Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

–  Projet de loi de finances pour 2023 (n° 273 – seconde partie) : examen pour avis des amendements sur la mission Enseignement scolaire (MM. Philippe Fait et Christophe Marion, rapporteurs pour avis)              2

– Présences en réunion..............................37

 

 

 

 

 


Jeudi
20 octobre 2022

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 5

session ordinaire de 2022-2023

Présidence de
Mme Isabelle Rauch,
Présidente

 


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La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Mme Isabelle Rauch, Présidente)

 

La commission examine pour avis les amendements sur la mission Enseignement scolaire du projet de loi de finances 2023 (n° 273 seconde partie) (MM. Philippe Fait et Christophe Marion, rapporteurs pour avis).

Mme la présidente Isabelle Rauch. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle l’examen des crédits de la mission Enseignement scolaire.

Comme cela vous a été indiqué, un certain nombre d’amendements de crédits, principalement mais pas exclusivement sur la mission Enseignement scolaire, ont été déclarés irrecevables ce matin.

Cette situation résulte de l’application d’une exigence de la commission des Finances et de la Séance s’agissant des crédits de personnel, dits « du titre 2 ». Lorsqu’un amendement déplace des crédits de ce titre d’une action d’un programme vers une action d’un autre programme, l’amendement doit l’indiquer et préciser pour quel montant. Il s’agit de permettre le respect du principe de la fongibilité asymétrique en exécution.

Nous nous devons donc d’appliquer les mêmes règles de recevabilité que la commission des Finances et la séance pour éviter que des amendements examinés, voire adoptés, par notre Commission soient écartés de l’examen par la commission des Finances et surtout de l’examen en séance publique. De telles asymétries dans les décisions sont sources d’incompréhensions et sont régulièrement déplorées en conférence des Présidents.

Dans la mesure où nous examinons aujourd’hui les premières missions de la législature, j’ai finalement décidé de permettre l’examen des amendements portant sur des actions dont la totalité des crédits sont en titre 2 même si la mention de ce titre manquait, comme le Président Coquerel l’a fait à la commission des Finances. Je ne ferai pas preuve de la même souplesse pour les missions qui seront examinées à partir de la semaine prochaine.

Je compte sur votre compréhension. Vous pourrez rectifier les amendements qui posent problème avant leur dépôt en vue de la séance publique. Je vous invite à la vigilance lors du dépôt des amendements sur les autres missions que nous aurons à examiner.

Article 27 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-AC32 de M. Roger Chudeau.

M. Roger Chudeau (RN). Cet amendement vise à créer un programme dédié à l’éducation prioritaire. Cette politique publique, créée en 1981, repose sur une allocation des moyens différenciée et plus équitable, pour assurer l’application effective du principe d’égalité des chances.

La Cour des comptes évalue à 1,7 milliard d’euros par an le surcoût induit par les équivalents temps plein (ETP) supplémentaires et les nombreuses primes d’indemnités versées au personnel. En outre, les crédits de titre 2 dédiés aux personnels affectés structurellement dans les établissements concernés s’élèvent à 6 milliards d’euros. Le budget total de l’éducation prioritaire s’élève donc à près de 8 milliards d’euros. Les crédits du programme proposé sont prélevés sur les programmes 140, 141, 230, 139 et 214.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. La fusion des crédits consacrés à l’éducation prioritaire au sein d’un seul programme ne nous semble pas souhaitable. L’éducation prioritaire en primaire, par exemple, fait partie intégrante de l’enseignement scolaire du premier degré et ne doit pas être traitée à part.

Si une telle fusion peut donner l’impression de donner une visibilité à une politique publique importante par son contenu et son volume, les moyens des politiques relatives à l’éducation prioritaire sont essentiellement de la masse salariale, sous forme de rémunérations et de primes. Les extraire de la masse salariale globale est compliqué, et ingérable du point de vue budgétaire. En outre, cela compliquerait les mouvements de personnels, pour un bénéfice assez réduit, d’autant que nous avons d’ores et déjà une vision globale des moyens consacrés à l’éducation prioritaire.

Celle-ci est une préoccupation importante du ministère, comme en témoignent la poursuite du dédoublement des classes, qui mobilisera cette année plus de 1 500 ETP, l’abondement des crédits consacrés aux contrats locaux d’accompagnement (CLA), et la revalorisation des bourses de 4 %. Avis défavorable.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Nous sommes en désaccord avec cette proposition, qui aurait pour effet d’isoler plus encore l’éducation prioritaire du reste de l’enseignement public, alors qu’elle en fait partie intégrante. Il ne faut créer aucune barrière, même fictive, entre l’éducation prioritaire et les autres établissements. Au demeurant, 36 % des élèves habitant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) ne sont scolarisés ni en réseau d’éducation prioritaire (REP) ni en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+).

Certes, l’éducation prioritaire induit un surcoût, qui s’élève à 876 euros par élève et par an, soit un coût supérieur de 22 % à celui d’un élève scolarisé ailleurs. Ce surcoût représente 4 % des moyens consacrés aux écoles et aux collèges, pour une proportion d’élèves défavorisés de 30 %. Si l’éducation prioritaire donne peu de résultats, c’est, d’après la Cour des comptes, en raison de la ségrégation résidentielle et des stratégies de contournement de la carte scolaire.

M. Roger Chudeau (RN). Il ne s’agit pas d’isoler l’éducation prioritaire, mais de la distinguer. Cette politique publique mérite d’être distinguée et pilotée. En créant un programme spécifique, doté de moyens significatifs, nous permettons à l’administration et au ministre de piloter cette politique publique qui, comme son nom l’indique, est prioritaire. Il ne s’agit pas de la stigmatiser, mais au contraire de la mettre en relief, et de démontrer l’importance que la représentation nationale accorde à cette priorité éducative.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-AC169, II-AC170, II-AC171 et II-AC168 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement II-AC169 vise à instaurer la gratuité réelle de l’éducation. Notre école publique, malheureusement, n’est pas gratuite. Le coût de la scolarisation représente une dépense importante pour les familles, qui va de quelques centaines d’euros pour un élève d’école maternelle à plus de 1 500 euros pour un lycéen de la voie professionnelle. Cette atteinte au principe de gratuité, lequel découle de l’obligation scolaire, contrevient au principe d’égalité d’accès de tous les élèves à l’éducation.

Nous proposons la gratuité des cantines scolaires, du matériel scolaire, des sorties scolaires, des activités périscolaires et du transport scolaire, soit une dépense d’environ 7 milliards d’euros, que le budget de la nation peut parfaitement financer : la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) représente une perte de recettes fiscales de 8 milliards d’euros. Nous pouvons financer immédiatement cette mesure forte et profondément républicaine de justice sociale.

Les amendements II-AC170, II-AC171 et II-AC168 sont des amendements de repli limitant le champ de cette mesure aux établissements REP, REP+ et publics. Fin août, le ministre Olivier Klein appelait à l’application de cette mesure dans les établissements situés en QPV.

Le budget de la France peut tout à fait la financer. Son coût est minime rapporté au budget de l’Éducation nationale, et elle est indispensable en ces temps de grande difficulté sociale, où la pauvreté s’étend. Un élève sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. La gratuité est un enjeu particulièrement prégnant.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Chacun connaît la difficulté dans laquelle se trouvent certaines familles. Pour la soulager, de nombreuses dispositions ont été adoptées, notamment des fonds sociaux, des bourses et le dispositif « cantine à un euro ». Les fonds sociaux alloués à l’enseignement public et privé dans le projet de loi de finances pour 2023 atteignent un total de 54 millions d’euros, soit un montant très largement supérieur aux crédits consommés en 2022. Les bourses ont été revalorisées de 4 % à la rentrée pour tenir compte de l’inflation, en sus de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) et des crédits pédagogiques permettant l’achat de certains manuels.

Par ailleurs, les compétences visées par les amendements relèvent des collectivités territoriales. Elles feront l’objet de financements renforcés de la part de l’État, par le biais de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Enfin, prélever plus de 6 milliards d’euros sur les 8,4 milliards d’euros destinés à l’enseignement privé pose un problème de constitutionnalité. Le principe de liberté de l’enseignement impose la participation de l’État au financement des établissements privés, pour garantir leur existence et leur fonctionnement.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Les dispositions énumérées par le rapporteur pour avis ont fait leur temps. Le dispositif « cantine à un euro » concerne 18 000 élèves en France. Quant aux fonds sociaux, de plus en plus de parents n’y recourent pas pour des raisons de dignité. Leur montant a été réduit lors du précédent quinquennat car ils n’étaient pas intégralement consommés.

Il s’agit de procéder à une mise à jour « 2.0 », afin d’instaurer un droit commun pour tous les enfants, indépendamment du revenu des familles, grâce aux revenus de l’État. Il faut renouveler la répartition de l’impôt pour faire disparaître toute discrimination des enfants en matière d’accès plein et entier à l’école et permettre la liberté pédagogique des enseignants.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Certes, le dispositif « cantine à un euro » doit être davantage développé et promu auprès des collectivités territoriales. Elles sont toujours plus nombreuses à l’adopter. Se l’approprier – c’est un ancien élu local qui parle – demande du temps.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC179 de M. Rodrigo Arenas.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Cet amendement de double repli prévoit, à l’unisson du ministre Olivier Klein, la gratuité des fournitures scolaires pour supprimer toute discrimination entre les enfants. Les enjeux sont écologiques – supprimer le plastique –, de genre – éviter que les stylos des filles soient roses et ceux des garçons bleus – et pédagogiques – dans certaines écoles, les circulaires du ministère ne sont pas appliquées, ce qui pèse sur le budget des parents, surtout s’ils se fournissent dans la grande distribution.

Pour éviter des biais de consommation et des biais pédagogiques, pour soutenir les mesures éducatives du Gouvernement et du ministère de l’Éducation nationale et compte tenu de l’impact des fournitures scolaires sur la liberté pédagogique des enseignants, nous proposons que les fournitures scolaires soient prises en charge par la puissance publique, grâce à un soutien aux collectivités territoriales, qui jouent le rôle d’opérateur en la matière. Il faut que tous les enfants aient accès au même pack de fournitures scolaires pour que l’école fonctionne correctement et de la même façon partout sur le territoire national.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. La mesure proposée est de la compétence des collectivités locales. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Une enquête du comité national d’action laïque (CNAL) publiée en 2019 démontre que 52 % des familles d’enfants scolarisés dans le premier degré déclarent être sollicitées pour acheter des fournitures scolaires, et que 26 % d’entre elles disent être en difficulté pour ce faire. Par ailleurs, 42 % des familles sont sollicitées pour participer aux frais des sorties pédagogiques, ce qui constitue une difficulté pour un grand nombre d’entre elles. Cela pose des problèmes en matière d’égalité d’accès et de réussite éducative pour les élèves issus des catégories populaires.

Nos amendements proposent de doter les collectivités locales des moyens permettant la mise en œuvre des politiques publiques de l’éducation. Il ne s’agit pas de leur substituer l’État, mais de leur donner les moyens de mener des politiques publiques ambitieuses pour tous les élèves.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. D’après mon expérience d’élu local, les sorties scolaires sont gratuites. En théorie, aucune participation n’est demandée aux familles. Les caisses d’école prennent en charge l’intégralité de leur coût. S’agissant des fournitures scolaires, l’allocation de rentrée scolaire sert en priorité à aider à leur acquisition.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC172 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Fin août, le ministre délégué chargé de la ville et du logement a dit : « J’ai envie, avec le ministre de l’Éducation nationale, de travailler pour la rentrée 2023 à une procédure qui ferait que, dans les quartiers populaires en tout cas, les enfants aient tous leurs fournitures ». Nous partageons cet appel à la gratuité des fournitures scolaires, même si notre ambition dépasse celle du ministre.

