Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

  Suite de l’examen de la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2023 (n° 273) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général) ; examen et vote sur les crédits des missions :

  Cohésion des territoires : ........................ 2

-Logement et hébergement d’urgence (M. François Jolivet, rapporteur spécial)

-..Politique des territoires (M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial)

  Sport, jeunesse et vie associative (M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial)  39

  Économie : ................................. 49

-....Commerce extérieur (M. Franck Allisio, rapporteur spécial)

-Tourisme (Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale)

-Développement des entreprises et régulations ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés (M. Xavier Roseren, rapporteur spécial)

-Statistiques et études économiques ; Stratégies économiques ; Accords monétaires internationaux (M. Michel Sala, rapporteur spécial)

  présences en réunion........................... 67


Mercredi
26 octobre 2022

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 20

session ordinaire de 2022-2023

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission poursuit l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273).

Mission Cohésion des territoires (M. François Jolivet et M. Nicolas Sansu, rapporteurs spéciaux).

M. François Jolivet, rapporteur spécial (Logement et hébergement d’urgence). Rapporteur de ce budget, et des programmes 177, 109 et 135, pour la sixième fois, j’observe une atomisation de la fonction logement au sein des politiques publiques dans notre territoire.

Dans le processus de la construction de logements, les documents programmatiques sont pilotés par les maires et les présidents d’intercommunalité : ce sont eux qui décident des programmes locaux de l’habitat (PLH) et des plans locaux d’urbanisme intercommunal (PLUI), et qui déploient les plans départementaux d’action pour le logement et l’hébergement des personnes les plus défavorisées. Les territoires sont également maîtres du modèle économique puisque, souvent, les opérations de construction sont mixtes, mêlant logements sociaux, logements intermédiaires, programmes d’accession à la propriété. Par conséquent, les maires signent les permis de construire et, souvent, les intercommunalités les instruisent.

Depuis deux ou trois ans, une révolution est en cours : dans certaines grandes agglomérations, des permis de construire délivrés pour la construction de logements sociaux sont retirés par leurs bénéficiaires, au profit de parcs et jardins. Des zones d’aménagement concerté (ZAC), destinées à accueillir des logements sociaux, sont remises en cause par les nouvelles majorités municipales et intercommunales. Par ailleurs, peu de maires souhaitent construire des logements sociaux dans leurs territoires. Ce constat doit interpeller la représentation nationale.

Pour sa part, l’État a deux organismes de contrôle, l’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) et la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Il est représenté dans le conseil d’administration du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) mais ne participe plus à son financement, qui est assuré par un prélèvement sur les organismes HLM.

Le Parlement, lui, contrôle le financement du logement social par l’intermédiaire de la Caisse des dépôts et consignations – je salue Sophie Errante, en sa qualité d’ancienne présidente de la commission de surveillance.

L’État fixe les montants budgétaires des aides personnalisées au logement (APL). Il décide aussi des niches fiscales qui, souvent, dictent les modèles économiques de construction de logements. Par ses représentants qui siègent au conseil d’administration, il pilote l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Enfin, il fixe les enveloppes dédiées aux associations qui gèrent les centres d’hébergement.

La mission de l’État est donc bien partagée. Il est temps de mettre de l’ordre dans le rôle de chacun, car on s’y perd – il serait d’ailleurs bon de réunir à l’Assemblée des gens qui voudraient travailler ensemble sur le sujet.

Un débat s’est ouvert sur les places d’hébergement, dont le nombre est en légère baisse après une forte augmentation. Toutefois, 2 000 places de pension de famille seront créées, 1 000 pour des femmes victimes de violences, notamment conjugales, et 8 000 places d’intermédiation locale.

Après une hausse de 1,2 milliard sous le précédent quinquennat, le budget du programme Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables atteint un montant de près de 2,8 milliards d’euros. Il nous appartiendra de nous interroger sur les personnes qui occupent de manière récurrente ces places d’hébergement. Les services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) travaillent beaucoup, mais la demande d’hébergement n’est pas codifiée. Après avoir interrogé plusieurs SIAO sous le contrôle des préfectures, j’ai pu me faire une opinion personnelle sur le nombre de 1 600 enfants dans la rue qui est parfois avancé : je le conteste car ce n’est pas celui qu’ils m’ont donné.

La délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) est aujourd’hui à la manœuvre. C’est grâce à cette structure, placée sous l’autorité de la Première ministre, que les places d’hébergement ont été maintenues durant la période du covid. C’est la preuve que nous étions mieux-disants sur le plan social – nous le sommes toujours.

Les budgets de l’APL sont en légère augmentation. De nombreux amendements portent sur la contemporanéité des aides et les augmentations de budget. Dans les circonscriptions, de nombreux allocataires signalent qu’ils rencontrent des difficultés avec les caisses d’allocations familiales (CAF), du fait des dysfonctionnements du nouveau logiciel. Ces problèmes sont toutefois en voie d’être résolus.

La production de logement social a légèrement baissé après la période de covid et les petites révolutions locales que j’ai évoquées : environ 95 000 agréments sont attendus cette année.

Pour conclure, retenons que la compétence logement est partagée entre douze partenaires : il faut pouvoir travailler avec des acteurs identifiés et faciles à contrôler.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial (Politique des territoires). Bien que les crédits des programmes 112, 147 et 162 ne soient pas élevés, leur incidence est importante sur des politiques publiques majeures, comme le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), le plan Action cœur de ville, le programme Petites Villes de demain ou la politique de la ville.

Avec la dotation de plus de 1 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 952 millions d’euros en crédits de paiement (CP), le budget alloué à ces programmes n’est pas à la hauteur de l’ambition qui doit être la nôtre pour les territoires, d’autant que ces programmes fonctionnent et mériteraient d’être encouragés.

Dans le programme 112, la hausse des annuités des contrats de plan État-région et des contrats de plan interrégionaux État-région (CPER-CPIER) de 2021 à 2027, sanctuarisées autour de 140 millions d’euros pour le volet territorial, n’est que faciale. Elle procède d’un rapatriement des crédits du plan France relance en 2022, qui n’avaient rien à y faire puisqu’il s’agit du montant prévu chaque année au titre des engagements de l’État envers les régions jusqu’en 2027.

L’outil France Services est, d’abord, ce qui justifie la disparition des services publics. Même s’il peut fonctionner dans certains endroits, le reste à charge pour les collectivités est à la limite du supportable. De même, l’absence de revalorisation de la dotation de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) aura des conséquences immédiates : l’Agence devra appuyer sur la pédale de frein concernant les prestations sur mesure pour les collectivités, alors que ces dernières constituent une de ses raisons d’être.

S’il faut saluer l’augmentation de 30 millions d’euros du programme 147 Politique de la ville, qui permettra de pérenniser l’opération Quartiers d’été lancée en 2020, la très faible enveloppe de 15 millions d’euros allouée au NPNRU en 2023 envoie un mauvais signal. La haie à franchir sera d’autant plus haute pour l’État ces prochaines années, alors que le rythme de décaissement s’accélérera : il faudra allouer 200 à 250 millions d’euros les dernières années pour honorer le milliard qui avait été annoncé. Un soutien supplémentaire aurait permis au conseil d’administration de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) d’augmenter le taux d’avance accordé aux porteurs de projet, aujourd’hui fixé à 20 % par son règlement, donc d’accélérer les investissements.

S’agissant de l’accompagnement des territoires, qui concerne indirectement ces trois programmes, la logique du NPNRU qui insiste sur un engagement pluriannuel de l’État devrait progressivement devenir le paradigme de l’action de l’État envers les collectivités. Cet engagement n’existe pas aujourd’hui pour des programmes nationaux comme Action cœur de ville ou Petites Villes de demain. L’absence de prévisibilité est source d’incertitude pour les collectivités et une dépense d’énergie inutile. C’est aussi vrai pour le soutien aux associations des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) au titre des contrats de ville : la logique des appels à projets ou manifestations d’intérêt est à bout de souffle. Elle est source d’incertitudes et d’inégalités dans l’accès aux subventions publiques entre acteurs.

Quant au programme 162, il regroupe plusieurs interventions territoriales de l’État.

En juillet 2021, l’État a été sommé d’agir par le tribunal administratif (TA) de Renne en raison de l’insuffisance de son action contre les algues vertes en Bretagne. De nouvelles actions doivent être lancées – mesures agroenvironnementales et climatiques pour accompagner les agriculteurs dans leur changement de pratiques, achat et mise en place de matériels pour le suivi des émanations d’hydrogène, déploiement de techniques de collecte en mer –, mais de crédits frais, il n’est point question.

Concernant l’action relative au plan Chlordécone, l’État a été condamné par le tribunal administratif pour négligence fautive. Aucun nouveau crédit n’est ouvert alors que, là encore, des besoins réels existent : il faut notamment préciser la cartographie des terres polluées et créer un observatoire des pollutions. Je ne parle là que des mesures qui auraient leur place dans le programme, car la question de l’indemnisation des personnes touchées est aujourd’hui posée par le jugement du TA de Paris.

Le plan Sargasses 2 propose des mesures adéquates – développement des capteurs, achat de matériel de collecte, recensement des besoins en matière de barrages, développement du stockage, acquisition d’une flottille –, mais il faut être ambitieux : une flottille ne peut se résumer à un navire et une plateforme en mer. Les collectivités territoriales soutiennent certaines actions à hauteur de 50 % sans disposer de la santé financière suffisante. Le plan n’apporte aucune réponse à la dégradation des équipements domestiques, qui est pourtant un vrai sujet.

Enfin, le programme 162 Interventions territoriales de l’État (PITE) inclut les crédits du contrat de convergence et de transformation de la Guyane. Ils auront principalement permis d’engager la construction du plan du Larivot et la modernisation du grand port maritime, mais notre effort budgétaire doit changer de braquet. La moitié de la population de la Guyane vit sous le seuil de pauvreté – ce chiffre doit nous faire honte –, et la base de Kourou ne doit pas cacher la forêt de pauvreté.

J’ai déposé six amendements, qui, s’ils sont adoptés, pourraient motiver mon abstention.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (Logement et urbanisme). Sobriété foncière, demande de logements élevée, coûts de construction en hausse et rénovations énergétiques coûteuses, tels sont les principaux défis que doivent relever les secteurs du logement et de l’urbanisme. C’est dans ce contexte que s’inscrivent les deux ambitions majeures affichées par les programmes 109 et 135 : l’accès à un logement décent pour tous et la transition écologique.

Des moyens sans précédent sont déployés. Les aides au logement augmentent de près de 300 millions, l’accès aux APL est mieux protégé depuis la réforme du versement en temps réel – de quoi envisager sereinement la grande mesure de justice sociale tant attendue que sera la solidarité à la source.

Concernant la rénovation énergétique, le budget dédié au dispositif MaPrimeRénov’ augmente de 15 %, pour atteindre 2,8 milliards. Il s’agit de massifier les rénovations pour faire mieux que les 750 000 logements rénovés l’an dernier. Le nouveau dispositif MaPrimeRénov’ sérénité y concourra.

Parce que la rénovation énergétique est un impératif financier pour les locataires sociaux, 200 millions supplémentaires y sont consacrés grâce au Fonds national des aides à la pierre. Quant aux collectivités territoriales, elles bénéficieront du Fonds vert, à hauteur de 2 milliards.

Le cap fixé est clair et les moyens pour y parvenir sont là. L’heure est désormais à l’évolution de nos modes d’habitat, de développement urbain et d’aménagement du territoire. Nos outils fiscaux concernant le foncier, les meublés de tourisme ou le soutien à l’investissement locatif devraient, à terme, s’y adapter. La création par la commission des affaires économiques d’une mission d’information consacrée au prix du logement dans les zones tendues, nous invite à la réflexion.

La commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission Cohésion des territoires relatifs au logement et à l’urbanisme. En son nom a également été déposé un amendement relatif au barème des allocations de logement.

Article 27 et état B : Crédits du budget général

Amendements II-CF1142 de Mme Eva Sas, II-CF1407 de M. Éric Coquerel, II-CF452 de M. Julien Bayou, II-CF1177 de M. Philippe Naillet, II-CF1191 de Mme Eva Sas, II-CF438 de Mme Marie-Charlotte Garin et II-CF1073 de M. William Martinet (discussion commune).

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement CF1142 vise à abonder les crédits du programme Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables afin de porter à 200 000 le nombre de places d’hébergement d’urgence hors centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). Il prend en compte le financement de la revalorisation salariale du Ségur social au bénéfice de certains intervenants sociaux, ainsi que les conséquences de l’inflation sur le prix de l’énergie et des aliments.

Les logements d’urgence sont, pour les personnes sans abri, les premiers remparts contre une précarité accrue. Depuis le début des années 2000, cette population a fortement augmenté : la Fondation Abbé Pierre dénombre plus de 300 000 personnes sans domicile, quand l’Insee en avait estimé le nombre à la moitié lors de sa dernière enquête de 2012 et au quart, en 2001.

Il est donc surprenant que le budget dédié à l’hébergement d’urgence baisse. J’appelle à le rendre plus ambitieux, plus en lien avec les chiffres réels du sans-abrisme en France.

M. le président Éric Coquerel. M. le rapporteur spécial a évoqué des créations de places dans diverses structures, telles des pensions de famille, mais, comme l’a expliqué Christophe Robert de la Fondation Abbé Pierre, ce n’est pas en milliers que se comptent les personnes qui n’ont pas de logement, c’est en centaines de milliers. Leur nombre a explosé depuis cinq ans car on n’a jamais construit aussi peu de logements sociaux en France. La pression s’est répercutée en chaîne sur tous les types de logements, jusqu’aux logements d’urgence. La réalité est celle-ci que la suppression de 7 000 places d’hébergement en 2022 et 7 000 autres en 2023, ce sont 14 000 personnes de plus qui n’auront pas de quoi être hébergées en urgence.

Année après année, chacun qualifie la situation de catastrophique sans qu’aucune amélioration se produise, et la Fondation Abbé Pierre distribue des cartons rouges à tous les gouvernements qui se succèdent. Il n’est pas acceptable que les économies budgétaires se fassent au détriment des plus fragiles de nos concitoyens.

Mon amendement vise à récupérer les 14 000 places d’hébergement d’urgence.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement de M. Bayou a pour objet de revenir aux 155 000 places d’hébergement d’urgence – 200 000 en comptant les CHRS –, qui étaient disponibles pendant la crise sanitaire.

Plus de 300 000 personnes sont sans domicile fixe et alternent entre la rue et les hébergements d’urgence. Dans le 12e arrondissement de Paris, 412 personnes vivent dans la rue – elles sont 110 dans le 20e arrondissement. Le nouveau PLF acte pourtant la suppression de pas moins de 14 000 places depuis la fin de la crise sanitaire et le budget est en recul de 56 millions.

Cette décision est violente pour les plus de 2 000 enfants qui dormaient dans la rue ou dans des abris de fortune à la rentrée 2022, comme pour les gens qui appelleront le 115 sans qu’on puisse leur venir en aide. L’hiver arrive et il sera rude.

Nous ne pouvons pas accepter ce recul des moyens alloués à l’hébergement d’urgence. Il est dangereux et aux antipodes des besoins de notre société.

M. Philippe Naillet (SOC). Notre amendement, proposé par la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), vise à pérenniser les 200 000 places d’hébergement d’urgence actuelles en prenant en compte l’inflation et des mesures de revalorisation salariale, qui devraient s’appliquer à tous les salariés du secteur Accueil, hébergement, insertion (AHI). La ligne budgétaire de l’hébergement d’urgence devrait ainsi être portée à 1,6 milliard, soit une augmentation de 356,7 millions d’euros par rapport au budget initialement prévu.

L’accès au logement est préférable au maintien des solutions d’hébergement d’urgence, souvent peu qualitatives, mais tant que la politique du logement ne permettra pas d’offrir des solutions de logement pérennes à l’ensemble des personnes sans domicile, il paraît incontournable de maintenir les capacités d’hébergement.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Notre amendement, rédigé avec la Fondation Abbé Pierre, vise également à pérenniser les 200 000 places d’hébergement actuels.

Le 19 septembre 2022, les services du Samu social ont décompté plus de 6 300 personnes sans solution d’hébergement, et plus de 2 000 enfants ont dû dormir à la rue – 30 % de plus qu’au moment de la rentrée scolaire, vingt jours plus tôt. Dans la seule métropole de Lyon, 189 enfants sont à la rue, dont 23 ont de moins de 3 ans. Le ministre Olivier Klein a qualifié la situation d’inacceptable.

Les parents d’élèves, les écoles, les collectivités se mobilisent pour trouver des solutions, payer des nuits d’hôtel, mettre à disposition des établissements scolaires pour accueillir les familles. Dans un État aussi riche que le nôtre, c’est indécent : ce n’est pas aux citoyens d’organiser des goûters solidaires pour payer des nuitées et éviter que les enfants passent la nuit dehors.

Le minimum aurait été de prévoir une stagnation des moyens pour mettre à l’abri ces personnes ; le projet de loi de finances prévoit une baisse des capacités d’accueil pour 2023. Pour reprendre les mots d’Olivier Klein, c’est « inacceptable ».

M. William Martinet (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur spécial Jolivet, contester les chiffres des associations sur le nombre d’enfants à la rue ne me semble pas une bonne façon d’entamer le débat. Il y a cinq ans, un député de Paris expliquait qu’il n’y avait dans la rue que des hommes seuls qui refusaient l’hébergement qu’on leur proposait. Ne revenons pas à ces discours et reconnaissons que le niveau de tension sur le 115 est historique.

Chacun en a conscience, on ne réglera pas le problème du sans-abrisme avec le seul hébergement d’urgence. La réponse est évidemment structurelle ; elle se trouve sur le terrain du logement et l’on sait qu’au moment d’en débattre, nous aurons des désaccords et des débats politiques.

Emmanuelle Wargon, quand elle était ministre du logement, avait voulu arrêter la gestion au thermomètre, stabiliser le nombre de places d’hébergement à 200 000 et discuter avec les associations avant de faire quoi que ce soit. Essayons de tenir cet engagement : ayons le débat de fond pour régler le problème mais, dans une telle situation d’urgence, ne supprimons pas 14 000 places d’hébergement !

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je ne conteste pas qu’il y ait peut-être des enfants à la rue. À l’inverse de la demande de logements, que tout le monde dit être de 2,2 millions, la demande d’hébergement n’est pas codifiée. Le système d’information unifié ne permet pas à la représentation nationale de codifier les demandeurs – je le regrette.

De la même manière, on n’est pas capable de codifier les taux de rotation dans les centres d’hébergement : on n’y connaît pas la durée moyenne de présence. La Fédération des acteurs de la solidarité a présenté certains chiffres en septembre 2022 concernant les enfants à la rue mais, lors des nuits de la solidarité en 2021 et en 2022, les associations avaient dénombré moins d’enfants dormant effectivement à la rue. L’un de nous a peut-être raison ; personne ne le sait.

La Dihal, qui a fait des efforts pour moderniser le SIAO, compte passer à la vitesse supérieure, car il faut que la demande d’hébergement soit opposable, comme l’est le droit au logement – c’est mon opinion, je ne dis pas que la majorité la partage.

Au moment où je parle, 196 000 places d’hébergement sont occupées. La fonction logement est atomisée avec de multiples acteurs qui interviennent, tant pour le demandeur d’hébergement que pour celui qui gère et pour celui qui, derrière, paie. Vous regrettez les places qui seront supprimées mais vous oubliez les 8 000 places qui seront ouvertes en intermédiation locative et les 400 000 personnes qui sont passées de la rue au logement en quatre ans et demi, malgré une baisse de construction des logements.

L’entrée en centre d’hébergement est un échec national. Je ne me résous pas à la gestion de l’échec ; je souhaite que les gens passent de la rue au logement, avec des mesures d’intermédiation. Les pensions de famille vont offrir une réponse durable pour des personnes qui ont besoin d’un accompagnement de proximité.

Je serai d’accord avec vous le jour où nous pourrons partager des informations sur les data et que la demande d’hébergement sera gérée comme l’est aujourd’hui la demande de logement.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable à l’ensemble des amendements.

Mme Stella Dupont (RE). Personne ne peut concevoir que des enfants, des familles, des hommes isolés même, dorment dans la rue. Beaucoup a été fait pour créer des places, déployer des logements, mais tout cela prend du temps.

Dans le Maine-et-Loire, plusieurs projets de pensions de famille sont en cours mais ils n’aboutiront que dans trois ans, au mieux. Le calendrier semble décalé : l’objectif vers lequel on tend est le bon, mais il y a toujours des enfants et des familles sur les trottoirs des grandes villes. Il ne faut donc pas réduire le nombre de places d’hébergement.

Je présenterai en séance un amendement, qu’une cinquantaine de députés Renaissance ont déjà cosigné. Il nous faut retravailler ce sujet, notamment le pilotage, car il faut absolument, en effet, que l’on connaisse la manière dont ces crédits sont consommés et utilisés sur le terrain.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Je ne pensais pas qu’on en soit à contester les chiffres du sans-abrisme. Malgré les difficultés liées au nouveau système d’information, les SIAO ont tout à fait la capacité de donner, tous les soirs, le nombre de places pourvues et non pourvues, ainsi que des détails sur les familles hébergées, le nombre d’enfants et leur âge. C’est de là que proviennent les chiffres que nous avons évoqués de 2 000 enfants à la rue.

Quant à un droit opposable à l’hébergement, le code de l’action sociale et des familles dispose déjà que « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence ». Le sujet n’est pas de mieux comptabiliser les situations ou de créer un nouveau droit, il est de trouver des solutions applicables. Pour cela, on a besoin que les places d’hébergement soient ouvertes. Vous ne pouvez pas passer à côté de cela.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il y a peut-être des enfants à la rue, dites-vous, monsieur Jolivet – le « peut-être » est de trop. Oui, il y a des enfants à la rue, et des adultes aussi, et il faut leur apporter une réponse.

Celle que vous faites là est technocratique, administrative. Vous parlez de data alors qu’il s’agit d’êtres humains : ce n’est pas la réponse appropriée à un problème de cette ampleur, qui nous touche tous et devrait être transpartisan. À cet égard, je salue l’intervention de Stella Dupont.

Certes, toute la chaîne du logement doit être mobilisée, mais on a encore besoin d’hébergement d’urgence, car la suite de la chaîne n’est pas encore prête. Nous avons absolument besoin de maintenir le même nombre de places d’hébergement d’urgence que pendant la crise sanitaire. J’espère que l’ensemble de mes collègues souscriront à cet objectif.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Nous soutiendrons les amendements de la NUPES. Ce n’est pas la peine de raconter des histoires, il suffit de se promener dans Paris pour voir que des gens dorment dehors. Baisser le nombre de places d’hébergement d’urgence envoie un très mauvais signal, d’autant que le problème va s’accentuer : avec les Jeux olympiques, le parc hôtelier en région parisienne sera de moins en moins enclin à accueillir des personnes en situation d’urgence envoyées par le 115. Il faut aussi prendre en compte cette difficulté pour recréer des places, car on risque d’être fortement touché en 2023.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je suis un peu surpris que vous me preniez pour quelqu’un de technocratique.

