Compte rendu

Commission
des affaires sociales

– Suite de l’examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (n° 760) (Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale)              2

– Présences en réunion.................................27

 

 

 

 

 


Lundi
30 janvier 2023

Séance de 21 heures 15

Compte rendu n° 45

session de 2022-2023

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
présidente

 

 


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La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.

 

La commission des affaires sociales procède à la suite de l’examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (n° 760) (Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale).

 

Mme la présidente Fadila Khattabi. Chers collègues, nous avons examiné 143 amendements ; il nous en reste 5 423...

Article 2 (suite) : Mise en place d’un indicateur relatif à l’emploi des salariés âgés

Amendement AS3140 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Le contrat de génération, institué en 2013 mais abrogé depuis, comportait des obligations très strictes pour les entreprises de plus de cinquante salariés. Nous proposons donc de préciser les dispositions du présent projet de loi afin que l’objectif d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des salariés âgés soit atteint. Il s’agirait d’indiquer que cet objectif prend en considération le recrutement des salariés âgés dans l’entreprise, l’anticipation de l’évolution des carrières professionnelles, l’amélioration des conditions de travail et la prévention des situations de pénibilité, le développement des compétences et des qualifications et l’accès à la formation, l’aménagement des fins de carrière et de la transition entre activité et retraite, ainsi que la transmission des savoirs et des compétences et le développement du tutorat. Nous estimons que ces questions mériteraient des échanges réguliers au sein de l’entreprise.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale. Avis défavorable.

Il y aura des critères nationaux pour l’index, qui seront définis par décret après consultation des syndicats. Les branches et les entreprises pourront ensuite les adapter à la réalité du terrain. Ne rigidifions pas les choses.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). La mesure que nous proposons est au contraire très souple. Ce que nous voulons, c’est inscrire dans le droit des dispositions un peu contraignantes. Lorsque cela concerne les salariés, la contrainte est au rendez-vous, mais lorsqu’il s’agit des entreprises, il n’y a plus rien.

M. Charles de Courson (LIOT). Pour le bon déroulement de nos débats, pourriez‑vous nous indiquer, madame la présidente, le nombre d’heures qu’il nous reste pour examiner le texte ?

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous avons jusqu’à mercredi, 20 heures – étant entendu que s’il ne nous restait que quelques amendements à examiner, nous pourrions aller un peu au-delà.

M. Charles de Courson (LIOT). Il ne nous reste donc plus que dix-huit heures environ...

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous disposions de vingt-huit heures au total pour examiner l’ensemble du texte.

M. Charles de Courson (LIOT). Pour arriver au bout du texte, il faudrait que nous avancions au rythme de 250 amendements à l’heure. Tout est fait pour que nous n’abordions pas l’article 7 !

Mme la présidente Fadila Khattabi. Cela ne tient qu’à vous, chers collègues !

M. Charles de Courson (LIOT). Peut-être serait-il bon que les groupes qui ont déposé beaucoup d’amendements répétitifs les retirent pour que nous puissions l’examiner ?

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). J’invite donc nos collègues du groupe Renaissance à retirer leurs amendements répétitifs...

Il convient d’aborder tous les sujets importants, et l’emploi des seniors en est un. La disposition que propose notre collègue Dharréville n’est absolument pas rigide. Au contraire, tous ceux qui ont déjà participé à des négociations syndicales savent que le fait d’imposer un thème de négociation – les salaires, l’égalité entre les femmes et les hommes, etc. – permet de fixer un cadre à la discussion. Une négociation sans objectif ni thématique ne débouche en général sur rien. Il s’agit donc d’une suggestion de bon sens, qui permettra de rendre le texte opérant. Si j’étais macroniste, je voterai avec enthousiasme pour cet amendement !

M. Thibault Bazin (LR). Ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) comporte plusieurs dispositions qui sont renvoyées soit à des décrets soit à une négociation avec les partenaires sociaux. Pour ce qui concerne la pénibilité, par exemple, un accord entre les employeurs et les organisations syndicales pourrait déboucher sur une codification. Vous renvoyez aussi à un accord la définition des indicateurs de l’objectif d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des salariés âgés. L’amendement de Pierre Dharréville, loin de rigidifier les choses, ne ferait que les préciser. Je pense que nous pourrions nous retrouver autour des différents thèmes répertoriés. Si les négociations conduites en parallèle aboutissaient d’ici à la fin de la navette parlementaire, il serait toujours temps d’en codifier les résultats, mais, en attendant, adoptons cet amendement !

M. Nicolas Turquois (Dem). Je suis macroniste et je trouve l’amendement intéressant. Je souhaiterais que le départ à la retraite ne soit plus vécu comme une rupture, comme c’est encore trop souvent le cas. Les principes énoncés ici me semblent pertinents. En l’état, l’index seniors est trop léger. Il serait bon d’inscrire dans la loi un certain nombre de critères.

M. Marc Ferracci (RE). L’amendement me semble déjà satisfait par le code du travail, dans les articles traitant de la gestion des emplois et des parcours professionnels, puisque le projet de loi prévoit la négociation d’un tel accord concernant l’emploi des seniors. On s’attachera, dans ce cadre-là, à la formation professionnelle, à la mobilité professionnelle ou géographique, etc.

M. Jérôme Guedj (SOC). Tout le monde s’accorde à dire que l’index seniors, c’est mieux que rien. Tâchons donc de le concevoir au mieux. Nous ne connaissons pas les indicateurs qui seront retenus – on nous a expliqué qu’il fallait, d’une certaine façon, les « décentraliser » et que chaque branche les définisse. On aurait pourtant pu déterminer un socle commun, ce qui aurait permis des comparaisons. À cet égard, l’amendement de Pierre Dharréville a la vertu de circonscrire le périmètre d’application de l’index. On ne peut pas à la fois renvoyer à un décret la liste des indicateurs et leurs méthodes de calcul et refuser d’inscrire dans la loi ce que recouvre concrètement l’objectif d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des salariés âgés. L’adoption de cet amendement serait l’expression d’une coproduction vertueuse et permettrait d’envoyer un signal fort avant le débat en séance.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). Si c’est déjà écrit dans le code du travail et que cela va sans le dire, cela ira encore mieux en le disant : adoptons cet amendement !

Mme la rapporteure générale. Je le répète, une telle disposition rigidifierait les choses. Si des branches ou des entreprises veulent ajouter des critères qui ne figurent pas dans la liste, elles ne le pourront pas.

Mme Laure Lavalette (RN). Madame Parmentier-Lecocq, pour rebondir sur notre débat de la fin d’après-midi – que nous n’avons pu mener à son terme –, je vous ai apporté la proposition de réforme des retraites de Marine Le Pen. Je vous l’offre. Pour l’heure, le véhicule législatif ne nous permet pas de la décliner, mais si vous êtes réélue en 2027, vous aurez certainement l’occasion de la voter.

L’amendement de M. Dharréville vise à contenter les salariés sans être trop rigide avec les entreprises. C’est un jeu d’équilibriste : il faut faire les choses « en même temps » – mais vous avez une certaine pratique en la matière, chers collègues de la majorité.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS3141 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Par l’amendement AS3141, il s’agit, là encore, de préciser le dispositif, afin qu’il repose sur des objectifs chiffrés et des indicateurs concrets et réalistes, et que l’on puisse ainsi évaluer les effets des actions entreprises.

Mme la rapporteure générale. Fixer des objectifs chiffrés n’aurait aucun sens : les entreprises et les secteurs sont très divers et l’on ne peut imposer par la loi, uniformément et sans concertation, un pourcentage de recrutements au-dessus d’un certain âge.

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). L’amendement ne fixe aucun objectif. Il reviendrait au Gouvernement de les définir, à la suite de négociations avec les branches.

Je voudrais à ce propos appeler votre attention sur le fait que notre amendement visant à substituer au décret la négociation avec les organisations syndicales a été déclaré irrecevable au motif qu’il comportait une injonction au Gouvernement. Cela me semble très discutable.

La commission rejette l’amendement.


Amendements AS3782, AS3795, AS3776, AS3785, AS3796 et AS3786 de M. Sébastien Peytavie, AS4834 de M. Pierre Dharréville, AS1278 de M. Lionel Causse, AS6333, AS3755, AS6374, AS6411 et AS6429 de M. Sébastien Peytavie, AS3142 de M. Pierre Dharréville, amendements identiques AS2167 de M. Arthur Delaporte, AS3751 de M. Sébastien Peytavie, AS4654 de M. Paul-André Colombani et AS7149 de Mme Astrid Panosyan-Bouvet, amendements AS6233, AS6242, AS6252 et AS6198 de M. Sébastien Peytavie, amendements identiques AS860 de M. Joël Aviragnet et AS5915 de M. Sébastien Peytavie, amendements AS5947 et AS5971 de M. Sébastien Peytavie, AS861 de M. Joël Aviragnet, AS5992 et AS6021 de M. Sébastien Peytavie, AS862, AS863 et AS864 de M. Joël Aviragnet, amendements identiques AS865 de M. Joël Aviragnet et AS5652 de M. Francis Dubois (discussion commune).

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Nous présentons une série d’amendements visant à faire de l’index seniors un outil de contrôle ambitieux, assorti de sanctions dissuasives, afin que les entreprises ne dérogent pas à leurs obligations en matière d’emploi des seniors.

Ceux-ci sont massivement victimes de discrimination à l’embauche et au maintien à l’emploi. Beaucoup d’entreprises les considèrent comme des salariés jetables et ne veulent pas prendre d’engagement par peur de prétentions salariales pourtant légitimes après quarante années de travail et d’expérience. Or force est de constater que l’index proposé par le Gouvernement manque d’ambition. Il n’est pas contraignant et ne changera certainement rien.