Concrétiser sa proposition à la rentrée prochaine coûte 120 millions d’euros, ce qui n’est pas hors de portée, surtout à l’aune des recettes soustraites au budget de l’État, notamment les 8 milliards de la CVAE, soit près de soixante-dix fois plus. Tel est le sens de l’amendement.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Ancien élu local d’une commune comportant des QPV, j’ai mis en œuvre pendant quinze ans les dispositions précitées, avec toute l’énergie que l’on peut y mettre. J’appelle à ne pas différencier les publics. Avis défavorable.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Puisque nous en sommes à décliner nos états de service, je suis un ancien représentant de parents d’élèves, pour lesquels les fournitures scolaires sont un vrai sujet de préoccupation. Je m’étonne qu’un rapporteur pour avis, membre de la majorité qui plus est, suggère que la mesure proposée par le ministre Olivier Klein est impossible à mettre en œuvre. Dont acte.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement II-AC212 de M. Idir Boumertit.

Amendements II-AC182 et II-AC181 de M. Rodrigo Arenas.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Ces amendements tirent les conséquences du fait que 40 % des communes proposent aux familles l’application du quotient familial. Il en résulte une inégalité des enfants en matière d’accès à l’alimentation. Au demeurant, le système fondé sur le quotient familial a vécu. Il faut instaurer un droit commun pour tous les enfants. Par ailleurs, il s’agit d’un enjeu écologique et de santé publique : il faut s’affranchir des considérations que certains adultes veulent mettre dans l’assiette des enfants, dont il faut faire un outil de liberté.

Le repas pris à la cantine scolaire est un moment démocratique pour les enfants. Je défendrai ultérieurement un amendement faisant de la pause méridienne au collège la même lecture. Dans ce moment de liberté, où les adultes sont là pour surveiller et non pour éduquer, les enfants peuvent créer leurs propres projets et suivre leurs propres envies, dans le cadre scolaire et éducatif. Cela permettra aux élèves d’avoir leur moment à eux, autour d’un repas commun. L’amendement s’inscrit dans les enjeux auxquels le Gouvernement se dit sensible, notamment la lutte contre le réchauffement climatique et la promotion des circuits courts.

L’assiette n’est pas seulement un outil alimentaire, elle est aussi un outil éducatif. Déjà, dans les années 1970, l’alcool a été interdit dans les lycées. La cantine scolaire ne se contente pas d’alimenter ; elle éduque.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Plusieurs dispositions, notamment les fonds sociaux et le dispositif « cantine à un euro », sont consacrées à l’alimentation scolaire. Au cours de l’année scolaire 2020-2021, près de 2,5 millions de repas à moins d’un euro ont été servis dans les cantines des petites communes rurales.

Les fonds sociaux pour les cantines facilitent l’accès à la restauration scolaire du plus grand nombre de collégiens et de lycéens, afin d’éviter que certains enfants ne soient privés de repas au motif que leur famille ne parvient pas à prendre en charge les frais de restauration. L’aide est attribuée en déduction du tarif dû par la famille pour le règlement des frais de restauration, après déduction de la bourse nationale éventuelle.

Par ailleurs, les cantines scolaires sont de la compétence des collectivités locales, dont certaines expérimentent la gratuité. Les centres communaux d’action sociale (CCAS) prennent aussi leur part.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). La question de la gratuité de la cantine scolaire se pose, au moins pour les élèves des catégories sociales les plus défavorisées, qui déjeunent moins souvent à la cantine, notamment dans les collèges relevant de l’éducation prioritaire : 58 % des élèves en REP et 75 % des élèves en REP+ n’y déjeunent jamais. Les bourses ne couvrent pas tous les coûts de la demi-pension, même en cas de tarification sociale.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC134 de Mme Francesca Pasquini.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel vise à financer une campagne de communication auprès des parents d’élèves de collège et de lycée pour faire connaître l’existence des fonds sociaux pour les cantines. D’après l’association des maires de France (AMF), la moitié des communes ont appliqué à la rentrée une hausse allant de 5 % à 10 %. La fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) estime que plus de 2 millions d’élèves pourraient être privés d’accès à la cantine.

Il est impératif de protéger les enfants de cette hausse. L’inégalité d’accès à une alimentation en qualité ou en quantité satisfaisante renforce les inégalités sociales. Le ministère a confirmé que les crédits des fonds sociaux pour les cantines sont insuffisamment consommés.

Il faut financer une campagne de communication massive dès le mois de janvier 2023 et prévoir des campagnes de rappel, dont les modalités seront précisées par circulaire.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Une telle campagne de communication peut être laissée à l’initiative des rectorats, à budget constant. Le ministère mobilise les académies pour augmenter d’au moins 50 % la consommation des fonds sociaux. Sur le terrain, les services sociaux mènent des actions de d’information et de formation auprès des élèves. Avis défavorable.

Mme Cécile Rilhac (RE). Rapporteure pour avis de la mission Enseignement scolaire des deux derniers budgets, j’ai commandé en 2021 un rapport sur les fonds sociaux, qui a démontré que la sous-consommation des crédits est due à un manque non d’information mais de demande de la part des familles. Depuis deux ans, le déficit d’information de la part des personnels de l’Éducation nationale a été comblé, et la sous-consommation des crédits des fonds sociaux pour la cantine scolaire demeure. Elle a donc une autre origine.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Le système d’information n’est pas efficient. L’amendement de notre collègue Pasquini vise à le compléter et à accélérer les choses.

Prenons l’exemple de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « loi Egalim ». Elle prévoit notamment que les collectivités territoriales proposent des repas végétariens aux enfants. Or de nombreux maires disent ne pas en être informés. La transmission de l’information de l’Assemblée nationale aux acteurs concernés n’est pas efficace à l’aune des objectifs que nous nous donnons collectivement.

L’amendement vise à renforcer les dispositions que nous votons. Faute d’information, et aussi, souvent, d’accompagnement humain par des assistantes sociales et des conseillers principaux d’éducation (CPE), les chefs d’établissement portent une attention insuffisante aux enfants qui ont le plus besoin d’être accompagnés.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC183 de M. Rodrigo Arenas.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Il vise à la création d’une dotation de soutien financier à la neutralité plastique dans les cantines scolaires. Il s’agit de soutenir les initiatives des acteurs concernés au sein des collectivités territoriales, pour éviter que l’école ne contribue au sixième continent, fait de déchets plastiques flottant dans les océans. Il s’agit d’éduquer nos enfants au contournement du plastique, en leur montrant qu’il n’est ni utile ni nécessaire, et qu’il est même nuisible au monde que nous leur livrons, qu’ils auront certainement à cœur de réparer.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Cette compétence relève des collectivités locales, qui sont d’ores et déjà encouragées à réduire l’usage du plastique. Certaines mènent des actions ambitieuses. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-AC206 de M. Jérôme Legavre, II-AC166 de M. Paul Vannier, II-AC208 de M. Jérôme Legavre, II-AC210 de M. Idir Boumertit, II-AC207 et II-AC165 de M. Paul Vannier (discussion commune).

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Le rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publié le 3 octobre 2022, que nous avons évoqué hier avec le ministre Pap Ndiaye, rappelle que la rémunération des enseignants français est inférieure de 19 % à la moyenne de l’OCDE, notamment en milieu de carrière, ce que M. le ministre appelait poétiquement le « plateau de milieu de carrière ». L’amendement II-AC206 prévoit une revalorisation immédiate de 15 % des salaires des enseignants, quel que soit leur niveau de carrière.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement II-AC166 vise à mettre en lumière le mensonge du ministre Pap Ndiaye annonçant une augmentation de salaire de 10 % des enseignants.

La somme de 2 milliards d’euros en année pleine, au sein d’une masse salariale de 50 milliards d’euros, permet une augmentation de 4 % du traitement des enseignants. La prétendue hausse du point d’indice de 3,5 % porte l’augmentation des salaires à 7,5 %, soit 2,5 points de moins que les 10 % annoncés qui, au demeurant, restent insuffisants à l’aune de la très grave crise de recrutement qui frappe notre système éducatif et porte atteinte au droit à l’éducation des élèves ainsi qu’à la qualité du service public de l’éducation.

Le présent amendement prévoit une augmentation de 10 % du salaire des enseignants. Nous appelons la majorité être fidèle aux promesses du Gouvernement.

M. Hendrick Davi (LFI-NUPES). L’amendement II-AC208 est un amendement de repli visant à augmenter de 10 % la rémunération des enseignants, conformément à une promesse formulée par le président Macron cet été. « En euros constants et compte tenu de l’inflation, les enseignants français ont perdu entre 15 % et 25 % de rémunération au cours des vingt dernières années » : cette phrase n’est pas extraite du programme de La France insoumise, mais d’un rapport rédigé par le sénateur Les Républicains Gérard Longuet. En 1980, le traitement d’un enseignant équivalait à 2,3 SMIC ; aujourd’hui, il est de 1,2 SMIC.

Cette dévaluation du traitement des enseignants est allée de pair avec la dévalorisation de leur métier. Aux derniers concours de recrutement, 4 000 postes n’ont pas été pourvus.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). L’amendement II-AC210 prévoit une augmentation immédiate de 10 % du traitement des enseignants, pour respecter les promesses du Président de la République et du ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement II-AC165 est un amendement d’appel visant à augmenter le traitement des enseignants de 30 %, comme nous le proposions lors de la campagne présidentielle. Ce chiffre, qui fait sourire certains, correspond à la perte de pouvoir d’achat des enseignants depuis le début des années 1980. Ils commençaient alors leur carrière à 2,3 SMIC ; ils la commencent aujourd’hui à 1,2 SMIC.

Cet effondrement du pouvoir d’achat des enseignants est l’une des causes, sans doute la principale, de la très grave crise de recrutement qui frappe l’Éducation nationale. 4 000 postes non pourvus aux concours, c’est autant d’enseignants qui manquent dans les salles de classe, devant les élèves, aujourd’hui et dans les semaines à venir, dès lors que le vivier des remplaçants est épuisé.

Il en résulte un affaiblissement du service public de l’éducation et l’émergence d’un modèle d’école low cost, que nous refusons. Nous proposons au contraire de reconstruire notre service public de l’éducation, ce qui suppose une revalorisation massive de la condition enseignante.

M. Roger Chudeau (RN). Nous voterons contre ces amendements. Ils sont profondément injustes. Un professeur débutant est rémunéré 1 600 euros nets par mois, un agrégé hors classe enseignant en classe préparatoire 5 000. Augmenter tout le monde de 10 % n’a pas de sens.

Par ailleurs, les professeurs de République fédérale d’Allemagne sont, certes, payés deux fois plus que les nôtres, mais ils travaillent aussi bien plus et différemment. Des amendements visant à augmenter forfaitairement les enseignants sans poser la question de leurs obligations réglementaires de service ne sont pas acceptables.

Mme Cécile Rilhac (RE). Il est exact que le pouvoir d’achat des enseignants a substantiellement diminué depuis les années 1980. C’est pourquoi le budget de l’Éducation nationale augmente depuis trois ans.

Le précédent gouvernement, soutenu par notre majorité, a été le premier à investir autant dans la revalorisation salariale des enseignants : 500 millions d’euros en 2021, 400 millions d’euros en 2022 hors glissement vieillesse-technicité (GVT) et 635 millions d’euros pour l’année 2023. Nul ne conteste que les enseignants, en France, sont mal payés. Le ministre Pap Ndiaye a dit qu’aucun enseignant ne commencera sa carrière à moins de 2 000 euros par mois, s’inscrivant dans la continuité de son prédécesseur, Jean‑Michel Blanquer.

Monsieur Vannier, je ne puis vous laisser dire que notre école est low cost. Sans remonter aux années 1980, ce qui aboutirait à des chiffres en effet très mauvais, le nombre moyen d’élèves par classe de primaire a diminué sans discontinuer au cours des cinq dernières années. À l’échelle du ministère, le budget de l’éducation est équilibré.