Monsieur Martinet, il existe bien évidemment un droit inconditionnel à l’hébergement. Ce droit est tellement inconditionnel qu’il est garanti à toute personne, sans la connaître, de manière anonyme. Chaque jour, chaque soir, le SIAO actualise le nombre de personnes qui cherchent un toit, mais du fait de cet anonymat, il peut être amené à comptabiliser certains demandeurs plusieurs fois. J’appelle de mes vœux une modernisation du système d’information du SIAO, qui prenne en compte l’identité des demandeurs d’hébergement d’urgence ; cela nous permettrait d’assurer un suivi de ces derniers, à l’instar de ce qui se fait pour les demandeurs de logement. Ce n’est pas une question de statistiques, mais d’évaluation des politiques publiques et d’ajustement de ces dernières aux besoins réels. Disposer de meilleures données nous éviterait aussi d’avoir ce type de débat.

Madame Dupont, nous partageons beaucoup de convictions. Il est vrai qu’on observe un décalage entre le moment où nous décidons de créer des places et celui où ces places sont effectivement disponibles. Pour autant, 400 000 personnes sont bel et bien passées de la rue au logement en quatre ans et demi : c’est une première. Certes, il y a encore aujourd’hui des gens à la rue. Je ne connais pas de manière certaine leur nombre ni leur profil.

Oui, madame Sas, il y a des gens à la rue, que ce soit dans le 12e ou dans le 20e arrondissement, en Seine-Saint-Denis, dans les Yvelines… Toutefois, comme l’a signalé M. Sansu, le problème, dans ces grandes métropoles qui sont devenues des villes olympiques, n’est pas la fermeture de centres d’hébergement – si tel était le cas, les associations seraient tout de suite venues vous voir – mais la suppression de nuitées d’hôtel. En effet, de nombreux hôteliers sont en train d’envisager des travaux dans leur établissement en vue d’accueillir les touristes lors des prochains Jeux olympiques.

Dans son appel à projets, l’État a voulu inciter les communes à construire des centres d’hébergement en assurant lui-même 80 % de leur financement. Pourtant, dans les zones à population dense, je n’ai pas connaissance d’un engagement énorme des maires en la matière. Vous voyez bien que cette fonction est atomisée. Mais vous savez aussi que l’État est au rendez-vous, chaque année, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative (PLFR), s’il y a besoin de crédits supplémentaires.

Je profite de cette intervention pour vous annoncer qu’un accord a été conclu, lundi dernier, avec l’ensemble des associations gestionnaires pour instaurer un bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité dans les centres d’hébergement. S’agissant de l’élargissement du champ des bénéficiaires du Ségur de la santé, les négociations sont toujours en cours.

Si nous avons besoin de 200 000 places d’hébergement d’urgence, nous en aurons bien 200 000. Aujourd’hui, plus de 190 000 places sont ouvertes avec un objectif de 193 000 places au 31 décembre 2022. Dont acte.

M. le président Éric Coquerel. Quiconque a été amené à chercher des hébergements d’urgence pour y loger des personnes, qu’il s’agisse des occupants d’un immeuble en copropriété dégradée – je pense à ce qui s’est passé à Épinay-sur-Seine, dans la plus grande tour de Seine-Saint-Denis – ou de migrants qui se trouvent à la rue, sait qu’il faut toujours, au bout d’un moment, faire ouvrir des gymnases en catastrophe faute de places en nombre suffisant. Ce ne sont pas des chiffres, c’est la réalité concrète. Si l’on supprime 14 000 places…

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Non, 7 000.

M. le président Éric Coquerel. Si l’on supprime 7 000 places puis 7 000 autres places un an plus tard, cette situation ne va pas s’arranger – c’est le moins qu’on puisse dire.

Mme Stella Dupont (RE). Je voterai l’amendement II-CF1073, dont le coût est très faible – de l’ordre de 140 millions d’euros –, pour montrer mon attachement au maintien de ces 14 000 places. Les autres amendements ont un coût beaucoup trop important.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1142, II-CF1407, II-CF452, II-CF1177, II-CF1191, II-CF438 et II-CF1073.

Amendement II-CF1083 de Mme Danielle Simonnet.

Mme Danielle Simonnet (LFI-NUPES). Je réaffirme la nécessité absolue de ne pas fermer ces 14 000 places d’hébergement d’urgence.

Par cet amendement d’appel, nous demandons le financement, à un niveau élevé de qualité, de nouvelles places d’hébergement dédiées aux femmes victimes de violences. La France est très loin d’atteindre l’objectif fixé par la convention d’Istanbul, ratifiée en 2014, qui impose aux pays signataires « un accueil sûr dans des refuges spécialisés pour femmes, répartis dans toutes les régions et capables de recevoir une famille pour 10 000 habitants ». Il manque 40 000 places en centre d’hébergement spécialisé pour remplir cet engagement. Nous en demandons la création afin qu’aucune femme ne soit abandonnée à des violences conjugales ou intrafamiliales. Nous avons estimé le coût d’une telle mesure à 450 millions d’euros.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends votre préoccupation. L’accueil des femmes victimes de violences, conjugales ou autres, est une priorité de tous les gouvernements. Il est prévu la création de 1 000 places supplémentaires en zone urbaine pour ces femmes dans le PLF 2023 après un appel à projet en 2022 visant déjà à créer 1 000 nouvelles places d’hébergement

Pour être franc, je n’ai pas connaissance des difficultés rencontrées par les autorités chargées de gérer ces faits si douloureux pour les femmes qui en sont victimes. J’avais l’impression que cela fonctionnait plutôt bien, grâce aux efforts réalisés depuis une dizaine d’années dans ce domaine. Je suis très surpris par le besoin de 40 000 places que vous annoncez. Je ne sais pas comment vous avez calculé ce chiffre, qui est peut-être vrai. Si tel est le cas, cela veut dire que la santé sociale de notre pays est très mauvaise.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1083.

Amendement II-CF1202 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons de consacrer 2 millions d’euros au financement de centres d’hébergement pour femmes en situation de précarité sortant de maternité. Les structures existantes sont trop peu nombreuses et sous-dotées, de sorte que les femmes doivent généralement attendre plusieurs semaines avant d’obtenir une place d’hébergement en lieu de mise à l’abri ou en hôtel social.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Il me semble avoir déjà répondu lorsque nous avons examiné l’amendement précédent. Avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). M. le rapporteur spécial n’est pas certain qu’il y ait des enfants à la rue et pense que la mise à l’abri des femmes victimes de violences ne pose pas de difficulté.

Le présent amendement concerne les femmes sortant de maternité. Faute de parvenir à le faire adopter, nous allons utiliser le temps dont nous disposons pour informer la représentation nationale de ce qui se passe. De nombreuses femmes sans abri accouchent à la maternité mais n’ont pas de solution d’hébergement pour la suite. L’hôpital les garde trois ou quatre jours, mais il doit aussi remplir ses objectifs de rentabilité et finit donc par les remettre à la rue, avec leur nourrisson. Si vous en doutez, monsieur le rapporteur spécial, posez la question au 115, à qui les hôpitaux demandent de prendre en charge ces femmes sans qu’aucune solution ne soit malheureusement trouvée.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je ne sais que répondre, tant vos propos tournent à la caricature s’agissant de mes interventions et de l’action du Gouvernement, dont je ne suis pas membre. Je vous invite à revenir vers moi lorsque vous aurez un exemple de femme remise à la rue par un service social dépendant d’un hôpital public. Nous saurons alors remédier à cette situation, car les hôpitaux publics sont tenus de respecter un certain nombre de règles.

M. le président Éric Coquerel. Je pense que vous recevrez des députés de La France insoumise.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je serai heureux de le faire. Nous irons rencontrer ensemble les services du département et le directeur de l’hôpital !

La commission rejette l’amendement II-CF1202.

Amendement II-CF1204 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter l’offre de chambres adaptées aux personnes à mobilité réduite dans les centres d’hébergement d’urgence. Les chambres de ce type sont trop peu nombreuses au regard des besoins. Nous proposons donc d’abonder le budget de 5 millions d’euros.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Pour avoir visité un certain nombre d’accueils d’urgence, je sais qu’une très grande majorité d’entre eux sont déjà adaptés à l’accueil de personnes en situation de handicap. Tous ceux qui ont demandé un permis de construire sont d’ailleurs obligés de satisfaire à ces règles. Les associations qui œuvrent dans le domaine du handicap, que j’ai rencontrées, ne m’ont pas saisi de ce type de problème. Cependant, je prends acte de votre demande et je vous propose, si l’occasion nous est donnée de discuter de ce sujet dans l’hémicycle, de poser la question au Gouvernement.

Avis défavorable.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). J’aimerais revenir à l’amendement précédent, sur lequel nous avons un profond désaccord. Je peux vous assurer que j’ai vu, dans le cadre de mon travail, des femmes sorties des maternités par les équipes médicales – qui ne le font pas par plaisir. La seule solution que l’on trouve parfois, pour leur éviter de se retrouver à la rue, est de les accueillir dans une structure de la protection de l’enfance, alors qu’elles n’en relèvent pas et que ces services ne sont pas adaptés à leurs besoins. Vous nous dites que cela n’existe pas, mais je pourrais vous décrire plein de situations de ce type que j’ai eu à gérer dans le cadre de mes activités passées.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je n’ai pas dit que cela n’existait pas. Je vous ai invités à venir me voir pour me donner des exemples, car de telles situations ne doivent normalement pas se produire.

La commission rejette l’amendement II-CF1204.

Amendement II-CF1201 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit d’augmenter le nombre de chambres adaptées aux maîtres d’animaux dans les centres d’hébergement, afin de permettre aux animaux de compagnie des personnes sans abri de passer la nuit au chaud avec leur maître.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je crois savoir que certains centres d’hébergement accueillent déjà des personnes avec leurs animaux. C’est parfois le cas des pensions de famille et des foyers d’accueil. Je ne sais pas comment vous avez estimé le besoin budgétaire – le montant de 500 000 euros me paraît très faible –, mais votre demande me semble déjà satisfaite. Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous vous répondrons dans l’hémicycle. Mais une fois de plus, vous niez un problème qui existe, et je ne sais pas à quel moment nous pourrons avoir un débat.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous ne l’aurons peut-être pas en séance.

M. le président Éric Coquerel. C’est bien le problème.

La commission rejette l’amendement II-CF1201.

Amendements identiques II-CF1034 de M. Stéphane Peu et II-CF1130 de Mme Danielle Simonnet, amendements II-CF1178 de M. Philippe Naillet et II-CF1190 de Mme Stella Dupont (discussion commune).

Mme Karine Lebon (GDR-NUPES). L’amendement II-CF1034 vise à revaloriser les métiers de l’ensemble des professionnels du secteur « accueil, hébergement, insertion » (AHI). Si les associations saluent la revalorisation salariale de 183 euros par mois dont bénéficient les intervenants socio-éducatifs du secteur privé non lucratif, il n’en reste pas moins qu’un grand nombre de salariés restent exclus du périmètre de la revalorisation. C’est le cas, par exemple, des personnels techniques et administratifs des associations du secteur de l’hébergement et du logement accompagné, ou encore des écoutants du 115, alors même que ces professionnels jouent un rôle primordial pour répondre à la détresse des personnes sans domicile. Il convient de réparer ces oublis.

Mme Danielle Simonnet (LFI-NUPES). L’amendement II-CF1130 est identique. Je salue la mobilisation des oubliés du Ségur, et plus particulièrement celle des agents du centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP), qui ne sont pas directement concernés par cet amendement mais dont nous reparlerons plus tard. Bon nombre de professions ont été exclues du bénéfice de cette prime de 183 euros net par mois, comme les personnels techniques et administratifs des associations du secteur de l’hébergement et du logement accompagné, ou les écoutants du 115, qui sont en première ligne pour s’occuper de personnes en situation de précarité. Il est urgent de revaloriser leurs revenus. Sans compter que, s’agissant d’un secteur où travaillent majoritairement des femmes, il faut également remédier à un problème d’inégalité salariale femmes-hommes.

M. Philippe Naillet (SOC). Dans le même esprit que les deux amendements précédents, l’amendement II-CF1178 vise à revaloriser les métiers de l’ensemble des professionnels du secteur AHI.

Mme Stella Dupont (RE). Les professionnels de ce secteur, en particulier les écoutants du 115, sont au contact de publics très précaires et assurent des fonctions et missions difficiles. Ils méritent une revalorisation. C’est le sens de l’amendement II-CF1190, que j’ai rédigé en lien avec la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS).

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends votre préoccupation. Vous avez déposé ces amendements sur les crédits de la mission Cohésion des territoires parce que la tarification des centres d’hébergement relève de cette dernière. Cependant, les mesures du Ségur ont été prises et sont mises en œuvre par le ministère des solidarités.

Nous savons tous que les négociations se poursuivent. À titre personnel, je suis favorable à l’extension des mesures du Ségur à l’ensemble des salariés du secteur AHI, car une telle différence de traitement me semble difficile à comprendre. Je donne toutefois un avis défavorable à ces amendements, car cette extension ne me semble pas relever uniquement de la mission budgétaire Cohésion des territoires pour la totalité des personnels que vous évoquez.

M. Charles de Courson (LIOT). Je soutiens l’amendement de Mme Dupont. On a mis le bazar en voulant distinguer des autres les personnels exerçant de près ou de loin une activité de soins. En outre, une partie du secteur médico-social a été oubliée par le Ségur – je pense notamment aux résidences autonomie et aux maisons d’accueil et de résidence pour l’autonomie (Marpa). Il y a plusieurs mois, j’avais appelé l’attention de Mme Bourguignon sur cette question ; elle m’avait alors répondu que les négociations étaient en cours et allaient très vite déboucher sur une décision. Or ce n’est toujours pas le cas. Nous ferions donc œuvre utile en adoptant l’amendement II-CF1190 afin de susciter une réaction du Gouvernement.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Parmi les exclus du Ségur, au sein du secteur AHI, on trouve notamment les écoutants du 115, dont je parlerai tout à l’heure car j’ai déposé un amendement portant spécifiquement sur leur situation. On trouve aussi, principalement dans les centres d’hébergement, des personnels dits administratifs, qui remplissent en réalité un rôle d’accueil ou s’assurent du bon fonctionnement de la restauration, ce qui les met au contact avec le public, et des agents techniques, qui entrent dans les chambres des résidents pour effectuer des interventions. Pour faire le tri entre les personnels bénéficiant des mesures du Ségur et ceux qui n’en bénéficient pas, les critères théoriques étaient l’action socio-éducative et le contact avec le public, mais lorsqu’on regarde la réalité du travail des agents, on s’aperçoit que cette distinction n’est pas pertinente.

Je suis d’accord avec M. de Courson, cette différence de traitement a mis le bazar au sein des établissements. Bien plus, elle a suscité chez les exclus du Ségur un sentiment d’injustice tel que certains se replient et se désinvestissent de leur travail. Ils ne se sentent pas reconnus dans leur activité et ne voient donc pas pourquoi ils continueraient à y mettre toute leur énergie.

La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF1034 et II-CF1130 et les amendements II-CF1178 et II-CF1190.

Amendement II-CF1401 de M. Éric Coquerel.

M. le président Éric Coquerel. Il s’agit d’un amendement d’appel, car il a trait à une question qui ne rentre pas exactement dans le périmètre de cette mission budgétaire. Il vise à interpeller notre commission et le Gouvernement sur la situation des personnels des centres de santé municipaux, qui, bien que possédant les mêmes diplômes que les autres personnels soignants et ayant été en première ligne pendant la crise du covid, n’ont pas profité des mesures du Ségur. Je ne vois pas au nom de quoi ils en sont privés, alors que de nombreux personnels non soignants bénéficient de la prime dans d’autres secteurs.

Pour tout vous dire, je m’en suis ouvert au ministre afin que nos discussions puissent déboucher sur l’adoption d’un amendement, soit dans le cadre du PLF, si nous pouvons en débattre en séance, soit dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. La solution passera sans doute par une compensation versée aux communes qui gèrent des centres de santé.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Il faut en effet que le Ségur s’applique à tout le monde, y compris d’ailleurs aux centres de santé mutualistes et de droit privé. Ce n’est donc pas un problème qui touche spécifiquement les collectivités territoriales. Nous devons trouver un véhicule législatif qui puisse contenir les dispositions adéquates. S’agissant plus spécifiquement des relations avec les collectivités, il conviendra d’abonder une dotation exceptionnelle venant compenser l’augmentation du Ségur. Mon avis est donc favorable sur le principe, étant entendu qu’il faut encore trouver le bon véhicule pour faire en sorte que les mesures du Ségur couvrent l’ensemble du champ médico-social.

La commission rejette l’amendement II-CF1401.

Amendement II-CF1077 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Comme je suis très raisonnable, j’ai déposé de nombreux amendements de repli. Celui-ci vise à élargir le bénéfice de la prime Ségur aux seuls écoutants du 115. Ces agents, qui décrochent au téléphone quand des personnes sans abri appellent au numéro d’urgence 115, sont par définition en première ligne de la détresse sociale. Ils accomplissent un travail socio-éducatif, puisqu’ils doivent évaluer la situation et remplir une fiche après chaque appel. Il leur revient même de faire des choix très difficiles : à la fin de la journée, après avoir reçu des centaines d’appels, ils doivent décider quelles sont les deux ou trois personnes qui bénéficieront des rares places d’hébergement disponibles. En termes de pénibilité, ce n’est pas négligeable, au regard des cauchemars qu’ils font le soir quand ils rentrent chez eux.

Vous nous avez dit, monsieur le rapporteur spécial, que des discussions étaient en cours entre l’exécutif et les associations responsables des SIAO. Nous ne sommes pas obligés d’être à la remorque du ministère chargé du logement. Peut-être la représentation nationale peut-elle décider d’envoyer un message. Une revalorisation de 3,2 millions d’euros ne mettra pas les finances du pays à terre !

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je me suis déjà exprimé à ce sujet et je maintiens ma position. Je fais confiance aux négociations en cours entre les acteurs de la solidarité et l’État, représenté non par le ministère chargé du logement mais par la Dihal. Je suis persuadé qu’un accord pourra être trouvé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1077.

Amendement II-CF454 de M. Julien Bayou.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de soutenir le plan Logement d’abord, qui vise à loger des personnes sans abri en privilégiant des solutions pérennes. Le Gouvernement ayant annoncé vouloir relancer ce plan essentiel, nous l’appelons à concrétiser sa promesse en prévoyant les dotations adéquates dans le projet de loi de finances. Nous proposons un doublement de la somme allouée, soit une augmentation de 40 millions d’euros qui servira à financer 2 500 places supplémentaires.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je me réjouis de cette communication positive au sujet du plan Logement d’abord, qui correspond au service public de la rue au logement sans passer par le centre d’hébergement. À ma connaissance, les parties prenantes de ce plan n’ont formulé aucune demande de financement, y compris en matière d’intermédiation locative ; en réalité, elles n’arrivent pas à consommer l’enveloppe qui leur est dédiée. Mais puisqu’il s’agit d’une priorité du Gouvernement, je ne doute pas que ce dernier saura trouver les ressources supplémentaires en cas de besoin, ne serait-ce que pour justifier la petite baisse du nombre de places d’hébergement. Votre amendement étant déjà satisfait, je lui donne un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF454.

Amendement II-CF1181 de Mme Stella Dupont.

Mme Stella Dupont (RE). Je suis déjà intervenue au sujet de la domiciliation administrative des personnes sans domicile stable, lesquelles doivent disposer d’une adresse, en quelque sorte, pour activer leurs droits. De nombreux acteurs, qu’il s’agisse de centres communaux d’action sociale (CCAS) ou d’associations, peuvent assurer ce service. Or cela nécessite, pour ces structures, beaucoup de temps, de personnel et un investissement important. Mon amendement vise donc à instaurer un financement national de ce service assuré par des associations qui s’appuient beaucoup sur du bénévolat alors qu’elles ont grand besoin de professionnalisme.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous discutons de cet amendement chaque année. Vous l’avez dit vous-même, un certain nombre d’acteurs publics et d’associations domicilient déjà les personnes à la rue. Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel, parce que cette idée progresse et qu’une révision de l’ensemble de la tarification interviendra à partir du 1er janvier prochain. On me reproche parfois de faire confiance à la négociation entre le monde associatif et les administrations relevant du pouvoir exécutif. Mais malgré l’avis défavorable que je donne à votre amendement, je ne doute pas que vous obtiendrez gain de cause dans cette négociation.

La commission rejette l’amendement II-CF1181.

Amendement II-CF1183 de Mme Stella Dupont.

Mme Stella Dupont (RE). Il s’agit, là encore, d’un amendement d’appel, cette fois concernant le bouclier tarifaire. Mais je crois que vous avez apporté tout à l’heure une réponse positive à ma demande, auquel cas je le retirerai.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai en effet été prévenu par les services de la Dihal qu’un accord avait été conclu lundi dernier entre l’État et les fédérations d’associations gestionnaires pour la mise en œuvre d’un bouclier sur les prix de l’électricité et du gaz. Cet accord, que je n’ai pas vu, semble satisfaire tout le monde.

L’amendement II-CF1183 est retiré.

Amendement II-CF1084 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement porte à nouveau sur les plateformes d’écoute du 115. Il s’agit cette fois de permettre des recrutements supplémentaires dans les SIAO. Depuis tout à l’heure, nous parlons des personnes qui arrivent à joindre le 115 mais ne se voient pas proposer de place d’hébergement d’urgence ; or la plateforme téléphonique elle-même est saturée, si bien qu’il est très difficile pour une personne sans abri d’accéder à un interlocuteur. En permettant des recrutements, nous rendrons plus accessible le 115 et renforcerons donc l’accès aux droits.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je vous remercie de cet amendement, qui pointe certains sous-effectifs manifestes au sein des SIAO. Je le considère comme un amendement d’appel, d’autant que son montant est de 1 euro.

Au-delà des 183 euros de la prime Ségur, la question de la revalorisation salariale s’inscrit dans une problématique plus large puisque de nombreux collaborateurs de l’ensemble du secteur médico-social, du handicap jusqu’à l’accompagnement social en passant par les structures d’insertion, désertent ces métiers.

