Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

 

–  Examen pour avis des articles 1er à 10 du projet de loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033) (M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis)              2

–  Examen, en application de l’article 88 du Règlement, des amendements à la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement (n° 1090) (M. Philippe Brun et M. Sébastien Jumel, rapporteurs)              21

  Information relative à la commission................22

  Présences en réunion...........................24

 


Mercredi
3 mai 2023

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 64

session ordinaire de 2022-2023

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission examine pour avis les articles 1er à 10 du projet de loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033) (M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis).

M. le président Éric Coquerel. Notre commission a décidé de se saisir pour avis des articles 1er à 10 du projet de loi relatif à la programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense, pour lequel nous avons nommé rapporteur pour avis M. Christophe Plassard.

Seuls deux des amendements déposés en commission ont été jugés irrecevables, l’un car il méconnaissait les exigences de la loi organique relative aux lois de finance (LOLF), l’autre car il ne se plaçait pas dans le champ de la saisine pour avis, limitée, donc, aux articles 1er à 10. De façon générale, j’ai opté pour l’interprétation selon laquelle les amendements qui tendent à modifier la programmation financière du projet de loi– ou les règles que cette programmation devra respecter – n’emportent pas en eux-mêmes de dépenses supplémentaires, dans la mesure où ce n’est pas la loi de programmation mais les lois de finances successives qui, juridiquement, ouvriront les crédits. Il ne s’agit pas là d’une innovation, mais de l’application de la jurisprudence applicable aux dispositions programmatiques.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Ce projet de LPM prévoit une programmation ambitieuse, avec une trajectoire de 413 milliards d’euros, dont 400 milliards d’euros de crédits budgétaires, soit une augmentation de 105 milliards d’euros – en hausse d’environ 36 % par rapport aux 295 milliards d’euros prévus entre 2019 et 2025. En 2030, les crédits atteindront 68,9 milliards d’euros et auront plus que doublé par rapport à 2017.

La trajectoire est également crédible. L’effort s’inscrit dans un contexte de tension pour les finances publiques : la charge annuelle de la dette de l’État pourrait dépasser les 70 milliards d’euros, soit plus que le budget de la défense prévu en fin de programmation. La maîtrise des finances publiques est donc essentielle ; il s’agit d’un enjeu majeur de souveraineté. Selon l’avis du Haut Conseil des finances publiques, la programmation budgétaire est compatible avec la trajectoire globale des finances publiques.

De même, l’augmentation des effectifs – légèrement en deçà de la précédente loi de programmation militaire – est plus cohérente : 6 300 équivalents temps plein (ETP) sont prévus d’ici à 2030, avec un enjeu de fidélisation des personnels. En effet, la fidélisation doit permettre de réduire le décalage entre les objectifs en matière de personnels et la réalité des effectifs.

La LPM étant planifiée sur sept ans, la question de la hauteur des marches peut donner lieu à débat. Les marches les plus élevées sont programmées en fin de période, après les élections présidentielle et législatives de 2027, ce qui constitue un risque pour la réalisation des capacités planifiées. Cependant, la trajectoire est définie en fonction du rythme d’avancement des programmes, notamment les plus structurants : les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), les missiles à tête nucléaire ou le porte-avions, à cheval sur la future LPM et sur la suivante. Il ne sert donc à rien de vouloir anticiper les crédits, calés sur les nécessités industrielles de déploiement plus que sur une mécanique strictement financière.

Les marches de plus de 3 milliards d’euros par an, sur cinq années consécutives, restent significatives ; aucun autre ministère ne peut en dire autant. En outre, la programmation comprend un objectif de dépense pour chacune des sept annuités de la période 2024-2030 – ce qui n’était pas le cas pour la précédente LPM.

Enfin, la moitié de l’effort d’augmentation proposé sera réalisé d’ici à 2027, soit 12,1 milliards d’euros, contre 12,9 milliards d’euros entre 2028 et 2030. Il sera de la responsabilité des candidats et de la future majorité de ne pas remettre en cause notre modèle d’armée. L’histoire nous rappelle en effet qu’une guerre peut se perdre des années avant le déclenchement des hostilités : malgré l’impact des échéances de 2027, il est souhaitable que la LPM ait une visibilité sur sept ans, compte tenu notamment de l’inscription des projets dans un cadre temporel très long.

Les cibles capacitaires sont ambitieuses, même si un étalement des livraisons de certains matériels s’est avéré nécessaire : des arbitrages ont été faits quant à leur planning de livraison, susceptible d’aller au-delà de l’année 2030.

On peut regretter que la LPM ne permette pas aux forces armées de retrouver de la masse sur l’ensemble des segments, dont certains demeureront échantillonnaires. Il s’agit toutefois d’un choix assumé du ministère des armées : plutôt que la masse, le projet de LPM fait le choix de la cohérence. Les achats de nouveaux matériels ne sont rien s’ils ne s’accompagnent pas d’un effort sur la formation des personnels. Les états-majors ont ainsi priorisé un modèle d’armée cohérente, crédible et équilibrée.

Le projet de LPM est aussi construit en fonction de la réalité des missions de nos forces ’armées. Sur certaines capacités, nous serons toujours échantillonnaires : nous n’avons pas vocation à agir seuls, l’armée française intervenant dans un cadre collectif, avec plusieurs pays. Sur d’autres segments, en revanche, nous devons être souverains – je pense en particulier à la cyberdéfense et à l’outre-mer.

La programmation n’est toutefois pas dénuée d’incertitudes, notamment sur les ressources additionnelles : le budget a été présenté sur la base de 413 milliards d’euros, avec une ventilation de 400 milliards d’euros d’une part et 13 milliards d’euros de l’autre. Ces derniers peuvent susciter des interrogations, mais l’on peut les détailler comme suit.

Le premier volet – 5,9 milliards – est constitué de ressources extrabudgétaires, ainsi ventilées : 3,1 milliards de l’assurance maladie pour le service de santé des armées, 1 milliard de cessions de matériels, 474 millions d’euros de cessions immobilières et redevances domaniales, 652 millions d’euros de prestations de services et 650 millions d’euros liés à des renégociations de contrats. Ces estimations – en moyenne 840 millions d’euros par an contre 1,1 milliard entre 2019 et 2022 – sont réalistes.

Le deuxième volet représente 1,2 milliard d’euros, destinés au remplacement de matériels cédés à l’Ukraine, le reste de l’effort national de soutien à l’Ukraine n’étant pas inclus dans les crédits prévus par le projet de LPM.

Le troisième volet enfin – 6,2 milliards d’euros – correspond à des mécaniques comptables : le report de charge, qui consiste à reporter le décaissement de certains crédits de paiement sur l’exercice suivant, afin de financer d’autres dépenses jugées prioritaires ; la marge frictionnelle, qui correspond à des redéploiements de crédits, inévitables en raison des décalages industriels liés à des investissements colossaux et de long terme.

Ces outils ne sont pas nouveaux, ils ont toujours existé même si les LPM précédentes ne faisaient pas apparaître distinctement leurs montants. Ils sont pertinents pour exécuter la programmation dans un contexte d’inflation et d’incertitude : il est normal d’avoir des variables d’ajustement, et celles-ci sont réalistes.

Le niveau d’inflation prévisionnel est cependant incertain. Le niveau d’inflation effectif entre 2024 et 2030 aura nécessairement un impact sur les achats du ministère des armées ainsi que sur la masse salariale. Le projet de LPM intègre une provision de 30 milliards d’euros sur sept ans pour faire face aux conséquences de l’inflation. Si l’on peut toujours en discuter la méthode, les hypothèses retenues étaient les plus crédibles au moment de la préparation du projet de LPM, en cohérence avec la vision à moyen terme dont Bercy peut disposer.