Quant à la promesse présidentielle d’augmenter le revenu des enseignants de 10 %, elle est tenue. Il s’agit d’une moyenne calculée sur la masse salariale des enseignants des premier et second degrés. Il ne s’agit pas de donner la priorité au tout début de carrière, mais, de façon nouvelle, d’agir sur les vingt premières années de carrière. Une attention particulière est aussi portée aux fins de carrière, en vue d’accélérer l’accès à la hors classe et à la classe exceptionnelle.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Notre école est low-cost parce que le nombre moyen d’élèves par classe dans notre pays est très supérieur à la moyenne européenne. Sa diminution dans le premier degré est davantage due à des évolutions démographiques qu’à la mobilisation de moyens, même si celle-ci a eu lieu pour l’éducation prioritaire, ce qui est heureux, à ceci près qu’elle a été annihilée, dans ma circonscription par exemple, par le manque d’enseignants, qui oblige à regrouper des classes dédoublées.

Sur la question salariale, il est faux de dire que ce gouvernement et le précédent ont agi. Cette année encore, le projet de loi de finances confirme une baisse du pouvoir d’achat des enseignants. L’inflation est attendue à 6 % ; le point d’indice augmentera de 3,5 %. Le pouvoir d’achat des enseignants diminuera donc de 2,5 %, dans la continuité d’une évolution entamée dans les années 1980.

Nous appelons à une bifurcation des politiques éducatives et à un changement de cap radical. Vous vous inscrivez dans une forme de continuité qui nous rapproche d’un point de bascule. Je lance l’alerte sur le risque d’effondrement de notre service public de l’éducation.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Les augmentations de salaire, prévues par le PLF, sont déjà très importantes. Elles permettront, in fine, d’atteindre la revalorisation que nous souhaitons tous : 10 % au titre de ce que le ministre appelle le socle – les mesures prises dans le cadre du Grenelle de l’éducation, la hausse du point d’indice et la revalorisation inconditionnelle – et 10 % supplémentaires en moyenne avec l’instauration du « pacte » avec les enseignants.

Ces revalorisations recouvrent : pour 1,7 milliard d’euros, l’application en 2023 de la hausse du point d’indice décidée en juillet 2022, qui concerne 1,2 million d’agents du ministère ; pour 635 millions d’euros, la revalorisation catégorielle afin qu’aucun enseignant ne commence sa carrière avec une rémunération mensuelle inférieure à 2 000 euros nets ; pour 300 millions d’euros, la rémunération de missions complémentaires exercées par les enseignants dans le cadre du « pacte ». Ce montant est indicatif et ne présage pas du nombre d’enseignants qui adhèreront à la démarche. La définition des missions concernées fera l’objet d’une concertation au premier semestre de l’année 2023 ; pour 66 millions d’euros, la revalorisation d’autres professionnels de l’éducation et de la jeunesse, avec un effort particulier pour les personnels sociaux et de santé, les personnels administratifs et techniques et les personnels d’encadrement ; pour 73,5 millions d’euros, la revalorisation des personnels exerçant en éducation prioritaire.

L’effort, au demeurant important, est-il suffisant ? Il faut l’inscrire dans une logique pluriannuelle : le PLF 2023 est la première étape d’un chemin de hausse de la rémunération des enseignants, hausse appelée à se poursuivre dans les années qui viennent.

En outre, la rémunération n’est qu’un des éléments de l’attractivité du métier. Le rapport Longuet montre que même les pays qui rémunèrent leurs enseignants mieux que la France sont confrontés à des difficultés de recrutement – c’est le cas de l’Allemagne.

J’émets un avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC57 de M. André Chassaigne, amendements II-AC58 et II-AC60 de M. Stéphane Peu (présentation commune).

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Nous ne boudons pas notre satisfaction à l’égard de la hausse de la rémunération des enseignants en début de carrière que nous appelions de nos vœux.

Toutefois, en Seine-Saint-Denis, la crise des vocations ne concerne pas seulement les nouveaux enseignants mais aussi ceux qui sont déjà en poste. Ils sont nombreux à quitter le métier après dix, quinze voire vingt-cinq ans. Arrivés à la cinquantaine, ils sont épuisés, ils n’en peuvent plus pour de multiples raisons parmi lesquelles, outre le salaire insuffisant, un management devenu entrepreneurial.

Si nous voulons éviter que l’école publique dans les quartiers populaires ne se transforme en une immense école d’application à force de n’y affecter que des enseignants peu formés, il faut garantir une mixité entre novices et enseignants expérimentés. Pour ce faire, la revalorisation doit s’appliquer à l’ensemble de la grille salariale.

C’est la raison pour laquelle les trois amendements – l’un pour l’école élémentaire, l’autre pour le collège et le troisième pour le lycée – visent à augmenter les crédits de 300 millions d’euros afin d’augmenter les rémunérations de tous les enseignants.

Le groupe GDR-NUPES a également déposé une proposition de loi visant à répondre à la crise de recrutement des professeurs de l’Éducation nationale.

Nombre d’enseignants me disent leur lassitude et leur volonté de quitter le métier. Nous devons leur apporter une réponse.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. L’augmentation s’appliquant à compter de la prochaine rentrée scolaire, l’enveloppe est de 635 millions d’euros pour l’année 2023 ; elle sera de 1,9 milliard d’euros en année pleine.

Elle a pour objet d’améliorer la rémunération non seulement en début de carrière mais aussi pendant les vingt premières années, le ministre l’a répété hier. Les modalités de répartition de cette enveloppe tout au long de la carrière feront l’objet de concertations avec les organisations syndicales d’enseignants.

Il est vrai que certains enseignants s’interrogent sur leur métier et souhaitent le quitter. À cet égard, l’enseignement n’est pas différent du monde de l’entreprise dans lequel le sens du travail est aujourd’hui souvent questionné et les envies d’ailleurs fréquentes.

Il n’en reste pas moins que l’Éducation nationale n’accompagne pas suffisamment les enseignants désireux de donner une nouvelle orientation à leur carrière. Elle n’offre pas assez de perspectives ni de formation continue à ceux qui sont épuisés d’être devant des élèves depuis longtemps.

Mon avis est donc défavorable.

Mme Elsa Faucillon (GDR-NUPES). Monsieur le rapporteur pour avis, vos propos ne sont pas du tout de nature à nous rassurer.

Les démissionnaires sont plus nombreux depuis quelque temps, c’est un fait, mais vous ne pouvez pas pour autant minimiser ce qu’il se passe au sein de l’Éducation nationale.

La crise du sens du travail touche de très nombreux métiers mais elle est particulièrement aiguë chez les enseignants parce que c’est un métier pour lequel la vocation est très forte. Ceux qui l’exercent sont confrontés à un conflit éthique permanent, exacerbé par la politique du ministre Jean-Michel Blanquer pendant cinq ans.

L’école est censée être le lieu de l’émancipation des enfants et de leur construction d’être adulte. Les injonctions auxquelles les enseignants sont soumis et les moyens dont ils disposent sont contradictoires avec cette ambition, qui est souvent à l’origine du choix de ce métier.

Vos propos ne semblent pas prendre la mesure de la crise que traverse l’école.

Mme Géraldine Bannier (Dem). Quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, nous sommes tous conscients de la crise de la profession d’enseignant. Pour y répondre, le Gouvernement mise sur un choc d’attractivité.

Toutefois, les enseignants souffrent d’abord d’un manque de reconnaissance de la part de la société.

635 millions d’euros – 1,9 milliard d’euros en année pleine – sont prévus pour répondre à leur première préoccupation en rehaussant les salaires, y compris en milieu de carrière, là où les revalorisations précédentes ont toujours porté sur le début de carrière. Il est également prévu de faciliter l’accès la hors classe et à la classe exceptionnelle.

Le message de soutien que le Gouvernement adresse aux enseignants est clair. C’est un premier pas important. Les enseignants sont bien placés pour savoir qu’une hausse généralisée de 30 % des salaires mettrait en péril les finances publiques.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Les enseignants sont épuisés non pas d’être devant les élèves – ils sont passionnés – mais par leurs conditions de travail. Ils sont victimes de maltraitance institutionnelle. Ils travaillent déjà quarante-trois heures par semaine. Quand pourront-ils faire les tâches supplémentaires que vous leur proposez pour obtenir une hausse de salaire ?

Puisqu’ils doivent attendre la rentrée prochaine pour voir leur salaire augmenter, comment feront-ils pour vivre jusque-là alors que l’inflation galope ?

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. La rémunération n’est pas l’alpha et l’oméga de la réponse au malaise des enseignants. Des mesures ont été prises pour leur redonner confiance : les classes à douze élèves ; la diminution du nombre d’élèves par classe ; la création du fonds d’innovation pédagogique visant à renforcer la liberté et la souplesse pédagogiques.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC167 de M. Paul Vannier. 

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement s’attaque à l’une des causes de la crise du métier, qui est aussi une crise de sens née de la multiplication des tâches bureaucratiques, des dispositifs d’évaluation ou encore des hiérarchies intermédiaires. Cette accumulation éloigne de la mission fondamentale de l’enseignant : la transmission des savoirs, l’éveil de l’esprit critique et créatif des élèves.

Or le ministre ne fait pas autre chose en utilisant la hausse de salaire comme une carotte pour convaincre les enseignants d’assumer de nouvelles missions. La revalorisation salariale ne doit pas être conditionnée à une augmentation de la charge de travail.

L’amendement vise donc à supprimer l’enveloppe destinée à financer les missions complémentaires, laquelle a aussi le défaut de mettre en concurrence les enseignants, et à utiliser cette somme pour augmenter tous les personnels.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. L’enveloppe de 300 millions d’euros est indicative puisqu’elle est susceptible d’évoluer selon l’engouement que suscitera le dispositif.

La définition des nouvelles missions fera l’objet de négociations avec les enseignants et les organisations syndicales.

L’enveloppe n’est pas seulement destinée à rémunérer des missions nouvelles mais aussi des missions que les enseignants exercent déjà – l’animation de clubs culturels ou de forums, etc. Il s’agit de valoriser l’engagement et l’investissement des enseignants dans leur établissement.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Je soutiens l’amendement et je tiens à réfuter quelques idées fallacieuses, diffusées notamment par M. Chudeau.

Les enseignants français travailleraient moins que les autres. Leur temps de travail est en moyenne de quarante-trois heures par semaine et, dans le premier degré, cela peut être davantage.

Le chemin que vous voulez tracer, monsieur le rapporteur pour avis, nous inquiète car il va vers la contractualisation des missions. Moi je crois profondément au statut de la fonction publique qui protège les enseignants, les élèves et les usagers.

Qui décidera, lorsque les missions ne sont pas nouvelles, qu’elles ouvrent droit à une rémunération supplémentaire ?

Nous proposons d’utiliser l’enveloppe pour augmenter tous les enseignants car ils sont tous méritants.

Mme Cécile Rilhac (RE). Nous sommes aussi très attachés au statut de la fonction publique. Il n’est pas question de le remettre en cause.

S’agissant des missions visées par le « pacte », il faut distinguer le primaire et le secondaire. On pourrait ouvrir les indemnités pour mission particulière (IMP) aux enseignants du premier degré, par exemple lorsqu’ils s’engagent – de manière bénévole aujourd’hui – dans l’Union sportive de l’enseignement du premier degré (Usep). L’accompagnement éducatif auquel les directeurs d’école consacrent beaucoup de temps de même que la coordination d’un pôle inclusif d’accompagnement localisé (Pial) pourraient aussi être considérés comme des missions particulières.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC132 de Mme Francesca Pasquini.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à créer un fonds destiné à revaloriser de 10 % tous les enseignants, immédiatement et sans condition. Le décrochage des salaires est l’une des raisons majeures – même si ce n’est pas la seule – du déficit de recrutements dont souffre la profession. Or les moyens alloués dans le PLF pour 2023 ne nous semblent pas à la hauteur. L’enveloppe ne répond pas à la promesse du Président de la République. Quant à la part conditionnelle, elle correspond en réalité à des tâches déjà effectuées par les équipes pédagogiques. Si l’on intègre le temps de travail hors classe, les enseignants travaillent 43 heures par semaine.

Nous contestons la décision consistant à cibler les débuts et les milieux de carrière, car elle revient à ne pas augmenter la majorité des professeurs. La hausse du nombre de démissions est l’un des nombreux signaux indiquant qu’un malaise s’est installé dans l’ensemble de la profession.

