Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

 

–  Examen du rapport de la mission d’information sur la rationalisation de notre administration comme source d’économies budgétaires (Mme Véronique Louwagie et M. Robin Reda, rapporteurs)              2

–  Commission d’évaluation des politiques publiques relative aux missions Défense et Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation              16

Discussion unique sur l’exécution budgétaire..................16

-          mission Défense : M. Christophe Plassard, rapporteur spécial Préparation de l’avenir ; M. Emeric Salmon, rapporteur spécial Budget opérationnel de la défense

-          mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation : M. Bryan Masson, rapporteur spécial 19

Discussion sur la thématique d’évaluation ...................22

-          Le plan famille (M. Emeric Salmon, rapporteur spécial)

–  Examen, en application de l’article 88 du Règlement, des amendements à la proposition de loi visant à élargir l’assiette de la taxe sur les transactions financières (n° 1297) (M. Christophe Naegelen, rapporteur)              27

  présences en réunion................................29

 


Mercredi
7 juin 2023

Séance de 9 heures 

Compte rendu n° 92

session ordinaire de 2022-2023

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission procède à l’examen du rapport de la mission d’information sur la rationalisation de notre administration comme source d’économies budgétaires (Mme Véronique Louwagie et M. Robin Reda, rapporteurs).

M. le président Éric Coquerel. Mes chers collègues, nous procédons à l’examen du rapport de la mission d’information sur la rationalisation de notre administration comme source d’économies budgétaires, dont Mme Véronique Louwagie et M. Robin Reda sont les rapporteurs.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure. Nous avons le plaisir, ce matin, de vous présenter les conclusions des travaux de la mission d’information, constituée à l’initiative du groupe Les Républicains, relative à la rationalisation de notre administration comme source d’économies budgétaires.

Je remercie l’ensemble de ses membres – outre vos deux serviteurs, Mme Constance Le Grip et MM. Charles Sitzenstuhl, Kévin Mauvieux, Mme Charlotte Leduc, MM. Luc Geismar, Philippe Brun, Mme Lise Magnier, M. Karim Ben Cheikh, Mme Karine Lebon, M. Michel Castellani –, qui, en dépit de l’agenda chargé de ce premier semestre, ont pu participer à nos travaux, jusqu’à en adopter les conclusions jeudi dernier.

Au cours des travaux que nous avons conduits, nous avons reçu une quarantaine de personnes dont deux membres du Gouvernement, six directeurs d’administration centrale, les dirigeants des deux principaux établissements gestionnaires des fonctions publiques territoriale et hospitalière, sans oublier les trois principales associations d’élus ainsi que des personnalités qualifiées.

En guise d’introduction, une série de constats s’impose. Les Français sont très attachés au service public. Nous le sommes aussi et c’est justement la raison pour laquelle il nous semble que nul ne peut se satisfaire que nous entendions si fréquemment nos concitoyens déplorer que, désireux d’obtenir de l’administration un conseil, une prestation, une autorisation ou un dédommagement, ils se retrouvent face à une porte close, à une avalanche de papiers à comprendre puis à remplir ou encore à des recommandations, injonctions et interdictions contradictoires. À titre d’exemple, 138 cases peuvent être cochées sur l’imprimé CERFA du formulaire de demande du revenu de solidarité active (RSA).

Deux objectifs vont donc de pair : non seulement préserver, mais réarmer notre secteur public, et contribuer au redressement des comptes de la Nation, ce qui, je le sais, mobilise beaucoup d’entre nous sur plusieurs bancs.

Dans une première partie, le rapport pose un diagnostic juridique et budgétaire sur l’efficacité parfois trop faible de l’administration. Les dépenses de personnel et de fonctionnement consacrées aux administrations publiques placent la France dans une situation très écartée de la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

L’administration française est à la fois rigide à cause du statut de la plupart de ses agents et foisonnante, c’est-à-dire qu’elle prospère dans des structures nombreuses, plus ou moins bien articulées entre elles. Nous avons d’ailleurs noté des coordinations défaillantes entre les compétences de l’État et des autres collectivités publiques, en particulier dans la sphère locale, mais aussi au sein de l’État lui-même.

Une observation malheureuse se dessine : l’organisation de notre administration a des effets négatifs aussi bien sur ceux qui font appel à elle qu’à l’égard de ceux qui la servent au quotidien. À titre d’exemple, nous nous sommes penchés sur le thème des formulaires, le stock de formulaires CERFA s’établissant à 1 800. Ils sont très régulièrement refondus : là aussi, l’idée est souvent d’améliorer les choses ou de tenir compte du dernier amendement parlementaire adopté, mais une baisse semble aisée et nécessaire. Songez qu’il existe quatre documents différents pour déclarer une course à pied ou cycliste sur la voie publique selon qu’elle soit chronométrée ou non !

Le travail dans l’administration est de moins en moins motivant. Au fil des années, suivant l’idée louable de vouloir connaître au mieux la performance des administrations publiques et de leurs agents afin d’en rendre compte à leurs supérieurs comme aux citoyens et d’identifier les dysfonctionnements, se sont multipliées les tâches de reporting, c’est-à-dire de conception, puis de remplissage, de compilation et enfin d’analyse d’indicateurs.

Dans une seconde partie, nous étudions les points positifs, mais aussi les trop nombreuses lacunes des plans de modernisation conduits au cours des quinze dernières années.

Que dire de la révision générale des politiques publiques (RGPP), engagée par le Président de la République Nicolas Sarkozy et coordonnée par le questeur Éric Woerth, alors ministre du budget et de la réforme de l’État ?

La RGPP a permis d’obtenir des résultats tangibles sur le plan budgétaire, de l’ordre de 12 milliards d’euros d’économies, mais sa méthode ne s’est pas révélée appropriée. Par ailleurs, ces économies n’auront été qu’une inflexion, vite rattrapée par la réalité de la demande citoyenne, plutôt qu’un changement structurel. Prenant la suite de la RGPP avec l’élection du Président de la République François Hollande, la modernisation de l’action publique (MAP) procédait d’une logique complètement différente, les économies budgétaires n’étant pas affichées comme une ambition majeure. De fait, sur un chiffrage estimatif de 5 à 7 milliards d’euros, moins de la moitié est vérifiable.

Le dernier programme que notre pays a connu, lancé par l’actuel Président de la République, s’appelait Action publique 2022. Il a permis d’engager des chantiers importants, mais la double crise du mouvement social des gilets jaunes puis de l’épidémie de covid-19 ont interrompu son élan de transformation. Le bilan financier est délicat à établir, puisque l’essentiel des réformes visant à rendre l’administration plus efficace n’ont pas pu être conduites.

M. Robin Reda, rapporteur. À mon tour, je remercie Mme Véronique Louwagie pour sa collaboration. C’était un plaisir de travailler avec elle sur ce sujet, qui mobilise l’action publique depuis longtemps. Nous sommes nombreux à être attachés à ce que l’État soit à la fois humble, qu’il sache déléguer et faire confiance, mais aussi à ce qu’il soit exemplaire en matière de gestion publique.

Venons-en à nos préconisations afin de réduire les contraintes administratives en faisant confiance au terrain et de limiter les coûts de fonctionnement de l’État, mais aussi de ses satellites. D’abord, un triple effort doit être conduit s’agissant du stock et du flux des normes, des procédures et des contrôles de l’État vis-à-vis des collectivités territoriales.

Le simple fait de supprimer trois normes, circulaires, notes ou instructions en contrepartie de l’instauration d’une nouvelle norme de contrainte équivalente permettrait, selon notre chiffrage, une économie supplémentaire d’environ 9,4 millions d’euros par an, soit 65,8 millions d’euros d’ici à 2030, si l’on en croit les gains enregistrés grâce à la stratégie du « deux pour un » déjà en partie appliquée depuis 2018.

Il conviendrait en outre que les lettres de cadrage envoyées à chacun des membres du Gouvernement en amont du dépôt du projet de loi de finances (PLF) intègrent ce levier de simplification, et que les études d’impact de tous les projets de loi comprennent une forme de scoring de leurs dispositions. Chaque ministre pourrait ainsi réaliser des préconisations en matière de baisse de la dépense publique, mais aussi en termes de transformation publique. Une des grandes tensions de notre rapport vise à mettre en lien le temps de l’urgence de la dépense publique et le temps long de la transformation publique, qui nécessite parfois plus d’investissements pour générer ensuite des économies.

Sur le modèle de ceux concernant la déontologie ou la laïcité, nous proposons que chaque service se dote, à la bonne échelle hiérarchique, d’un référent chargé de la simplification administrative, avec la cible d’une économie d’un milliard d’euros d’ici à 2027, ce qui est absolument réaliste lorsque l’on réfléchit à l’échelle de chaque ministère. Il reviendrait donc à ce référent d’être à l’écoute de ses collègues et des usagers pour, dans un rapport d’étonnement permanent, relever les errements organisationnels qui peuvent être corrigés à droit constant. L’objectif vise ici à faire confiance aux agents de terrain, qui voient les incohérences et les lourdeurs au quotidien.

Une autre proposition est relative au contrôle de légalité des collectivités territoriales. Nous suggérons sa suppression, compte tenu de son caractère aléatoire : 7 millions d’actes sont aujourd’hui produits par les collectivités territoriales et 20 % sont contrôlés par plus de 1 000 équivalents temps plein (ETP) dans les préfectures. Nous prônons un renversement de perspective, pour promouvoir la culture de la confiance a priori envers les collectivités territoriales.

Le contrôle de légalité relève du dernier alinéa de l’article 72 de la Constitution. Dans l’attente d’une révision de la Constitution qui pourrait intégrer une suppression de ce contrôle, nous proposons une expérimentation « territoires zéro contrôle a priori pendant trois ans ». En réalité, les contrôles se feraient sur le temps long, comme le font par exemple les chambres régionales et territoriales des comptes, à intervalles distants.

Ensuite, des répétitions peuvent facilement être évitées dans les démembrements de l’État, qui n’ont pas tous la même plus-value. On dénombre ainsi 314 commissions consultatives et délibératives placées directement auprès de la Première ministre, des ministres ou de la Banque de France. Nous en avons calculé pour la première fois le coût total, à savoir plus de 21 millions d’euros de fonctionnement par an, car les annexes budgétaires retiennent une présentation sans aucun agrégat.

Il convient néanmoins de relever que ce montant est inférieur à la réalité, puisqu’il ne correspond qu’au défraiement des participants aux réunions et aux coûts afférents aux menues tâches comme la reprographie. En revanche, il exclut le fait qu’une certaine quotité de travail est assurée par des agents publics pour le secrétariat de ces commissions. Dans notre hypothèse, nous calculons que le coût de ces structures bondirait à 33,4 millions d’euros par an. Une économie d’un tiers semble réalisable : par exemple, 37 de ces conseils ou commissions ne se sont pas réunis en 2021 et 86 ne l’ont pas fait depuis trois ans.

