet effort, qui représente 5 milliards d’euros, est réparti de la façon suivante :
– l’article 64 du PLF instaure un fonds de réserve au profit des collectivités territoriales alimenté par un prélèvement sur les 450 collectivités dont les dépenses réelles de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros, dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement, et dont sont exonérées les collectivités les plus fragiles. Ce fonds, qui disposerait ainsi d’environ 3 milliards d’euros, viendrait financer en 2026 trois mécanismes de péréquation : le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic), le fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux et le fonds de solidarité régionale ;
– l’article 30 du PLF abaisse de 16,404 % à 14,850 % le taux de compensation forfaitaire pour les dépenses éligibles au fonds de compensation pour la TVA et réduit l’assiette éligible en excluant les dépenses de fonctionnement qui y figuraient, ce qui devrait permettre à l’État de réaliser une économie d’environ 800 millions d’euros ;
– enfin, l’article 31 du PLF prévoit le gel de la quasi-totalité des fractions de TVA transférées aux collectivités territoriales pour l’année 2025, dont le montant restera à son niveau de 2024, soit 52,5 milliards d’euros. Les collectivités territoriales ne bénéficieront donc pas de la dynamique de la TVA en 2025, ce qui représente une économie pour l’État estimée à 1,2 milliard d’euros.
La dotation globale de fonctionnement : une dotation à réformer dont le montant reste stable en 2025
Si la dotation globale de fonctionnement (DGF) ne fait pas strictement partie de la mission « RCT », elle constitue néanmoins le principal concours financier que l’État verse aux collectivités territoriales. La DGF est calculée à partir d’une trentaine de critères de ressources et de charges, de nature variée (démographique, sociale, financière, géographique ou administrative) et est composée de plusieurs dotations réparties en deux catégories : les dotations forfaitaires et de compensation d’une part qui ont pour objet de garantir aux collectivités des ressources stables d’une année sur l’autre, et les dotations de péréquation d’autre part qui viennent soutenir les collectivités territoriales qui ont des charges particulières.
Le montant de la DGF a été fixé à 27,24 milliards d’euros pour 2025, soit une valeur stable en euros courants par rapport à 2024. Cela signifie qu’un effort supplémentaire est demandé cette année aux collectivités territoriales au regard de l’inflation, dans le contexte de redressement nécessaire des comptes publics.
Il faut toutefois rappeler que si le montant de la DGF a diminué de près de 11 milliards d’euros entre 2013 et 2017, il a été stabilisé à périmètre constant entre 2018 et 2022 avant d’être augmenté de 320 millions d’euros en 2023 puis en 2024 (soit une hausse de 640 millions d’euros sur deux ans). Ces deux augmentations successives ont représenté des hausses inédites depuis 2013 à périmètre constant. Si elles n’ont représenté qu’environ 1 % du montant global de la DGF, une progression inférieure à celle de l’inflation sur la même période, il est important de rappeler que les collectivités territoriales ont, en outre, bénéficié de plusieurs filets de sécurité et d'un bouclier tarifaire pour faire face à la hausse du coût de l’énergie.
Par ailleurs, une réforme ambitieuse de la DGF est attendue afin de revoir certains paramètres de calcul pour partie incomplets, révolus ou imprécis. Cette réforme doit nécessairement se faire en concertation avec les associations d’élus et le comité des finances locales, comme initialement prévu en début d’année 2024. Elle devra notamment s’intéresser aux différences qui existent entre le montant de dotation forfaitaire par habitant dans les communes rurales qui touchent la dotation de solidarité rurale (58 euros par habitant en moyenne d’après les informations transmises à la rapporteure par la DGCL) et les communes urbaines qui touchent la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (103 euros par habitant). Si la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales, dotées de 100 millions d’euros en 2024 et 2025 (voir infra), vient réduire cet écart pour les communes concernées, une réflexion plus globale semble urgente.
*
La mission « Relations avec les collectivités territoriales » a pour objet de retracer les financements que l’État accorde aux collectivités territoriales dans la poursuite de trois objectifs : soutenir les dépenses de fonctionnement des collectivités, soutenir l’investissement local et compenser les charges transférées aux collectivités dans le cadre de la décentralisation et de la disparition de certains impôts locaux.
Dans la partie thématique de ses travaux, votre rapporteure pour avis a choisi de s’intéresser cette année à la lisibilité des dotations d’investissement versées par l’État aux communes.
Elle a ainsi rencontré les représentants des principales associations d’élus locaux, les services de la direction générale des collectivités locales (DGCL) et a effectué un déplacement dans le Rhône pour rencontrer, entre autres, les services de l’État qui instruisent les demandes de subvention.
À l’issue de ses travaux, elle fait le constat de la nécessité d’améliorer la prévisibilité des dotations aux communes, afin d’assurer un investissement pérenne des collectivités notamment dans la transition écologique. Cette prévisibilité accrue pourrait s’inscrire dans un cadre pluriannuel renforcé et nécessite des efforts de simplification accentués.
I. Partie Budgétaire : la stabilitÉ des crÉdits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »
A. le programme 119 « Concours financiers aux collectivitÉs territoriales et À leurs groupements »
Le programme 119 est le principal programme de la mission. Il comprend les dotations d’investissement et les dotations de décentralisation versées par l’État aux collectivités territoriales et représente 3,8 milliards d’euros en AE et 3,7 milliards d’euros en CP dans le PLF pour 2025.
Alors que les dotations d’investissement assurent le soutien de l’État aux projets d’investissement des collectivités territoriales pour 2,32 milliards d’euros en AE et 2,27 milliards en CP, les dotations de décentralisation, d’un montant de 1,47 milliard d’euros en AE et en CP, visent à compenser les charges supportées à la suite d’un transfert de compétence.
Les crédits alloués au programme 119 sont globalement stables par rapport à 2024. On observe une légère hausse des CP alloués au programme qui s’explique par le rythme des décaissements en CP de l’abondement exceptionnel de 303 millions d’euros de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et de la dotation de soutien aux projets des départements et des régions.
ÉVOLUTION DES CRédits du programme 119
(en milliards d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|||
Numéro et intitulé de l’action |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
01 – Soutien aux projets des communes et groupements de communes |
1,97 |
1,83 |
1,97 |
1,84 |
- |
+ 1 % |
02 – Dotation générale de décentralisation des communes |
0,14 |
0,14 |
0,14 |
0,14 |
- |
- |
03 – Soutien aux projets des départements et des régions |
0,21 |
0,15 |
0,21 |
0,17 |
- |
+ 8 % |
04 – Dotation générale de décentralisation des départements |
0,26 |
0,26 |
0,26 |
0,26 |
- |
- |
05 – Dotation générale de décentralisation des régions |
0,94 |
0,94 |
0,94 |
0,94 |
- |
- |
06 – Dotation générale de décentralisation concours particuliers |
0,27 |
0,27 |
0,27 |
0,27 |
- |
- |
09 – DSIL exceptionnelle |
- |
0,11 |
- |
0,114 |
- |
+ 3,18 % |
Total |
3,80 |
3,80 |
3,71 |
3,75 |
0,0 % |
+ 1 % |
Source : projet annuel de performances pour 2025.
1. Les dotations d’investissement
Les dotations d’investissement sont versées par le biais de deux actions : l’action n° 1 « Soutien aux projets des communes et groupements de communes » et l’action n° 3 « Soutien aux projets des départements et des régions ».
L’action n° 1 regroupe, pour 2025, huit dispositifs en faveur des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.
La dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), créée par la loi de finances pour 2011, a pour objet de subventionner des dépenses d’équipement des communes et de leurs groupements en milieu rural, déterminées comme prioritaires par les commissions DETR réunies à l’échelon départemental. La dotation est fixée à 1,05 milliard d’euros depuis 2018, année où elle a été augmentée de 50 millions d’euros pour pallier la suppression de la réserve parlementaire. Le PLF pour 2025 reconduit ce montant d’AE. Les CP augmentent de 6,5 millions pour atteindre 924,2 millions d’euros.
La dotation politique de la ville (DPV), créée par la loi de finances pour 2015, soutient financièrement les communes les plus exposées aux difficultés en matière urbaine. Son montant, qui s’élève à 150 millions d’euros en AE, est stable depuis 2017. Pour 2025, il est donc maintenu en AE et porté à 130,1 millions d’euros en CP afin de tenir compte de la montée en charge progressive des engagements.
La dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements (DSIL), créée en 2016, participe au financement de projets locaux structurants définis avec l’État. Après un abondement exceptionnel de 303 millions d’euros d’AE supplémentaires en 2022 pour financer les projets de redynamisation des centralités mis en œuvre dans le cadre des contrats de relance et de transition écologique, les AE ont retrouvé, en 2023 et en 2024, leur niveau de 2021, soit 570 millions d’euros. Les CP s’élèvent à 531,7 millions en 2025, en légère baisse par rapport à 2024 (549,4 millions).
La dotation forfaitaire pour la délivrance de titres sécurisés (DTS) compense depuis 2009 la charge, pour les communes, résultant de l’installation et du fonctionnement de dispositifs de recueil des demandes de passeports biométriques et de cartes nationales d’identité. Face aux difficultés observées depuis le début de l’année 2022, cette dotation a atteint un montant total de 100 millions d’euros sur l’année 2023, puis en 2024. L’effort est maintenu en 2025, avec une dotation de 100 millions d’euros prévue par le présent PLF.
La dotation pour les régisseurs de police municipale au titre de la perception du produit de certaines contraventions (IRPM) compense l’obligation des communes de verser, pour le compte de l’État, une indemnité de responsabilité aux régisseurs des polices municipales qui a pour objet de compenser leurs charges de cautionnement. Cette dotation s’établit à 250 000 euros en AE et en CP dans le PLF.
La dotation communale d’insularité, créée par la loi de finances pour 2017, permet de prendre en compte les charges spécifiques, liées à l’insularité, des « îles-communes ». Elle demeure stable à 4 millions d’euros en AE et CP.
La dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité et la protection des aménités rurales, a remplacé, en 2022, la dotation « Natura 2000 ». En 2024, le Gouvernement a modifié les modalités de la répartition de cette dotation et a augmenté significativement l’effort en faveur de la protection de la diversité et des aménités rurales (+ 58 millions d’euros) en portant la dotation à 100 millions d’euros. En 2025, cet effort est confirmé avec une dotation maintenue à 100 millions d’euros. Cette dotation est destinée aux communes rurales dont une partie significative du territoire comprend une aire protégée ou jouxte une aire marine protégée.
Le plan Marseille en grand, initié par le Président de la République en 2021 au profit de la rénovation des écoles de la ville de Marseille, continue de mobiliser, pour 2025, 56,8 millions d’euros en CP.
La répartition du montant de dotations par strate de communes
D’après les informations transmises par la direction générale des collectivités locales (DGCL) à votre rapporteure, l’ensemble des communes françaises reçoivent en moyenne 195 euros de dotations de l’État par habitant, en tenant compte de la dotation globale de fonctionnement (DGF), de la dotation aménités rurales et des trois principales dotations d’investissement.
Ce montant varie selon les strates de communes, de 132 euros en moyenne par habitant pour les communes de 200 000 habitants et plus à 239 euros par habitant pour les communes de 50 000 à 74 999 habitants.
On note que le soutien de l’État est particulièrement fort sur les communes de 20 000 à 200 000 habitants qui bénéficient de modalités d’attribution de la DGF plus avantageuses que les plus petites communes via la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale.
En revanche, si les communes de moins de 20 000 habitants bénéficient, via la DSR, d’une DGF moins élevée, les modalités d’attribution des dotations d’investissement leur sont plus favorables. C’est particulièrement le cas pour les communes de moins de 500 habitants qui bénéficient en priorité de la DETR, dotation d’investissement la plus élevée en volume financier (1,05 milliard d’euros) et concentrée sur les projets d’investissements des petites communes rurales.
L’action n° 3 « Soutien aux projets des départements et des régions » porte les crédits de la dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID). L’intégralité de cette dotation est attribuée suite à des appels à projets sélectionnés par le préfet de région, compte tenu de la fusion en loi de finances pour 2022 de la part « péréquation » et de la part « projet » de cette dotation. En 2025, les AE sont stables à 212 millions d’euros et les CP augmentent de 12,8 millions d’euros pour atteindre 167,7 millions d’euros, afin de tenir compte de la montée en puissance des crédits de l’ancienne part « péréquation » de la dotation.
Dans le contexte de la sortie de crise sanitaire, le législateur a abondé, par la troisième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020, de 950 millions d’euros supplémentaires en AE la DSIL afin de financer la dimension territoriale du plan de relance et d’accompagner massivement les projets d’investissement des communes et des EPCI à fiscalité propre, principalement dans les domaines de la transition écologique, de la résilience sanitaire et de la préservation du patrimoine public, et afin d’amplifier leur effet de levier incontestable sur la reprise économique.
Si, au 31 décembre 2021, la totalité des AE ouvertes a bien été engagée, conformément aux objectifs du plan de relance, l’action n° 9 continue d’ouvrir, pour 2025, 114 millions d’euros au titre des CP.
2. Les dotations de décentralisation
Il existe quatre dotations générales de décentralisation (DGD) qui concernent des dispositifs spécifiques de compensation de transferts de charges ne relevant pas de la dotation globale de fonctionnement (DGF), cette dotation étant abondée par des ressources de l’État affectées par la première partie du PLF.
L’action n° 5 « Dotation générale de décentralisation des régions » est la plus importante de ces dotations. En 2025, cette dotation reste stable à 940 millions d’euros en AE et en CP. La DGD des régions finance notamment la dotation attribuée à la collectivité de Corse ou la dotation du syndicat des transports d’Île-de-France (STIF) pour les charges liées aux transports scolaires.
Les principaux crédits de l’action n° 2 « Dotation générale de décentralisation des communes » concernent le financement des services communaux d’hygiène et de sécurité (91 millions d’euros). La DGD des communes est stable à 140 millions d’euros en AE et CP dans le PLF.
L’action n° 4 « Dotation générale de décentralisation des départements » permet une compensation financière résiduelle, par rapport à la DGF, ne pouvant être opérée sous forme fiscale. Cette dotation reste stable en 2025, à 265 millions d’euros.
Les crédits de l’action n° 6 « Dotation générale de décentralisation concours particuliers » s’élèvent à 272 millions d’euros en AE et CP dans le PLF pour 2025, un montant identique à celui de l’année précédente. Ils concernent les compensations attribuées aux différentes collectivités territoriales et EPCI à fiscalité propre.
B. Le programme 122 « Concours spÉcifiques et administration »
Le programme 122 regroupe, de manière résiduelle au sein de la mission, les crédits destinés aux aides exceptionnelles octroyées aux collectivités territoriales (action n° 1), les moyens de la direction générale des collectivités territoriales (action n° 2) et les dotations d’outre-mer (action n° 3).
Pour 2025, ces crédits s’élèvent à 212,2 millions d’euros en AE et 314,4 millions d’euros en CP. Les crédits exceptionnels, nécessairement fluctuants d’une année sur l’autre, diminuent de 15 % en AE et de 27 % en CP.
éVOLUTION DES CRédits du programme 122
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|||
Numéro et intitulé de l’action |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
01 – Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales |
139,3 |
90,9 |
50,3 |
152,1 |
– 64 % |
67 % |
02 – Administration des relations avec les collectivités territoriales |
8,3 |
8,7 |
10,7 |
11,1 |
29 % |
28 % |
04 – Dotations outre-mer |
149,9 |
149,9 |
151,2 |
151,2 |
1 % |
1 % |
Total |
297,5 |
249,6 |
212,2 |
314,4 |
– 29 % |
26 % |
Source : projet annuel de performances pour 2025.
1. L’action n° 1 « Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales »
L’action n° 1 « Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » est dotée de 50,3 millions d’euros en AE et 152,1 millions d’euros en CP. Elle comprend, pour 2025 :
– les subventions exceptionnelles aux communes en difficulté (9 millions d’euros en AE et CP, stable par rapport à 2024) ;
– les aides aux communes forestières victimes de scolytes (1 million d’euros en AE et CP, même montant qu’en 2024) ;
– les subventions exceptionnelles pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques (40 millions d’euros en AE et 30 millions d’euros en CP) ;
– les aides aux communes concernées par les restructurations Défense (300 000 euros en AE et CP) ;
– le fonds violences urbaines, qui marque la contribution de l’État à la prise en charge des dégâts sur les biens des collectivités territoriales à la suite des violences urbaines de l’année 2023, est doté, dans ce PLF, de 63,8 millions d’euros en CP. Ce fonds a été financé, en 2023, par le dégel de la réserve de précaution du programme 122, par des ouvertures de crédits en loi de finances de fin de gestion pour 2023 et par la mobilisation d’une autre ligne du programme. Le reliquat de crédits non consommés ayant été reporté intégralement en AE et partiellement en CP en 2024, la dotation de 2025 vient financer les restes à payer de ces engagements ;
– le fonds exceptionnel pour l’accompagnement des collectivités qui ont été touchées par la tempête Ciaran en novembre 2023 est doté de 48 millions d’euros en CP pour couvrir les restes à payer des engagements effectués en totalité en 2024.
2. Les autres actions du programme
L’action n° 2 « Administration des relations avec les collectivités territoriales » comprend les crédits alloués à la Direction générale des collectivités locales et au fonctionnement des organismes nationaux relatifs aux collectivités territoriales. Pour 2025, ces crédits, qui s’élèvent à 10,7 millions d’euros en AE et 11,1 millions d’euros en CP, sont en hausse de 2,4 millions d’euros pour assurer le financement des refontes des systèmes d’information existants et de nouveaux outils informatiques qui visent notamment à moderniser le contrôle des actes des collectivités territoriales.
L’action n° 4 « Dotations outre-mer », bénéficiant de 151,2 millions d’euros en AE et CP pour 2025, regroupe une dotation de fonctionnement des provinces de Nouvelle-Calédonie (82,7 millions d’euros), deux dotations de compensations versées à cette même collectivité (61,4 millions d’euros) et à la Polynésie Française (2,3 millions d’euros) au titre des services et établissements publics transférés et une dotation de compensation versée à Saint-Martin (4,7 millions d’euros).
C. Les mesures prÉvues par les articles rattachÉs
L’article 61 modifie la dotation globale de fonctionnement des communes et EPCI à fiscalité propre ainsi que des départements, en révisant ses modalités de répartition et en faisant évoluer les dispositifs de péréquation horizontale qui s’appliquent entre les collectivités. Ainsi, il prévoit une hausse de 290 millions d’euros des dotations de péréquation des communes (140 millions d’euros pour la dotation de solidarité urbaine et 150 millions d’euros pour la dotation de solidarité rurale). Il prévoit également que la hausse de la dotation de solidarité rurale (DSR) en 2025 sera répartie au minimum à 60 % sur sa fraction de « péréquation ». La péréquation verticale des départements est également augmentée de 10 millions d’euros. En outre, il prévoit un traitement simplifié des mouvements de communes entre EPCI et des ajustements des modalités de répartition de la DGF.
L’article 62 tire les conséquences de l’article 240 de la loi de finances pour 2024 qui a remplacé dans le calcul des indicateurs financiers utilisés pour la répartition du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) le produit perçu par le bloc communal au titre de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) par la fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) perçue en compensation de la suppression de cet impôt. Cet article inclut cette même fraction de TVA dans les ressources fiscales agrégées prises en compte comme référence pour l’application éventuelle d’un plafonnement du prélèvement du FPIC, et rend cette mesure applicable à la répartition du fonds effectuée en 2024. Il tire également les conséquences de la décision n° 2024-1085 QPC du Conseil constitutionnel, qui a déclaré contraires à la Constitution les modalités dérogatoires de répartition du FPIC entre les communes membres d’un même établissement public territorial (EPT) de la Métropole du Grand Paris (MGP).
L’article 63 complète le régime fiscal spécifique mis en place pour le projet Cigéo (projet de centre de stockage profond de déchets radioactifs) en 2021 en créant un dispositif de répartition du produit de la taxe de stockage entre les collectivités concernées, en sécurisant juridiquement les modalités existantes d’affectation du produit d’une taxe de stockage et en adaptant les modalités d’affectation du produit de la taxe d’accompagnement aux collectivités.
L’article 64 crée un fonds de réserve au profit des collectivités territoriales, abondé par un prélèvement sur le montant des impositions versées aux collectivités territoriales dont les dépenses réelles de fonctionnement constatées en 2023 sont supérieures à 40 millions d’euros. L’article prévoit que sont exonérées de ce prélèvement les collectivités dont les indicateurs de ressources et de charges mesurés dans les dispositifs de péréquation sont dégradés.
II. Partie thÉmatique : la lisibilitÉ des dotations d’investissement aux communes
Régulièrement alertée par les élus locaux sur le manque de lisibilité des dotations allouées aux communes, votre rapporteure a choisi de concentrer ses travaux de l’automne budgétaire sur cette problématique, en ayant à cœur, d’une part, de dresser un bilan des dotations existantes et des difficultés rencontrées par les élus locaux dans l’obtention de celles-ci et, d’autre part, d’engager des pistes de réflexion pour améliorer la situation. Elle fait le constat que c’est surtout le manque de prévisibilité des dotations qui a des conséquences sur l’investissement des communes. Ainsi, il lui semble possible d’instaurer une programmation pluriannuelle renforcée pour que les investissements des collectivités puissent s’inscrire dans la durée.
A. un manque de prÉvisibilité des dotations d’investissement allouÉes aux communes
1. Des dotations attribuées selon une logique de subvention de projets
L’État attribue principalement trois dotations budgétaires aux communes et à leurs groupements visant à cofinancer leurs projets d’investissement :
– la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR (1,05 milliard d’euros en AE en PLF 2025), versée aux communes rurales pour subventionner leurs dépenses d’équipements ;
– la dotation de soutien à l’investissement local – DSIL (570 millions d’euros en AE en PLF 2025), qui participe au financement de projets locaux structurants définis avec l’État. Cette dotation a été complétée par une DSIL exceptionnelle dans le cadre du plan de relance (abondement de 950 millions d’euros supplémentaires en AE en 2020) ;
– la dotation politique de la ville – DPV (150 millions d’euros en AE en PLF 2025), pour soutenir financièrement les communes abritant des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).
Les dotations d’investissement versées aux collectivités ont augmenté significativement entre 2020 et 2022 en raison de la mise en place de dispositifs ponctuels. En dehors de ces dispositifs, ces trois dotations sont restées globalement stables depuis 2018 et s’établissent en 2025 à 1,77 milliard d’euros.
Des orientations prioritaires communes nationales s’appliquent à ces trois dotations ([1]) :
– la transition écologique des territoires ;
– l’accessibilité des bâtiments publics ;
– la construction et la rénovation d’équipements sportifs dans le cadre de l’organisation des Jeux Olympiques ;
– la rénovation et la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel ;
– les projets d’investissement destinés à renforcer la sécurité et la résilience des systèmes d'information des collectivités ;
– les projets structurants à l’instar des pactes capacitaires relatifs aux moyens des services d’incendie et de secours.
En outre, bien que non rattaché à la mission « RCT », le fonds vert finance aussi les projets d’investissements des communes dans la transition écologique. Votre rapporteure a donc décidé de s’intéresser également aux subventions versées par ce fonds, doté pour 2025 d’une enveloppe de 1 milliard d’euros. Cette enveloppe est nettement inférieure à celle des deux années précédentes (1,8 milliard d’euros consommés en 2023 et 2 milliards d’euros budgétés en 2024) suite au plan d’économies proposé par le Gouvernement pour redresser les comptes publics.
La gestion de l’ensemble de ces dotations est déconcentrée et fonctionne selon une logique de subventions de projets sélectionnés par le préfet de région ou de département en fonction des enveloppes concernées.
Créée en 2011, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) subventionne les dépenses d’investissement et les projets des communes et des EPCI situés essentiellement en milieu rural, dans le domaine économique, social, environnemental, sportif et touristique ou favorisant le développement ou le maintien des services publics en milieu rural.
La DETR est attribuée par le préfet de département, selon des critères démographiques et de richesse fiscale fixés par l’article L. 2334-33 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et des priorités déterminées au niveau local par une commission départementale d’élus ([2]). Cette commission est chargée de définir les catégories d’opérations prioritaires, les taux de subvention minimaux et maximaux applicables à chacune d’elles, et de donner son avis sur tous les projets de subvention supérieurs à 100 000 euros.