Nous regrettons également que la hausse de salaire ne s’applique qu’à la rentrée 2023. D’ici là, l’inflation va continuer à affecter durement le pouvoir d’achat des enseignants, et ce malgré la hausse du point d’indice.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES). Je soutiens l’amendement de Mme Pasquini. Il ne s’agit pas ici d’une hausse de pouvoir d’achat : ce qui est en jeu, c’est un rattrapage pour rendre sa dignité au travail des enseignants. Ces derniers accomplissent une mission pour le compte de la République, à savoir fabriquer des citoyens – et non des travailleurs. C’est là une différence conceptuelle et éthique dont nous aurons l’occasion de débattre lors de l’examen des amendements. Or ils sont sous-payés par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE. Nous parlons de personnes recrutées au niveau master, à bac plus cinq. Même l’augmentation prévue à l’horizon de 2023 n’est pas de nature à leur assurer un salaire égal par rapport à celui que touchent leurs camarades qui préfèrent aller travailler dans le privé.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC13 de M. Roger Chudeau.

M. Roger Chudeau (RN). Depuis des décennies, les ministres de l’Éducation nationale successifs nous expliquent la main sur le cœur que le premier degré est leur priorité. La réalité est bien différente : le coût moyen d’un élève du premier degré est de 6 980 euros, quand celui d’un élève du second degré s’élève à 9 850 euros. Cela dure depuis des décennies, et l’écart ne se resserre que très peu. Cet amendement a donc pour objectif d’appeler l’attention sur la nécessité de transformer en actes les paroles et les projets politiques. Pour ce faire, il vise à abonder de 3 milliards d’euros le programme 140 Enseignement public du premier degré.

Le premier degré est le maillon faible. On lit en effet au détour d’une phrase, dans la présentation stratégique de la mission pour l’année 2023, que « 50 % des élèves entrent en 6ème  sans savoir lire de manière fluide ». Le sens de l’amendement est de faire en sorte que la priorité accordée au premier degré se traduise dans le budget.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Nous partageons évidemment votre ambition quant à la réussite des élèves de primaire et à la bonne acquisition des savoirs fondamentaux. Le PLF en témoigne : les crédits du programme 140 augmentent de 6 %. Par ailleurs, comme le nombre d’élèves diminue mais que le nombre de postes ne suit pas la même évolution, le taux d’encadrement augmente mécaniquement chaque année, même si le nombre d’élèves par classe reste plus élevé que d’autres pays européens : il y avait 23,2 élèves par classe à la rentrée 2017, 21,8 à la rentrée 2021 et il devrait y en avoir 21,3 à la rentrée 2023.

En outre, des moyens importants ont été consacrés à l’acquisition des savoirs fondamentaux, notamment en REP et REP+ avec le dédoublement des classes et le lancement de grands plans de formation, par exemple en mathématiques et en français.

L’amendement vise à faire basculer vers l’enseignement primaire 3 milliards d’euros affectés aux dépenses de personnel des collèges et lycées. Or les besoins sont également importants dans ces établissements, notamment dans les collèges. Avis défavorable.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Le recueil Regards sur l’éducation indiquait, dans son édition 2021, que la part des horaires hebdomadaires d’enseignement dévolus à la lecture, à l’expression écrite et à la littérature étaient supérieurs, en France, à la moyenne de l’OCDE. Autrement dit, les savoirs fondamentaux sont déjà bien pris en compte dans l’enseignement scolaire. Les 3 milliards d’euros que vous proposez d’affecter ne correspondraient donc à aucune mesure tangible.

M. Bertrand Sorre (RE). Depuis plusieurs années, nous avons œuvré en faveur de l’enseignement primaire avec le dédoublement des classes en grande section de maternelle, en CP et en CE1. N’en doutons pas, cette mesure livrera ses fruits dans les prochaines évaluations de 6ème, comme l’a souligné hier monsieur le ministre.

Je trouverais dommageable d’amputer de 3 milliards d’euros les crédits de l’enseignement du second degré, compte tenu de l’excellence du travail qui y est accompli. Ce serait affaiblir ce maillon important.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC241 de M. Alexandre Portier.

M. Alexandre Portier (LR). Le Gouvernement fait de l’intégration des nouveaux enseignants une priorité. Cet amendement va dans le même sens.

Le nombre de démissions d’enseignants au cours de leur année de stage est en forte augmentation : en huit ans, il a été multiplié par quatre. Ce sont environ 4 % des enseignants stagiaires qui fuient l’Éducation nationale après avoir réussi le concours. À travers cet amendement, nous souhaitons consolider l’intégration de ces enseignants en étendant la prime pour la mobilité qui leur est versée. L’objectif est de prendre en charge en totalité leurs frais de déplacement pour faciliter leur quotidien au cours de la première année, lors de laquelle beaucoup de choses se jouent. Nous proposons, pour financer cette mesure, de réorienter vers les actions consacrées à la formation des personnels enseignants des crédits provenant de l’action 06 Politique des ressources humaines du programme 214 Soutien de la politique de l’Éducation nationale

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. L’amendement vise à financer l’intégralité des frais de déplacement des stagiaires du premier et du second degrés en augmentant la prime pour la mobilité. Je comprends l’objectif, et il est vrai que ces déplacements peuvent être coûteux pour des stagiaires qui doivent se rendre à de nombreuses reprises de leur lieu de vie à l’institut national supérieur du professorat et de l’éducation (Inspe) ou à l’établissement où se déroule le stage. Toutefois, l’amendement est en grande partie satisfait : le montant des indemnités kilométriques est le même pour tous les fonctionnaires et le dispositif a été revalorisé récemment. Certes, il existe quelques régimes dérogatoires pour les stagiaires et les titulaires sur zone de remplacement (TZR), mais les indemnités spécifiques ont été alignées en gestion en 2022. Il faudra probablement réfléchir à un alignement juridique mais, en pratique, les montants sont déjà alignés depuis cette année.

En ce qui concerne les démissions en tout début de carrière, notamment de la part de stagiaires qui découvrent à ce moment-là qu’ils ne sont pas faits pour ce métier, la solution consiste plutôt à insister sur la préprofessionnalisation à partir de la deuxième année de licence. Il faut mettre dans le bain les futurs enseignants, leur permettre de découvrir la réalité du métier avant qu’ils ne passent le concours. Ainsi, ils seront certains de s’être engagés dans la bonne voie professionnelle. Avis défavorable.

M. Francis Dubois (LR). Vous dites que le dispositif est le même pour les différentes catégories d’enseignants, mais ce n’est pas le cas pour ceux qui exercent en milieu rural, avec le prix des carburants, l’inflation et le faible niveau des rémunérations. Seule une partie des frais de déplacement est prise en charge, et elle varie selon les régions et le système de carte de transport en vigueur. C’est une injustice. Ce n’est pas en agissant ainsi que l’on témoigne de la reconnaissance aux enseignants. Si le système est juste pour l’ensemble des salariés, il est injuste pour les enseignants. Nous devons rétablir de la justice à leur profit.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Le problème que vous soulevez n’est pas limité aux enseignants : il touche l’ensemble des travailleurs dans le monde rural. Ce n’est pas dans cette commission que nous allons pouvoir y apporter une réponse. Celle-ci doit passer par la mise en place de politiques de soutien à la baisse du coût de l’énergie.

Par ailleurs, selon le principe de la résidence administrative, si l’on enseigne à 40 kilomètres de sa résidence personnelle, les frais de déplacement ne sont pas pris en charge. Ils ne le sont que si l’on se rend de son établissement à l’Inspe ou dans un autre lieu où l’on doit suivre une formation complémentaire. C’est ainsi que cela fonctionne en général dans l’ensemble de l’administration.

Plutôt que d’appeler au rejet de votre amendement, je vous demande de le retirer, car l’objectif visé est en grande partie satisfait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC178 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement vise à porter l’augmentation des frais de déplacement au niveau de celle des prix des carburants. Certes, le PLF prévoit une augmentation des frais de déplacement de 10 %, mais les prix des carburants, pour leur part, ont plus que doublé. C’est donc une question de justice. Nous proposons de transférer 5 millions d’euros de crédits pour financer cette augmentation.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Le PLF prévoit déjà une revalorisation des indemnités kilométriques pour les déplacements professionnels afin de prendre en compte l’augmentation du coût de l’énergie. Ce sont près de 5 millions d’euros qui ont été ajoutés à l’enveloppe consacrée aux frais de déplacement, laquelle atteint 57 millions d’euros. À cela s’ajoutent les mesures prises au mois de juillet pour limiter la hausse des prix des carburants. Je ne conçois pas une réponse spécifique pour chaque catégorie professionnelle de l’administration – en l’occurrence, ici, pour les enseignants. Avis défavorable.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Je soutiens l’amendement de mon collègue. Les arguments de M. Dubois sont très justes : dans les départements ruraux, les enseignants peuvent faire jusqu’à 100 kilomètres par jour pour se rendre sur leur lieu de travail. En attendant que soit corrigée la bizarrerie administrative dont parlait monsieur le rapporteur pour avis, à savoir que les enseignants ne sont remboursés que pour les déplacements ayant pour point de départ leur résidence administrative et les conduisant dans un autre lieu d’exercice, nous vous proposons une mesure d’urgence visant à éviter que les enseignants exerçant en milieu rural, par exemple, continuent à perdre du pouvoir d’achat. C’est une nécessité.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC251 de M. Jean-Claude Raux.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à doter la médecine de prévention de moyens supplémentaires. Il est d’autant plus important de le faire que monsieur le ministre ne nous a pas forcément rassurés en la matière.

Les enseignants sont exposés à des risques singuliers inhérents à leurs fonctions : risques psychosociaux comme la dépression, troubles musculo-squelettiques, altération de la voix et de l’audition, etc. Or, on compte un médecin pour 16 000 professeurs, ce qui signifie que l’obligation de visite d’information et de prévention quinquennale découlant du décret de mars 1982 n’est pas respectée. Je sais de quoi je parle : je n’ai pas vu une seule fois un médecin en vingt-cinq ans de carrière dans l’enseignement, en dehors de la visite d’aptitude.

Prendre soin du personnel de l’Éducation nationale, y compris les professeurs, c’est être attentif et vigilant, par ricochet, aux conditions d’apprentissage des élèves. Donner plus de moyens dans ce domaine, c’est aussi renforcer l’attractivité des métiers de l’enseignement, qui en manquent cruellement. Il n’y a pas que les salaires qui comptent.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre l’a expliqué hier soir : qu’il s’agisse de la médecine scolaire ou de la médecine de prévention, les postes ne sont pas pourvus. Avant d’augmenter les crédits, il faut donc mener une réflexion beaucoup plus large sur ce dont a besoin cette médecine de prévention, notamment en matière d’organisation. Avis défavorable.

M. Roger Chudeau (RN). Nous ne voterons pas cet amendement car il est hors sol : le ministre nous a expliqué fort justement que ces postes ne sont pas pourvus. En quarante‑trois ans de carrière dans l’Éducation nationale, je n’ai jamais vu le moindre médecin de prévention. Dans ces conditions, il ne sert à rien d’ajouter des millions aux millions. L’enjeu est de payer correctement ces personnels : un médecin de l’Éducation nationale touche le Smic, ce qui est ridicule.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous abordons une série d’amendements consacrés aux accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).

Amendements II-AC187 et II-AC189 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Il importe de répondre à la très grave crise de recrutement que connaît la profession d’AESH : il manque des milliers d’intervenants dans les salles de classe. Cette crise s’explique par l’absence d’un véritable statut des AESH, mais surtout par la très faible rémunération de ces professionnels, qui touchent un peu moins de 800 euros par mois.

Nous proposons, à travers l’amendement II-AC187, que la quotité horaire correspondant à un temps plein d’AESH passe à 24 heures, ce qui correspond à la réalité du temps d’accompagnement possible auprès des élèves. Les AESH sont le plus souvent dans des situations de temps partiel contraint qui expliquent en partie leur très faible rémunération. L’amendement conduirait à augmenter celle-ci de l’ordre de 30 %.