Je donne à votre amendement un avis défavorable, mais cette idée progresse car les acteurs de ce secteur se rendent compte des limites du fonctionnement actuel. Cependant, la fédération professionnelle et les organisations syndicales sont toujours en négociation, et je crois qu’ils parviendront à un accord, comme d’ailleurs dans le domaine des établissements et services d’aide par le travail (Esat).

La commission rejette l’amendement II-CF1084.

Amendements identiques II-CF1074 de Mme Danielle Simonnet et II-CF1172 de M. Philippe Naillet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). L’amendement II-CF1074 est légèrement plus cher que le précédent puisqu’il porte sur 1,3 milliard d’euros. Il concerne le logement social mais n’est pas sans lien avec notre discussion précédente puisque la résorption du sans-abrisme passe par une production de logements sociaux au loyer abordable permettant de vider les centres d’hébergement, voire d’accueillir directement les personnes à la rue. Cependant, les bailleurs sociaux ont-ils la capacité économique de produire ces logements sociaux abordables ? L’instauration de la réduction de loyer de solidarité (RLS), en 2017, a équivalu à une ponction de 1,3 milliard d’euros sur le budget des bailleurs sociaux et a privé ces derniers de toute capacité d’investissement. Notre amendement vise donc à réparer ce que vous avez abîmé il y a cinq ans en empêchant les bailleurs sociaux de produire.

M. Philippe Naillet (SOC). Nous proposons de réévaluer le montant des APL de 1,3 milliard, soit l’équivalent de ce que coûte aux bailleurs sociaux la réduction de loyer de solidarité (RLS), que nous proposons d’ailleurs de supprimer.

Les économies réalisées grâce à la baisse des APL durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, qui s’élèvent à plus de 12 milliards, justifient de revenir sur ce dispositif qui pénalise les bailleurs sociaux et qui aura eu pour principaux effets une diminution importante de l’entretien et de la rénovation du parc existant, et une nette réduction de la production de logements sociaux entre 2018 et 2021.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Du point de vue macroéconomique, les mesures d’accompagnement des organismes HLM ont en réalité accru leur capacité d’autofinancement. Le principal obstacle à la création de logement social, ce n’est pas le manque de moyens des bailleurs HLM, mais la difficulté à trouver des terrains, surtout dans les zones urbaines denses, où les maires refusent de signer les permis de construire. La situation des bailleurs sociaux s’est nettement améliorée depuis la réforme, grâce aux mesures de compensation, qui ont peut-être coûté plus de 1,3 milliard d’euros à l’État.

Avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Je ne sais pas de quelles mesures de compensation vous parlez. La RLS coûte 1,3 milliard aux bailleurs sociaux et ils ont subi un deuxième coup de rabot budgétaire de 1 milliard avec l’augmentation de la TVA sur la construction de logements neufs. Au total, depuis 2017, on a pris 3 milliards dans les caisses des bailleurs sociaux. La Caisse des dépôts a elle-même évalué leur capacité d’investissement et de production à 100 000 logements par an, bien en dessous de l’objectif fixé l’année dernière par Emmanuelle Wargon de construire 250 000 nouveaux logements en deux ans.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1074 t II-CF1172.

Amendements identiques II-CF1156 de Mme Danielle Simonnet et II-CF1175 de M. Philippe Naillet, amendement II-CF1157 de M. William Martinet (discussion commune).

M. William Martinet (LFI-NUPES). Comment protéger les locataires face à la hausse des prix de l’énergie ? Outre le bouclier tarifaire, que nous évoquerons plus tard, on peut agir sur le forfait de charges. Nous considérons qu’il faut revaloriser cette composante de l’APL qui est censée aider les locataires à payer leurs charges, notamment d’énergie. Mme Simonnet propose un doublement du forfait de charges. Je propose, quant à moi, une augmentation de 25 % de celui-ci.

M. Philippe Naillet (SOC). Cet amendement, qui a été travaillé avec l’Union sociale pour l’habitat (USH), vise à revaloriser de 25 % le forfait de charges pour tenir compte des prévisions de hausse des prix de l’énergie, largement supérieures à 3,5 %.

À titre d’illustration, pour un couple avec un enfant, dont le loyer en zone 2 est de 500 euros, la revalorisation de 3,5 % de tous les paramètres s’est traduite par une augmentation de l’APL d’environ 13 euros, mais le forfait de charges n’a été revalorisé, pour sa part, que de 2,33 euros, passant de 66,51 à 68,84 euros. L’augmentation décidée en juillet n’est donc clairement pas suffisante pour faire face aux hausses attendues.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le forfait de charges mériterait effectivement d’être revalorisé, car il ne l’a pas été depuis des années. Monsieur Martinet, vous avez évoqué le bouclier tarifaire, qui va s’appliquer à l’électricité, et peut-être au gaz, mais je crois que la solution est plutôt à chercher du côté du chèque énergie. À l’heure actuelle, les locataires de copropriété ou de HLM ne peuvent pas en bénéficier, puisqu’ils ne sont pas abonnés auprès d’un opérateur et qu’ils ne peuvent donc pas produire de facture. Je sais que Bercy travaille sur cette question et je crois vraiment que la généralisation du chèque énergie serait la meilleure solution, en plus du bouclier tarifaire.

Avis défavorable.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Un mouvement de protestation monte dans tous les départements au sujet du forfait de charges. Nos compatriotes qui vivent dans des logements HLM voient leurs charges exploser. Même si le bouclier tarifaire s’applique, leur facture augmentera quand même de 15 %, ce qui ne sera pas indolore. Ne pas revaloriser le forfait de charges serait une grave erreur.

La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF1156 et II-CF1175 et l’amendement II-CF1157.

Amendements II-CF1173 de M. Philippe Naillet et II-CF1205 de Mme Sabrina Sebaihi (discussion commune)

M. Philippe Naillet (SOC). Nous proposons de supprimer le mois de carence pour le bénéfice des APL.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. La règle existe depuis toujours. On ne perçoit pas les APL lorsqu’on entre dans un logement social. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1173 et II-CF1205.

Amendement II-CF1164 de Mme Danielle Simonnet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Nous proposons de revaloriser de 10 % l’ensemble des APL. La revalorisation de 3,5 % qui a été décidée dans le PLFR est trop modeste en comparaison des coupes budgétaires qui ont été faites dans les APL depuis 2017.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable. On ne pourra pas réparer en un seul budget tout ce que vous nous reprochez d’avoir fait en cinq ans.

La commission rejette l’amendement II-CF1164.

Suivant l’avis rapporteur spécial François Jolivet, la commission rejette l’amendement II-CF1035 de M. Stéphane Peu.

Amendement II-CF1160 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Nous ne corrigerons peut-être pas tout ce que vous avez fait, mais nous pouvons vous rappeler vos erreurs. La suppression de l’APL accession en est une autre.

L’APL accession était un excellent outil, qui permettait aux classes moyennes et populaires d’accéder à la propriété. Avec cet amendement d’appel, nous proposons de la rétablir dans le cadre d’un bail réel solidaire (BRS), pour que l’argent public n’alimente pas la bulle spéculative.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. L’APL accession favorisait, comme son nom l’indique, l’accession à la propriété. Or le bail réel solidaire, qui distingue le foncier du bâti, est le contraire de l’accession à la propriété, puisqu’il a une durée déterminée. Les deux dispositifs paraissent donc inconciliables. Je vous renvoie à un rapport de la Cour des comptes et à trois rapports d’inspection, qui expliquent très bien les raisons pour lesquelles l’APL accession a été supprimée.

Avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Le bail réel solidaire repose effectivement sur une dissociation entre le foncier et le bâti, mais il permet d’être propriétaire du bâti, tout en ayant un bail emphytéotique pour le foncier. C’est un excellent outil pour favoriser l’accession à la propriété, tout en luttant contre la spéculation.

M. le président Éric Coquerel. Avec la remontée des taux d’intérêt, il devient très difficile pour les gens qui n’ont pas d’apport personnel d’accéder à la propriété.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le bon moyen, me semble-t-il, pour encourager l’accession à la propriété, c’est le prêt à taux zéro. On a vu qu’il était générateur dans les zones urbaines denses, et le relèvement des taux lui rend tout son intérêt. Il faudrait peut-être l’étendre à d’autres zones.

M. Charles de Courson (LIOT). D’après les dernières statistiques relatives aux crédits immobiliers, les primo-accédants, qui représentaient 40 % des prêts, ne comptent plus que pour 20 %. Si cette tendance se poursuit, le parcours résidentiel sera complètement bloqué.

La commission rejette l’amendement II-CF1160.

Amendements identiques II-CF1038 de M. Stéphane Peu et II-CF1174 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet (SOC). Cet amendement, travaillé avec l’USH, vise à supprimer le seuil de non-versement des APL. Les 12 milliards d’économies réalisées grâce à la baisse des APL durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron justifieraient de revenir sur ce seuil.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je n’avais pas très bien compris l’objet de votre amendement. Je pense qu’il vise les locataires qui ont constaté une baisse de leur loyer, alors qu’ils ne percevaient pas d’APL. Je m’étais, moi aussi, étonné de ce dispositif, que je ne comprenais pas. Je vais vous transmettre la réponse qui m’a été donnée : la réduction de loyer de solidarité n’est pas une mesure budgétaire. Son objet est d’abord de recalculer les loyers nonobstant la perception ou non d’aides au logement par les locataires. Écarter de la RLS les locataires qui ne bénéficient pas d’APL faciliterait les choses pour les opérateurs HLM mais remettrait en cause toute la réforme, puisque cela voudrait dire que ce n’est qu’une mesure budgétaire.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1038 et II-CF1174.

Amendements identiques II-CF1043 de M. Stéphane Peu et II-CF1179 de M. Philippe Naillet, amendement II-CF1206 de Mme Sabrina Sebaihi (discussion commune).

M. Philippe Naillet (SOC). Il s’agit d’harmoniser les barèmes des allocations logement entre l’outre-mer et l’Hexagone pour ce qui concerne la prise en compte du nombre de personnes à charge. Limitée à six enfants pour l’outre-mer, cette mesure constitue une inégalité de traitement que la proportion des familles de plus de six enfants en outre-mer par rapport à la métropole justifie de moins en moins.

Par ailleurs, les prix des loyers en outre-mer se rapprochant des prix franciliens, il serait souhaitable que les pouvoirs publics examinent la possibilité de classer les territoires d’outre-mer en zone 1 plutôt qu’en zone 2, comme c’est le cas actuellement.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous voulons mettre fin à l’inégalité du barème, qui limite le calcul des aides à six personnes à charge dans les outre-mer mais ne prévoit pas de limite en métropole.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai découvert avec surprise cette inégalité de traitement. J’aurais tendance à vous demander de retirer vos amendements et de poser directement la question au ministre en séance, sans toutefois être sûr que nous ayons une séance. Je suis prêt, en tout cas, à rédiger une question écrite à ce sujet, afin de savoir quel était le fondement de cette disposition, car je n’ai trouvé nulle part d’explication. Je ne sais pas davantage si les sommes visées seraient adaptées.

Je pourrais aussi m’en remettre à la sagesse de la commission.

M. le président Éric Coquerel. Cela me semble préférable, dans la mesure où les crédits de cette mission risquent de ne pas être examinés en séance.

Mme Karine Lebon (GDR-NUPES). Cette limitation du nombre de personnes à charge dans les foyers ultramarins date des années Debré et de la politique antinataliste qui était alors menée outre-mer. La France d’alors interdisait encore l’avortement, mais il était permis, sous une forme déguisée, à La Réunion. Certains enfants, qu’on estimait trop nombreux chez eux, ont même été arrachés à leur foyer pour repeupler la Creuse – ce sont les fameux « enfants de la Creuse ». Ce n’est qu’une inégalité de plus. Nous pouvons la réparer aujourd’hui : faisons-le !

M. Charles de Courson (LIOT). Je confirme que c’était bien une politique antinataliste. Michel Debré, qui était député de La Réunion, était nataliste en France hexagonale et antinataliste à La Réunion. Une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) ferait sauter immédiatement cette disposition, puisqu’il y a une rupture d’égalité entre les familles. Je voterai ces amendements.

M. Philippe Naillet (SOC). À l’époque, on nous expliquait que les pauvres, a fortiori s’ils étaient loin, ne devaient pas avoir beaucoup d’enfants. En 2022, le taux de fécondité des outre-mer se rapproche de celui de l’Hexagone. Il faut mettre fin à cette injustice terrible, qui a trop longtemps duré, en adoptant ces amendements à l’unanimité, sans attendre une question écrite.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1043 et II-CF1179.

En conséquence, l’amendement II-CF1206 tombe.

Suivant l’avis du rapporteur spécial François Jolivet, la commission rejette l’amendement II-CF1041 de M. Stéphane Peu.

Amendements II-CF1161 et II-CF1162 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Nous poursuivons, avec ces deux amendements, le bilan critique du précédent quinquennat concernant les APL.

Le premier propose de revenir sur la réforme des APL en temps réel, qui a surtout permis de faire 1 milliard d’économies. Elle a beaucoup pénalisé les jeunes qui entrent dans la vie active, puisque l’ancien système de calcul leur permettait de bénéficier d’un niveau élevé d’APL pendant leur première année de travail, ce qui n’est plus le cas. Cette réforme devait permettre de mieux adapter les APL à la situation des personnes mais, dans l’ancien dispositif, on pouvait très bien, avec une assistante sociale de la CAF, procéder à une neutralisation de ressources : si on se retrouvait au chômage, les APL pouvaient être recalculées immédiatement. Je pense que cette réforme a surtout permis de faire des économies.

Le second amendement, d’appel, propose de revenir sur la coupe de 5 euros qui a été décidée en 2017.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je suis en total désaccord avec l’amendement II-CF1161 et avec votre vision des choses. La contemporanéité des aides était demandée depuis 1995 par des gens très à gauche, de façon à ce que le montant d’APL puisse être calculé au plus juste, en fonction de la situation du bénéficiaire. Je ne peux pas vous laisser dire qu’un jeune qui entre dans le monde du travail est pénalisé : pendant les trois premiers mois, il perçoit de l’APL ; ensuite, sa situation est remise à jour.

Auparavant, les APL étaient calculées d’après les revenus de l’année n – 2, et le fils d’ouvrier recevait la même chose que celui du directeur général d’une grande entreprise de distribution d’énergie. Une femme qui se séparait de son conjoint ou de sa compagne avait bien du mal à obtenir un rendez-vous à la CAF pour faire recalculer ses droits sur sa situation individuelle et non plus sur la base des revenus de son couple – pour dire que c’était facile, on voit que vous ne l’avez jamais fait. Aujourd’hui, la mesure fonctionne plutôt bien et les représentants de locataires eux-mêmes l’apprécient.

Quant aux économies que vous imaginez, elles servent à revaloriser les APL de gens qui se retrouvent dans une situation défavorable.

Avis très défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Pour prendre un cas concret, un jeune en contrat d’apprentissage qui entre dans un foyer de jeunes travailleurs ne touche plus rien depuis la réforme, alors qu’avant, le calcul de l’APL prenait en compte ses revenus à n – 2, c’est-à-dire quand il était étudiant. Je ne sais pas de quelle association de locataires vous parlez, mais je peux vous dire que la Fédération des foyers de jeunes travailleurs est catastrophée par les conséquences de cette réforme.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1161 et II-CF1162.

Amendement II-CF1158 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Lors de l’audition de la direction de la CAF par la commission des affaires économiques, on nous a expliqué qu’en même temps que la CAF devait gérer la réforme très compliquée du mode de calcul des APL, elle avait dû aussi mettre en œuvre un plan de suppression de 1 600 postes d’agents administratifs. Cela pourrait expliquer les dysfonctionnements qui ont pu se produire dans le versement des APL. C’est aussi ce qui explique que le ministère du logement a dépêché le cabinet McKinsey pour accompagner la CAF.

De toute évidence, ces 1 600 postes étaient indispensables au bon fonctionnement de l’institution. C’est pourquoi je propose, à travers cet amendement, de revenir sur leur suppression.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai rencontré la direction générale de la CAF, qui n’a pas évoqué ces 1 600 postes. La CAF va négocier avec l’État sa convention d’objectifs et de gestion pour les trois années à venir. Ses demandes sont beaucoup plus modestes. Elle souhaite surtout avoir des personnels pour traquer les bailleurs véreux.

Vous parlez de McKinsey, mais c’est Atos qui a été le maître d’œuvre de cette réforme.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1158.

Amendement II-CF1136 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). Avec cet amendement d’appel, nous proposons de réfléchir à une extension du dispositif Pinel dans le cadre du plan Action cœur de ville, des opérations de revitalisation de territoire (ORT) et du programme Petites Villes de demain, afin d’y favoriser la mixité.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le dispositif Pinel va s’éteindre en 2024. On sait qu’il favorise souvent la production de logement intermédiaire et de logement social. Il appartiendra au Gouvernement et à la représentation nationale de trouver de nouveaux modèles économiques durables pour la construction de logements pour tous les territoires.

L’amendement II-CF1136 est retiré.

Amendement II-CF1137 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). Dans le même esprit, cet amendement d’appel vise à imaginer un régime de contingentement et d’agrément des logements susceptibles de bénéficier du dispositif Pinel dans des territoires qui ont des projets mais qui n’y sont plus éligibles.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Même avis.

L’amendement II-CF1137 est retiré.

Amendements II-CF469 de Mme Julie Laernoes et II-CF1076 de M. William Martinet (discussion commune).

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cinq ans après le drame de la rue d’Aubagne à Marseille, la lutte contre l’habitat indigne n’est toujours pas engagée. Plus de 1,3 million de personnes sont toujours contraintes de vivre dans des conditions dangereuses pour leur santé et leur sécurité. Nous proposons donc de déléguer de nouvelles missions à l’Anah et de lui offrir de nouveaux moyens, afin qu’elle assure le rôle d’agence nationale des travaux d’office et qu’elle mène une politique de résorption de l’habitat indigne.

La création d’une telle agence est évaluée à 20 millions d’euros et les besoins en investissement pour la mise aux normes annuelles de 60 000 logements sont évalués à 1,5 milliard d’euros supplémentaire.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Lorsqu’une autorité, par exemple le préfet, prend un arrêté d’insalubrité parce qu’un habitat indigne a été identifié, son propriétaire est théoriquement obligé d’y faire des travaux. Très souvent, surtout quand c’est un marchand de sommeil, il se soustrait à cette obligation.

La loi permet à la puissance publique de se substituer au propriétaire pour faire ces travaux et de les lui refacturer, mais les collectivités ont souvent du mal à le faire. L’idée serait de confier cette tâche à l’agence nationale des travaux d’office : elle ferait les travaux et se retournerait vers les marchands de sommeil pour qu’ils les prennent en charge.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Sur le fond, je suis d’accord. Je précise toutefois que l’immeuble qui s’est effondré à Marseille appartenait à la ville et non à un marchand de sommeil. L’agglomération de Marseille produit énormément de logements, mais à 25 kilomètres de son centre-ville. Elle ne s’occupe pas des logements insalubres, dont la mission flash réalisée à l’époque à la demande de Julien Denormandie avait estimé le nombre entre 60 000 et 75 000. Je ne suis pas certain que l’ANAH soit l’opérateur idoine pour ce genre de mission. En revanche, il pourrait être utile que des opérateurs de ce type existent au niveau local, surtout au regard de l’étalement urbain et de l’artificialisation des sols.

Avis défavorable, même si je comprends l’objectif de vos amendements.

M. le président Éric Coquerel. Je soutiens ces amendements. En Seine-Saint-Denis aussi la situation est dramatique et on en arrive à des situations paradoxales. Faute de logements sociaux ou parce qu’ils n’ont pas les garanties nécessaires pour louer un logement privé, des gens louent des taudis dignes de Dickens ou de Zola au prix du marché privé. La préfecture de Seine-Saint-Denis fait de son mieux, mais il est clair qu’il manque des moyens pour traquer le logement indigne.

La commission rejette successivement les amendements II-CF469 et II-CF1076.

Amendements II-CF282 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1211 de Mme Sabrina Sebaihi (discussion commune).

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Le dispositif MaPrimeAdapt’ devrait voir le jour en 2024. L’adaptation des logements pour les personnes à mobilité réduite est insuffisante. Il faut accélérer pour que tous les bâtiments d’habitation nouvellement construits soient accessibles aux personnes handicapées. Des moyens doivent être mis sur la table pour cela.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement CF1211 vise à accélérer la mise en accessibilité du parc de logements par l’intermédiaire de MaPrimeAdapt’. Il s’agit d’étendre le bénéfice de ce dispositif au-delà des personnes âgées, car elles ne sont pas les seules à faire face à des situations de perte d’autonomie.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Les amendements sont satisfaits par le dispositif Habiter facile, qui est ouvert aussi bien aux personnes en situation de handicap qu’aux personnes âgées confrontées à une perte de mobilité.

Par ailleurs, des moyens sont prévus pour adapter les logements au handicap dans le cadre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (Opah).

Si vous avez des exemples précis, je serais très heureux d’en parler avec la directrice générale de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Notre amendement a été rédigé en collaboration avec le Collectif Handicaps, qui n’est pas satisfait.

L’amendement II-CF282 est retiré.

La commission rejette l’amendement II-CF1211.

Amendement II-CF1078 de Mme Danielle Simonnet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement vise à soutenir financièrement les bailleurs sociaux.

L’objectif de production de 250 000 logements sociaux sur la période 2021-2022 n’a pas été tenu, notamment en raison des coupes budgétaires qui ont frappé ces bailleurs.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. L’exposé sommaire dénonce l’insuffisance du nombre des agréments. Il faut rappeler que la période a été marquée par la crise sanitaire et par les élections municipales. Comme l’ont relevé les bailleurs lors du congrès annuel de l’Union sociale pour l’habitat, c’est un échec collectif des acteurs, y compris les collectivités territoriales.

Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Les organismes bailleurs avaient indiqué que les prélèvements divers, notamment sur Action Logement, aboutiraient à une baisse de 20 % à 25 % des constructions de logements sociaux. On ne peut pas le nier. Les statistiques de construction montrent que les résultats correspondent bien à ce qu’ils avaient annoncé.

M. le président Éric Coquerel. Ils l’ont confirmé lors de leur audition par le groupe LFI-NUPES.

Dans des départements où le taux de logements sociaux est important, les gens concernés par des projets de l’Anru comprenant des démolitions ne retrouvent pas un logement social dans leur ville ou à proximité, tout simplement parce qu’on ne reconstruit pas autant de logements qu’on en a détruits. Cela pourrait d’ailleurs conduire à s’interroger sur une politique de rénovation qui passe par des démolitions.

Le manque de logements sociaux est criant et il ne s’explique pas seulement par la disponibilité du foncier. C’est aussi le résultat de constructions insuffisantes.

La commission rejette l’amendement II-CF1078.