Le cas échéant, l’ouverture de crédits supplémentaires en gestion ou en loi de finances rectificative  constitue bien évidemment une option d’ajustement, ce qui est une pratique courante. En effet, les marches sont des seuils et non pas des plafonds : les montants proposés dans la LPM ne sont pas gravés dans le marbre ; ils constituent un minimum au-delà duquel aller, si nécessaire, en fonction de la conjoncture. Le niveau des crédits additionnels ouverts en 2022 – 1,18 milliard d’euros – et annoncés pour 2023 – 1,5 milliard d’euros – peut d’ailleurs inciter à l’optimisme. De fait, il n’y a aujourd’hui aucun retard de programme lié à l’inflation dans la LPM qui s’achève.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le 13 juillet 2017, le Président de la République marquait son engagement envers la fin de la décroissance et pour la remontée de notre effort de défense. Cette promesse a été tenue dans la LPM pour la période 2019-2025, votée sous le premier quinquennat, avec un effort à hauteur de 295 milliards d’euros pour les armées.

Dans son programme présidentiel pour 2022, Emmanuel Macron a indiqué sa volonté de continuer à renforcer notre armée, avec la poursuite de l'objectif de 2 % de notre richesse nationale et la modernisation des équipements. La LPM pour les années 2024-2030 matérialise cet engagement, renouvelé devant les Français. La France est une grande nation militaire, une puissance atomique, un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, membre fondateur et moteur de l’Union européenne : nous avons un rang à tenir, pour défendre nos intérêts dans le monde, dissuader nos ennemis potentiels et protéger nos frontières nationales.

Le terrorisme islamiste qui a touché notre territoire ces dernières années, ainsi que l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, nous rappellent que notre pays doit poursuivre son effort de réarmement : on ne se défend pas avec des épées en bois, mais avec des armes et du personnel. Le groupe Renaissance salue donc l’ambition de cette LPM, qui fait l’effort de consacrer 400 milliards d’euros pour la période 2024-2030, couplés à une hausse des effectifs du ministère des armées. Nous appelons le plus grand nombre de nos collègues à marquer leur attachement à nos militaires, en soutenant ce texte.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Le groupe Rassemblement national prend acte de la vision générale de ce texte qui poursuit la dynamique amorcée par la LPM en vigueur, celle de la remontée en puissance de nos armées, en commençant par leur réparation. L’arbitrage obtenu entre Matignon et Brienne rend compte du fragile équilibre qui devait être trouvé entre, d’une part, le respect de la maîtrise des dépenses et, d’autre part, le souhait d’un réarmement de nos armées, le plus rapidement possible.

Dans le prolongement de l’avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques, le groupe Rassemblement national ne peut que regretter les faiblesses financières d’une loi de programmation sectorielle. L’incertitude qui pèse sur les 13,3 milliards d’euros programmés mais non budgétés affaiblit considérablement la portée des objectifs de ce projet de loi.

L’incertitude quant aux conséquences d’une inflation plus forte que prévu sur la trajectoire des dépenses n’offre pas non plus une sérénité suffisante pour voter le texte en l’état. Il faut également relever la prudence excessive de la variation des marges budgétaires, qui laissent au quinquennat suivant le plus gros de l’effort que les circonstances commandent pourtant de fournir sur-le-champ. La première marche pour 2024s’en trouve ainsi réduite à néant.

À ce stade de l’examen, le groupe Rassemblement national invite les membres de la commission à voter en faveur des amendements travaillés afin de corriger les imperfections financières de ce texte, qui ne propose pas une programmation financière conforme aux objectifs de politique de défense visés.

Mme Véronique Louwagie (LR). J’ai deux regrets. Tout d’abord, le temps politique nécessaire à l’élaboration d’un tel texte n’a pas été pris, alors qu’il n’y avait pas d’urgence – la précédente LPM courant jusqu’en 2025 – et que les marches – antérieures au conflit ukrainien – sont les mêmes. Par ailleurs, nous ne disposons toujours pas d’une loi de programmation des finances publiques et nous sommes dans une situation d’incertitude : le Haut Conseil des finances publiques l’a souligné, le projet de LPM contraindra fortement les autres dépenses du budget de l’État, qui « devraient baisser en volume pour respecter la trajectoire du projet de loi de programmation, ce qui impliquerait un effort de maîtrise important et, à ce jour, peu de documenté, de la dépense ». La chronologie de ces différents textes est donc problématique.

Sur le fond, l’augmentation de 400 milliards d’euros représente une hausse budgétaire de 35 % par rapport à la précédente LPM : nous avons des doutes sur la méthode utilisée pour les estimations, s’agissant notamment de l’inflation, donc sur la crédibilité des hypothèses. Il manque également 13 milliards d’euros pour financer cette loi de programmation militaire. En outre, ces 413 milliards d’euros sont insuffisants, notamment au regard des annonces budgétaires allemandes et anglaises. Enfin, il existe un risque sur le niveau des marches, quand bien même celles-ci ne constituent pas des plafonds.

M. Mohamed Laqhila (Dem). La LPM pour la période 2024-2030 prévoit une enveloppe de 413,3 milliards d’euros pour les armées, soit une augmentation de plus de 100 milliards d’euros par rapport à la précédente LPM pour 2019-2025. Cet important effort financier doit servir à la transformation de l’armée française, après une grande période d’austérité dans les années 2000-2010. Il ne doit toutefois pas nous conduire à augmenter les effectifs et matériels aveuglément, sans réflexion claire sur nos besoins futurs en matière de défense. Le projet de loi renforce les missions principales de l’armée française pour garantir la souveraineté de la nation, en métropole et en outre-mer, ainsi que la capacité à agir en dehors des frontières pour préserver les intérêts de la France et de ses alliés.

Il s’agit également de relever le défi de l’émergence de nouveaux espaces de conflictualité, tels que le cyber et le spatial, en tirant parti des ruptures technologiques de l’innovation. Le texte tire aussi les enseignements du retour d’un conflit entre États aux portes de l’Europe et des décennies de lutte contre le terrorisme armé.

Nous devons à présent définir l’ambition militaire de la France en discutant, en amendant et en votant ce texte, afin de fixer les moyens d’évoluer à nos armées pour les sept prochaines années. Nous soutenons ce projet de loi de programmation, que nous saluons avec vigueur. Nous avons toutefois des inquiétudes sur la montée en charge très progressive de cette LPM : nul doute que le débat parlementaire permettra de les lever.

Mme Valérie Rabault (SOC). Le Gouvernement affiche, à l’article 2, un objectif de porter l’effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB (produit intérieur brut). Le total des dépenses, rapporté au PIB, est donc supposé correspondre à ce chiffre. MM. Le Maire et Lecornu doivent, à cet égard, se mettre d’accord : le PIB pour 2025 qui figure dans le projet de programme de stabilité pour 2022-2027 n’est pas du tout le même que celui sur lequel se fonde la LPM. Si M. Lecornu ne ment pas, le PIB figurant dans le programme de stabilité envoyé à Bruxelles par Bruno Le Maire est faux. Pour l’heure, le niveau de 2 % revendiqué n’est pas atteint.

Par ailleurs, comme l’a indiqué Mme Louwagie, en l’absence de loi de programmation des finances publiques, l’effort affiché induira une baisse des dépenses publiques ailleurs : est-ce bien le cas ? Le Haut Conseil des finances publiques l’a confirmé, annonçant, pour les autres services publics, une baisse des dépenses comprise, selon les années, entre 2,8 % et 1,2 %.