Une seconde source de dépenses pouvant être rationalisée est celle des opérateurs de l’État. Un autre axe utile serait l’immobilier : nous avons identifié 7 millions de mètres carrés de bureaux publics inutilisés aujourd’hui sur les 22 millions dont dispose l’État.

Au total, nous proposons donc un plan chiffré, à la fois réaliste et ambitieux, mobilisant des facettes complémentaires de l’action publique et de la gestion des services qui la font vivre, pour une économie incrémentale de 15 milliards d’euros, soit une proportion de 3 à 4 % du budget de l’État, qui contribuerait à un tiers de notre effort de réduction de dépenses pour tenir nos engagements européens, à savoir un déficit public n’excédant pas 3 % du produit intérieur brut (PIB).

À ce titre, je tiens à remercier MM. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques, et Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Ils sont venus longuement devant notre mission exposer les actions du Gouvernement en la matière. La priorité consiste ainsi à préserver le service public pour les usagers, les entreprises, mais aussi les agents publics, qui sont souvent les premières victimes de lourdeurs bureaucratiques que nous souhaitons alléger.

M. le président Éric Coquerel. Ce rapport fournit l’occasion de saluer l’exemplarité des millions de fonctionnaires qui œuvrent au service de l’État et dont le statut les protège de toutes les pressions. L’administration et l’État bénéficient d’une armature que bien des pays nous envient encore.

Votre rapport poursuivait dès le départ un objet particulier : simplifier et moderniser l’action publique, dans l’objectif de réaliser des économies. Pour ma part, j’aurais tendance à considérer que cette simplification et cette modernisation doivent avant tout viser une plus grande efficacité. Je crains que certains ne se saisissent de votre rapport pour estimer qu’il y a trop de moyens et de personnels administratifs, à l’instar des mesures qui avaient été prises pour supprimer le poste d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Parmi les propositions que vous avez formulées, trois m’interrogent particulièrement. La première concerne le bouclier déontologique. En échange d’une plus grande attention de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), il s’agirait de faciliter les allers et retours avec le secteur privé, que d’aucuns appelleraient du pantouflage. Cette piste ne me satisfait que très modérément, surtout à l’aune des affaires récentes.

Une autre de vos recommandations vise à supprimer le contrôle de légalité sur les actes des collectivités territoriales. J’aimerais en savoir plus. Je tiens à ce que les lois soient les mêmes pour tous sur tout le territoire et les préfets en sont les garants.

Enfin, une de vos recommandations concerne les petits opérateurs. S’agit-il d’intégrer le travail de ces opérateurs portant sur des domaines très précis à celui de l’administration ou bien de les supprimer purement et simplement, en laissant penser que leur action est inutile ? Pouvez-vous éclaircir ces points ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je voudrais d’abord remercier les rapporteurs de la mission d’information pour la très grande qualité du travail fourni sur un sujet crucial concernant l’avenir de nos services publics. Vous l’avez dit, vos conclusions sont à la fois distinctes et complémentaires du dispositif de revue des dépenses annoncé en janvier dernier par le Gouvernement et qui trouvera un premier aboutissement dans les assises des finances publiques, prévues le 19 juin. Ce nouveau chantier devrait alimenter les travaux du Parlement dès l’examen des projets de lois de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024. Je ne peux que vous encourager à traduire votre rapport par des amendements dans les prochains textes financiers.

Comme vous le soulignez dans votre rapport, le Gouvernement est engagé depuis 2017 dans le processus de rationalisation de l’administration que vous appelez de vos vœux. Bien qu’interrompu par les crises, je crois que le programme Action publique 2022 a eu le mérite nous fournir un legs assez important. Je pense notamment à la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite ESSOC, qui a introduit un droit à l’erreur, ou encore à la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite ASAP, qui a rapproché du terrain nombre de décisions individuelles, mais aussi à cet outil d’impulsion et de suivi qu’est le comité interministériel de la transformation publique (CITP), dont le dernier s’est tenu il y a trois semaines.

Je lis également dans vos travaux que vous saluez la démarche de mutualisation que permet le réseau France services, qui est considéré comme un véritable succès aujourd’hui. En revanche, vous semblez plus circonspects quant aux résultats concrets du fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP), créé au début de la législature précédente. Je rappelle que ce fonds traduit l’idée selon laquelle les économies et la modernisation nécessitent en premier lieu de faire des investissements et de mettre en place des objectifs.

Le Gouvernement annonce à ce titre la réalisation d’économies non négligeables, de l’ordre de 100 millions d’euros à court terme, puis de 600 millions d’euros une fois tous les chantiers achevés. Le FTAP a d’ailleurs connu un réabondement de 300 millions d’euros pour 2023 à 2025 et s’est vu doter d’une nouvelle doctrine d’emploi plus rigoureuse. Madame et Monsieur les rapporteurs, quelles sont vos préconisations pour renforcer l’efficacité des projets soutenus par ce fonds et répondre aux observations récentes de la Cour des comptes ?

Parmi les dix recommandations formulées dans votre rapport, auxquelles j’adhère globalement, deux retiennent particulièrement mon intérêt.

Premièrement, vous préconisez de réduire le nombre des commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès de la Première ministre, des ministres ou de la Banque de France. Il faut souligner que la majorité actuelle a déjà engagé ce processus puisque le nombre de ces commissions s’élevait à 394 dans l’annexe « jaune » jointe au PLF pour 2020 et à 314 dans celui pour 2023, soit une diminution de 20 %. Nous devons continuer ce mouvement de rationalisation. Avez-vous un objectif dans ce domaine ?

Deuxièmement, vous préconisez de désigner un référent chargé de la simplification administrative dans toutes les directions ministérielles et, à terme, dans tous les services publics. Cette proposition me paraît intéressante mais pourriez-vous nous préciser comment concrètement ce référent opérerait-il ? À quel niveau serait-il placé ?

Enfin, je suis très favorable au renforcement des pouvoirs dérogatoires du préfet. Quel est votre avis à ce sujet ? Il s’agirait ainsi de placer les décisions au plus près du terrain, pour être plus réactif par rapport aux attentes des élus et de nos concitoyens.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure. M. le président, vous avez rappelé l’importance du rôle des agents publics et de leur statut. Dans ce rapport, nous nous sommes attachés à trouver des pistes d’amélioration de leurs conditions de travail, qui sont parfois rendues difficiles par un certain nombre de missions et de procédures supplémentaires qu’on leur a imposées en sus de leurs missions habituelles, sans que jamais on ne leur en retire. Il est donc nécessaire de réfléchir à la réorganisation des services, afin que les missions confiées aux agents correspondent à leurs conditions de travail.

Vous avez évoqué la question du statut. Dans l’introduction, nous avons exclu deux éléments du périmètre du rapport. Le premier concerne un travail équivalent, qui aurait pu être conduit concernant la réorganisation des collectivités territoriales. De plus, des travaux pourraient utilement être menés sur le statut des agents publics, au regard de deux constatations : le recrutement est peu efficient – des postes sont vacants notamment dans l’éducation nationale – et la gestion de carrière manque de souplesse.

M. le président, vous indiquez par ailleurs que vous n’adhérez pas nécessairement à une diminution de la dépense publique car elle pourrait conduire à une diminution du nombre d’agents. Nous n’avons pas retenu ce prisme. En réalité, nos préoccupations étaient de trois ordres : l’amélioration de la qualité des services pour les citoyens, l’amélioration des conditions de travail pour les agents et le souci de la dépense publique et de son impact.

Vous avez évoqué en outre la question du bouclier déontologique. L’idée consiste à favoriser effectivement les allers et retours entre les secteurs privé et public, pour ne pas priver l’État de talents et répondre aux difficultés patentes de recrutement.

Vous avez mentionné vos doutes concernant la proposition de suppression du contrôle de légalité. Notre rapport et l’ensemble de ses recommandations s’inscrivent dans un dispositif qui vise à renoncer à une culture du contrôle pour privilégier une culture de la confiance. Il ne s’agit pas de ne plus contrôler, mais d’effectuer des contrôles d’une autre manière. C’est la raison pour laquelle nous proposons l’expérimentation « territoires zéro contrôle a priori » pendant une certaine période et la réalisation de contrôles a posteriori.

Enfin, s’agissant des opérateurs, il n’existe pas de modes opératoires précis et déterminés dans ce rapport. Il s’agit simplement de faire un état des lieux et de bien déterminer le rôle de chacun. Je rappelle d’ailleurs que nos collègues Mme Lise Magnier et M. Jean-Paul Mattei avaient rédigé un rapport à l’issue de leur mission d’évaluation des relations entre l’État et ses opérateurs. Celui-ci listait notamment un certain nombre de propositions concernant le rôle des opérateurs et la manière dont ils pourraient mieux intervenir, à travers des contrats d’objectifs et de moyens (COM) plus précis. Nous proposons quant à nous de réaliser une revue de leur rôle.

M. Robin Reda, rapporteur. Nous considérons qu’il faut toucher à l’administration, notamment à l’administration d’État, d’une main tremblante. Les trois dernières expériences, assez différentes, de la RGPP, de la MAP et du programme Action publique 2022 nous permettent d’aboutir à un nouveau contrat de méthode. L’heure n’est plus à la réduction martiale du nombre d’emplois publics ou de fonctionnaires. Nos objectifs visent la bonne maîtrise des dépenses publiques, l’efficacité des emplois publics associés au service public et donc à la qualité pour les usagers.

Aujourd’hui, il ne s’agit pas de réduire l’emploi public en volume. La RGPP a été économe en volume entre 2007 et 2012 puisqu’elle a généré 12 milliards d’euros d’économies, mais chacun reconnaît aujourd’hui que l’administration de l’État s’est paupérisée, notamment dans les territoires. La MAP n’affichait pas de but d’économie budgétaire, mais s’est limitée à une forme de remue-méninges un peu plate et sans réelles avancées. Le programme Action publique 2022 avait pour ambition de faire la synthèse entre des économies budgétaires et une transformation de l’action publique sur le temps long.

Notre rapport suggère précisément d’inscrire une transformation de l’administration publique dans le temps long, au-delà des soubresauts politiques. La volonté politique doit exister pour piloter cette transformation à haut niveau, mais elle doit aussi se faire dans le temps long, pour pouvoir réduire ce « 3 % bureaucratique », c’est-à-dire les quelques 15 milliards d’euros que nous préconisons d’économiser.