Amendements II-CF279 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1210 de Mme Sabrina Sebaihi (discussion commune).

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (loi « 3DS ») instaure un nouveau critère de recours au titre du droit au logement opposable (Dalo). Toute personne en situation de handicap logée dans un logement inadapté peut engager un recours pour être relogée. À défaut, elle pourra recevoir des indemnités pour manquement de l’État.

Cela va probablement entraîner des demandes importantes. L’amendement propose de consacrer 1 million d’euros supplémentaires pour mieux garantir l’offre de logements accessibles. Il s’agit de montrer la volonté d’accompagnement de l’État. Voter une loi, c’est bien. Prévoir les moyens de sa mise en œuvre, c’est encore mieux.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement II-CF1210 vise à accompagner la mise en place par la loi « 3DS » du nouveau critère relatif au handicap au sein du Dalo. Cela impose à l’État d’accélérer le recensement et la mise en accessibilité du parc locatif. Il faut mettre en cohérence les budgets avec l’ouverture de ce nouveau droit.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Les personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap sont prioritaires lors de l’examen des dossiers par les commissions d’attribution des logements sociaux.

Il est exact que la loi « 3DS » va ouvrir de nouveaux droits et va élargir le public prioritaire. Le PLF prévoit une augmentation des crédits liés à l’augmentation prévisible du contentieux. Des crédits supplémentaires pourraient être nécessaires.

Dans le doute, sagesse.

M. William Martinet (LFI-NUPES). La loi « 3DS » ouvre des droits supplémentaires, avec un recours possible devant le juge et, le cas échéant, le versement d’indemnités. J’ai beaucoup critiqué le bilan du Gouvernement, mais je salue la prise en compte du handicap comme nouveau critère de recours au titre du Dalo.

Je soutiens ces amendements, qu’il faut considérer comme des amendements d’appel car avec 1 million d’euros on reste très loin des besoins réels.

M. Charles de Courson (LIOT). Petite réflexion de législateur : pensez-vous que c’est en multipliant les droits comme le Dalo que l’on va construire des logements et résoudre les problèmes ?

M. le président Éric Coquerel. Pour aller dans le sens de Charles de Courson, le Dalo est de plus en plus un droit au logement hypothétique. Dans le département dans lequel je suis élu, le Dalo n’est quasiment pas appliqué et il ne fait guère de différence. Il faudra bien un jour en dresser le bilan.

La commission adopte l’amendement II-CF279.

En conséquence, l’amendement II-CF1210 tombe.

Amendement II-CF1082 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Une des difficultés du dispositif MaPrimeRénov’ réside dans le montant du reste à charge pour les ménages modestes. Il peut s’établir entre 20 % et 30 % du montant des travaux de rénovation énergétique, ce qui empêche de les engager.

Le sujet est certes complexe, mais si l’on veut atteindre les objectifs de rénovation du parc de logement il faudra davantage de moyens et prévoir qu’il n’y ait plus de reste à charge pour les ménages modestes.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Tout le monde souhaiterait pouvoir entreprendre des travaux avec un reste à charge nul, mais je ne suis pas certain qu’une prise en charge intégrale par la puissance publique soit juridiquement possible.

Dans le cas des Opah, les collectivités territoriales complètent les aides de l’Anah, de telle sorte que certaines opérations de réhabilitation globale sont financées à hauteur de 80 % – c’est le cas dans l’Indre. Elles comprennent des travaux d’isolation et un changement du mode de chauffage qui améliorent la performance énergétique des bâtiments.

Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel, car il faut mieux étudier s’il est possible d’aboutir à un reste à charge nul.

Avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Certaines grandes entreprises ne paient pas d’impôts. Je ne vois pas ce qui s’oppose à ce que des familles modestes aient un reste à charge nul quand elles rénovent leur logement.

La commission rejette l’amendement II-CF1082.

Amendement II-CF1081 de Mme Danielle Simonnet.

Mme Danielle Simonnet (LFI-NUPES). Alors que la situation est urgente, on sait très bien qu’au rythme actuel de réhabilitation des passoires thermiques on en a pour au moins trois cent vingt ans.

Qu’est-ce qui freine les opérations de rénovation globale ? Le fait que l’ensemble des aides ne couvre généralement pas plus de 20 % à 40 % du coût total des travaux.

Il faut absolument prévoir un reste à charge nul pour les ménages modestes. C’est ce que propose cet amendement d’appel extrêmement modéré.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends votre souhait mais pas vos chiffres.

La directrice générale de l’Anah m’a indiqué que près de 80 000 logements ont bénéficié d’une aide au titre d’une rénovation globale depuis 2021. Si l’on considère les travaux moins complets, plusieurs millions de logements sont concernés.

Je comprends le jeu des acteurs et la rhétorique de chacun, mais je conteste la durée que vous avez mentionnée.

En revanche, je peux comprendre que l’on souhaite des compléments de financement pour mener les opérations de réhabilitation. Je suis d’ailleurs favorable à la généralisation du prêt à taux zéro. Mais cela ne se décide pas de la manière proposée par cet amendement d’appel.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1081.

Amendement II-CF1387 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Il s’agit du premier amendement sur les programmes que j’ai l’honneur de rapporter.

Les maisons France Services ne sont pas forcément la panacée puisqu’elles donnent parfois lieu au retrait de services publics. Selon un rapport de l’Inspection générale de l’administration (IGA), une maison France Services coûte en moyenne 110 000 euros, avec un financement de 30 000 euros partagé également entre l’État et les opérateurs, le reste à charge incombant aux collectivités territoriales. L’amendement tend à augmenter de 10 000 euros la participation de l’État, afin de les soulager, ce dont elles ont bien besoin.

La commission rejette l’amendement II-CF1387.

Amendement II-CF1389 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Le Gouvernement a souhaité regrouper des établissements publics comme le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) et l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca) au sein de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT). La dotation de cette agence et son plafond d’emplois sont seulement reconduits, ce qui va lui poser de graves problèmes puisque ses missions s’alourdissent et que l’inflation renchérit le coût des opérations. Surtout, elle va devoir faire face en 2023 a des engagements financiers pris par l’Epareca. De ce fait, l’ANCT ne pourra plus honorer ses engagements auprès des collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne les 20 millions d’euros prévus pour le soutien à l’ingénierie.

C’est la raison pour laquelle l’amendement propose d’augmenter de 5 millions les crédits de l’ANCT, afin qu’elle puisse assurer ses missions, notamment le programme Petites Villes de demain et le plan Action Cœur de ville.

La commission rejette l’amendement II-CF1389.

Amendement II-CF1388 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Il s’agit d’augmenter les crédits dont bénéficie l’Anru, afin que la parole de l’État soit tenue.

Dans le cadre NPNRU, l’État avait annoncé 1 milliard d’euros supplémentaire. Or les versements constatés jusqu’à présent ou prévus pour 2023 sont de seulement 15 millions par an. À ce rythme-là, il restera 700 millions à décaisser pendant les trois dernières années. Je vois mal comment l’État va pouvoir honorer sa promesse auprès de l’Anru.

L’amendement propose d’affecter 30 millions supplémentaires à l’Anru en 2023. Elle pourrait ainsi débloquer davantage de financements au début des travaux engagés par les collectivités territoriales, ce qui permettrait de ne pas ralentir les programmes de rénovation urbaine et d’augmenter l’investissement public.

La commission rejette l’amendement II-CF1388.

Amendement II-CF1386 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Seuls 25 % des quartiers prioritaires de la politique de la ville sont couverts par le programme des cités éducatives. Certaines collectivités sont intéressées par ce dispositif qui fonctionne bien, mais les financements disponibles ne permettent plus d’en créer. L’amendement propose d’affecter 7 millions d’euros pour relancer les appels à projets.

La commission rejette l’amendement II-CF1386.

Amendement II-CF1391 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Les investissements en Guyane sont très faibles par rapport aux besoins. À l’exception de la construction du pont de Larivot, le contrat de convergence et de transformation (CCT) ne prévoit aucune mesure d’envergure. Sur la période 2021-2022, seulement 3,826 millions d’euros sont prévus pour l’assainissement et l’accès à l’eau potable, alors que près de 40 % de la population n’y a pas accès.

Nous proposons de changer de braquet pour faire un vrai plan de développement des investissements publics en Guyane. L’amendement propose 30 millions d’euros supplémentaires pour le Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane, qui retrace les crédits du CCT.

La commission rejette l’amendement II-CF1391.

Amendements identiques II-CF1057 de la commission du développement durable et II-1125 de Mme Danielle Simonnet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel souligne notre opposition au projet Montagne d’or. Ce projet climaticide prévoit le déboisement de 1 513 hectares, dont un tiers de forêt primaire, et il met en danger plus de 2 000 espèces végétales et animales.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Le Gouvernement a annoncé l’arrêt de ce projet, mais la décision définitive n’a toujours pas été prise.

Avis favorable.

M. le président Éric Coquerel. Le projet Montagne d’or aurait également un impact écologique sur le Brésil, pays avec lequel la France partage sa plus longue frontière terrestre.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Notre groupe soutient cet amendement. Lors de la campagne présidentielle, Yannick Jadot s’était rendu sur place pour soutenir les opposants à ce projet. Il s’agit d’un amendement d’appel pour que le Gouvernement respecte sa parole, puisqu’il a indiqué que ce projet climaticide serait abandonné.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1057 et II-1125.

Amendement II-CF1390 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Cet amendement propose de doubler les crédits de l’action 13 Plan Sargasses 2 du programme 162, en les passant de 5 millions à 10 millions d’euros.

Nous devons faire face à de grands défis pour régler le problème des sargasses dans les Antilles françaises. On sait que la flottille annoncée sera largement insuffisante. Le plan prévu n’apporte aucune réponse à la dégradation des équipements domestiques liée aux émanations venant de ses algues. Les investissements réalisés par la République dominicaine sont huit à dix fois supérieurs.

La commission rejette l’amendement II-CF1390.

Amendement II-CF1153 de M. William Martinet.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Avis favorable. Il faudrait des moyens complémentaires pour lutter contre les algues vertes.

La commission rejette l’amendement II-CF1153.

Amendement II-CF1155 de M. William Martinet.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). En Guadeloupe et en Martinique, plus de 90 % de la population adulte sont contaminés par le chlordécone, d’où une importante mobilisation à ce sujet. La crise de la covid a mis en évidence les conséquences de l’affaire du chlordécone sur le rapport des populations à la parole gouvernementale et à la santé publique. Si l’on veut restaurer un jour un peu de confiance entre le Gouvernement et les habitants de ces îles, qui désormais se méfient légitimement de l’État, il faut allouer davantage de moyens au plan « chlordécone ».

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Avis favorable. Il y a une forte demande pour dresser la carte très précise des terres contaminées, avec leur taux de contamination. Cela n’a pas encore été fait et cela suppose des moyens supplémentaires.

L’État a été condamné, mais il n’a pas prévu une enveloppe budgétaire supplémentaire pour lutter contre le fléau du chlordécone grâce à un plan digne de ce nom.

M. Alexandre Sabatou (RN). Le groupe Rassemblement national est d’accord avec cet amendement, qui va dans le bon sens. Le chlordécone est un scandale sanitaire immense, qui est quasiment ignoré en métropole. Je partage le constat de M. Guiraud : la méfiance envers le Gouvernement est profondément installée, on l’a vu lors de la crise sanitaire avec l’opposition aux confinements et aux vaccins. Il faut donc rétablir la confiance.

La commission rejette l’amendement II-CF1155.

Amendement II-CF1159 de Mme Mathilde Hignet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Il s’agit d’apporter une aide exceptionnelle de 150 millions d’euros aux particuliers qui utilisent des granulés de bois pour se chauffer.

Les pouvoirs publics ont incité beaucoup de ménages à changer de mode de chauffage pour passer aux granulés de bois. C’est encore le cas à travers le dispositif MaPrimeRénov’, qui finance 38 000 changements de ce type par an. Or le prix des matières premières a augmenté de manière très importante et les ménages qui se sont inscrits dans une démarche écologique font face à des difficultés importantes.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends d’autant mieux l’objet de l’amendement qu’il me semble déjà satisfait. La loi de finances rectificative (LFR) du 16 août 2022 a prévu une enveloppe de 230 millions d’euros pour les personnes qui se chauffent au fioul. Le Gouvernement pourrait peut-être faire bénéficier de ce dispositif ceux qui utilisent les granulés de bois. Une enveloppe pourrait sinon être ouverte dans le prochain projet de loi de finances rectificatives (PLFR).

Le chauffage avec des granulés de bois concerne surtout les zones de montagnes, car les pompes à chaleur cessent de fonctionner lorsque la température descend en dessous de moins 10 degrés.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il y a quand même un gros problème : le Gouvernement incite des milliers de Français à adopter le chauffage par poêle à granulés de bois, puis les prix augmentent de manière faramineuse – près de 150 % en six mois. C’est le résultat d’une spéculation : des vendeurs ont constitué des stocks et en profitent pour augmenter les prix. C’est du vol organisé. L’État, qui a favorisé l’installation de ce type de chauffage, doit prendre ses responsabilités.

Notre commission doit envoyer un signal avant l’examen en séance publique, en particulier si celui-ci n’a finalement pas lieu en raison du « 49.3 ». Il faut prendre cette question au sérieux et notre amendement devrait rassembler tous les groupes politiques.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je partage la colère de notre collègue Guiraud. J’ai déjà abordé cette question en séance publique.

Je ne suis pas certain que la réponse budgétaire soit la bonne. En revanche, nous attendons tous une réponse claire du ministère de l’économie et de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) au sujet de la régulation de ce marché. Il faut renforcer les contrôles et rechercher ceux qui ont constitué des stocks.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nos concitoyens qui ont été incités à passer au chauffage à bois sont les seuls à ne bénéficier d’aucune aide. Le dispositif mis en place par la LFR concerne le chauffage au fioul. Je ne suis pas certaine qu’il soit étendu aux granulés de bois, comme l’indique le rapporteur – et si c’était le cas, en conservant la même enveloppe de 230 millions d’euros, je ne serais absolument pas d’accord.

M. Charles de Courson (LIOT). Lors des dialogues de Bercy, on nous avait dit qu’il était envisagé d’étendre la mesure. Il faudrait donc qu’avant l’examen du texte en séance publique, le rapporteur vérifie si le dispositif est étendu au chauffage au bois – lequel peut prendre plusieurs formes, et pas seulement celle de pellets.

Mme Magnier me souffle que, même s’il s’agit d’un tout petit secteur, certaines personnes se chauffent au propane. Il faudrait donc établir un système universel qui s’applique quel que soit le mode de chauffage.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Il est utile de rappeler les dispositions votées au titre du programme 345 Service public de l’énergie et le débat auquel elles ont donné lieu. Le dispositif du chèque fioul et le chèque exceptionnel qui sera probablement proposé à nouveau dans le cadre du projet de loi de finances rectificative couvrent en partie ce besoin. Il n’est donc pas exact de dire que ces fonds ne peuvent pas être utilisés pour acheter des pellets.

Il a également été dit qu’on ne peut pas à la fois prévoir un dispositif spécial pour les pellets et dénoncer des phénomènes de stockage observés non seulement chez les vendeurs de gros, mais également chez les particuliers.

Il y a encore été dit que le Gouvernement réfléchissait à ce problème, mais qu’il ne se posait pas exactement dans les mêmes termes pour le propane, qui ne se stocke pas de la même manière que les pellets, ce qui rend moins difficile d’étudier une mesure à ce propos.

Pour ce qui est des aspects scientifiques, il appartient au Gouvernement de répondre.

M. Fabien Di Filippo (LR). Quel est le niveau moyen de l’aide qui sera, si j’ai bien compris, octroyée aux premiers déciles pour le fioul et pour les pellets ?

M. François Jolivet, rapporteur spécial. L’exercice est beaucoup plus difficile, car je ne suis pas un expert. Je vous ai exposé le fond des mesures prévues au titre du PLFR et du dispositif exceptionnel qui sera reconduit, mais je ne peux pas vous répondre quant au montant. Si nous allons en séance, je vous propose de poser la question au ministre d’ici à l’examen du texte en séance publique.

En revanche, monsieur Sitzenstuhl, la DGCCRF est à la manœuvre et pourra communiquer à ce propos. Cette structure est dotée de fonctionnaires de qualité et parvient tout de même à faire des contrôles – le résultat en surprendra plus d’un !

M. le président Éric Coquerel. Compte tenu de l’urgence et de l’approche de l’hiver, si nous sommes d’accord sur la finalité, s’il ne s’agit que d’alerter le Gouvernement et étant donné qu’il est possible que l’examen du texte en séance n’ait pas lieu, je suis favorable à ce que la commission vote cet amendement.

La commission adopte l’amendement II-CF1159.

Amendement II-CF1403 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Cet amendement vise à prévoir des crédits de 50 millions d’euros pour la prolongation en 2023 du plan Avenir montagnes, qui était financé dans le cadre du plan de relance. L’objectif n’est pas de diminuer l’enveloppe de la mission, mais nous sommes contraints de le présenter de cette manière.

Le plan Avenir montagnes a eu pour objectif, à la suite de la crise, de diversifier l’activité touristique de montagne et de l’engager vers une transition écologique. Un montant de 50 millions d’euros apporté par l’État a déjà été engagé et il reste 100 millions à engager sur cette année. Je déplore cependant que les stations de sports d’hiver, qui sont le cœur de l’activité économique de nos montagnes, n’aient pas été éligibles à ce plan.

L’amendement, que je dépose en qualité de rapporteure spéciale pour le budget du tourisme, vise donc à poursuivre ce dispositif afin d’accompagner tous nos massifs dans leur transition écologique, et d’ouvrir aussi le bénéfice de ces aides de l’État à l’investissement dans les domaines skiables pour la transition écologique. L’aide pourrait ainsi permettre d’investir dans les remontées mécaniques en vue de réduire leur consommation d’énergie, ou dans des dameuses plus propres et moins consommatrices.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Je comprends votre inquiétude, car la mesure a été prise cadre du plan de relance, avec 300 millions d’euros en AE sur deux ans, dont 150 à la charge de l’État. Les crédits de paiement se prolongeront en 2023, puisque tous les projets n’ont pas pu être mandatés et liquidés.

Votre amendement propose de nouvelles autorisations d’engagement et la création d’une nouvelle intervention territoriale dans le cadre du programme 162, mais approuver une telle démarche supposerait de relancer toutes les politiques engagées dans le cadre du plan de relance. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, car il me semble normal de poursuivre de telles politiques territoriales. Même si je ne suis pas certain que le vecteur budgétaire le plus pertinent soit celui que vous proposez, du moins peut-on suggérer au Gouvernement de l’identifier.

La commission rejette l’amendement II-CF1403.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote des groupes sur les crédits de la mission.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’invite la commission à émettre un avis favorable. Comme je l’ai dit dans mon introduction, les trois budgets que nous examinons seront des budgets de transition et il importe de réinterroger tous les acteurs qui ont la compétence logement, car la situation manque de clarté. Nous avons en effet évoqué une dizaine d’intervenants dans des ministères différents, chargés tantôt des aides à la pierre et des aides à la personne, de la délivrance des permis de construire et de leur instruction, ou de la décision quant aux modèles économiques et de la surveillance des niches. Nous aurons sans doute l’occasion, au cours de cette législature, de contribuer à ce que la compétence en matière de logement soit mieux identifiée et mieux assumée.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Avis défavorable, car aucun des amendements du rapporteur, portant notamment sur le déploiement des cités éducatives, le soutien à l’ANCT et à l’Anru, ainsi que sur toutes les missions relatives aux politiques territoriales, n’a été adopté. Ce n’est pas bien de notre part de ne pas soutenir davantage le plan chlordécone ou les plans de lutte contre les sargasses et les algues vertes.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le groupe Renaissance votera les crédits de la mission Cohésion des territoires.

Nous nous félicitons d’avoir, dans un débat nourri, entendu M. Jolivet tenir sur la politique du logement, qui engloutit de nombreux milliards pour une efficacité décevante, un discours de vérité invitant à une réflexion que nous devrons mener tout au long du mandat qui s’ouvre.

Notre majorité agit depuis cinq ans pour les territoires. Nous avons notamment créé l’ANCT, qui a simplifié le paysage des opérateurs et aidé les collectivités locales dans le montage de projets. Nous avons créé des programmes appréciés des élus locaux, comme Action cœur de ville ou Petites villes de demain. Nous avons accéléré le déploiement des maisons France services et enclenché un mouvement de réouverture de sous-préfectures.

Enfin, à l’inverse des procès qui nous sont faits, nous protégeons les finances des collectivités territoriales en assurant la stabilité de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur la durée du quinquennat, en augmentant cette dernière pour l’année qui vient et en maintenant les dotations d’investissement.

M. Alexandre Sabatou (RN). Cette mission soulève plusieurs problèmes. La politique du logement est un tonneau des Danaïdes, avec un coût énorme et peu de résultats. Plus personne ne sait qui fait quoi. En matière de logement social, c’est la course à l’échalote – on veut créer 25 % de logement social partout, même lorsque ce n’est pas possible. Pourquoi cela ne marche-t-il pas ? N’y a-t-il pas aussi un problème de flux, du fait qu’une partie des gens occupant actuellement des logements sociaux n’a peut-être plus vocation à s’y trouver ? La chaîne du logement est brisée et peut-être faut-il aussi se concentrer davantage sur le logement intermédiaire et l’accession sociale à la propriété. Se pose aussi un problème d’attribution. Les maires n’ont plus envie de construire de logements sociaux parce qu’ils n’ont quasiment aucune maîtrise des attributions. Il faut donc vraiment remettre à plat toute cette politique, car nous en touchons les limites.

Si la politique de la ville connaît quelques réussites, des milliards d’euros ont néanmoins été dépensés depuis quarante ans dans ce qui est, selon nous, une gabegie – jugement qu’a du reste exprimé aussi, dans un style plus feutré, la Cour des comptes dans un récent rapport.

Nous ne voterons pas les crédits de cette mission.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cette mission illustre l’austérité qu’impose un projet de loi de finances qui ne répond pas aux besoins sociaux. Il aurait déjà fallu corriger les erreurs commises durant le précédent quinquennat avec la réduction des APL et les coupes budgétaires affectant les bailleurs sociaux, mais le rejet des amendements déposés en ce sens ne l’a pas permis.

Il aurait également fallu répondre à l’urgence, notamment face au sans-abrisme, et particulièrement celui qui touche les enfants. Je suis très déçu qu’une grande partie de la discussion ait été consacrée à la réalité du sans-abrisme plutôt qu’aux moyens à déployer pour le combattre.

Enfin, rien n’est prévu pour préparer l’avenir. Pour ne citer que la rénovation thermique, qui est une urgence absolue, nous n’avons pas obtenu les moyens budgétaires nécessaires pour tenir les objectifs en la matière.