Enfin, concernant la stratégie globale, les armées françaises sont comparables à des épiceries de luxe : nous disposons de beaucoup de matériels très perfectionnés, mais il est compliqué de mener une guerre plus conventionnelle – on peut le constater avec les efforts consentis en Ukraine, à laquelle je réaffirme mon soutien. Cette dimension n’est pas abordée dans le projet de LPM : quelle stratégie doit être menée – un point sur lequel le ministre ne répond pas ?

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Le groupe Écologiste-NUPES aborde cette LPM avec intérêt, en rappelant qu’il défend une approche politique qui promeut la coopération internationale et donne un rôle éminent à l’Europe. La LPM est susceptible de permettre une modernisation des armées, dans un contexte de retour de la guerre sur le continent européen. À cet égard, nous réaffirmons tout notre soutien aux Ukrainiens, agressés par leurs voisins russes.

Tout d’abord, nous avons des inquiétudes quant au caractère bien bouclé de cette LPM et au flou d’environ 13 milliards d’euros relevé par le Haut Conseil des finances publiques, chose bien curieuse pour un projet de loi aussi important sur le plan financier. Certes, il ne s’agit pas de l’essentiel au regard du total de 413 milliards d’euros, mais cela représente tout de même quatre fois le budget consacré à l’action extérieure de l’État.

La cohabitation entre, d’une part, les choix opérés dans la LPM et, d’autre part, les autres services publics, dépourvus de loi de programmation, n’est pas bonne. Le Haut Conseil des finances publiques a rappelé la tension que font exercer ces lois de programmation sur le reste du budget. Si promouvoir des lois de programmation permet, certes, de se donner des perspectives, vous le faites au détriment de tout le reste, ce à quoi nous ne pouvons nous résoudre : vous laissez ainsi la place à de futures coupes dans les services publics de l’éducation, de la santé ou de l’écologie, afin de financer la hausse budgétaire destinée à nos armées.

Nos services diplomatiques, mis en difficulté par trente années de réduction de leurs moyens et effectifs, n’ont d’ailleurs toujours pas de loi de programmation : ils doivent donc se serrer la ceinture pour nos armées, quoi que vous en disiez. Or une action militaire, même forte, combinée à une diplomatie sans moyens, conduit à une impasse, comme cela a été constaté trop de fois, y compris ces derniers mois. Le groupe Écologiste-NUPES veillera donc attentivement au travail législatif sur cette LPM : la nécessité d’une défense nationale à la hauteur des enjeux objectifs, auxquels nous souscrivons, ne doit pas aboutir à opposer la mise en ordre de nos armées et la déshérence financière de nos services publics.

M. Michel Castellani (LIOT). La hausse des crédits s’évalue à l’aune de l’inflation. Or le projet de loi prévoit une clause de revoyure en 2027 et l’augmentation de crédits la plus forte est prévue après cette date : il faut donc sans doute relativiser la hausse de 3 % par an du budget de la défense et la rapprocher du niveau de l’inflation, estimée entre 2 % et 5 % par an.

Ensuite, je m’interroge à mon tour sur l’origine des 13 milliards d’euros, soit 7 milliards d’euros de recettes nouvelles et 6 milliards d’euros de reports de crédits, qui demandent à être précisés.

Troisièmement, le programme de stabilité entend limiter drastiquement l’évolution de la dépense publique dans les prochaines années, alors que la programmation thématique – notamment les missions Justice, Aide publique au développement ou Défense – prend toujours plus de place. Des arbitrages devront donc être faits, de façon à réduire le volume des dépenses d’un certain nombre d’autres missions.

Enfin notre groupe réitère son soutien à notre collègue Estelle Youssouffa, qui demande depuis longtemps l’attribution d’un patrouilleur à Mayotte. Les troubles que connaît actuellement ce territoire ultramarin sont en effet largement dus à un manque de contrôle des frontières et à l’insuffisance de patrouilles.

M. le président Éric Coquerel. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer lors de l’audition du ministre. De ses réponses, j’ai retenu qu’il s’agissait d’une programmation de base, susceptible d’être réévaluée chaque année, ce qui suppose que l’on compte sur l’approbation de l’Assemblée. Nous pouvons effectivement nous interroger sur les objectifs – ils renvoient à la question de l’étude d’impact, bien qu’elle ait été validée par le Conseil constitutionnel – et sur le coût estimé de l’inflation, qui semble très optimiste.

Par ailleurs, Valérie Rabault l’a rappelé, l’objectif de 2 % du PIB en 2025 ne correspond pas à la programmation du Gouvernement, prévue à hauteur de 50,04 milliards d’euros, soit 1,65 % ; cela me laisse dubitatif.

Je ne suis pas non plus convaincu par le fait que les marches les plus importantes se situent après 2027, notamment en termes d’efficience : l’augmentation lors des deux dernières années est essentiellement due au début de la programmation du porte-avions nucléaire.

Enfin, Sébastien Lecornu avait indiqué que les objectifs primaient sur les contraintes budgétaires du Gouvernement : il me semble que cela peut être appliqué à d’autres urgences, écologiques, sociales et de service public.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le projet de LPM est à la fois ambitieux et indispensable, dans une période de bouleversements internationaux inédite depuis des décennies. Chacun comprendra, s’agissant notamment de programmes d’armement, que nos forces armées aient besoin de visibilité et d’un accroissement de leurs moyens.

Ce projet de loi s’inscrit dans la continuité de la précédente LPM, dont on peut saluer l’excellente exécution puisqu’elle a permis une régénération de nos forces armées, après plus de deux décennies de baisse des dépenses. Ce texte porte l’effort national de défense à 2 % du PIB. En réponse à la remarque de Mme Rabault : c’est le programme de stabilité qui fait bien évidemment foi. Je suppose que l’écart est dû au fait que ces deux documents n’ont pas été établis au même moment, le projet de LPM datant de la fin de l’année dernière tandis que le programme de stabilité a été actualisé il y a une semaine.

La LPM permet également de créer 6 000 emplois, au bénéfice du ministère des armées, d’ici à 2030. Elle portera le budget des armées à un niveau inédit de 68 milliards d’euros en 2030, soit presque un doublement par rapport à 2019. Nos forces armées, et les Français dans leur ensemble, attendent des moyens supplémentaires à la hauteur des besoins de recrutement et d’innovation.

Certains d’entre vous l’ont souligné, la LPM s’inscrit par ailleurs – comme cela doit être le cas pour toutes les lois de programmation sectorielles – dans le cadre de la trajectoire de maîtrise des finances publiques du Gouvernement. Afin de rendre les lois de programmation sectorielles crédibles, nous devons avoir une loi de programmation des finances publiques. Le programme de stabilité, présenté le 26 avril 2023, confirme et amplifie les perspectives de maîtrise des dépenses publiques et d’endettement. Les lettres de cadrage adressées par la Première ministre aux membres du Gouvernement, le 19 avril dernier, les assises des finances publiques, qui se tiendront d’ici à l’été, témoignent du sérieux de cet effort de maîtrise des dépenses : notre rôle sera de veiller à ce qu’il s’inscrive dans la durée et qu’il soit effectif et documenté dans les futures lois de finances.