Dans cet esprit, il faut savoir parfois investir pour économiser. Telle est la logique du FTAP, une des préconisations du programme Action publique 2022, mise en œuvre à la fin du quinquennat précédent. Ce dispositif avait comme objectif pour les ministères de dégager des économies pérennes. Ainsi, 764 millions d’euros ont été dépensés de 2018 à 2022, pour un équivalent de 870 millions d’euros économisés de manière pérenne.

Mais nous pouvons aller plus loin. Les ministres Attal et Guerini ont reconnu la nécessité de diversifier le FTAP, qui s’est beaucoup concentré sur les ministères dont l’ingénierie est reconnue en matière de transformation publique, notamment celui de l’économie et des finances, particulièrement la direction la générale des finances publiques (DGFiP). De fait, l’outil France connect et le site impôts.gouv.fr ont suscité une réelle satisfaction de la part des usagers.

Le FTAP peut être réparti plus intelligemment, tout en accompagnant mieux les ministères et en réalisant un meilleur contrôle parlementaire à l’occasion des prochains exercices budgétaires. Je retiens, M. le rapporteur général, que vous souhaitez que nos préconisations en matière de rationalisation de nos dépenses publiques se matérialisent, à la fois à court terme et à plus long terme. Nous ne manquerons pas d’essayer de transformer les préconisations du rapport en propositions lors du débat budgétaire de l’automne.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je remercie nos deux collègues pour leur travail sur un sujet complexe. J’ai été particulièrement sensible aux passages du rapport, relatifs aux opérateurs de l’État. Je pense en effet que leur démultiplication dans notre pays depuis vingt ans a contribué à affaiblir l’autorité de l’État. Par conséquent, son renforcement doit s’accompagner d’une baisse du nombre d’opérateurs et d’une reprise d’un certain nombre de compétences par les administrations centrales.

J’ai bien compris votre raisonnement sur les collectivités territoriales. J’estime qu’une rationalisation pourra être menée au niveau des collectivités territoriales quand on aura réussi à supprimer au moins un échelon de collectivité. Chez moi, en Alsace, il existe un projet de reprise des compétences régionales par la collectivité européenne d’Alsace. Il faut encourager ce genre d’initiatives.

Enfin, ma dernière question s’adresse Mme Véronique Louwagie, de manière gentiment provocatrice. J’ai toujours lu très attentivement les amendements que vous déposiez en PLF, notamment le fameux amendement de « débureaucratisation » du groupe LR. Dans celui-ci, vous parliez de 15 milliards d’euros d’économies annuelles, mais dans votre rapport, vous escomptez 15 milliards d’euros d’économies cumulées d’ici à 2030. Comment expliquez-vous cette différence ?

Mme Mathilde Paris (RN). Je vous remercie pour ce travail sur la rationalisation de notre administration comme source d’économies budgétaires. Nous partageons vos constats concernant la bureaucratie, la multiplication des opérateurs, les doublons et la lourdeur de l’administration française. Ces maux sont la conséquence d’une certaine inertie du service public, ainsi que du manque d’organisation entre les opérateurs.

Néanmoins, diverses parties demeurent incomplètes et imprécises, notamment concernant les administrations visées par les souhaits d’économie. Nous n’oublions pas l’affaiblissement généralisé des services publics de proximité orchestré par des coupes budgétaires aveugles menées dans le cadre de la RGPP à partir de 2007. L’exemple le plus marquant de cette politique a concerné la suppression de 35 000 postes de policiers et de gendarmes, réalisée sous l’ère Sarkozy.

Ce rapport s’attaque également au sujet des opérateurs, qui symbolisent l’une des formes de démembrements de l’État la plus répandue. En 2023, on recense ainsi 438 opérateurs de l’État disposant de 406 932 équivalents temps plein travaillé (ETPT) sous plafond et de 76,6 milliards d’euros de financement publics répartis entre cinquante-six programmes, soit une hausse de 17,5 % par rapport à 2022. L’administration française se caractérise par une véritable rigidité et une bureaucratie trop fortement ancrée, participant à la dégradation des services proposés.

Le Rassemblement national défend une véritable simplification administrative, qui doit s’accompagner d’un objectif d’efficacité et d’un ancrage dans les territoires. Nous notons quelques efforts proposés en ce sens dans le rapport, notamment en vertu de l’intégration de l’objectif de réduction et de simplification des normes dans les lettres de cadrage adressées par la Première ministre à chacun des membres du Gouvernement en amont du dépôt du PLF. Je pense également au souhait de la désignation d’un référent chargé de la simplification administrative dans toutes les directions ministérielles et, à terme, au sein de tous les services publics. La simplification administrative est une solution simple et efficace pour réaliser des économies budgétaires, mais les quelques mesures proposées par le rapport paraissent insuffisantes. Comment aller plus loin dans la simplification administrative afin d’enrayer l’obsolescence du système actuel ?

M. Patrick Hetzel (LR). Les dix recommandations du rapport sont pertinentes, même si je souhaite revenir sur certaines d’entre elles. Vous évoquez en premier point la gestion immobilière de l’État, qui demeure, il est vrai, un angle mort. Il y a là un certain paradoxe : l’État engage des actions pour limiter les passoires thermiques, mais son parc immobilier en comporte lui-même de nombreuses. Un travail important doit donc être conduit dans ce domaine.

La deuxième recommandation vise à supprimer trois normes à chaque fois que l’on en crée une nouvelle. Cette proposition avait déjà été effectuée à de multiples reprises, mais elle ne s’est jamais traduite en actes. Comment comptez-vous faire de cette proposition une réalité tangible ?

Ensuite, vous évoquez avec justesse les études d’impact des projets de loi, qui sont souvent encore incomplètes. Vous préconisez en outre la création d’un référent chargé de la simplification administrative dans chaque administration. L’idée semble pertinente, mais il faudra veiller à ce que ce référent n’édicte pas à son tour de nouvelles normes.

Enfin, à la suite du député Charles Sitzenstuhl, je rappelle à mon tour l’existence d’un projet pour faire en sorte que les compétences régionales soient concentrées autour de la collectivité européenne d’Alsace, ce qui permettrait de supprimer un échelon administratif.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Je salue à mon tour ce rapport, mais aussi le rôle souvent ingrat de l’administration et des fonctionnaires. Mme Louwagie, vous soulignez le nombre de CERFA existants, mais la problématique n’est-elle pas à chercher du côté du législateur ?

Vous évoquez ensuite la possibilité d’une économie substantielle grâce à l’expérimentation de la suppression du contrôle de légalité a priori. Quelle estimation financière faites-vous dans le cas d’une généralisation de cette mesure ? En outre, le contrôle a priori offre une certaine sécurité juridique. En cas de suppression, nos collectivités territoriales et leurs représentants ne courent-ils pas un risque ?

Vous préconisez par ailleurs une meilleure gestion immobilière de la part de l’État, qui permettrait à la fois de mieux gérer la dépense publique, mais aussi d’améliorer le cadre de travail des agents et l’accueil des usagers. Ne pensez-vous pas qu’il faille laisser le temps à l’Agence de gestion de l’immobilier de l’État (AGILE) de faire ses preuves dans sa mission de valorisation des biens de l’État ? Vous avancez notamment l’idée d’une rationalisation des parcs de bureaux des ministères, afin de réduire les coûts d’entretien et de loyer. Vous estimez d’ailleurs une économie substantielle des dépenses de charges, de loyer et d’entretien de l’ordre de 975,88 millions. À ce titre, on peut se réjouir que le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales ait d’ores et déjà élaboré une nouvelle manœuvre qui permettrait une économie de la surface occupée et une réduction de l’empreinte écologique d’ici à 2027.

Avez-vous ciblé d’autres postes pouvant conduire à un tel type de mutualisation ? Dans quelle mesure celle-ci pourrait-elle être généralisée ? Quelles économies peut-on espérer ? N’existe-t-il pas des postes et des services qui pourraient faire l’objet d’une restructuration en moyens humains ? Je pense notamment aux front office ou back office initiés par Bercy il y a quelques années. Comment rassurer nos administrés très attachés à leur service public, afin que cette mutualisation n’engendre pas de perte d’efficience ?

Mme Christine Pires-Beaune (SOC). Je félicite à mon tour les rapporteurs pour le travail fourni et leur exposé, clair, précis et honnête. À la page 61, le rapport indique que « France connect constitue le prolongement d’un chantier débuté en 2016 : cela restera donc une des réussites de la MAP ». Je remercie les rapporteurs pour leur objectivité. Le Gouvernement actuel a en effet la fâcheuse habitude de rebaptiser certains dispositifs pour s’en approprier la paternité. Je pense par exemple aux « maisons de service public », créées en 2016 et devenues les « maisons France services ».

Ensuite, si certaines propositions du rapport me semblent intéressantes, comme la lutte contre les doublons entre services déconcentrés et services de l’État, nous sommes assez dubitatifs sur certaines autres propositions et leur chiffrage. Je pense notamment à la septième recommandation, qui vise à la création d’un référent chargé de la simplification administrative dans toutes les directions ministérielles. Vous estimez l’économie générée à un milliard d’euros par an en régime plein à partir de 2027 et 5,5 milliards d’euros d’ici à 2030, soit un tiers des 15 milliards d’euros d’économies évoquées dans votre rapport. Quelle méthodologie avez-vous utilisée pour parvenir à ce chiffrage ?

Si je partage votre optimisme sur les économies pouvant être générées, la méthode préconisée pour les opérateurs me laisse un peu perplexe. Réduire d’un tiers la subvention des opérateurs employant moins de 250 personnes part du postulat que plus il y a de personnel, plus on est efficace. Je ne partage pas cette vision du « big is beautiful ».[BR1] En matière d’agence, je prône un examen au cas par cas.

Enfin, je souhaite savoir quelle suite vous envisagez afin que vos recommandations puissent s’appliquer.

Mme Lise Magnier (HOR). Vos préconisations semblent à la fois justes et réalistes pour parvenir à une meilleure efficacité de la dépense. J’y vois surtout une volonté de simplification administrative, à la fois pour nos concitoyens usagers, mais aussi pour les agents des services publics. Par la mise en œuvre de vos recommandations, vous tendez à moderniser le management au sein de nos administrations et donc à améliorer les conditions de travail de nos fonctionnaires, qui le méritent et qui l’attendent.

Avez-vous identifié un exemple très concret d’amélioration du service public, de simplification administrative, ayant généré des économies tangibles ? Ensuite, vous envisagez de supprimer le contrôle de légalité pour favoriser une culture de confiance et de responsabilité des collectivités territoriales. Vous suggérez ainsi une expérimentation « territoires zéro contrôle a priori ». Ne pourrait-on pas considérer que la certification de comptes de certaines collectivités territoriales par les CRTC devrait les libérer de ce contrôle de légalité ? Je pense notamment aux vingt-cinq collectivités territoriales ayant participé à l’expérimentation de certification, dont le bilan a été dressé par la Cour des comptes en janvier dernier.