Cette mission et ce budget ne sont pas à la hauteur.

M. Fabien Di Filippo (LR). Le groupe Les Républicains ne soutiendra pas non plus les crédits de cette mission. En matière de politique du logement, tous les voyants passent au rouge. Aujourd’hui encore, nous apprenons que les ventes de logements neufs sont en baisse de quasiment 11 %. Ces constats remettent en cause les réformes et la politique des années précédentes, auxquelles nous nous sommes toujours opposés – on commence ainsi à voir les effets des ponctions opérées sur les bailleurs sociaux en termes de sous-investissement et de non-développements du parc locatif.

Enfin, les conséquences de la disposition « zéro artificialisation nette », dite ZAN, seront catastrophiques tant pour la création de logements que pour le développement des communes rurales, renforçant la fracture territoriale entre les espaces métropolitains et les espaces périurbains ou ruraux.

Nous ne pouvons donc exprimer qu’un avis très défavorable sur les crédits de cette mission.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Ayant été durant cinq ans rapporteur de cette mission aux côtés de M. François Jolivet, je vois dans ces crédits des points positifs et des points négatifs.

Il convient tout d’abord de souligner les effets très positifs de l’instauration du versement des APL en temps réel, qui permet de mieux prendre en compte la situation des bénéficiaires. Il faut également saluer le fait que l’enveloppe du NPNRU, le nouveau programme national de renouvellement urbain, ait été portée à 12 milliards d’euros à la fin du quinquennat précédent.

Pour ce qui est des points négatifs, nous n’avons toujours pas pris le temps de réfléchir en profondeur à la politique de la ville, qui n’est parfois qu’un saupoudrage de subventions. Par ailleurs, la chlordécone reste un réel problème en Martinique et en Guadeloupe.

Toutefois, les points positifs l’emportant largement sur les points négatifs, nous voterons ces crédits.

M. Philippe Naillet (SOC). Depuis 2017, notre groupe dénonce les coupes claires opérées par la majorité dans les aides au logement, qui ont eu pour effet un affaissement de la production de logements sociaux durant trois ans, sans parler de la nette réduction de l’investissement courant pour l’entretien du parc existant. En outre, dans une période de forte inflation, ces facteurs pénalisent durement les ménages modestes et la sous-revalorisation des aides intervenue au 1er juillet dernier, si elle était nécessaire, reste très insuffisante. Nous regrettons vivement l’absence de rattrapage dans ce PLF2023.

Enfin, nous dénonçons le choix de supprimer 14 000 places d’hébergement d’urgence dans une période où nous voyons tant de jeunes enfants contraints de dormir dans la rue avec leur famille. Comment justifier l’effort de 4,5 milliards d’euros correspondant à la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), alors que les entreprises n’ont rien demandé, et les économies de bout de chandelle envisagées simultanément sur le dos des plus précaires ?

Nous voterons contre les crédits de cette mission.

Mme Lise Magnier (HOR). Le groupe Horizons et apparentés votera en faveur des crédits de cette mission, conformément à la recommandation du rapporteur Jolivet. Comme lui, nous tenons aussi à dénoncer la mise à contribution unilatérale et brutale d’Action logement, à hauteur de 300 millions d’euros, pour le financement du Fonds national d’aide à la pierre. La mesure nous paraît peu compréhensible, car ce groupe, après avoir réformé sa gouvernance et réduit ses coûts de gestion, prévoit un total de 3 milliards d’euros d’émissions obligataires en 2023 pour honorer les engagements qu’il a pris dans le cadre du plan d’investissement volontaire, qu’il a également respecté. Cette méthode est pour nous un grand sujet d’interrogation.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Les crédits alloués à la mission Cohésion des territoires sont très insuffisants. Tout d’abord, en effet, ils ne progressent que de 3,5 %, ce qui est très inférieur à l’inflation, et les augmentations projetées pour 2024 et 2025 sont encore moindres. Ensuite, une partie de cette augmentation n’est qu’apparente, puisqu’elle correspond à des financements du plan de relance, par exemple pour MaPrimeRénov’ Copropriétés, transférée dans cette mission pour un montant de 200 millions d’euros. Troisièmement, les crédits affectés aux APL progressent certes pour tenir compte des revalorisations adoptées en juillet 2022, mais je regrette que la revalorisation du forfait de charges dans ce cadre reste très insuffisante et laisse les ménages bénéficiaires en grande difficulté face à la hausse des prix de l’énergie. Il est regrettable que le Gouvernement n’ait pas conservé l’amendement en ce sens que nous avions fait adopter lors de l’examen de la première partie du PLF.

Enfin, les crédits attribués à l’hébergement d’urgence sont en recul de 56 millions d’euros. Il est inacceptable que 7 000 places d’hébergement d’urgence soient ainsi fermées en sus des 7 000 autres déjà fermées depuis le mois de janvier.

Je regrette, en outre, que les amendements du rapporteur spécial Nicolas Sansu visant au renforcement des moyens des plans de lutte contre les sargasses et le chlordécone n’aient pas été adoptés.

Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste-NUPES votera contre les crédits de la mission Cohésion des territoires.

Mme Karine Lebon (GDR-NUPES). Sans surprise, le groupe GDR, composée pour moitié d’élus communistes et pour moitié d’élus ultramarins, se prononcera contre ce budget. La construction est à la baisse et le mal-logement à la hausse, et les files d’attente de demandeurs de logements sociaux ne cessent de s’allonger, avec des délais d’attente qui atteignent des records, ce qui est synonyme de beaucoup de souffrance.

Nous regrettons que les amendements portant sur les places en hébergement d’urgence n’aient pas été acceptés. Si nous nous réjouissons de l’adoption de l’amendement II-CF1043 visant à l’homogénéisation du barème de l’allocation logement entre les outre-mer et l’Hexagone, le rejet de ceux qu’a proposés le rapporteur spécial, notamment à propos des sargasses et du chlordécone, nous laisse un goût amer, sans qu’on ait eu d’ailleurs de réels motifs de ce refus. Ce n’est pas là un signal très constructif envers nos territoires d’outre-mer. Sans le réflexe outre-mer, il est à craindre que la parole des ultramarins ne soit pas davantage prise en compte.

M. Charles de Courson (LIOT). Le groupe LIOT votera contre les crédits de cette mission.

Tout d’abord, nous comprenons mal le maintien d’une ponction de 300 millions d’euros sur Action logement. L’État n’a jamais tenu ses engagements envers cette structure, qui a pourtant tenu les siens. Ce n’est pas acceptable.

Ensuite, les crédits consacrés à l’APL sont insuffisants. Comme l’a en effet indiqué le rapporteur spécial, alors que nous avons consommé 2,9 milliards d’euros à ce titre en 2021, les crédits prévus pour 2023 sont un peu inférieurs à ce chiffre : comment pourra-t-on tenir ? Le rapporteur relève d’ailleurs que « le stock de dossiers en souffrance a atteint un plateau très élevé en raison de la réforme de la contemporanéisation des aides » – qui est, du reste, une bonne réforme sur le fond.

Par ailleurs, il n’est pas raisonnable de réduire de 7 000 en 2023 et à nouveau de 7 000 en 2024 le nombre de logements d’urgence en compensation du nombre de places supplémentaires ouvertes en pension de famille pour les femmes victimes de violences ou au titre de l’intermédiation locative par le biais d’associations privées, qui est très difficile à mettre en œuvre.

Plus largement, nous déplorons l’absence de politique du logement – qu’a du reste reconnue le ministre, à qui nous l’avons dit lors des dialogues de Bercy –, alors que la situation du logement se dégrade et que la construction faiblit fortement. Nous sommes en train d’organiser une nouvelle pénurie de logements.

La commission rejette les crédits de la mission Cohésion des territoires.

Article 30 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

L’amendement II-CF1013 de M. Philippe Schreck est retiré.

Après l’article 41

Amendements identiques II-CF1042 de M. Stéphane Peu, II-CF1180 de M. Philippe Naillet et II-CF1231 de M. Aurélien Taché.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de simplifier le dispositif RLS, ou réduction de loyer de solidarité, peu lisible, complexe et induisant un coût supplémentaire à la charge des organismes de logements sociaux. Le décalage entre le montant de la réduction d’APL et les réductions de loyer qui interviennent concomitamment représente des sommes très faibles, de l’ordre d’un euro par mois, et rend illisible la quittance du locataire, notamment en cas de régularisation au titre de plusieurs mois passés. La réforme de la contemporanéisation multiplie la fréquence de ces régularisations et rend le dispositif de la RLS très coûteux en gestion, pour les caisses qui versent les prestations d’aide au logement comme pour les bailleurs sociaux.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je connais les difficultés de mes anciens collègues bailleurs à ce propos et je suis, à titre personnel, favorable à ces amendements, qui n’ont du reste pas d’incidence budgétaire.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1042, II-CF1180 et II-CF1231 (amendement II-2812).

Amendement II-CF1207 de Mme Sabrina Sebaihi, amendements identiques II-CF33 de la commission des affaires économiques et II-CF1234 de M. Aurélien Taché (discussion commune).

Mme Eva Sas. L’amendement II-CF1207 est retiré.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement IICF33, déposé à l’initiative de M. Stéphane Peu et adopté à l’unanimité par la commission des affaires économiques, vise à mettre fin à la différence entre les modalités de calcul des APL qui s’appliquent respectivement à l’outre-mer et à la métropole. En effet, en outre-mer, le nombre d’enfants pris en charge est aujourd’hui limité à six, ce qui n’est pas le cas en métropole. L’amendement tend par ailleurs à revoir le zonage de ces territoires afin de les actualiser selon le niveau de prix constaté.

Le barème applicable en outre-mer pour l’APL présente de nombreuses spécificités. Si certaines, comme celle qui fait l’objet de l’amendement, sont en défaveur de nos compatriotes ultramarins, d’autres permettent d’ajuster favorablement l’APL par rapport à la situation en métropole. Il s’agit donc d’engager une réflexion globale sur les critères, afin de leur rendre une cohérence qu’ils peuvent avoir perdue au fil des années. Une grande partie de ce travail est d’ordre réglementaire et suppose une collaboration avec le ministère du logement, qui s’est déjà engagé en ce sens. Je vous propose d’y participer collectivement en adoptant cet amendement, qui peut être la première étape de ce travail.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Dans la suite logique de l’adoption par notre commission d’un amendement assumant les conséquences budgétaires théoriques d’une telle homogénéisation des règles qui s’appliquent outre-mer et en métropole – dont nous avons découvert à cette occasion la différence discriminatoire –, je propose d’adopter aussi ces amendements identiques tendant à modifier le code de la construction. Nous verrons ce qu’en fera le Gouvernement – car je ne suis pas certain pour autant que leur rédaction soit parfaite.

M. Nicolas Sansu, rapporteur pour avis. Il est important d’adopter ces amendements qui insèrent dans le code de la construction et de l’habitat la non-discrimination dans le calcul des APL, car le rejet des crédits de la mission a fait disparaître l’amendement que nous avions préalablement adopté.

La commission adopte les amendements identiques II-CF33 et II-CF1234 (amendement II-2813).

Amendements II-CF1129 de M. William Martinet et amendements identiques II-CF1049 de M. Stéphane Peu, II-CF1209 de Mme Sabrina Sebaihi et II-CF1242 de M. Aurélien Taché (discussion commune).

M. William Martinet (LFI-NUPES). L’objectif est d’élargir l’accès au tarif réglementé de l’électricité, et donc au bouclier tarifaire, au logement collectif, logement HLM ou différentes structures de logement d’insertion ou d’hébergement. Il s’agirait de prendre en compte l’électricité dans les charges communes telles que l’ascenseur ou l’éclairage.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je me suis déjà exprimé à ce propos. Pour les associations chargées de missions d’hébergement pour le compte de l’État, un accord est intervenu lundi sur la prise en compte des charges de chauffage dans le champ du bouclier tarifaire. Si j’en crois les propos du ministre du logement, relatifs au secteur HLM et aux copropriétés, un accord est sur le point d’aboutir sur l’intégration des charges des parties communes. Tous les abonnés des copropriétés ou les locataires à titre individuel peuvent bénéficier du chèque énergie et du bouclier tarifaire.

La question de l’utilisation du chèque énergie pour les locataires de logements dans des copropriétés ou les propriétaires occupants qui ne peuvent pas produire de factures d’abonnés reste à trancher, mais les deux points visés par les amendements sont satisfaits. Avis de sagesse.

M. Charles de Courson (LIOT). Raison de plus de les voter, s’ils sont satisfaits ! Ça ne mange pas de pain et nous passerons tous pour des gens formidables !

La commission rejette successivement l’amendement II-CF1129 et les amendements identiques II-CF1049, II-CF1209 et II-CF1242.

Amendement II-CF1131 de M. William Martinet.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Je comprends cet amendement, qui tend à atteindre un taux global de 100 % de reconstitution du logement social dans le cadre des projets ANRU. On compte aujourd’hui 95 000 reconstitutions dans le cadre des NPRU, pour 114 000 démolitions. Les chiffres s’appréciant projet par projet ou convention par convention, il est toujours très difficile d’atteindre un taux de 100 %.

Cet amendement, qui tend à ce que les programmes de rénovation urbaine permettent au moins de maintenir le nombre de logements sociaux, et non pas d’en détruire alors que nous en manquons tant, est tout à fait pertinent. Toutefois, sur certains territoires, la reconstitution de 100 % de l’offre n’a pas de sens, tandis que, sur certains autres, il faudrait atteindre un taux de 125 % du fait de la demande et des besoins qui s’expriment. Les chiffres doivent donc être envisagés à l’échelle nationale. Sagesse.

M. Charles de Courson (LIOT). L’analyse du rapporteur spécial va dans le sens inverse de ce que propose l’amendement. À Vitry-le-François, par exemple, dans la circonscription dont je suis élu, il faut réduire le parc, en raison d’une baisse de la population – et, de fait, dans certains quartiers de cette petite ville, on ne reconstruit qu’à peine 30 % des logements démolis. L’idée ancienne selon laquelle il fallait reconstruire autant de logements sociaux que l’on en détruisait n’est pas adaptée. Il faut parfois, comme l’a dit le rapporteur, en reconstruire davantage, et parfois il n’est parfois pas pertinent de le faire. La mesure proposée n’est pas adaptée.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Le NPNRU prévoit déjà un engagement de l’ANRU à mener des projets avec reconstitution complète du parc, mais pas nécessairement dans la commune concernée par la destruction des logements – l’échelle envisagée est plutôt intercommunale, voire départementale. Les projets existants sont souvent bloqués par la difficulté de reconstituer le parc, en particulier par le manque de visibilité en la matière. Le risque existe donc que, compte tenu des contraintes, l’engagement de reconstitution complète du parc ne soit pas tenu et l’amendement tend donc à inscrire cette obligation dans la loi.

La commission rejette l’amendement II-CF1131.

Amendement II-CF1167 de Mme Danielle Simonnet.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Je ne vois pas d’obstacle à l’adoption de cet amendement, qui vise à la remise d’un rapport sur le recours aux cabinets de conseil par l’ANCT, chargée de réaliser des études pour les collectivités. Je répète cependant que c’est une très mauvaise manière que d’avoir refusé l’augmentation des crédits de cette agence, qui devra précisément réaliser des économies sur ses crédits d’ingénierie pour pouvoir payer ses frais courants. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1167.

Amendement II-CF1169 de M. William Martinet.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Cet amendement prévoit la remise d’un rapport sur France services, portant en particulier sur le problème de financement des maisons France services, à peine couvert à 30 % actuellement par les opérateurs et par l’État, le reste étant à la charge des collectivités. On ne peut qu’approuver cette demande.

La commission rejette l’amendement II-CF1169.

Mission Sport, jeunesse et vie associative (M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial).

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Les crédits de la mission s’élèvent à 1,509 milliard d’euros en autorisations d’engagement et à 1,822 milliard en crédits de paiement. Les CP sont en hausse significative, respectivement de 5,5 % et 8,4 %, pour les programmes 219, Sport, et 163, Jeunesse et vie associative.

Le sport est une politique à laquelle concourent plusieurs ministères ; l’effort de l’État en la matière ne saurait donc s’apprécier en fonction des seuls crédits des programmes 219, Sport, et 350, Jeux olympiques et paralympiques 2024. Le jaune budgétaire montre qu’au total, ce sont près de 7 milliards d’euros qui financeront le sport en France en 2023.

Le programme 219 avait bénéficié en 2022 d’une hausse de 200 millions d’euros en autorisations d’engagement, au profit du programme des équipements sportifs de proximité. En 2023, la hausse des crédits de paiement, de 40 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022, doit permettre de financer l’augmentation des sommes versées à l’Agence nationale du sport (ANS), la hausse de la dotation en faveur de l’organisation de grands événements sportifs internationaux et la revalorisation des dotations des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (Creps).

Au sujet de ce programme, il convient de souligner la réussite du Pass’sport. Souhaité par nombre d’entre nous, il a permis l’année dernière à près d’un million de jeunes de s’inscrire dans l’une des 53 000 structures éligibles. Son bénéfice a été étendu aux étudiants jusqu’à 28 ans inclus et bénéficiant de bourses sur critères sociaux ou d’aides soumises à conditions de ressources. Vu son succès, le Pass’sport a été reconduit cette année.

Nous pouvons également nous féliciter de la mise en œuvre et de la poursuite du plan « 5 000 équipements sportifs de proximité », doté, je l’ai dit, de 200 millions et annoncé par le Président de la République à la suite, notamment, des conclusions du printemps de l’évaluation sur la nécessité d’aider les collectivités à construire ce type d’équipements. C’est une réussite.

Concernant le programme 350, des autorisations d’engagement d’un montant élevé avaient été ouvertes en 2022, dont 80 millions d’euros pour financer l’intégralité de la contribution financière de l’État au Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) et 11 millions d’euros pour financer le déménagement du laboratoire de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).

Pour 2023, le niveau de crédits de paiement permettra la poursuite des travaux de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) – opérateur principal –, qui représente le premier budget du programme, avec 270 millions d’euros, ainsi que le versement de la deuxième tranche de la contribution de l’État. Dès la fin de la crise du covid-19, nous avions échangé au sujet de l’inflation et de ses conséquences. Ainsi, la subvention versée à la Solideo intègre l’actualisation des coûts de construction actuels et à venir du fait de l’augmentation des prix au cours de ces dernières années. De plus, 61 millions d’euros ont été provisionnés pour faire face aux conséquences de l’inflation.

Pour ce programme, la notion d’héritage est essentielle et notre stratégie en ce domaine doit aller plus loin encore, en matière d’infrastructures, mais aussi et surtout d’accompagnement à la pratique sportive et d’insertion par le sport. La réussite des Jeux olympiques et paralympiques 2024 en dépendra. Lorsqu’il s’agit d’héritage, les programmes 219 et 350 sont nécessairement liés. Nous défendrons un amendement visant notamment à ajouter 10 millions d’euros aux crédits permettant de favoriser cette politique et l’insertion par le sport.

Évidemment, notre politique d’héritage devra être évaluée. Ainsi, 60 000 euros permettront de financer cinq études visant à mesurer l’impact des Jeux au cours de la période 2022-2030.

Enfin, les crédits du programme 163, Jeunesse et vie associative, progressent de 65 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Ces crédits complémentaires permettront de financer la montée en charge du service civique, l’augmentation de 15 millions d’euros de la subvention versée au Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) et la montée en puissance du service national universel (SNU), qui bénéficie de 30 millions d’euros supplémentaires pour accueillir 64 000 jeunes en séjour de cohésion. Je remercie la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel d’avoir accédé à la demande que je lui ai faite hier lors de son audition en commission des affaires culturelles : des élus pourront intervenir de manière plus systématique lors des séjours de cohésion pour présenter leur rôle et le fonctionnement de nos institutions, afin de participer à l’éveil à la citoyenneté des jeunes volontaires.

Enfin, et comme à l’accoutumée, je souligne le soutien que nous apportons à nos associations, notamment grâce au dispositif du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), qui, une fois encore, dépassera les 50 millions d’euros cette année.

Pour toutes ces raisons, je sollicite l’adoption de ce budget.

Article 27 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CF390 de Mme Marie Pochon

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il tend à ce que les sommes allouées au SNU soit reversées au service civique. Ce dispositif d’encouragement à l’engagement citoyen qui vise à mobiliser la jeunesse pour relever les défis propres à la société, ouvert à tous les jeunes de 16 à 25 ans – et jusqu’à 30 ans lorsqu’ils sont en situation de handicap –, est le cadre d’une expérience humaine unique. Il attire de plus en plus de jeunes.

M. Benjamin Dirx, rapporteur. Nous n’avons pas la même vision du SNU. Il ne faut pas l’opposer au service civique : ils sont complémentaires. Le SNU est synonyme d’intégration, de cohésion et d’éducation à la citoyenneté.

M. Fabien Di Filippo (LR). J’étais très réservé quant à ces dispositifs lorsqu’ils ont été créés. Quoi qu’il en soit, l’amendement tend à ponctionner les crédits du sport de haut niveau, à l’heure où l’on prépare les Jeux olympiques, pour lesquels on accompagne un nombre réduit d’athlètes dont certains, dans la perspective des Jeux, se mettent au RSA. Est-ce la meilleure manière de défendre votre projet ?

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Nous n’opposons pas les deux dispositifs ; simplement, les crédits du SNU augmentent de 27,3 %, ce qui n’est pas le cas de ceux alloués au service civique. Or le service civique, qui représente une vision de la société ouverte et innovante, pour l’autonomie de la jeunesse, devrait bénéficier de la même considération.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Les crédits vont de l’un vers l’autre. Le troisième stage effectué dans le cadre du SNU encourage nos jeunes à se tourner vers le service civique ; c’est d’ailleurs là qu’il est le plus utilisé.

La commission rejette l’amendement II-CF390.

Amendement II-CF1121 de M. Léo Walter

M. Léo Walter (LFI-NUPES). C’est un amendement d’appel. La secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, que nous avons auditionnée hier, partage certaines de nos réserves quant aux limites du SNU. Un véritable service citoyen obligatoire devrait prendre en charge un bilan de santé, une formation gratuite à l’examen du permis de conduire et le rattrapage de certains élèves décrocheurs ou en difficulté. Nous proposons en outre que ce service citoyen obligatoire soit rémunéré.

À cette fin, nous demandons un transfert de crédits de l’action 06, Service national universel, du programme 163 vers une nouvelle ligne permettant la création d’un tel service citoyen obligatoire.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Je vous rassure, nous sommes parfaitement en phase avec Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable, pour les raisons déjà exposées – nous sommes favorables au SNU – et parce qu’il nous faut évaluer ce dispositif tout récent pour l’améliorer, au lieu d’en instaurer un autre ; je vous suggère de vous joindre à nous pour le faire.