À cet égard on ne peut que déplorer à nouveau l’absence d’une loi de programmation des finances publiques : j’espère que la nouvelle lecture – qui devrait intervenir au mois de juillet et dans laquelle un certain nombre de remarques pourront être prises en compte – donnera lieu à un vote favorable, dans l’intérêt de notre pays.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Le rapport précisera, ligne par ligne, la ventilation des 13 milliards d’euros. Concernant l’absence de loi de programmation des finances publiques, comme le Haut Conseil aux finances publiques l’a rappelé, il existe une cohérence entre la programmation qui a été construite et le projet de loi de programmation des finances publiques qui a été présenté au vote, même si le groupe LR ne l’a pas voté.

TITRE IER : Dispositions relatives aux objectifs de la politique de défense et à la programmation financière

Article 1er : Programmation

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er.

Article 2 : Approbation du rapport annexé

Amendement CF14 de M. Jocelyn Dessigny.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Le projet de LPM alloue des crédits à la mission Défense à hauteur de 413,3 milliards d’euros, mais ne budgète que 400 milliards d’euros. Le présent amendement propose de tenir compte de cet écart en précisant que les montants des crédits programmés doivent être entendus comme des planchers et non comme des plafonds.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Sur le fond, vous avez raison. Les besoins programmés sont en effet un seuil plancher et non un plafond. Ils pourront être réévalués en fonction de nos marges de manœuvre budgétaires. D’ailleurs, certaines cibles capacitaires sont déjà fixées de la sorte, puisque sont prévus au moins soixante-dix hélicoptères Guépard, au moins trente-cinq avions A400M, au moins six appareils Eurodrone. Je vous propose, dans un amendement à venir, de l’exprimer sous la forme d’un pourcentage du PIB et vous invite donc à retirer votre amendement ; faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Je le maintiens.

La commission rejette l’amendement CF14.

Amendement CF13 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Cet amendement vise à traduire ce que j’ai indiqué dans ma précédente intervention. Je remercie à cet égard le rapporteur général pour l’honnêteté de ses propos. Le fait qu’il y ait 500 milliards d’euros d’écart – une simple règle de trois permet d’obtenir ce chiffre – entre les deux PIB pris en compte, l’un dans le programme de stabilité, l’autre dans la LPM, pose toutefois question : le différentiel est vraiment très important. Cet amendement invite le Gouvernement à apporter des éclaircissements sur ce point.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. J’ai contacté le Gouvernement pour obtenir une explication au problème que vous soulevez, qui est pertinent, puisque nous avons deux sources, avec deux chiffrages différents. À ce stade, je n’ai pas reçu de réponse. Le cheminement de la LPM nous donnera l’occasion d’étudier ce point, au sein de la commission de la défense puis en séance publique. Je vous invite donc à poser directement votre question au ministre, en commission de la défense ou en séance. Dans l’attente, je vous invite à retirer votre amendement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je pense effectivement qu’il faut poser directement la question au ministre.

L’écart constaté, madame Rabault, tient selon moi au fait que vous n’avez pas intégré les pensions. Si on les intègre, on retrouve un niveau de PIB cohérent avec celui qui est présenté dans le programme de stabilité – et je répète que c’est ce document qui fait foi.

Mme Valérie Rabault (SOC). Monsieur le président, je pense que vous ne serez pas insensible à cet écart de 500 milliards, qui est considérable. Tout le monde, je crois, est capable de faire une règle de trois.

La moindre des choses, dans une loi de programmation, c’est de disposer de chiffres précis : il faut que tout soit carré. Or ce n’est pas du tout le cas. Je maintiens mon amendement, parce qu’il importe que la commission des finances interpelle le Gouvernement sur ce point.

M. le président Éric Coquerel. Je suis évidemment sensible à votre amendement et je le voterai.

M. Patrick Hetzel (LR). Mme Rabault pose une vraie question : 500 milliards d’écart, ce n’est pas une paille.

Il y a un vrai problème de sincérité, et il ne nous revient pas de dire s’il se situe du côté de la loi de programmation militaire ou du côté du programme de stabilité. Notre responsabilité, en tant que parlementaires, est de relever ces incohérences et il faudra bien que le Gouvernement s’en explique.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Madame Rabault, le calcul des 2 % dans la norme Otan inclut les pensions. C’est ce qui explique l’écart que vous notez. Mais je suis d’accord avec vous : il faudra que le Gouvernement précise ce point.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. En prenant en compte le coût des pensions, on arrive à 60 milliards de dépenses en 2025, ce qui représente bien 2 % des 3 040 milliards de PIB. Le fait que l’on n’ait pas pris en compte les pensions explique certainement l’écart constaté. Il reviendra au ministre de nous éclairer sur son mode de calcul.

La commission rejette l’amendement CF13.

Amendement CF12 de M. Christophe Plassard.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. C’est l’amendement dont je vous ai parlé : il s’agit de préciser que l’objectif de consacrer 2 % du PIB à l’effort national de défense n’est pas un plafond, mais un plancher.

La commission adopte l’amendement CF12 (amendement DN41).

Amendements CF33 rectifié et CF26 de M. Christophe Plassard (discussion commune).

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je propose d’ouvrir la possibilité d’effectuer des partenariats avec des opérateurs privés et des services commerciaux pour les activités de renseignement et de défense. C’est particulièrement nécessaire dans le domaine spatial : la guerre en Ukraine en a donné une illustration, avec l’intervention de l’entreprise Starlink. Il existe des opérateurs français ; nous ne serons donc pas obligés d’utiliser des opérateurs étrangers.

M. le président Éric Coquerel. Je suis très dubitatif quant au recours à des prestataires privés. En outre, rien dans vos amendements ne nous obligera à recourir à des prestataires français, ce qui me paraît problématique quand on parle d’équipement militaire et spatial. Je voterai contre.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Moi aussi, je suis un peu étonnée de ces amendements. La défense, c’est régalien. Commencer à en confier une partie à des opérateurs privés, c’est ouvrir une brèche qui me paraît dangereuse. Nos partenaires allemands et anglais font-ils le même choix ? Nous avons une armée professionnelle ; je ne suis pas favorable à ce que l’on se lance dans des partenariats avec des opérateurs extérieurs, car c’est prendre le risque qu’il y ait des fuites, et c’est dangereux.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. En proposant ces amendements, je pensais à l’entreprise française Eutelsat, un opérateur de satellites. Les acteurs privés ont une place importante dans le monde spatial et je trouverais dommage de nous priver de pareilles collaborations. L’évolution du numérique et de l’organisation du marché satellitaire impose, de mon point de vue, de faciliter ce type de relations commerciales. Ces amendements, du reste, ne portent que sur le rapport annexé.

M. le président Éric Coquerel. Il faudra revenir sur ces amendements en séance car ils ouvrent un champ très largeet mériteront de plus amples débats.

La commission adopte successivement les amendementsCF33 (DN42) et CF26 (DN43).

Amendement CF25 de M. Christophe Plassard.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Dans mon rapport d’information sur l’économie de guerre, j’ai montré qu’il importait de garantir aux entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD) l’accès aux financements privés. Il leur est parfois refusé pour des questions éthiques, alors que l’industrie de défense est indispensable à notre autonomie stratégique et à notre souveraineté.

Cela pourrait par exemple passer par la création d’un label ou d’un sous-label « entreprise de souveraineté » visant à encourager les investissements dans les entreprises dont la production participe à des activités de souveraineté, la mobilisation de l’épargne privée ou encore la création de fonds d’investissement.

La commission adopte l’amendement CF25 (DN44).

Amendement CF24 de M. Christophe Plassard.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Il est nécessaire de préciser dans le rapport annexé que le soutien de l’État à la BITD doit bénéficier en particulier aux PME – petites et moyennes entreprises – et aux TPE – très petites entreprises –, qui sont les plus capables de développer des innovations de rupture.