Karim Ben-Cheikh (Écolo-NUPES). J’étais membre de cette mission dont je salue le travail et regrette de n’avoir pas pu assister aux différentes auditions, pour des raisons d’aléas électoraux que vous connaissez.

Je me contenterai donc d’apporter un témoignage de terrain, celui de quelqu’un ayant passé seize années au ministère des affaires étrangères, avant d’être élu député. Ce ministère est considéré par tous comme le « bon élève » en matière de politique de rationalisation et de modernisation, ou du moins comme le bon élève dans la mise en place de la RGPP et de la MAP.

Ce ministère a également procédé à l’extinction de deux corps de diplomates, à l’ouverture massive à l’emploi de contractuels, à l’interministérialisation des emplois, toutes catégories confondues, à la rationalisation des procédures internes par la mise en place d’un outil de communication, le « portail diplomatie », à la dématérisalisation des démarches pour les utilisateurs du service public consulaire avec France consulaire et France visas.

Quel ont été les résultats de ces politiques ? En trente ans, les effectifs ont décru de 50 %, le budget diminuant à peu près dans les mêmes proportions. Les objectifs d’économies budgétaires que vous plaidez dans votre rapport ont donc été pleinement atteints. Mais pour quelle réalité ? Les consulats ne sont plus en mesure de remplir leurs principales missions vis-à-vis de nos compatriotes à l’étranger. Les instituts culturels sont sommés d’asseoir leur programmation sur des recettes locales et ne sont plus en mesure de conduire une politique d’influence culturelle ambitieuse là où nous en avons besoin. L’influence française est en recul en Afrique de l’Ouest, et notamment au Sahel et le pays en est réduit à se redéfinir comme « puissance d’équilibre ».

Après avoir été pendant trente ans le bon élève des politiques de rationalisation et de modernisation, ce ministère se retrouve avec des agents en épuisement professionnel, ou burn out, des diplomates en grève et une communauté française à l’étranger qui se sent abandonnée. Bien que je salue l’ampleur du travail accompli, vous comprendrez donc mon scepticisme profond à l’égard d’un rapport dont le biais budgétaire me semble trop présent, au moment où il est urgent de réarmer des services publics par essence coûteux, comme ceux de l’éducation ou de la santé.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Au-delà de ce rapport sérieux proposant des recommandations sérieuses, la majorité nous prépare un futur budget mettant principalement l’accent sur les économies et les coupes budgétaires sérieuses. Ces mesures ont un effet sur la qualité de nos services publics. Certes, ce rapport adopte une approche moins axée sur les aspects budgétaires et présente une méthode subtile qui cible des points discutables.

Néanmoins, derrière les bonnes intentions, n’y aurait-il pas là un moyen de faire accepter de futures décisions économiques impopulaires et justifiant la suppression de postes supplémentaires ? L’intégration de l’objectif d’une réduction et d’une simplification des normes dans les lettres de cadrage annonce également la couleur, celle d’un nouveau palier dans les politiques d’austérité, en accord avec les efforts supplémentaires prévus dans le programme de stabilité et la poursuite de redressement des comptes publics. La dernière recommandation, qui préconise la réduction d’un tiers des subventions accordées aux opérateurs employant moins de 250 personnes est particulièrement révélatrice.

Ne devons-nous pas nous attendre une fois de plus à des coupes aveugles, mettant directement en péril l’existence même de nos missions régaliennes ?

Mme Véronique Louwagie, rapporteure. Dans la première partie, nous avons rédigé un historique des actions conduites dans le cadre de la RGPP, de la MAP et du programme Action publique 2022. Tous les gouvernements se sont donc intéressés à cette question, de différentes manières et avec des résultats différents. Pour la première fois, une mission parlementaire s’est saisie de ce sujet, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Ensuite, afin d’obtenir des résultats au regard des recommandations que nous portons, le Gouvernement et l’exécutif au sens large doivent intégrer ce changement de culture, que nous appelons de nos vœux. Il s’agit ainsi d’instaurer une culture de confiance et non plus une culture de contrôle. Cette démarche aboutira à mon avis à une plus grande satisfaction de la part de nos citoyens si elle s’effectue au plus près d’eux, afin qu’ils en profitent. Elle pourra aussi profiter à nos agents, notamment dans le domaine de la santé ou de l’éducation. Dans la santé, le taux d’absentéisme des soignants et des infirmiers est actuellement important ; il peut atteindre jusqu’à 25 % dans certains cas. Dans des établissements hospitaliers, les cadres des services infirmiers, qui devraient être là pour organiser les process et le développement des carrières de leurs agents, sont contraints de passer leur temps à remplir les plannings de leurs infirmiers et de leurs agents. De fait, les agents souffrent, les dépenses augmentent et le service n’est pas à la hauteur des attentes.

De même, le ministère de la santé et de la prévention nous a indiqué avoir recueilli 8 400 données chiffrées pour chaque agence régionale de santé (ARS) et avoir publié 4 300 pages d’instructions à destination de ces mêmes ARS. Ces dernières doivent ensuite en prendre connaissance et organiser la répartition des tâches.

Il nous faut également travailler dans le domaine de la numérisation, mais nous avons peu entendu jusqu’à présent le mot « simplification » dans la transformation de l’action publique. Il faut donc étudier l’ensemble des missions des agents, pour parfois les modifier et le cas échéant, les supprimer. Tel serait le rôle du référent chargé de la simplification, qui serait déjà un agent en poste. À l’écoute de ses collègues et des usagers, il pourrait faire un point sur les errements organisationnels qui peuvent être corrigés, afin de renforcer son service, d’apporter une valeur ajoutée et de renforcer la reconnaissance des membres de son équipe.

Dans ce cadre, un certain nombre de reporting demandés aux agents pourraient être supprimés. Pourquoi, au nom de la transparence et de la traçabilité, opérer un reporting tous les jours de l’année pour certaines missions ? Ne serait-il pas possible de ne le faire qu’un mois dans l’année ? Encore une fois, il s’agit d’inculquer cette culture de la confiance.

M. Sitzenstuhl, les députés LR avaient effectivement déposé des amendements intitulés « sobriété bureaucratique ». La terminologie peut être modifiée, pour évoquer plutôt la « sobriété administrative ».

S’agissant des perspectives financières proposées dans le rapport, nous ne pouvons pas nous engager en évoquant la diminution du nombre d’agents ou la diminution des dépenses en milliards d’euros : cela ne parle plus à nos concitoyens. C’est la raison pour laquelle nous avons établi une programmation, avec une incidence dès 2024, chiffrée en millions d’euros sur un certain nombre de nos recommandations : pour arriver à des milliards, il faut additionner diverses séquences de plusieurs millions d’euros. Enfin, ce rapport ne prétend pas être exhaustif : il faudrait également aborder l’organisation des collectivités territoriales, mais aussi le statut des agents publics et de la fonction publique.

M. Robin Reda, rapporteur. J’observe que les constats sont globalement partagés par les différents groupes, même si les solutions peuvent varier.

M. le rapporteur général a demandé à quels niveaux hiérarchiques le référent chargé de la simplification administrative serait placé au sein des administrations. Cela dépendra naturellement de la nature de l’administration, de la taille des ministères et de leurs services. Cependant, nous imaginons que ces référents doivent être situés à des niveaux hiérarchiques dans lesquels ils ont suffisamment d’autorité pour avoir une supervision sur le fonctionnement de leur service sans être totalement éloignés de la pratique quotidienne du service public et de la contrainte administrative. L’objectif consiste à pouvoir s’étonner de certaines procédures, signaler et alerter. Nous sommes attachés à ce que les administrations puissent contribuer au renforcement du baromètre de l’action publique, qui constitue une avancée, mais les rapports d’activité internes complexifient parfois les tâches quotidiennes des agents publics et peuvent les démotiver. Il faut donc les connaître pour pouvoir les proscrire.

S’agissant de l’immobilier de l’État, il ne s’agit pas seulement de rationaliser les mètres carrés de bureaux sous l’angle de la performance énergétique et environnementale, même si cela est également important. Il faut aussi rationaliser les espaces de travail au regard des nouveaux modes de travail et des nouvelles aspirations des agents publics. Certains d’entre eux peuvent ainsi pratiquer le télétravail ou le bureau partagé. La rationalisation passe donc aussi par la réduction des mètres carrés de bureau des administrations.

Pour répondre à Mme Magnier, j’indique tout d’abord que les projets portés par le FTAP sont recensés sur le site du ministère de la fonction et de la transformation publiques. Il est possible d’y consulter les fiches de projet, les coûts en investissement et les économies attendues. Il s’agit souvent de projets de transformation interne. Pour la seule DGFiP, les effectifs ont diminué d’un tiers depuis dix ans, mais le service rendu a été perfectionné, le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu a été notablement amélioré et les contrôles fiscaux ont été augmentés.

S’agissant des collectivités territoriales, la proposition d’une expérimentation « territoires zéro contrôle a priori » découle d’un constat : le contrôle de légalité subit déjà aujourd’hui de nombreuses adaptations locales. Par exemple, certaines préfectures contrôlent les actes de la commande publique bien au-delà des seuils de transmission. En outre, dans notre esprit, il s’agit de nous appuyer sur les collectivités qui disposent le plus de moyens financiers et juridiques pour pouvoir elles-mêmes évaluer la légalité de leurs actes. Il s’agit des plus grandes collectivités mais aussi des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au service de leurs communes.

Enfin, à Mme Pires Beaune qui évoquait les expériences passées, nous aurions pu évoquer la résilience des collectivités lorsqu’elles ont subi la baisse draconienne des dotations de 11 milliards d’euros durant le quinquennat de François Hollande. Il faut parfois un acte volontariste pour conduire à la transformation ; c’était le cas de la RGPP, mais aussi de la baisse des dotations. Il faut conjuguer des efforts de simplification et la baisse durable de la dépense publique, qui est trop lourde, alors même que la performance de l’action publique en pâtit. Nous souhaitons réellement faire avancer ces deux sujets de pair.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure. M. Hetzel a évoqué notre recommandation visant à supprimer trois normes à chaque fois que l’on en crée une nouvelle et rappelé l’existence d’anciennes tentatives. Il est difficile d’aller plus loin dès lors que la Constitution dispose que « le Premier ministre […] exerce le pouvoir réglementaire » et que « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ». Par conséquent, une volonté politique très forte doit se manifester sur le sujet. C’est la raison pour laquelle nous recommandons que les études d’impact fassent référence à un scoring.