La commission rejette l’amendement II-CF1121.

Amendement II-CF1122 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). Il est prévu une hausse de plus de 27 % du budget du SNU, qui passe de 110 à 140 millions d’euros. Or le SNU ne concerne que 32 000 jeunes de 15 et 16 ans, son utilité sociale n’a jamais été démontrée et il n’a aucun impact sur les conditions matérielles d’existence des jeunes générations, alors que 62 % des jeunes en recherche d’emploi déclarent avoir des difficultés à se nourrir et 69 % à payer leur loyer.

Si l’objectif est vraiment de susciter chez nos jeunes une culture de l’engagement et de leur faire prendre conscience des grands enjeux sociaux et sociétaux, la création d’une garantie autonomie de 1 102 euros par mois pour tous les jeunes de 18 à 25 ans en formation et détachés du foyer fiscal parental serait bien plus utile.

Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1122.

Amendement II-CF1408 de M. Benjamin Dirx

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Il vise à augmenter les crédits de l’insertion par le sport. Je pense par exemple au dispositif « Du stade vers l’emploi ». L’amendement est gagé sur les crédits des Jeux olympiques, mais dans l’espoir confiant que le Gouvernement lèvera le gage.

La commission adopte l’amendement II-CF1408 (amendement II-2826).

Amendement II-CF1118 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). Nous souhaitons allouer au développement d’emplois jeunes une partie du budget consacré au service civique. Celui-ci est trop souvent utilisé au détriment d’emplois salariés, ce qui retarde l’arrivée des jeunes sur le marché du travail. Le taux de chômage des 15-24 ans était de 17,8 % au deuxième trimestre 2022, contre 7,4 % en moyenne nationale. En fait, les jeunes se tournent vers le service civique faute de trouver un emploi salarié.

Selon le bleu budgétaire, le service civique « a vocation à faire émerger une génération de citoyens engagés souhaitant consacrer du temps au service de la collectivité à travers une expérience reconnue et valorisée dans leur parcours ». Ces propos sont hallucinants : ces jeunes sont payés en moyenne moins de 600 euros par mois.

En outre, 61 % d’entre eux sont des femmes, précarisées avant même leur entrée sur le marché du travail en plus des discriminations flagrantes qu’elles subissent quotidiennement.

Nous proposons que ces emplois, créés dans les secteurs qui en ont le plus besoin, soient réservés à des jeunes pendant cinq ans et rémunérés au moins au niveau du Smic.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Tout à l’heure, on voulait prendre des crédits au SNU pour les donner au service civique ; maintenant, on veut les lui retirer pour créer des emplois jeunes. Tout cela est bien compliqué.

L’insertion des jeunes est très importante à nos yeux ; je vous remercie d’avoir voté avec nous l’amendement précédent, qui nous permettra de lui consacrer 10 millions de plus. Il existe déjà des contrats d’engagement jeunes. Il faut toujours faire davantage pour l’insertion, mais vous voyez que nous répondons présent.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1118.

Amendement II-CF1111 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). Nous proposons un plan national d’urgence pour la construction et la rénovation des équipements sportifs, en partenariat avec les collectivités territoriales qui sont en première ligne dans ce domaine, dans le respect des normes environnementales, afin de réduire les inégalités et de mettre fin à la concurrence entre territoires.

Le Gouvernement a annoncé un plan de construction de 5 000 équipements de proximité doté de 250 millions sur trois ans. Nous savons tous ici que ce budget est très loin de ce qui est attendu. Dès 2009, la Cour des comptes estimait à près de 21 milliards le coût nécessaire à la rénovation et à la mise aux normes des équipements.

Il est urgent de rompre avec la logique professionnalisante qui domine depuis de nombreuses années. Le budget alloué à la préparation des Jeux olympiques et paralympiques est dantesque au regard de celui dont bénéficient les collectivités pour la pratique sportive amateur. Un grand nombre de piscines, de stades, de gymnases et de pistes sont trop délabrés pour être praticables. Il faut relancer la machine, pour un sport pour toutes et tous voué non à la professionnalisation, mais à la discipline et à l’émancipation individuelle et collective.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. N’opposons pas les deux aspects : ils sont étroitement liés, notamment par la notion d’héritage. Votre amendement est satisfait par le lancement, à la suite du printemps de l’évaluation, du plan pour 5 000 équipements sportifs, qui en est à 3 500 équipements et doit aboutir en deux ans, au lieu des trois initialement prévus. J’ai demandé que soit recensée l’intégralité de nos équipements afin d’identifier les éventuelles dents creuses.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1111.

Suivant l’avis du rapporteur spécial, elle rejette l’amendement II-CF1116 de M. Idir Boumertit.

Amendement II-CF1117 de M. Léo Walter

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel, et de repli par rapport à celui qui vient d’être discuté, propose la création d’un fonds de soutien pour permettre aux collectivités gestionnaires d’infrastructures sportives de faire face au coût de l’énergie, dont la hausse concerne particulièrement ces équipements. Le récent scandale de la fermeture des piscines par Vert marine rappelle que les collectivités sont soit prisonnières des délégataires de service public, soit confrontées elles-mêmes à l’explosion des prix.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Nous avons déjà eu de longs et passionnants débats sur les collectivités territoriales depuis le début de l’examen du PLF. Je salue à ce sujet l’action de notre rapporteur général. Un filet de sécurité de 430 millions avait été voté dans le cadre du dernier projet de loi de finances rectificative, outre d’autres avancées inscrites dans le présent PLF. Avis défavorable.

M. Fabien Di Filippo (LR). Je comprends le souhait d’aider les communes qui assument des charges de centralité, en l’occurrence l’accès au sport pour l’ensemble d’un territoire. Mais prendre l’argent du sport pour régler les problèmes énergétiques risque d’avoir un effet négatif sur la pratique sportive.

La commission rejette l’amendement II-CF1117.

Suivant l’avis du rapporteur spécial, elle rejette l’amendement II-CF1115 de M. Léo Walter.

Amendement II-CF1152 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). Les crédits de paiement alloués à l’éducation populaire atteignent 125 millions, en hausse de plus de 20 %, ce que nous saluons. Le secteur de la jeunesse et de l’éducation populaire œuvre chaque jour pour favoriser l’autonomie, développer la citoyenneté et faciliter l’accès au savoir et à la culture académique. L’augmentation prévue tient compte de la période inflationniste, mais ne suffira pas pour que les associations l’abordent sereinement. Nous vous proposons donc d’aller plus loin en créant un fonds de soutien aux associations de jeunesse et d’éducation populaire (JEP).

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous partageons votre volonté d’aider davantage notre jeunesse. Rappelons toutefois, outre tous les dispositifs de droit commun existants, la hausse de 21,3 millions prévue dans le programme 163, dont 14,4 millions pour le Fonjep. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1152.

Amendement II-CF1124 de M. Léo Walter

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Jusque dans les années 1990, une bonne partie des salariés permanents des grandes fédérations d’éducation populaire et des organismes de vacances et de loisirs étaient mis à disposition par leur administration d’origine, qui prenait donc en charge leur salaire, souvent en totalité. On est ensuite passé à des détachements, puis à des mises en disponibilité, de plus en plus souvent refusées. Ce phénomène a accru la masse salariale d’un certain nombre d’associations et, joint à la baisse massive des subventions dans la même période, les a laissées exsangues. Elles ont dû réduire fortement les effectifs de leurs équipes permanentes.

Par cet amendement, nous proposons de rendre à nouveau possible la mise à disposition au profit de ces structures.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Cet amendement d’appel serait plus à sa place dans la mission Enseignement scolaire… s’il ne traitait pas d’un sujet qui ne relève pas de la loi de finances.

L’article 209 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale permet déjà d’organiser la mise à disposition d’agents publics auprès d’associations.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1124.

Amendement II-CF1151 de M. Léo Walter

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Nous souhaitons un plan national de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le sport. Nos échanges avec la ministre hier en commission des affaires culturelles ont confirmé que le milieu du sport est loin d’être épargné par le problème. Le bleu budgétaire précise que les efforts engagés en ce sens seront poursuivis, mais sans en spécifier les moyens.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Le sujet est essentiel. La nouvelle directrice des sports est également déléguée ministérielle à la lutte contre les violences dans le sport. Des outils de prévention ont été mis en œuvre ou vont l’être d’ici à 2023, comme le RéglOSport, et l’action de la cellule signal sport, qui fonctionne bien, se poursuit, ainsi que le contrôle de l’honorabilité des éducateurs. Continuons d’évaluer ce qui est fait pour limiter autant que possible ces violences.

Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement II-CF1151.

Amendement II-CF1112 de M. Léo Walter

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Les sportifs sourds ne sont pas admis par le Comité international paralympique à participer aux Jeux paralympiques. Ils prennent donc part aux Deaflympics, organisés par le Comité international des sports pour les sourds (International Committee of Sports for the Deaf, ou ICSD), lequel est reconnu par le Comité international olympique (CIO), mais non par l’État français.

Cet amendement d’appel vise à faire officiellement reconnaître les Deaflympics comme compétition de haut niveau, afin que les sportifs sourds et malentendants puissent enfin être acceptés au sein des Jeux paralympiques.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. C’est un problème important, mais la décision ne m’appartient pas. Il faudrait en discuter avec la ministre en séance. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement II-CF1112.

Amendement II-CF1113 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). En 2018, près de 83 % des établissements et services médico-sociaux (ESMS) proposaient des activités physiques et sportives, sans que l’on sache si ces termes recouvrent une pratique régulière ou des actions ponctuelles. L’Unapei, l’Union nationale des associations de parents de personnes en situation de handicap intellectuel et cognitif et leurs amis, constate que les établissements manquent de moyens pour développer une offre de pratique sportive régulière et que 56 % des personnes en situation de handicap ont déjà été limitées dans leur pratique sportive, pourtant essentielle à leur bien-être et à leur autonomie. Tenons compte de cette expertise et des besoins qu’elle relaie.

Par cet amendement, nous appelons le Gouvernement à soutenir efficacement la pratique sportive des personnes en situation de handicap intellectuel et cognitif.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Il faut développer la pratique sportive pour tous. En application de la loi visant à démocratiser le sport en France, votée pendant la précédente législature, un référent pour l’activité physique et sportive doit être nommé dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux ; il est notamment chargé de faire connaître à leurs usagers l’offre qui leur est accessible. En outre, parce que ce n’est pas seulement dans ces structures que les personnes en situation de handicap doivent pouvoir pratiquer, nous avons un objectif de 8 000 clubs susceptibles de les accueillir dans les prochaines années.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1113.

Suivant l’avis du rapporteur spécial, elle rejette l’amendement II-CF1120 de M. Idir Boumertit.

Amendement II-CF1123 de M. Léo Walter (LFI-NUPES).

M. Léo Walter (LFI-NUPES). J’ai mon brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) et pratique les colonies de vacances depuis plus de trente ans. C’est donc un sujet qui me tient à cœur. En 2021, 46 % des ménages et, chaque année, 3 millions d’enfants ne partent pas en vacances. Les centres de vacances, qui accueillaient 1,6 million d’enfants en 1995, en accueillent désormais moins de 900 000. Mon amendement, d’appel, vise à créer un fonds de soutien aux colonies de vacances car notre pays ne peut se priver de cet outil absolument essentiel et complémentaire de l’offre éducative.

M. Benjamin Dirx, rapporteur spécial. Il n’y a pas de fonds dédié aux colonies de vacances en 2023. Il n’y en avait pas non plus en 2022. Pour autant, 40 millions d’euros ont été consacrés au dispositif Vacances apprenantes, ce qui illustre la volonté du ministère d’avancer sur cette thématique. Je ne doute pas qu’il en sera de même en 2023. Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je soutiens l’amendement car je me bats depuis plusieurs années en tant que rapporteure spéciale du budget du tourisme pour que l’on renforce le tourisme social, notamment celui des plus jeunes, grâce aux colonies de vacances, mais aussi aux séjours dans les centres de vacances durant l’année scolaire – classes de neige, classes de découverte.

J’ai interrogé très régulièrement le ministère de l’éducation nationale pour disposer de chiffres clairs sur leur nombre. On m’a répondu qu’il était impossible de me les fournir, les informations n’étant pas remontées. Il est surprenant que le ministère de l’éducation nationale ne soit même pas capable de suivre l’évolution de ces séjours, alors que nous souhaitons mettre en place une politique publique dédiée, notamment pour les jeunes les plus défavorisés.

Il faut un signal fort et une simplification des aides au départ. Je plaide également pour l’octroi d’une prime aux enseignants qui s’engagent dans ces séjours, et prennent beaucoup de responsabilités.

M. le président Éric Coquerel. En 2021, pratiquement la moitié des ménages ne sont pas partis en vacances. Les colonies de vacances et tous les autres dispositifs sont essentiels, notamment pour la jeunesse des quartiers défavorisés.

La commission rejette l’amendement II-CF1123.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote des groupes sur les crédits de la mission.

M. Robin Reda (RE). Le groupe Renaissance va suivre l’avis de notre excellent rapporteur spécial, Benjamin Dirx, et voter pour les crédits de cette mission, en hausse de près de 6 % pour 2023.

Le budget du sport profite de l’élan mobilisateur et du contexte exceptionnel des Jeux olympiques (JO). Cela nous permettra de favoriser le développement de la pratique sportive pour tous.

La politique en direction de la jeunesse s’appuie d’abord sur la vitalité de la vie associative. Nous tenons aux partenariats entre les associations d’éducation populaire et les collectivités. Je salue les 13 millions de bénévoles français, qui vont profiter de la hausse du budget. Ce dernier renouvelle aussi les actions éducatives en faveur des jeunes afin de leur permettre de s’emparer pleinement de leur citoyenneté et de leur autonomie. Le service civique, le service national universel (SNU), projets de société, nous rappellent que les actions de la mission vont dans le sens plus large de la promotion de nos valeurs et d’une plus grande cohésion de la nation.

M. Philippe Lottiaux (RN). Les intentions sont là – le service national universel évolue, il y a des moyens supplémentaires, on accompagne les collectivités dans la création et la rénovation d’infrastructures sportives, les crédits de la vie associative évoluent également.

Pour autant, le dispositif du SNU est encore inabouti et la gestion de l’Agence nationale du sport (ANS), critiquée, notamment par la Cour des comptes.

Enfin, les résultats concrets des politiques à destination de la jeunesse sont mal évalués, alors que nous y consacrons beaucoup de crédits. C’est pourquoi nous nous abstiendrons.

M. Idir Boumertit (LFI-NUPES). Malgré certaines augmentations, le budget de la mission Sport, jeunesse et vie associative est insuffisant au regard des besoins réels de nos concitoyens. C’est pourquoi nous avions déposé des amendements et pourquoi également, depuis des années, notre groupe propose d’investir massivement dans la jeunesse car elle portera notre pays. Nous ne pouvons cautionner que les jeunes s’habituent progressivement à choisir entre manger ou se chauffer et leur offrir le service civique pour seul avenir. Nous devons garantir leur autonomie et leur permettre de trouver un emploi qui fait sens et pour lequel ils auront été formés selon leurs souhaits.

M. Fabien Di Filippo (LR). Une nation sportive, c’est avant tout un tissu associatif dense qui permet un brassage large des pratiquants. Ce sont également des équipements de proximité, y compris dans les territoires ruraux, et des bénévoles passionnés qu’on accompagne dans leur formation afin qu’ils puissent notamment encadrer les jeunes pratiquants.

Hier, lors de son audition, la ministre des sports n’a pourtant pas dit un mot sur les associations sportives… La hausse des crédits du sport ne représente qu’un tiers de l’inflation et le montant du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) équivaut à un sixième de l’ancienne réserve parlementaire.

On multiplie les couches bureaucratiques à l’ANS, en ajoutant des délégations en région. On parle de cadrage stratégique, de haute performance. Pendant ce temps, le sport pour tous se limite à trente minutes d’activité physique par jour à l’école. Ce Gouvernement est le troisième à tenir le même discours. Vous comprendrez que nous ne pouvons pas soutenir l’adoption des crédits de la mission.

M. Luc Geismar (Dem). La mission Sport, jeunesse et vie associative rassemble des programmes assez différents.

Je me félicite de la réussite du Pass’sport, qui a profité à un million de jeunes, y compris des étudiants boursiers de moins de 28 ans. Les Jeux olympiques de Paris, en 2024, doivent être la locomotive de la pratique sportive. La réussite des JO s’évaluera certes au nombre de médailles et de visiteurs, mais surtout grâce aux chiffres de la pratique sportive dans les années qui suivront.

Je salue le développement du SNU, ce formidable projet de société visant à renforcer la cohésion sociale et nationale autour des valeurs de la République, à susciter une culture de l’engagement et à permettre à une génération de prendre toute sa part face aux principaux enjeux sociaux et sociétaux.

Nous voterons évidemment les crédits de la mission.

Mme Fatiha Keloua Hachi (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés se réjouit de la hausse de 2,6 % des crédits de la politique sportive, hors Jeux olympiques et paralympiques de 2024. En 2019, nous étions le premier groupe politique à proposer un Pass’sport. Nous saluons les améliorations portées par le PLF pour 2023, la simplification du dispositif et son élargissement aux étudiants boursiers. Cependant, le Pass’sport doit devenir un outil de santé publique permettant à tous de pratiquer un sport. C’est pourquoi nous soutenons l’universalisation du dispositif pour tous les jeunes de moins de 25 ans.

Le groupe Socialistes et apparentés regrette la non-progression des crédits alloués au soutien de la vie associative. Dans le contexte actuel de crise du bénévolat et de crise énergétique, qui fragilisent sérieusement le tissu associatif local, nous devons rester aux côtés de ces structures. C’est pourquoi nous plaidons pour l’augmentation du montant du FDVA. Nous nous abstiendrons.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La mission Sport, jeunesse et vie associative mérite une attention particulière, alors que les secteurs sportif et associatif se remettent à peine du choc du covid-19. Difficile dans ce contexte de comprendre l’amputation de 6 millions d’euros – soit 10,7 % – du budget de l’action Développement de la vie associative, qui finance notamment la formation des bénévoles.

Les moyens du SNU augmentent de 27,3 %, ce qui témoigne d’une vision inquiétante et rétrograde de la jeunesse, alors qu’il existe des dispositifs extrêmement innovants qui cherchent des soutiens financiers, comme les Erasmus ruraux, visant à renouer le lien social et à favoriser la réinstallation dans les campagnes.

Nous saluons la reconduction du Pass’sport. Cependant, il faut revoir ses modalités de versement car le montant de l’aide ne permet toujours pas aux familles dans le besoin d’accéder aux activités sportives, même les moins chères.

La politique en faveur du sport, de la jeunesse et de la vie associative est mal orientée et insuffisamment ambitieuse. Nous voterons donc contre l’adoption des crédits de la mission.

M. Charles de Courson (LIOT). Même si le budget comporte de bonnes choses, notre groupe s’abstiendra car la commission des affaires culturelles n’a pas retenu nos amendements, alors qu’ils étaient pleins de bon sens : nous demandions la création d’un fonds de 50 millions pour aider les petites associations sportives, très marquées par le covid, ainsi que la création d’un fonds de 30 millions pour soutenir les associations sociosportives ; nous plaidions en faveur de la création d’un pass’colo de 35 millions d’euros afin de favoriser le développement des colonies de vacances ; nous souhaitions la prise en charge des coûts de formation du Bafa, pour 15 millions.

La commission adopte les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative modifiés.

Article 30 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

L’amendement II-CF1030 de M. Philippe Schreck est retiré.

Après l’article 46

Amendement II-CF1110 de M. Léo Walter.

M. Léo Walter (LFI-NUPES). Le rapport que j’appelle de mes vœux dans cet amendement est annoncé, si j’ai bien compris ce que j’ai entendu à la commission des affaires culturelles hier. Je retire donc l’amendement, tout en formulant à nouveau le vœu que ce rapport voie effectivement le jour en temps et en heure, que les parlementaires soient associés et que ses conclusions soient rendues publiques.

M. le président Éric Coquerel. Je reprends l’amendement pour poser une question au rapporteur spécial. En réunion de bureau, je me suis interrogé sur la nécessité d’une mission d’information sur le financement des JO. On m’a répondu, très justement, que c’était aussi l’objet du rapport spécial. Si le budget du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojo) devrait s’équilibrer, ce ne sera pas le cas de celui de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), du fait des surcoûts énergétiques et de l’inflation notamment. J’ai lu qu’un budget additionnel lui serait attribué en fin d’année. Avez-vous des informations plus précises ? Les 10 millions d’euros que nous venons de voter ont-ils un rapport avec cette rallonge ?

M. Benjamin Dirx (RE). Les 10 millions d’euros n’ont strictement rien à voir. Il s’agit bien de 10 millions supplémentaires pour le sport et je remercie mes collègues pour cette unanimité. Pour la Solideo, les coûts additionnels se chiffrent à 61 millions d’euros et lui seront versés. J’auditionne à nouveau l’organisme la semaine prochaine, monsieur le président, et pourrai sans doute vous apporter des informations complémentaires lors de la séance publique.

L’amendement II-CF1110 est retiré.

Examen des crédits de la mission Économie : Commerce extérieur (M. Franck Allisio, rapporteur spécial) ; Tourisme (Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale) ; Développement des entreprises et régulation et Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés (M. Xavier Roseren, rapporteur spécial) ; Statistiques et études économiques, Stratégie économique et fiscale et Accords monétaires internationaux (M. Michel Sala, rapporteur spécial) et de l’article 43, rattaché.

M. Franck Allisio, rapporteur spécial (Commerce extérieur). Deux actions budgétaires portent principalement le soutien financier de l’État au commerce extérieur. L’action Développement international des entreprises et attractivité du territoire du programme 134 de la mission Économie comprend des crédits au bénéfice d’opérateurs en charge de l’internationalisation de l’économie française. Elle est en hausse de plus de 36 % par rapport à 2022, du fait notamment de l’augmentation des moyens alloués à Business France et du transfert des missions financières de Natixis vers Bpifrance Assurance Export.

La seconde action, Développement international de l’économie française, figure dans le programme 114 de la mission Engagements financiers de l’État. Elle regroupe les dispositifs de garantie aux entreprises exportatrices et connaît une légère baisse de 6,5 millions d’euros, principalement due à de moindres dépenses pour l’assurance prospection.

Outre ces crédits, il convient de noter l’extinction du volet export du plan de relance fin 2022, qui conduit à une disparition des crédits associés. Tout au plus 8 millions d’euros de crédits de paiement subsistent-ils pour le Fonds d’études et d’aides au secteur privé (Fasep) au sein du programme Compétitivité de la mission Plan de relance.