Pour prendre un exemple dans un autre domaine, celui des pompiers, les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) testent des produits non finalisés sur lesquels ils font des retours d’expérience ; cela leur permet de disposer d’un matériel parfaitement adapté à leurs missions, car leur conception ne résulte pas seulement d’un cahier des charges, mais aussi d’une expérimentation sur le terrain. Un tel schéma gagnerait à être reproduit au niveau des forces armées. À l’heure actuelle, seules les forces spéciales disposent d’une telle marge de manœuvre, dans des conditions limitées qui profitent peu aux entreprises.

Ce que je propose, c’est qu’une partie des crédits consacrés par l’État à l’innovation de défense – 10 milliards – soient fléchés en direction des PME et des TPE. Le cas échéant, ces acquisitions pourraient être réalisées sous forme de leasing.

La commission adopte l’amendement CF24 (DN45).

Amendement CF27 de M. Christophe Plassard.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Dans le même esprit, je propose d’élargir nos capacités de surveillance en ouvrant la possibilité de partenariats avec des opérateurs de satellites privés.

M. le président Éric Coquerel. Comme précédemment, je trouve que ces amendements, même s’ils ne portent que sur le rapport annexé, ouvrent un champ trop large. Je suis déjà assez circonspect lorsqu’il s’agit de recourir à des opérateurs privés mais, en plus, votre exposé sommaire est très imprécis : vous indiquez qu’« il serait plus intéressant de faire appel à un opérateur civil français », sans introduire aucune obligation à cet égard. Cette ouverture au privé, pour des missions on ne peut plus régaliennes, me paraît assez inquiétante.

La commission adopte l’amendement CF27 (DN46).

Amendements CF28 et CF29 M. Christophe Plassard (discussion commune).

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Les planeurs et les missiles hypersoniques constituent l’une des menaces les plus graves pour un pays, même doté de l’arme atomique. Pilotables pendant la majeure partie du vol, avec des vitesses supérieures à Mach 5, les missiles hypersoniques sont particulièrement difficiles à intercepter. Il paraît donc important de faire figurer, dans le rapport annexé, la nécessité de lutter contre ces armes nouvelles.

La commission adopte successivement les amendements CF28 (DN47) et CF29 (DN48).

Amendements CF30 et CF31 M. Christophe Plassard (discussion commune).

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Il s’agit d’élargir le champ d’action du rapport. Avec plus de 2 000 entreprises et sous-traitants et un chiffre d’affaires de près de 30 milliards d’euros pour sa seule activité de défense, la BITD constitue l’essentiel de notre économie de défense.

D’après la définition proposée par Paul Dunne en 1995, qui est largement admise, la BITD est constituée de trois groupes d’entreprises distincts : les unités qui concourent à la production des systèmes d’armes et des équipements létaux ; les unités qui fournissent des produits non létaux mais stratégiques, comme les carburants ; enfin, les unités qui fournissent des produits courants utilisés par les armées, comme la nourriture.

L’inconvénient de cette définition, c’est qu’elle exclut, de fait, des acteurs apparus avec la révolution numérique, par exemple les opérateurs de satellites civils, qui peuvent apporter des solutions à notre BITD. Je propose donc de les y inclure.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). J’aimerais comprendre ce que nous sommes en train de faire. La loi de programmation militaire contient trente-six articles, dont une dizaine seulement ont une vraie dimension financière. L’article 2 consiste en l’approbation d’un rapport annexé. Il me semble que les amendements que vous défendez depuis quelques minutes relèvent davantage de la commission de la défense que de la commission des finances. Pouvez-vous nous exposer leurs implications budgétaires ?

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Ce débat pourra effectivement être prolongé en commission de la défense.

Tous ces amendements, je l’ai dit, s’appuient sur le rapport d’information relatif à l’économie de guerre, , que j’ai présenté à la commission il y a quelques semaines et qui a mis en exergue des problèmes de financement. Certains des opérateurs de la BITD ne sont pas financés ou n’entrent pas dans le spectre des marchés publics, pour des raisons diverses : raisons normatives, difficulté à mobiliser des financements ou de l’épargne… Il s’agit donc bien de sujets financiers.

Identifier des secteurs qui, du fait de leur taille – les PME et les TPE – ou de leur activité – les entreprises du numérique – ne sont pas considérés comme faisant partie de la BITD ne relève pas, à strictement parler, de questions budgétaires, c’est vrai. Mais je me suis appuyé, pour construire ces amendements, sur le rapport que j’ai rédigé récemment, et qui identifiait des problèmes de financement.

Le débat que j’ai ouvert à propos du rapport annexé pourra très bien se prolonger en commission de la défense.

La commission adopte successivement les amendements CF30 (DN49) et CF31 (DN50).

Amendement CF32 de M. Christophe Plassard.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. À l’alinéa 47, je propose d’insérer, après le mot : « communications », les mots : « terrestres, air-air et spatiales ».

La commission adopte l’amendement CF32 (DN51).

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

Article 3 : Moyens de la politique de défense

Amendement CF15 de M. Jocelyn Dessigny.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Le projet de LPM fait une distinction entre les « besoins programmés », qui s’élèvent à 413,3 milliards d’euros, et les « ressources budgétaires », qui s’élèvent, sur la même période, à 400 milliards. Dès lors, il paraît nécessaire de préciser que le montant des ressources budgétaires programmées est un plancher, et non un plafond.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je vous ferai la même réponse que sur l’amendement CF14. Sur le fond, vous avez raison. Sur la forme, cette idée apparaît déjà à l’article 3. Ainsi, à l’alinéa 4, il est indiqué que les ressources budgétaires s’ajouteront à d’autres ressources, par exemple celles liées au soutien à l’Ukraine. À l’alinéa 5, il est également précisé que ces ressources seront complétées par des ressources extrabudgétaires. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement CF15.

Amendements CF22 de Mme Valérie Rabault, CF20 de M. Jocelyn Dessigny et CF3 de Mme Valérie Rabault (discussion commune).

Mme Valérie Rabault (SOC). Avec l’amendement CF22, je propose de partir des prévisions du programme de stabilité pour calculer ce que serait une trajectoire budgétaire en adéquation avec l’objectif du Gouvernement de porter l’effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB à compter de 2025.

J’ai été un peu déçue que la commission vote contre la règle de trois. J’espère qu’elle adoptera cet amendement, qui nous permettra d’interpeller le Gouvernement.

Avec l’amendement CF3, je propose de raisonner en euros « constants », plutôt qu’en euros « courants », car l’euro de 2027 ou 2030 ne sera pas l’euro de 2023.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je suis pour un raisonnement en euros courants, car c’est la présentation la plus lisible. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle toutes les lois de programmation sectorielles sont présentées en euros courants. Du reste, le fait de raisonner en euros constants ne protège pas nécessairement contre une diminution des budgets.

Vous voulez protéger le budget des armées contre l’inflation, mais le projet de LPM comporte déjà des instruments pour le faire : une provision de 30 milliards, le report de charges et la marge frictionnelle.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’aimerais répondre à la vice-présidente Rabault, qui insiste d’une manière assez déplaisante. Plutôt qu’une règle de trois, je vous propose de faire une addition. Je répète que les documents produits par le Gouvernement ne présentent pas deux PIB différents. Le programme de stabilité a établi que le PIB serait supérieur à 3 000 milliards en 2025. Le calcul que vous faites n’est pas juste, puisque vous ne prenez pas en compte les pensions. En les prenant en compte, on arrive à 60 milliards d’effort budgétaire pour la défense, qui représentent bien 2 % de 3 000 milliards. Avant de faire une règle de trois, faisons une addition.