Nous avons découvert avec surprise qu’il s’agissait d’une copie au rabais de l’index de l’égalité professionnelle, lequel est inefficace du fait qu’il ne comporte pas d’indicateurs clairs, que ses méthodes de calcul manquent de transparence et qu’il est assorti de sanctions insuffisamment dissuasives. Alors qu’il existe encore un écart de 22 % des salaires entre hommes et femmes et qu’on observe une surconcentration d’emplois précaires et de temps partiel chez les femmes, 92 % des entreprises obtiennent comme par magie un score supérieur à 75 sur 100. Des directeurs des ressources humaines ont même admis qu’il était très simple de manipuler les données pour obtenir quelques points supplémentaires. On trouve sur internet des conseils pour obtenir la note la plus favorable et grappiller des points en jouant sur les indicateurs. Les contrôles sont rares faute de budget. L’index de l’égalité professionnelle sert donc essentiellement de faire-valoir aux entreprises.

Avec l’index seniors proposé par le Gouvernement, nous risquons de nous trouver dans la même situation. Pire, il n’impose même pas aux entreprises d’obtenir un score minimum : l’obligation ne concerne que la publication. Il est évident qu’en l’état, son effet sera nul. Cela révèle l’absence totale de volonté de la part du Gouvernement de rendre de la dignité aux seniors.

Nous demandons donc que les entreprises soient obligées non seulement de publier l’index mais également d’obtenir une note suffisamment élevée, comme c’est le cas pour l’index de l’égalité professionnelle, qui requiert un score de 75 sur 100. Nous ne pouvons voter en faveur d’un index seniors qui n’exige même pas des entreprises des résultats corrects. Le Gouvernement s’étant déclaré ouvert à toute amélioration potentielle de cet outil, nous en proposons plusieurs, en espérant que les plus ambitieuses seront adoptées.

Nous souhaitons étendre le dispositif aux entreprises de plus de onze salariés ou, à défaut, de cinquante : il ne faudrait pas qu’il ne concerne qu’une minorité de salariés. Les entreprises de plus de trois cents salariés ne représentent en effet que 39 % du total des entreprises et la moitié des salariés français travaillent dans de petites et moyennes entreprises. Ce sont 7 millions de personnes qui seraient ainsi privées des mesures d’accompagnement en faveur des seniors.

Pour ce qui est des sanctions, nous proposons d’opérer une distinction entre les entreprises en fonction de leur taille : une PME ne dispose pas des mêmes ressources qu’une multinationale. En outre, leur montant maximum, fixé à 1 % des rémunérations et gains, est dérisoire. Les entreprises qui licencient massivement les salariés seniors le font par intérêt financier, parce qu’elles considèrent qu’un salarié senior ne leur rapporte rien et qu’il est bon à jeter. Un index ambitieux doit être assorti de sanctions dissuasives et punitives, sans quoi le dispositif restera une coquille vide. Nous sommes donc favorables à des sanctions allant de 3 % à 35 % des rémunérations et gains, en fonction de la taille de l’entreprise.

Le sort réservé à ces amendements en dira long sur la volonté de la majorité de donner à ce nouvel outil les moyens d’avoir un effet réel sur l’emploi des seniors et de rendre leur dignité aux travailleurs et travailleuses les plus âgés.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). L’index est censé procurer des informations sur l’emploi des seniors dans les entreprises et aussi être un outil incitatif. Or le seuil de trois cents salariés ne correspond pas au tissu économique de certains territoires, notamment ruraux. Sachant que la problématique de la mobilité est l’un des principaux enjeux en matière d’emploi des seniors, abaisser le seuil à onze salariés comme le propose l’amendement AS4834 permettrait d’avoir connaissance de la situation dans des territoires où le tissu économique est majoritairement constitué de petites entreprises embauchant un petit nombre de salariés. Cela permettrait de mener une politique beaucoup plus efficace en matière de retour à l’emploi des seniors.

M. Éric Alauzet (RE). L’amendement AS1278 est défendu.

M. Nicolas Sansu (GDR - NUPES). On veut nous faire croire que cet index va régler la question de l’emploi des seniors et, ce faisant, celle des retraites, mais ce n’est qu’une friandise destinée à faire passer la pilule ! De surcroît, le dispositif sera sans doute censuré par le Conseil constitutionnel. Bref, quand le sage désigne la lune, certains regardent l’index...

Le seuil de cinquante salariés, que nous proposons par l’amendement AS3142, ne sort pas de nulle part : c’est celui qui est appliqué pour l’index de l’égalité professionnelle. Cela étant, les organisations syndicales vous diront que ce dernier n’a rien changé.

M. Arthur Delaporte (SOC). Les différents groupes membres de la NUPES ont déjà eu l’occasion d’exprimer leur scepticisme concernant cette mesure. Il ne s’agit que d’un paravent qui masquera mal la dégradation de l’emploi des seniors que provoquera la réforme. En outre, nous doutons, tout comme M. de Courson, de la recevabilité constitutionnelle de cette disposition – qui en devient presque fictive.

Cela étant, en l’état, le dispositif ne s’appliquerait qu’aux entreprises de plus de trois cents salariés. Seuls 39 % – au maximum – des salariés seraient ainsi concernés par cet index. C’est pourquoi nous proposons d’élargir son champ d’application aux entreprises de plus de cinquante salariés. Quitte à inventer une usine à gaz, autant qu’elle touche le plus grand nombre !

M. Paul-André Colombani (LIOT). L’index seniors ne réglera en rien le problème de l’emploi des seniors. En l’état, cet index et l’obligation de négocier un accord de gestion des emplois et des parcours professionnels ne concerneraient que les entreprises de plus de trois cents salariés, qui n’emploient que 39 % des salariés du secteur privé. Le groupe LIOT propose donc d’abaisser le seuil aux entreprises d’au moins cinquante salariés. Si elle était appliquée en l’état dans des territoires fragiles comme la Corse, les territoires d’outre-mer ou les zones de montagne, cette disposition ne servirait à rien.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet (RE). L’index de l’égalité professionnelle s’appliquait initialement aux entreprises de plus de deux cent cinquante salariés, puis, au bout d’un an, à celles de plus de cinquante salariés. Mon amendement vise à introduire une cohérence entre les deux index. En effet, la place des seniors en entreprise constitue un défi national tout aussi important que l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, les travailleurs d’aujourd’hui étant les retraités de demain. En outre, fixer le même seuil et le même délai de mise en application pour les deux index serait plus simple et plus lisible pour les entreprises. Enfin, alors que l’index de l’égalité professionnelle se fonde sur des historiques de rémunération, il est probable que l’index seniors repose sur des critères démographiques – nombre de salariés, mobilité interne, recrutements – plus facilement mobilisables et exploitables par les entreprises, quelle que soit leur taille.

M. Elie Califer (SOC). Je défends l’amendement AS860. Il serait bon, en effet, de faire preuve d’un peu de cohérence. En outre, un seuil trop élevé ne serait pas adapté à certains territoires. C’est pourquoi nous préférerions qu’il soit fixé à cinquante salariés.

M. Arthur Delaporte (SOC). Je défends les amendements AS861 et AS862. Toutefois, si certains collègues estiment, comme on me le souffle, qu’un seuil aussi bas risquerait d’inclure les start-up, qui embauchent peu de seniors, on peut aussi le fixer à 125 salariés, comme dans l’amendement AS861. Au-dessus de 100 salariés, on est sûr de trouver des seniors.

M. Jérôme Guedj (SOC). Je défends les amendements AS863, AS864 et AS865. Nous multiplions les propositions en vue d’améliorer ce mauvais index, avec des amendements visant à abaisser le seuil à 50, 100, 150, 175, 200 ou 250 salariés. Toutefois, il me semble qu’un consensus pourrait se dégager autour du seuil de 50 salariés, certains membres du groupe Renaissance défendant cette option. Nous pourrions ainsi passer à autre chose.

M. Fabien Di Filippo (LR). L’amendement AS5652 est défendu.

Mme la rapporteure générale. M. Peytavie mérite une petite médaille pour ses cent quarante‑deux amendements, déclinant de plus de dix à plus de deux cent cinquante le nombre de salariés rendant les entreprises éligibles au dispositif.

Tout en étant nécessaire, l’index seniors implique une charge administrative non négligeable pour l’entreprise. Ses résultats sont particulièrement utiles lors des négociations sur la gestion de l’emploi au sein de l’entreprise, qui s’imposent aux entreprises de plus de trois cents salariés. Il est logique que sa publication soit obligatoire pour les entreprises de cette taille.

Avis défavorable à l’ensemble des amendements.

M. François Ruffin (LFI - NUPES). Que va changer votre index seniors pour le gros paquet de seniors que La Voix du Nord a décidé de licencier, pour Marc, serveur dans un restaurant, licencié parce qu’il ne galopait pas assez vite dans les escaliers, pour la série d’auxiliaires de vie, d’agents d’entretien, de manutentionnaires de chez Dunlop qui partent pour inaptitude, sans la moindre proposition de reclassement ? Rien !

En allongeant l’âge de la retraite de 60 à 62 ans, on a multiplié par quatre en dix ans le nombre de seniors au revenu de solidarité active. On a remplacé une retraite méritée par de l’allocation pauvreté : des gens qui gagnaient 1 200 ou 1 300 euros se sont retrouvés à toucher 500 euros. Votre projet de loi ne changera rien pour tous ceux-là. Au contraire, vous allez reproduire la même chose par l’allongement de 62 à 64 ans.

Vous n’agissez pas pour que les seniors ne se fassent pas jeter de l’entreprise, pour qu’ils n’en sortent pas usés, épuisés, ce qui fait que l’on a un taux d’emploi des seniors particulièrement bas – en dessous de 60 %.