Au moins 80 % des subventions attribuées par le préfet de département doivent être notifiées au cours du premier semestre de l’année et la liste des opérations, le montant des projets, et le montant des subventions attribuées sont publiés en ligne avant le 31 juillet de l’année en cours.
L’effet de levier attendu de la DETR, est d’un pour quatre, ce qui signifie que le montant total des investissements engagés par les bénéficiaires doit être quatre fois supérieur à celui des subventions accordées.
En sus des priorités communes nationales, la DETR a trois priorités supplémentaires : le soutien au réseau France Services et à la revitalisation des villes, petites et moyennes ; le soutien aux communes nouvelles et le financement des implantations de la gendarmerie nationale en milieu rural.
Enfin, les préfets peuvent aussi déterminer les critères et les priorités qu’ils souhaitent mettre en œuvre, au niveau local, dans le financement des projets.
Les critères d’attribution de la DETR
Sont éligibles à la DETR les communes :
- dont la population n’excède pas 2 000 habitants dans les départements de métropole et 3 500 habitants dans les départements d’outre-mer ;
- dont la population est supérieure à 2 000 habitants dans les départements de métropole (3 500 habitants dans les départements d’outre-mer) et n’excède pas 20 000 habitants dans les départements de métropole (35 000 habitants dans les départements d’outre-mer) et dont le potentiel financier par habitant est inférieur à 1,3 fois le potentiel financier par habitant moyen de l’ensemble des communes des départements de métropole et d’outre-mer dont la population est supérieure à 2 000 habitants et n’excède pas 20 000 habitants.
- les communes de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
- les communes nouvelles, pendant les trois premiers exercices à compter de leur création, issues de la transformation d’EPCI éligibles à la DETR l’année précédant leur transformation ou issues de la fusion de communes dont l’une d'entre elles était éligible à cette dotation l’année précédant leur fusion ;
- par dérogation, lorsque la subvention s’inscrit dans le cadre d’un contrat signé entre une commune ou un groupement éligible et le représentant de l’État, les maîtres d'ouvrage désignés par le contrat peuvent être bénéficiaires de la subvention.
Sont également éligibles à cette dotation, les EPCI à fiscalité propre :
- dont la population n’excède pas 75 000 habitants en métropole et 150 000 dans les départements d’outre-mer ;
- qui présentent un territoire d’un seul tenant et sans enclave ;
- dont les communes membres ont des populations inférieures à 20 000 habitants en métropole et 85 000 habitants en outre-mer ;
- dont la densité de population est supérieure ou égale à 150 habitants au kilomètre carré.
À titre dérogatoire, sont éligibles les EPCI éligibles en 2010 à la dotation globale d’équipement (DGE) des communes ou à la dotation de développement rural (DDR), les syndicats mixtes de moins de 60 000 habitants composés d’EPCI et de communes, les syndicats de communes de moins de 60 000 habitants.
La dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) est versée aux communes et EPCI en métropole ainsi qu’aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’aux pôles d’équilibre territoriaux et ruraux (PETR) pour financer des projets d’investissement éligibles selon six grandes priorités thématiques (article L. 2334-42 du CGCT) :
– la rénovation thermique, la transition énergétique, le développement des énergies renouvelables,
– la mise aux normes et la sécurisation des équipements publics,
– le développement d’infrastructures en faveur de la mobilité ou en faveur de la construction de logements,
– le développement du numérique et de la téléphonie mobile,
– la création, la transformation et la rénovation des bâtiments scolaires,
– la réalisation d’hébergements et d’équipements publics rendus nécessaires par l’accroissement du nombre d’habitants.
La DSIL peut aussi financer des opérations visant au développement des territoires ruraux inscrit dans un contrat signé entre le préfet et le président de l’EPCI ou du PETR. Ces opérations peuvent concerner des actions destinées à favoriser l’accessibilité des services et des soins, à développer l’attractivité, à stimuler l'activité des bourgs-centres, à développer le numérique et la téléphonie mobile et à renforcer la mobilité, la transition écologique et la cohésion sociale.
Cette DSIL classique a été complétée par une DSIL exceptionnelle, créée par la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020, qui priorise trois orientations : la transition écologique, la résilience sanitaire et la rénovation du patrimoine.
La DSIL est attribuée par le préfet de région. Le préfet du département présente chaque année à la commission départementale d’élus consultée pour l’attribution de la DETR les orientations que le préfet de région prévoit de mettre en œuvre concernant la DSIL. Cette commission d’élus n’est pas consultée pour la détermination de ces orientations.
Comme c’est le cas pour la DETR, le préfet peut ajouter des critères locaux de sélection des projets.
Au moins 80 % des subventions attribuées par le préfet de région doivent être notifiées au cours du premier semestre de l’année. Il communique la liste des projets subventionnés dans le mois à compter de sa décision à la commission départementale d’élus et aux membres du Parlement élus dans le département. Un rapport faisant le bilan de la dotation pour chaque exercice leur est également transmis. La liste des opérations, le montant des projets et le montant des subventions attribuées sont publiés en ligne avant le 31 juillet de l’année en cours.
L’effet de levier attendu est d’un pour quatre et demi.
La DPV soutient financièrement les communes les plus exposées aux difficultés en matière urbaine.
Les subventions sont accordées dans le cadre du contrat de ville signé entre les communes bénéficiaires ou l’EPCI et le préfet du département. Les actions financées sont donc prévues par ces contrats.
Au moins 80 % des subventions attribuées par le préfet de département doivent être notifiées au cours du premier semestre de l’année et la liste des opérations, le montant des projets, et le montant de la subvention attribuée sont publiés en ligne avant le 31 juillet de l’année en cours.
L’effet de levier attendu est d’un pour trois.
Les critères d’attribution de la DPV
Sont éligibles à la DPV les communes qui remplissent les trois conditions suivantes :
- avoir été éligible à la dotation de solidarité urbaine (DSU) au moins une fois au cours des trois derniers exercices et, pour les communes de plus de 10 000 habitants, avoir fait partie des 250 premières communes éligibles de cette strate démographique au cours des trois derniers exercices ;
- présenter une proportion de population située soit en quartier prioritaire de la politique de la ville soit en zone franche urbaine égale ou supérieure à 19 % de la population INSEE de la commune au 1er janvier 2016 ;
- faire partie du périmètre d’intervention de l’agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) au titre du programme national de rénovation urbaine ou du nouveau programme de renouvellement urbain.
Les communes des départements d’outre-mer et des collectivités territoriales de Martinique et de Guyane doivent réunir deux critères pour être éligibles à la DPV :
- avoir une population DGF supérieure ou égale à 5 000 habitants,
- et faire l’objet d’au moins une convention pluriannuelle avec l’ANRU.
Sont également éligibles les communes des départements d’outre-mer et des collectivités territoriales de Martinique et de Guyane citées dans la liste des quartiers qui présentent les dysfonctionnements urbains les plus importants.
Créé en 2023, le fonds d’accélération de la transition écologique des territoires, dit « fonds vert » a pour objectif d’aider les collectivités territoriales à accélérer leur transition écologique.
Doté d’un montant de 2 milliards d’euros en 2023, le fonds vert a rencontré un vif succès, avec près de 18 000 dossiers déposés, totalisant 5,3 milliards d'euros d’aides demandées, et plus de 10 000 dossiers acceptés en 2023.
Les crédits du fonds vert sont délégués aux préfets de région puis répartis par eux en fonction des besoins propres de chaque territoire. Cette gestion associe tous les services déconcentrés de l’État au sein des préfectures, avec l’appui des agences de l’eau et de l’Ademe. Une véritable aide à l’ingénierie est donc proposée aux projets qui bénéficient du fonds vert, ce qui n’est pas le cas dans le cadre des subventions DSIL et DETR.
L’effet de levier attendu est fixé à hauteur d’un pour quatre. Ainsi, il est recommandé aux préfets de ne pas permettre le cumul entre le fonds vert et les autres subventions d’investissement de l’État. En 2023, les projets bénéficiaires du Fonds vert ont représenté un investissement de plus de 14 milliards d’euros.
Le fonds vert s’organise autour de trois axes :
– la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux ;
– l’adaptation des territoires au changement climatique ;
– l’amélioration du cadre de vie avec des projets de sobriété en matière de mobilité, de foncier ou de déploiement des zones à faibles émissions.
Les projets de rénovation énergétique des bâtiments locaux et de rénovation des parcs de luminaires d’éclairage public ont représenté la grande majorité des projets financés en 2023 (5 850 projets).
En 2024, si 2,5 milliards d’euros ont été inscrits en loi de finances initiales, la situation des finances publiques a conduit à une annulation de 500 millions d’euros des crédits alloués au fonds vert, qui a donc vu sa dotation se stabiliser à 2 milliards d’euros.
La priorité a été donnée à la rénovation énergétique des établissements scolaires (enveloppe de 500 millions d’euros au niveau national), aux projets situés dans les quartiers de la politique de la ville (objectif de financement de 15 % en faveur des projets situés dans ces quartiers) et à la mobilité durable dans les zones rurales (objectif de financement national de 30 millions d’euros). En revanche, compte tenu du dépassement de l’objectif cible de 10 % de renouvellement du parc d’éclairage public, les collectivités ont été invitées à recourir à d’autres modes de financements pour ces projets ([3]).
2. Un manque de prévisibilité des dotations d’investissement pointé par les élus locaux
Tous les élus locaux rencontrés par votre rapporteure ont regretté le manque de prévisibilité et de lisibilité des dotations d’investissement allouées aux communes.
La logique d’une subvention accordée sur la base d’appels à projets induit obligatoirement une sélection sur critères spécifiques, qui peuvent varier en fonction des priorités territoriales, à partir de dossiers déposés par les communes. Par exemple, les services de la préfecture et de la sous-préfecture du Rhône rencontrés par votre rapporteure ont indiqué se fonder sur une grille d’analyse qualitative des projets en tenant compte à la fois de la baisse des émissions de gaz à effet de serre engendrée par le projet, l’enjeu pour le territoire, l’obtention de subventions les années précédentes et le fait d’avoir soldé les projets antérieurs. La constitution de ces dossiers peut se révéler complexe pour les plus petites communes dont les moyens humains sont limités.
Par ailleurs, la pluralité des subventions accordées nécessite une connaissance pointue des différents critères afin de demander la subvention adéquate en fonction de la nature du projet. Les dossiers déposés pour une subvention inadéquate peuvent être réorientés par les services des préfectures mais cela implique qu’ils soient déposés suffisamment en amont pour que l’accompagnement soit pleinement effectif.
Ainsi, les services de la préfecture et de la sous-préfecture du Rhône ont indiqué effectuer cette orientation des dossiers vers la dotation la plus adaptée. Ils ont cependant regretté que la majorité des dossiers soit déposée tardivement par les communes, dans les derniers jours prévus avant la date butoir prévue par les services (généralement autour de la mi-janvier) pour les attributions de DETR et de DSIL, ce qui conduit à une instruction directe des dossiers sans passer par une phase d’accompagnement et d’échanges pour s’assurer de la complétude du dossier.
Ce manque d’accompagnement dans des délais contraints et la procédure d’instruction qui a lieu au cours du premier semestre expliquent que les élus locaux déplorent de ne pas toujours connaître le montant des subventions accordées lorsque les travaux démarrent, ce qui peut avoir des conséquences sur leur plan de financement. Cette imprévisibilité est renforcée lorsque les cofinancements sont nombreux puisque chaque co-financeur a son calendrier et ses critères prioritaires.
Il est toutefois important de souligner que l’ampleur du projet peut impliquer des dépassements et des financements complémentaires, pas toujours anticipés au moment du dépôt du projet initial. Il conviendrait donc d’engager une réflexion sur la nécessité de séquencer le financement des plus gros projets (voir infra).
La qualité des relations entre les services de la préfecture, le préfet et les élus locaux est particulièrement importante pour renforcer la prévisibilité des dotations.
En 2024, les contraintes financières ont conduit le Gouvernement à procéder à des annulations de crédits et au relèvement de la réserve de précaution (+1,65 point) qui a été portée à 7,15 % des crédits ouverts, qui ont eu des conséquences sur le niveau des crédits disponibles pour les différentes dotations aux communes :
– 500 millions d’euros ont été annulés sur le fonds vert ([4]) ;
– un surgel de crédits a été appliqué sur la DETR (+ 15 millions d’euros en CP), la DPV (+ 2 millions d’euros en CP) et la DSIL/DSIL exceptionnelle (+ 23 millions d’euros en AE et + 10 millions d’euros en CP).
Ces annulations et surgels ont conduit les préfectures à recalibrer en cours d’année les dotations allouées. Cette incertitude sur les montants alloués renforce les inquiétudes des acteurs locaux et l’impression d’opacité concernant ces dotations.
Dans le contexte d’économies engagées par le Gouvernement en raison de la situation de nos finances publiques, le fonds vert fera l’objet, en 2025, d’une diminution de son enveloppe, ramenée à 1 milliard d’euros, tandis que l’effort est maintenu sur les autres dotations d’investissement.
Cette diminution de l’enveloppe du fonds vert, après sa forte montée en puissance en 2023 et 2024, aura un impact significatif sur le financement des projets d’accélération de la transition écologique. La constitution des projets nécessitant du temps, la mobilisation des communes est progressive et certains projets ne pourront finalement pas être financés. Votre rapporteure regrette la diminution de cette enveloppe alors que les collectivités territoriales s’engagent massivement dans la transition écologique.
Enfin, les difficultés financières des autres collectivités territoriales, notamment des départements, peuvent avoir des conséquences importantes sur le financement des projets des communes. En effet, la viabilité d’un projet dépend de l’ensemble de ses cofinancements et la diminution des subventions apportées par un acteur a des conséquences sur l’ensemble du projet, l’État ne s’engageant que si le projet a des chances d’aboutir.
B. La mise en place d’un cadre pluriannuel renforcÉ pour amÉliorer la visibilitÉ des dotations aux communes
1. La poursuite de l’effort d’investissement des collectivités territoriales dans la transition écologique est indispensable
La contribution à l’effort de redressement des comptes publics des collectivités territoriales doit être le plus juste et le plus équitable possible, pour ne pas pénaliser de façon trop forte les investissements indispensables dans la transition écologique.
Le contexte actuel est particulièrement favorable à l’investissement des collectivités compte tenu du cycle électoral (dix-huit mois avant les prochaines élections municipales).
Si les collectivités territoriales semblent avoir investi massivement depuis 2020 (+ 24 à 28 milliards d’euros sur la période 2020-2025 par rapport au cycle précédent 2014-2019 soit 4 à 5 milliards d’euros supplémentaires par an), cette hausse est essentiellement due à des opérations exceptionnelles réalisées par les organismes divers d’administration locale tandis que les investissements des collectivités restent légèrement inférieurs aux réalisations des mandats de 2001 et de 2008, à durée, prix et population comparables ([5]).
Les collectivités investissent cependant de plus en plus dans la transition écologique – elles y ont consacré 8,3 milliards d’euros en 2022 contre 6 milliards en 2017. Les besoins d’investissement dans le climat sont cependant estimés à 19 milliards d’euros au minimum par an et en moyenne sur la période 2024-2030 par I4CE et à 14,8 milliards d’euros par l’Inspection générale des finances (IGF) ([6]).
La question se pose alors de mettre en place un cadre prévisible et sécurisant pour encourager les collectivités à réaliser les investissements nécessaires pour la transition écologique. Ce cadre doit s’accompagner d’un soutien massif de l’État.
2. Le cadre pluriannuel instauré en 2024 doit être évalué et complété
Une prévisibilité accrue est synonyme de plus d’efficacité et d’un effet de levier optimal des subventions. Elle permet de réduire l’effet d’opportunité et est un facteur incitatif à l’investissement dans la transition écologique.
Selon les élus locaux et les services de l’État rencontrés par votre rapporteure, cette prévisibilité accrue passe d’abord par un cadre pluriannuel renforcé pour que les collectivités puissent anticiper sur plusieurs années le soutien de l’État et ainsi, programmer leurs investissements dans la durée.
Une instruction relative à la programmation pluriannuelle des dotations de soutien à l’investissement des collectivités (DETR, DSIL, DSID) en date du 31 mai 2024 a posé les bases d’un cadre pluriannuel renforcé ([7]). Ainsi, elle prévoit que les préfets puissent organiser un soutien triennal des projets d’investissement susceptibles de leur être présentés par les collectivités en 2025 et 2026, notamment lorsqu’il s’agit de financer un même projet en plusieurs tranches. La programmation doit s’effectuer pour 2025 à hauteur de 50 % des crédits notifiés en 2024 et, pour 2026, à hauteur de 25 % de ces crédits. La programmation étant glissante, les préfets peuvent chaque année ajuster la programmation pluriannuelle dans la limite de ces plafonds.
Il est trop tôt pour tirer le bilan de ce cadre pluriannuel mais votre rapporteure souhaite qu’une attention particulière soit apportée à l’application de cette instruction par les préfets.
Cette pluriannualité ne peut avoir d’effets bénéfiques que si le lien de confiance entre les collectivités territoriales et l’État est fort et si l’État s’engage à maintenir le niveau global des dotations de façon pluriannuelle. Si la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques ([8]) a prévu que les documents budgétaires annexés au PLF comprennent une présentation des crédits alloués à titre prévisionnel, à chaque programme, pour les deux années suivant l’année considérée, cette programmation pluriannuelle budgétaire n’a évidemment pas d’effet contraignant.
Votre rapporteure considère qu’il est nécessaire de renforcer ces outils de programmation pluriannuelle pour améliorer la prévisibilité des dotations et s’assurer d’un cycle d’investissements pérenne des collectivités territoriales. Elle souhaite donc engager une réflexion sur la mise en place d’une loi de programmation de soutien aux territoires qui permettrait à l’État de s’engager clairement sur une trajectoire pluriannuelle de dotations aux collectivités.
Le développement de la pluriannualité implique un changement de fonctionnement pour les communes qui devront séquencer leurs projets en plusieurs tranches. Cette pratique est aujourd’hui très peu utilisée, ce qui pose des difficultés pour les plus gros projets, les élus locaux devant parfois chercher des financements complémentaires quand le projet initial n’a pas été bien dimensionné.
De plus, votre rapporteure considère que cette programmation pluriannuelle doit être réalisée dans un cadre contractuel renforcé et simplifié.
D’après les chiffres transmis par la DGCL, en 2023, plus du tiers des projets subventionnés au titre des dotations d’investissement en 2023 (soit 8 348 projets), représentant 50 % des crédits attribués (soit 945 millions d’euros), l’ont été dans un cadre contractuel (contrats de réussite de la transition écologique (CRTE), « Petites villes de demain », « Action cœur de ville », contrats de ruralité, etc.) et cette proportion augmente depuis 2021. Les contrats et partenariats entre l’État et les collectivités territoriales constituent en effet aujourd’hui un instrument majeur de l’action publique territoriale.
La question se pose des modalités de cette contractualisation renforcée : faut-il passer par l’intercommunalité – mais les auditions menées par votre rapporteure ont montré une certaine frilosité des maires – ou favoriser une contractualisation directe entre l’État et les communes ?
Une réflexion est également engagée sur la revitalisation des contrats de réussite de la transition écologique (CRTE), signés à l’échelon intercommunal et qui regroupent l’ensemble des programmes partenariaux de l’État. Ces CRTE pourraient servir d’appui à ce lien renouvelé entre l’État et les communes s’ils devenaient un véritable outil prospectif. La ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation de France, Catherine Vautrin, a fait part, lors de son audition par la commission des lois le 15 octobre 2024, de sa volonté de réaliser un bilan d’étape de ces contrats.
3. Les efforts de simplification initiés doivent être fortement accentués
Des efforts de simplification et de transparence ont été réalisés ces dernières années. On peut citer les exemples suivants :
– la programmation en préfecture a été avancée pour que les crédits puissent être engagés dès le mois de juin ;
– depuis 2021, la transmission des dossiers de demande de subvention au titre de la DETR ou de la DSIL se fait par voie dématérialisée par le biais de la plateforme unique « démarches simplifiées » ;
– dans le département du Rhône, un travail de recensement des différentes subventions reçues par les collectivités commence à être effectué et diffusé sur une plateforme.
*
Votre rapporteure considère qu’il est possible d’aller beaucoup plus loin dans la simplification des procédures. Elle a pris bonne note de la volonté de la ministre d’engager une réflexion sur la mutualisation des différentes enveloppes de subventions en mettant en place une fongibilité partielle des crédits et une doctrine d’emploi plus simple. Cette piste lui semble intéressante à creuser, et doit s’accompagner d’une réflexion de fond sur l’objectif porté par les différentes dotations et le nécessaire équilibre à trouver entre le saupoudrage des crédits pour financer une multitude de projets d’ambition mesurée et le financement de grands projets structurants. Il sera indispensable dans ce cadre de s’interroger sur la pertinence du fléchage des subventions en fonction des priorités thématiques fixées au niveau national et sur le rôle des élus locaux dans les procédures d’attribution des subventions.
Annexe 1 : Récapitulatif des crédits de la mission
|
AE (en euros) |
CP (en euros) |
Programme 119 - Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
3 799 207 080 |
3 746 208 204 |
01 – Soutien aux projets des communes et groupements de communes |
1 970 250 000 |
1 846 980 871 |
DETR (Dotation d’équipement des territoires ruraux) |
1 046 000 000 |
9 242 000 000 |
DPV (Dotation d’équipement des territoires ruraux) |
150 000 000 |
130 100 000 |
DSIL (Dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements) |
570 000 000 |
531 700 000 |
DTS (Dotation forfaitaire titres sécurisés) |
100 000 000 |
100 000 000 |
IRPM (Dotation « régisseurs de police municipale ») |
250 000 |
250 000 |
Dotation communale d’insularité |
4 000 000 |
4 000 000 |
Dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales |
100 000 000 |
100 000 000 |
Plan Marseille en grand |
|
56 800 000 |
02 – Dotation générale de décentralisation des communes |
140 895 251 |
140 895 251 |
03 – Soutien aux projets des départements et des régions |
211 855 969 |
167 708 548 |
04 – Dotation générale de décentralisation des départements |
265 401 963 |
265 401 963 |
05 – Dotation générale de décentralisation des régions |
938 335 116 |
938 335 116 |
DCT (dotation de continuité territoriale - pour la Corse) |
187 000 000 |
187 000 000 |
DGD IDF mobilités |
128 100 000 |
128 100 000 |
DGD Régions |
623 200 000 |
623 200 000 |
06 – Dotation générale de décentralisation concours particuliers |
272 468 781 |
272 468 781 |
DGD ACOTU |
87 900 000 |
87 900 000 |
DGD ports maritimes |
53 500 000 |
53 500 000 |
DGD Aérodromes |
4 400 000 |
4 400 000 |
DGD Bibliothèques |
94 900 000 |
94 900 000 |
DGD domaine public fluvial |
2 900 000 |
2 900 000 |
Compensation pertes de ressources fiscales |
19 200 000 |
19 200 000 |
Compensation taxe gestion des milieux aquatiques & inondation |
9 700 000 |
9 700 000 |
08 – Concours exceptionnels pour l'achat de masques |
0 |
0 |
09 – Dotation de soutien à l'investissement local exceptionnelle |
|
114 417 674 |
Programme 122 - Concours spécifiques et administration |
212 225 935 |
314 420 098 |
01 – Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales |
50 300 000 |
152 088 913 |
Subventions exceptionnelles aux communes en difficulté |
9 000 000 |
9 000 000 |
Aides aux communes forestières victimes de scolytes |
1 000 000 |
1 000 000 |
Subventions réparation des dégâts causés par les calamités publiques |
40 000 000 |
30 000 000 |
Subventions pour travaux divers d’intérêt local |
0 |
0 |
Aides aux communes concernées par les restructurations Défense |
300 000 |
300 000 |
Fonds de reconstruction – tempête Alex |
0 |
0 |
Fonds exceptionnel d’accompagnement – tempête Ciaran |
0 |
48 000 000 |
02 – Administration des relations avec les collectivités territoriales |
10 739 174 |
11 144 424 |
Dépenses de fonctionnement |
600 751 |
599 751 |
Dépenses d’investissement |
10 138 423 |
10 544 673 |
04 – Dotations Outre-Mer |
151 186 761 |
151 186 761 |
DGF Nouvelle-Calédonie |
82 747 941 |
82 747 941 |
DG compensation Nouvelle-Calédonie services et étabts publics transférés |
61 404 692 |
61 404 692 |
DG compensation Polynésie services et étabts publics transférés |
2 312 808 |
2 312 808 |
DG compensation Saint-Martin services et étabts publics transférés |
4 721 320 |
4 721 320 |
06 – Soutien à l’entretien du réseau routier local |
0 |
0 |
Acronyme |
Libellé |
Place mission |
Commentaire |
AE |
Autorisations d’engagement |
|
|
CP |
Crédits de paiement |
|
|
DETR |
Dotation d’équipement des territoires ruraux |
119-1 |
Dépenses d’équipement des communes et groupements de communes situés essentiellement en milieu rural, selon des priorités déterminées au niveau local par des commissions d’élus. |
DCT |
Dotation de continuité territoriale |
119-5 |
Part de la DGD Régions attribuée à la Corse |
DGD |
Dotation générale de décentralisation des communes, des départements et des régions |
119-2, 119-4, 119-5 |
Compense les charges transférées aux collectivités territoriales |
DGD Concours particuliers |
Dotation générale de décentralisation concours particuliers |
119-6 |
Finance des transferts spécifiques : ports maritimes aux départements, aérodromes aux CT, voies d'eau aux communes, compensation de pertes de ressources fiscales ou des actions incitatives (bibliothèques) |
DPV |
Dotation politique de la ville |
119-1 |
Finance des projets, essentiellement d’investissement, portés les communes éligibles au bénéfice des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville |
DSID |
Dotation de soutien à l’investissement des départements |
119-3 |
Finance des appels à projets, par le préfet de région, sur investissements structurants |
DSIL |
Dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements |
119-1 |
Finance des projets d’investissement portés par les collectivités et structurants au plan local. Priorités fixées par la Loi. |
DTS |
Dotation forfaitaire titres sécurisés |
119-1 |
Accompagne les communes qui ont sollicité l’installation des demandes de passeports et de CNI |
IRPM |
Dotation « régisseurs de police municipale » |
119-1 |
Permet de verser une indemnité de responsabilité aux régisseurs des polices municipales (régie de recettes pour percevoir le produit de certaines contraventions) |
Lors de sa réunion du mardi 15 octobre à 16 heures 30, la Commission auditionne Mme Catherine Vautrin, ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, sur la politique du gouvernement en matière de décentralisation et sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis).