L’amendement II-AC189, qui est un amendement de repli, vise pour sa part à accroître la rémunération de 10 %, de sorte que la promesse d’augmenter le traitement des enseignants concerne aussi les AESH. Là encore, l’objectif est de revaloriser ce métier, alors que partout les besoins éducatifs sont considérables. Dans les écoles du Val d’Argenteuil, dans ma circonscription, il manquait des AESH, le jour de la prérentrée, dans toutes les écoles que j’ai visitées. Dans certaines, il en manquait trois, quatre, parfois même cinq. Ce sont autant d’enfants qui ne peuvent accéder au droit à l’éducation et autant de familles qui sont contraintes de les garder chez elles, ce qui est insupportable à l’heure de la promesse de l’école inclusive.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Un AESH est payé 760 euros par mois, soit moins que le seuil de pauvreté. Qui d’entre nous souhaiterait travailler pour un tel salaire ? Comment s’étonner, dès lors, que, dans certaines écoles de nos circonscriptions, il n’y ait qu’un AESH et demi pour seize élèves en situation de handicap, dont plusieurs à 100 % ? Il faut absolument mettre un terme à cette situation. Certains élèves se voient refuser l’accès à l’école et à l’éducation faute d’accompagnement.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. La question des AESH mérite que nous y consacrions un peu de temps. Plusieurs amendements portent notamment sur leur statut.

Le projet de loi de finances prévoit 4 000 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires. Depuis 2017, le nombre d’AESH a augmenté dans des proportions importantes : 55 %. Toutefois, nous sommes confrontés à plusieurs problèmes.

Le premier concerne la grande variabilité des décisions des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) selon les départements. En 2020, par exemple, 74 % des élèves en situation de handicap bénéficiaient d’une notification d’aide individuelle dans le Finistère, contre 38 % dans la Vienne. Une instance de dialogue entre l’Assemblée des départements de France et le ministère de l’Éducation nationale a été mise en place pour harmoniser les pratiques, car on ne saurait se satisfaire de telles inégalités territoriales.

Le deuxième problème tient à l’insuffisance des capacités d’accueil dans les instituts médico-sociaux, en particulier les instituts médico-éducatifs (IME) et les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP). Pour certains enfants, le milieu ordinaire n’est pas la bonne solution, y compris avec l’accompagnement d’un AESH.

Le troisième problème concerne l’attractivité du métier d’AESH, comme en témoigne la difficulté croissante à trouver des candidats. La rémunération a pourtant progressé récemment : le décret et l’arrêté du 23 août 2021, résultats du Grenelle de l’éducation, ont introduit une nouvelle grille indiciaire, une revalorisation régulière et automatique et un avancement tous les trois ans. Qui plus est, la grille est construite sur trente ans, ce qui ouvre des perspectives de carrière. Cette grille a défini les contours d’une véritable institutionnalisation du métier d’AESH.

La revalorisation du métier passe aussi par une meilleure formation. La formation initiale prévoit 60 heures. Ce n’est pas suffisant. Le PLF pour 2023 contient des crédits destinés à la formation des AESH.

Renforcer l’attractivité de ce métier suppose d’augmenter les rémunérations. À partir de janvier 2023, les AESH, comme du reste les assistants d’éducation (AED), auront accès aux primes REP et REP+. Les décrets d’application devraient être bientôt publiés. Est-ce suffisant ? Non.

Je ne suis pas favorable au passage du temps plein à 24 heures. Il serait préférable d’augmenter la quotité de travail pour les AESH qui le souhaitent – car, pour certains, la durée de 24 heures n’est pas le résultat d’un choix. Qu’il s’agisse de l’augmentation de la quotité de travail, de la prise en compte de la pause méridienne ou encore de l’intégration du temps périscolaire, il faut travailler avec les collectivités territoriales. J’ai eu à gérer ce genre de problèmes lorsque j’étais maire.

Il faut envisager la création d’un contrat unique émanant de l’Éducation nationale mais prévoyant un conventionnement avec la collectivité territoriale et un reversement effectué par cette dernière en direction de l’Éducation nationale pour la prise en charge de la pause méridienne. Le ministre, entendu hier soir, a laissé la porte ouverte en ce qui concerne l’augmentation du temps de travail sur le temps scolaire, et pas seulement sur le temps périscolaire, avec des missions plus larges, relevant de la vie scolaire et de l’inclusion, ou encore du soutien aux enseignants et aux directeurs d’école.

Faut-il aller jusqu’à la création d’un corps ? La question reste ouverte. Je considère qu’elle ne saurait être réglée par voie d’amendement dans le cadre du PLF. Elle doit faire l’objet d’une réflexion globale sur le métier d’AESH, avec en ligne de mire l’augmentation de la quotité de travail pour ceux qui le souhaitent.

Il importe également de dépasser la question de l’accompagnement individuel. En effet, on peut se demander si la seule solution pour que l’école soit inclusive passe par l’accompagnement de chaque élève par un AESH. Doit-on envisager, dans certaines conditions, de rattacher des AESH non pas à des enfants mais à des établissements ? Doit-on renforcer les mutualisations qui ont commencé à être mises en place avec les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial) ? Au fond, l’inclusion scolaire n’est pas seulement une question de gestion des individus : c’est une question plus globale.

L’école inclusive ne se réduit pas forcément à la place de l’AESH dans le système scolaire. C’est ce que nous avons retenu de nos échanges avec l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés. C’est ce que dit Nicolas Eglin, président de la Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap. L’accompagnement n’est qu’un des facteurs de l’école inclusive ; ce n’est ni le seul ni le premier. Des études menées au Royaume-Uni concernant les teaching assistants, qui ont été très largement déployés autour des personnes en situation de handicap, montrent que les élèves accompagnés individuellement ne réussissent pas mieux que ceux bénéficiant de l’aide d’un accompagnant qui s’occupe globalement de l’inclusion au sein de la classe ; parfois même, ils réussissent moins bien.

La question est fondamentale, passionnante, elle fait l’objet d’études et de recherches à l’université et conduit à se pencher plus globalement sur la place des AESH. Je ne crois pas que nous puissions résoudre tous ces problèmes au détour d’un amendement dans le PLF. Avis défavorable.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Je suis d’accord avec vous sur un point : le sujet mérite une réflexion approfondie, et pour cela il faut prendre du temps. Mais nous devons également traiter des situations d’urgence : certains élèves en situation de handicap ne peuvent pas aller à l’école, ou mangent dans la voiture familiale le midi parce qu’ils ne sont pas accompagnés pendant la pause méridienne. Certaines familles sont en difficulté. Il faut à la fois remédier à ces situations et réfléchir à d’autres solutions. Compte tenu de l’urgence, il est entièrement justifié d’essayer de régler certains problèmes à travers des amendements.

M. Roger Chudeau (RN). Nous ne voterons pas ces amendements car ils restent à la surface des choses. Notre position est assez proche de celle, très nuancée, qu’a exprimée monsieur le rapporteur pour avis. Nous sommes pour la CDIsation des AESH et pour leur professionnalisation. Nous sommes même pour la création d’un statut. AESH, c’est un métier ; il faut y être formé. Certes, la question de l’école inclusive ne se résume pas à l’accompagnement par des AESH, mais il faut tout de même travailler beaucoup dans cette direction.

Le problème, en matière de pilotage des AESH, c’est que l’État n’est plus prescripteur. J’ai été inspecteur d’académie pendant huit ans. En cette qualité, je présidais la commission chargée de cette question et, croyez-moi, les choses se passaient différemment lorsque c’était l’État qui dirigeait les débats : c’était beaucoup plus équilibré ; surtout, on savait exactement où l’on mettait les pieds. Il faudra remettre la question sur la table avec les départements, car le double pilotage n’est pas propice à la résolution du problème.

La commission rejette successivement les amendements.

La réunion est suspendue de onze heures cinq à onze heures quarante-cinq.

Amendement II-AC104 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Cet amendement vise à encourager le Gouvernement à revaloriser l’ensemble des rémunérations des AESH.

Oui, la situation des AESH doit être considérée dans sa globalité. Durant la précédente législature, dans le cadre de l’examen du projet de loi pour une école de la confiance, j’avais essayé de faire avancer la question, mais je n’avais pas été entendue. J’espère que nous finirons par y travailler. Il faut progresser, en particulier, dans la réflexion concernant la quotité de travail hebdomadaire. Monsieur le ministre parlait hier du fait que les missions des enseignants ne bénéficiaient pas d’une reconnaissance suffisante du point de vue de la rémunération ; c’est vrai aussi pour les AESH.

Il est beaucoup question de la prise en compte du temps périscolaire. Pourquoi pas, mais cela ne risque-t-il pas d’accroître les inégalités ? Certains enfants seront accompagnés et d’autres non, car certaines mairies pourront payer des AESH, mais d’autres ne le pourront pas. Ainsi, certains AESH bénéficieront d’une augmentation de salaire, d’autres non. En outre, cela se fera-t-il à la demande des parents ou de la MDPH ?

Dans l’immédiat, je demande à travers cet amendement que l’on prenne en considération la nécessité d’une augmentation immédiate de la rémunération, par exemple en agissant sur le taux horaire.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

En ce qui concerne la pause méridienne, le Conseil d’État a rendu en 2020 une décision indiquant clairement que ce temps relevait de la responsabilité des collectivités territoriales. Nous n’aurons donc pas le choix, malheureusement. Cela dit, quand un élève est accompagné sur le temps scolaire par un AESH, la pression est très forte sur les épaules du maire ou du président du département pour que l’accompagnement s’étende à la pause méridienne. Dans la plupart des cas, il est difficile de le refuser.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Nous nous abstiendrons, car cet amendement aurait pour effet d’augmenter le salaire des AESH de seulement 1,5 euro par mois seulement.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Vous auriez pu le sous-amender !

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). J’ai fait beaucoup mieux en proposant d’augmenter la rémunération de 10 %, et vous n’avez pas voté en faveur de mon amendement ! J’en ai aussi présenté un autre créant un statut des AESH ; vous ne l’avez pas voté non plus.

Votre amendement témoigne d’un certain mépris pour ce que vivent les AESH : 1,5 euro par mois ! Je n’ai pas de mots pour qualifier cette proposition.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Ce que vous venez de dire m’affecte profondément. Si vous me connaissiez, vous sauriez que j’ai défendu les AESH tout au long de la précédente législature.

Quant à votre proposition relative au temps plein à 24 heures, il faut effectivement travailler sur la question, mais je suis d’accord avec monsieur le rapporteur : ce n’est pas à travers un amendement que celle-ci sera réglée. C’est pourquoi je propose de faire un geste tout de suite envers les AESH. Effectivement, la somme proposée n’est pas adéquate, mais sachez que je reconnais et que je salue le travail des AESH depuis cinq ans, et même depuis bien plus longtemps que cela, puisque j’étais enseignante.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC92 de Mme Lisette Pollet.

Mme Lisette Pollet (RN). Cet amendement vise à allouer des crédits supplémentaires pour les AESH. Ce métier est nécessaire pour accompagner au mieux les élèves handicapés afin qu’ils réussissent. Les AESH sont des acteurs clés pour la réussite du projet inclusif de la Nation. Malgré une revalorisation du métier et une prime annuelle de 600 euros l’an dernier, nous considérons qu’il faut aller plus loin et augmenter les salaires. En effet, le revenu moyen d’un AESH se situe aux alentours de 800 euros net. Ces professionnels méritent une revalorisation : on ne peut pas vivre avec un tel salaire. Il convient de les rémunérer à leur juste valeur.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Nous voterons contre cet amendement qui est un pur scandale : s’il était adopté, madame la députée du Rassemblement national, le salaire des AESH augmenterait de 63 centimes chaque mois, soit l’équivalent d’une demi-baguette. C’est une insulte faite aux AESH.