Un peu plus de 300 millions d’euros seulement participent, au sein du budget de l’État, au soutien du commerce extérieur français. Cette somme paraît dérisoire au regard de l’importance que revêt cette politique publique de premier ordre et surtout, eu égard à la situation catastrophique de la balance commerciale.

Notre déficit commercial va doubler puisqu’il devrait atteindre 156 milliards d’euros cette année, puis 154 milliards l’an prochain, contre 85 milliards en 2021. L’envolée de la facture énergétique et la dépréciation de l’euro face au dollar expliquent une bonne partie de cette dégradation, mais il serait évidemment intellectuellement et économiquement malhonnête de s’en tenir à des causes conjoncturelles. C’est un record absolu et, avec l’explosion de la dette, c’est l’échec le plus retentissant du quinquennat précédent.

Le sujet n’est pas nouveau. Depuis près de vingt ans, nous importons plus que nous n’exportons. Notre balance commerciale n’est que le reflet de nos choix de politique économique. Nous connaissons les causes structurelles : la France paie le sacrifice de notre industrie par les gouvernements successifs, ce qui n’est pas le cas de nos concurrents. Elle paie aussi les défaillances du système éducatif et de formation professionnelle, celles des capacités d’investissement dans l’innovation et celles des dispositifs de soutien à l’exportation.

Retrouver les moyens de nos ambitions en matière de commerce extérieur passe par la restauration d’une véritable direction des relations extérieures, aujourd’hui absorbée par la direction du Trésor, et d’un ministère du commerce extérieur de plein exercice, aujourd’hui sous tutelle du Quai d’Orsay et sans administration propre. Cela passe aussi par la réattribution à la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface) des compétences accordées à la Banque publique d’investissement (BPIFrance) et enfin par la concentration de nos efforts dans la détection méthodique, bassin d’activités par bassin d’activités, des dizaines de milliers d’entreprises exportatrices qui nous manquent.

C’est pourquoi je suis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Économie.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale (Tourisme). Après deux années particulièrement difficiles pour le secteur, au premier semestre 2022, la reprise touristique est au rendez-vous : fin juillet, le total des recettes dépassait 31 milliards. Toutefois, il est délicat d’anticiper la fin de l’année, tant la filière voit son horizon s’assombrir en raison de l’inflation, et donc d’une demande qui risque de se contracter, mais aussi d’une offre fragilisée par l’explosion des coûts de l’énergie et des matières premières, notamment pour les stations de sport d’hiver. Le risque est majeur pour ces destinations et il nous faut y apporter une attention toute particulière. Je ne sais pas si les réponses du Gouvernement sont adaptées.

Après avoir demandé chaque année depuis cinq ans la nomination d’un ministre du tourisme de plein exercice, ainsi que la considération du tourisme comme véritable filière économique, je suis heureuse du rattachement du tourisme à Bercy en 2023. Si cette décision ne doit en rien atténuer l’ambition de promotion internationale de la destination France, elle me paraît beaucoup plus cohérente avec les besoins du secteur. Le budget du programme 134 de la mission Économie dédié au tourisme est stable avec 35 millions d’euros pour l’opérateur Atout France. Reste à connaître la part des recettes liées à l’attribution d’une partie des droits de visas qui sera allouée à la promotion. On ne m’a pas communiqué l’information.

Toutefois, le programme 134 n’épuise ni la politique touristique ni le budget de l’État dédié au tourisme. Les crédits du tourisme sont éclatés dans divers missions et programmes, ce qui constitue une difficulté pour suivre leur consommation et évaluer la qualité de cette politique. Je ne me satisfais absolument pas du document de politique transversale Tourisme car on y valorise de trop nombreux budgets qui n’ont rien à y faire, comme la totalité de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) – la construction d’une école n’a rien à voir avec le tourisme.

Il me semble plus honnête d’évaluer les crédits de 1,9 milliard du plan Destination France visant à relancer la filière après la crise du covid et à faire de la France la première destination de tourisme durable d’ici à 2030. Il a été lancé en novembre 2021 et doit s’étendre jusqu’en 2024. Au sein de ce budget, 1,2 milliard d’euros, soit quasiment les deux tiers, sont constitués de prêts et outils financiers gérés par BPIFrance et la Banque des territoires. Autrement dit, l’effort financier de l’État sur ses fonds propres est de 650 millions, dont 110 millions déjà engagés.

Au sein du plan, il m’a semblé intéressant d’analyser les actions relatives à l’emploi et à la transition écologique des entreprises touristiques.

Selon le GNI, si la saison estivale a été bonne, elle aurait pu être bien meilleure si les tensions en personnel n’avaient pas été si fortes. Le Gouvernement a lancé une campagne de communication sur l’emploi dans le tourisme, à hauteur de 9 millions d’euros, ainsi que d’autres actions relatives à la formation. Je salue ces initiatives et les suivrai attentivement.

Toutefois, l’un des obstacles majeurs au recrutement dans les zones touristiques relève de l’accès au logement. J’ai déposé un amendement en première partie du PLF pour y répondre, afin que les employeurs puissent récupérer la TVA sur les investissements qu’ils réalisent dans des logements mis à disposition de leurs salariés. Ce dispositif existe déjà pour les salariés du secteur de la sécurité. J’espère que l’on pourra y travailler.

Le deuxième point que je souhaitais aborder concerne la transition écologique du tourisme. Je me battrai toujours contre une vision caricaturale qui estime que le tourisme n’est pas essentiel et qu’il devrait être sacrifié, plus que d’autres activités économiques, sur l’autel de l’écologie radicale. Ce secteur représente 2 millions d’emplois non délocalisables, 8 % de notre PIB et la valorisation des atouts de territoires de montagne, ruraux et littoraux, pour permettre à des familles d’y vivre et d’y avoir un avenir. Pour autant, il doit effectuer sa transition écologique, comme tous les autres secteurs, et l’État doit l’accompagner.

Selon l’Ademe, le secteur représente 11 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau national. Or, près de 77 % de ces émissions sont dues aux transports, et 40 % au transport aérien. S’attaquer à la transition écologique, c’est donc s’attaquer aux transports. C’est une des lacunes du plan Destination France. L’État doit agir en faveur de l’amélioration de l’offre de transport ferroviaire et de sa compétitivité. Je proposerai un amendement visant à mieux évaluer ce point, ainsi qu’un amendement de crédit pour encourager les territoires touristiques à investir dans les transports propres.

Les 20 % restants d’émissions sont dues à l’hébergement, aux achats de biens et à la restauration. Sur ce point, il faut saluer les actions de Destination France. L’Ademe pilote pour l’État le Fonds tourisme durable dédié à la réalisation d’investissements de rénovation thermique, d’économie d’énergie, d’eau et de lutte contre le gaspillage dans l’hôtellerie et la restauration. Le bilan à mi-parcours est très bon, avec 40 millions engagés. Il est essentiel de faire perdurer ce fonds : 35 millions doivent encore être engagés sur les 85 millions prévus. Ils ne figurent pas dans le budget pour 2023, mais seraient inscrits dans le collectif budgétaire de fin d’année sur le budget du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Je n’ai pas eu confirmation de cette information.

Enfin, je souhaiterais insister sur l’importance de réabonder le Fonds avenir montagne, en le ciblant sur la transition écologique des domaines skiables.

Je salue l’effort budgétaire, tout en déplorant l’absence de réponses à certaines de mes questions. Je vous propose de vous abstenir.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial (Développement des entreprises et régulations ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés). Depuis cinq ans, il me revient de vous présenter les crédits des programmes 134 Développement des entreprises et 343 Plan France Très haut débit de la mission Économie.

S’agissant des crédits, si le programme 343 connaît une budgétisation conforme à ce qui était annoncé, le programme 134 est particulièrement mobilisé en raison des crises successives.

Avant de présenter les crédits, je souhaite faire un point sur les dépenses fiscales du programme 134. Le bleu budgétaire propose une présentation inédite des dépenses fiscales, désormais classées par politiques publiques auxquelles elles concourent. L’organisation du programme ayant longtemps été critiquée, il s’agit d’un vrai progrès en matière de lisibilité.

Je déplore toujours l’absence de chiffrage des dépenses fiscales, particulièrement nombreuses dans ce programme. Celles qui le sont se montent à plus de 10 milliards d’euros, soit quatre fois les crédits budgétaires ouverts pour 2023. Un chiffrage exhaustif permettrait un meilleur contrôle parlementaire.

Le programme 134 est un outil de gestion de crise particulièrement utile. Il est de nouveau fortement mobilisé pour soutenir les entreprises les plus touchées et les secteurs stratégiques. En exécution 2022, plus de 3 milliards d’euros ont été ouverts, notamment pour soutenir les entreprises face aux conséquences des prix de l’énergie et, face au coût exorbitant de l’énergie, ces aides sont essentielles pour sauver les entreprises industrielles. En 2023, le premier poste de dépenses sera la compensation carbone versée aux entreprises électro-intensives : 856 millions d’euros y seront consacrés, en hausse de plus de 500 millions d’euros par rapport à l’année précédente. Même si une réflexion est en cours, je regrette que sa cotation dans le budget vert ne puisse être correctement établie.

Le programme 134 porte également la nouvelle dotation budgétaire versée au groupe La Poste, en compensation de sa mission de service universel postal. Ainsi, 520 millions d’euros seront versés au groupe en 2023.

Je me félicite que le programme 134 comporte désormais des crédits de soutien en faveur du tourisme. L’opérateur Atout France, chargé du développement du tourisme, est désormais sous la tutelle exclusive du ministère de l’économie et des finances. Cela souligne le rôle important du tourisme dans notre économie.

Le Gouvernement n’a pas souhaité faire figurer dans le programme 134 la dotation budgétaire de soutien de l’activité de garantie de BPIFrance, pourtant essentielle. Cette dernière m’a indiqué qu’elle pouvait poursuivre son activité sans cette dotation en 2023. Mais il nous faudra être vigilant en 2024 car les besoins risquent d’être plus importants.

Le programme 343 bénéficie de 74 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 437 millions d’euros en crédits de paiement (CP) dans le PLF pour 2023 afin de poursuivre le développement du très haut débit en France. Le plan France Très haut débit est entré dans sa phase de développement opérationnel. Les crédits de paiement restent élevés, mais entament une diminution, de 30 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022. La phase finale est délicate car il va falloir installer du très haut débit dans les territoires difficiles, tels que les zones de montagne ou les zones rurales isolées.

Je salue cette politique publique, opérationnelle : l’objectif du très haut débit pour tous fin 2022 sera tenu, ainsi que l’objectif de généralisation de la fibre fin 2025.

Deux points méritent malgré tout notre attention : il faudra anticiper les conséquences de la fin du réseau cuivre annoncée par Orange l’an dernier et être vigilant à ce que la fibre soit opérationnelle, afin que le passage du réseau cuivre à la fibre se fasse sans coupure ; dans certains territoires, l’installation de la fibre n’étant pas possible, il faut prévoir des alternatives fiables – 4G fixe, 5G fixe ou réseau satellitaire de basse altitude.

Je vous propose d’adopter les crédits des programmes 134 et 343 de la mission Économie ainsi que ceux du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers et à des organismes privés.

M. Michel Sala, rapporteur spécial (Statistiques et études économiques ; Stratégies économiques ; Accords monétaires internationaux). Mon rapport spécial concerne les crédits des programmes 220 Statistiques et études économiques et 305 Stratégies économiques de la mission Économie.

Les crédits du programme 220 de l’Insee sont en augmentation de 20 millions d’euros en AE et CP par rapport à la LFI pour 2022. Les crédits du programme 305 concernent la direction générale du Trésor et s’établissent à 715 millions d’euros en CP, en très forte hausse – + 71,5 % par rapport à la LFI pour 2022. Cette augmentation s’explique exclusivement par une mesure de périmètre. En effet, le programme 305 finance désormais la mission d’accessibilité bancaire, assurée jusqu’alors par la Caisse des dépôts et consignations, mais confiée par la loi à La Banque Postale, pour un montant d’environ 303 millions d’euros. Cela devient le premier poste de dépenses du programme 305. À périmètre constant, les crédits du programme sont donc en baisse.

Le programme finance également la contribution versée à la Banque de France en contrepartie des missions qu’elle effectue pour le compte de l’État, pour un montant de 200 millions d’euros, contre 218 millions en 2022. Sur cette somme, 117 millions sont destinés à la tenue du secrétariat des commissions de surendettement.

Le plafond d’emplois du programme 220 s’élève à 5 037 équivalents temps plein (ETP), contre 5 028 en 2022, celui du programme 305 à 1 278 ETP contre 1 260 en 2022, l’augmentation de 18 ETP s’expliquant notamment par des effectifs supplémentaires au sein de l’Agence des participations de l’État et par le transfert de la mission chargée du plan national de relance et de résilience à la direction générale du Trésor.

Il faut mieux encadrer le libre accès des données de l’Insee, qui met désormais gratuitement à disposition certaines de celles qu’elle traite, alors qu’elles étaient auparavant vendues, venant abonder le budget de l’Institut d’environ 10 millions d’euros.

Je suis également réservé sur la dématérialisation excessive des enquêtes conduites par l’Insee. Si le multimodal – possibilité de répondre à l’enquête par internet ou sur le terrain – peut être un progrès, l’enquête en ligne ne remplacera jamais l’expertise des enquêteurs sur le terrain.

Au cours des dernières années, la direction générale du Trésor a connu d’importantes réductions d’effectifs, en particulier au sein de son réseau international. Il faut désormais stabiliser les effectifs afin que cette dernière mission puisse être conduite avec la même exigence.

Au cours des dernières années également, la Banque de France a conduit d’importantes réformes de ses systèmes d’information afin de gagner en efficacité et en productivité. Ces transformations se sont accompagnées d’une baisse continue de la contribution versée depuis dix ans en contrepartie des missions effectuées pour le compte de l’État : de 318 millions d’euros en 2012, elle est passée à 200 millions en 2023.

Je salue le travail mené par l’institution, d’identification en amont des personnes en situation de fragilité bancaire, qui permet de prévenir le surendettement. Mais nous attendons toujours le rapport demandé par notre collègue Philippe Chassaing sous la précédente législature concernant le non-recours aux dispositifs de surendettement. La hausse des inscriptions au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) – + 20 % entre 2021 et 2022 – et au fichier central des chèques (FCC) est un signal fort d’alerte. Si la situation économique venait à perdurer, elle pourrait conduire à une explosion des cas de surendettement.

Enfin, les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) innovent, expérimentent et trouvent des solutions concrètes pour les territoires, aux côtés des acteurs économiques classiques et des pouvoirs publics. Ce secteur représente 14 % de l’emploi salarié privé, 2,4 millions de salariés et 12 millions de bénévoles, 10 % du PIB et 200 000 entreprises.

L’action 04 Économie sociale, solidaire et responsable est dotée de 20 millions d’euros en AE et en CP : 5 millions pour les structures de têtes de réseaux, 11,45 millions pour les dispositifs locaux d’accompagnement et 4 millions pour les investissements à impacts sociaux et les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE).

Globalement, les fonds alloués ont vocation à favoriser l’émergence et le développement des entreprises de l’ESS par effet de levier afin d’encourager l’engagement financier d’autres partenaires – collectivités territoriales ou acteurs financiers, publics ou privés. Néanmoins, les crédits sont insuffisants compte tenu de notre ambition.

Je m’interroge également sur le versant relatif aux investissements, qui est noyé dans la myriade d’interventions de l’État, ce qui nécessiterait une approche transversale des moyens de l’ESS. Il conviendrait donc que soit publié un document de politique transversale (DPT), qui permettrait d’améliorer la coordination des actions de l’État, lesquelles relèvent de plusieurs ministères et programmes. Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de mai 2021 concernant les sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) et les coopératives d’activité et d’emploi confirme l’intérêt que nous devons porter à ces structures de l’ESS et formule un certain nombre de propositions afin de faire évoluer leur statut.

Je suis défavorable à l’adoption des crédits des programmes 220 et 305.

M. Aurélien Lopez-Liguori, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (Communications électroniques et économie numérique). L’analyse des évolutions des déploiements, la question des délestages et les moyens de favoriser notre souveraineté numérique sont les trois éléments essentiels de mon rapport.

L’évolution des crédits du plan France Très haut débit est conforme aux prévisions, même si le rythme de déploiement a tendance à ralentir, en particulier en zone très dense et en zone moins dense d’initiative privée, ce qui ne peut que susciter la vigilance des pouvoirs publics. Concernant les réseaux d’initiative publique (RIP), donc les zones rurales, la dynamique est bonne mais inégale et la question du financement des prises les plus complexes continue de se poser. Je défendrai un amendement à ce propos qui a été adopté à l’unanimité par la commission des affaires économiques.

Le plan ou, plutôt, l’absence de plan du Gouvernement à propos des délestages est problématique. J’insiste sur l’impréparation de ce dernier face aux coupures d’électricité des antennes relais. Si, demain, l’électricité est coupée, plus d’appels d’urgence pendant plusieurs heures, plus de pompiers, plus de policiers alors que des vies seront en jeu. J’appelle donc le Gouvernement à nous proposer un plan viable et structuré.

S’agissant de la souveraineté numérique, il est nécessaire de permettre l’émergence de géants français et européens. Des solutions existent pour reconquérir notre indépendance : réformons la fiscalité pour favoriser nos entreprises face aux Gafam et autres BATX – Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi –, favorisons la commande publique pour les entreprises françaises et européennes, accentuons le contrôle des investissements étrangers pour qu’aucune autre entreprise française capable de nous sortir de notre ornière stratégique ne nous échappe ! Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre de nouveaux Excelia, Trad, PriceMinister.

Mme Sophia Chikirou, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (Économie sociale et solidaire). Les crédits de paiement de l’action 04 du programme 305 ont augmenté de 7,5 % par rapport à 2022 mais l’ESS ne bénéficie d’aucune feuille de route. L’absence d’ambition se traduit sur le plan budgétaire par une enveloppe non seulement très inférieure aux besoins exprimés par les personnes que j’ai auditionnées mais qui, surtout, ne permettra en aucun cas de relever les défis qui sont devant nous.

M. le rapporteur spécial Michel Sala a évoqué les 20 millions prévus mais le budget des dispositifs locaux d’accompagnement stagne, tout comme le financement des têtes de réseaux. Les pôles territoriaux de coopération économique, quant à eux, ne disposent d’aucun moyen supplémentaire. Dès lors, la programmation budgétaire de 2023 ne prend en compte ni les attentes des bénéficiaires, qui ont déjà du mal à mener à bien les missions qui leur sont confiées par la loi, ni l’inflation.

Le Gouvernement fait l’impasse sur trois défis décisifs.

Tout d’abord, il ne prend pas en compte la nécessité impérieuse de penser, d’organiser, de planifier les recrutements, l’amélioration des conditions de travail, le renforcement de la formation professionnelle dans des secteurs pourtant essentiels comme le médico-social et le sanitaire. Tous les acteurs que j’ai auditionnés s’inquiètent de l’insuffisance des moyens et de la pénibilité de ces métiers.

Ensuite, il ignore les défis en matière d’accompagnement et de financement alors qu’ils sont indispensables pour valoriser l’innovation sociale.

Enfin, la planification écologique fait cruellement défaut : l’ESS n’est pas mobilisée au sein d’un plan écologique national.

J’ai donc émis un avis défavorable à l’adoption de ces crédits.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (Tourisme). Le secteur touristique est un moteur fondamental de notre économie et a retrouvé des couleurs à l’été 2022, ce dont nous pouvons nous réjouir. Cependant, il fait encore face à de nombreuses difficultés : pénurie de main d’œuvre, hausse des prix de l’énergie, remboursements des prêts garantis par l’État.

Je suis satisfaite que le Gouvernement ait enfin regroupé l’essentiel des crédits relatifs au tourisme au sein de la mission Économie. Cet effort de rationalisation doit s’accompagner d’un pilotage stratégique de la filière en reconstituant rapidement le comité interministériel du tourisme et le comité de filière du tourisme.

Je prends acte de la stabilité des dépenses consacrées à l’opérateur Atout France, complétées par des dépenses d’intervention destinées à alimenter le plan Destination France. J’ai donc émis un avis de sagesse.

Par ailleurs, mon avis budgétaire comporte une partie thématique sur la dessaisonalisation du tourisme, qui peut être un véritable atout pour notre politique touristique, en particulier pour réduire l’empreinte de ce secteur sur l’environnement. Nous constatons déjà des efforts d’amélioration de l’offre en ce sens. Des dispositifs de promotion valorisent ainsi davantage le hors saison, certaines activités comme le tourisme de savoir-faire, le vélo ou le thermalisme disposant en outre d’un potentiel particulièrement intéressant.

Pour fonctionner, le tourisme hors saison doit trouver son juste modèle économique. Il doit créer de la valeur pour les acteurs de l’offre touristique et les territoires concernés tout en s’inscrivant dans une politique globale d’attractivité des territoires, ce qui ne doit pas faire oublier les problèmes liés au tourisme en pleine saison, en particulier ceux liés à l’emploi et au logement des saisonniers.

Article 27 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CF1189 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) joue un rôle central dans la protection de nos concitoyens puisqu’elle est notamment chargée du contrôle de la loyauté des pratiques commerciales et du repérage des fraudes.

La concurrence pure et parfaite n’existe pas, surtout dans un contexte où règnent les oligopoles, avec ce que cela suppose de pressions et de manipulations sur les prix et les relations commerciales.

Je ne doute pas que ceux qui sont attachés au libre jeu du marché seront attentifs à cet amendement visant à renforcer ses moyens. Depuis 2007, ils se sont en effet dégradés puisque la DGCCRF compte 900 équivalents temps plein (ETP) en moins alors que ses missions ont été étendues. La surcharge de travail s’explique notamment par le contexte inflationniste qui perturbe les chaînes de valeur. Dans le cadre des travaux du groupe de suivi de l’inflation, la DGCCRF nous a d’ailleurs fait part, à Xavier Albertini et à moi-même, de ces difficultés.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Cet amendement vise à augmenter de 20 millions d’euros les moyens de la DGCCRF, notamment en raison du surplus d’activité lié au contrôle des pratiques du prix de l’énergie.

J’ai auditionné la DGCCRF et j’ai pu en effet mesurer le rôle central qu’elle joue en ce moment et les moyens dont elle a besoin. Précisément, ce budget augmente de 7,4 millions et le schéma d’emplois de 84 ETP. La DGCCRF nous a également fait part du travail supplémentaire qu’elle devra effectuer dans le cadre des contrôles liés aux Jeux olympiques de 2024.

Je rappelle enfin que la DGCCRF modernise ses outils pour faciliter le travail des agents, notamment avec le projet Sesam, qui permet un meilleur suivi de toutes les données d’enquête ou encore l’équipement de certains agents en tablettes permettant par exemple la production d’actes dématérialisés.