Les syndicats vous l’ont dit la semaine dernière, l’index ne sert à rien d’autre qu’à faire de l’habillage, à divertir le regard de l’essentiel. Les Français l’ont très bien compris, malgré toute votre pédagogie et vos index – il ne manque que des numéros verts –, le cœur de votre réforme, c’est deux ans fermes !

M. Sébastien Jumel (GDR - NUPES). Votre index, c’est de l’enfumage ! Sous la législature précédente, vous avez commencé à instaurer un permis de licencier en paix, notamment en barémisant les indemnités prud’homales, ce qui permettait aux tauliers de calculer combien leur coûterait le licenciement avant même d’y procéder. Vous avez institutionnalisé, pour ainsi dire, les licenciements de compétitivité, ou boursiers, qui permettent de se débarrasser de ceux que vous appelez les seniors, qui sont, pour nous, des travailleurs expérimentés, qui ont un savoir-faire, une expertise. D’un coup de crayon, vous décidez de les jeter, comme des kleenex.

Chez moi, c’est un paquet de seniors de la fonderie Sival qui va se retrouver « sur le sable » – au chômage. Pour eux, c’est la double peine : non seulement ils seront immédiatement percutés par votre réforme de l’assurance chômage, censée stimuler les demandeurs d’emploi dans leur recherche d’emploi, mais votre index va révéler son inefficacité absolue à leur permettre de retrouver du boulot. Pour ceux-là, qui ont la valeur travail chevillée au corps et une expertise, il faudrait d’abord que leurs corps suivent – ce n’est pas évident et c’est la raison pour laquelle nous resterons fondamentalement opposés au report de l’âge de la retraite. Ils auraient aussi besoin de formations, de contrats stables, de propositions de boulots en proximité, ce que votre index inefficace, inutile et d’enfumage est loin de résoudre.

Je le dis pour que vous ne puissiez pas vous prévaloir d’avoir trouvé un consensus en sortant de cette commission.

M. Thomas Ménagé (RN). Un consensus se dégage tout de même : cet index ne sert à rien, c’est de l’enfumage.

Monsieur Peytavie, les entreprises de 300 salariés ont les services RH et les moyens de se payer des cabinets. Pour elles, cet index ne servira peut-être à rien, mais il sera une charge administrative incroyable pour une entreprise de onze salariés – d’ailleurs, comment le calculer sur un si petit nombre d’employés ?

Le proposer, c’est vraiment ne pas connaître nos artisans, commerçants, très petites entreprises, qui ont quelques ouvriers, qui gèrent leur entreprise, souvent avec leur femme, qui font vivre des millions de Français et que le Rassemblement national essaie de défendre. Ils subissent déjà la hausse des matières premières, de l’énergie et un gouvernement qui ne les soutient pas. Et vous profitez de cette réforme des retraites pour taper sur les patrons, pour distiller votre haine du petit patron. Ce n’est pas l’objectif.

Nous devrions au moins nous entendre sur le fait de passer à autre chose. Là, vous servez le Gouvernement. Cet index ne sert à rien, retirez vos amendements ! Avançons vers le cœur de la réforme – le report de l’âge légal, la pénibilité, le cumul emploi-retraite. Voilà ce que les Français attendent de nous !

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (RE). Après avoir dit pis que pendre de l’index seniors, la NUPES veut l’appliquer à un plus grand nombre d’entreprises. Un peu de cohérence !

Il faut savoir distinguer les outils en fonction de la taille des entreprises. Une entreprise de plus de trois cents salariés a une direction des ressources humaines, une stratégie de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, des objectifs. On peut lui imposer cet index seniors, qui la forcera à étudier sa politique d’emploi pour les seniors et à être proactive sur le sujet. Les entreprises plus petites, il faut plutôt les accompagner avec des outils beaucoup plus près du terrain – aide au recrutement, à la formation –, pour identifier les publics et ses besoins.

Je propose donc de conserver le seuil initial : il est bien ciblé et ménage nos PME.

Mme Cyrielle Chatelain (Ecolo - NUPES). Le Rassemblement national, qui n’a pas voté les amendements de suppression, se découvre contre la mesure et met beaucoup plus de temps et d’énergie à taper sur la NUPES qu’à critiquer le projet du Gouvernement.

Vous avez, au Rassemblement national, une vision étonnante des femmes au travail : les chefs d’entreprise, dites-vous, « gèrent leur entreprise avec leur femme ». Une femme ne pourrait donc pas être cheffe d’entreprise ; les femmes aident, elles n’ont pas de compétences ni droit à un salaire. Aujourd’hui, les femmes ont le droit d’être reconnues et d’avoir un travail. C’est parce que ces femmes-là – votre mère, peut-être – ont aidé leur mari sans être rémunérées qu’elles auront une moindre retraite.

Effectivement, nous essayons d’être constructifs et d’étendre ce pis-aller d’index seniors. Reconnaissons-le, il sert à bien peu de chose et ouvre des trappes à pauvreté, notamment pour les femmes, qui travaillent davantage à temps partiel et ont le taux d’activité le plus bas.

M. Fabien Di Filippo (LR). On peut penser ce que l’on veut de l’effectivité réelle de cet index seniors, mais dire que travailler équivaut à de la prison ferme n’est pas un bon message à envoyer à notre jeunesse. Le travail peut être épanouissant. Dans la vie, on ne construit rien sans travail.

Si l’on commence à tenir un tel discours sur le travail, c’est le début de la fin – pas pour la réforme des retraites, mais pour notre pays. Il faut garder le sens des réalités. S’imaginer que la richesse tombe du ciel, qu’on peut partager des choses qui n’ont pas été produites, c’est vivre dans un monde parallèle, qui est loin de la réalité d’aujourd’hui et encore plus loin de celle de demain.

M. Nicolas Turquois (Dem). M. Jumel a raison de parler des seniors comme de travailleurs expérimentés. C’est un gâchis qu’autant de plus de 55 ans se retrouvent au chômage ou en inactivité. Nous devons diffuser un message reconnaissant la richesse de ces personnes pour l’emploi, notamment par l’expérience qu’ils ont accumulée.

Je trouve l’index seniors insuffisant, mais il contribuera à faire entrer le sujet dans le discours public. S’il ne s’applique qu’aux entreprises de plus de trois cents salariés, des territoires entiers ne se sentiront pas concernés – ma circonscription n’en compte que trois ou quatre, mais d’autres, aucune. Les employeurs, dont je suis, n’ont pas tant de difficultés à remplir des obligations. C’est pourquoi le seuil de cinquante salariés ne me semble pas aberrant.

M. Arthur Delaporte (SOC). On nous reproche de n’être pas cohérents parce que nous déposons des amendements pour rendre le texte plus ambitieux. Après tout, c’est notre rôle de parlementaires. L’index seniors est sans doute peu utile, mais nous tentons de le rendre un peu plus utile.

Je salue l’honnêteté de mes collègues de la majorité qui, notamment par l’amendement de Mme Panosyan-Bouvet, demandent à toucher le plus d’entreprises possible. Cela va dans le bon sens.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet (RE). Je retire mon amendement et le présenterai à nouveau en séance publique.

L’amendement AS7149 est retiré.

La commission rejette successivement les autres amendements.

Amendement AS866 de M. Joël Aviragnet.

M. Elie Califer (SOC). L’amendement AS866 vise à préciser à l’alinéa 5 que les indicateurs sur les travailleurs seniors devront être envoyés par l’entreprise au ministère du travail ainsi qu’à Pôle emploi. Il s’agit de donner, non pas une contrainte, mais une orientation forte.

Mme la rapporteure générale. D’une part, il est explicitement prévu que les données sont rendues publiques. D’autre part, tel qu’il est rédigé, l’amendement n’est pas efficient. Je vous suggère de le redéposer en séance.

Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.

M. Elie Califer (SOC). La publication dans un journal local ou sur internet n’est pas la même chose qu’une communication au ministère du travail ou à Pôle emploi. Il s’agit bien d’avoir un suivi de l’emploi des seniors, n’est-ce pas ?

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS3143 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). L’amendement AS3143 tend à substituer au mot « publie » les mots « rend publics » pour s’assurer que l’index seniors, avec l’efficacité redoutable que nous lui prêtons, sera largement accessible en dehors de l’entreprise.

Marc Ferracci, lui, présentait l’index comme pouvant servir aux demandeurs d’emploi à s’orienter vers telle ou telle entreprise. Certes, il ne faut pas renoncer à considérer chacun comme capable d’entrer dans l’emploi, les travailleurs expérimentés comme les plus jeunes, d’ailleurs, auxquels on demande d’avoir de l’expérience avant de les embaucher. Le problème de l’emploi est plus complexe qu’il n’y paraît. À trop le saucissonner, on risque de se perdre.

Mme la rapporteure générale. L’amendement est satisfait. Retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS2358 de M. Stéphane Viry, AS3144 de M. Pierre Dharréville et AS777 de M. Dino Cinieri (discussion commune).

M. Stéphane Viry (LR). Mon amendement a pour objet de valoriser les travailleurs expérimentés.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Il s’agit de souligner l’imprécision du projet de loi : un salarié « âgé » ne répond pas à une définition particulière, ce qui rend l’index d’autant plus inopérant.

M. Dino Cinieri (LR). L’expression « de plus de 50 ans » est plus claire et moins péjorative à l’égard des personnes visées par la disposition que le mot « âgé ».

Mme la rapporteure générale. Avis favorable à l’amendement de M. Viry, défavorable aux deux autres.

M. Sébastien Jumel (GDR - NUPES). Les entreprises de plus de trois cents salariés sont tenues d’élaborer et de présenter un bilan social en entreprise, qui contient des informations obligatoires. Dans ceux que j’ai pu voir, il y avait toujours une pyramide des âges, avec le nombre et les âges des salariés. Quelle obligation nouvelle apporte votre index sur l’employabilité des seniors ?