Lien vidéo : https://assnat.fr/125AKh
M. le président Florent Boudié. Nous commençons notre marathon budgétaire par l’audition de Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, sur les crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales (RCT).
Cette première audition depuis votre nomination aura également pour objet de nous présenter les grandes lignes de la politique du nouveau gouvernement en matière de décentralisation.
Outre les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, qui sont particulièrement scrutées cette année, les sujets d’actualité ne manquent pas, comme la mise en œuvre du rapport Woerth ou les projets d’autonomie de la Corse.
J’aurai, pour ma part, une question sur l’effort demandé aux collectivités territoriales. J’ai participé hier à la séance plénière du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et ce sujet a été très largement commenté, notamment par son président Alain Rousset, dans des termes vifs qui reflètent les réactions générales des élus locaux. Peut-être pourrez-vous apporter des précisions très attendues par la représentation nationale sur la répartition de cet effort de 5 milliards d’euros.
Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation. Cette première audition est en effet pour moi l’occasion de vous présenter les principales mesures du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 qui concernent les collectivités territoriales et d’échanger avec vous.
Je souligne les conditions très particulières dans lesquelles ce PLF a été élaboré, tant au regard du calendrier que du contexte budgétaire, qui nécessite un sursaut collectif des différents responsables de l’action publique.
Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a placé au premier rang des priorités du Gouvernement la réduction de la dette financière et de la dette écologique. Il a rappelé que le niveau de la dette publique atteint 3 228 milliards et que la charge d’intérêts s’élève à 55 milliards. Si nous n’y prenons pas garde, cela pourrait porter atteinte à la souveraineté du pays et à sa capacité d’agir. La charge de la dette est désormais le deuxième poste de dépenses de l’État. Tous les gouvernements successifs depuis 1976 ont participé à la formation de cette dette, qui s’explique principalement par un niveau de dépenses publiques très élevé. Il représente 57 % de notre richesse nationale, contre 49 % en moyenne en Europe – une différence que le niveau de services n’explique pas avec certitude.
Je n’oppose pas le budget de l’État à celui des collectivités territoriales – je suis encore élue locale et je sais combien les élus locaux sont engagés dans les questions budgétaires de leur territoire. La situation nécessite incontestablement un effort exceptionnel, un sursaut qui ne peut être que collectif. Or, en matière d’impôts et de taxes, le contribuable et le citoyen ne font qu’un.
Les collectivités territoriales ne sont pas responsables de l’aggravation du déficit public. Elles assurent 60 % de l’investissement public et leur dette représente 8 % de la dette publique. Certes, leurs dépenses ont augmenté rapidement, mais le second fascicule du rapport annuel de la Cour des comptes sur les finances publiques locales, paru il y a deux semaines, montre que l’une des raisons de l’accroissement de la dette des collectivités territoriales est à rechercher dans les injonctions de l’État – notamment, 3 milliards au titre de l’augmentation du point d’indice et 800 millions du fait correspondant à la prime de pouvoir d’achat des agents de catégorie C. Ces mesures, extrêmement importantes pour les agents, ont eu des conséquences tout aussi importantes sur les comptes des collectivités.
Le mot « partenariat » qui figure dans le titre du ministère que j’ai l’honneur de diriger introduit une notion relativement nouvelle dont j’espère qu’elle sera plus qu’un concept de marketing gravé sur une plaque. Je compte bien l’adopter comme méthode de travail, même si l’exercice n’est pas aisé dans le contexte que nous connaissons.
La méthode que je souhaite mettre en place s’énonce en quatre mots : écoute, dialogue, suivi et contractualisation.
Tout en respectant les compétences des collectivités, nous avons vocation à étudier les possibilités de les renforcer. Quarante ans après les grandes lois de décentralisation, il faut bâtir un nouveau contrat de responsabilité entre les collectivités et l’État. C’est bien l’un des éléments de ma feuille de route. Il faut tirer les leçons de ce qui a pu être fait, et notamment de l’expérimentation de simplification et de déconcentration conduite lors des Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Tout le monde a relevé le succès de leur organisation ; les simplifications qui y ont contribué doivent être envisagées comme faisant partie de l’héritage de ces jeux.
Je ne suis pas la première ici à dire qu’il faut simplifier la vie des élus. Comment faire en pratique ? En identifiant tous les projets locaux dont la réalisation est empêchée par la complexité de la réglementation. Les remontées de terrain et propositions de simplifications sont importantes et nous devrons travailler avec le Parlement pour lever certains obstacles.
Des travaux ont été conduits entre la fin de 2023 et le début de 2024, et je citerai en premier lieu le rapport de Boris Ravignon sur le coût du millefeuille administratif. Appréhender la norme par son coût plutôt que par l’hypothétique amélioration qu’elle pourrait apporter me semble une voie de progrès. C’est la raison pour laquelle j’ai chargé Boris Ravignon de la mission de déterminer comment appliquer une partie de ses recommandations.
Nous devons également prendre en compte la spécificité des territoires : les solutions ne peuvent pas être identiques pour la métropole, l’outre-mer, les territoires de montagne ou insulaires.
Je souhaite évidemment reprendre le dialogue avec les élus corses pour parvenir à un consensus républicain et présenter un projet de loi constitutionnelle qui réponde au mieux aux nombreux problèmes auxquels l’île est confrontée.
Nous devons également travailler en concertation sur des sujets tels que l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) ou les zones à faibles émissions (ZFE), ainsi que sur les transferts de compétences. Les transports, la sécurité, le logement et la santé sont au cœur des préoccupations quotidiennes des Français. Le territoire au sens du bassin de vie vécu est la bonne échelle pour mener ces travaux – j’insiste sur cette notion, qui ne correspond pas forcément à la définition du bassin de vie par l’Insee mais qui est une réalité pour nos concitoyens. Penser l’action publique à ce niveau, c’est se mettre à hauteur de leur quotidien, ce qui doit conduire à examiner le rôle des préfets et, surtout, des sous-préfets dans leur mission de proximité et de mutualisation. Il faut probablement mener une réflexion sur la manière dont est organisée actuellement l’action publique.
En cette période budgétaire très complexe, nous devons trouver des solutions sur le plan tant national que territorial, ce qui m’amène à la contribution qui est demandée aux collectivités territoriales dans le PLF – dont la version initiale a évidemment vocation à évoluer au gré des travaux parlementaires. Il est proposé d’instaurer un fonds de réserve dit de résilience des finances locales en cas de dépassement par ces collectivités dans leur ensemble de l’objectif de déficit fixé par la loi de finances de 2024 et au regard des comptes réellement exécutés. J’insiste sur ce dernier point : il n’est plus question de se fonder, comme cela était envisagé il y a un mois, sur les projections arrêtées au mois de juillet. Le prélèvement sur les recettes des collectivités concernerait, à ce stade, celles dont les dépenses réelles de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros, dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement.
Cela permettrait d’alimenter trois mécanismes de péréquation : le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic), le fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et le fonds de solidarité régional. Le produit du prélèvement sera affecté à un fonds de réserve en 2025, lequel permettra en 2026 d’alimenter les fonds de péréquation précités. L’utilisation des sommes sera alors faite sur proposition du Comité des finances locales (CFL). Les collectivités les plus fragiles – celles qui sont bénéficiaires de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) ou du Fpic – ne sont pas concernées par ce prélèvement.
Quatre autres mesures concernant les collectivités territoriales figurent dans le PLF.
La première prévoit d’abaisser, dès le 1er janvier 2025, de 16,404 % à 14,850 % le taux de compensation forfaitaire pour les dépenses éligibles au fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), ce fonds devant également rester un instrument de soutien à l’investissement – nous y sommes tous très attachés.
Il est ainsi proposé de supprimer les exceptions qui rendent éligibles au FCTVA des dépenses de fonctionnement comme celles de l’entretien des réseaux et de l’informatique en nuage, par exemple.
La part de la TVA affectée aux collectivités sera stabilisée et elle atteindra de nouveau 5,2 milliards d’euros.
Le PLF prévoit une baisse des variables d’ajustement à hauteur de 487 millions d’euros après plusieurs années de grande modération, ce qui permettra de retrouver un niveau comparable à celui de 2017.
Encore une fois, il s’agit d’une première version du PLF.
J’en viens aux moyens des collectivités au titre des prélèvements sur recettes. Les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales s’élèvent à 53,5 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). L’année 2025 sera marquée par l’arrêt du dispositif de filet de sécurité mis en place en 2023 pour soutenir les collectivités face à la croissance du prix de l’énergie, ce dernier étant désormais relativement stable.
La dotation globale de fonctionnement (DGF) sera stable et, en son sein, l’effort supplémentaire en faveur de la péréquation sera poursuivi avec une augmentation du même niveau qu’en 2024. La majoration de la DSU atteindra 140 millions et celle de la dotation de solidarité rurale (DSR) 150 millions. La DGF augmentera pour 60 % des collectivités en 2025. La dotation d’intercommunalité la péréquation verticale des départements augmenteront chacune. La dotation pour les titres sécurisés (DTS) et la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales (DSCAR) resteront chacune fixées à 100 millions.
En ce qui concerne les interventions territoriales de l’État en 2025, les crédits des dotations de soutien à l’investissement local sont reconduits à 2 milliards en autorisations d’engagement (AE). Leur trajectoire de verdissement est rehaussée, tout en conservant leur vocation généraliste. La démarche de simplification et de dématérialisation sera poursuivie.
Depuis 2023, le soutien de l’État aux projets d’investissement des collectivités est principalement assuré par deux programmes budgétaires, qui me sont rattachés.
Le programme 119 Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements représente un montant total de 2 milliards, reconduit dans le PLF. Ce programme comprend la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) – 1,046 milliard –, la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) – 570 millions –, la dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) – 200 millions – et la dotation politique de la ville (DPV) – 150 millions. Le programme 119 retrace des dotations de décentralisation qui compensent des charges supportées par les collectivités à la suite d’un transfert, d’une création ou d’une extension de compétences.
En 2023, la consommation des crédits du programme 380 Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires s’est élevée à 1,8 milliard. Le PLF pour 2025 prévoit de ramener ses crédits à 1 milliard d’euros ; il s’agit clairement de participer à la maîtrise des dépenses de l’État. Le recentrage du fonds Vert permettra de rationaliser certains dispositifs, dont les gestionnaires délégués sont les préfets.
Je souhaite que les dotations de soutien à l’investissement local fassent l’objet d’un travail d’évaluation en vue de les rapprocher. En effet, on se rend compte que l’effort de verdissement a déjà été pris à bras-le-corps par les élus locaux, puisque 25 % des investissements de la DSIL et 15 % de ceux de la DETR contribuent aux objectifs de la transition écologique – ce qui montre que le fonds Vert n’est pas le seul outil utilisé pour les dépenses territoriales en faveur de cette transition. Aucune dépense publique ne peut désormais ignorer l’objectif d’accompagnement de la transition écologique – sachant que la dette écologique est la deuxième dette supportée par le pays.
À rebours de leur philosophie première, qui visait à donner à chaque dotation d’investissement un objectif ou un objet précisément déterminé, on constate une multiplication des financements croisés par les différents outils que sont la DSID, la DSIL, la DETR et le fonds Vert. Leur cloisonnement n’a plus vraiment de sens et je suis disposée à travailler pour élaborer une doctrine d’emploi plus simple. La notion de fongibilité partielle doit être évoquée. Il ne s’agit pas de diminuer les budgets par rapport au PLF mais bien d’avoir plus de souplesse à l’intérieur des différentes enveloppes. Un gestionnaire qui peut financer au meilleur coût certains projets d’investissement ne doit pas être sanctionné par la perte de crédits ainsi libérés mais, bien au contraire, pouvoir redéployer son effort ailleurs.
Le programme 122 Concours spécifiques et administration regroupe des aides spécifiques gérées par le ministère et attribuées aux collectivités territoriales, ainsi que les moyens dévolus à la direction générale des collectivités locales (DGCL) pour ses missions au profit des collectivités territoriales. Les crédits du programme sont reconduits sensiblement à l’identique, à l’exception d’une ouverture supplémentaire de 63 millions de CP pour financer les restes à payer du fonds destiné à la réparation des dégâts subis par les collectivités territoriales au cours des émeutes urbaines du 27 juin au 5 juillet 2023.
Telles sont les principales dispositions du PLF ainsi que les grands axes de mon action à la tête du ministère.
M. le président Florent Boudié. Je précise que l’examen des amendements et le vote sur les crédits de cette mission auront lieu le 30 octobre.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Tout d’abord, nous pouvons être rassurés par le maintien du niveau des crédits alloués à la mission Relations avec les collectivités territoriales en 2025, avec un montant d’environ 4 milliards d’euros en AE et en CP. Cela signifie que l’État sera au rendez-vous en ce qui concerne les principales dotations d’investissement allouées à ces collectivités, comme la DETR, la DSIL ou les différentes dotations générales de décentralisation.
En revanche, en raison de la situation complexe dans laquelle nous nous trouvons, le Gouvernement demande aux collectivités territoriales de faire un effort de 5 milliards en 2025.
Il est important de souligner que tous les acteurs contribueront cette année au travail de redressement des comptes publics. Ce qui importe, c’est que cette contribution soit la plus juste et la plus équitable possible.
Pour les collectivités territoriales, cette contribution passe notamment par un prélèvement de 3 milliards réparti sur 450 « grosses » collectivités en bonne situation financière, afin de financer un fonds de réserve dans une logique d’autoassurance. Si l’idée apparaît raisonnable, nous manquons à ce stade d’informations sur les modalités de redistribution de ces 3 milliards.
Ce financement aura-t-il un effet sur l’écrêtement de la DGF, puisque les collectivités qui contribuent le plus à celui-ci sont aussi celles qui financeront ce fonds ? Au bout du compte, ce mécanisme ne risque-t-il pas d’encourager la mauvaise gestion puisque seules les collectivités qui sont de « bonnes élèves » sont concernées ?
Enfin, de façon générale, avez-vous réalisé des études sur les conséquences de cette mesure sur l’investissement des collectivités, alors qu’elles s’engagent massivement dans la transition écologique ? Cette question est d’autant plus importante que les crédits alloués au fonds Vert – qui ne sont pas rattachés à la mission RCT mais qui financent les projets d’investissement des collectivités – vont être significativement diminués en 2025, passant de 2,5 milliards en loi de finances de 2024 à 1 milliard dans le PLF que vous présentez. Dans ces conditions, comment s’assurer que nous serons à la hauteur des enjeux en matière de transition écologique ?
J’en viens à la partie thématique de mon avis. J’ai choisi de me concentrer sur la lisibilité des dotations aux communes. J’ai donc auditionné les principales associations d’élus et la DGCL, et je me rendrai jeudi dans le Rhône, pour rencontrer notamment les services de l’État.
Le premier bilan de ces entretiens est sans appel : les élus font état de difficultés liées à l’impossibilité de connaître avant le lancement d’un projet – et parfois même lorsqu’il démarre – le montant de la subvention d’investissement qui sera finalement attribuée. Si ce problème semble avoir été encore plus important en 2024 du fait des annulations de crédits en cours d’année, il me semble possible d’agir pour améliorer la prévisibilité de ces dotations. Tout le monde serait gagnant : plus de prévisibilité permet d’avoir un véritable effet de levier et non un simple effet d’opportunité.
Cela passe par un renforcement de la pluriannualité des dotations, dans la continuité de ce que prévoit la circulaire du 31 mai 2024. Pouvez-vous faire le point sur l’application de celle-ci par les préfets ? Peut-on aller plus loin dans la prévisibilité des dotations pour les communes ? Cette pluriannualité doit-elle intervenir dans un cadre contractualisé renforcé ?
En tout état de cause, cette prévisibilité accrue doit nécessairement être associée à une simplification des normes, pour plus d’efficacité. Les élus locaux ont également fait part de leur souhait d’être mieux accompagnés par les préfectures lors de l’élaboration de leurs projets.
J’en termine par une réflexion plus personnelle. Je m’interroge sur l’effet de la suppression de la taxe d’habitation sur nos finances publiques, d’une part, et sur la rupture du lien qu’elle a causée entre le citoyen et la commune, d’autre part. Je vous sais sensible à ce sujet, madame la ministre. Une réflexion est-elle engagée par le Gouvernement s’agissant de la mise en place d’une contribution citoyenne locale, dont les modalités seraient différentes de celles de l’ancienne taxe d’habitation que nous avons supprimée car elle était injuste ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Le fonds de réserve sera bien alimenté par un prélèvement en 2025 et la redistribution interviendra en 2026 à travers trois fonds de péréquation : le Fpic, le fonds national de péréquation des DMTO perçus par les départements et le fonds de solidarité régional. Cette redistribution sera effectuée après avis du CFL. Il n’y a pas d’effet sur l’écrêtement de la DGF puisqu’il s’agit d’un mécanisme financier différent.
Vous avez relevé que les collectivités concernées par le prélèvement, dont le budget de fonctionnement est supérieur ou égal à 40 millions, sont potentiellement celles qui ont le moins de difficultés financières. Le travail à réaliser est difficile et l’objectif est aussi de tenir compte de la situation financière de l’ensemble des collectivités. Vous savez qu’un certain nombre de départements sont dans une situation extrêmement difficile qui ne permet pas le moindre prélèvement – d’où la notion de vigilance. Le mécanisme proposé a pour objet d’inciter à baisser les dépenses de fonctionnement et non à mal gérer.
La loi de finances de 2024 avait certes prévu 2,5 milliards de crédits pour le fonds Vert, mais le décret d’annulation du 21 février a ramené sa dotation à 1,75 milliard. La consommation des crédits est le véritable sujet, et elle s’est élevée à 1,8 milliard en 2023.
Trois semaines après avoir pris mes fonctions, je n’ai pas encore d’avis définitif sur la contractualisation et la pluriannualité des dotations, même si cela fait partie des points que je souhaite examiner. Dans sa feuille de route, le Premier ministre a insisté sur l’importance du suivi : l’heure n’est pas aux annonces mais à l’examen de ce qu’elles sont devenues.
En tant qu’élue locale, je fais partie de ceux qui pensent que la contractualisation pluriannuelle est un moyen d’avancer. Le contrat de relance et de transition écologique (CRTE) est un outil intéressant. Je souhaite examiner ceux qui ont été conclus dans chacune des régions, en identifiant les dix qui fonctionnent le mieux et les dix qui ne fonctionnent pas, afin d’analyser l’origine de telles différences. En d’autres termes, il s’agit de comprendre d’où viennent les blocages et non d’essayer de réinventer un nouvel outil.
En ce qui concerne la simplification des normes, le rapport de Boris Ravignon propose de mettre rapidement en place des mesures pratiques.
S’agissant de la rupture du lien entre le citoyen et la commune, même si je n’ai pas de mandat pour m’engager au nom du Gouvernement je considère, à titre personnel, qu’il conviendrait de redonner un pouvoir de taux aux collectivités. Je suis consciente que la pression fiscale dans notre pays est l’une des plus élevées et nous devons donc être extrêmement vigilants. Pour autant, nous ne pouvons pas éviter ce débat avec les collectivités. À dix-huit mois des élections municipales, le moment est probablement venu de réfléchir à une contribution, dont j’ignore la forme qu’elle pourrait prendre.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Yoann Gillet (RN). La situation est critique. Personne ne peut le nier et certainement pas le Rassemblement national, qui n’a eu de cesse, ces dernières années, de sonner l’alarme. La France vit au-dessus de ses moyens, mais c’est bien la gestion catastrophique de nos finances publiques par les gouvernements successifs qui l’a mise dans cette situation. Notre pays cumule ainsi des records d’impôts, de déficit et de dette.
Loin de la rupture attendue et du courage politique, le Gouvernement a présenté un budget injuste pour les retraités et les Français qui travaillent, mais aussi pour les collectivités territoriales auxquelles vous allez retirer pas moins de 5 milliards d’euros et dont vous baissez la DGF en euros courants.
Si la situation de ces collectivités ne cesse de se dégrader, c’est en raison de l’étranglement financier imposé par l’État, soit directement du fait de ses décisions, soit par ricochet de la politique menée à l’échelle nationale. Les mesures imposées par l’État sans aucune compensation sont ainsi à l’origine de 90 % de l’augmentation de la masse salariale des collectivités. Depuis deux ans, les recettes tirées des droits de mutation ont chuté, conséquence directe des erreurs stratégiques et de l’incompétence des gouvernements successifs.
On demande toujours plus aux élus locaux, avec de plus en plus de normes mais toujours moins de moyens. On estime le coût des nouvelles normes à plus de 2 milliards d’euros en 2022 et à plus de 1,2 milliard en 2023.
Les crédits destinés aux dotations de soutien à l’investissement des collectivités territoriales dans le cadre du PLF pour 2025 ne répondent pas aux besoins de nos territoires et de nos concitoyens. En euros courants, la DETR, la DPV et la DSIL sont en recul du fait de l’inflation. Cette situation est non seulement injuste pour les collectivités, qui ne sont à l’origine que de 8 % de la dette publique – soit 208 milliards d’euros sur un total de 3 200 milliards –, mais aussi pour les Français, et elle est dangereuse pour l’économie du pays. En effet, 70 % de l’investissement public sont réalisés par les collectivités. Elles sont bien gérées, dans l’ensemble, notamment les communes, et leur dette est globalement saine, pour une raison simple : elles n’empruntent que pour leurs investissements, quand l’État emprunte pour son fonctionnement.
Face à notre situation financière compliquée, le nouveau Gouvernement continue de faire s’envoler les dépenses publiques de l’État et taille là où il est facile de le faire, du côté des retraités, des Français qui travaillent et des collectivités. Il existe pourtant des réformes structurelles à réaliser avec des économies à la clef : l’immigration nous coûte de 30 à 50 milliards d’euros par an, la fraude fiscale et sociale plusieurs dizaines de milliards, et l’accumulation d’un nombre gigantesque de structures et agences gouvernementales, 20 milliards au bas mot. Vous pourriez pourtant agir concrètement dans le cadre de votre portefeuille si le Gouvernement auquel vous appartenez avait un minimum de vision d’avenir et de courage politique.