Non, le Rassemblement national ne propose pas l’augmentation du salaire des AESH ; il se satisfait parfaitement de la situation de misère dans laquelle ils se trouvent. Il y a quelques minutes, j’ai proposé un amendement visant à augmenter de 10 % le salaire des AESH. Or l’extrême droite n’a pas pris part au vote. Ce que vous venez de dire, madame, est donc un mensonge.

La commission rejette l’amendement.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-AC90 de M. Sébastien Jumel.

Elle rejette également l’amendement II-AC211 de M. Idir Boumertit.

Amendement II-AC144 de Mme Francesca Pasquini.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Le présent amendement, d’appel, vise à inciter le ministère de l’Éducation nationale à lancer un plan de titularisation massif des AESH en leur proposant des contrats à temps complet. Seuls 2 % des 130 000 AESH (dont 93 % sont des femmes) disposent d’un emploi à temps complet, alors que les besoins d’accompagnement s’accroissent. Leur rémunération moyenne n’est que de 760 euros par mois et seuls 25 % d’entre eux sont employés en CDI. Il est inadmissible que les syndicats aient été forcés de saisir le Conseil d’État début octobre pour faire valoir des droits aussi évidents.

Si nous voulons suffisamment d’AESH, il est impératif de leur fournir des conditions de travail stables, qui leur permettent de vivre dignement. Les déclarations récentes du Gouvernement, sur le souhait d’une école plus inclusive, sont en contradiction totale avec la réalité. Cette aide n’est pas une faveur, elle est de droit.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable car la fonction publique ne peut imposer le temps partiel – celui-ci n’est possible que s’il est choisi – or la très grande majorité des AESH disposent de contrats de vingt-quatre heures par semaine.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC186 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Les accompagnants d’enfants en situation de handicap jouent un rôle indispensable dans le service public de l’éducation. Ces personnels sont actuellement en situation précaire et ne bénéficient pas du statut de fonctionnaire. Ils ont besoin de davantage de reconnaissance, et de revalorisation. L’inclusion des enfants en situation de handicap dans le système scolaire nécessite des personnels formés.

Nous proposons donc de titulariser les AESH dans un nouveau corps de la fonction publique. Ces personnels bénéficieraient d’une formation.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement AC135 de Mme Francesca Pasquini.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Le présent amendement, d’appel, vise à recruter 4 000 AESH supplémentaires à temps complet pour assurer pleinement les droits des élèves en situation de handicap. Actuellement, seule la moitié de ces élèves est accompagnée. Or, la scolarisation de tous les enfants, quel que soit leur handicap, est un droit garanti par la loi et la carence de l’État est constitutive d’une faute de nature à engager sa responsabilité – le groupe Écologiste interpelle régulièrement le Gouvernement sur ce point.

S’il faut saluer le recrutement de 4 000 AESH, cela ne suffira pas à traiter les nombreuses notifications des MDPH. Le ministère peut multiplier les annonces de recrutement sur les murs des écoles ; elles ne trouveront pas preneurs tant que les conditions salariales proposées ne seront pas à la hauteur des conditions de travail éprouvantes des AESH.

Enfin, l’inclusion ne peut se limiter à une approche individuelle. Il faut repenser le cadre pour que l’école puisse s’adapter aux élèves, et non l’inverse. Cela doit se traduire par une politique d’investissement dans le matériel, une adaptation des supports pédagogiques, mais aussi des locaux.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Vous avez raison, il faut améliorer l’accessibilité des enseignements scolaires. L’article L. 111-1 du code de l’éducation dispose que le service public de l’éducation veille à la scolarisation inclusive de tous les enfants, sans aucune distinction. C’est donc un droit fondamental, mais cela ne signifie pas que la présence d’un AESH est requise dans tous les cas. La circulaire de 2017 sur les missions des AESH indique d’ailleurs que la présence d’un personnel chargé de l’accompagnement n’est ni un préalable, ni une condition à la scolarisation de l’élève.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Mais alors, à quoi servent les notifications des MDPH ?

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Elles émanent d’institutions qui ne sont pas les payeurs et les différences sont extrêmement importantes d’un département à l’autre. Ainsi, dans la Vienne, 38 % des enfants en situation de handicap bénéficient d’un accompagnement individuel alors que c’est le cas de 74 % des enfants dans le Finistère. La Vienne fait-elle mal son travail et le Finistère très bien le sien ? Il s’agit plutôt d’approches différentes, qui méritent un travail conjoint entre le ministère et l’Assemblée des départements de France. C’est pourquoi des négociations sont en cours.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). Nous n’accepterons pas que vous régliez le problème de l’accompagnement des enfants en situation de handicap par une baisse du nombre de notifications !

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Ne voyez pas le mal partout. Dans une étude de 2011, Éric Plaisance, Brigitte Belmont et Aliette Verillon ont établi que les relations de coopération entre l’auxiliaire de vie scolaire (AVS), devenu AESH, l’enseignant et l’élève étaient plus favorables dans le cadre de dispositifs collectifs que lorsque l’AVS était chargé de s’occuper individuellement d’un enfant. Il n’existe aucune vérité universelle sur le sujet, chaque cas étant différent.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC205 de M. Jérôme Legavre

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Pourquoi manque-t-on d’AESH ? La précarité, le faible salaire, les conditions de travail difficiles expliquent les nombreux postes vacants. Le maintien en contrat à durée déterminée (CDD) pendant deux fois trois ans avant de pouvoir prétendre à un éventuel contrat à durée indéterminée (CDI) n’a aucun sens. Ces personnels effectuent des missions pérennes au sein de la fonction publique. C’est pourquoi nous demandons leur titularisation et la création d’un nouveau corps de la fonction publique.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC188 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Il s’agit de dégager 115 millions d’euros pour recruter de nouveaux AESH car les besoins ne sont pas satisfaits. Une récente enquête auprès de 8 000 élèves scolarisés en milieu ordinaire ou spécialisé, réalisée par l’Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei), mouvement citoyen représentant 900 000 personnes en situation de handicap, indique que 33 % des élèves en situation de handicap ont moins de six heures de classe par semaine, et 18 % aucune heure.

En outre, le recrutement d’AESH privés se développe. Dans certaines académies, les recteurs demandent aux chefs d’établissement d’encourager les familles à se tourner vers ce mode d’accompagnement, inaccessible aux familles les plus défavorisées puisqu’il représente une dépense pouvant aller jusqu’à 3 000 euros par mois pour un plein-temps. Que faites-vous des principes de gratuité et d’égalité d’accès au service public de l’éducation ?

Ce dernier doit être à la hauteur de sa promesse, rappelée par le Président de la République : celle de l’école inclusive.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). L’injustice, ce n’est pas que certains départements délivrent plus de notifications MDPH que d’autres, mais le fait que certains parents ont les moyens de payer des AESH privés, quand d’autres enfants sont mis à l’écart puisque nous ne sommes pas en mesure de leur offrir l’accompagnement dont ils ont besoin. Vous avez créé un système sans vous donner les moyens de le mettre en place, et vous vous cachez ensuite derrière des recherches qui démontreraient que l’accompagnement n’a aucun effet sur l’évolution de ces enfants ? Allez-vous bientôt affirmer la même chose s’ils restent à la maison ?

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC240 de M. Alexandre Portier.

M. Alexandre Portier (LR). Cet amendement vise à prendre en charge tous les déplacements des AESH et à augmenter leurs indemnités kilométriques. De plus en plus d’AESH sont mutualisés et suivent donc plusieurs enfants qui ne sont pas toujours dans le même établissement. Outre les contraintes de déplacement, cela génère des frais substantiels.

Nous proposons d’abonder les crédits de l’action 03 Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap du programme 230 Vie scolaire, en prélevant sur ceux de l’action 06 Politique de ressources humaines du programme 214 Soutien de la politique de l’Éducation nationale.

M. Roger Chudeau (RN). Nous voterons pour cet amendement car les AESH, déjà très mal payés, doivent en outre assumer des frais de déplacement excessifs.

M. Jean-Jacques Gaultier (LR). Je suis particulièrement favorable à cet amendement, capital dans les territoires ruraux, dont Monsieur Portier est également élu.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Votre amendement est déjà satisfait. Un AESH contraint d’utiliser son véhicule personnel pour l’exercice de ses fonctions entre différents établissements peut prétendre à des indemnités kilométriques, après autorisation de l’administration.

Les frais entre le domicile et le lieu d’affectation ne sauraient être pris en charge. J’entends les problèmes que cela peut poser dans les territoires ruraux mais, si nous ouvrons cette boîte de Pandore, tous les fonctionnaires ou contractuels de l’État pourraient formuler la même demande.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC105 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Il s’agit d’un amendement d’appel, qui me permet de revenir sur deux points. Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez raison, la réponse, ce n’est pas toujours une AESH. Ce peut aussi être une réponse matérielle – mais mon amendement a été déclaré irrecevable.

Les AESH mutualisés peuvent éventuellement constituer une solution en école élémentaire, quand il s’agit de gérer des élèves dans différentes classes. Mais comment une AESH mutualisée peut-elle s’organiser au collège pour gérer quatre élèves dans quatre classes différentes, de quatre niveaux différents et avec quatre types de handicaps ?

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC97 de Mme Sophie Blanc.

Mme Sophie Blanc (RN). Environ 20 000 enfants qui pourraient être scolarisés ne le sont pas car il n’y a pas assez d’AESH. Pourquoi ? Le métier d’AESH est précaire et ils sont insuffisamment formés. Notre amendement vise à faire tenir au Président de la République les promesses électorales du candidat Emmanuel Macron. Le ministre de l’Éducation nationale nous l’a rappelé hier, le Gouvernement ne va pas créer les postes nécessaires. Nous sommes donc fixés. C’est pourquoi nous proposons d’abonder le programme 230 en réduisant du même montant le programme 214.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC106 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Cet amendement vise à améliorer la formation des AESH afin de les aider dans leur accompagnement des élèves dont les profils peuvent être très différents.

Contre la préconisation du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion thématique sur l’inclusion des élèves en situation de handicap.

 

Amendement II-AC22 de Mme Sophie Blanc.

Mme Sophie Blanc (RN). Intégrer pleinement nos concitoyens handicapés dans la société est un combat permanent. Cette intégration commence à l’école, premier lieu de socialisation et d’échange.

Le programme 230 Vie de l’élève enchaîne les poncifs dans l’air du temps– respect, apprentissage de la citoyenneté, éco-délégués, etc. Toutes ces préoccupations honorables ne sont rien ni nous laissons chez eux les plus fragiles de nos enfants.

Nous proposons donc de créditer l’action 06 Besoins éducatifs particuliers du programme 141 Enseignement scolaire public du second degré de 500 millions d’euros, en les prélevant sur l’action 01 Vie scolaire et éducation à la responsabilité du programme 230 Vie de l’élève.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. L’action 01 du programme Vie de l’élève sert aussi à financer la rémunération des conseillers principaux d’éducation (CPE) et des assistants d’éducation (AED), qui sont essentiels au bon fonctionnement du système scolaire. Amputer cette action de 500 millions, c’est lui retirer 15 % de ses crédits, ce qui aurait des conséquences assez lourdes.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Nous souhaitons tous que les élèves handicapés soient mieux intégrés : c’est pourquoi les crédits de l’action 06 du programme 141 augmentent déjà de 6 % dans le PLF pour 2023.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Je suis d’accord avec le rapporteur pour avis. Je m’étonne, par ailleurs, que cet amendement ne concerne que le secondaire et oublie les élèves handicapés dans le primaire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC53 de Mme Sophie Blanc.

Mme Sophie Blanc (RN). Cet amendement vise à ponctionner le programme 230 Vie de l’élève pour abonder le programme 140 Enseignement scolaire public du premier degré.

Suivant la préconisation de M. Philippe Fait, rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC127 de Mme Angélique Ranc.