La commission adopte l’amendement AS2358.

Puis elle rejette successivement les amendements AS3144 et AS777.

Amendement AS1303 de Mme Marie-Pierre Rixain.

Mme Stella Dupont (RE). L’amendement AS1303 vise à intégrer à l’index une précision concernant le sexe des seniors, de façon à suivre plus particulièrement l’évolution du maintien en emploi des hommes et des femmes.

Mme la rapporteure générale. Avis favorable. Bien plus qu’une précision de critères, c’est un principe qui est ici posé.

M. François Ruffin (LFI - NUPES). M. Jumel n’a pas reçu de réponse : qu’est-ce que l’index apporterait de plus que le bilan social des entreprises ?

M. Thibault Bazin (LR). La question des seniors n’est pas seulement une affaire de genre. Il faut examiner les conséquences de l’allongement de l’âge de départ à la retraite sur les mères de famille, qui sont les grandes oubliées de la réforme. Il y a un besoin d’harmonisation par le haut des droits familiaux et des pensions de réversion. Le compte n’y est pas. Présenter un tel amendement comme le moyen de traiter la situation des femmes est un leurre.

Mme Marie-Charlotte Garin (Ecolo - NUPES). Ce n’est évidemment pas avec un tel amendement que l’on s’occupe de la situation des femmes et des inégalités, notamment au regard de la retraite et des salaires. En revanche, les données dites différenciées sont très utilisées, notamment dans le développement, pour mesurer l’impact des projets.

Ces données plus fines permettraient de donner plus de visibilité sur les femmes, plus nombreuses parmi les personnes n’ayant ni emploi ni retraite, subissant des situations de dépendance ou ayant moins accès à l’emploi – le taux d’emploi est déjà catastrophique pour les jeunes femmes, plaçant la France au dix-neuvième rang des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Mme la rapporteure générale. Monsieur Jumel, les entreprises de plus de trois cents salariés établissent leur bilan social à partir de critères très généralistes – l’emploi, les rémunérations, les conditions d’hygiène, les autres conditions de travail. L’emploi des seniors n’y est pas précisé. Au contraire, un index entraînera une obligation de négociation avec les branches et sera public.

M. Sébastien Jumel (GDR - NUPES). Tous les bilans sociaux contiennent une pyramide des âges – consultez les sites de Verescence, de Danone, de Pochet du Courval, de Renault. Le bilan social, transmis à la direction du travail et consultable par tous les salariés, est communiqué aux délégués syndicaux du comité social et économique, qui peuvent le rendre public et se l’approprier. Il établit certaines informations, notamment la pyramide des âges dans l’entreprise.

Soit l’index n’apporte rien de nouveau, ce qui fait s’effondrer un petit argument de votre mauvaise réforme ; soit il y a une différence, mais vous devez le démontrer.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet (RE). Le bilan social contient en effet une pyramide des âges, mais l’index vise à rendre publiques des données démographiques sur le recrutement, la formation, le turnover et la mobilité pour une tranche d’âge.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS4203 de Mme Véronique Riotton.

Mme Christine Decodts (RE). L’amendement AS4203 vise à favoriser l’accès des seniors à la formation professionnelle et à mesurer celui-ci.

Mme la rapporteure générale. L’amendement est satisfait. Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement AS3145 de M. Yannick Monnet.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). L’amendement vise à publier les indicateurs en comparaison d’objectifs chiffrés d’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des personnes de plus de 50 ans.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable. Nous avons déjà eu ce débat.

M. François Ruffin (LFI - NUPES). En un clic, j’ai pu vérifier un bilan social de Renault France. Les chiffres figurent par catégorie professionnelle, au masculin et au féminin. Et les données sont publiques !

Vous êtes en train d’inventer un machin qui existe déjà ! Vous faites un maximum de mousse autour de ça, pour cacher l’essentiel : plus deux ans. Et l’index n’est assorti ni de sanctions ni d’objectifs, comme nos collègues communistes le proposent. C’est bidon, dix mille fois bidon !

M. Arthur Delaporte (SOC). Pour ma part, je souhaite vous lire le début de l’article R. 2312-8 du code du travail : « En l’absence d’accord prévu à l’article L. 2312-21, dans les entreprises de moins de trois cents salariés, la base de données prévue à l’article L. 2312-18 comporte les informations suivantes : [...] Évolution des effectifs par type de contrat, par âge, par ancienneté ; évolution des effectifs retracée mois par mois ; nombre de salariés titulaires d’un contrat de travail à durée indéterminée ; nombre de salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée [...] ». Je m’arrête là, mais la liste est encore longue.

Vous le voyez, on dispose déjà d’un grand nombre de données beaucoup plus précises que celles que vous voulez faire figurer dans votre index seniors, et elles s’appliquent même dans les entreprises de moins de trois cents salariés. S’il s’agit de faire un peu de transparence, pourquoi pas ? Mais introduisons un minimum de contraintes et, surtout, n’inventons pas une usine à gaz en parallèle de ce qui existe déjà.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). On confine à l’absurde ! Pour donner l’illusion que vous demandez quelque chose aux entreprises, alors que toute la contrainte pèse en réalité sur les salariés, vous leur demandez quelque chose qui existe déjà et qui s’appelle le bilan social. On pourrait imaginer de préciser les données qui figurent dans le bilan social : ce serait une manière de normaliser ces données, ce qui serait aussi une bonne chose pour les chercheurs et les chercheuses. Mais l’index que vous proposez n’a aucun sens. Chacun sait que l’index sur l’égalité entre les femmes et les hommes n’apporte rien de plus que les données genrées qui figurent déjà dans le bilan social.

M. Sébastien Jumel (GDR - NUPES). Comme François Ruffin a parlé du bilan social de Renault, je suis allé voir celui de Total. L’indicateur 116 présente la répartition des employés par classe d’âge, en distinguant, pour chacune, la proportion d’hommes et de femmes. Votre index, c’est vraiment du bidon, de la poudre de perlimpinpin, comme dirait l’autre ! Vous ne nous enfumerez pas avec ça !

M. Marc Ferracci (RE). Le bilan social doit être soumis aux représentants du personnel. Dans les sociétés par actions, il doit être soumis aux actionnaires, mais ceux-ci ne sont pas tenus de le publier. Il arrive que les entreprises de grande taille le publient, mais ce n’est pas une obligation.

Tout à l’heure, Pierre Dharréville a présenté un amendement, à l’esprit duquel je souscrivais plutôt. Il proposait de rendre publiques les indications de l’index, en particulier à travers le service public de l’emploi, afin que les demandeurs d’emploi sachent quelles entreprises jouent le jeu de l’emploi des seniors. Si l’on considérait que les bilans sociaux font office d’index, cette information ne serait pas accessible à tout le monde, en particulier à ceux qui cherchent un emploi.

M. Paul Christophe (HOR). On est entré dans une bataille de chiffres. Or, à l’alinéa 5, il n’est pas seulement question d’indicateurs chiffrés, mais aussi des « actions mises en œuvre » pour favoriser l’emploi des salariés âgés. Un contrat d’objectifs va être défini, qui ira au-delà des données que vous pouvez trouver sur internet.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS867 de M. Joël Aviragnet.

M. Arthur Delaporte (SOC). Nous proposons que soient également publiées les données ayant permis la construction des indicateurs, car nous sommes partisans d’une transparence intégrale.

Mme la rapporteure générale. Les données de l’index seront rendues publiques dans des conditions définies par décret. Il importe de respecter la législation relative à la communication des données.

Avis défavorable.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Cet amendement a plusieurs vertus ; il nous rappelle notamment à quel point ces indicateurs sont politiques. On veut faire un index sur l’emploi des seniors, mais on ne sait toujours pas ce qu’est un travailleur senior, ni ce qu’on entend par « emploi » des seniors. Est-ce le nombre de contrats signés, le différentiel entre les entrées et les sorties, la masse salariale, l’effectif à un moment dans l’année – mais dans ce cas, à quel moment de l’année ? –, le nombre de salaires versés, le nombre d’heures de travail déclarées ?

L’autre intérêt de cet amendement, c’est qu’il prévoit que les données ayant permis de construire les indicateurs sur les travailleurs seniors seront envoyées par l’entreprise au ministère du travail ainsi qu’à Pôle emploi. Cela favorisera la diffusion des bonnes pratiques alors que l’index, en l’état, n’implique aucune intervention politique sur les pratiques patronales.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet (RE). Monsieur Ruffin, le bilan social de Renault, que vous avez consulté, comporte effectivement une pyramide des âges : on sait donc combien d’hommes et de femmes âgés de 51 à 59 ans et de plus de 60 ans sont employés par l’entreprise. En revanche, on ne sait pas combien d’entre eux viennent d’être recrutés, ni combien ont bénéficié d’une formation ou d’une mobilité professionnelle.

Il faut disposer de données claires, afin que les entreprises prennent conscience de leurs pratiques et que les salariés puissent questionner leur entreprise sur ces pratiques.

M. Thibault Bazin (LR). On voit bien que cet index ne va pas améliorer le taux d’emploi des seniors. Il est dommage que le Gouvernement ne soit pas présent pour exposer les mesures relatives au travail des seniors qu’il compte prendre pour compléter ce PLFRSS. Il faut créer, pour les seniors, un choc d’attractivité et de formation. Il faut aussi revoir les modalités de la retraite progressive – deux ans, ce n’est pas suffisant – et prévenir la pénibilité beaucoup plus tôt. On nous annonce un projet de loi sur le travail pour le printemps, mais on aurait besoin de connaître dès maintenant la stratégie globale du Gouvernement, parce que là, on parle dans le vide. Il est peut-être encore temps de rectifier le tir.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). On pourrait très bien détailler davantage, dans le bilan social, les rubriques relatives aux travailleurs de plus de 50 ans. L’index, en lui-même, n’apportera rien. Ce qu’il faut, c’est une vraie politique d’amélioration des conditions de travail des seniors, de diminution des risques socioprofessionnels, de reconnaissance de la pénibilité, de formation, d’aménagement des temps de travail et de revalorisation des carrières professionnelles. Sur cette base, on pourra produire un index. Mais, en l’état, le vôtre n’a aucun sens.