Je souhaite également revenir sur les opérateurs. Chacun convient qu’il existe des doublons, qui contribuent parfois à affaiblir l’État. L’objectif consiste donc à remettre à plat un certain nombre de missions qui ont pu être confiées. Je rappelle que dans leur rapport, Mme Magnier et M. Mattei avaient souligné la faiblesse des COM déclinés auprès des opérateurs. Il est donc possible de réaliser une revue de ces missions.

Enfin, je partage l’avis de M. Laqhila : en tant que législateurs, nous avons une responsabilité dans l’inflation législative.

M. Daniel Labaronne (RE). Je m’associe aux félicitations concernant la qualité du rapport et souhaite revenir sur votre première proposition, qui vise à utiliser la gestion immobilière comme levier de baisse des dépenses publiques et d’amélioration du cadre de vie. Il me semble que cette proposition pourrait être associée à l’annonce récente de la Première ministre en faveur du logement, qui cherche à accélérer la transformation du foncier de l’État et de ses opérateurs. Vous avez évoqué 7 millions de mètres carrés qui seraient sous-utilisés. Pensez-vous qu’ils pourraient être transformés en logements ?

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Il est vrai que depuis quelques années, chaque gouvernement formule une politique de modernisation et de rationalisation de l’État. Mais au-delà de la prise de conscience, il faut également une volonté et un pilotage politiques. Si nous laissons à la haute administration le soin de s’autoréguler, nous n’avancerons pas.

En matière de simplification, un exemple me vient immédiatement à l’esprit : la fiche Chorus. Lorsque l’on est candidat à une élection, il faut remplir une fiche Chorus, puis en refaire une à nouveau pour obtenir le remboursement des frais de campagne. Il existe un véritable problème de confiance vis-à-vis de l’administration.

M. Fabien Di Filippo (LR). Je souhaite interroger les rapporteurs sur le lien qu’ils établissent entre l’inflation normative et la hausse de la dépense publique. Je pense qu’il serait nécessaire de mener un travail pour supprimer certaines normes, soit parce qu’elles sont désuètes, soit parce qu’elles posent problème.

M. Marc Le Fur (LR). Il y a quelques années, une formule s’était développée et me semblait très efficace : quand l’usager adressait une demande et que celle-ci ne donnait pas lieu à une réponse, au bout d’un certain temps, la réponse était automatiquement positive. Je constate pour le vivre dans mon département que dans certains cas, quand ce type de procédure existe légalement, l’administration reprend le pouvoir en organisant des actes de retrait de leur disposition implicite, ce qui va à l’encontre de la logique qui avait prévalu lors de l’adoption de cette disposition. Je souhaiterais que le Parlement dise à l’administration de cesser ce type de comportement.

M. Pascal Lecamp (Dem). Je mentionne l’existence d’un très bon rapport de la Cour des comptes, en date de janvier 2021, sur les relations entre l’État et ses opérateurs. Ce rapport révèle que seul un quart de ces opérateurs a signé un contrat d’objectifs et de performance (COP). Une idée consisterait par exemple à signer des COP et non des contrats d’objectifs et de moyens (COM) avec les opérateurs de l’État, afin d’intégrer les impératifs de simplification dans les objectifs assignés aux opérateurs.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure. M. Labaronne a demandé si des mètres carrés de bureau pourraient être transformés en logements. Toutes les possibilités doivent être prises en compte.

Ensuite, Mme Dalloz, vous avez raison d’associer prise de conscience et forte volonté politique. Sans cette dernière, aucun pilotage ne sera possible et rien ne se passera. Le référent chargé de la simplification doit précisément participer, pour engager un processus de transformation de l’action publique synonyme de simplification.

M. Di Filippo a évoqué le problème de l’inflation normative. Notre quatrième recommandation consiste précisément à supprimer trois normes à chaque fois que l’on en crée une nouvelle. Mais là aussi, une volonté politique doit prévaloir.

Le retrait d’un acte implicite mentionné par M. Le Fur pose effectivement un problème, puisqu’il est contraire à la volonté du législateur. Il sera donc nécessaire d’intervenir vigoureusement sur ce sujet.

M. Robin Reda, rapporteur. Nous pouvons optimiser la gestion de l’immobilier de l’État par les cessions, qui sont souvent déjà l’œuvre dans les territoires. Je rappelle que les ministres ont également appelé de leurs vœux une simplification de la relation entre la direction de l’immobilier de l’État et les collectivités territoriales, afin d’obtenir une plus grande transformation des fonciers et des bâtiments publics. Je pense aussi à la location des bureaux de l’État pour d’autres activités tertiaires ou industrielles. En résumé, le meilleur usage peut prendre différentes formes.

Ensuite, les ressaisies administratives sont fréquemment déplorées par les usagers et les agents publics. Dans le domaine de la justice, en raison de la diversité des logiciels, les greffiers doivent par exemple saisir à plusieurs reprises les données des justiciables pour une même affaire. Des efforts de convergence des systèmes d’information doivent donc être entrepris.

Dans l’esprit de ce rapport, nous pouvons conjuguer simplification sur le temps court et économies sur le temps long, selon le principe bien connu que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Nous devons commencer par des économies de l’ordre du million d’euros pour ensuite atteindre des économies de l’ordre du milliard d’euros. Les parlementaires que nous sommes ont la responsabilité d’être les premiers référents en simplification, dans nos propositions, dans nos amendements, mais également dans notre suivi.

M. le président Éric Coquerel. J’interroge la commission afin qu’elle autorise la publication de ce rapport d’information, en application de l’alinéa 7 de l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale.

En application de l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale, la commission autorise la publication du rapport d’information.

 

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La commission, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, procède à l’examen des missions Défense et Anciens combattants, mémoire et lien avec la Nation.

M. le président Éric Coquerel. L’ordre du jour de notre réunion appelle l’examen de la commission d’évaluation des politiques publiques (CEPP) relative aux missions Défense et Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation. Cette CEPP prend une forme particulière puisqu’en raison d’un agenda très chargé, M. Sébastien Lecornu, ministre des armées, n’a pas été en mesure de pouvoir répondre positivement aux différentes propositions de créneaux horaires que nous avions effectuées. Il a proposé une alternative, et après consultation avec le rapporteur général, il nous a semblé que dans le contexte très particulier d’une audition très récente par notre commission sur le projet de loi de programmation militaire (LPM), il était possible d’accepter cette dérogation exceptionnelle.

Par conséquent, il a été demandé aux rapporteurs spéciaux d’élaborer quelques questions écrites, auxquelles le ministre a bien voulu répondre par écrit. Ces réponses écrites ont été portées à la connaissance de l’ensemble des commissaires. Nous allons donc pouvoir engager la discussion sur l’exécution budgétaire 2022, sur la base des rapports des trois rapporteurs spéciaux et de ces trois réponses écrites.

La commission examine la mission Défense (M. Christophe Plassard, rapporteur spécial)

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial Préparation de l’avenir. En 2022, les dépenses de la mission Défense se sont élevées à 59 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE), un niveau proche de la prévision ; et 52 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit 4 % de plus que prévu. Les 300 millions d’euros annulés par décret d’avance ont été rétablis dans la loi de finances rectificative d’août 2022. Le collectif de fin de gestion a ouvert 1,45 milliard d’euros d’AE et 1,33 milliard d’euros de CP, pour compenser les dépenses supplémentaires dues à la guerre en Ukraine ; les surcoûts liés aux opérations extérieures (OPEX) et aux missions intérieures et les surcoûts liés à l’inflation, notamment sur les carburants.

Les restes à payer atteignent 91 milliards d’euros. Ils sont la conséquence logique de la montée en puissance des grands programmes d’armement. Tant que la trajectoire des CP n’est pas remise en cause, ils ne présentent pas de risque. Les reports de charges atteignent 3,88 milliards d’euros, soit 13,7 % des crédits ; ils sont plus élevés que la cible (12 %) mais diminuent par rapport à 2021 (14,4 %). Je le rappelle : le report de charge est un outil pertinent pour atténuer les effets de l’inflation, à condition qu’il reste dans une proportion soutenable.

Sur le programme 144, les dépenses sont de 1,9 milliard d’euros en AE et en CP. L’exécution 2022 confirme la montée en puissance des moyens affectés aux services de renseignement, avec 483 millions d’euros pour la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la Direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD). La DGSE a vu sa présence en Europe de l’Est et ses moyens de cyberdéfense renforcés. Néanmoins, l’opération « Fort neuf de Vincennes », le projet de nouveau siège pour la DGSE, a pris du retard, en raison du contexte d’inflation, et les crédits afférents ont été à nouveau reportés.

S’agissant de la prospective et du soutien à l’innovation, les crédits consacrés aux études amont s’élèvent à 996 millions d’euros et sont proches du milliard promis. Les principales études ont été consacrées aux évolutions du programme Rafale, au programme « système de combat aérien du futur » (SCAF) et aux planeurs hypersoniques. Celles relatives au programme « système principal de combat terrestre » (MGCS) ont été reportées, en raison des retards pris par ce projet mené en coopération franco-allemande.

Concernant les fonds de soutien à l’innovation, Definvest a dépensé 10 millions d’euros pour monter au capital de cinq PME stratégiques et le Fonds innovation défense (FID) a exécuté 35 millions d’euros, plus que les années précédentes, au profit de deux entreprises innovantes. Je l’avais indiqué dans mon rapport sur l’économie de guerre : compte tenu des difficultés rencontrées par notre base industrielle et technologique de défense (BITD), ces deux outils gagneraient à être complétés par un fonds de capital-développement spécialisé dans les levées de fonds de 50 à 100 millions d’euros.

Je salue à ce titre la décision de l’État de bloquer la prise de contrôle de Segault par une entreprise américaine. Cette PME est stratégique et ses compétences doivent être conservées en France.

Sur le programme 146, les dépenses s’élèvent à 16 milliards d’euros en AE et 15 milliards d’euros en CP. Le niveau des CP traduit la montée en puissance des programmes à effet majeur :

Les AE sont inférieures de 7 % à la prévision. Nous sommes dans une phase de transition entre deux LPM. En conséquence, l’engagement de plusieurs programmes a été reporté, dans l’attente des arbitrages prévus dans le cadre de la LPM 2024-2030. Enfin, l’exécution du programme 146 a évidemment été affectée par la guerre en Ukraine. Ainsi, il y a eu 360 millions d’euros de surcoûts liés à l’inflation ; 111 millions d’euros d’AE et 22 millions d’euros de CP ont été mobilisés pour le remplacement des 18 canons Caesar cédés à l’Ukraine. Enfin, 200 millions d’euros ont été employés pour la création d’un fonds de soutien à l’Ukraine, dont nous aurons l’occasion de reparler dans les prochains mois.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial Budget opérationnel de la défense. En tant que rapporteur spécial des programmes 178 et 212, je vous présenterai l’exécution budgétaire de ces deux programmes au cours de l’année 2022 en mettant l’accent sur certains points qui me paraissent les plus importants.