Mme Angélique Ranc (RN). L’intégration des personnes en situation de handicap à l’école primaire est cruciale, puisque c’est un moment clé du développement social et intellectuel des enfants. Or de nombreux parents n’ont pas pu scolariser leur enfant, à cette rentrée encore. Même si les établissements sont dans l’obligation légale d’accepter un enfant en situation de handicap, la plupart des parents ne peuvent se résoudre à y laisser le leur, car il ne ferait l’objet d’aucune surveillance particulière et ne bénéficierait que d’une aide à l’apprentissage approximative, faute de moyens.

Nous proposons d’augmenter les crédits consacrés à l’inclusion scolaire, afin que les établissements puissent embaucher davantage de personnels pour encadrer les enfants en situation de handicap.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Nous voterons contre cet amendement, car il promeut un modèle d’école territoriale. Celui-ci est contraire au modèle républicain, qui doit garantir à tous les élèves, quel que soit leur lieu de résidence, une égalité d’accès au service public d’éducation.

En proposant que les AESH soient directement recrutés au niveau des établissements, cet amendement promeut le modèle de l’école entreprise. Il confie au chef d’établissement la responsabilité de gérer l’embauche et les conditions de travail de ces AESH. C’est un facteur d’aggravation des inégalités.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Vous proposez d’augmenter de 5 millions d’euros les crédits de l’action 03 Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap du programme 230 Vie de l’élève. Nous comprenons votre intention, mais nous estimons que le PLF fait déjà beaucoup pour l’école inclusive. Les crédits de l’action 03 augmentent déjà de 11 % par rapport à l’année dernière, alors qu’ils avaient déjà augmenté de 10 % en 2022. Cette hausse permettra le recrutement d’AESH, mais aussi le développement des unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis).

Au total, le ministère de l’Éducation nationale consacre plus de 3,8 milliards à l’école inclusive dans ce PLF. Cela permettra notamment le recrutement de 4 000 ETP et une bascule de tous les contrats d’AESH vers des contrats de titre 2. Par ailleurs, à compter de janvier 2023, les AESH percevront également l’indemnité versée aux personnels exerçant en éducation prioritaire.

Le Gouvernement a engagé une réflexion ambitieuse pour poursuivre l’amélioration des conditions d’exercice des AESH. Des questions restent en suspens quant à la prise en charge du temps périscolaire par les collectivités territoriales, telle que requise par la décision du Conseil d’État du 20 novembre 2020. Nous serons, comme vous, attentifs aux suites qui lui seront données. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion thématique sur les ouvertures ou réouvertures d’écoles.

Amendement II-AC199 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Il s’agit de créer un fonds pour aider à la construction d’écoles publiques dans les territoires qui en sont dépourvus.

Il existe en France des déserts d’école publique. Dans le département de la Vendée, par exemple, soixante-cinq communes ne disposent d’aucune école publique, seulement d’une école privée. Parce que nous sommes attachés aux principes républicains, notamment à la laïcité, nous pensons que l’accès à l’école publique doit être garanti à tous les élèves de ce pays et qu’il faut construire des écoles publiques là où il en manque.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Vous proposez de créer un nouveau programme, destiné à la « construction d’écoles publiques dans les déserts scolaires ». Cette dénomination ne me semble pas justifiée.

Il me semble qu’il faut laisser le soin aux élus locaux de réfléchir à des regroupements pédagogiques concentrés (RPC) ou intercommunaux (RPI), plutôt que de créer des écoles dans toutes les communes.

Des mesures ont été prises, sous le précédent quinquennat, pour éviter les fermetures d’école dans les territoires ruraux : aucune école de zone rurale ne peut fermer sans l’accord préalable du maire de la commune concernée. Avis défavorable.

Mme Géraldine Bannier (Dem). Cet amendement est un peu fantaisiste car, dans certaines régions, l’implantation de l’enseignement privé s’explique historiquement.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). L’offre d’enseignement public doit être assurée absolument partout sur le territoire : c’est un prérequis qui ne peut pas être balayé d’un revers de la main, sous prétexte que le privé a pris l’avantage dans un certain nombre de départements. Je rappelle que le privé n’est pas soumis aux mêmes contraintes que le public et qu’il n’a pas été touché par la réforme des rythmes scolaires, qui a entraîné une fuite vers le privé.

J’ai assisté récemment à la réouverture d’une école à classe unique dans mon département : c’est suffisamment rare pour être souligné. Cette école avait fermé, malgré l’opposition du conseil municipal, des organisations syndicales et des représentants du personnel. Lorsqu’on ferme des écoles dans la précipitation, on oblige souvent les mairies à les rouvrir dans des conditions intenables.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC200 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’année dernière, 358 écoles publiques ont fermé en France, soit près d’une école par jour. Il y en avait 44 262 en 2021 et il n’y en a plus que 43 904 en 2022. Nous proposons donc d’investir dans un plan de réouverture d’écoles publiques. Rapprocher l’école du domicile fait gagner du temps aux familles et réduit la fatigue des enfants : nous fixons un objectif d’un temps de trajet maximal de trente minutes. Ce plan, en diminuant l’usage de la voiture, est également vertueux sur le plan environnemental.

M. Roger Chudeau (RN). Nous voterons contre cet amendement, qui ranime le prurit de la guerre scolaire, ce qui est totalement ridicule. L’école est communale : lorsqu’une commune veut créer une école, elle est totalement libre de le faire, avec l’aide de l’État. Cela ne pose aucun problème. Il y a 70 000 élèves de moins cette année et cette tendance à la baisse se prolongera l’année prochaine. Il est donc normal que des écoles ferment. Il n’y a pas à le déplorer, c’est juste de la bonne gestion. Enfin, le service public d’éducation est également assuré, sous le contrôle de l’État, par l’enseignement privé sous contrat.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Pour répondre à Monsieur Chudeau, la fermeture d’école intervenue dans ma circonscription était précisément due à une mauvaise gestion, puisque l’administration n’avait retenu ni les arguments de la mairie, ni ceux des représentants du personnel, si bien qu’il a fallu rouvrir une classe dans l’urgence.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC201 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Cet amendement de repli vise à concentrer l’effort de reconstruction d’écoles publiques dans les territoires ruraux, car ce sont eux qui ont connu le plus de fermetures. C’est aussi dans ces territoires que la distance entre le lieu de domicile et l’établissement scolaire est la plus grande.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Laissons aux élus locaux le soin de réfléchir à des regroupements et remettons l’enfant au centre de nos préoccupations. En parlant de distances, il faut parfois que les enfants d’une école fassent une heure de bus, voire davantage, pour aller manger dans la cantine d’un autre établissement. Les regroupements sont, de mon point de vue, la solution de demain. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion thématique sur les aides aux collectivités territoriales.

Amendements II-AC174 et II-AC175 de M. Paul Vannier. 

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Ces deux amendements visent à soutenir financièrement les collectivités territoriales, dont les charges vont augmenter du fait de la hausse des prix de l’énergie, alors que leurs recettes vont encore diminuer, avec la suppression à venir de la CVAE. Nous proposons de créer un fonds de soutien aux collectivités territoriales – communes, départements, régions – pour les aider à faire face à la hausse du prix du chauffage dans les établissements scolaires. Dans les Hauts-de-France, il est question de fermer les lycées le samedi pour faire des économies d’énergie : cela aura nécessairement des conséquences sur le plan éducatif.

Nous proposons également de soutenir les collectivités qui ont des difficultés à assurer le transport scolaire. À l’augmentation du coût des carburants s’ajoute la pénurie des chauffeurs scolaires. Il en manque 8 000 et cela est dû en partie au faible niveau de rémunération de ce métier. Nous ne disons pas que l’État doit se subsister aux collectivités, mais il doit les soutenir.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). D’après l’Association des petites villes de France (APVF), les dépenses énergétiques de certaines communes ont déjà bondi de 50 %. L’Association des maires de France (AMF) estime quant à elle que cette hausse oscillerait entre 30 et 300 %. Or l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) considère que les écoles représentent un tiers de la consommation énergétique totale des bâtiments des communes.

En plus du fonds de soutien dont nous proposons la création, il importe de lancer un plan d’urgence pour la rénovation thermique des bâtiments scolaires. La réduction immédiate de la consommation d’énergie est une priorité : elle doit permettre aux collectivités de moins dépendre des énergies fossiles, de diminuer leurs émissions de CO2 et de retrouver une marge de manœuvre budgétaire.

M. Roger Chudeau (RN). Nous voterons contre ces amendements car il nous semble que ce qui est au centre du système scolaire, c’est l’élève, et non le chauffage ou le transport. Ces amendements n’ont pas leur place ici : ils sont hors sujet. Je note par ailleurs que les amendements de l’ultragauche s’en prennent toujours au programme 139 Enseignement privé du premier et du second degrés. Comme par hasard !

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Nous comprenons la préoccupation des collectivités territoriales mais, comme monsieur Chudeau, j’estime que ces questions n’ont pas vraiment leur place dans cette discussion relative à l’enseignement scolaire. Il me semble qu’elles relèvent davantage des politiques de soutien aux collectivités territoriales. À cet égard, plusieurs leviers ont d’ores et déjà été actionnés : les petites collectivités qui ont moins de dix employés et moins de 2 millions de recettes sont éligibles aux tarifs réglementés de vente d’électricité. Elles peuvent donc bénéficier du bouclier tarifaire qui limite la hausse de leur facture d’électricité. Par ailleurs, toutes les collectivités, éligibles ou non aux tarifs réglementés de vente d’électricité, bénéficient d’une baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) qui est passée de 22,5 à 0,50 euro le mégawattheure. Cette réduction fiscale représente un effort particulièrement important pour l’État – 8 milliards d’euros en 2022 – et un gain de 400 millions d’euros pour le bloc communal. Avis défavorable.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. J’ajoute que le plan de relance a permis de financer de nombreux travaux de rénovation énergétique. Enfin, pour vous répondre au sujet du transport scolaire, lorsque les collectivités ne sont pas organisées en régie, ce qui est fréquent, les transports font l’objet d’un marché public et on n’a aucun moyen d’agir sur les salaires.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements II-AC176 et II-AC177 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). J’ai fait une erreur : je viens de défendre les amendements AC174 et AC176. Je vais donc défendre, à présent, les amendements de repli AC175 et AC177. Ils ciblent plus particulièrement les petites communes, notamment rurales, où les problèmes de financement que je viens de décrire sont encore plus aigus.

M. Christophe Marion, rapporteur. Avis défavorable.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Je suis étonné que le rapporteur pour avis et notre collègue d’extrême droite jugent cette série d’amendements irrecevables ou hors sujet, puisqu’ils ont été jugés recevables par notre commission.

Dans mon département, le maire d’une commune de 8 000 habitants m’a indiqué que sa facture énergétique allait augmenter de 400 000 euros cet hiver, soit 50 euros par habitant, ce qui est intenable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC180 de M. Rodrigo Arenas.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Les communes françaises qui ont fait le choix de « l’accueil de qualité » sur la pause méridienne sont déclarées en « centre de loisirs » et ont intégré ce temps d’accueil au contrat de la caisse d’allocations familiales (CAF), via la convention territoriale globale (CTG). Par ce contrat, la CAF finance une partie des charges, notamment une partie des salaires des « animateurs de pause méridienne ». Or, sur ce temps, la CAF a décidé de ne prendre en charge qu’une heure et demie sur les deux heures d’accueil, considérant que le temps du repas, de trente minutes, n’est pas reconnu comme un temps éducatif, alors que son rôle dans l’éducation aux attitudes nutritionnelles est crucial, et que son impact, bien au-delà des comportements des enfants, modifie de façon vertueuse les habitudes de consommation des familles.

Cet amendement s’inscrit dans la continuité des objectifs de la loi dite « Egalim », et demande l’intégration de cette demi-heure de repas dans la CTG. Cela permettrait mécaniquement d’augmenter la participation de la CAF au financement de ce temps d’accueil ; ce serait aussi une manière de reconnaître l’importance de l’accueil éducatif sur le temps du repas. Cette mesure est estimée à 250 millions d’euros : c’est à peine 10 % du coût qu’a représenté, pour le budget de l’État, la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Cette question est de la compétence de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et doit être abordée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion thématique sur le recrutement supplémentaire d’enseignants.