Mme Laure Lavalette (RN). Cela fait trois heures que nous parlons de cet index, dont tout le monde s’accorde à dire qu’il ne sert à rien. On ne peut pas débattre des mesures d’amélioration de l’emploi des seniors, puisque cela n’entre pas dans le cadre de ce PLFRSS et que le Gouvernement ne propose rien. Chers collègues de la NUPES, je vous invite à retirer vos amendements relatifs à cet index, afin que nous puissions avancer. Les Français méritent que nous ayons un débat un peu plus éclairé et que nous arrivions à l’article 7. Vous aurez tout fait pour que nous n’y arrivions pas et c’est dommage.

M. Arthur Delaporte (SOC). On a bien compris que le Rassemblement national n’a pas très envie de discuter de la réforme des retraites, vu le nombre d’amendements qu’il a déposés et son attitude depuis le début de nos débats.

Cet amendement est important : les indicateurs n’auront d’intérêt que si l’on connaît les données sur lesquelles ils sont fondés ; sinon, ce ne sera que de la poudre aux yeux. Le meilleur critère de la transparence, c’est l’open source. Ce serait une bonne chose pour les chercheurs, notamment pour les sociologues, qui ont besoin de données fiables ; et cela contribuerait au name and shame. Mon collègue Hadrien Clouet a dit que cet amendement était vertueux. L’Index librorum prohibitorum visait, lui aussi, à la vertu. J’espère que, par cette publicité renforcée, nous renforcerons aussi la vertu des entreprises.

M. Philippe Vigier (Dem). Tout ce qui peut permettre d’éclairer à la fois la représentation nationale, les partenaires sociaux et les entreprises sur la construction des indicateurs va dans le bon sens. C’est aussi le rôle du Parlement que de garantir l’accès à ce type de données : cela relève de son rôle de contrôle de l’action gouvernementale.

La commission rejette l’amendement.

 

Suspendue à vingt-deux heures trente, la réunion reprend à vingt-deux heures quarante.

 

Amendements AS3772 de M. Sébastien Peytavie, AS5970 de M. Paul-André Colombani et AS6128 de M. Sébastien Peytavie (discussion commune).

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). L’amendement AS3772 tend à rendre l’index contraignant et à introduire des sanctions financières pour les entreprises qui n’obtiendraient aucun résultat. Dans un monde merveilleux où les entreprises n’ont aucune contrainte, elles n’ont aucune obligation et donc aucun résultat.

M. Paul-André Colombani (LIOT). Mon amendement vise à dépasser le caractère seulement incitatif de la publication de l’index seniors, en prévoyant un objectif de résultat d’emploi senior adapté à chaque secteur d’activité et fixé grâce au dialogue de branche.

En cas de résultat inférieur à cet objectif, l’entreprise devra entamer une négociation afin d’améliorer les conditions d’emploi des seniors, et en vue d’améliorer ses résultats. Ce n’est qu’au terme de cette négociation, et en l’absence de résultat, qu’une pénalité financière pourra lui être appliquée. Elle tiendra compte des efforts déployés par l’entreprise et restera proportionnée.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’amendement AS6128, proposé par l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa), reprend une proposition que nous avons déjà faite. Il s’agit d’étendre le dispositif aux entreprises de plus de onze salariés et de fixer un score minimum, sous peine de sanctions.

Les organisations syndicales – celles qui défendent les intérêts des salariés, et non ceux du CAC40 – sont de notre côté. Elles font le même constat que nous à propos de cet index seniors : si l’on s’en tient à la seule publication de l’index, il n’y aura aucun impact sur les pratiques des entreprises, qui ne seront nullement obligées de mieux traiter les seniors. En l’état, même avec un score de 2 sur 20, une entreprise n’aura aucun problème : pourvu qu’elle publie l’index, elle sera en règle.

S’il n’est pas assorti de sanctions financières, cet index sera un gâchis de temps et d’argent. Il servira seulement au Gouvernement à se donner bonne conscience sur le dos des travailleurs et des travailleuses seniors.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable.

Mme Mathilde Panot (LFI - NUPES). On invoque souvent, en Macronie, l’index relatif à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Or c’est une vaste fumisterie : ce n’est pas moi qui le dis, mais la dirigeante confédérale de la CGT chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Mme Sophie Binet. Elle explique qu’il y a toujours un écart salarial de 22 % entre les femmes et les hommes et que l’indicateur a été monté sur mesure pour que les entreprises échappent en quasi-totalité aux sanctions, puisque 92 % d’entre elles affichent plus de 75 points sur 100. Or, pour l’index seniors, vous ne prévoyez même pas de sanctions !

On sait déjà ce que cette réforme va provoquer, puisqu’on a vu ce qui s’est passé au moment du décalage de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Le nombre de personnes de 60 et 61 ans n’étant ni en emploi ni à la retraite a augmenté de 16 points. L’effet a été particulièrement marqué pour les femmes, notamment les ouvrières, qui bénéficient moins des dispositifs de départ anticipé pour carrière longue du fait de leurs carrières plus hachées. Le taux des ouvrières qui ne sont ni en emploi ni à la retraite culmine à 33 %, alors qu’il est de 23 % pour les ouvriers. Pour les cadres, la réforme s’est avant tout traduite par l’allongement de la durée en emploi. Ce nouveau recul de l’âge légal de départ à 64 ans va amplifier ces phénomènes. À 62 ans, près de 17 % des personnes ne sont ni en emploi ni à la retraite. Autrement dit, 40 % des personnes qui ne sont pas à la retraite à 62 ans ne travaillent déjà pas et verront leur période de précarité se prolonger.

Je vous redonne les chiffres de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques : plus 110 000 personnes aux minima sociaux, plus 400 000 arrêts maladie, accidents du travail et maladies professionnelles indemnisés, plus 270 000 personnes au chômage. Avec votre réforme et cet index qui ne sert à rien, vous allez créer une machine à fabriquer du chômage et de la précarité pour la fin de carrière de centaines de milliers de personnes dans ce pays.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements AS4276 de M. Arthur Delaporte, AS4760 de M. Thibault Bazin et AS6081 de M. Sébastien Peytavie (discussion commune).

M. Arthur Delaporte (SOC). Mon amendement, qui a été travaillé avec l’Unsa, vise à mieux définir les indicateurs de l’index seniors, afin de s’assurer de son efficacité.

Il s’agit de garantir la prise en compte des politiques d’emploi et des conditions de travail et de rémunération des salariés proches de la retraite, afin que l’index soit un véritable outil de mesure au service de la négociation en branche et en entreprise.

Par ailleurs, l’inégalité entre les femmes et les hommes quant au niveau des pensions de retraite et à l’âge effectif de départ à la retraite nécessite une déclinaison de ces indicateurs dans le champ de l’égalité professionnelle.

M. Thibault Bazin (LR). Comme je souhaite que nous avancions, afin de pouvoir évoquer les autres incomplétudes et incohérences de ce texte, je ne m’étendrai pas sur mon amendement.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Si les indicateurs ne sont pas assez précis, les entreprises risquent de contourner certaines obligations. Nous proposons donc d’inscrire dans la loi que ces indicateurs prendront comme critères les politiques d’emploi, les conditions de travail, la formation, la qualité de vie au travail et la sortie progressive de l’emploi vers la retraite.

Nous proposons également de prendre en compte ces indicateurs dans le champ de l’égalité professionnelle. En effet, pour les femmes seniors, c’est la double peine sur le marché du travail : en 2019, parmi les personnes âgées de 54 à 64 ans, 57 % des hommes avaient un emploi, et seulement 53 % des femmes. Les femmes partent à la retraite un an plus tard que les hommes, en moyenne, avec une pension inférieure de 42 %.

Ces chiffres sont aussi le résultat de longues années de pratiques discriminatoires, qui cantonnent les femmes aux emplois les moins payés et les plus pénibles. Nous avons donc la responsabilité de construire un index seniors suffisamment précis pour que ni les femmes seniors, ni les seniors en emploi précaire, ni les seniors menacés de rupture de contrat précoce ne soient oubliés.

Mme la rapporteure générale. L’amendement AS3140 de M. Pierre Dharréville, que nous avons adopté, prévoit déjà une liste de critères.

Avis défavorable.

Mme Mathilde Hignet (LFI - NUPES). Des collègues nous ont dit cet après-midi qu’il fallait arrêter de surfer sur le malaise social. Je leur réponds d’arrêter de planer et d’atterrir, parce que l’index seniors, c’est de la poudre aux yeux, comme l’ensemble de cette réforme.

La réalité, c’est que Jocelyne, Monique ou Madeleine, que j’ai rencontrées samedi et qui sont en invalidité, ne peuvent plus travailler parce qu’elles sont cassées par le travail. Elles vivent dans des logements sociaux insalubres. Elles font partie de celles et ceux qui ne sont plus en emploi mais ne peuvent pas prendre leur retraite, et pour qui le recul de l’âge ne fera qu’allonger la durée de cette période de précarité.