En 2015, le redécoupage de la carte des régions devait produire des économies. Le Rassemblement national avait prévenu qu’il n’en serait rien et, de fait, les dépenses n’ont fait qu’exploser. Le budget de ma région, l’Occitanie, s’élève ainsi à 3,55 milliards, soit plus d’un milliard de plus qu’avant la fusion des deux anciennes régions. En 2023, les dépenses des régions ont continué d’augmenter, de 4,9 %. Les charges externes étaient alors en hausse de 15 % et les charges financières de 52,9 %. Par ailleurs, le redécoupage des régions a éloigné les Français de leurs élus. Il faudrait donc avoir le courage de s’attaquer au millefeuille administratif – le rapport Ravignon a évalué le fardeau qui en résulte à 7,5 milliards d’euros. Il faut également aborder la question des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), qui gèrent des compétences autrefois confiées aux municipalités et dont les dépenses de fonctionnement et les effectifs ont connu une croissance importante.
Il faut agir ! Le Rassemblement national vous demande de prendre des mesures concrètes d’économies, reposant sur une vision d’avenir pour le moyen et le long terme.
Mme Laure Miller (EPR). Vous avez parlé de respect et d’humilité lors de la passation de pouvoirs : vous avez promis d’écouter chaque élu et de porter une attention toute particulière à la question des moyens d’action. Écouter et soutenir les élus locaux, c’est ce qui a été fait ces dernières années, en protégeant mieux l’exercice des mandats électifs, par un renforcement de l’accompagnement et de la fermeté à l’égard des auteurs de violences contre les élus, en accompagnant les collectivités dans la transition écologique grâce au fonds Vert, qui a été pérennisé alors qu’il ne devait durer qu’un an, et en faisant en sorte que l’État soit un facilitateur pour les projets des collectivités, comme c’est le cas dans le cadre du couple maire-préfet, qui fonctionne très bien. Nous avons aussi agi, plus récemment, en ce qui concerne les secrétaires de mairie, véritables chevilles ouvrières des communes, et il n’est pas inutile de rappeler que la DGF a augmenté en 2023, pour la première fois depuis treize ans, et qu’une nouvelle hausse a suivi en 2024.
Pour ce qui est du fonds de réserve, le sentiment des élus locaux est qu’on va chercher à faire des économies en se tournant vers les collectivités les plus vertueuses, alors qu’on laisse tranquilles celles qui n’ont pas pris leurs responsabilités. Vous avez répondu au sujet de l’avenir de ce fonds et vous avez rappelé que deux rapports très utiles, concernant la question fondamentale du lien de confiance entre l’État et les collectivités territoriales, ont été remis au Gouvernement au cours des derniers mois. Nous ressentons aisément dans nos relations avec les maires et les élus départementaux et régionaux à quel point la confiance est fragile : il existe un vrai besoin de décentralisation, au bénéfice des élus de terrain, et une incompréhension.
S’agissant du RSA, qui relève de la compétence des départements, l’État verse une compensation, mais celle-ci ne tient pas compte de l’évolution du nombre de bénéficiaires. Dans la Marne, 5 millions d’euros ne sont donc pas compensés cette année. Par ailleurs, si l’augmentation du Smic et la revalorisation du point d’indice sont de bonnes nouvelles, elles ne font pas nécessairement l’objet d’une compensation. Quant aux expérimentations, elles constituent une excellente méthode, mais elles finissent parfois par une généralisation à la charge des collectivités. Pour ce qui est des compensations, que pensez-vous de la proposition de notre collègue Éric Woerth de redonner du pouvoir de taux aux collectivités et de mieux partager l’impôt national et la gouvernance ?
Les élus locaux subissent au quotidien l’enchevêtrement des politiques publiques et des compétences de l’État et des collectivités. Les doublons nuisent à la clarté des politiques qui sont menées et à leur efficacité. Le rapport de Boris Ravignon nous offre cependant une lueur d’espoir, puisqu’il permet de chiffrer le coût de l’enchevêtrement, estimé à 7,5 milliards d’euros. Ce coût est en très grande partie à la charge des collectivités, pour 6 milliards, et ce sont les communes qui paient le plus lourd tribut, à hauteur de 4,8 milliards. Quelle méthode envisagez-vous de suivre pour réduire les coûts liés à l’enchevêtrement des compétences et à la surabondance des normes qui pèsent sur les collectivités ? Comment les parlementaires pourraient-ils être associés à la réforme nécessaire dans ce domaine ?
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Allons à l’essentiel : tout cumulé, 10 milliards d’euros seront ponctionnés sur les collectivités, que Bruno Le Maire rendait responsables du déficit public. Leurs budgets doivent pourtant être à l’équilibre : ce que disait Bruno Le Maire était tout à fait faux. La Cour des comptes évoque la suppression de 100 000 emplois, mais on ne sait ni où ni comment. Une réduction drastique des moyens consacrés aux collectivités territoriales aurait des conséquences sur les services publics et les politiques publiques, comme la protection de l’enfance et l’accueil public de la petite enfance. À force d’étrangler les collectivités, on a laissé la place au privé dans ce domaine, avec les conséquences que l’on sait. Par ailleurs, si les crédits du fonds Vert baissent de 60 %, il ne sera même plus question d’isoler les bâtiments publics de façon correcte et écologique. Quelle hypocrisie !
Deux principes constitutionnels et républicains sont bafoués : la libre administration des collectivités et leur autonomie financière. La libre administration des collectivités est un principe démocratique : les élus doivent pouvoir respecter leurs engagements, mettre en œuvre le programme sur lequel ils ont été élus. L’impuissance dans laquelle vous les enfermez explique une partie des tensions dont ils sont victimes, et la surenchère pénale ne réglera absolument rien. L’autonomie financière des collectivités territoriales est aujourd’hui quasi inexistante, en particulier pour les communes. L’expression « redonner du pouvoir de taux » aux collectivités est peut-être pudique ou bien emballée, mais chacun a compris qu’elle voulait dire : « débrouillez-vous, nous allons vous donner l’autorisation de recréer un impôt ». Les collectivités, particulièrement les communes, n’ont plus de levier fiscal. Il ne leur reste plus que la part locale de la taxe foncière, ce qui explique son augmentation massive, alors que cet impôt est spécialement injuste.
L’État n’a pas tenu parole – on pourrait même parler d’imposture à son sujet. Des politiques publiques ont été imposées aux collectivités, par exemple en matière d’accueil périscolaire, avec un financement de l’État, mais on apprend en examinant les documents budgétaires que la compensation prévue n’existera plus. De même, les pertes liées à la disparition de la taxe d’habitation devaient être compensées à l’euro près, ce qui supposait une évaluation, prévue fin 2023. Or elle n’a jamais eu lieu. Voilà pourquoi nous disons que l’État se comporte en imposteur. En la matière, le cynisme le dispute à l’irresponsabilité.
Tout le monde paie sauf vous, qui êtes responsables de la situation financière du pays, et vous entretenez la récession. Les collectivités territoriales représentent 70 % de l’investissement public civil. Celui-ci est a priori vertueux : il s’agit de construire des équipements publics et de permettre aux services publics locaux de fonctionner dans les meilleures conditions. Votre logique austéritaire aura donc un impact économique. Vous dites faire confiance aux élus locaux : c’est ce qu’il faudrait faire, mais en réalité vous les sabordez, vous les empêchez de mener les politiques pour lesquelles ils ont été élus. Ils n’ont même plus les moyens de s’assurer face aux aléas climatiques. Nous avons tous été frappés par les images d’élus locaux venant en aide, les pieds dans l’eau, à leurs concitoyens.
M. Hervé Saulignac (SOC). Nous sommes au mois d’octobre ; les collectivités territoriales entrent dans une période de construction budgétaire. Avec un tel PLF, elles le font avec des questions, des incertitudes, et même dans un contexte d’insécurité. Les conséquences sont pourtant connues : une collectivité qui se trouve dans une situation d’insécurité budgétaire appuie d’abord sur le frein des investissements. C’est très probablement ce qui va se produire.
Je voudrais cependant vous remercier d’avoir rappelé que les collectivités représentent 8 % de la dette publique. Une petite musique faisait peser sur elles une forte responsabilité : les propos de Bruno Le Maire étaient très injustes à l’endroit des exécutifs des collectivités, compte tenu de leur travail important pour tenter de maîtriser la dépense publique – je ne cherche pas à les exonérer de cet effort. Vous avez même admis que les injonctions de l’État généraient des dépenses, ce qui est agréable à entendre de la part de la ministre chargée des collectivités ; il reste néanmoins à savoir quels actes suivront.
J’accueille avec un peu de circonspection la fongibilité des enveloppes que vous avez évoquée. La fongibilité risque de pénaliser les territoires qui ne sont pas les plus dynamiques, car ceux qui le sont, au contraire, pourraient ponctionner une bonne partie des moyens. À cet égard, je suis attaché, et je ne suis pas le seul, au « R » du sigle DETR, et je souhaite que les crédits puissent continuer à être fléchés vers les territoires ruraux sans avoir à pâtir d’une quelconque fongibilité.
Les collectivités subissent une double conjoncture, à la fois économique et gouvernementale. La plongée des DMTO, qui sont des recettes volatiles, impossibles à maîtriser, voire à anticiper, est terrible. Dans le même temps, les dépenses sociales augmentent considérablement, notamment pour les départements. Les frais fixes, comme l’énergie, ont également explosé. S’agissant des charges salariales, il est heureux que les rémunérations des agents aient augmenté, mais cela conduit les collectivités à assumer 800 millions d’euros de dépenses supplémentaires en 2024. La revalorisation du RSA, évidemment nécessaire, elle aussi, représente 500 millions d’euros en année pleine, sans compensation ni accord préalable avec notamment le comité des financeurs.
Bref, la barque s’alourdit considérablement, à force de charges supplémentaires et de ponctions, parfois phénoménales. Dans mon petit département de l’Ardèche, j’ai cru comprendre que les sommes prélevées sur les recettes de fonctionnement avoisinaient les 7 millions d’euros. Je suis très heureux de ne pas être le vice-président chargé des finances au sein du conseil départemental : mon collègue va se faire des cheveux blancs en essayant de boucler le budget.
Les crédits du fonds Vert, qui s’élèvent actuellement à 1,8 milliard d’euros en exécution, passeraient à 1 milliard. Ils subiraient donc une coupe claire.
Enfin, je rappelle un principe : celui qui dépense décide. C’est bien d’avoir une méthode, mais envisagez-vous d’améliorer la codécision, pour faire en sorte que celui qui dépense ne soit pas mis devant le fait accompli, comme la plupart des collectivités en ont le sentiment ?
M. Philippe Gosselin (DR). Au moins avons-nous avec vous une connaisseuse des collectivités territoriales. J’ai néanmoins de vraies inquiétudes. Nous partageons tous, quelles que soient les sensibilités politiques, l’idée que ce budget est injuste et nous regrettons qu’on traite parfois les élus locaux comme des boucs émissaires. Ils sont présentés comme responsables de la dette publique alors que les collectivités territoriales, contrairement à l’État, ne peuvent pas adopter des budgets en déséquilibre et que leur dette est vertueuse, puisqu’elle est consacrée à de l’investissement – elle ne pose donc pas de problème, contrairement à la dette de fonctionnement, qui est récurrente.
Entre 60 % et 70 % de l’investissement public émanent des collectivités territoriales. Enrayer la machine en matière d’investissement revient tout simplement à enrayer les marchés publics locaux et donc l’économie départementale, communale et régionale. Même si le code des marchés publics permet une mise en concurrence aussi large que possible, les marchés sont assez souvent locaux, et c’est d’ailleurs très bien. L’investissement est en péril si on rogne les budgets.
Je rappelle aussi que les engagements de l’État ne sont pas nécessairement tenus, ce qui ne date pas d’aujourd’hui : des dépenses ne sont pas compensées. On est loin de l’esprit de la décentralisation de 1982, qui était de compenser au franc près. Dans la Manche, le RSA est compensé à 67 %, le coût de prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA), de 12 millions, est compensé à hauteur de 3,78 %. Le compte n’y est pas.
Le fonds de réserve nous inquiète tous. Dans le seul département de la Manche, il représenterait 19 millions, qui s’ajouteront à la chute d’environ 15 millions des DMTO en raison du faible nombre de transactions immobilières. C’est donc la quadrature du cercle qu’il faudrait réaliser : nous sommes confrontés à de vraies difficultés d’organisation. Et que dire de nos petites communes rurales qui sont à la recherche de bouts de ficelle pour gérer tant bien que mal la situation ? Leurs élus, quasiment bénévoles, sont à la fois des moutons à cinq pattes et des sentinelles de nos petites républiques, qui fondent la grande. À dix-huit mois des élections municipales, beaucoup de vocations sont en train de s’éroder, ce qui m’inquiète pour notre démocratie locale. Comme le disait Tocqueville, qui était de la Manche, lui aussi, « C’est dans la commune que réside la force des peuples libres ».
Enfin, quid du lien fiscal ? Nos collectivités n’en ont plus : la taxe d’habitation a été supprimée. Dans les départements et les régions, c’en est également fini, en partie, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Il est urgent de reconstituer un lien fiscal d’importance. Quelles sont donc les perspectives en matière de décentralisation et de déconcentration de l’État dans les mois à venir ? Comptez-vous redonner confiance grâce à un nouvel acte de décentralisation qui permettrait enfin un retour à une plus grande autonomie des collectivités territoriales ?
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Alors que la demande de proximité et de services publics ne cesse de croître, l’État se retire des territoires depuis de longues années. L’action que déploient au quotidien les collectivités territoriales au service de leurs habitants vise souvent à pallier les insuffisances de l’État. En matière de droit à l’éducation, les collectivités organisent ainsi à tous les degrés, de la maternelle à l’université, l’amélioration des conditions de scolarité en investissant dans les établissements. Elles concrétisent aussi la promesse républicaine d’égalité en prenant en charge des coûts tels que ceux de la restauration, du transport et des fournitures scolaires. Face au manque de moyens dont souffrent les enseignants et l’éducation nationale, les collectivités n’hésitent pas à développer des activités périscolaires et contribuent largement à l’épanouissement de la jeunesse, à son ouverture sur le monde et à son accès à la culture.
Dans ce domaine, les collectivités sont en première ligne pour accompagner et soutenir les acteurs culturels et permettre à nos concitoyens d’accéder à la culture. C’est grâce à leur action que, partout, les arts, le spectacle vivant, les festivals et les événements patrimoniaux vivent et font vivre nos territoires. Les collectivités sont aussi en première ligne pour le développement économique et le soutien à l’activité. Elles confortent partout le tissu commercial, investissent et soutiennent les entrepreneurs. Lorsque des commerces de proximité existent encore dans nos villages, c’est grâce à l’action des collectivités, qui soutiennent les artisans, la pérennité de leur activité et les investissements.
Par ailleurs, les collectivités assurent nombre de services publics de proximité, notamment lorsque l’État se désengage. Dans ma circonscription, pas moins de sept agences postales ont disparu ces dernières années. Quasiment à chaque fermeture, les collectivités ont pris le relais par le biais d’agences postales communales. Lorsque l’État, après avoir tout dématérialisé, cherche à nouveau la proximité, les collectivités sont mises à contribution. Nombre de dispositifs France Services, par exemple, ne peuvent fonctionner que grâce à l’engagement des communes. Face à la désertification médicale, ce sont encore les collectivités qui agissent pour décharger les médecins et libérer du temps de soin, réduire les charges administratives et améliorer les conditions de travail des personnels médicaux.
Les élus locaux sont ceux auxquels nos concitoyens accordent le plus leur confiance. Contrairement à ce que le Gouvernement prétend, l’action des collectivités ne s’inscrit pas dans une logique de dépenses incontrôlées. Depuis des années déjà, les gouvernements qui se succèdent organisent leur appauvrissement : on multiplie à Bercy des mécanismes complexes pour diminuer les recettes locales. L’État détricote ainsi jour après jour le principe de libre administration des collectivités et celui de leur autonomie financière.
J’entends dire que les baisses des budgets porteront sur les grosses collectivités, mais c’est confondre gros et riches. Toutes les grosses collectivités ne sont pas riches : la moitié des départements ont déjà une épargne négative, alors qu’ils sont chargés de s’occuper des allocataires du RSA, des prestations de compensation pour les personnes en situation de handicap, de l’allocation personnalisée d’autonomie des seniors et de l’aide sociale à l’enfance, qui se trouve dès à présent dans un état catastrophique. Et il ne s’agit là que de dépenses non pilotables. Par ailleurs, c’est oublier que les fonds de concours ne seront pas épargnés, comme le fonds Vert, qui se verrait amputer de plus d’un milliard d’euros, et le fonds de soutien au développement des activités périscolaires. Or, dans de nombreuses petites collectivités, il n’y a plus que les fonds de concours qui permettent d’agir, tant les dépenses de fonctionnement ont déjà été comprimées par les budgets précédents.
Dans ce contexte d’injonctions contradictoires, qui voudraient qu’on fasse toujours plus avec toujours moins, les maires sont de plus en plus nombreux à démissionner : ils ne peuvent plus mener à bien le projet pour lequel ils ont été élus. Plus de 4 700 élus municipaux ont jeté l’éponge depuis 2020, dont 1 300 maires, et ce mouvement risque de se poursuivre. Les élus locaux ont plus que jamais besoin d’être confortés dans leurs missions, toujours plus nombreuses, et de disposer d’une véritable vision pluriannuelle, à la fois pour les recettes et pour les dépenses.
Au vu de l’action menée par les collectivités territoriales, comment pouvez-vous penser que la cure de 6 milliards d’euros que vous souhaitez leur imposer puisse avoir lieu sans dégrader durablement les conditions de vie dans nos territoires ?
M. Éric Martineau (Dem). L’ampleur du portefeuille de vos responsabilités ouvrira la porte, pour reprendre vos mots, à un dialogue nouveau avec les collectivités. Vos missions sont définies par l’intitulé même de votre ministère : le partenariat avec les collectivités territoriales, pour rétablir le lien entre elles et le Gouvernement, et la décentralisation, dans l’ambition de clarifier et de faciliter le transfert de compétences.
Le rapport de notre collègue Éric Woerth a ouvert des pistes de réflexion pour consolider les moyens des collectivités, faciliter l’exercice des mandats locaux et clarifier la répartition des compétences entre les collectivités. L’un des points abordés dans le rapport est la recentralisation de compétences sociales jusqu’à présent dévolues aux départements, notamment l’aide sociale à l’enfance (ASE). J’ai pu constater à plusieurs reprises, dans ma circonscription, des dysfonctionnements dans les services à la petite enfance, largement pénalisés par des limites administratives géographiques entre départements et régions qui vont à l’encontre du bien des enfants. Êtes-vous favorable à une recentralisation de l’aide sociale à l’enfance afin d’apporter des garanties homogènes en matière de protection ? Il y va du bien-être des enfants et de notre société.
Selon le rapport remis par Boris Ravignon, l’enchevêtrement des compétences des collectivités territoriales coûterait chaque année 7,5 milliards d’euros. Ce coût pèse principalement sur les communes, à hauteur de 4,8 milliards. Le rapport appelle à refonder complètement le financement des collectivités pour dépasser la défiance entre elles et l’État et à revoir le partage des compétences et des responsabilités. Vous semblez apprécier certaines de ces recommandations. Pouvez-vous préciser lesquelles ? Compte tenu de l’effort financier demandé aux collectivités cette année, envisagez-vous sérieusement de vous pencher sur la question de la réduction du coût du millefeuille territorial, décrit dans le rapport de M. Ravignon ?
M. Laurent Marcangeli (HOR). Tous les acteurs de la puissance publique doivent participer à la réduction du déficit. Le groupe que je préside est parfaitement lucide à cet égard, mais considère que quelques conditions préalables sont à remplir ; vous les partagez sûrement puisqu’il s’agit de points de méthode comprenant, notamment, l’impératif d’un dialogue franc et respectueux avec les collectivités territoriales. Trois éléments nous semblent essentiels : la concertation, la réciprocité et la juste contribution.
Si l’on regarde les grandes masses, c’est bien l’État et les organismes de sécurité sociale qui pèsent le plus dans le déficit public et l’endettement. Les efforts devront donc, en grande majorité, venir d’eux.
Le PLF pour 2025 prévoit plusieurs mesures de mise à contribution des collectivités. D’abord, la DGF sera maintenue à son niveau de 2024. C’est une bonne nouvelle, car on pourrait faire pire, mais l’évolution de cette dotation ne suivra pas l’inflation. Ensuite, la fraction de TVA allouée aux collectivités restera parfaitement stable par rapport à 2024, ce qui les empêchera de bénéficier de la dynamique de la croissance. Enfin, le taux du FCTVA sera abaissé. Ces mesures semblent a priori proportionnées à la situation, très préoccupante, de nos finances publiques.
En revanche, le dispositif de fonds de réserve créé à l’article 64 fera payer un lourd tribut aux collectivités territoriales. Les plus grandes d’entre elles devront contribuer de manière significative, jusqu’à 2 % de leurs recettes réelles de fonctionnement à partir de 2025. Un tel taux peut sembler peu élevé, mais cela représente un effort massif à l’échelle locale. Comment le fonds de réserve fonctionnera-t-il concrètement ? En tout état de cause, le groupe Horizons & indépendants propose une véritable règle de péréquation pour valoriser les collectivités territoriales qui ont une bonne gestion. Il nous paraît injuste que celles qui sont bien gérées continuent de supporter le poids de l’inefficacité des autres. À terme, il serait souhaitable d’instaurer un système de bonus et de malus pour récompenser enfin ceux qui font preuve de rigueur et contribuent activement au développement de leur territoire.
La clef, c’est la confiance – celle de l’État dans la gestion des deniers publics et celle dans le transfert de certaines de ses compétences. Nos concitoyens attendent l’ouverture d’un nouveau chapitre dans l’histoire de la décentralisation. Quelles sont vos ambitions en la matière et, surtout, avec quels moyens comptez-vous les atteindre ?
Au-delà de la décentralisation se pose la question du statut du territoire dont je suis issu : nous attendons encore de connaître les contours précis de l’autonomie de la Corse, en proie à de véritables difficultés économiques et sociales qui ne doivent pas être occultées par le débat institutionnel. Compte tenu des difficultés concernant les dessertes aériennes et maritimes, je déposerai prochainement des amendements visant à ajuster le montant de la dotation de continuité territoriale de façon pérenne, au lieu de procéder exercice budgétaire après exercice budgétaire. Le temps joue contre nous et je souhaite donc, dans l’intérêt de tous, que les projets aboutissent au plus vite. Pouvez-vous indiquer vos priorités et votre calendrier en la matière ?
La réunion est suspendue de dix-sept heures trente-cinq à dix-huit heures cinq.
M. Stéphane Peu (GDR). On ne peut pas dire que les collectivités territoriales ont été bien traitées sous la présidence d’Emmanuel Macron : elles ont fait l’objet d’une certaine indifférence et d’une certaine méconnaissance de la part de ce qu’on a appelé la Macronie, et les liens de confiance entre les collectivités et les gouvernements successifs se sont distendus. Votre arrivée, madame la ministre, était plutôt une espérance compte tenu de votre parcours, mais le budget qui nous est présenté est une véritable douche froide. S’ajoutent à cela les provocations de Bruno Le Maire, qui a essayé de faire porter le chapeau aux collectivités, ou de leur passer le mistigri de la dérive des comptes publics, alors qu’elles sont vertueuses en la matière, dans la mesure où elles votent des budgets à l’équilibre et que leur dette ne couvre que leurs investissements – c’est donc une dette vertueuse.
La note qui leur est présentée est très salée. Certains parlent de 5 milliards d’euros d’amputation, mais j’arrive plutôt, en faisant les comptes, aux alentours de 6,5 milliards. La mise en place d’un fonds de réserve est pour nous injuste et incompréhensible : ce n’est ni plus ni moins qu’une ponction de 3 milliards. Dans ma circonscription, 10 millions seront pris aux seules villes de Pierrefitte-sur-Seine et de Saint-Denis et à la communauté d’agglomération, alors que nous avons, comme partout, des besoins considérables et que nos villes font partie des plus pauvres de France du point de vue des populations que nous accueillons et dont nous nous occupons. Comme l’écrêtement de la taxe d’habitation, cette mesure se traduira par moins de services publics là où l’État est souvent déficient. Deux rapports parlementaires sur les services de l’État dans le département de la Seine-Saint-Denis, l’un remis par François Cornut-Gentille et l’autre par Christine Decodts et moi-même, ont montré que nous étions souvent en dessous de la moyenne nationale, notamment pour les missions régaliennes que sont la sécurité publique, la justice et l’éducation. Ce que vous proposez conduira inévitablement à une dégradation des services rendus à la population et fera courir le risque d’accroître encore un peu les difficultés.