Je commencerai mon intervention par le programme 178 Préparation et emploi des forces. Je rappelle que ce programme occupe une place centrale dans le dispositif de défense. Il regroupe les dépenses liées à l’activité et à l’entraînement dans les différents milieux maritime, terrestre et aérien, ainsi que les dépenses liées au soutien logistique des opérations. Dans un contexte où les conflits de haute intensité font un retour inquiétant, nous devons être particulièrement vigilants au caractère opérationnel des troupes et à la disponibilité des matériels.

Je note tout d’abord que le programme 178 s’est vu attribuer près de 1,8 milliard d’euros de crédits de paiement supplémentaires par rapport au montant ouvert en LFI. Ces ouvertures de crédits illustrent assez bien la forte mobilisation de nos armées, compte tenu du nouveau contexte sécuritaire incertain dans lequel elles doivent évoluer. Plus que jamais, les actions financées par le programme 178 prennent tout leur sens face aux menaces qui pèsent sur la France et ses alliés.

L’effort de la France en faveur de l’Ukraine a d’ailleurs été essentiellement porté par ce programme, pour un coût total de 666 millions d’euros en AE et de 541 millions d’euros en CP. Ces crédits ont permis de renforcer le flanc oriental de l’OTAN, notamment avec l’opération Aigle en Roumanie ; et de procéder au remplacement de matériels ainsi que des carburants cédés à l’Ukraine. Le contexte inflationniste que nous traversons a été particulièrement perceptible sur les dépenses d’énergies et d’infrastructures du ministère, c’est-à-dire les dépenses portées par le programme 178. En résumé, ce programme a été le principal support des dépenses opérationnelles devenues nécessaires pour répondre au retour de la haute intensité.

Je souhaite ensuite évoquer le maintien en condition opérationnelle (MCO), auquel je suis particulièrement vigilant. Je me réjouis que l’année 2022 ait vu plusieurs marchés de MCO engagés avec succès, en particulier celui du moteur des flottes d’hélicoptères Puma et Gazelle pour 665 millions d’euros. Toutefois, je note avec regret que certains marchés n’ont pas pu aboutir, notamment le MCO du Airbus A330 MRTT et de l’Alphajet. Les crédits en autorisations d’engagement correspondant à ces marchés ont d’ailleurs été reportés en 2023.

Ensuite, le programme 212 Soutien de la politique de la défense rassemble les fonctions de soutien mutualisé et les politiques transverses au ministère des Armées. Il porte principalement les crédits de personnels qui se sont élevés à 21,5 milliards d’euros en 2022. L’exercice 2022 me semble assez révélateur des difficultés de recrutement et de fidélisation auxquelles le ministère est confronté. En effet, le ministère des Armées n’est pas parvenu - une nouvelle fois - à réaliser son schéma d’emploi. Celui-ci était de 492 ETP supplémentaires, auxquels se sont ajoutés 718 ETP en raison de l’accumulation de retards de recrutement ces dernières années. Le niveau de recrutement a été particulièrement élevé en 2022 mais le nombre de départs s’est accru de 5 % par rapport à 2021. Il s’agit là de l’illustration de la difficulté du ministère des Armées à attirer et à retenir les talents. Je reviendrai d’ailleurs sur ce point lors de la présentation de mon thème d’évaluation. Je souhaite enfin attirer votre attention sur la prochaine marche de la LPM qui est fixée à 1 500 ETP supplémentaires, auxquels s’ajoutent donc des retards de recrutements qui s’accumulent. Cet objectif de recrutement me semble peu réaliste.

Par ailleurs, je note que le contrat de concession « Ambition logement » a été engagé pour 2,8 milliards d’euros en AE couvrant une période de 35 ans. Ces crédits permettent d’assurer le financement d’un contrat majeur pour le ministère des Armées et son personnel : au total 15 000 logements seront construits ou rénovés afin de garantir aux personnels du ministère des conditions d’habitation de qualité. Il faut saluer cette démarche même si j’ai la conviction que nous pourrions aller encore plus loin.

Enfin, il convient de souligner l’engagement de la troisième marche de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM). Il est trop tôt pour tirer un bilan de la NPRM mais j’ai bon espoir qu’elle permette de fidéliser les personnels militaires, de valoriser leurs spécificités ainsi que les compétences propres aux métiers très variés qu’offrent nos armées.

La commission en vient à l’examen de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (M. Bryan Masson, rapporteur spécial)

M. Bryan Masson, rapporteur spécial. Je vous remercie, et je regrette que Monsieur le ministre ne soit pas là pour aborder l’exécution budgétaire de cette mission très importante, puisqu’elle concerne nos anciens combattants.

Avant d’évoquer les lignes budgétaires, je me permets d’évoquer les propos d’Hélie Denoix de Saint Marc : « La guerre m’avait déjà appris l’énigme du destin ; une fraction de seconde nous sépare de la mort. On ne crée pas sa vie : on la reçoit et on la donne. » Ces mots résonnent aujourd’hui tout particulièrement et résument la philosophe de vie des combattants. C’est parce qu’ils ont donné leur vie à la nation que nous avons le devoir d’être à la hauteur.

En ma qualité de rapporteur spécial des programmes 169 Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation et 158 Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale, dont le budget pour 2022 était de 2,09 milliards d’euros en AE et 2,08 milliards d’euros en CP, j’aimerais insister sur quelques points qui ont attiré mon attention.

En premier lieu, je souligne la qualité de l’exécution restée conforme à la prévision. Comme chaque année, elle prend en compte la baisse tendancielle et naturelle des bénéficiaires. Je remarque aussi que la modification de l’architecture budgétaire de la mission, passée de trois à deux programmes au 1er janvier 2022 du fait de la disparition du programme 167 Liens entre la Nation et son armée, s’est déroulée sans encombre.

Le programme 158 est plus petit que le 169, mais il est néanmoins doté de 92,76 millions d’euros en AE et en CP. Il finance les trois dispositifs en faveur des victimes de spoliation intervenues du fait de législations antisémites, des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et de ceux dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie. L’exécution me semble satisfaisante.

Concernant le programme 169, qui concentre 96 % des ressources budgétaires de la mission, l’exécution a été adéquate. Je relève néanmoins quelques aléas de gestion qui auraient pu, à mon sens, être mieux anticipés. Je pense tout d’abord à la revalorisation du point pour les pensions militaires d’invalidité (PMI) et de la retraite du combattant introduite en loi de finances initiale (LFI). Elle était nécessaire, méritée et attendue de nos anciens combattants : elle compensait, à juste titre, la différence constatée de 2018 à 2021 entre l’évolution de la valeur du point de PMI et l’évolution des prix à la consommation. Je m’étonne donc que cette mesure évaluée à 32,8 millions d’euros, dont 18,8 millions pour les PMI et 14 millions pour les retraites du combattant, ait été en partie financée grâce à la sous-consommation sur d’autres postes, par exemple la dette viagère (8 millions d’euros). La Cour des comptes le pointe aussi : il conviendrait de mieux évaluer l’évolution des effectifs de bénéficiaires.

Je constate également que l’exécution des crédits du dispositif de solidarité à destination des enfants de harkis a rencontré quelques difficultés. Lancé en 2019, ce dispositif avait pour date de forclusion le 31 décembre 2022. L’augmentation du nombre de demandes durant l’année 2022, était donc facile à anticiper. Or, seuls 7,5 millions d’euros ont été prévus à l’automne pour financer cette mesure. Ce budget insuffisant, dont je relève qu’un million devait en plus être amputé sur la trésorerie de l’Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), a dû être complété en cours de gestion à hauteur de 15,75 millions d’euros, par deux versements.

Comme je l’ai dit, dans l’ensemble, l’exécution reste satisfaisante. Mais je pense, et vous en conviendrez avec moi, que cette politique est trop importante, que nous devons trop à nos anciens combattants, pour ne pas faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les aider à vivre dignement alors qu’ils ont tant donné à la France !

Pour cette même raison, je m’inquiète des difficultés de recrutement que rencontrent l’ONaCVG, principal opérateur de la mission, et l’Institution nationale des Invalides (INI), c’est-à-dire deux des trois opérateurs de la mission. Les documents budgétaires évoquent des problèmes conjoncturels de recrutement. Je crois qu’ils sont plutôt d’ordre structurel, je pense par exemple aux infirmiers et aides-soignants que recherche l’INI. Dans sa réponse fournie ce matin, le ministre me donne d’ailleurs raison, puisqu’il évoque à la fois la pénibilité du travail et le coût de la vie en région parisienne.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous remercie d’avoir accepté ce format particulier et de vous être adaptés aux contraintes auxquelles le ministre est soumis. Il existe effectivement des écarts entre l’exécution et le budget initial 2022, mais aussi entre les AE et les CP, qui sont liés à la spécificité militaire. Cependant, il serait malhonnête de ne pas reconnaître que des éléments exceptionnels ont affecté cette année, notamment la situation en Ukraine. Les surcoûts engagés avec nos partenaires européens témoignent de l’adaptation nécessaire face aux évènements géopolitiques de l’année passée. Cela concerne notamment des remplacements de matériels et des carburants cédés à l’Ukraine.

M. le rapporteur spécial Masson, je vous trouve assez injuste au sujet du budget spécifique pour les enfants de harkis. Il fallait bien attendre que les enfants de harkis, à qui nous devons ce soutien, se déclarent ; ils avaient jusqu’à la fin de l’année 2022 pour le faire.

Au-delà des éléments géostratégiques, des éléments économiques spécifiques liés à l’inflation doivent également être mentionnés. Le programme 212 Soutien de la politique de la défense a été particulièrement marqué par l’augmentation du point d’indice ; l’augmentation du SMIC, qui a coûté 46 millions d’euros aux armées ; et le renforcement du dispositif de l’OTAN en Europe de l’Est, pour un montant de 42 millions d’euros. Ces éléments majeurs peuvent expliquer les modifications importantes qui ont été observées.

L’exécution budgétaire 2022 montre que les services de renseignement ont vu leurs moyens renforcés en matière de cyberdéfense. Par ailleurs, le fonds Definvest et le FID permettent de conduire des participations minoritaires au capital de PME stratégiques innovantes et primordiales pour notre souveraineté, à hauteur de 10 et 35 millions d’euros.