On le sait, les ouvriers sont abîmés plus vite par le travail ; les agriculteurs et les ouvriers sont plus de 20 % à être en incapacité dès leur première année de retraite – laquelle dure moins de dix ans ; en moyenne, chaque année, 9 000 personnes supplémentaires mourront avant d’atteindre la retraite ; un quart des hommes les plus pauvres meurent avant 62 ans. Votre index n’y changera rien ! C’est un dispositif complètement déconnecté de la réalité, qui n’aura aucune conséquence sur le taux d’emploi des seniors et dont je peine à trouver le sens.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS3592 de M. Arthur Delaporte.

M. Arthur Delaporte (SOC). Mon amendement vise à préciser que les indicateurs de l’index seniors seront chiffrés.

Mme la rapporteure générale. Il me semble que le nombre de seniors en emploi, le nombre de licenciements et les autres indicateurs prévus sont bien des données chiffrées.

Avis défavorable.

M. Antoine Léaument (LFI - NUPES). Il semble indispensable de disposer d’indicateurs chiffrés, c’est-à-dire de données quantitatives, si l’on veut évaluer correctement la politique des entreprises.

Je répète qu’il n’y a pas grand sens à créer cet index, s’il n’est pas assorti de pénalités en cas de mauvais résultats. Il n’aura aucun effet sur l’emploi des seniors. Le bilan social donne déjà des informations très précises concernant la pyramide des âges, le genre des personnes employées et leur statut. Le bilan social de BNP Paribas, par exemple, est extrêmement précis. L’index que vous proposez le sera sans doute moins.

M. Marc Ferracci (RE). Cet amendement est intéressant. Je pense, comme M. Delaporte, que l’on a besoin d’indicateurs chiffrés, notamment dans l’hypothèse où l’on introduirait par la suite une incitation financière, en fonction d’un seuil à atteindre. Pour qu’il y ait un seuil, il faut des chiffres.

Cela étant, l’adoption de l’amendement AS3140 de notre collègue Pierre Dharréville complique ce travail de chiffrage, puisqu’il a introduit les thèmes suivants : l’anticipation de l’évolution des carrières professionnelles, l’amélioration des conditions de travail, la transmission des savoirs et des compétences. Je ne sais pas bien comment on peut chiffrer tout cela et j’y vois une forme d’incohérence.

M. Matthieu Marchio (RN). Pour prendre un exemple qui parle à la Macronie, dans les cabinets de conseil, qui recrutent essentiellement des jeunes corvéables à merci, il existe deux types de seniors : ceux, peu nombreux, qui occupent des postes de dirigeants et les autres, qui sont incités à partir. Ceux-là peinent souvent à retrouver un emploi et, s’ils en retrouvent un, ils sont souvent moins rémunérés – et encore s’agit-il de cadres. Pour les ouvriers et les employés, il est très difficile, voire impossible de retrouver un emploi.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS3783 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). La multiplication des index – sur les femmes, les personnes handicapées, les seniors... – donne une idée de ceux que l’on juge productifs et non productifs dans une société. Cela reflète un choix de société. Comment peut‑on en arriver à créer un tel index, qui ne débouchera sur des solutions que dans quelques années ? Que fait-on, pendant ce temps, pour toutes les personnes concernées, celles qui envoient des CV sans recevoir de réponse, celles qui ne peuvent plus travailler parce qu’elles ont été abîmées par la pénibilité de leur travail ? Ce n’est pas sérieux.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Si l’on veut que cet index ait, en dépit de ses défauts, un minimum de portée politique, il faut que l’évaluation à laquelle il permet de procéder puisse se rapporter à un barème ou une note minimale. C’est important pour que la collectivité comprenne ce que révèle cet index, pour que les salariés puissent comparer leur situation à d’autres et pour que les employeurs puissent se situer vis-à-vis de leurs homologues.

La question sous-jacente est de savoir qui traitera les quelque 65 000 index qui seront régulièrement publiés. L’opération s’annonçant complexe, il convient de simplifier cet outil et d’en faciliter l’utilisation, notamment par l’inspection du travail, car l’employeur n’est pas forcément le mieux placé pour expliquer pourquoi il s’est planté.

Adopter cet amendement permettrait de donner du sens à un dispositif qui n’en avait pas et de le simplifier.

Mme Cyrielle Chatelain (Ecolo - NUPES). Après plusieurs heures de débat sur cet index, une question demeure : à quoi sert-il ? À montrer que l’emploi des seniors aura augmenté, donc que votre réforme fonctionne, parce que les gens travailleront deux ans de plus ? Mais ce taux n’augmentera pas parce qu’ils auront retrouvé du travail ; c’est simplement que les seniors déjà en emploi conserveront leur poste deux ans de plus. Quant aux seniors ni en emploi ni en retraite – donc au chômage, au revenu de solidarité active ou sans revenu –, ils y resteront plus longtemps. Ce ne sont pas des emplois que vous allez créer mais d’énormes poches de pauvreté.

M. Thibault Bazin (LR). Nous convenons tous que cet index n’est pas la solution pour améliorer le taux d’emploi des seniors. Cette question, qui inquiète beaucoup, ne peut se résumer à un index. Il serait temps de passer aux autres points qui font encore débat, car nous sommes encore loin de l’article 7.

M. Sébastien Chenu (RN). L’index aidera au mieux à une prise de conscience mais n’aura aucun résultat, si ce n’est suradministrer un peu plus. Les 60 000 index ne seront jamais lus. Depuis des heures, nous étudions un dispositif qui n’aura strictement aucune utilité : ce n’est pas ainsi que l’on fera une politique en faveur de l’emploi des seniors. Nous ne suivrons pas ces amendements cosmétiques.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement AS3148 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). L’index doit s’accompagner d’objectifs à atteindre, qui peuvent être chiffrés. Un indicateur est un outil d’évaluation à partir d’éléments mesurables – nombre et types de contrats, âges de départ, typologie des motifs de départ, etc. Cela ne changera pas fondamentalement la politique qui sera menée en faveur des travailleurs expérimentés et ne rendra pas ce projet de loi acceptable – c’est là toute la différence entre nous et Thibault Bazin. Mais nous sommes là pour en discuter et nous le faisons.

Mme la rapporteure générale. Votre amendement confie à l’accord national interprofessionnel (ANI) le soin de construire les indicateurs. Cela alourdirait la procédure.

Avis défavorable.

Mme Rachel Keke (LFI - NUPES). Cet index n’est que de la poudre aux yeux. Son unique objectif est de vous donner bonne conscience, car il ne changera rien aux souffrances et aux discriminations que vivent les seniors et les femmes au travail. Ils sont poussés vers la sortie, mis au placard et ne bénéficient pas de formations. Il est urgent de prendre des mesures pour les protéger. Or nous sommes très loin du compte. En rejetant systématiquement toutes les propositions que nous faisons, c’est votre mépris que vous leur renvoyez.

M. Thibault Bazin (LR). Nous pensons qu’avec cet article, le compte n’y sera pas. Il reste de nombreux points à revoir, notamment la prise en compte des mères de famille et des petites pensions de ceux qui ont travaillé toute leur vie. Je ne sais pas si nous aurons fini l’examen de l’article 2 ce soir. Il me semble important d’en venir aux autres articles.

M. Sébastien Chenu (RN). Cette idée d’index est héritée d’une proposition de loi débattue ici même, en novembre 2021 ; elle a terminé au fond d’un tiroir parce qu’elle n’avait pas été jugée pertinente. Mais elle figurait également dans le programme présidentiel, non pas d’Emmanuel Macron, mais d’Éric Zemmour. Vous comprenez pourquoi nous sommes dubitatifs !

Mme Marie-Charlotte Garin (Ecolo - NUPES). Je soutiens l’amendement de M. Dharréville. Cet index n’est évidemment pas satisfaisant mais si l’on veut sortir des incantations et des vœux pieux, il faut bien se donner une boussole et se fixer des objectifs.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS850 de M. Joël Aviragnet.

M. Jérôme Guedj (SOC). Dans ce texte de loi, il y a deux types de dispositions : celles qui ont un impact sur la vie de nos concitoyens, qui sont d’application immédiate – la fermeture des régimes spéciaux, le report de l’âge légal, l’accélération du calendrier de durée de cotisation...

M. Pierre Cazeneuve (RE). Vous avez du mal à dire « de la loi Touraine » !

M. Jérôme Guedj (SOC). J’en ai d’autant moins que je ne l’ai pas votée.

Il y a aussi les dispositions réputées positives, qui restent dans l’imprécision et sont renvoyées aux calendes grecques.

Comme on nous a beaucoup répété que le dialogue social était précieux, nous vous proposons par l’amendement AS850 de renvoyer la définition des indicateurs, non pas à un décret, mais aux partenaires sociaux, dans le cadre d’un ANI. Même si nous savons tous que cette mesure n’est qu’un écran de fumée, nous ferions ainsi la jonction entre la démocratie sociale et la démocratie politique.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous débattons depuis une heure et demie d’un écran de fumée...

Mme la rapporteure générale. Nous entamons une longue série d’amendements qui ne visent qu’à ralentir les débats. Avis défavorable.

M. Jérôme Legavre (LFI - NUPES). Nous vous proposons d’imposer aux employeurs un certain nombre de règles et de contraintes, qui devront être fixées au plan interprofessionnel. Vous vous y refusez, en cohérence avec la politique du Gouvernement car, pour vous, la place des organisations syndicales est exclusivement dans les entreprises. Vous vous targuez d’avoir organisé de grandes concertations sur ce projet de réforme. Or nous savons comment elles ont été conduites : c’était à prendre ou à laisser ! Voilà votre conception du dialogue social ! Tout cela ne sert qu’à masquer le fait que votre réforme condamnera des milliers de salariés à la pauvreté.