Suivant la préconisation de M. Christophe Marion, rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-AC204 de M. Jérôme Legavre.

Amendement II-AC156 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Nous proposons de créer 10 000 postes d’enseignants à la rentrée prochaine car, contrairement aux affirmations du ministre Pap Ndiaye, il n’y avait pas, en cette rentrée, un professeur devant chaque classe. Le Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale (Snpden) a montré qu’il manquait des enseignants dans plus d’un tiers des établissements du second degré. La création de 10 000 postes permettrait au moins de compenser les réductions de postes massives qui ont eu lieu au cours du quinquennat Blanquer : 7 900 postes ont été supprimés entre 2017 et 2022 dans le second degré et le PLF pour 2023 prévoit 2 000 nouvelles suppressions.

M. Roger Chudeau (RN). Nous voterons contre cet amendement, parce que c’est une fois encore le programme 139 que nos amis d’ultragauche se proposent de ponctionner : cela devient une obsession. Je ne sais pas ce que vous avez contre l’enseignement privé sous contrat, où il y a des élèves, des professeurs, et même des syndicats. Vous proposez de créer 10 000 postes de professeurs : pourquoi pas 100 000 ? Cela n’a pas de sens, c’est de la pure démagogie.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Vous avez raison : pourquoi pas 100 000 ? Certains syndicats estiment que c’est le nombre d’enseignants qu’il faudrait en plus pour remplir toutes les missions fixées par l’État. Notre demande est donc bien modeste. Monsieur Chudeau, l’ultragauche existe dans ce pays, et ce n’est pas nous.

Enfin, si nous avons proposé de prendre des crédits sur le programme 139, c’est parce qu’il fallait bien en prendre quelque part pour que notre amendement soit recevable. Vous remarquerez que les exposés sommaires de nos amendements appellent le Gouvernement à lever ces gages.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Le taux d’encadrement s’améliore dans le premier degré, passant de 23,2 élèves par classe en 2017 à 21,8 en 2021, et ce nombre continuera à diminuer à l’horizon 2023. Si le schéma d’emplois prévoit une baisse d’environ 2 000 postes – 1 117 dans le premier degré et480 dans le second degré publics, 502 dans l’enseignement privé sous contrat, soit 0,19 % de l’ensemble des postes du ministère –, cela tient au contexte démographique. L’année scolaire 2023-2024 sera en effet marquée par une forte baisse du nombre d’élèves : moins 90 000 élèves dans le premier degré, moins 10 000 élèves dans le second degré. Si nous avions suivi la baisse démographique, ce sont 5 000 emplois que nous aurions pu supprimer : avec seulement 2 000, le taux d’encadrement s’améliorera. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC157 de M. Paul Vannier.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à maintenir les 2 000 postes d’enseignants que vous envisagez de supprimer. Certes, le nombre d’élèves moyens par classe diminue mais avec plus de 23 élèves par classe en moyenne, la France demeure extrêmement loin de la moyenne européenne, qui est de 19 élèves par classe. Il faut continuer à disposer d’enseignants pour diminuer ce nombre. Alors qu’il manque des enseignants, les suppressions de postes ne peuvent conduire qu’à aggraver la pénurie. Si ces suppressions sont maintenues, nous connaîtrons à nouveau des difficultés en septembre prochain pour répondre à l’exigence d’un professeur devant chaque classe.

Suivant la préconisation de M. Christophe Marion, rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC133 de Mme Francesca Pasquini.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à recréer les postes supprimés de fait dans la mission Enseignement scolaire car non renouvelés en 2023. Ces suppressions envoient un mauvais signal politique, alors que 35 % des établissements affirment avoir au moins un poste d’enseignant vacant. La baisse du nombre d’élèves ne saurait justifier le non-renouvellement de ces emplois à plein temps : elle devrait au contraire être considérée comme une chance pour préserver la politique de dédoublement. S’il est vrai que le nombre d’élèves dans le premier degré devrait diminuer à la rentrée prochaine, les effectifs enseignants pourraient être maintenus pour être redéployés dans des établissements en REP et REP+ afin de dédoubler d’autres niveaux du primaire comme les CM1 ou les CM2, où les effectifs moyens restent trop élevés, sans oublier les classes de grande section de maternelle.

Suivant la préconisation de M. Philippe Fait, rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion portant sur l’enseignement du premier degré.

Amendement II-AC158 de M. Paul Vannier.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Nous proposons le recrutement d’enseignants du premier degré afin de reconstituer un vivier de remplacement. En 2021, 21,6 % des absences n’ont pas été remplacées. Cela peut sembler peu au premier abord mais, sur le terrain, on s’en rend compte immédiatement. Dans mon département rural, l’année dernière, des écoles à classe unique ont été fermées un certain nombre de jours dans l’année, ou encore une classe dans une école à deux ou trois classes. Ce défaut de service public est insupportable : il y a nécessité absolue de reconstituer un vivier de remplacement.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. L’action 05 Remplacement du programme 140 Enseignement scolaire public du premier degré bénéficie déjà d’une hausse de 6 %, passant de 1,9 à 2,1 milliards d’euros. Assurer le remplacement des enseignants absents constitue une priorité, sur laquelle le Président de la République s’est engagé. Dans le premier degré, les personnels titulaires remplaçants sont mobilisés dès la première demi-journée d’absence d’un enseignant. Les emplois affectés au remplacement représentent 8,7 % des emplois du premier degré, soit une proportion très stable. Le schéma d’emplois ne remet absolument pas cela en cause. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC39 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Après avoir supprimé 8 000 postes dans le second degré sous le précédent quinquennat, le ministère s’attaque désormais au premier degré en supprimant 1 117 postes pour la rentrée 2023. L’argument de la baisse des effectifs n’est pas recevable pour la France, qui fait partie des pays européens avec le plus d’enfants par classe en primaire : 19 élèves, contre 13,5 en moyenne dans l’Union européenne. Alors que la profession d’enseignant est en pleine crise d’attractivité, une telle suppression de postes nous paraît dangereuse car elle serait synonyme de conditions de travail dégradées pour les personnels et de manque d’accompagnement pour les élèves. L’amendement vise donc à rétablir les 1 117 postes supprimés pour la rentrée 2023, afin d’assurer un meilleur taux d’encadrement dans les classes.

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). L’argument de la baisse du nombre d’élèves est inopérant car les suppressions de postes de ces dernières années n’étaient pas corrélées avec cette évolution. Ainsi, alors que le nombre d’élèves dans le secondaire a augmenté entre 2017 et 2022, le ministère a supprimé 1 800 emplois à plein temps à la rentrée 2021, justifiant cela par un transfert en volume d’heures d’enseignement. Par ailleurs, cette politique est une traduction dans l’Éducation nationale de la philosophie du « travailler plus pour gagner plus », que nous récusons.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Mon collègue Christophe Marion a déjà répondu s’agissant de la baisse démographique et de l’amélioration du taux d’élèves par classe. Celui-ci est estimé pour 2023 à 21,3 contre 23,2 à la rentrée 2017. Par ailleurs, le schéma d’emplois ne remet pas en cause la poursuite du dispositif de dédoublement de classes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC160 de M. Paul Vannier.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Nous proposons la tenue d’un concours supplémentaire pour recruter d’urgence les 2 000 enseignants du premier degré que les concours de la session 2022 n’ont pas permis de recruter. Le 26 août dernier, le ministre a annoncé la tenue d’un concours exceptionnel de titularisation des contractuels du premier degré. Or ce concours, s’il a lieu, ne permettra pas d’augmenter le nombre d’enseignants devant les élèves puisque les contractuels sont déjà en poste. Nous proposons donc l’ouverture d’une session exceptionnelle du concours de recrutement des professeurs des écoles au début de l’année 2023 dans les académies pour lesquelles les postes proposés à la session 2022 n’ont pas été pourvus. Pour éviter à M. Chudeau de s’épuiser dans une attaque inutile, je tiens à préciser que nous avons gagé cet amendement sur les crédits de l’enseignement privé mais que nous demandons au Gouvernement de lever ce gage.

M. Philippe Fait, rapporteur pour avis. Ce n’est pas parce qu’on augmente le nombre de postes au concours qu’il y aura mécaniquement plus de candidats. Il faut travailler plus généralement sur l’attractivité de cet emploi. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Nos amendements s’inscrivent dans le projet éducatif qui est le nôtre, et qui diffère du vôtre. Il ne faut pas réduire un amendement à sa stricte portée mais au contraire l’examiner dans le cadre global de ce débat. La crise du recrutement ne sera pas réglée seulement en créant de nouveaux postes mais nous avons besoin de créer de nouveaux postes pour recruter de nouveaux enseignants. Nous avons fait des propositions pour augmenter le salaire des enseignants et pour redonner du sens au métier : vous les avez toutes refusées.

Mme Cécile Rilhac (RE). Monsieur Walter, vous avez raison mais votre amendement est déjà satisfait d’un point de vue purement budgétaire : les concours sont d’ores et déjà prévus, particulièrement dans les académies de Créteil, de Versailles et de la Guyane.

Concernant les contractuels, nous avons prévu des concours exceptionnels en 2023. Ils renforceront le vivier de remplaçants, ce qui permettra aux enseignants, particulièrement du premier degré, de partir plus facilement en formation et aux directeurs d’école de bénéficier de décharges.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons à une discussion relative à l’enseignement du second degré.

Amendement II-AC203 de M. Jérôme Legavre.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à créer 7 900 postes dans le second degré pour compenser le désastre de la suppression d’un nombre équivalent de postes ces cinq dernières années. Cela représente l’équivalent de 175 collèges fermés alors même que le nombre d’élèves du second degré a augmenté de 96 000 sur la même période. En conséquence, le nombre de classes de plus de 30 élèves a augmenté de 5 % entre 2017 et 2022, et le nombre d’heures d’enseignement non assurées par manque de remplaçants a été plus que doublé entre le début et la fin du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Ces suppressions de postes ont conduit à une dégradation massive des conditions d’études des élèves et des conditions de travail des enseignants.

M. Christophe Marion, rapporteur pour avis. Les crédits de l’action 11 du programme 141, qui financent les postes de remplaçants dans le second degré, qu’ils soient titulaires ou contractuels, augmentent en 2023, passant de 1,5 à 1,6 milliard d’euros. Cela témoigne de l’effort qui est fait pour abonder les crédits dédiés au remplacement. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

La séance est levée à treize heures cinq.

 


Présences en réunion

 

Présents.  Mme Emmanuelle Anthoine, M. Rodrigo Arenas, M. Philippe Ballard, Mme Géraldine Bannier, M. Quentin Bataillon, Mme Béatrice Bellamy, Mme Sophie Blanc, Mme Anne Brugnera, Mme Céline Calvez, Mme Agnès Carel, M. Roger Chudeau, Mme Fabienne Colboc, M. Laurent Croizier, M. Hendrik Davi, Mme Béatrice Descamps, M. Francis Dubois, M. Inaki Echaniz, M. Laurent Esquenet-Goxes, M. Philippe Fait, Mme Estelle Folest, Mme Anne-Sophie Frigout, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Fatiha Keloua Hachi, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Sarah Legrain, M. Stéphane Lenormand, Mme Christine Loir, M. Alexandre Loubet, M. Christophe Marion, Mme Graziella Melchior, Mme Sophie Mette, M. Karl Olive, Mme Francesca Pasquini, M. Stéphane Peu, Mme Lisette Pollet, M. Alexandre Portier, Mme Angélique Ranc, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Cécile Rilhac, M. Bertrand Sorre, Mme Violette Spillebout, Mme Sophie Taillé-Polian, M. Paul Vannier, M. Léo Walter

 

Excusés.  Mme Aurore Bergé, M. Bruno Bilde, M. André Chassaigne, M. Raphaël Gérard, M. Frantz Gumbs, M. Frédéric Maillot, M. Julien Odoul, Mme Claudia Rouaux, M. Boris Vallaud

 

Assistaient également à la réunion.  Mme Elsa Faucillon, M. Joris Hébrard