M. Plassard, vous évoquez dans votre rapport l’exécution des fonds de soutien à l’innovation de défense et aux PME et TPE de la BITD. Vous proposez la création d’un fonds de capital développement pour les levées de fonds comprises entre 50 et 100 millions d’euros. Pouvez-vous être un peu plus explicite ?

Mme Stella Dupont (RE). Les deux programmes de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation sont dotés d’un budget de plus de 2 milliards d’euros par la loi de finances pour 2022. Malgré le financement de deux dispositifs, dont le soutien aux enfants de harkis, l’exécution est conforme à la prévision. À ce titre, il est important de souligner les amendements gouvernementaux d’un montant de près de 70 millions d’euros, qui ont permis de maintenir cette cohérence budgétaire.

Ensuite, il n’aura échappé à personne que la conjoncture géopolitique exceptionnelle a fortement impacté les crédits des missions Défense et budget opérationnel de la Défense. À ce titre, je souhaite rappeler que la LPM 2024-2030 est considérée comme un plancher budgétaire et non comme un plafond. Non seulement, cette programmation est respectée à l’euro près, mais il est aussi prévu d’actionner la LFR lorsqu’il faudra la compléter.

Ma question porte sur un sujet devenu récurrent au sein de notre commission : l’inflation. Dans quelle mesure a-t-elle impacté le secteur de la défense ? Remet-elle en cause la prévision pour la LPM telle qu’elle est aujourd’hui arrêtée ?

M. David Guiraud (LFI). Je souhaite pour ma part évoquer les crédits dégagés pour les rapatriés harkis et leurs enfants. Très honnêtement, les associations de ma circonscription m’indiquent que le compte n’y est pas. La méthode de comptage permet certes d’avoir des bénéficiaires, mais elle exclut aussi un grand nombre de personnes. Je prends l’exemple de ma circonscription : pour être éligibles, les harkis doivent être passés par certaines structures, alors qu’ils se sont répartis dans la ville entière de Roubaix. Par conséquent, un grand nombre de familles ne bénéficient pas de la réparation que leur doit la France, alors même qu’ils sont des enfants de rapatriés. Il serait bon de revoir les critères d’attribution de cette réparation.

M. Luc Geismar (Dem). La loi de finances pour 2022 a alloué 59,6 milliards d’euros en AE et 49,6 milliards en CP. Les CP hors contribution de pension, se sont élevés à 49,9 milliards, conformément à la LPM 2019-2025. Dans ce budget, le programme 146 Équipement des forces a été particulièrement affecté par les conséquences de la guerre en Ukraine, qui a entraîné des dépenses supplémentaires à hauteur de 182 millions d’euros en AE et de 57 millions d’euros en CP. Je retiens par ailleurs le prélèvement de 200 millions d’euros en AE et en CP sur les crédits mis en réserve dans le programme pour créer un fonds spécial de soutien l’Ukraine.

Ensuite, l’inflation a entraîné des surcoûts pour le programme 146, à hauteur de 360 millions d’euros. Enfin, l’évaluation du programme 212 rappelle les difficultés rencontrées pour recruter et fidéliser dans le secteur de la défense. Malgré un volume important de 25 707 recrutements en 2022, le niveau de sortie définitif n’a pas permis la réalisation du schéma d’emploi.

Alors que de nouveaux objectifs de recrutement ont été affichés dans la LPM, comment comptez-vous les atteindre ? Quelles mesures envisagez-vous pour fidéliser les personnes recrutées, notamment dans les métiers à forte compétence technique ? Quelle a été l’ampleur générale des dépenses supplémentaires liées à l’inflation dans le secteur de la défense lors de l’année écoulée ?

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. M. Geismar, je vous propose de consulter la réponse écrite du ministre à nos questions. Le taux de départ s’est effectivement accru de 5 % et il sera nécessaire de prendre des mesures spécifiques à ce sujet. J’aurai l’occasion d’y revenir lors de mon intervention sur le plan Famille.

Mme Dupont, la LPM constitue effectivement un plancher budgétaire et, en tant que rapporteurs spéciaux, nous y veillerons. Je rappelle que nous avions proposé des amendements à l’article 5 de la LPM, concernant principalement les carburants et les munitions, qui n’ont malheureusement pas été retenus.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. M. le rapporteur général, nous avons signalé un manque : Definvest a dépensé 10 millions d’euros pour rentrer au capital de cinq PME et le FID va jusqu’à 20 millions d’euros. À ce jour, il n’existe pas forcément une ingénierie financière pour les sommes plus importantes : si un ciblage pour les besoins de 50 à 100 millions d’euros a été effectué, il n’y a pas à ce jour de réponses convenables. Plusieurs formats pourraient être envisagés, qu’il s’agisse d’un fonds en direct, un fonds de fonds ou d’une structure construite avec BPI France. Dans ce domaine, des initiatives privées doivent également être mentionnées, à l’instar de Weinberg Capital ou de Tikehau.

Enfin, plusieurs réponses peuvent être apportées à la question de Mme Stella Dupont sur l’inflation. Tout d’abord, dans le précédent PLFR, nous avons voté 225 millions d’euros supplémentaires, essentiellement à destination des carburants. En outre, mon rapport évoque le report de crédits de paiement qui permet d’étaler les paiements et donc l’impact de l’inflation, qui a été évaluée à 30 milliards d’euros pour la LPM (413 milliards). Comme c’est le cas chaque année, le PLFR permet d’effectuer des ajustements. Dans le budget 2023, demandes de complément s’établissent ainsi à ce jour entre 1 et 1,5 milliard. En résumé, la loi de finances verrouille les sommes, ce qui permet de constater que la LPM est bien un plancher et que tout dépassement ou correction peuvent se faire à travers le PLFR.

M. Bryan Masson, rapporteur spécial. Nous savons que la situation des harkis a été très difficile en France et qu’elle le demeure pour leurs enfants.

J’ai également entendu les remarques de M. Guiraud, que je partage. Je vais d’ailleurs les communiquer au ministre, pour essayer d’étendre les conditions d’attribution. En 2022, 2 400 dossiers ont été traités, pour un montant moyen de 4 670 euros par dossier. Enfin, certains dossiers seront payés cette année, ce qui expliquer un retard ressenti par certains bénéficiaires.

La commission en vient ensuite à la Discussion sur la thématique d’évaluation : Le plan Familles (M. Emeric Salmon, rapporteur spécial)

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Le 31 octobre 2017, un premier plan Famille a été annoncé par la ministre des Armées, Madame Florence Parly. L’annonce de ce plan était fondée sur un constat clair sur lequel nous pouvons tous nous retrouver : il n’y a pas de soldat fort sans famille heureuse.

Cette dimension de la politique de la défense a été pendant trop longtemps délaissée. Les armées ont été les principales victimes des coupes budgétaires initiées par la révision générale des politiques publiques : dégradation de la qualité des logements, des hébergements et, de manière plus générale, de toutes les infrastructures militaires. En parallèle, l’activité opérationnelle n’a jamais faibli. Elle s’est même intensifiée face au retour des menaces. L’équilibre, déjà fragile, entre les sujétions inhérentes au métier militaire et la nécessaire préservation de la vie familiale des soldats n’était donc plus assuré.

Avec le plan Famille, 540 millions d’euros sont déployés entre 2018 et 2025. Cet effort budgétaire important doit permettre d’améliorer concrètement les conditions de vie et de travail des militaires. En février 2023, le ministre des Armées annonce officiellement un plan Famille 2 doté d’un budget de 750 millions d’euros sur les années 2024 à 2030. Il faut saluer cette démarche : la pérennité dans le temps des mesures mises en œuvre depuis 2018 est un impératif pour nos armées. Quelques mois après cette annonce bienvenue, il me semble que le moment était opportun pour conduire une évaluation approfondie du premier plan Famille, notamment dans l’optique de la deuxième séquence qui débutera en 2024.

Tout d’abord, si le plan Famille 1 est un véritable succès, il convient de le replacer dans son contexte. En 2018, les armées étaient à bout de souffle. Les contraintes, souvent très fortes, du métier militaire sont plus difficilement acceptées par la nouvelle génération. Les militaires aspirent, comme le reste de la société, à une meilleure conciliation entre les sujétions qui s’imposent à eux et leur vie familiale, qu’ils entendent – à juste titre – préserver. Des évolutions sociologiques majeures transforment également le rapport du militaire et de sa famille à l’institution. Les conjoints veulent poursuivre une carrière professionnelle épanouie, sans que celle-ci ne subisse les conséquences des mutations successives.

Je rappelle également, à titre d’exemple, les importants dysfonctionnements du logiciel de paiement des militaires, dit logiciel Louvois, qui entraînaient parfois le non-versement des soldes, notamment en 2013 et 2014. Cela a déclenché beaucoup de colère dans les armées, notamment chez les conjoints de militaires. Avant 2018, l’accompagnement social des militaires existait mais il n’était pas suffisant pour compenser l’ensemble des contraintes qui pèsent sur leur vie familiale. Le lancement du plan Famille entendait donc répondre à cette défaillance.

J’en viens désormais plus directement au plan Famille et à son bilan. J’ai constaté, au cours de mes travaux, que les mesures mises en œuvre sont très nombreuses et diverses, peut-être à l’image du retard accumulé. Toutes ces actions sont globalement saluées par la communauté militaire. À la fin de l’année 2022, un total de 283,1 millions d’euros ont été consommés pour financer les différentes actions du plan. Ce montant a permis d’améliorer sensiblement la qualité de la vie en unité grâce à la rénovation d’espaces de convivialité, le déploiement d’accès gratuit au wifi ou encore la création de solutions de restaurations rapides en enceinte militaire. Il s’agit de mesures concrètes que les militaires plébiscitent et apprécient. Il faut également saluer un ajustement de la gestion des ressources humaines, qui est désormais plus attentive à la préservation de la vie familiale.

Pour apprécier un peu mieux la mise en œuvre de toutes ces mesures sur le terrain, je me suis rendu à base aérienne 116 de Luxeuil-Saint-Sauveur, située dans ma circonscription en Haute-Saône. J’ai notamment visité l’espace Atlas (Accès en tout temps et tout lieu au soutien) qui est un lieu très utile pour les militaires de la base aérienne. Il s’agit en effet d’un guichet d’accueil unique visant à faciliter les démarches administratives. Je crois qu’il faut continuer et accélérer le déploiement de ces espaces Atlas.