M. Philippe Vigier (Dem). Inscrire la création d’un index dans la loi accrédite l’idée que l’on va faire mieux : ce n’est pas l’outil le plus pertinent mais cela constitue déjà une piste intéressante, en ce qu’elle met les responsables professionnels, syndicalistes en particulier, au pied du mur. Redonner la parole aux partenaires sociaux donnerait du corps à l’idée que l’index est un moyen d’améliorer l’emploi des seniors – vous devriez y réfléchir, madame la rapporteure générale.

M. Arthur Delaporte (SOC). Cet amendement de mon collègue Aviragnet est important, car il vous met au défi de faire du dialogue social et de la concertation. L’index seniors, bien que mineur, nous est présenté comme l’une des mesures majeures de la loi. Faites en sorte de le définir en concertation avec les organisations professionnelles !

M. Sébastien Chenu (RN). Cela fait des heures que nous tentons d’améliorer un index bidon, pour rendre l’expression de Mme Abomangoli. Quand j’entends notre collègue qui essaye d’améliorer un dispositif bidon, je me dis qu’il aurait pu le faire avec le Parti socialiste le week‑end dernier : il y avait de la matière ! Je ne peux m’empêcher de penser à Cyrano : « c’est encore plus beau lorsque c’est inutile » !

M. Sébastien Jumel (GDR - NUPES). Soyons clairs, nous ne voulons pas de cette réforme strictement comptable ; nous voulons qu’elle soit retirée, car nous avons compris que protéger les Français n’était pas votre préoccupation. Nous utilisons tous les outils parlementaires à notre disposition. L’amendement de nos collègues socialistes est pertinent, car il reprend ce que le législateur prévoit pour le bilan social, mais son adoption ne changerait rien au caractère injuste, non nécessaire et infondé de cette réforme. Nous ne cesserons de vous le répéter, même si cela ne vous plaît pas.

M. Thibault Bazin (LR). L’expérience récente nous a montré que le respect du paritarisme n’était pas toujours au rendez-vous, comme l’ont démontré la ponction sur Action Logement et le transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco. Depuis le début de l’examen de cet article, madame la rapporteure, vous nous dites que les précisions seront apportées par les partenaires sociaux. Le présent amendement, qui vise à passer par un accord national interprofessionnel, répond donc à votre engagement.

Cela soulève toutefois un problème de méthode : le dialogue social se poursuit sur certains sujets – emploi des seniors, pénibilité – alors que nous sommes en première lecture du PLFRSS. Le Gouvernement serait prêt à codifier le contenu d’un éventuel accord entre les partenaires sociaux sur la pénibilité. On nous invite à légiférer sur un projet incomplet et il en ira de même pour certains sujets liés à la famille, renvoyés à un chantier du Conseil d’orientation des retraites (COR) sur l’harmonisation des droits familiaux.

M. Marc Ferracci (RE). Cet amendement est en totale contradiction avec l’amendement de M. Dharréville adopté tout à l’heure, qui fixe de manière rigide l’ensemble des sujets ayant vocation à entrer dans l’index, ne laissant plus aucune marge de manœuvre aux partenaires sociaux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS849 de M. Joël Aviragnet.

M. Arthur Delaporte (SOC). Il s’agit de renvoyer à un décret en Conseil d’État, et non à un décret simple, le soin de définir la liste des indicateurs, car il s’agit d’un des éléments majeurs de ce projet de loi.

Mme la rapporteure générale. Je donnerai un avis défavorable à la série d’amendements de M. Aviragnet.

Mme Mathilde Panot (LFI - NUPES). La question de l’emploi des seniors est directement liée à celle de la pénibilité, en particulier celle subie par les travailleuses, qui n’est jamais reconnue. Comment comptez-vous, avec l’index seniors, maintenir en emploi des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, qui doivent sans cesse porter des enfants, ou encore des aides à domicile ? Mme Béatrice Boulanger, par exemple, a dû arrêter de travailler à 52 ans parce qu’à force de soulever des charges, son corps était devenu, selon son chirurgien, celui d’une vieillarde.

Je vous livre quelques chiffres de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) : entre 2001 et 2015, les accidents du travail avec arrêt ont baissé globalement de 15,3 % et de 28,6 % pour les hommes, mais ils ont progressé de 28 % pour les femmes. Il est complètement illusoire de penser qu’un index seniors dépourvu de sanction permettra d’améliorer les conditions de travail des femmes.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Avec la méthode choisie par le Gouvernement, on s’est déjà affranchi de beaucoup de précautions, dont l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi. Il me paraît, de ce fait, nécessaire de renvoyer à un décret en Conseil d’État.

Pour répondre à Marc Ferracci concernant la négociation avec les organisations syndicales, je ferai juste observer que la lettre de cadrage pour les discussions avec l’Unedic était autrement plus contraignante que l’amendement que nous avons adopté.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (RE). Il faut vraiment que nos collègues de la NUPES arrêtent de dire qu’on ne leur laisse pas assez de temps pour débattre. Cela fait des heures que nous discutons d’un index seniors dont ils nous ont dit dès le départ qu’ils le trouvaient inutile. Or ils ont déposé une kyrielle d’amendements pour le transformer en usine à gaz et Mme Panot refait ce soir tout le débat que nous avons eu cet après-midi.

Mme Cyrielle Chatelain (Ecolo - NUPES). Cet index est inutile mais le sujet dont nous traitons, l’emploi des seniors, est très important. Le Gouvernement n’a pas réussi à développer une politique en faveur de l’emploi des seniors digne de ce nom : c’est cela que nous dénonçons. Nous proposons donc des pénalités, un droit à la formation, une meilleure reconnaissance de la difficulté des métiers. M. Peytavie vous a proposé une réécriture de l’ensemble de l’article, qui n’a pas été adoptée.

Le Gouvernement n’aime parler qu’à lui-même. Il refuse de parler avec les syndicalistes et il recourt à des astuces pour ne pas parler à l’Assemblée. Cet amendement le ferait sortir de ce dialogue avec lui-même en faisant en sorte qu’au moins le Conseil d’État puisse donner son avis sur le décret, puisque la disposition en question n’a pas été discutée avec les syndicats. De surcroît, le Gouvernement veut limiter le temps de débat à l’Assemblée et pourrait recourir à une ordonnance.

Nous proposons le retrait du projet de loi et un véritable dialogue social, conformément à la volonté de la majorité des Français.

M. Nicolas Turquois (Dem). Dans mon territoire, le taux de chômage avoisine 5 %, ce qui est en partie le fruit du travail engagé en faveur de l’emploi des seniors. Une partie des entreprises a compris que les seniors pouvaient être un atout pour elles, compte tenu de la difficulté à trouver des salariés. L’index ne va pas révolutionner les choses mais il place le sujet au cœur du débat public et contribue à redonner aux seniors de la visibilité. Il faudra l’amplifier, à mon sens, par des mesures plus directives, voire coercitives.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS936 à AS947 et AS949 à AS952 de M. Joël Aviragnet.

M. Jérôme Guedj (SOC). Vous avez refusé d’associer les organisations syndicales à la définition des indicateurs. Afin d’améliorer le dispositif, nous vous proposons, par ces amendements, de consulter d’autres corps intermédiaires : le Conseil économique, social et environnemental, l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’Association pour l’emploi des cadres, l’Anact, Cap emploi, le Centre d’animation de ressources d’information sur la formation, les chambres de commerce et d’industrie, les chambres d’agriculture, les chambres de métiers et de l’artisanat, l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi, le Conseil national des missions locales, Pôle emploi, les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, France Stratégie et le COR.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable, car vous alourdissez le mécanisme. Depuis le début de l’après-midi, j’insiste pour que l’on n’apporte pas trop de précisions au sujet des indicateurs car, contrairement à ce que vous affirmez, nous faisons confiance aux branches.

M. Antoine Léaument (LFI - NUPES). Nous soutenons ces amendements, qui visent à améliorer ce dispositif fumeux.

M. Chenu nous a expliqué que l’index, comme le report de l’âge de départ à 64 ans, étaient inscrits au programme de M. Zemmour, ce qui n’est pas sans créer quelques tensions, tant chez les macronistes, qui prennent conscience de ce qu’ils font, qu’au sein du Rassemblement national, qui se fait doubler sur sa droite par des personnes censées être positionnées au centre. J’espère que le fait de nommer ces tensions permettra un retour au calme.

M. Sébastien Chenu (RN). On a bien compris qu’il faudra attendre l’article 7 pour véritablement parler de l’emploi des seniors et du projet de société que nous voulons. L’index, pour sa part, est totalement inutile – une majorité se dessine pour le reconnaître.

Pour en revenir aux amendements, je retrouve chez notre collègue socialiste le goût de la complexification dans tous les domaines, que l’on a connue lorsque la gauche était au pouvoir. À vous écouter, on consulterait la Terre entière – il ne manque que Greta Thunberg et Nicolas Mayer-Rossignol dans cet inventaire à la Prévert... On a bien compris la technique de nos collègues bolcheviks : essayant de faire oublier qu’ils ont fait élire Emmanuel Macron, ils se donnent bonne conscience en faisant durer les débats, pour montrer au peuple qu’ils essaient de les défendre. Tout cela est un jeu de rôles bien hypocrite !

M. Arthur Delaporte (SOC). M. Chenu nous gratifie, depuis une demi-heure, d’insultes et d’interventions hors de propos, visant en particulier les députés socialistes. Pour notre part, nous effectuons un travail de fond. Nous aimerions pouvoir en dire autant du Rassemblement national, qui n’a su proposer que des amendements relatifs à l’exclusion des chibanis et des étrangers. Mais nous y sommes habitués.