Mme Valérie Rabault (SOC). Dans ce cas, votez mon amendement, puisqu’il se fonde sur les projections de PIB que vous avez faites. Si cet amendement est voté, il sera beaucoup plus facile pour la commission des finances d’interpeller le Gouvernement pour lui demander de clarifier les choses. Si vous vous fixez un objectif de 2 %, il faut que, dans tous les tableaux de chiffres que vous présentez, on retrouve bien ces 2 %. Sinon, monsieur le rapporteur général, il y a mensonge. La responsabilité de la commission des finances est d’éclairer nos collègues sur les vrais chiffres, en séance publique.

Au sujet de la lutte contre l’inflation, j’ai un petit désaccord avec vous, monsieur le rapporteur pour avis. À chaque fois que nous avons déposé des amendements pour revaloriser les carburants – parce que c’est ce qui coûte cher à nos armées –, vous avez toujours voté contre. Alors ne me dites pas que vous voulez soutenir nos armées face à l’inflation : si vous l’aviez voulu, vous auriez voté nos amendements.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je rappelle que, dans le dernier projet de loi de finances rectificative (PLFR), nous avons voté 220 millions d’euros de crédits pour lutter contre l’inflation, notamment contre les hausses de carburants.

Dans le tableau que vous proposez, la marche de 2025 représenterait une hausse de 13,77 milliards, ce qui est beaucoup trop important, puisque j’ai expliqué que les marches doivent être cohérentes avec le développement des programmes industriels. Vous ne trouveriez pas, en 2025, à dépenser de telles sommes.

Par ailleurs, dans le tableau proposé par le Gouvernement, la première marche représente une hausse de 7 %. Ce pourcentage va diminuer pendant les quatre années suivantes et recommencer à augmenter en 2028 pour atteindre 6,7 % en 2030. L’augmentation des marches est donc assez cohérente et relativement lissée : il n’y aura pas un effort surhumain à réaliser à la fin de la LPM.

La commission rejette successivement les amendements CF22, CF 20 et CF3.

Amendement CF2 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Le Haut Conseil des finances publiques constate, on l’a dit, un écart de 13 milliards entre les besoins programmés – 413 milliards – et les ressources – 400 milliards. Nous avons besoin d’explications à ce sujet : tel est le sens du présent amendement.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. J’ai indiqué tout à l’heure que les 13 milliards de ressources additionnelles aux crédits de la mission Défense ne proviendront pas uniquement de crédits budgétaires. Une partie sera financée par l’ouverture de crédits supplémentaires, par exemple la somme de 1,2 milliard nécessaire au remplacement des Crotale livrés à l’Ukraine. Une partie proviendra de ressources extrabudgétaires : cessions de matériels, cessions immobilières, financements du service de santé des armées par l’assurance maladie.

Si c’est nécessaire, des ouvertures de crédits supplémentaires pourront avoir lieu. Ce sera à nous, législateur, de le décider, en loi de finances rectificative. J’émettrai donc un avis défavorable sur cet amendement, tout en m’en remettant à la sagesse de la commission.

La commission rejette l’amendement CF2.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 non modifié.

Après l’article 3

Amendement CF10 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Nous demandons que, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les voies et moyens pour parvenir à des financements additionnels en vue de compléter les ressources budgétaires non documentées.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Les moyens d’obtenir les 13 milliards ont été précisément documentés : un rapport serait donc inutile. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF10.

Amendement CF17 de M. Jocelyn Dessigny.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Les plafonds des crédits alloués à la mission Défense par la LPM sont exprimés en euros courants, et non en euros constants : ils ne tiennent donc pas compte des effets de l’inflation.

Le Gouvernement a estimé à 30 milliards l’impact de l’inflation sur la période 2024-2030, soit 4,3 milliards par an, ce qui annule au moins la première marche d’augmentation budgétaire.

Nous demandons que le Gouvernement remette chaque année, au moment du dépôt du projet de loi de finances, un rapport sur l’impact de l’inflation sur les crédits inscrits.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je vous rejoins sur la nécessité de surveiller l’impact de l’inflation sur la LPM, mais les articles 8 et 9 prévoient déjà la production de rapports qui apporteront toutes les informations utiles. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF17.

Amendement CF23 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Nous demandons que, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’évolution des restes à payer de la mission Défense.

L’analyse de l’exécution budgétaire de 2022 montre que les restes à payer, pour la mission Défense, sont passés de 52 milliards en 2017 à 91 milliards en 2022, ce qui représente un doublement en l’espace de cinq ans. Il est indispensable que le Gouvernement fournisse au Parlement des chiffres clairs, afin qu’il soit parfaitement éclairé.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Ces chiffres sont disponibles. Les informations relatives aux restes à payer figurent, tout d’abord, dans les annexes budgétaires. La Cour des comptes, ensuite, en livre une analyse tous les ans, dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire de la mission Défense. Enfin, c’est un sujet qu’examinent régulièrement les rapporteurs spéciaux de la commission des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat : je vous renvoie à leurs différents rapports. Avis défavorable.

Mme Valérie Rabault (SOC). Il va de soi que j’ai lu tous ces documents. Ce que je dis, c’est qu’il faut que le Gouvernement présente une trajectoire incluant ces restes à payer, pour sortir de l’hypocrisie.

La commission rejette l’amendement CF23.

Article 4 : Provision au titre des surcoûts OPEX et MISSINT

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 non modifié.

Article 5 : Carburants opérationnels

Amendements CF21 de Mme Valérie Rabault et CF18 de M. Jocelyn Dessigny (discussion commune).

Mme Valérie Rabault (SOC). Monsieur le rapporteur pour avis, nous avons un désaccord au sujet de l’inflation. L’article 5 émet l’hypothèse d’une hausse « durable » du prix des carburants, mais cela ne veut rien dire. Je propose de fixer un seuil pour clarifier les choses : dès que l’inflation dépasse 50 millions d’euros sur une année, il doit y avoir une revalorisation des crédits.

Pour clarifier les choses, j’ai fait figurer, dans mon exposé sommaire, tous les amendements que nous avons déposés pour prendre en compte l’inflation, et que vous avez rejetés. Je ne peux pas vous laisser dire que vous l’avez prise en compte.

M. Jocelyn Dessigny (RN). L’article 5 prévoit qu’en cas de hausse durable du prix des carburants opérationnels, des crédits supplémentaires seront ouverts, sans plus de précisions. Le présent amendement vise à définir un seuil de déclenchement et un principe de compensation. Une hausse de 10 %, sur trois mois consécutifs, du prix moyen constaté des carburants opérationnels par rapport à la moyenne des prix constatés lors des trois années précédentes déclencherait l’ouverture des crédits supplémentaires correspondants.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. La rédaction de l’article 5 reprend celle de l’article 5 de la précédente LPM. Cet article a fait ses preuves : en 2022, nous avons voté l’ouverture de 225 millions d’euros dans la seconde loi de finances rectificative pour lutter contre l’inflation, notamment concernant le prix des carburants. Il n’y a pas de raison de modifier une disposition qui a permis d’obtenir les crédits nécessaires. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements CF21 et CF18.

Amendement CF19 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Je propose que les hausses de prix des carburants opérationnels soient documentées par l’Insee.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Le Gouvernement s’appuie déjà sur l’Insee pour constater l’inflation passée. Cette précision est donc superflue. Par ailleurs, l’activation de l’article 5 relève d’une décision politique. Ce n’est pas à l’Insee de l’imposer, par la publication d’un chiffre.

La commission rejette l’amendement CF19.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 non modifié.

Article 6 : Effectifs

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 non modifié.