D’autres mesures, concernant le FCTVA ou le fonds Vert, vont amputer les capacités d’investissement, alors que 1 euro de dotation aux collectivités dans ce domaine a un effet levier d’environ 3 euros. Les 3 milliards d’euros d’investissement, au moins, qui seront prélevés conduiront ainsi à une amputation d’environ 9 milliards et à une dégradation de la capacité des collectivités à agir en faveur de la croissance économique du pays.
M. Paul Molac (LIOT). Quel bel intitulé que celui de votre ministère ! Cette idée de partenariat avec les territoires est porteuse de promesses que le groupe LIOT espère voir se concrétiser. Cependant, le budget pour 2025 nous inquiète grandement : alors que l’ancien gouvernement a ruiné l’État, le nouveau semble bien décidé à faire les poches des élus locaux en n’oubliant aucune strate. Si j’étais taquin, je ferais remarquer que l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) rapportait 5 milliards d’euros par an, c’est-à-dire le montant retiré aux territoires, et que l’on aurait pu rétablir cet impôt pour épargner les finances des collectivités territoriales. Vous avez admis que ces dernières n’étaient pour rien dans la dette publique, qui dépasse 3 200 milliards d’euros, alors que nous avions l’impression, avec M. Le Maire, que l’État central demandait aux autres d’assumer ses propres échecs.
S’agissant du fonds de réserve, je ferais observer deux choses : la grandeur d’une collectivité ne fait pas forcément sa richesse ; il est des collectivités plus vertueuses que d’autres, certaines ayant déjà commencé à réduire leurs coûts de fonctionnement. Quels critères retenez-vous pour demander, par exemple, un effort total de 56 millions à la région Bretagne ?
Je regrette évidemment le choix de geler l’évolution annuelle des recettes de TVA, ce qui va casser une dynamique pour laquelle nous nous étions battus en 2017 – cela n’avait pas été évident de l’obtenir de Bercy. Je peux comprendre la chasse aux dépenses de fonctionnement, mais pourquoi couper dans le fonds Vert, destiné à des investissements, et pourquoi attaquer le FCTVA ? Rappelons que les collectivités assurent des services à la population – écoles, terrains de sport, piscines, aides à la mobilité et autres – et qu’elles réalisent environ 70 % de l’investissement public.
Vous qui êtes chargée de la décentralisation, comment allez-vous amorcer un nouvel acte en privant un peu les élus locaux de leur marge de manœuvre ? Plutôt que de donner le pouvoir aux préfets, des fonctionnaires dépendant de la place Beauvau, je préférerais que vous le donniez aux élus locaux, des élus du peuple. Nous militons pour que, dans le cadre de leurs compétences, les élus locaux aient une autonomie fiscale, réglementaire, voire législative dans certains cas. Il en est ainsi en Nouvelle-Calédonie et dans les régions de pays qui nous entourent. Comme mes collègues corses pour leur territoire, je suis prêt à assumer mes responsabilités pour la Bretagne.
Mme Brigitte Barèges (UDR). Il est profondément injuste de voir les collectivités obligées d’assumer la mauvaise gestion de l’État, alors qu’elles doivent respecter des règles d’équilibre pour leur propre budget de fonctionnement. Cela porte atteinte au principe constitutionnel de libre administration des communes.
Vous avez honnêtement constaté que les collectivités assument 70 % de l’investissement public et ne sont responsables que de 8 % de la dette, contrairement à ce que tous les médias avaient d’abord claironné pour justifier l’atteinte aux moyens des collectivités territoriales. Vous avez aussi reconnu que l’État est responsable d’une grande partie de l’alourdissement de nos charges de fonctionnement en raison de transferts de compétences et de la revalorisation des salaires.
Dans vos prévisions, la seule bonne nouvelle est le report de la suppression de la CVAE. Cette suppression pénalisera encore les territoires dynamiques alors que la recette pourrait en partie contrebalancer les très lourdes dépenses dues au transfert vers les intercommunalités des compétences en matière d’eau et d’assainissement. Pour le reste, votre projet est une vraie catastrophe. Une fois de plus, on pénalise les collectivités les plus vertueuses pour favoriser les plus dépensières. C’est totalement injuste et cela n’incite pas à l’effort de redressement, objectif affiché du Gouvernement – il serait temps qu’il se l’applique à lui-même !
Parmi les mauvais souvenirs, je citerais les contrats dits de Cahors : les calculs de l’État étaient erronés dans mon intercommunalité, ce qui a été reconnu par la justice. Quant à la suppression de la taxe habitation, cadeau électoral d’Emmanuel Macron, l’État a fini par la compenser, mais le système est totalement injuste : le financement des services publics est supporté par les seuls propriétaires fonciers ; la péréquation établie fait que les habitants de Montauban, par exemple, paient 11 millions d’euros de taxe foncière, un montant qui excède la compensation, la différence étant redistribuée dans la région parisienne. Ces précédents conduisent les collectivités à avoir très peur.
Dans la mesure du possible, nous nous opposerons donc à ce projet de loi. L’État nous impose déjà des pénalités trop lourdes, que ce soit au titre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) ou des lois sur l’environnement. En obérant la trésorerie des collectivités, vous réduisez leurs capacités d’investissement, ce qui va nuire à la qualité des services publics, mettre en difficulté les entreprises qui contribuent à la construction de nos infrastructures, et pénaliser l’emploi, à l’heure où l’on nous annonce déjà de nombreuses faillites dans les petites et moyennes entreprises (PME) et les très petites entreprises (TPE).
Nous sommes nombreux à vous le dire, à commencer par Arnaud Robinet, maire de Reims, et par le président de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) : les élus locaux n’en peuvent plus ! De grâce, madame la ministre, vous qui avez été une élue locale de qualité, plaidez notre cause auprès d’un Président de la République qui, lui, ne connaît toujours pas la réalité locale.
Mme Catherine Vautrin. Étant encore une élue locale, je connais le dossier et sa complexité. S’agissant du fonds de précaution, il va concerner 450 communes qui ne sont pas forcément les plus importantes, car, en effet, taille n’est pas nécessairement synonyme de richesse. Il a été tenu compte de deux indices de faiblesse pour exonérer certaines d’entre elles : recevoir la DSU ; ne pas contribuer au Fpic. Les cartes qui ont circulé la semaine dernière – pas à l’initiative du Gouvernement –, n’intégraient pas ces indices de fragilité.
La réduction de 800 millions d’euros du FCTVA est un sujet en discussion avec le Premier ministre, en vue d’éventuels ajustements. Sachant parfaitement ce qu’est un plan de financement, j’imagine sans peine que certains élus ont pu contracter un prêt relais sur la base d’un FCTVA à deux ans. Cela étant, les services apportés par les collectivités à la population ayant un coût, nous devons nous poser la question suivante : faut-il durablement tenir nos concitoyens totalement éloignés du coût de tel ou tel service ? Comme je l’ai dit dans mon propos introductif, nous devons mener cette réflexion. L’État doit faire 20 milliards d’euros d’économies dans le cadre de l’effort de redressement, ce qui va entraîner des révisions dans ses coûts de fonctionnements, comme certains d’entre vous le suggèrent.
La loi SRU va fêter ses 40 ans, madame Barèges, et le logement reste un sujet majeur. À l’échelle d’un territoire, il est important d’avoir une complémentarité des types de logement.
À l’instar de M. Gillet, beaucoup d’entre vous ont parlé des dépenses de l’État. N’oubliez pas le filet de sécurité, instauré au moment de la crise sanitaire, qui a permis d’accompagner les collectivités et les entreprises. Avec le recul, on peut même penser que beaucoup a été fait en matière de mesures d’accompagnement.
Madame Miller, je vais signer aujourd’hui même la circulaire pour les préfets concernant la loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie, que vous avez mentionnée. « Il n’y a pas de hasard, il y a que des rendez-vous », disait Éluard. Vous avez raison, nous devons travailler sur les enchevêtrements des politiques et des compétences, en conduisant une réflexion avec les communes, les départements et les régions. Quant au fonds de résilience, il vise à alimenter la péréquation à partir de 2026, après constitution de la réserve en 2025. C’est un fonds de solidarité, un instrument budgétaire inédit pour notre pays.
Élisa Martin a indiqué que 10 milliards d’euros seraient ponctionnés sur les collectivités et Stéphane Peu a évalué la note à 6,5 milliards. Pour ma part, j’en reste à 5 milliards d’euros. Peut-être, monsieur Peu, incluez-vous la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), dossier que je vais suivre de très près ? Dans mes fonctions précédentes, constatant la dérive des comptes de cet organisme, j’avais demandé un rapport : le minimum que l’on doit aux agents de la fonction publique est de s’assurer d’avoir les moyens de payer leur retraite. L’idée est de lisser sur plus de trois ans la hausse des cotisations, sachant qu’une hausse d’un point équivaut à 355 millions d’euros. Et n’oublions pas qu’en d’autres temps l’Ircantec a bénéficié d’un accompagnement de la CNRACL.
S’agissant de l’autonomie financière, je rappelle que les ratios d’autonomie des communes n’ont pas baissé et sont toujours supérieurs à 70 %. Il est demandé 15 milliards d’euros d’économies sur le budget de la sécurité sociale, mais aussi 20 milliards d’économies sur celui de l’État, madame Martin. Il y a une recherche générale et solidaire d’économies, qui n’est pas dirigée contre les élus.
Vous craignez, monsieur Saulignac, que la fongibilité des enveloppes ne pénalise les territoires ruraux. Il n’est pas question de supprimer la poche de la DETR qui est destinée à la ruralité. Nous voulons engager une réflexion afin de simplifier, mais aucune décision n’a été prise et je n’ai pas d’avis préconçu. Quoi qu’il en soit, l’idée n’est pas de chercher à grappiller quelques millions supplémentaires par ce biais-là.
Monsieur Gosselin, vous indiquez que les collectivités territoriales ne sont pas responsables de la dette publique et vous insistez sur leurs dépenses d’investissement. Le problème est que la dette publique au sens de Maastricht intègre toutes les dépenses, y compris les dépenses d’investissement. Pour avoir présidé un exécutif local pendant dix ans, je sais très bien que mes investissements étaient financés par mon épargne, ma capacité d’autofinancement et donc l’accumulation de mes réserves. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Il n’en reste pas moins que les courbes montrent que la croissance des dépenses est plus rapide que celle de la constitution des réserves. Gardons cela en tête.
Vous avez raison, monsieur Duplessy, de dire que les compétences sont enchevêtrées, notamment dans les domaines de la culture et du sport. Réfléchissons ensemble, peut-être à une notion de chef de file, afin d’éviter des coûts de fonctionnement redondants, liés en particulier à l’instruction des dossiers. S’agissant des services publics, le réseau France Services compte désormais 2 800 maisons dont plus de 80 % des usagers se déclarent satisfaits. Une bonification d’un montant de 7,5 millions d’euros est dévolue à la participation des collectivités territoriales les plus fragiles au financement de ces structures.
En ce qui concerne la recentralisation des dépenses sociales, monsieur Martineau, je resterai très prudente. Outre l’ASE qui vous préoccupe, je citerai les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) où l’égalité de traitement me semble parfois remise en cause étant donné que les prestations varient d’un endroit à l’autre, ce qui peut inciter des gens à changer de département pour être mieux aidés. La semaine prochaine, j’ai rendez-vous avec Éric Woerth, qui parle en effet du millefeuille territorial dans son rapport. Nous pourrons réfléchir à la création d’un groupe de travail avec des parlementaires et des associations d’élus afin de trouver les voies et les moyens d’avancer sur ce sujet.
Monsieur Marcangeli, je vous rappelle que l’essentiel de l’effort est consenti par l’État et la sécurité sociale : 35 milliards d’euros. La DGF est stable, mais elle a connu des hausses non négligeables en 2023 et 2024. Pour la Corse, le montant de la dotation de continuité territoriale (DCT) est fixé à 187 millions depuis 2009. La collectivité avait reçu 40 millions d’euros supplémentaires en 2023, mais rien en 2024. Avec le président Simeoni, que j’ai rencontré la semaine dernière, nous sommes d’accord pour considérer qu’il faut parler de la DCT, des ports et aéroports ainsi que du plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC). S’agissant de la notion d’autonomie dans la République, le Sénat va rendre son rapport sur l’évolution institutionnelle de l’île à la fin du mois. Je le transmettrai à votre commission pour que nous puissions élaborer un projet de loi constitutionnelle à partir du début de l’année prochaine, en discuter à l’automne et réunir le Parlement en Congrès avant la fin de 2025.
Vous insistez sur la notion de population accueillie, monsieur Peu. Je suis très consciente des charges de centralité, de ce que j’appellerai des charges de solidarité et de l’effet levier des investissements. J’ai été à l’initiative de la réforme de la DSU, qui n’a pas perdu de son intérêt en vingt ans d’existence. Son effet n’est pas négligeable en Seine-Saint-Denis, l’un des départements aux indices de fragilité importants. Pour les collectivités, notamment les municipalités et les EPCI, nous devrions aborder l’année 5, mais nous avons pris du retard en raison de la crise sanitaire, je veux bien en convenir.
Monsieur Molac, je ne veux pas faire les poches des élus locaux, mais essayer de remplir la feuille de route qui m’a été confiée : baisser les dépenses publiques. Il n’est pas question non plus de donner le pouvoir aux seuls préfets. Il s’agit de regarder comment on travaille avec eux et les sous-préfets, comment les élus sont entendus, en particulier à l’échelle d’un bassin de vie où la politique conduite est lisible pour nos concitoyens. C’est la politique, la stratégie de proximité. Même si je ne connais pas bien la Bretagne, je me permets de dire que cette région n’a pas la même insularité que la Corse – c’est un peu pareil pour l’Alsace.
Je compte aussi travailler sur l’assurabilité, thème cher à votre ancien collègue Alain Chrétien, vice-président de l’AMF et maire de Vesoul, car certains biens sont difficilement assurables. Pour conclure, je répète que l’enjeu est de freiner la dépense tout en continuant à accroître la solidarité entre les différentes strates.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux questions des autres députés.
Mme Sophie Blanc (RN). Le 8 octobre dernier, lors de l’audition conjointe devant le Comité des finances locales, où vous étiez présente, le ministre chargé du budget et des comptes publics a annoncé un objectif d’économies de 5 milliards d’euros sur le budget des collectivités territoriales dès 2025. À cette occasion, nous avons aussi appris qu’un impôt local serait probablement rétabli, avec un pouvoir de taux pour les collectivités territoriales. Les élus locaux demandent des réponses claires et rapides afin d’éviter que cette situation ne devienne ingérable et que nos territoires ne soient durablement affaiblis. La fronde des maires prend déjà forme comme en témoigne l’appel du maire de Verdun, qui incite les élus locaux à démissionner en masse pour protester contre votre politique de coupes budgétaires. Pourriez-vous nous éclairer sur les intentions réelles du Gouvernement concernant le financement des collectivités territoriales ? Ces coupes budgétaires, jugées insoutenables, risquent de compromettre gravement la capacité des communes à investir et à maintenir des services publics de qualité.
M. Andy Kerbrat (LFI-NFP). Depuis des années, les collectivités territoriales sont étranglées, prises en étau, asphyxiées de manière orchestrée : baisse de la DGF ; suppression de taxes et d’impôts jamais compensée par la CVAE ; augmentation des coûts liés à l’inflation ; promesses de compensation non tenues pour les transferts de compétences ; nouvelles missions confiées en raison de la fameuse décentralisation. Les collectivités sont ainsi contraintes à s’endetter : leur endettement est passé de 140 à 230 milliards d’euros entre 2011 et 2023. Au total, l’État a soutiré près de 250 milliards d’euros aux collectivités territoriales depuis 2012 – 4,775 milliards au département de Loire-Atlantique. Derrière ces chiffres, il faut se représenter des familles à la rue sans proposition de relogement, une ASE en lambeaux, des collèges délabrés. L’État est le principal responsable de cette dette. Alors que nous avons toujours plus besoin de nos services publics, nous aurions espéré qu’une ancienne présidente de métropole allait préserver les collectivités de nouvelles coupes. André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF, évalue à quelque 10 milliards d’euros les nouvelles coupes budgétaires que vous prévoyez, poursuivant avec un zèle tout particulier la politique des majorités précédentes. Madame Vautrin, quand allez-vous rendre l’argent que vous avez soutiré aux collectivités territoriales ?
Mme Marie-José Allemand (SOC). Pour une question de lisibilité budgétaire, ne serait-il pas souhaitable d’intégrer le fonds Vert dans le périmètre de la mission Relation avec les collectivités territoriales ? À la demande de nos communes, le Sénat a adopté en février dernier une proposition de loi visant à abaisser le seuil d’autofinancement minimal de 20 % à 5 % pour les investissements des communes rurales les moins riches. Certes, les préfets peuvent déjà accorder des dérogations, mais dans des conditions très restreintes, ce qui explique le faible recours à cette disposition. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Mme Émilie Bonnivard (DR). Pour ma part, madame la ministre, je vous demanderai d’être vigilante au fonds de péréquation, afin que l’on ne sollicite pas toujours les mêmes. Sous le quinquennat de François Hollande, les collectivités ont subi une baisse massive de la DGF tandis que les recettes du Fpic sont passées de 100 millions à 1 milliard d’euros. La solidarité est une bonne chose, mais si on n’élargit pas le périmètre des contributeurs, cela devient problématique pour les communes concernées, qui sont toujours les mêmes.
Par ailleurs, je m’inquiète du gel, cette année, des crédits alloués à la dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques (DSEC), alors qu’un nombre croissant de communes font justement face à des difficultés climatiques, comme des inondations. De plus, l’État dispose d’un an pour verser les fonds aux communes concernées, alors que certaines, notamment les plus petites, peuvent se trouver en très grande difficulté budgétaire. Je pense à la commune de Bessans, dans ma circonscription, qui doit débloquer 2 millions d’euros d’ici à la fin de l’année, alors que son budget est limité.
M. Jérémie Iordanoff (EcoS). J’ai regardé la définition du mot « partenariat » dans le dictionnaire et celle-ci ne me semble pas correspondre aux annonces qui ont été faites jusqu’à présent. Nous aimerions donc connaître l’acception que vous donnez à ce terme. Quant à la « décentralisation », qui peut être définie comme un « mouvement de transferts de compétences », on peut se demander si empêcher l’exercice des compétences locales en baissant drastiquement les budgets, comme vous prévoyez de le faire, ne représente pas plutôt un mouvement de recentralisation – j’espère que vous me contredirez également sur ce point.
Dans le logiciel macroniste, les collectivités territoriales ne comptent pas, ou si peu. Elles ont été méprisées depuis 2017 et les dernières annonces, si elles sont regrettables, paraissent cohérentes. Une telle politique semble toutefois plus surprenante de la part d’une ministre telle que vous – conseillère municipale, ancienne présidente du Grand Reims et membre de l’UMP et de LR, une famille politique aux affaires dans nombre de collectivités et qui a une culture de la gestion locale. Comment expliquer que vous tolériez une telle méthode, une telle brutalité dans les coupes budgétaires, un tel mépris des élus locaux ? N’avez-vous pas songé, à l’instar du garde des sceaux, à mettre votre démission dans la balance ?
Veuillez excuser la tonalité de mes questions, mais les élus locaux sont en colère et nos débats du jour me semblent un peu trop apaisés.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). « Écoute », « dialogue » et « contractualisation », tels sont les mots que vous avez employés pour décrire votre méthode de travail. En juin dernier, un décret a été signé imposant aux départements la prise en charge des revalorisations des oubliés du Ségur de la santé, ce qui, pour la Seine-Maritime, représente une charge de 3,6 millions d’euros. Sans remettre en cause le bienfondé de ces primes, pouvez-vous nous assurer que l’absence de concertation au moment où cette décision a été prise ne se reproduira pas ?
Et je ne parle pas des 40 millions d’euros – même si j’ai bien noté que vous avez contesté l’exactitude de ce chiffre publié dans la presse –, qui doivent être ponctionnés sur les comptes du département dans le cadre du budget pour 2025.
M. Paul-André Colombani (LIOT). Je salue votre engagement à renouer le dialogue avec la Corse. J’espère que nous saurons convaincre la représentation nationale de la nécessité de faire évoluer son statut.
Je souhaite ici relayer l’inquiétude de plusieurs maires de ma circonscription au sujet du nouveau zonage France ruralité revitalisation (FRR). Leurs communes viennent d’en être exclues alors même qu’elles faisaient partie des zones de revitalisation rurale (ZRR). Je sais que le PLF pour 2025 prévoit que les communes dans cette situation conserveront le bénéfice de leur classement jusqu’en 2027, ce dont je me félicite, mais l’opacité entourant les critères statistiques retenus pour ce nouveau zonage m’interroge, d’autant plus que s’y ajoute une forme d’incohérence. En effet, comment expliquer que certaines communes rurales au sens de la définition de l’Insee soient éligibles au dispositif renforcé FRR « plus », alors qu’elles ne faisaient pas partie du FRR ?
Mme Sophie Vaginay (UDR). L’État demande aux collectivités de contribuer à la réduction de sa dette au lieu de trouver des solutions pour équilibrer ses comptes. Pour répondre à la faillite de l’État, le Gouvernement ponctionnera donc une nouvelle fois, dans le cadre du PLF pour 2025, les communes et les collectivités. Il en résultera un effet ciseaux, avec moins de services, moins d’investissement et une pression supplémentaire sur les impôts locaux. Certaines collectivités territoriales étaient pourtant déjà en difficulté en raison de la suppression de la taxe d’habitation et de la baisse des DMTO. De plus, tous les contribuables locaux vont avoir à supporter une part de la dette nationale, sans distinction et donc de manière inéquitable selon les communes, les départements et les régions.
Quelles sont les mesures concrètes prévues pour que nos collectivités territoriales, en particulier en milieu rural, continuent à jouer leur rôle sans être sacrifiées sur l’autel de la dette publique ?
Mme Béatrice Roullaud (RN). Dans un entretien donné à Ouest-France, vous avez déclaré vouloir créer une « équipe de France » des services publics locaux, afin de mutualiser certains services à l’échelle des bassins de vie. Doit-on comprendre que certains services publics, guichets, points de vente, comme ceux de La Poste ou de la SNCF, pourraient être supprimés dans les petites communes ? Les Français doivent-ils s’attendre à une diminution des services publics en milieu rural et, si oui, quels services seraient concernés ?
J’ai également une question sur la bonne utilisation de l’argent public par les collectivités territoriales. En Seine-et-Marne, des dirigeants de l’association Adsea 77 et de l’association Equalis ont été épinglés pour enrichissement personnel. Seriez-vous favorable à l’instauration de davantage de transparence dans l’octroi des subventions publiques, en créant des obligations déclaratives ou de communication de pièces, afin de permettre aux élus de délibérer en connaissance de cause et d’éviter de telles fraudes ?
M. Michaël Taverne (RN). La situation budgétaire est plus qu’alarmante et des efforts considérables seront nécessaires. Dans ce contexte, les maires de nos communes rurales, comme dans mon département du Nord, s’inquiètent de la possible diminution des subventions qui leur sont allouées, à commencer par la DETR, la DSIL ou la DPV. Leur crainte est évidemment que certains projets ne puissent finalement aboutir et, surtout, de subir une augmentation des charges, notamment de l’énergie.
De la même manière, les élus de mon territoire s’inquiètent de l’avenir du troisième pacte « Sambre-Avesnois-Thiérache ». Vous engagez-vous à le poursuivre et, plus généralement, quelle réponse donnez-vous aux élus de notre ruralité, qui se serrent la ceinture tous les ans, et particulièrement cette année ?
Mme Marie-France Lorho (RN). Je m’interroge sur la durée de l’effort qu’auront à consentir les collectivités dans leur participation à la réduction du déficit public. Cette contribution, qui représentera 12,5 % des économies totales prévues, ne sera-t-elle à verser qu’une année, ou les collectivités doivent-elles s’attendre à devoir la subir pour les prochains exercices ?