Les amendements en discussion visent à améliorer les indicateurs par le dialogue et la concertation.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). En matière d’emploi des seniors, notamment pour les femmes, il faut porter une attention particulière à certains indicateurs : le nombre de jours de congé maladie, le nombre de maladies, en particulier professionnelles, et le degré d’émiettement de l’emploi, c’est-à-dire les intervalles entre les temps de travail au cours d’une même journée. En effet, les femmes seniors, en particulier précaires, se distinguent des autres salariés par des temps de travail de forte amplitude : leur activité est à ce point hachée qu’elles ne peuvent valider une journée complète de travail. On doit aussi s’intéresser au temps partiel, qu’il soit subi – par exemple pour un motif thérapeutique – ou choisi. Ces indicateurs sont communs à toutes les branches mais leur confier le soin de les préciser fait courir le risque qu’elles évaluent différemment une même maladie. Des études ont montré que des personnes travaillant dans des crèches ne déclarent pas un port de charge équivalent à celles qui gardent des enfants à domicile, ce qui témoigne d’une différence de perception de la pénibilité. Non seulement l’index est inutile, mais les effets de branche seront source d’inégalité.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements AS831 à AS836 de M. Jérôme Guedj.

M. Jérôme Guedj (SOC). Nous ne souhaitons pas instituer un cadre contraignant qui limiterait les prérogatives des syndicats dans les branches et les entreprises, mais définir des objectifs identiques, des socles à discuter.

Cette série d’amendements vise à garantir que les indicateurs prennent en considération les catégories socioprofessionnelles (CSP). Le premier d’entre eux demande qu’il y ait au moins des indicateurs spécifiques aux travailleurs seniors occupant un emploi d’ouvrier. Ce faisant, nous n’imposons rien aux partenaires sociaux : nous les laissons choisir les indicateurs pertinents pour leur branche. Par les amendements suivants, nous voulons nous assurer qu’il y aura des indicateurs spécifiques aux employés, aux professions intermédiaires, aux cadres et professions intellectuelles supérieures, aux artisans, commerçants et chefs d’entreprise et aux agriculteurs exploitants. On s’assurera ainsi que l’on ne passe pas à côté d’éléments essentiels pour apprécier les conditions de l’emploi des seniors dans chaque branche.

Mme la rapporteure générale. Une entreprise n’employant pas de salariés appartenant à l’une des CSP que vous citez se trouverait un peu coincée par ces dispositions.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). L’existence d’indicateurs n’implique pas qu’ils soient remplis ; même en l’absence de choses à indiquer, ils ont un sens. Il me paraît essentiel de faire apparaître les CSP, car elles reflètent de nombreux facteurs, tels que le revenu, le diplôme, le lieu de vie, et permettent ainsi d’affiner la politique publique.

M. Sébastien Chenu (RN). Monsieur Guedj, vous en demandez toujours plus aux autres lorsque vous êtes dans l’opposition mais, pour la loi El Khomri, je n’ai pas souvenir que vous ayez beaucoup consulté les CSP. Vous avez d’ailleurs fait adopter le texte grâce à l’article 49, alinéa 3.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements AS838 à AS846 de M. Joël Aviragnet.

M. Jérôme Guedj (SOC). Notre rôle de parlementaires est de nous assurer que l’index des seniors – dont vous avez fait une mesure emblématique, bien qu’il soit extrêmement creux – atteigne l’objet qui lui est assigné. Nous voulons établir des garde-fous pour éviter que cela finisse en eau de boudin, comme cela a été le cas pour l’index de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Ces amendements prévoient la prise en compte d’un certain nombre de publics : les femmes âgées d’au moins 50 ans, qui sont victimes de la double peine – l’âge et le sexe –, les femmes ayant une carrière hachée, les femmes âgées ayant eu des enfants, les travailleurs exerçant un métier pénible, ceux qui ont commencé leur carrière avant l’âge de 20 ans, 19 ans, 18 ans, et ainsi de suite jusqu’à 14 ans. Si vous ne définissez pas précisément le cadre de l’index, celui-ci fera pschitt.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable.

On constate des progrès dans la publication de l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, puisque cette obligation est respectée par 90 % des grandes entreprises. Les notes sont également en augmentation. Même s’il ne peut, à lui seul, conduire à la suppression de toutes les inégalités salariales entre les femmes et les hommes, on ne peut pas dire que cela a fini en « eau de boudin ».

M. Victor Catteau (RN). Voilà quatre heures que l’on discute d’un outil inutile parce que la gauche a déposé des centaines d’amendements sur un article qu’elle ne veut pas voter. On sait que ce type de dispositif ne fonctionne pas. Depuis 2018, le pourcentage d’entreprises respectant la parité salariale est passé de 25 % à 27 %, signe que l’index de l’égalité salariale entre femmes et hommes ne produit pas les effets escomptés. Par ailleurs, seules 29 % des entreprises respectent l’obligation de recruter des travailleurs handicapés dans une proportion de 6 % de leur effectif ; 31 % des sociétés n’en accueillent aucun. Même les sanctions pécuniaires ne produisent pas d’effet. Je vous invite à retirer ces amendements inutiles pour que l’on discute des vrais sujets qui touchent les Français.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Lorsqu’on traite de retraite, il faut avoir une vision précise des trajectoires professionnelles des salariés en prenant en compte leur âge, leur sexe et le caractère plus ou moins continu de leur carrière. L’âge conduit à s’intéresser, en particulier, aux perspectives d’évolution de carrière et aux objectifs éventuels de formation. Le sexe éclaire sur les inégalités salariales, qui coûtent très cher, notamment à la Caisse nationale d’assurance vieillesse – on pourrait récupérer 5 milliards d’euros en renforçant l’égalité en matière de salaires. La discontinuité de la carrière, quant à elle, ampute grandement les pensions, notamment des femmes, par le mécanisme de la décote. Sans ces informations, on peut difficilement satisfaire les exigences de financement de l’assurance vieillesse.

Monsieur Catteau, je trouve surprenant que vous incriminiez la gauche, alors que nous nous battons contre ce texte, que nous essayons de démanteler petit bout par petit bout, tandis que vous présentez un amendement toutes les quarante-huit heures.

M. Arthur Delaporte (SOC). Nous avons essayé de donner un peu de contenu à votre index. Plus généralement, nous nous efforçons de limiter les effets néfastes de votre politique, et nous avançons petit à petit sur ce chemin. C’est pourquoi, madame la présidente, je vous prie à nouveau d’accepter de prolonger l’examen en commission d’un ou deux jours pour nous permettre de continuer de discuter des amendements. Cet index est un cavalier mais vous l’avez quand même mis dans la loi. Nous ne pouvons pas ne pas faire notre travail de députés. Nous continuerons demain en proposant la création de sanctions pour rendre le dispositif opérationnel.

M. Yannick Neuder (LR). Certains seniors souhaitent prolonger leur activité professionnelle, tandis que d’autres aspirent à la retraite. Dans le cadre de la discussion entre le salarié et l’employeur, se pose nécessairement la question de l’aptitude. Or celle-ci est appréciée par la médecine du travail, dont les effectifs, en diminution, sont déjà insuffisants. Ne créons pas des critères qui ne pourront être appréciés, faute de praticiens. Il est dommage de répondre à cette question en recourant à une pirouette : les infirmiers en pratique avancée qui ont été évoqués sont un autre sujet. Il faut faire preuve d’un peu de sérieux. Je ne suis pas certain que nos débats donnent une bonne image du Parlement.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). Nous vous avions proposé de supprimer l’index, ce qui vous aurait évité ces amendements. Puisque vous l’avez refusé, nous sommes entrés dans votre jeu et avons essayé de donner à ce dispositif de la substance – un contenu chiffré, un caractère contraignant, une portée universelle. Mais, quand bien même vous auriez adopté tous nos amendements, un problème majeur aurait subsisté : votre index laisse de côté la poche de pauvreté. La meilleure chose que nous pourrions faire, à présent, serait de voter contre l’ensemble de la loi, ce qui arrangerait le peuple entier.

M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). À minuit, on constate, en effet, que les députés de la NUPES ont joué. Or, madame Rousseau, le travail parlementaire n’est pas un jeu. Nous faisons cette loi pour des raisons sérieuses.

 

La séance est levée à minuit.


Présences en réunion

Présents.  M. Éric Alauzet, Mme Farida Amrani, M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Fanta Berete, Mme Anne Bergantz, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Pierre Cazeneuve, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, M. Paul-André Colombani, Mme Josiane Corneloup, M. Charles de Courson, Mme Laurence Cristol, Mme Christine Decodts, M. Arthur Delaporte, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, M. Olivier Falorni, M. Marc Ferracci, M. Thierry Frappé, Mme Anne Genetet, M. François Gernigon, M. Jean-Carles Grelier, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, Mme Claire Guichard, Mme Mathilde Hignet, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Rachel Keke, Mme Fadila Khattabi, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, M. Antoine Léaument, M. Jérôme Legavre, Mme Katiana Levavasseur, M. Sylvain Maillard, M. Matthieu Marchio, M. Yannick Monnet, M. Benoit Mournet, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Mathilde Panot, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Maud Petit, M. Sébastien Peytavie, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. François Ruffin, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Prisca Thevenot, M. Nicolas Turquois, M. Frédéric Valletoux, M. Philippe Vigier, M. Stéphane Viry, M. Christopher Weissberg, Mme Caroline Yadan

 

Excusés.  M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Isabelle Valentin

 

Assistaient également à la réunion.  Mme Émilie Bonnivard, M. Xavier Breton, Mme Cyrielle Chatelain, M. Sébastien Chenu, M. Dino Cinieri, M. Fabien Di Filippo, M. Julien Dive, Mme Stella Dupont, Mme Martine Etienne, Mme Anne Genetet, M. Sébastien Jumel, M. Benjamin Lucas, Mme Pascale Martin, M. Thomas Ménagé, M Nicolas Sansu, Mme Danielle Simonnet, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Pierre Taite