Article 7 : Actualisation

Amendement CF6 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). L’amendement vise à prévoir une actualisation de la LPM fin 2026. Un état des lieux très précis s’impose avant les élections de 2027.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. L’intérêt de la LPM est d’inscrire l’évolution des crédits budgétaires sur une période de sept ans. C’est important pour les armées, mais également pour les industriels, qui doivent avoir une vision de moyen et de long termes pour engager leurs fonds propres dans le développement de projets. À multiplier les actualisations, on risque de réduire la visibilité et, ce faisant, d’aller à l’encontre de l’objectif de la LPM. Par ailleurs, en 2027, la majorité nouvellement élue pourra, si elle le souhaite, s’affranchir de la LPM, en en assumant la responsabilité devant les Français. Il ne me paraît donc pas nécessaire de prévoir ces deux rapports.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Votre argumentaire est pour le moins étonnant. L’amendement vise à nous permettre de mener le débat démocratique de 2027 dans de bonnes conditions, grâce à une meilleure visibilité, et vous répondez que le Gouvernement nouvellement nommé disposera des informations nécessaires. L’enjeu est de permettre, préalablement aux élections, un débat objectivé par des données.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). M. Sitzenstuhl nous a dit qu’il fallait montrer notre attachement à nos militaires en votant cette LPM. Or cela n’a rien à voir : le sens de notre vote ne contredit en rien le soutien que nous leur apportons. La question essentielle est de savoir si le texte est adapté compte tenu du retard pris au cours des dernières années et des nouveaux enjeux de défense apparus en Europe. Il me paraît nécessaire de réaliser un point d’étape avant la fin du quinquennat pour voir où l’on se situe par rapport aux engagements de nos voisins et, surtout, à nos besoins. Je ne comprendrais pas que la majorité s’y oppose.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Je ne partage pas votre point de vue. J’imagine votre réaction si, juste avant l’échéance électorale, on modifiait la LPM : vous nous diriez que nous transformons un instrument régalien en un outil politique destiné à polluer la campagne. Il s’agit précisément de décorréler ces deux dimensions et d’offrir de la visibilité à long terme. Il serait compréhensible que la nouvelle majorité, en 2027, souhaite réviser la LPM.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). J’abonde dans le sens du rapporteur pour avis. La défense fait partie des prérogatives essentielles du Président de la République. Or un nouveau Président sera élu en 2027. Madame Dalloz, plusieurs de vos collègues ont reproché à la majorité, début 2022, d’avoir fait des annonces, notamment sur le nucléaire, affirmant que cela avait pollué la campagne présidentielle. Il faut éviter d’avoir, quelques mois avant l’élection, une discussion sur ce genre de sujets, qui serait inévitablement politicienne.

La commission rejette l’amendement CF6.

M. le président Éric Coquerel. Le ministre a expliqué que la LPM était une loi de base qui serait révisée chaque année. Le Parlement est fondé à prévoir des garanties sans attendre que le ministre ne décide de procéder à la révision.

Amendement CF5 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Il s’agit de prévoir l’élaboration d’un nouveau Livre blanc avant l’actualisation de la LPM de 2027 afin de permettre un véritable débat sur les besoins de la défense française.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. La revue stratégique de défense et de sécurité nationale de 2017 ainsi que la revue nationale stratégique de 2022 ont permis d’actualiser les constats sur l’évolution du contexte stratégique, par exemple en intégrant la programmation des nouveaux champs de conflictualité, comme le spatial, le cyber et les fonds marins. Ces éléments sont pris en compte dans le projet de LPM.

Je ne vois pas en quoi il serait nécessaire de conditionner l’actualisation de la LPM à un nouveau Livre blanc. Il sera de la responsabilité du Président de la République, chef des armées, de déterminer si un nouveau Libre blanc est nécessaire ou si d’autres formes de revue sont possibles, en fonction des changements intervenus et du calendrier. La rédaction de l’article 7 me semble à cet égard satisfaisante.

M. Mounir Belhamiti (RE). Les députés ont toute latitude pour exercer leur pouvoir de contrôle. Hier, dans l’hémicycle – dont les bancs étaient quelque peu clairsemés – nous avons eu un débat, à l’initiative du MODEM, sur l’exécution et le bilan de la précédente LPM. Le projet de loi de finances (PLF) est l’occasion, chaque année, d’exprimer des avis, de corriger des trajectoires, de constater des reports de charges qui résultent de l’évolution de la menace et de la situation internationale. Il me paraît osé, de la part des députés Les Républicains et Socialistes, de nous reprocher de ne pas être suffisamment clairs et transparents sur l’exécution d’une LPM à l’euro près, alors que ni la majorité de M. Hollande, ni les majorités précédentes n’ont respecté les trajectoires budgétaires.

La commission rejette l’amendement CF5.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 non modifié.

Article 8 : Rapport sur le bilan de l’exécution de la programmation

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 non modifié.

Article 9 : Rapport sur les enjeux et l’évolution de la programmation

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 non modifié.

Article additionnel après l’article 9 : Contrôle parlementaire de l’application de la programmation militaire

Amendement CF8 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). L’article 9 de la précédente LPM confiait le soin aux commissions parlementaires chargées de la défense de contrôler l’application de la programmation militaire par le Gouvernement. Or cette disposition ne figure plus dans le projet de loi. Je ne vois pas ce qui justifie sa suppression.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Le retrait de cette disposition fait suite à l’avis du Conseil d’État. Cela étant, je partage votre point de vue quant à la nécessité de mentionner les prérogatives de contrôle des commissions des finances et des commissions chargées de la défense. Avis favorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Nous voterons en faveur de l’amendement car il nous paraît souhaitable de préciser le rôle des commissions.

Mme Véronique Louwagie (LR). Monsieur Belhamiti, pour revenir sur vos propos, je voudrais vous rappeler que le vote est libre. Par ailleurs, vous nous reprochez de ne pas avoir respecté les lois de programmation antérieures, mais le débat porte sur un autre sujet, qui est la discordance entre la LPM et des documents budgétaires présentés par l’exécutif – la loi de programmation des finances publiques et le programme de stabilité. Il est de notre devoir de contrôler l’action du Gouvernement.

La commission adopte l’amendement CF8 (DN52).

Article additionnel après l’article 9 : Rapport sur l’évaluation des programmes de coopération européenne en matière de défense

Amendement CF9 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). L’amendement a pour objet la remise d’un rapport sur l’évaluation des programmes de coopération européenne en matière de défense. En effet, nous savons très bien que nous ne pourrons pas tout financer et que d’autres pays lancent des programmes. Il s’agit de favoriser la coopération ou la mutualisation sur certains sujets.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. La réalisation de programmes en coopération européenne présente plusieurs avantages. Elle permet de réaliser des économies d’échelle, de faciliter l’interopérabilité des matériels et l’action commune ainsi que de développer des équipements souverains. C’est pourquoi nous soutenons des programmes tels que le Scaf – système de combat aérien du futur – et le MGCS – système principal de combat terrestre –, malgré les difficultés que l’on connaît pour faire avancer ces projets ambitieux et lourds.

Les programmes en cours ont déjà été largement commentés par le ministère des armées et par des rapports parlementaires. De surcroît, vous êtes libres de lancer une nouvelle mission d’information sur le sujet. L’information relative à l’évolution des programmes pourra figurer dans les rapports prévus aux articles 8 et 9 du projet de loi. Toutefois, il me paraît important de favoriser les collaborations européennes. J’émettrai donc un avis de sagesse.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). À titre personnel, je voterai l’amendement. Il est important de rappeler l’horizon européen dans lequel nos politiques de défense doivent s’inscrire. Il est nécessaire que nous débattions de la dimension européenne de la LPM. Nous aurons certainement des échanges nourris à ce sujet, en séance, avec le ministre.