Par ailleurs, les ponctions opérées sur les recettes des collectivités ne risquent-elles pas de freiner les investissements locaux, alors même que ces derniers, particulièrement dans les territoires ruraux, constituent une source importante d’activité ?
Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Dans un rapport publié en septembre dernier, la Cour des comptes évalue le budget des espaces France Services à 351 millions d’euros, dont les deux tiers sont à la charge des hébergeurs que sont, pour l’essentiel, les collectivités. Ces espaces ne suffisent pas à compenser le démantèlement des services publics et la réduction de leur accès partout sur le territoire. Pour régler le problème, qui emporte des conséquences délétères quotidiennes pour des millions de nos concitoyennes et concitoyens, il faudrait tout simplement rouvrir les accueils physiques dans les services publics, comme le prévoit ma proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en novembre dernier et qui attend d’être inscrite à l’ordre du jour du Sénat.
Le réseau France Services est un palliatif qui confirme la nécessité de ces réouvertures. Les demandes des usagers augmentent de manière continue depuis l’instauration du réseau, leur nombre étant passé de 1 million en 2020 à 9 millions en 2023. À cet égard, la Cour des comptes relève que le financement de l’État ne tient pas compte des situations de saturation qui en découlent et précise qu’une subvention forfaitaire supplémentaire serait nécessaire.
Pouvez-vous confirmer que la trajectoire fixée par votre prédécesseure, qui consiste à porter la subvention de 40 000 à 45 000, puis à 50 000 euros, sera maintenue et même encore renforcée compte tenu des coupes budgétaires que vous prévoyez d’imposer aux collectivités et qui réduiront automatiquement leur capacité à financer de tels dispositifs ?
M. Julien Rancoule (RN). Mercredi dernier, devant les sénateurs, le Premier ministre a annoncé l’abandon du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux EPCI. La contestée loi portant nouvelle organisation territoriale de la République de 2015 (loi Notre) avait en effet prévu ce transfert pour 2020, échéance ensuite reportée à 2026. La mesure était largement désapprouvée par les maires ruraux, qui craignaient une hausse du coût de l’eau pour les usagers et une gestion moins précise des réseaux. Chaque territoire a ses spécificités et les maires sont les mieux placés pour décider.
L’an dernier, notre groupe avait déposé une proposition de loi pour laisser aux communes la liberté de conserver ces compétences. L’annonce du Premier ministre est donc positive, mais des questions subsistent. Quel sera le calendrier ? Les communes ayant déjà transféré ces compétences pourront-elles les récupérer ? Qu’en sera-t-il des EPCI qui n’ont obtenu ces compétences que d’une partie des communes qui les composent ? Ces communautés de communes ne risquent-elles pas de gérer uniquement les réseaux en mauvais état, plombant ainsi leur budget ?
M. Marc Pena (SOC). C’est au titre de ma triple responsabilité de député des Bouches-du-Rhône, de conseiller municipal d’Aix-en-Provence et de conseiller métropolitain que je souhaite vous interroger sur la métropole Aix-Marseille-Provence. Souvent décrite comme mal née, elle connaît des difficultés structurelles liées à son financement et à son organisation. Par exemple, sa présidente est également à la tête du conseil départemental. Face à ce constat, l’immobilisme est la pire des options et deux pistes s’offrent à nous.
La première consisterait à faire de cette métropole un établissement public de plein exercice, doté de conseillers métropolitains élus au suffrage universel, en la fusionnant éventuellement avec le département des Bouches-du-Rhône.
La seconde, très différente, serait de reconnaître l’existence de deux bassins de vie distincts, avec d’un côté une métropole maritime, dont les problématiques se concentrent sur le littoral, et de l’autre une métropole de l’arrière-pays, qui serait partie intégrante de ma circonscription. Cette deuxième solution impliquerait la création de deux intercommunalités distinctes…
M. le président Florent Boudié. Votre temps est écoulé, monsieur Pena. Tous les orateurs se sont exprimés en une minute, ce dont je les remercie.
M. Marc Pena (SOC). J’aurais eu besoin de trente secondes de plus. Dans ces conditions, personne ne comprendra mon propos…
Mme Catherine Vautrin, ministre. S’agissant d’abord des ZRR, je rappelle que les critères utilisés ont été approuvés par le législateur en 2023. Ils recouvrent trois éléments : le revenu moyen, la densité de population et la nécessité d’un rattrapage du bassin de vie. Tel que le prévoit le PLF pour 2025, le FRR « plus » est cohérent avec le FRR « socle », dans la mesure où il sera réservé aux communes rurales au sens de la définition de l’Insee.
En ce qui concerne ensuite l’enveloppe allouée à la DSEC, elle s’établira à 40 millions d’euros en 2025, soit le même niveau qu’en 2024. En l’occurrence, l’enjeu est davantage celui de l’amélioration de la procédure, car il est vrai que les versements prennent du temps. En effet, quand les dégâts sont importants et supérieurs à 1 million d’euros, il faut procéder à l’évaluation des dommages sur les biens non assurables. Toutefois, les collectivités peuvent demander une avance de 30 % au moment de la notification du soutien de l’État.
Madame Firmin Le Bodo, nous n’avons pas toujours obtenu de réponse de la part des associations lors des concertations relatives au Ségur de la santé, ce qui ne nous a pas aidés s’agissant du surcoût de 170 millions d’euros à propos duquel vous m’avez interrogée. Vous connaissez l’histoire : je ne m’étendrai pas.
Concernant le fonds Vert et l’opportunité de l’incorporer à la mission Relations avec les collectivités territoriales, tel que le suggère Mme Allemand, il me semble que l’important est surtout de pérenniser sa gestion, qui est efficace, notamment pour les petites communes. Il s’agit typiquement d’une question d’articulation des dotations d’investissement. Une circulaire commune sera diffusée dès 2025.
Monsieur Taverne, le troisième pacte « Sambre-Avesnois-Thiérache » est financé et sera poursuivi : nous l’avons examiné spécifiquement. Il fait partie des grands contrats d’équipement et d’investissement de l’État pour 2025 et, malgré la baisse des crédits affectés au programme 112 auquel il est rattaché, soyez assuré de notre volonté absolue de conserver ce dispositif. Il y a parfois des bonnes nouvelles !
Madame Obono, vous avez raison, les deux tiers du budget des maisons France Services sont pris en charge par les hébergeurs. Cette organisation fonctionne et je confirme que le PLF pour 2025 portera de 40 000 à 45 000 euros le montant de la subvention par espace. J’ajoute que nous réfléchirons aussi à des mutualisations avec des locaux appartenant, entre autres, à La Poste et à la SNCF.
S’agissant de la métropole Aix-Marseille-Provence, je ne suis pas certaine d’avoir entièrement compris votre question, monsieur Pena, mais je ne puis, de toute façon, me prononcer dans l’instant sur un tel sujet. À cet égard, n’oublions pas le plan « Marseille en grand », qui prévoit des investissements considérables et qui mérite également toute notre attention.
Concernant les compétences eau et assainissement, le Premier ministre a été très clair : il n’y aura pas de rétroactivité pour les transferts déjà effectués en direction des communautés d’agglomération et des communautés de communes. Les élus ont demandé de tenir compte de leurs spécificités et l’idée est de mutualiser face à ce que l’on peut appeler un mur d’investissements.
Cela me permettra d’ailleurs, en conclusion, de répondre à M. Iordanoff. En agissant ainsi, je ne me renie pas en tant qu’élue, car notre responsabilité est de préserver une action publique de proximité. Reprenons l’exemple de l’eau et de l’assainissement. Dans mon territoire, certaines communes avaient besoin d’une nouvelle station d’épuration. Nous avons tiré des tuyaux pour les relier à la station d’épuration de la communauté urbaine, améliorant ainsi la qualité du service sans construire une autre installation. C’est l’exact résumé de ce que nous devons essayer de faire, et vous êtes au cœur, avec les maires, de ces réponses visant à optimiser et à mutualiser quand l’argent public est rare. Je vous remercie de votre écoute.
Mme Béatrice Roullaud (RN). Le 5 octobre, vous avez déclaré au journal Ouest-France, souhaiter une « équipe de France » des services publics locaux. Une telle mutualisation entraînerait-elle une diminution des services publics dans les zones rurales ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Non, il n’y aura pas de diminution. Je parle de mutualisation, car La Poste ou encore la SNCF disposent de locaux et de personnels mobilisables, et parce que cela peut apporter une réponse dans les endroits où il n’y a rien.
*
* *
Lors de ses réunions du mercredi 30 octobre à 9 heures et 16 heures 30, la Commission examine pour avis les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis).
Lien vidéo : https://assnat.fr/XvMD7M
M. le président Florent Boudié. Nous avons procédé, le 15 octobre dernier, à l’audition de Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation. Nous commençons ce matin l’examen des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales et des articles rattachés.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CL218 de M. Bérenger Cernon ; amendements identiques II-CL316 de M. Emmanuel Duplessy et CL307 de M. Hervé Saulignac (discussion commune)
Mme Danièle Obono (LFI-NFP). La situation financière des départements ne cesse de se dégrader. Alors que les dépenses sociales augmentent, leurs recettes diminuent fortement, ces collectivités n’ayant plus de marge de manœuvre fiscale depuis qu’elles ont perdu le produit de la taxe foncière dans le cadre de la réforme de la taxe d’habitation. Si rien n’est fait, Départements de France craint que de nombreux départements ne soient plus en mesure de faire face à leurs obligations et se retrouvent en cessation de paiement. Selon les estimations de La Banque postale, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) devraient baisser de 17 % en 2024, après une chute de 3,5 milliards en 2023. Cette évolution contribuerait fortement à la baisse de l’épargne nette des départements, qui pourrait diminuer de 59,4 %. Dans le même temps, ces collectivités subissent un reste à charge de 53 % pour le versement des allocations individuelles de solidarité (AIS), alors que ces compétences leur ont été transférées par l’État.
Afin de permettre aux départements en difficulté d’exercer leurs missions de proximité et de solidarité, et conformément à la demande exprimée par Départements de France, notre amendement II-CL218 vise à abonder de 163 millions d’euros le fonds de sauvegarde des départements.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. La loi de finances initiale pour 2020 a créé un fonds de sauvegarde des départements alimenté par la croissance de la fraction du produit de la TVA versée aux départements – dont le montant initial était de 250 millions d’euros. Ainsi, en 2024, le fonds de sauvegarde était initialement doté de 53 millions d’euros. Un prélèvement sur recettes (PSR) temporaire a été mis en place en 2024 afin de porter ce montant à 106 millions.
Vous souhaitez augmenter les crédits alloués au fonds de sauvegarde. Or, sur la forme, toute hausse de crédits doit passer par le PSR, qui relève de la première partie du projet de loi de finances (PLF). Sur le fond, je vous rappelle que la situation de nos finances publiques est complexe et que nous devons donc porter une attention particulière à nos dépenses.
Le fonds de sauvegarde des départements est déjà exempté de la mesure prévue à l’article 31 du PLF, qui dispose que la dynamique de TVA ne sera pas affectée aux collectivités territoriales. De plus, les vingt premiers départements bénéficiaires du fonds de sauvegarde sont exemptés du prélèvement exceptionnel de 3 milliards d’euros instauré par l’article 64 afin de financer le fonds de précaution pour les collectivités territoriales.
Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. Philippe Gosselin (DR). Le financement des collectivités locales, en particulier des départements, pose problème. Leurs recettes sont désormais complètement déconnectées de la fiscalité – c’est un peu moins vrai pour les communes, même si la disparition de la taxe d’habitation réduit leurs marges de manœuvre. Les départements, qui exercent des compétences sociales, voient les DMTO s’écrouler, du fait de la baisse du volume des transactions immobilières, mais seront soumis au prélèvement exceptionnel de 2 % prévu par l’article 64. Ils doivent financer des restes à charge énormes : ainsi, dans la Manche, où je suis conseiller départemental, la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA) coûte 12 millions d’euros par an, pour un taux de compensation de 3,78 %. Le compte n’y est pas ! Nos collègues ont raison de tirer la sonnette d’alarme.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Si la situation budgétaire de notre pays est difficile, c’est parce que nous n’avons pas la volonté politique d’aller chercher l’argent là où il est. En effet, un certain nombre de groupes s’opposent à la taxation des grandes entreprises, des dividendes et des actions.
De surcroît, les départements font face à certaines obligations, notamment en matière de RSA. Il s’agit là de dépenses induites, impératives, et d’ailleurs absolument nécessaires sur le plan social. Aussi est-il très inquiétant d’entendre des présidents de départements annoncer qu’ils n’assumeront plus leurs obligations.
Enfin, la création d’un fonds dit de résilience, auquel personne ne comprend rien, va capter une partie des ressources de certaines collectivités, en particulier des départements et des grandes villes dont les dépenses de fonctionnement sont supérieures à 40 millions.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). La situation du pays nécessite un renforcement de toutes les politiques de solidarité, a fortiori de celles exercées au niveau local, en particulier par les départements. Je rappelle que ces derniers sont chargés de l’aide sociale à l’enfance (ASE) ainsi que du versement de la prestation de compensation du handicap (PCH), de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et du RSA : ainsi, ils sont au cœur des actions concrètes de solidarité. Je m’inquiète donc que l’on décide de faire des économies là où l’on ne devrait pas.
Si je m’exprime avec une certaine gravité, c’est aussi parce que les missions que je viens d’évoquer sont assurées par des agents, fonctionnaires ou contractuels, que M. Kasbarian a lourdement mis en cause ces derniers jours. Le Gouvernement envoie le pire des messages : il s’attaque à la fois à des politiques publiques fondamentales, en diminuant les moyens qui leur sont consacrés, et aux agents chargés de les conduire. La priorité devrait être d’abonder le fonds de sauvegarde des départements, à hauteur de 163 millions d’euros, comme nous le proposons dans notre amendement II-CL316, de permettre aux collectivités de mener à bien leurs missions et de les soutenir dans leurs ambitions.
M. Hervé Saulignac (SOC). Je souscris aux propos de mes collègues.
Vous avez dit, madame la rapporteure pour avis, que la situation de nos finances publiques était complexe. C’est une réalité, mais les mesures que vous imposez aux collectivités ne permettront pas de résoudre ce problème, puisque la dette de l’ensemble des administrations publiques locales ne représente que 7 % de la dette publique française, qui avoisine désormais les 3 300 milliards d’euros. Au contraire, ces mesures porteront un grand préjudice aux collectivités qui assurent des services : elles réduiront les politiques d’insertion, nuiront à l’aide sociale à l’enfance, qui relève des départements et est aujourd’hui à la peine, et fragiliseront les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), alors que les événements récents dans le Sud-Est ont montré que l’on ne pouvait pas rogner leurs budgets. Par souci de justice, nous proposons donc de venir en aide aux départements, qui sont en grande difficulté.
La commission adopte l’amendement II-CL218.
En conséquence, les amendements II-CL316 et II-CL307 tombent.
Amendements II-CL214 de M. Bérenger Cernon, II-CL308 de Mme Marie-José Allemand et II-CL314 de M. Emmanuel Duplessy (discussion commune)
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Notre amendement II-CL214 vise à revaloriser la dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) à hauteur de l’inflation. En effet, ce n’est pas parce que les dotations sont stables en valeur qu’elles permettront aux collectivités de maintenir le même niveau d’engagement. Ne pas prendre en compte l’inflation, c’est baisser les crédits en volume. Or les collectivités, qui assurent environ 70 % de l’investissement public, doivent faire face à un certain nombre de dépenses dans le cadre de la transition écologique, ne serait-ce qu’en matière d’isolation des bâtiments, afin de préserver la planète tout en faisant des économies d’énergie.
Mme Marie-José Allemand (SOC). Nous devons soutenir les départements afin de leur permettre d’accompagner vraiment les habitants tout en préservant le financement des investissements locaux.
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Ce fonds est très important pour les départements : 29 % des crédits sont utilisés dans le domaine éducatif – l’école est une priorité, même si le Gouvernement prévoit de supprimer des postes –, 25 % dans le domaine de la santé et du social – on sait à quel point les collectivités sont sur la ligne de front en ce qui concerne la lutte contre la désertification médicale et l’accès aux soins de nos concitoyens – et près de 25 % pour les questions environnementales et de transition énergétique, qui constituent un des défis du siècle, pour l’humanité entière. Il convient de permettre aux départements de poursuivre leurs efforts en revalorisant ces crédits à hauteur de l’inflation, ce qui restera loin des besoins réels mais permettra au moins une petite avancée.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Personne ici ne dit que les actions menées par les départements ne sont pas de première importance. Nous en avons besoin. Il ne s’agit pas de faire des économies sur le dos des collectivités territoriales, mais de leur demander une participation aux efforts budgétaires.
Le débat sur le lien entre les différentes dotations et l’inflation revient très souvent. On peut en discuter, mais sans oublier que depuis quelques années, contrairement à une autre période, le Gouvernement fait l’effort de maintenir les dotations.
Pour ces différentes raisons, je suis, hélas, défavorable aux amendements.
La commission adopte l’amendement II-CL214.
En conséquence, les amendements II-CL308 et II-CL314 tombent.
Amendement II-CL203 de M. Paul Molac
M. Paul Molac (LIOT). Cet amendement vise à renforcer les capacités des régions, compétentes en matière d’aménagement du territoire, en leur confiant l’octroi de la moitié de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Ce gouvernement a peu à peu donné à l’administration, notamment en mettant fin à la réserve parlementaire, des moyens qui relevaient auparavant des élus. Je n’ai rien contre les préfets, mais les élus représentent le peuple alors que les préfets sont des fonctionnaires de l’État qui prennent leurs ordres directement auprès de leur ministre de tutelle, celui de l’intérieur. Je préfère que les montants en question soient répartis par des élus locaux, quitte à créer des commissions.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Cet amendement est intéressant parce qu’il pose la question de l’efficacité et de la lisibilité des différentes dotations d’investissement des collectivités territoriales, que j’ai précisément choisi de traiter dans la partie thématique de mon rapport. Si nous devrions réfléchir à une association des élus pour l’attribution de la DSIL, un peu sur le modèle de ce qui existe pour la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), le fait que les crédits soient à la main du préfet n’est pas la source du problème. Confier les crédits aux présidents de région pourrait, à l’inverse, poser de graves difficultés en cas de différends politiques entre eux et les maires – je connais des exemples concrets dans mon département. Le préfet, pour sa part, a le mérite d’être politiquement neutre. Les acteurs que j’ai rencontrés ont surtout fait état d’un manque de prévisibilité des dotations dans le temps, ce qui me conduit à recommander de renforcer le cadre pluriannuel existant. Avis défavorable.
M. Yoann Gillet (RN). Les conséquences de cet amendement me paraissent assez dangereuses. Des dérives politiques peuvent se produire, mais nous pouvons travailler à une amélioration du dispositif en créant une commission à l’image de celle qui existe pour la DETR – les parlementaires y sont notamment représentés. Nous devons, en tout cas, faire attention à ne pas éloigner du terrain la prise de décision : les préfets agissent dans un département dont ils connaissent les élus locaux et les projets, alors que les présidents de nos superbes grandes régions en sont relativement éloignés. Je rappelle aussi que la présidente de ma région, Carole Delga, a été condamnée pour discrimination à l’égard d’une commune, gérée par le Rassemblement national. Il y a lieu de se méfier, parfois, quand on donne des pouvoirs à tel ou tel politique. S’agissant du soutien à l’investissement dans des projets locaux, on ne doit pas tout politiser, mais faire confiance aux préfets, qui sont quotidiennement en relation avec les élus.
M. Philippe Gosselin (DR). Je fais partie de ceux qui considèrent que les préfets représentent l’intérêt général – je vois que cela fait bondir certains d’entre nous –, même si leur nomination, le mercredi matin en Conseil des ministres, est à la discrétion du Gouvernement – cela n’a pas tellement changé depuis l’an VIII. La question de la coordination ou de la conciliation avec des décisions locales, c’est-à-dire de l’amélioration de la prise de décision, se pose en revanche. Les commissions qui associent les élus locaux en matière de DETR ne fonctionnent pas trop mal, bien qu’en réalité seuls les dossiers les plus importants, de plus de 100 000 euros, soient évoqués. Nous pouvons réfléchir à une évolution du mode de fonctionnement actuel : un mixte de déconcentration plus poussée et de décentralisation, qui permet d’associer les élus locaux, serait envisageable. Je n’ai pas de défiance particulière à l’égard des représentants de l’État, mais les modes de fonctionnement et d’attribution des dotations sont sans doute à revoir, en faisant attention à ne pas reconstituer, parfois, des baronnies – la tentation pourrait être grande, quelles que soient les étiquettes politiques.
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Je ne suis pas sûr qu’il faille remplacer les décisions prises par des préfets par des décisions uniquement liées à la politique locale, qui relève d’autres problématiques, mais je voudrais dire au collègue Gosselin que le préfet n’est pas un représentant de l’intérêt général, même si j’adorerais que ce soit le cas. Le préfet est, en vertu des textes en vigueur, le représentant du Gouvernement et de l’État – c’est tout.
M. Philippe Gosselin (DR). Ce n’est pas incompatible avec l’intérêt général.
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Ce n’est pas ce que je dis, mais si vous pensez que le Gouvernement représente forcément l’intérêt général, nous aurons un désaccord. Je respecte les préfets et leurs attributions, mais ne faisons pas dire n’importe quoi aux textes. J’ai déjà vu des préfets qui prenaient, sur ordre du Gouvernement, des décisions qui ne me semblaient pas correspondre à l’intérêt général, notamment quand il s’agissait de réprimer des manifestations, de gilets jaunes ou contre les retraites.
M. Paul Molac (LIOT). Le préfet ne représente pas nécessairement l’intérêt général, en effet. Je pourrais citer des exemples un peu curieux dans certaines régions – pas la mienne –, mais vous me permettrez de ne pas le faire.
Le terme « baron » me paraît relativement mal choisi. Au Moyen Âge, un baron levait l’impôt, faisait la loi, avait sa propre armée et menait sa propre diplomatie ; les présidents de région ou de département en sont vraiment très loin. S’ils pouvaient déjà être maîtres de leur budget et pouvaient lever l’impôt au lieu de recevoir des dotations venant de Paris et susceptibles d’évoluer tous les ans à la hausse ou la baisse, ce qui est plutôt la tendance, ce serait déjà de bonne gestion.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL295 de M. Yoann Gillet et amendements identiques II-CL309 de M. Marc Pena et II-CL217 de Mme Élisa Martin (discussion commune)
M. Yoann Gillet (RN). Les dotations de soutien à l’investissement des collectivités territoriales ne sont pas de simples lignes budgétaires et ne doivent pas servir de variables d’ajustement à l’État : elles sont le moteur de la continuité des services publics et le pilier du développement économique des territoires. Les crédits destinés dans ce budget aux dotations de soutien à l’investissement, comme la DETR et la DSIL, ne répondent aucunement aux besoins de nos territoires : en euros constants, ces moyens sont en recul, alors que les besoins des communes explosent en matière d’infrastructures de santé, d’éducation, de sport ou de rénovation des bâtiments publics.
Le nouveau gouvernement continue de faire s’envoler les dépenses publiques de l’État et taille là où il est possible de le faire, du côté des retraités, des Français et de nos collectivités. Il y aurait pourtant des économies à faire sans sacrifier le cœur de l’investissement local. Il est injuste de s’en prendre aux collectivités, qui ne sont à l’origine que de 8 % de la dette publique, le reste étant le fait de l’État. Ce n’est pas aux collectivités et aux Français de payer pour les erreurs budgétaires commises par les précédents gouvernements. Une telle décision est injuste et dangereuse pour l’économie du pays car 70 % de l’investissement public, et même un peu plus selon les dernières données, repose sur les collectivités. Nous proposons de faire tout simplement preuve de bon sens en soutenant financièrement les collectivités territoriales et en protégeant leurs capacités d’investissement. Aucun compromis ne doit être fait quand il s’agit de soutenir les collectivités.
M. Marc Pena (SOC). Notre amendement propose d’ajuster la DSIL en l’augmentant de 1,8 %, soit le taux d’inflation prévu pour 2025, afin de préserver la capacité d’investissement des collectivités territoriales. Le PLF pour 2025 fixe le montant de la DSIL à 570 millions d’euros, c’est-à-dire au même niveau qu’en 2014. Compte tenu de l’inflation, cela implique une baisse des crédits en euros constants qui limitera la capacité d’investissement des collectivités.