Avis défavorable.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Je voterai bien sûr cet amendement.

Quasiment tous les organismes de contrôle de l’État sont sous-dotés : l’Autorité de la concurrence, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP), la DGCCRF… Pourtant, dans la période que nous connaissons, il importe particulièrement de donner aux fonctionnaires les moyens de bien travailler. Je déplore le peu de moyens alloués en ce sens dans cette mission et je dénonce un pareil affaiblissement.

La commission rejette l’amendement II-CF1189.

Amendement II-CF78 de la commission des affaires économiques.

M. Aurélien Lopez-Liguori, rapporteur pour avis. Il vise à augmenter de 50 millions d’euros le financement des raccordements complexes au sein des RIP, ce qui me paraît raisonnable au regard des besoins exprimés. Même si les raccordements prennent plus de temps en zone rurale, des efforts doivent être réalisés pour que nous puissions plus rapidement parvenir à des résultats. Il s’agit de permettre à un maximum de familles de bénéficier de la fibre car il est inacceptable que certains foyers ne puissent être raccordés : c’est une question d’égalité.

Cet amendement, proposé l’année dernière par M. Bothorel, a été adopté cette année à l’unanimité en commission des affaires économiques. Je compte sur vous.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. La question des raccordements complexes est centrale pour le bon développement du plan France Très haut débit.

J’ai auditionné l’Arcep et la sous-direction des communications et des postes de la direction générale des entreprises (DGE). Nous sommes encore au début des opérations de raccordement complexe mais, en l’état, l’enveloppe de 150 millions semble suffire. Je resterai attentif à ce qu’elle demeure correctement dimensionnée.

J’ajoute que, techniquement, il n’est pas possible de déployer la fibre partout mais que nous proposerons des alternatives avec la 4G et la 5G, et tout ce qui relève du satellitaire de basse altitude.

Avis défavorable.

M. Aurélien Lopez-Liguori (RN). Tous les opérateurs demandent une augmentation des financements. C’est également le cas de M. Bothorel, votre collègue de Renaissance, des habitants de certains territoires et de toute la commission des affaires économiques. J’espère que nos collègues ne vous suivront pas.

M. Dominique Da Silva (RE). L’enjeu est en effet important.

Selon votre exposé des motifs, les acteurs de ce secteur chiffrent le coût des opérations à 400 millions à l’horizon de 2025. Nous discutons du budget pour 2023, doté en l’occurrence de 150 millions. C’est une étape dans le processus de déploiement.

La commission rejette l’amendement II-CF78.

Amendement II-CF1200 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Le manque de moyens est donc criant pour les organismes de contrôle et d’évaluation ou d’expertise, les fonctionnaires n’étant pas assez nombreux pour répondre à leurs missions. C’est aussi le cas pour l’Insee, qui organise les travaux statistiques des administrations publiques mais, aussi, des opérateurs privés sous le contrôle de l’État. Depuis quelques années, il doit également fournir des données de plus en plus denses à Eurostat.

L’appareil statistique est d’autant plus important – y compris pour les prévisions – que le Gouvernement s’est saisi de notre idée de planification. Or, depuis 2018, l’Insee a perdu soixante-sept ETP et il en perdra quatre cette année. Nous assistons à une véritable saignée ! Nous demandons donc d’allouer 30 millions supplémentaires à l’Institut.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Je suis favorable à ce renforcement des moyens de l’Insee.

Les agents de l’Insee, qui peinent à accomplir leurs missions, souffrent d’une surcharge de travail et n’ont plus le temps d’explorer de nouveaux domaines.

Les recours à des contractuels voire à des prestataires se multiplient sans que cela soit véritablement un plus dès lors que les agents de l’Insee doivent les superviser.

L’Insee a de plus en plus recours à la dématérialisation et aux enquêtes multimodales, outils intéressants mais dont la qualité laisse à désirer et qui ne peuvent remplacer le travail humain.

Avis favorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1200.

Amendement II-CF1216 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel vise à alerter la représentation nationale sur le coût exorbitant du dispositif de « compensation carbone ». Les entreprises énergo-intensives absorbent le quart des crédits de cette mission – 850 millions –, ce qui ruine le mécanisme du marché carbone censé faire payer des quotas carbone aux entreprises polluantes, les conditions d’octroi de cette compensation étant de surcroît à peu près nulles.

De plus, ces entreprises bénéficient d’un bouclier tarifaire spécifique alors que les bénéfices de certaines d’entre elles sont très élevés. Alstom est ainsi doublement subventionnée.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Le montant de la compensation carbone découle directement des prix du marché du carbone tels que fixés par le droit européen. La crise que nous traversons entraîne une hausse de ces prix et du montant alloué en conséquence au titre de cette compensation. Ce montant est certes important mais nécessaire car il permet de soutenir des industries stratégiques.

Les contreparties demandées pour l’obtention de cette compensation ne figurent pas aux articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de l’énergie, comme indiqué dans votre exposé des motifs, mais bien à l’article L. 122-8, fondement juridique de la compensation carbone. Cet article renvoie certes à ceux que vous avez mentionnés s’agissant des obligations d’audit énergétique mais il prévoit également d’autres obligations comme la réduction de l’empreinte carbone due à la consommation d’électricité de ces entreprises de manière à couvrir au moins 30 % de leur consommation d’électricité générée à partir de sources décarbonées.

Il faut cependant aller encore plus loin. Lors de l’audition de la DGE, je me suis réjouis d’entendre que des discussions étaient en cours avec la Commission européenne pour renforcer les contreparties.

Enfin, il convient de distinguer les aides conjoncturelles et structurelles.

Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). L’adoption de cet amendement contredirait les objectifs traditionnels de la Nupes en fragilisant nos industries nationales d’aluminium, de silicium, de métal. Dans un marché mondialisé et très capitalistique, vous ouvririez ainsi le champ aux importations massives. Or, la première source des émissions de gaz à effet de serre, en France, ce sont précisément les importations.

De plus, ces entreprises sont beaucoup plus vertueuses que celles de nos amis chinois sur ces marchés-là. Je m’oppose fermement à cet amendement.

M. le président Éric Coquerel. Merci en tout cas de reconnaître que nous défendons notre industrie.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). La compensation carbone de 300 entreprises, à hauteur de 856 millions, a été multipliée par trois. Pour une fois, le montant de l’aide accordée suit le cours de la taxe carbone, qui est passé de 15 à 90 euros. Rien de tel en matière d’inflation, ni pour l’alimentaire, ni pour les salaires ! Et cela pour le droit à polluer, si contraire à ce que nous voulons faire ! La Nupes fait preuve de cohérence en remettant en cause ce système où l’on dissuade des entreprises énergivores et très polluantes de faire des efforts écologiques.

La commission rejette l’amendement II-CF1216.

Amendement II-CF1184 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Il vise à renforcer le financement de l’économie sociale et solidaire en développant l’apport de garanties bancaires publiques, ces entreprises ayant des difficultés pour accéder aux emprunts, en particulier à deux moments charnières des projets : la création puis le changement d’échelle après une phase d’expérimentation réussie. Cela concerne tout particulièrement les coopératives et les sociétés commerciales.

Je rappelle que l’ESS représente 10 % du PIB, 200 000 entreprises et 14 % des emplois privés.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Avis favorable, vous n’en serez pas étonnés. Les services de la direction générale du Trésor qui travaillent sur l’ESS m’ont confirmé lors des auditions que les dispositifs de soutien de l’ESS manquent en effet de moyens. Certains ne sont pas suffisamment renouvelés, par exemple, les contrats à impact social, dont les derniers appels à manifestation d’intérêt remontent à plus d’un an ; d’autres sont insuffisamment dotés comme les PTCE.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. De nombreuses offres de cautionnement existent déjà de la part d’opérateurs privés comme le Crédit agricole ou le Crédit mutuel, ou publics comme BPIFrance. Votre amendement est en fait satisfait.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). J’ai auditionné BPIFrance et la Banque des territoires. Depuis 2014, lorsqu’Emmanuel Macron était ministre de l’économie, l’une des missions de BPIFrance depuis 2012 qu’est le financement de l’ESS a été détournée. Ces deux institutions n’ont plus de personnels qui se consacrent aux investissements et aux financements dans ce secteur.

Un article paru aujourd’hui dans Les Échos insiste sur les difficultés qu’ont les entreprises à obtenir des prêts bancaires. Il est d’autant plus urgent de soutenir les structures de l’ESS maltraitées par les banques privées, qui doivent bénéficier de soutiens spécifiques.

La commission rejette l’amendement II-CF1184.

Amendement II-CF1197 de Mme Sophia Chikirou.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Il concerne le financement de l’accompagnement à l’innovation sociale et vise plus particulièrement à remédier à la disparition de la ligne « Soutien territorial à l’innovation sociale » qui finançait la labellisation de collectifs territoriaux et l’accompagnement de projets.

La loi de 2014 reconnaît l’innovation sociale, à laquelle ce budget ne consacre aucun crédit alors que des membres de la majorité et du Gouvernement ne manqueront évidemment pas d’en souligner les bienfaits.

Contre l’avis de M. Michel Sala, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1197.

Amendement II-CF1198 de Mme Sophia Chikirou.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Selon BPIFrance, 50 000 à 60 000 entreprises risquent de ne pas trouver de repreneurs et 20 % des chefs d’entreprise ont plus de soixante ans. Cette situation devrait tous nous alarmer et nous devrions planifier de telles reprises.

De plus, des associations et des entreprises veulent se transformer, certes pour des raisons économiques mais aussi et surtout en raison des aspirations à une autre économie, plus humaine, solidaire et démocratique. Beaucoup de salariés souhaitent reprendre leur entreprise et nombre d’associations veulent se transformer en coopérative. Il convient donc de financer un accompagnement et une ingénierie. Ce modèle, très « résilient », fonctionne très bien, comme nous l’avons vu lors de la crise sanitaire et comme c’est également le cas dans le cadre de la crise inflationniste que nous connaissons, quoique les risques de défaillances soient assez importants.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Avis favorable.

Les sociétés coopératives, en particulier les SCIC, sont un outil précieux de l’écosystème ESS.

Les sociétés coopératives de production (Scop) et les SCIC ont un chiffre d’affaires de plus de 6,4 milliards – 7,7 milliards en comptant les filiales – et réalisent près de 166 millions de résultat net et 3 milliards de valeur ajoutée. Elles font travailler plus de 81 000 personnes.

Dans le droit des sociétés français, le nouvel article 1833 du code civil oblige désormais toute société à prendre en considération « les enjeux sociaux et environnementaux de son activité », autrement dit à appliquer une politique de responsabilité sociale des entreprises (RSE) associant toutes les parties prenantes concernées.

Même s’il peut encore évoluer, le statut des coopératives comme les SCIC est l’un des meilleurs cadres juridiques possible pour appliquer cette disposition. Il est donc essentiel de favoriser leur création ou leur reprise.

La commission rejette l’amendement II-CF1198.

Amendement II-CF1192 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Il vise à créer un fonds de soutien doté de 40 millions pour les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME) d’innovation afin de favoriser la bifurcation écologique « low tech » et l’économie circulaire : recyclage, réemploi, reconditionnement, écoconception dans les secteurs de l’artisanat, du bâtiment, de l’industrie, mais également de l’ingénierie et de l’innovation sociale, où les emplois sont certes de qualité mais, surtout, non délocalisables.

Certes, 9 à 10 milliards d’aides directes sont consacrées aux entreprises pour leurs activités de recherche et de développement mais trop peu à destination des TPE et des PME, en particulier s’agissant des innovations à haute intensité technologique.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Les TPE et les PME doivent bien sûr être soutenues.

Le dispositif Tremplin géré par l’Ademe sera encore en vigueur en 2023. La question de la suite qui y sera éventuellement donnée aura davantage sa place dans le budget pour 2024.

De plus, d’autres dispositions destinées à accompagner les PME et TPE dans leur transition écologique existent : le prêt éco-énergie de BPIFrance, le guichet de subvention pour l’efficacité énergétique des entreprises, les aides fiscales à la transition énergétique et, en particulier, le crédit d’impôt PME-TPE.

Enfin, le Gouvernement a déposé un amendement en première partie du PLF pour rétablir le crédit d’impôt en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires d'entreprise, en vigueur en 2021.

Avis défavorable.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Le dispositif de l’ADEME est trop faiblement doté et, comme vous l’avez dit, il prendra fin en 2023-2024. Il est donc nécessaire, dès maintenant, d’en assurer le relai financier.

La commission rejette l’amendement II-CF1192.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote des groupes sur les crédits de la Mission.

M. Benoit Mournet (RE). Le soutien au commerce extérieur augmente de 36 % car il convient en effet de soutenir l’internationalisation de nos entreprises. Je salue en particulier le travail de Business France et me félicite de la suppression d’une partie des impôts de production pour lutter contre les délocalisations.

Mme Bonnivard a salué le rattachement du secteur du tourisme à Bercy. L’État joue un rôle d’incitateur en matière d’emploi et de transition écologique. Je me réjouis de l’efficacité du volet « tourisme durable » de l’Ademe, de même que des crédits alloués à Destination France, à hauteur de 1,9 milliard. Sans doute conviendrait-il de mieux prendre en compte les secteurs dont le cycle de vente est long, comme le tourisme spirituel – je pense évidemment à Lourdes.

S’agissant du développement des entreprises, l’essentiel se trouve hors de la mission Économie M. Roseren a fait allusion aux dépenses fiscales de 10 milliards. Je salue le soutien apporté aux entreprises, en particulier en matière de Très haut débit.

Les statistiques de l’Insee sont évidemment fondamentales. Des gains d’efficience sont sans doute possibles mais, contrairement à M. Sala, je suis favorable à l’open data.

Nous voterons ces crédits.

M. Kévin Mauvieux (RN). Nous nous y opposerons. D’une part, la balance commerciale est dans une situation catastrophique inédite dont les conséquences sont très négatives. D’autre part, dans le secteur numérique, les délestages prévus pourraient avoir des conséquences non moins catastrophiques.

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Nous voterons contre ces crédits.

Ce budget s’inscrit dans une vision économique que nous ne partageons absolument pas. Nous défendons une économie des besoins essentiels et non essentiels mais dans le cadre de la préservation de la planète. Vous en tenez pour une économie néo-libérale qui fait la part belle aux cadeaux fiscaux à destination des grandes entreprises et qui ne dispose pas du budget nécessaire en faveur d’une vraie relance écologique et sociale. Nous avons besoin chaque année de dizaines de milliards pour investir dans une bifurcation écologique à la hauteur des immenses défis tant les besoins sont nombreux en matière de santé, d’éducation, de culture.

Le développement des entreprises suppose de soutenir la demande et d’investir à long terme afin de créer des centaines de milliers d’emplois non délocalisables, notamment dans l’ESS. Force est de constater que le compte n’y est pas.

M. Nicolas Forissier (LR). Notre position concernant les crédits du tourisme est sage et nuancée. Il en est de même s’agissant des dispositifs d’appui au commerce extérieur, qui ont beaucoup évolué. Le précédent Gouvernement a été au bout de la réforme en clarifiant les relations avec les chambres de commerce et les régions, et en donnant un rôle pilote à Business France. Avec la Team France Export, il faut aller plus loin en développant en particulier le benchmark.

Il n’en reste pas moins que nous avons un déficit commercial record de 139 milliards sur les douze mois glissants – 156 milliards selon le rapporteur spécial. Le thermomètre de la compétitivité française est impitoyable. Depuis une dizaine d’années, la compétitivité des entreprises se dégrade très fortement. L’effort réalisé avec la suppression d’une partie des impôts de production ne suffira pas. Si nous voulions atteindre la moyenne, nous devrions encore les diminuer de 20 milliards et de 40 milliards si nous voulions être au niveau de l’Allemagne.

Nous voterons donc contre ce budget.

M. Pascal Lecamp (Dem). Après deux ans de pandémie, le plan de relance et le plan de soutien ont permis d’augmenter le nombre d’exportateurs. Sans un tel effort de l’État, cela n’aurait pas été possible.

Business France réalise un benchmark chaque année, dont j’étais d’ailleurs chargé. Avec BPIFrance, qui gère l’assurance-crédit, nous disposons de tous les outils pour réussir.

S’agissant du déploiement de la fibre, nous butons sur les derniers points, les plus compliqués, comme en atteste l’appel à projet RIP à Mayotte.

La DGCCRF joue un rôle fondamental en période d’inflation. Nous attendons le rapport annoncé par le ministre délégué Attal.

Nous voterons ces crédits.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous avons fait valoir l’urgence d’une réponse adaptée au choc systémique qui s’abattra sur nos entreprises en raison de l’explosion des prix de l’énergie et de leur extrême volatilité. À périmètre constant, l’évolution des crédits de la mission se limite pour l’essentiel, comme en 2022, à l’augmentation de 400 millions de la compensation carbone des sites très électro-intensifs, ce qui est d’ailleurs normal.

Toutefois, le périmètre de la mission ne comprenant pas cet enjeu essentiel qu’est le soutien à la pérennité de nos entreprises, nous voterons contre ces crédits.

Les rapports de la commission des affaires économiques ont permis d’identifier des pistes de travail, dont la dessaisonalisation du secteur touristique, notamment en montagne.

Compte tenu du contexte économique, les enjeux de compétitivité pour le développement de nos entreprises à l’export sont importants en Europe.

Nous avons alerté sur l’entretien et la nécessaire garantie de fiabilité du réseau cuivre jusqu’en 2030.

Mme Lise Magnier (HOR). Sans surprise, le groupe Horizons et apparentés votera les crédits de la mission Économie.

Depuis trois ans, j’alerte sur les moyens qu’il faut confier à l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi) afin de réussir le guichet unique pour les formalités d’entreprise et le registre général des entreprises, créé par la loi Pacte en 2019. Or l’Inpi ne disposera que de 31 équivalents temps plein (ETP) en 2023, au lieu des 50 ETP promis pour le 1er janvier 2023. Quand sera-t-il doté des moyens nécessaires ?

Monsieur le rapporteur spécial Xavier Roseren, pouvez-vous garantir que le guichet unique et le registre général des entreprises seront effectifs au 1er janvier 2023 ?

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Devant la nécessité de concilier la défense des intérêts nationaux et la protection de la planète dans le cadre du commerce extérieur, il faut préciser les conditions d’un juste échange et le renforcement du contrôle des marchandises aux frontières. Nos accords de libre-échange signés à l’échelle européenne doivent intégrer ces conditions de juste échange, avec des règles strictes sur les importations de produits agricoles et alimentaires. Ceux-ci doivent être produits en respectant des normes sur l’environnement aussi strictes que celles que nous avons en Europe.

La vision des écologistes est tournée vers un tourisme des quatre saisons, respectueux de l’environnement, visant, en lien avec les collectivités locales, à convertir des emplois par le biais de formations professionnelles et d’un plan massif, notamment en zone de montagne.

Nous regrettons qu’il manque des outils pour mesurer l’efficacité du dispositif de compensation carbone d’un point de vue environnemental et son incidence réelle sur le risque de délocalisation des entreprises. Ce regret est d’autant plus justifié que les entreprises concernées bénéficient déjà d’importantes dépenses fiscales, évaluées à 1,6 milliard pour 2022.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique avait assuré en 2021 que l’Inpi aurait les moyens d’installer le guichet unique des entreprises et le registre général des entreprises, avec un renfort de 50 ETP. Après vérification, seuls 31 ETP ont été concrétisés – 14 en 2022 ; 17, dans le PLF pour 2023. Il reste à éclaircir ce point pour la séance, afin que l’institut soit doté des 50 ETP supplémentaires, même s’il estime d’ores et déjà qu’il parviendra à instaurer le guichet unique.

La commission adopte les crédits de la mission Économie non modifiés.

Article 30 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

L’amendement II-CF1019 de M. Philippe Schreck est retiré.

Amendement II-CF1383 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. L’amendement vise à créer des indicateurs pour mieux évaluer l’ambition du Gouvernement pour la transition écologique du tourisme. Il s’agit d’évaluer les différentiels entre le prix de l’avion et du train ; le nombre de lignes de train de nuit à mettre ou remettre en service ; et le déploiement de solutions de transport peu émettrices de gaz à effet de serre dans les zones touristiques.

En effet, 80 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur touristique sont dus au transport entre la destination et le domicile. Il s’agit de s’attaquer à la vraie source de pollution, non de fustiger l’économie touristique dans son ensemble : tant que le train sera plus cher que l’avion, tant que son offre ne sera pas compétitive, on n’obtiendra pas de résultats.

M. Fabien Di Filippo (LR). Nous ne sommes pas pour la décroissance : nous ne voulons pas moins de tourisme, moins d’activité, moins de richesses. Il faut que l’on change nos modes de vie – de déplacement, en l’occurrence – si l’on veut avoir un impact vertueux sur la trajectoire carbone du pays. C’est peut-être là le point de départ pour ce qui concerne le tourisme. C’est pourquoi nous soutiendrons l’amendement.

La commission adopte l’amendement II-CF1383 (amendement II-2827).

Article 43 : Intégration au budget de l’État du financement de la mission d’accessibilité bancaire

La commission adopte l’article 43 non modifié.

Elle adopte les crédits du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés non modifiés.

Article 30 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

Amendement II-CF1305 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. L’amendement vise à compléter l’état G avec les objectifs et les indicateurs de performance du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

La commission adopte l’amendement II-CF1305 (amendement II-2830).

 

 

 

 

 

 


Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 26 octobre 2022 à 15 heures

Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Christian Baptiste, Mme Émilie Bonnivard, M. Mickaël Bouloux, M. Frédéric Cabrolier, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Florian Chauche, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Fabien Di Filippo, M. Benjamin Dirx, Mme Alma Dufour, Mme Stella Dupont, Mme Sophie Errante, Mme Marina Ferrari, M. Joël Giraud, M. David Guiraud, M. Victor Habert-Dassault, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Constance Le Grip, Mme Karine Lebon, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, M. Philippe Lottiaux, Mme Lise Magnier, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, M. Michel Sala, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy

Excusés. - M. Karim Ben Cheikh, M. Jean-Paul Mattei

Assistaient également à la réunion. - Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thibault Bazin, M. Idir Boumertit, Mme Sophia Chikirou, Mme Virginie Duby-Muller, M. Nicolas Forissier, Mme Marie-Charlotte Garin, M. Alexis Izard, Mme Fatiha Keloua Hachi, M. Aurélien Lopez-Liguori, M. Bastien Marchive, M. William Martinet, M. Philippe Naillet, Mme Danielle Simonnet, Mme Aurélie Trouvé, M. Léo Walter, M. Jean-Luc Warsmann