La commission adopte l’amendement CF9 (DN53).

Après l’article 9

Amendement CF7 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). L’amendement vise à ce que le Gouvernement remette un rapport sur les moyens de faire apparaître, dans le calcul du déficit public, les dépenses et investissements en matière de défense. La France a un budget de la défense parmi les plus élevés des pays de l’Union européenne. Elle contribue, de ce fait, à la défense de l’ensemble du continent. Il nous serait utile de connaître le niveau du déficit public après déduction des dépenses et investissements en matière de défense tant du point de vue de la comptabilité nationale que de celui des traités européens.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Pour être crédible, la programmation militaire doit être compatible avec la trajectoire globale des finances publiques. La maîtrise des finances publiques est un enjeu de souveraineté majeur, qui renforce notre autonomie. Il ne me semble pas opportun de soustraire les dépenses engagées en matière de défense au respect des exigences relatives aux déficits publics, dont la commission des finances est garante. Avis défavorable.

M. Fabien Di Filippo (LR). Une des leçons de la période que l’on vient de vivre est la nécessité de renforcer notre souveraineté en matière militaire et d’armement. Cela étant, nous subissons aujourd’hui les effets économiques délétères du « quoi qu’il en coûte » décidé par Emmanuel Macron. Vous souhaitez extraire les dépenses liées à la LPM du calcul du déficit, afin que nous puissions nous endetter encore plus avec l’accord de nos partenaires européens. Cela ne nous paraît pas opportun car, in fine, c’est la France qui paiera la facture et supportera l’augmentation du coût de la dette et des taux d’intérêt. Si l’on choisit d’affecter davantage de moyens à notre défense, ce qui est sans doute souhaitable dans le contexte international, il faut se demander comment rééquilibrer les comptes pour qu’ils demeurent soutenables. Le Gouvernement doit nous dire où il fera peser l’effort pour compenser ces dépenses, égales à 1,3 point de PIB.

Mme Valérie Rabault (SOC). Le Haut Conseil des finances publiques a souligné dans son avis que la LPM allait nécessiter la réalisation d’économies dans d’autres domaines. Il a chiffré, sur la base de l’ancienne loi de programmation des finances publiques, le montant des économies à réaliser pour respecter la trajectoire budgétaire qui a été votée. Nous proposons de renforcer la lisibilité des finances publiques pour que chacune et chacun vote de manière éclairée.

La commission rejette l’amendement CF7.

Amendement CF4 de Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault (SOC). Cet amendement vise à ce que les projets annuels de performance mentionnent le taux de disponibilité des matériels et le taux de réalisation des grands équipements. Hormis le rapport de la Cour des comptes de 2022 et le rapport d’information n° 864 de la commission de la défense, qui contient certaines données, il n’y a pas d’information disponible à ce sujet.

M. Christophe Plassard, rapporteur pour avis. Un débat sur le bilan de la LPM 2019-2025 a eu lieu hier après-midi en séance. Les zones de flou dont vous faites état m’amènent à émettre un avis de sagesse.

La commission rejette l’amendement CF4.

Article 10 : Abrogation du titre Ier de la LPM 2019-2025

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 non modifié.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

*

*         *

Puis la commission examine en application de l’article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement (n° 1090) (M. Philippe Brun et M. Sébastien Jumel, rapporteurs).

Le tableau ci-dessous récapitule le sens des avis émis par la commission sur les amendements.

 

N° Amdt

 

 

Place

 

 

Auteur

 

 

Groupe

 

 

Avis de la commission

 

 21

 2

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 44

 2

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 22

 2

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 45

 2

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 42

 2

 M. BRUN Philippe

 SOC

Repoussé

 15

 2

 M. SABATOU Alexandre

 RN

Repoussé

 16

 2

 M. SABATOU Alexandre

 RN

Repoussé

 14

 2

 M. SABATOU Alexandre

 RN

Repoussé

 32

 2

 M. LEFÈVRE Mathieu

 RE

Repoussé

 23

 2

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 46

 2

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 33

 2

 M. LEFÈVRE Mathieu

 RE

Repoussé

 17

 2

 M. SITZENSTUHL Charles

 RE

Repoussé

 40

 2

 Mme ARRIGHI Christine

 Ecolo - NUPES

Repoussé

 18

 2

 M. SITZENSTUHL Charles

 RE

Repoussé

 41

 ap 3

 M. GIRARD Christian

 RN

Repoussé

 19

 ap 3

 M. CABROLIER Frédéric

 RN

Repoussé

 3

 3 bis

 M. SALA Michel

 LFI - NUPES

Repoussé

 5

 3 bis

 Mme DUFOUR Alma

 LFI - NUPES

Repoussé

 7

 3 bis

 Mme DUFOUR Alma

 LFI - NUPES

Repoussé

 10

 3 bis

 M. RAY Nicolas

 LR

Repoussé

 37

 3 bis

 M. RAY Nicolas

 LR

Repoussé

 8

 3 bis

 M. MARTINET William

 LFI - NUPES

Repoussé

 39

 3 bis

 Mme ARRIGHI Christine

 Ecolo - NUPES

Repoussé

 55

 3 bis

 M. JUMEL Sébastien

 GDR - NUPES

Repoussé

 56

 3 bis

 M. JUMEL Sébastien

 GDR - NUPES

Repoussé

 57

 3 bis

 M. JUMEL Sébastien

 GDR - NUPES

Repoussé

 25

 3 bis

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 48

 3 bis

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 26

 3 bis

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 49

 3 bis

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 35

 3 bis

 M. LECAMP Pascal

 Dem

Repoussé

 50

 3 bis

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 51

 3 bis

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 58

 3 ter

 Mme YOUSSOUFFA Estelle

 LIOT

Repoussé

 28

 3 ter

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 53

 3 ter

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 20

 ap 3 ter

 M. DI FILIPPO Fabien

 LR

Repoussé

 30

 Titre

 M. CAZENEUVE Jean-René

 RE

Repoussé

 38

 Titre

 M. LEFÈVRE Mathieu

 RE

Repoussé

 54

 Titre

 M. LACRESSE Emmanuel

 RE

Repoussé

 

*

*         *

Information relative à la commission

La commission a désigné M. Karim Ben Cheikh, rapporteur spécial pour la mission Action extérieure de l’État.

La commission a autorisé la publication du rapport d’information de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, sur le programme de stabilité pour les années 2023 à 2027 et les orientations des finances publiques.


Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 3 mai 2023 à 9 heures

 

Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Christian Baptiste, M. Mounir Belhamiti, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Fabrice Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, M. Benjamin Dirx, Mme Sophie Errante, M. Luc Geismar, Mme Félicie Gérard, M. David Guiraud, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Marc Le Fur, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, Mme Patricia Lemoine, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, M. Louis Margueritte, M. Denis Masséglia, M. Damien Maudet, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, Mme Mathilde Paris, M. Christophe Plassard, Mme Valérie Rabault, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, M. Michel Sala, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy

Excusés. - Mme Émilie Bonnivard, M. Florian Chauche, Mme Alma Dufour, Mme Marina Ferrari, Mme Perrine Goulet, M. Victor Habert-Dassault, Mme Karine Lebon, M. Bryan Masson, M. Jean-Paul Mattei, M. Emeric Salmon, Mme Eva Sas

Assistaient également à la réunion. - Mme Christine Pires Beaune, M. Jean-Luc Warsmann