Nous invitons le Gouvernement à lever le gage car nous ne souhaitons pas réduire les dépenses d’autres collectivités.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Notre amendement vise également à ce que les montants des dotations d’investissement tiennent compte de l’inflation – nous ne demandons pas, vous l’aurez compris, une répartition différente des crédits mais une augmentation. Il est très important de soutenir les collectivités locales, qui doivent notamment participer aux mutations écologiques dans le cadre de leurs bâtiments. On les en empêche par la rareté organisée des crédits.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. L’expression « rareté organisée des crédits » me paraît un peu forte. Les crédits sont loin d’être annulés, puisqu’ils sont maintenus. Certains d’entre vous souhaitent établir un lien avec l’inflation, mais il faudrait commencer par vous mettre d’accord sur le taux à prendre en compte : est-ce 2,5 ou 1,8 % ? J’ajoute qu’avec les amendements adoptés au début de la réunion nous venons d’inscrire au PLF 167 millions d’euros supplémentaires. Avis défavorable à ces amendements.
M. Marc Pena (SOC). La revalorisation de 1,8 % que je propose pour tenir compte de l’inflation est modeste. Ce n’est pas une dépense inconsidérée mais un simple retour à ce que nous avons fait l’an dernier.
M. Yoann Gillet (RN). Nous opposer que nous venons d’ajouter plus de 160 millions d’euros est un peu fort de café : c’était au Gouvernement de proposer un PLF comportant des économies là où il faut en faire. Les mauvaises dépenses sont nombreuses en France, mais ce gouvernement, comme les précédents, n’a pas osé prendre le taureau par les cornes.
Mme Émilie Bonnivard (DR). L’effort doit peser sur tous, de façon équilibrée. Avez-vous des éléments au sujet du ralentissement des investissements un an et demi avant les élections municipales ? Des crédits supplémentaires seront-ils pleinement utilisés ? On sait que les investissements diminuent à l’approche des périodes électorales.
Mme Brigitte Barèges (UDR). Je m’exprime en tant qu’ancien maire : quand on arrive à la fin d’un mandat, tous les projets ont été engagés et il faut payer les entreprises. Il est absolument incompréhensible de réduire de 5 milliards d’euros des crédits nécessaires non seulement pour les collectivités mais aussi pour les entreprises et par voie de conséquence pour l’emploi. Ce qui nous est proposé est une hérésie, il faut absolument rétablir tous les crédits que l’État veut enlever.
M. Philippe Gosselin (DR). Je m’interroge sur le tunnel qui va s’ouvrir dans les mois qui viennent. Il ne me paraît pas anormal que chacun fasse un effort, mais nous risquons de pénaliser l’investissement public, dont quasiment les trois quarts reposent sur les collectivités territoriales. Toucher aux frais de fonctionnement ne sera simple ni pour les communes, ni pour les départements, ni pour les régions. Les collectivités auront donc la tentation, voire l’obligation, de limiter les investissements. Or les élus municipaux sont déjà en fin de mandat : les risques de ralentissement en 2025 et 2026 sont sérieux et, sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augure, ils pourraient se prolonger puisque nous serons alors à quelques mois de l’élection présidentielle de 2027. Prenons garde de creuser encore plus profondément, par les décisions d’aujourd’hui, le tunnel qui nous attend dans les trois prochaines années, avec les conséquences qu’on peut imaginer en matière d’emplois locaux, non délocalisables, par exemple dans le BTP (bâtiment et travaux publics) Ne limitons pas notre réflexion aux aspects purement budgétaires.
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Je suis assez surpris que des groupes politiques qui, lors de l’examen de la première partie de ce budget, ont refusé davantage de recettes, voire ont aggravé les pertes de ressources de l’État, ne semblent pas trouver le courage d’assumer des baisses de dépenses. Mon groupe ne soutiendra pas l’amendement II-CL295, mais votera en faveur des suivants qui, compte tenu de l’état des finances publiques et du refus de certains membres de cette commission de récupérer de l’argent auprès des grosses fortunes pour financer nos collectivités, se limitent à suivre l’inflation.
Je défends, comme d’autres, l’idée que l’action des collectivités territoriales est bien plus déterminante pour assurer la compétitivité de nos entreprises, favoriser un écosystème propice au développement et permettre de répondre aux besoins sociaux et économiques de la population que les avantages fiscaux accordés aux très riches et aux grandes entreprises.
Faites au moins preuve d’un peu de cohérence : quand on a refusé plus de recettes, voire aggravé les pertes de ressources de l’État, il est quand même inconséquent de demander ensuite une augmentation des dépenses.
M. le président Florent Boudié. Vous n’avez pas tort sur un point : cette législature est teintée de certaines originalités.
La commission rejette l’amendement II-CL295, puis adopte les amendements II- CL309 et II-CL217.
Amendement II-CL215 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il s’agit de caler sur l’inflation la dotation politique de la ville (DPV), même si j’ai de fortes préventions à son égard. D’abord, je conteste l’approche géographique suivie par l’État. Ensuite, au motif que ces moyens objectivement pas très importants leur sont attribués, les zones populaires concernées – vous remarquerez que je ne parle pas de « quartiers » – ne bénéficient pas des crédits de droit commun, ce qui n’est pas positif. En attendant que nous changions le mode d’organisation, ce qui ne tardera pas, nous demandons au moins que les crédits actuels ne soient pas en baisse.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Même position, pour les mêmes raisons, que précédemment.
M. Yoann Gillet (RN). C’est presque hors sujet, mais je regrette que de petites et moyennes communes qui pourraient prétendre à la DPV, parce qu’elles ont des quartiers prioritaires comptant un nombre important d’habitants et qu’elles ont donc des besoins d’investissement, ne bénéficient pas de cette dotation, contrairement à de grosses agglomérations. Les injustices sont réelles.
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Il est nécessaire d’augmenter les crédits de la politique de la ville, qui sont utiles compte tenu de l’organisation administrative actuelle. C’est la moindre des choses : si les zones en question ont été revisitées et agrandies récemment, les crédits n’ont pas bougé, ce qui fait que les dépenses par habitant sont en baisse.
Cette politique s’accompagne de beaucoup d’effets de bord et de biais. Dans de nombreux cas, l’éducation nationale n’applique pas certains dispositifs, car une prise en compte a déjà lieu dans le cadre de la politique de la ville – je pense aux cités éducatives ou aux cordées de la réussite. La promesse initiale était pourtant d’en faire plus, pour remettre à niveau des territoires sous-dotés dans le cadre du fonctionnement classique des administrations. Il faudra donc revoir de fond en comble la question.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CL296 de M. Yoann Gillet et II-CL216 de M. Bérenger Cernon
M. Yoann Gillet (RN). Cet amendement vise à revaloriser la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, à hauteur de l’inflation en 2024, soit 2,5 %. Dans un contexte économique qui place les collectivités territoriales face à de nombreux défis, il est indispensable de faire en sorte qu’elles puissent assurer la continuité de leurs services publics. Nous devons donc préserver leur capacité d’investissement.
Les gouvernements successifs ont passé leur temps à faire les poches des collectivités : elles ont donc de grandes difficultés à investir, ce qui a des conséquences pour les habitants et l’économie de nos territoires. À un an et demi des élections municipales, les projets sont d’habitude très nombreux et le secteur du bâtiment se porte bien, mais c’est exactement l’inverse qu’on observe. Vous êtes certainement tous sollicités par les fédérations départementales du bâtiment, car la situation est très mauvaise.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous demandons d’augmenter de 1,8 % la DETR, pour la caler sur l’inflation. Selon les calculs de l’AMF (Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité), le Gouvernement va prendre plus de 10 milliards aux collectivités territoriales. Il faut bien mesurer la catastrophe que cela laisse présager. Les collectivités devront arrêter des projets, élections ou non, parce qu’elles n’auront plus les moyens de les mener, et elles ne pourront plus participer à la bifurcation écologique.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Je m’inscris en faux contre l’affirmation selon laquelle les communes ne pourront pas s’engager dans la transition écologique. Certes, les moyens du fonds vert diminuent, mais il existe encore. D’autre part, vous ne parlez pas des aménités rurales dont la prise en compte permet à environ 9 000 communes d’engager la transition écologique, comme toutes nos collectivités. Enfin, je pose la même question que précédemment : de quelle inflation parlez-vous ? Il est question tantôt de 1,8 % et tantôt de 2,5 %.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Ce qui compte en politique, ce ne sont ni les discours ni les actes, mais leur adéquation. Quand un Premier ministre commence son discours de politique générale en disant qu’il cherche des solutions venant « d’en bas », c’est-à-dire du terrain, pour être plus courtois, et qu’on diminue, comme vous le reconnaissez vous-même, les crédits du fond Vert, qu’on baisse les dotations et qu’on s’en prend aux collectivités locales, un problème de cohérence et de stratégie se pose.
C’est à ce niveau, en effet, que se joue la capacité de transformation stratégique des territoires, y compris en matière de dynamique économique. J’ai vécu et travaillé longtemps en Charente, territoire très rural, et en Seine-Saint-Denis, territoire très urbain : c’est là où se concentrent les plus grandes difficultés – désertification des territoires, absence des services publics et isolement d’un certain nombre de personnes – qu’il est urgent d’abonder les crédits. Ces amendements sont vraiment cruciaux pour les prochaines décennies.
M. Jordan Guitton (RN). Nous sommes, dans mon groupe, des partisans de la croissance. On doit, pour la favoriser, partir du plus petit échelon et des plus petites collectivités territoriales. Si nous proposons d’augmenter la DSIL et la DETR afin de les aligner sur l’inflation, c’est simplement pour que nos collectivités aient des leviers de croissance. Ce sont elles qui investissent, par des marchés publics, et qui parfois récupèrent et rénovent des friches pour relancer des petits commerces ruraux. Ce n’est pas en réduisant la dotation globale de fonctionnement (DGF), la DSIL et la DETR que nous allons retrouver de la croissance économique. Les petites communes ont besoin de ces leviers. Vos réponses, excusez-moi, ne nous convainquent pas.
M. Hervé Saulignac (SOC). Je ne veux pas minimiser la portée de ces amendements, mais la principale question n’est pas celle du maintien de la DETR à son niveau de 2024, alors qu’elle devrait être indexée sur l’inflation : cela représente quelques millions d’euros – 18 pour un amendement et 26 pour l’autre –, quand le fonds Vert est amputé de 1,5 milliard. Or c’est ce fonds qui est destiné à la transition écologique. La dotation d’équipement des territoires ruraux permet, en fonction des préfets, de financer toute une diversité d’équipements dont certains ne relèvent pas du tout de la transition écologique. Le vrai scandale, c’est le siphonnage du fonds Vert. Nous voterons évidemment ces amendements, mais il faut être conscient que leur portée est extrêmement limitée.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). L’AMF, qui a fait son travail de façon rigoureuse, estime qu’un peu plus de 10 milliards d’euros sont pris aux collectivités.
En n’allant pas chercher les recettes là où elles se trouvent et en multipliant les fonds dédiés, dont les montants subissent par ailleurs des baisses drastiques, vous remettez en cause la libre administration des collectivités territoriales, ce qui pose un véritable problème démocratique. Ne nous dites pas ensuite en versant des larmes de crocodile que personne ne veut se présenter aux élections municipales.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je rappelle à notre collègue Saulignac que le fonds Vert ne disparaît pas. C’est une création récente qui permet d’aider les collectivités à investir dans la transition écologique.
Nous sommes nombreux à être des élus locaux : ce qui nous insupporte, c’est qu’on rejette sur les collectivités territoriales une partie du déficit. Une partie d’entre elles sont d’accord pour participer à l’effort collectif, mais doivent-elles toutes le faire au même niveau ? Certaines sont engagées depuis longtemps dans des efforts, mais pas d’autres. Mon groupe propose de travailler sur un système de bonus et de malus qui permettrait de continuer à accompagner les collectivités vertueuses.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Nous ne réduisons pas les dotations. Si on ne tient pas compte de l’inflation, elles seront moindres, c’est vrai, mais il faut faire attention à ce qu’on dit.
Nous soutenons tous les collectivités territoriales et les élus locaux, qui s’engagent auprès des habitants de nos territoires, et nous voudrions tous que les différentes collectivités puissent bénéficier de dotations et de fonds leur permettant de mener les investissements qu’elles souhaitent. Cependant, veuillez m’en excuser, un principe de réalité budgétaire s’impose.
On peut se lancer dans des débats politiciens sur les années écoulées ; pour ma part, je préfère regarder ce qu’il est possible de faire avec le budget actuel. Nous devons continuer à soutenir au maximum les collectivités et les élus locaux dont l’immense majorité a conscience de ses responsabilités. Comme l’a dit M. Gosselin, c’est plutôt sur les modes de fonctionnement et d’attribution des différentes dotations que nous devrions nous pencher sérieusement. Avis défavorable sur les deux amendements.
La commission rejette l’amendement II-CL296 et adopte l’amendement II-CL216.
Amendements II-CL304 de M. Hervé Saulignac et II-CL207 de Mme Élisa Martin (discussion commune)
M. Hervé Saulignac (SOC). Notre amendement est absolument vital pour les communes touchées par les inondations des 17 et 18 octobre dans mon département, l’Ardèche, mais aussi la Loire, la Haute-Loire, le Rhône ou la Lozère. De petites communes ont subi des dégâts extrêmement importants. Celle de Limony, au nord de l’Ardèche, qui compte 800 habitants et une capacité d’autofinancement annuelle de 130 000 euros, devra réaliser des millions d’euros de travaux. À Saint-Julien-d’Intres, qui a 315 habitants, il faudra faire plus de 500 000 euros de travaux. Or ce PLF prévoit une diminution des crédits pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques. Il est absolument incompréhensible de n’inscrire que 40 millions d’euros dans le PLF pour toute la France et toute l’année, alors que d’autres événements climatiques sont à craindre. Nous proposons donc 60 millions d’euros supplémentaires.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il s’agit là non pas du fond vert et de la transformation de certaines logiques d’aménagement du territoire, mais de situations urgentes face auxquelles nous devons faire preuve de solidarité avec des communes et des habitants fortement touchés par des inondations.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. C’est évidemment une question très importante. Mon département, le Rhône, a été particulièrement touché et nous pensons tous profondément aux différentes victimes. Par ailleurs, ce genre de problème ne cessera pas de se poser dans les années qui viennent.
Les événements que vous citez n’ont pas été budgétés, car ils ont eu lieu après le dépôt du PLF. Il faudra regarder comment le soutien aux collectivités concernées sera financé : à ce stade, je ne suis pas en mesure d’estimer si l’enveloppe prévue cette année est suffisante ou s’il faudra redéployer des crédits. Je vous propose de retirer ces amendements pour que nous puissions en rediscuter plus précisément en séance lorsque nous aurons une estimation plus juste des coûts. Je vous propose également de regarder la proposition de loi visant à assurer l’équilibre du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles qui a été adoptée hier à l’unanimité par le Sénat – cela pourrait être un véhicule intéressant.
M. Hervé Saulignac (SOC). Vous dites, madame la rapporteure pour avis, ne pas savoir si les montants budgétés sont suffisants : ils s’élèvent à 40 millions d’euros alors que l’estimation, à la louche, des dégâts, portant sur des biens non assurés, est d’un demi-milliard. Mon amendement est très raisonnable : il ferait passer les crédits budgétaires de 40 à 100 millions d’euros.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Avec les inondations dramatiques qui ont touché notre pays, nous ne sommes qu’au début de ce problème, qui a des conséquences en chaîne. Outre les gens qui ont été touchés individuellement, des équipements collectifs comme les routes ou les transports sont également affectés, et plus on attend pour réparer, plus cela coûte. Ce n’est pas vraiment de l’argent qu’on dépense car augmenter les crédits proposés permettra des économies à plus long terme, puisque les inondations peuvent paralyser complètement des réseaux de transport des marchandises et des personnes.
M. le président Florent Boudié. Je vais réfléchir à ce concept d’argent qu’on ne dépense pas.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Cet amendement est bien le minimum. Il s’agit presque d’un amendement d’appel pour engager la vraie discussion sur la bifurcation écologique du pays. Les collectivités seront concernées à tous points de vue, à la fois par la révision du régime assuranciel et par la nécessité de repenser les dotations de l’État. Les conséquences ne sont pas seulement matérielles, car des écosystèmes du vivant sont détruits. Les enjeux sont donc nombreux.
Lorsque le Premier ministre, presque dès son discours inaugural de politique générale, parle de dette écologique – et même si je ne suis pas d’accord avec cette expression, parce que la dette ne se rembourse pas –, on voit ce qu’il veut dire, et cela implique que nous mobilisions les moyens nécessaires, lorsque se produit un imprévu aussi grave, pour soutenir nos collectivités.
M. Ian Boucard (DR). Nous souscrivons évidemment aux propos de M. Saulignac comme Mme la rapporteure pour avis. En réalité, personne ne peut savoir à ce jour combien coûtera cette catastrophe et, de fait, l’amendement est encore insuffisant pour couvrir l’ensemble des dégâts causés par les catastrophes naturelles que notre pays a connues quasiment sur tout son territoire, que ce soit chez vous, en Ardèche, monsieur Saulignac, en Seine-et-Marne ou dans de très nombreux départements encore.
Plutôt que cet amendement ou un avis favorable de Mme la rapporteure qui, de toute façon, ne peut pas le chiffrer plus que nous, ce que j’aimerais entendre du Gouvernement, c’est une prise en compte générale des sinistres survenus dans l’ensemble des départements. Nous ignorons aujourd’hui s’il s’agira de 30 ou de 50 millions, mais en fait, ce sera certainement beaucoup plus à l’échelle du pays.
Nous ne réglerons pas ce problème aujourd’hui en commission des lois, mais le Gouvernement devra s’engager très largement sur cette question pour apporter son aide et ne pas laisser des communes de 300 habitants régler seules ce problème.
Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement II- CL304.
En conséquence, l’amendement II-CL207 tombe.
Amendement II-CL306 de M. Marc Pena
M. Marc Pena (SOC). Il vise à créer un fonds de soutien de 50 millions d’euros aux communes, à leur intercommunalité et à leurs groupements pour les dépenses afférentes aux installations de lutte contre le risque de submersions marines, notamment celles qui sont relatives aux digues et écluses. Cet amendement avait été adopté par la commission des finances dans le cadre du PLF pour 2024, mais n’a pas été retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité.
En effet, de nombreuses communes littorales, continentales ou sur nos îles, sont confrontées au vieillissement et à la dégradation de ces installations, qui nécessitent de lourds investissements qui ne sauraient être financés seulement par le produit de la taxe Gemapi – gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations –, laquelle, en outre, dans ces communes le plus souvent rurales, génère un rendement limité.
Afin d’accompagner ces territoires, il est donc proposé la création d’un fonds de soutien additionnel qui leur permettra de disposer de moyens à la hauteur des enjeux.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Votre préoccupation est tout à fait légitime. La taxe Gemapi présente des limites importantes, mises en évidence notamment par nos collègues sénateurs dans un rapport d'information publié en septembre 2024, qui souligne surtout le manque d'accompagnement des communes et les montants financiers limités dont elles disposent, et recommande la création d'un fonds de péréquation.
En tout état de cause, la réflexion doit être poursuivie. Nous ne pouvons pas nous contenter d'augmenter les crédits alloués au programme 122 sans garantie de création d'un quelconque fonds entièrement financé par l'État. Je demande donc le retrait de l’amendement.
M. Philippe Gosselin (DR). Les risques de submersion marine sont une vraie préoccupation, comme on le voit sur la côte atlantique ou sur les plages et dans les villes de la Manche. Ces risques incluent la délocalisation ou la relocalisation de certaines activités, qui peuvent alors venir en concurrence avec l’exploitation de terres agricoles. Il ne s’agit donc plus seulement, même si c’est déjà important, de protéger des habitations privées, mais également des activités économiques. Or les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) adoptés ces derniers mois dans plusieurs régions, notamment côtières, ne prennent pas nécessairement en compte ces facteurs. Je ne sais pas si le fonds proposé est à la hauteur des enjeux et j’ai tendance à penser que 50 millions ne suffisent pas, mais toujours est-il que nous devrions saisir cette occasion d’approfondir la réflexion sur cette question qui nous pend au nez.
Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CL213 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Préserver l’eau est une nécessité absolue, qui suppose des investissements, or les réseaux d’eau des communes ou intercommunalités sont vieillissants et présentent souvent des fuites importantes. L’amendement tend donc à consacrer une part du budget à la rénovation de ces réseaux.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Le plan Eau prévoit la mobilisation de 180 millions d’euros additionnels d’aides à compter de 2024, avec notamment des aides des agences de l'eau et des prêts à long terme de la Banque des territoires. Cette disposition concerne notamment les 2 000 communes fragiles face au risque de rupture d’alimentation en eau potable et les 170 points noirs identifiés comme présentant un taux de fuite supérieur à 50 %. Les aides des agences de l’eau sont conditionnées à une amélioration durable de la gestion du patrimoine des services publics d’eau potable. Je demande donc le retrait de l’amendement.
Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Les événements que nous avons observés dans notre pays et en Espagne illustrent la perturbation du cycle de l’eau liée au dérèglement climatique. Il est absolument irresponsable, voire criminel, de ne pas mettre les moyens nécessaires pour anticiper des situations que nous connaissons depuis des décennies et qui sont en train de se produire. Les dégâts matériels et les pertes de vies humaines que nous déplorons sont causés par ce manque d’anticipation et parce que nous continuons à alimenter les causes du dérèglement en produisant des gaz à effet de serre. C’est une question vitale.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL200 de M. Paul Molac
M. Paul Molac (LIOT). Le gel de la DGF en période d’inflation pèse lourdement sur le budget des collectivités. Je rappelle que cette dotation était indexée sur l’inflation jusqu’en 2011, avant de connaître une diminution. L’amendement vise donc à lier l’augmentation de cette dotation à l’inflation prévue, soit 1,8 %.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. La non-indexation de la DGF sur l'inflation est systématiquement – et à juste titre – dénoncée par les maires. Je rappelle qu'en 2018, pour la première fois depuis 2013, le Gouvernement a décidé de ne pas diminuer le montant de la DGF, laquelle a même connu une augmentation de 320 millions d’euros durant deux années consécutives, en 2023 et 2024.
Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement.
Amendements II-CL301, II-CL302 et II-CL303 de M. Arthur Delaporte
M. Arthur Delaporte (SOC). M. le président Boudié et moi-même sommes corapporteurs d’une proposition de loi d’initiative sénatoriale visant au report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, justifié par une situation économique et sociale très inquiétante. Ces amendements, dont le deuxième et le troisième sont des amendements de repli, visent à souligner le fait que le PLF ne prend pas en compte cette situation d’une gravité sans précédent. Dans la préparation de ce budget, en effet, le Gouvernement n’a pas même proposé de socle d’investissement, alors que le ministre des outre-mer a fait des annonces en ce sens.
L’Assemblée nationale a reçu une délégation transpartisane qui a demandé à rencontrer la plupart des groupes et diverses autorités gouvernementales. Elle a présenté à cette occasion le plan quinquennal de reconstruction de la Nouvelle-Calédonie, qui se traduit par un besoin d’investissement de 4,2 milliards d’euros sur cinq ans. En tout état de cause, le PLF actuel ne prévoit que des reconductions d’avances de fonds, ce qui n’est évidemment pas suffisant.
L’amendement II-CL301 vise à mobiliser 850 millions d’euros soit un cinquième des 4,2 milliards correspondant au plan quinquennal. Nous attendons que l’État assume sa responsabilité, car c’est lui qui est la cause du déclenchement des émeutes qui ont ruiné la Nouvelle-Calédonie, avec une perte de 20 % à 30 % de son PIB et une chute du même ordre des recettes des collectivités locales. Celles-ci sont aujourd’hui contraintes de faire des coupes budgétaires faute de visibilité sur la dotation de l’État, car au moins 25 % de leurs recettes fiscales propres ont été amputées. Cela se traduit notamment par la suppression de bourses et allocations. En outre, certaines collectivités, notamment dans la province Sud, ayant décidé de conditionner, par exemple, le bénéfice des bourses scolaires et des allocations logement à dix ans de résidence en province Sud, les personnes passées du Nord au Sud depuis moins longtemps n’ont pas accès aux aides sociales et ne disposent donc pas du moindre filet de sécurité. En outre, l’indemnisation du chômage – qu’il s’agisse du chômage partiel ou des allocations-chômage – est inférieure en Nouvelle-Calédonie à ce que prévoit le droit en vigueur en métropole, car la durée du chômage y est de neuf mois et le chômage partiel s’arrête en décembre prochain.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Je propose le retrait de l’amendement, afin que nous puissions évoquer plus précisément cette question très complexe avec le Gouvernement lors de l’examen du PLF en séance publique. À défaut, sagesse.
M. le président Florent Boudié. À titre personnel, je soutiens l’amendement II- CL301.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Ce matin, les rapporteurs Boudié et Delaporte ont évoqué les auditions auxquelles ils avaient procédé et nous avons voté à l’unanimité des dispositions qui auront des suites pour toutes les populations de Nouvelle-Calédonie Kanaky. Nous espérons que le processus électoral ira à son terme dans un climat que nous souhaitons tous apaisé, consensuel et démocratique. Il a également été dit que, dans ce contexte, chacun devait contribuer à apaiser le climat. L’un des éléments de cette contribution consiste aussi à montrer que l’État prend sa part de responsabilité dans la réparation des dégâts causés originellement par la décision du Président de la République.
M. le président Florent Boudié. Je précise que 400 millions d’euros ont été avancés par l’État aux collectivités territoriales depuis le mois de juillet jusqu’au mois d’octobre. Il était nécessaire de renouveler le financement par l’État de cette avance aux collectivités territoriales. C’est donc à ce jour le seul élément qui figure dans le PLF pour 2025 pour la Nouvelle-Calédonie, ce qui me semble tout à fait insuffisant.
M. Arthur Delaporte (SOC). Je remercie la rapporteure d’avoir émis un avis de sagesse. Nous attendons évidemment des réponses précises et des engagements conséquents de la part du Gouvernement mais, notre commission étant chargée d’émettre un avis et une intention générale, un vote favorable sur cet amendement serait de bon augure. Cela contribuerait à obtenir une réponse du Gouvernement et exprimerait la volonté de l’Assemblée nationale d’aider la Nouvelle-Calédonie à la hauteur des besoins.
M. le président Florent Boudié. Nous aurons cette discussion à dix-sept heures avec le ministre des outre-mer.
La commission adopte l’amendement II-CL301.
En conséquence, les amendements II-CL302 et II-CL303 tombent.
Amendement II-CL261 de M. Michel Castellani
M. Paul Molac (LIOT). Il vise à octroyer une dotation exceptionnelle de continuité territoriale de 50 millions d’euros à la collectivité de Corse afin de ne pas mettre à mal le service public de transport aérien et maritime de l’île. Pour rappel, la dotation de continuité territoriale (DCT) n’est plus indexée sur l’inflation depuis 2009.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Vous rappelez avec raison que la DCT a été gelée depuis 2009 alors qu'elle aurait dû suivre l'évolution de la DGF. Sur le fond, vous soulevez un vrai problème. En effet, si la DCT a été maintenue à 187 millions depuis 2013, elle a aussi fait l'objet de dotations complémentaires ponctuelles, notamment en 2023 à hauteur de 30 millions et en 2024 à hauteur de 40 millions.
Vous demandez aujourd'hui 50 millions supplémentaires. J'entends les arguments fondés sur les réelles difficultés que connaissent les transports corses et je sais que la ministre Catherine Vautrin y est aussi très sensible – elle s'est d'ailleurs rendue en Corse voilà quelques jours. Des discussions sont en cours actuellement au sein du Gouvernement à propos de l'éventuelle hausse de cette dotation et je pense qu’il serait plus judicieux d’attendre la séance publique pour en discuter avec le Gouvernement. Je propose donc le retrait de l’amendement.
M. Paul Molac (LIOT). Je le retire d’autant moins qu’il a été voté ce matin en commission des finances.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL197 de M. Paul Molac
M. Paul Molac (LIOT). Il vise à interpeller la ministre du partenariat avec les territoires sur la nécessité d’étendre la protection fonctionnelle à tous les élus locaux. En effet, ces derniers sont de plus en plus confrontés aux violences, menaces et outrages dans l’exercice de leurs fonctions. Si la protection fonctionnelle constitue un dispositif essentiel pour les accompagner, elle ne concerne toutefois qu’un nombre restreint d’entre eux : les exécutifs – maires, présidents d’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), présidents de conseil départemental ou régional – et leurs suppléants ou les élus qui ont reçu délégation. Rien ne justifie cette différence de traitement entre élus face à la violence.
La loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux avait demandé au Gouvernement un rapport sur l’extension de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux. Ce rapport a-t-il été remis au Parlement ?
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Je suis tout à fait d’accord avec vous. La protection fonctionnelle doit être étendue à tous les élus locaux, car il est insupportable qu’ils subissent des violences et des outrages de plus en plus fréquents et de plus en plus forts. J’attends un projet de loi beaucoup plus large sur le statut de l’élu, dans lequel cette extension devrait figurer. Je vous propose de retirer cet amendement d'appel et de le redéposer en séance pour obtenir de véritables engagements de la part du Gouvernement sur cette question cruciale pour notre démocratie.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL305 de Mme Marie-José Allemand
Mme Marie-José Allemand (SOC). Il vise à compléter la compensation au bloc communal pour l’élaboration des documents d’urbanisme sous la forme d’une aide exceptionnelle pour les communes ne disposant d’aucun document d’urbanisme et relevant du règlement national d’urbanisme (RNU).
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Il est vrai que certaines petites communes ne disposent pas des moyens humains et financiers permettant d'élaborer un document d'urbanisme mais, lorsque c’est le cas, elles peuvent décider de transférer cette compétence à l'EPCI, qui pourra y procéder. Je souhaiterais toutefois connaître plus précisément le nombre de communes concernées. En l’état, avis plutôt défavorable.
Mme Eliane Kremer (DR). Puisque la loi prévoit que la compétence d’urbanisme est du domaine des EPCI, nous nous acheminons donc vers des PLUI, ou plans locaux d’urbanisme intercommunaux. L’amendement n’a donc aucun intérêt.
Mme Marie-José Allemand (SOC). Mieux vaut prévenir que guérir et il faut bien commencer ainsi.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL297 de M. Yoann Gillet
M. Yoann Gillet (RN). Il s’agit d’un amendement d’appel. La situation de notre pays est critique et la France cumule des records d’impôts, de déficit et de dette, mais le nouveau gouvernement continue de faire s’envoler, dans son projet de budget, les dépenses publiques de l’État.
En 2015, le redécoupage de la carte des régions devait engendrer des économies. Le Rassemblement national avait, à l’époque, donné l’alerte et le temps nous a malheureusement donné raison. J’en veux pour preuve la situation de la région Occitanie, dont je suis élu, où le budget de Carole Delga atteint 3,55 milliards, soit 1 milliard de plus qu’à l’époque des deux anciennes régions fusionnées depuis lors. Ce sont, malgré la fusion censée rationaliser les coûts, 39 % de dépenses de fonctionnement supplémentaire. Posons-nous la question du devenir des régions – et, éventuellement celle de leur suppression.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. J’entends qu’il s’agit d’un amendement d'appel et que vous ne comptez pas supprimer purement et simplement des crédits alloués aux régions sans que les mesures de simplification que vous appelez de vos vœux aient été engagées. Je suis en partie d’accord avec vous sur le fond du problème, à savoir la nécessité de simplifier l’articulation des compétences et de réduire l’enchevêtrement, comme le recommande du reste le rapport Ravignon, qui évalue à 7,5 milliards le coût du millefeuille territorial. Toutefois, le PLF n’est pas le bon véhicule.
M. Yoann Gillet (RN). Le rapport Ravignon sous-évalue les économies nécessaires et le coût du millefeuille. Pour pouvoir imaginer des économies à court, moyen et long terme, il faut aussi se poser la question des compétences des collectivités, même si je suis très attaché, par exemple, à la clause de compétence générale des communes par exemple. De fait, les régions sont championnes du monde des dépenses sur des compétences qu’elles n’ont pas. Les exemples sont nombreux. Je pense notamment au cas de la région Occitanie, qui dispense ainsi de multiples subventions à SOS Méditerranée.
M. Hervé Saulignac (SOC). Ce message sur l’Occitanie est préoccupant. On a le droit de ne pas être d’accord avec Carole Delga, mais vouloir sanctionner toutes les collectivités du pays parce qu’on a un différend avec sa présidente de région en dit long sur le RN, plus soucieux de combats particuliers que de l’intérêt général du pays.
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Les compétences des régions comportent les transports en commun, avec le financement de la SNCF et des lignes de proximité, le développement écologique et la transition écologique – trois compétences auxquelles les différents groupes ont pu exprimer ce matin leur attachement. J’ai du mal à ne pas voir dans la proposition du RN une attaque ciblée contre une strate de collectivité qui joue son rôle parmi les autres strates, ainsi qu’une attaque contre du personnel politique, au lieu de propos de fond sur l’organisation de la décentralisation, sur les différents échelons territoriaux et sur la pertinence de certaines compétences à certains échelons. Je suis surpris que nous soyons saisis d’amendements aussi dogmatiques dans le cadre de cette commission. Le groupe Écologiste et social votera contre cet amendement.
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales.
Article 61
Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 61
Après l’article 61
Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement II- CL210 de M. Bérenger Cernon.
Amendement II-CL211 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il vise à réduire l’écart de DGF entre les communes rurales et urbaines.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Ayant travaillé dix ans pour l’Association des maires ruraux, je suis particulièrement consciente de la nécessité de corriger cet écart incompréhensible pour les habitants de nos espaces ruraux. Cependant, ce n’est pas au détour d’un amendement que nous pourrons le faire, et nous devons réfléchir au fond pour y parvenir. Je demande le retrait de l’amendement.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Aucun détour n’étant possible, nous sommes obligés de saisir l’occasion du budget pour poser la question – à moins que le président de la commission des finances ignore qu’un projet de modification des modalités de calcul de la DGF soit en gestation, mais il me semble que l’heure soit plutôt aux logiques d’austérité.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CL276 de Mme Marie-José Allemand
Mme Marie-José Allemand (SOC). Afin de renforcer la consultation des élus sur les choix de l’État et de ses représentants dans le département en matière d’attribution de la DETR, cet amendement vise à abaisser à 50 000 euros le seuil à partir duquel la commission des élus relative à la DETR constituée dans chaque département est saisie pour avis.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Cette question n’a absolument pas été soulevée au cours des auditions, le fonctionnement actuel de la DETR recueillant plutôt l’assentiment des élus.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 61 (suite)
Amendement II-CL209 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cet amendement quelque peu technique vise à lisser dans le temps les mécanismes financiers qui s’appliquent aux communes lorsqu’elles franchissent le seuil de 10 000 habitants.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Je demanderai le retrait de tous les amendements introduisant des modifications importantes de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Même si j’estime qu’une réforme d'ampleur doit être amorcée rapidement, il ne me semble pas pertinent de procéder à certaines modifications par amendement, sans évaluer précisément leurs impacts.
À défaut de retrait, j’émettrai donc un avis défavorable, non pas parce que la question ne mérite pas d’être traitée, mais au contraire parce qu’elle doit l’être de manière plus approfondie.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). J’entends votre propos, mais certains mécanismes pourraient être activés rapidement sans bouleverser toute l’organisation.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. La nécessité de traiter ce point de manière urgente n’est jamais ressortie des auditions que j’ai conduites.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL222 de M. Béranger Cernon
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Bien que favorables à la coopération intercommunale, nous voulons prévoir tous les moyens nécessaires, y compris techniques, pour nous assurer que les communes sont d’accord pour mettre en commun certaines ressources. L’intercommunalité n’a de sens, à nos yeux, que si elle est pleinement choisie et construite par les élus municipaux.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Le dispositif que vous souhaitez supprimer est une simple possibilité laissée aux communes de permettre la perception et la mise en commun de la DGF au niveau de l'EPCI, l’établissement public de coopération intercommunale, qui la redistribue ensuite selon des critères de richesse. Il est purement volontaire et requiert l'aval des communes, qui ne sont ainsi obligées à rien.
Je suis donc défavorable à la suppression de ce dispositif, qui permet d’appliquer le principe de solidarité au niveau intercommunal.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL212 de M. Béranger Cernon
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il s’agit ici de prévoir une participation des élus aux débats sur l’attribution de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL).
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Cette question, que j’ai choisi de développer dans mon rapport pour avis, a, pour le coup, été soulevée à de multiples reprises au cours des auditions. L’idée consistant à s’inspirer, pour la DSIL, de la procédure d’attribution de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) en créant une commission d’élus fait partie des pistes, mais la question mérite d’être étudiée de façon plus globale. D’autres hypothèses peuvent être envisagées, comme un cadre pluriannuel renforcé ou une fongibilité entre les enveloppes correspondant aux différentes subventions.
En attendant que cette réflexion puisse avoir lieu, demande de retrait.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Dans quel cadre ce travail prendrait-il place ?
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. J’aimerais pouvoir vous répondre. Je formulerai en tout cas des remarques et propositions, dont je suis d’ailleurs ravie de constater que certaines semblent pouvoir faire consensus. Le véhicule législatif adapté pour les concrétiser reste à trouver, mais j’y travaillerai très volontiers avec vous.
Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement.
Article 62
Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 62 non modifié.
Article 63
Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 63 non modifié.
Article 64
Amendement de suppression II-CL223 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Sans surprise, nous sommes opposés à la création du fonds de réserve prévu à l’article 64. Ce n’est pas aux collectivités qu’il revient d’organiser une péréquation entre elles : aucune n’est en position de faire preuve de solidarité vis-à-vis des autres puisque, à peu de chose près, toutes sont à l’os. Je songe par exemple à la ville de Grenoble, qui serait concernée alors qu’elle connaît de très grandes difficultés, dont témoigne la forte augmentation de la part communale de la taxe foncière que les élus ont été contraints de voter.
Nous préférerions que les recettes de l’État soient accrues par d’autres biais et réparties différemment entre les collectivités.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Il est vrai que certaines collectivités sont en difficulté, mais je ne partage pas votre constat selon lequel elles seraient toutes à l’os. Il me semble assez juste de prévoir que seules les plus importantes, qui jouissent d’une bonne situation financière, contribueront au fonds de réserve. Les efforts demandés préserveront les collectivités les plus fragiles.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Le fait de dépenser plus de 40 millions d’euros en frais de fonctionnement – puisque ce seuil fait partie des critères, même s’il n’est pas le seul – n’est pas un signe de bonne santé financière.
La commission rejette l’amendement.
La réunion est suspendue de seize heures quarante à seize heures cinquante.
Amendement II-CL194 de M. Ian Boucard
M. Ian Boucard (DR). L’article 64 prévoit la création d’un fonds dit de réserve fonctionnant sur le principe de l’autoassurance, dont les communautés d’agglomération qui n’étaient pas contributrices au fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) l’année précédente seraient exonérées. Or de nombreuses communautés d’agglomération sont à la fois contributrices et bénéficiaires du Fpic. Je propose d’exonérer toutes celles qui ne sont pas contributrices nettes.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Sur le principe, il pourrait paraître normal que seuls les établissements publics territoriaux (EPT) dont l’ensemble intercommunal n’était pas contributeur net au Fpic soient exonérés du fonds de réserve, pour recentrer le prélèvement sur les communes les plus aisées. Je préférerais toutefois que l'impact de cette mesure soit chiffré, afin de déterminer combien d'EPT supplémentaires seraient exemptés du prélèvement et si celui-ci resterait soutenable pour les seuls contributeurs nets.
Dans le doute, je vous invite donc à retirer votre amendement le temps que ces estimations nous parviennent.
M. Ian Boucard (DR). Comme elles risquent fort de ne pas nous être transmises dans les temps, je le maintiens.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL195 de M. Ian Boucard
M. Ian Boucard (DR). Vingt conseils départementaux, sélectionnés en fonction de leur indice de fragilité sociale, ont été exonérés du prélèvement pour le fonds de réserve. Cette année, plusieurs conseils départementaux ont bénéficié du fonds de sauvegarde, car ils cumulaient fragilité sociale et insuffisance de ressources. Il paraît donc incohérent de leur demander de contribuer au fonds de réserve. Par exemple, l’an dernier, le Territoire de Belfort, dont 98 % des dépenses sont contraintes, était éligible au fonds de sauvegarde à hauteur de 3 millions d’euros ; cette année, l’État lui ponctionne 3 millions d’euros…
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Je vous avoue avoir un peu de mal à comprendre votre amendement. L’article 64 prévoit que sont exonérés du prélèvement les vingt premiers départements éligibles au fonds de sauvegarde. Étant donné qu’ils sont actuellement quatorze, votre amendement est satisfait, à moins de considérer que le nombre de départements éligibles à ce fonds va notablement augmenter. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Ian Boucard (DR). L’indice de fragilité sociale défini à l’article 64 ne prend pas en compte le fonds de sauvegarde pour 2024, si bien que le Territoire de Belfort, qui était pourtant éligible au fonds de sauvegarde, à l’instar de treize autres départements, ne fait pas partie des vingt départements exonérés du versement au fonds de réserve, pas plus que la Haute-Marne. Or ces deux départements ne peuvent pas attendre de rentrées financières de métropoles qu’ils n’ont pas. C’est pourquoi je propose de les exonérer au même titre que les vingt autres. Mon amendement n’aurait pas de réel effet sur les finances publiques.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 64 non modifié.
Après l’article 64
Amendement II-CL322 de M. Emmanuel Duplessy
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous proposons de conserver les critères établis en 2024 du fonds de sauvegarde auquel quatorze départements ont été éligibles en raison de leur taux d’épargne brute et de leur indice de fragilité sociale. On compte parmi eux des départements ruraux en difficulté, tels que la Nièvre et la Creuse, des départements urbains, comme la Seine-Saint-Denis, et des départements d’outre-mer, comme la Guadeloupe et la Martinique. Le fonds de sauvegarde doit être abondé par l’État pour tenir compte de la hausse inévitable du nombre de ses bénéficiaires.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Le fonds de sauvegarde a été créé par la loi de finances initiale de 2020 et doté à l’origine de 53 millions d’euros. Son montant a été porté à 106 millions d’euros dans le cadre de la loi de finances pour 2024. Les modalités de répartition du fonds arrêtées en 2024 tiennent compte d’un prélèvement sur recettes (PSR) temporaire qui n’est pas reconduit en 2025. Je m’interroge sur la faisabilité technique de votre amendement. Avis défavorable.
M. Philippe Gosselin (DR). Au-delà de la question de la faisabilité technique, qu’il faudrait résoudre, les faits sont têtus. Un nombre croissant de départements sont en difficulté et la plupart ont tiré la sonnette d’alarme. Leurs dépenses de fonctionnement explosent, notamment dans le domaine social, et sont mal voire pas compensées par l’État. Alors qu’il y avait en 2024 une trentaine de départements en difficulté, dont une quinzaine en très grande difficulté, il y en aura soixante ou soixante-cinq en 2025. Il y a urgence à agir.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CL273 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Il serait intéressant que le Gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant la pertinence d’une fusion de la DSIL et de la DETR, comme le réclament certaines collectivités territoriales et certains préfets. Nous veillerions bien sûr à préserver l’enveloppe globale. Cela permettrait de simplifier les demandes de subventions des collectivités territoriales. Peut-être pourrions-nous également travailler avec le Gouvernement sur la représentativité des élus au sein des commissions d’attribution.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Nombre d’élus et d’associations d’élus, quelle que soit la collectivité concernée et sa taille, semblent réclamer cette fusion. Je suis très favorable à votre demande de rapport afin d’augmenter la lisibilité et la sûreté des dotations aux collectivités. Lors de son audition, le 15 octobre, Catherine Vautrin s’était également montrée favorable à une telle réflexion.
M. le président Florent Boudié. Sans doute faudra-t-il créer un jour un service central de rédaction des rapports, car nous en demandons beaucoup…
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Je n’ai, par principe, rien contre les demandes de rapport. Néanmoins, à l’heure du tout-économies, où l’on prend d’abord aux collectivités locales et où on les empêche de se déployer comme il le faudrait et de mener à bien leurs missions principales, je crains que la fusion de ces deux fonds ne conduise presque à coup sûr à une diminution du montant cumulé des deux dotations.
M. Philippe Gosselin (DR). Je partage un peu l’inquiétude de Pouria Amirshahi. J’aime bien les jardins à la française : on n’y voit qu’une tête, mais le jour où la tête tombe, il n’y en a plus. Autrement dit, je me méfie de ces regroupements qui auraient pour effet, le jour où l’on souhaitera faire baisser les crédits, de les écrêter davantage encore. On notera tout de même que la DSIL et la DETR n’ont pas les mêmes conditions de recevabilité, ce qui offre une certaine souplesse, appréciable. Le rapport, toutefois, pourrait permettre d’y voir plus clair. Il pourrait aussi être l’occasion de préciser les modalités d’une plus grande coopération entre les élus et l’administration.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CL208 de M. Bérenger Cernon
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous souhaitons également obtenir un rapport sur l’évolution des finances locales depuis 2012, autour de trois éléments principaux : les effets de l’accumulation des réformes – la compensation de la suppression de la taxe d’habitation par exemple ; l’évaluation du manque à gagner du fait des baisses des dotations ou de leur non-indexation sur l’inflation ; les conséquences des transferts opérés plus ou moins subrepticement – les communes organisent et financent désormais intégralement les temps périscolaires.
S’agissant des rapports, j’entends ce que vous dites en matière de mobilisation des services. Mais voilà les pauvres moyens dont disposent les députés pour essayer de contrôler un peu ce que fait le Gouvernement…
M. le président Florent Boudié. Nous pourrons demander un rapport d’évaluation sur les rapports demandés par chaque loi.
Mme Blandine Brocard, rapporteure pour avis. Il existe pléthore de rapports sur ce sujet, madame Martin : rapports annuels de la Cour des comptes sur les finances publiques locales, rapports de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales, rapport sur les finances locales annexé chaque année au PLF, sans compter les différents rapports parlementaires que l’on oublie trop souvent de lire. Pour avoir auditionné la direction générale des collectivités locales (DGCL), je sais qu’elle sera ravie de vous fournir tous les chiffres que vous souhaitez. Tous les chiffres sont d’ailleurs en libre accès et je vous souhaite bien du courage pour étudier un tel volume de données !
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). D’une certaine manière, votre réponse me conforte dans ma requête. Dans cette forêt de chiffres, il faut rendre les informations lisibles et compréhensibles par tout un chacun, en particulier le pauvre député français qui n’a pas tant de moyens pour contrôler l’action gouvernementale.
La commission rejette l’amendement.
M. Bertrand Hauchecorne, membre du conseil d’administration de l'AMRF, maire de Mareau-aux-Prés
Mme Helesbeux, chargée de mission
M. Antoine Homé, maire de Wittenheim, premier vice-président de l’APVF
M. Franck Claeys, délégué adjoint
Mme Louise Cornillère, conseillère finances locales
Mme Sarah Bou Sader, conseillère relations parlementaires
M. Emmanuel Sallaberry, maire de Talence, co-président de la commission des finances de l’AMF
Mme Charlotte de Fontaines, responsable des relations avec le Parlement
M. Yoann Blais, adjoint au sous-directeur des finances locales et de l’action économique
M. Julien Rouge, chef de bureau des concours financiers de l’État
Échanges avec M. Jean-Marc Galland, sous-préfet de Villefranche-sur-Saône, les services de la sous-préfecture et les services de la préfecture du Rhône
Échanges avec M. Daniel Pommeret, maire d’Anse, président de la communauté de communes Beaujolais Pierres Dorées ;
Échanges avec M. Yves Millardet, président du directoire de l’Agence France Locale.
CONTRIBUTION ÉCRITE
Intercommunalités de France
([1]) Instruction relative aux règles d'emploi des dotations de soutien à l'investissement des collectivités territoriales en 2024, 23 février 2024 : https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf/circ?id=45523
([2]) Cette commission est composée des représentants des maires des communes éligibles à la DETR et des présidents d’EPCI éligibles, ainsi que de certains députés et sénateurs élus dans le département.
([4]) Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.
([5]) Observatoire des finances et de la gestion publique locales, L’ampleur des investissements locaux actuels, octobre 2024.
([6]) Institute for climate economics (I4CE), Panorama des financements climat des collectivités locales, septembre 2024.
([8]) Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, article 25.