En résumé, j’ai la conviction que le plan Famille a été une réussite, mais je crois qu’il ne pouvait en être autrement, tant nous partions de loin sur ces sujets. Cependant, ce bilan positif ne doit toutefois pas occulter de moindres réussites du plan Famille. Elles sont de plusieurs ordres. D’abord, la communication est largement perfectible. J’ai ainsi constaté que les actions de communication sur le plan Famille n’atteignaient pas réellement leur public, ce qui est pourtant essentiel pour faire connaître les mesures mises en place. Les jeunes militaires et les familles ne consultent en fait que très peu les canaux classiques de communication, en particulier le réseau interne du ministère. En conséquence, la communauté militaire n’identifie pas toujours que certaines mesures concrètes sont issues de ce plan, ce qui a pu créer une forme de déception.

Ensuite, le pilotage du plan Famille m’a semblé trop centralisé. La majorité des crédits ne sont pas directement mis à disposition des commandements locaux. Des projets très concrets sont en effet pilotés au niveau central comme les rénovations de foyer, la création d’espace Atlas ou encore d’infrastructures sportives. Tous ces projets sont financés par des marchés nationaux, dans une logique de standardisation et de mutualisation. Vous conviendrez que cela ne permet pas toujours d’adapter les mesures à la situation locale et aux besoins exprimés par les militaires.

Enfin, s’agissant des actions menées en tant que telles, j’ai relevé plusieurs points de vigilance. Je ne vous en mentionnerai que deux, qui me paraissent cependant assez significatifs. D’une part, les besoins de logements et d’hébergements sont tels que les programmes de construction ou d’acquisition demeurent insuffisants, notamment dans les zones de forte tension immobilière. Il faudrait amplifier les efforts dans ce domaine. D’autre part, et c’est une problématique à laquelle je suis très sensible, les mesures portant sur le suivi médical des familles ne permettent pas toujours d’empêcher les ruptures de soins liées à la mobilité du militaire.

En conclusion, même si le plan Famille a contribué à améliorer les conditions de vie des militaires, je constate que cela ne s’est pas traduit par un renforcement réel de l’attractivité et de la fidélisation des carrières.

Pour finir, je souhaite aborder la question du plan Famille 2. À la différence du premier plan Famille, cette nouvelle séquence portera uniquement sur des mesures visant à améliorer le quotidien des familles. Les actions permettant de perfectionner la vie en emprise militaire ne feront donc plus partie du plan Famille. Je pense qu’il s’agit là d’une clarification bienvenue, mais en tant que rapporteur spécial, je m’assurerai que ces mesures soient bien poursuivies avec la même intensité en parallèle du plan Famille.

La première observation que je souhaite formuler concerne la méthode employée : ce nouveau plan sera recentré sur les territoires, afin d’impliquer davantage les collectivités territoriales. Le développement de tels partenariats est essentiel pour faciliter l’intégration des militaires et de leurs familles dans le tissu local. Dans la même logique, un effort de subsidiarité a été annoncé pour donner au commandement de proximité les moyens d’agir pour les familles. Je salue ce changement de méthode qui permettra, sans doute, une utilisation plus efficace des crédits et le financement de mesures plus adaptées aux problématiques locales.

Ma deuxième observation est la suivante : une réponse doit être apportée au problème de communication évoqué plus tôt dans mon intervention. À cet effet, le ministère des armées déploie un nouvel outil, dénommé « Famille des armées ». Ce portail numérique aura pour fonction de rediriger les utilisateurs vers les systèmes d’information du ministère des armées. L’idée me semble pertinente mais elle devra faire ses preuves.

S’agissant du contenu des mesures, je crois qu’il est encore trop tôt pour évaluer leur pertinence. Je vous invite à consulter mon rapport pour avoir davantage de détails mais je souhaiterais, une nouvelle fois, évoquer la question du suivi médical. Il s’agit en effet d’une problématique majeure pour les familles, et notamment les plus fragiles d’entre elles.

J’ai interrogé la direction de projet du plan Famille à ce sujet. Il s’avère qu’il n’est pas possible d’élaborer des listes de praticiens disponibles qui pourraient être diffusées aux familles ou de demander aux praticiens de réserver des places au profit de la communauté militaire. Ce sujet constitue donc un véritable angle mort du premier plan Famille mais également du plan Famille 2 : je crois que nous devons progresser dans ce domaine, tant la situation actuelle n’est pas satisfaisante.

M. le président Éric Coquerel. M. le rapporteur, je suis d’accord avec vous pour souligner que la condition militaire pèse lourdement sur le quotidien des militaires et de leurs familles. La réciproque est également vraie, y compris pour attirer et retenir des talents. Vous avez également raison lorsque vous insistez sur la nécessité de l’adaptation locale en fonction de sujets qui peuvent varier, notamment selon le niveau des services publics locaux ou l’offre disponible. Cette problématique devrait sans doute être questionnée pour d’autres corps de fonctionnaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je remercie à mon tour le rapporteur pour son exposé, qui reconnaît à la fois le succès du plan Famille et formule des recommandations bienvenues. Je sais d’expérience personnelle que les militaires ont parfois des difficultés à concilier leur engagement au service de leur pays et leur vie de famille.

Je salue l’augmentation significative du plan Famille 2, qui sera doté de 750 millions d’euros contre 540 millions pour le premier plan. Ce dernier avait introduit un certain nombre d’innovations. Celles-ci seront-elles retenues également dans le nouveau plan ? Ensuite, je souligne à mon tour l’importance des échelles locales. Avez-vous des exemples de ce que pourrait être ce nouveau type de synergies ?

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Je souhaite évoquer l’exemple de la base aérienne de Luxeuil-Saint-Sauveur, située dans ma circonscription. Le plan Famille comporte une partie budgétisée pour la création de places de crèches en emprise militaire. Cependant, dans ma circonscription, l’offre de crèches publiques et privées est suffisante ; il n’est donc pas nécessaire de créer des crèches au sein de la base aérienne, ce qui n'est pas forcément le cas ailleurs. Par conséquent, il faut pouvoir adapter le besoin en fonction de la réalité du terrain.

Ensuite, il importe de nouer un lien avec les collectivités territoriales, afin de pouvoir agir sur les questions de l’emploi et de la formation des conjoints. De fait, les collectivités locales expriment fréquemment des besoins de recrutement.

Afin de répondre à la première question du rapporteur général, les éléments d’innovation ne sont pas encore complètement déterminés. Ils seront clarifiés d’ici la prochaine loi de finances. Il a été indiqué que les aspects liés à la vie du militaire étaient sortis du plan Famille, mais je veillerai à ce qu’ils soient bien traités de manière parallèle.

Mme Stella Dupont (RE). L’amélioration de la vie quotidienne de nos forces armées passe évidemment par la vie de famille. Le plan Famille répond à des besoins et des attentes fortes. Le rapport d’évaluation note la bonne coordination de l’ensemble des acteurs et l’évolution des mesures en fonction des besoins des militaires. Le plan Famille 2 présenté en février dernier pourra certainement s’appuyer sur son prédécesseur pour répondre davantage aux besoins. Je note à mon tour l’enjeu du suivi médical des militaires et de leurs familles.

Je m’interroge sur le nombre de places en crèche et pense comme vous que les besoins diffèrent selon les territoires. Avez-vous pu regarder ce point particulier ? Votre analyse vous conduit-elle à envisager dans certains territoires une priorisation de l’accès de familles de militaires à certains services publics, comme les crèches, compte tenu des contraintes opérationnelles que subissent les militaires ? Cette priorisation pourrait faciliter l’ancrage, même temporaire, des militaires et de leurs familles dans les communes.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). M. le rapporteur, vous pointez dans votre rapport deux améliorations essentielles à apporter, dont le suivi médical. De fait, les déménagements posent des difficultés particulières en matière de suivi médical et de pratiques de soins.

Ensuite, vous avez évoqué les besoins en logement dans les zones de tensions immobilières. La question des crèches a déjà été évoquée, mais d’autres critères sont à prendre en compte : le travail des conjoints et conjointes, les services publics, les moyens de transport et l’offre culturelle.

Enfin, la LPM 2019-2025 avait prévu un accroissement des effectifs, qui ne s’est pas complètement matérialisé : il est difficile de recruter et les départs se poursuivent. Avec le plan Famille, le campus numérique sera-t-il suffisant pour enrayer ces départs et offrir une réelle attractivité à cette profession ?

M. Mohamed Laqhila (Dem). Je salue à mon tour les mesures prises dans le cadre du plan Famille, qui visent à améliorer l’accompagnement des familles et les conditions de vie des militaires.

Compte tenu du contexte actuel, on comprend la volonté de développer davantage les moyens mis à disposition de nos armées. Si nous partageons l’objectif de rendre le secteur militaire attrayant et de pérenniser les carrières de nos soldats, le seul Plan Familles suffit-il selon vous à atteindre ces objectifs ? Ensuite, quels moyens peuvent être employés pour sensibiliser davantage le jeune public ? Quelles stratégies de communication peuvent être déployées pour démocratiser davantage le secteur de la défense ? Comment concilier l’image souvent rigoureuse voire stricte de l’armée qui peut rebuter certains jeunes, avec les axes de partenariat du ministère de l’éducation nationale et le ministère des sports ? En matière de santé, quelles sont les solutions spécifiques envisagées pour prévenir les interruptions de soins dues à la mobilité militaire ?

M. Christophe Naegelen (LIOT). Les militaires s’engagent quotidiennement pour notre sécurité et il est important que leurs familles puissent vivre de manière décente. Avez-vous pu établir une liste de priorités en matière d’investissement pour les casernements ? En tant que rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur les forces de sécurité, j’ai effectué un tour de France, qui m’a permis de constater que certaines casernes étaient dans un état déplorable, voire indécent. Quelles sont les priorités dans ce domaine ? Des casernes militaires sont-elles également dans un état de délabrement très avancé ? Il serait intéressant d’envoyer des messages quant à nos priorités.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. L’enjeu du suivi médical est effectivement essentiel. Malheureusement, les emprises militaires sont souvent affectées par les problématiques de déserts médicaux. Lorsqu’un soldat est muté dans une nouvelle garnison, il est confronté comme les autres citoyens à la difficulté pratique de trouver un médecin traitant pour lui ou pour sa famille.

Au sein des emprises militaires, l’institution de gestion sociale des armées (Igesa) s’occupe des questions relatives à la garde d’enfants et s’occupe de la gestion de nouvelles places en crèche. Il est par ailleurs difficile de prioriser en matière de service public, compte tenu du principe d’égalité. Souvent, lorsqu’il existe des crèches en dehors des emprises militaires, les garnisons y préréservent des places. Ce système est par exemple utilisé à la base militaire de Luxeuil Saint Sauveur.

Dans le même ordre d’idées, il peut exister des accords avec les services de Pôle Emploi, afin que les conjoints de militaires puissent avoir des entretiens pour essayer de trouver des emplois correspondant à leur formation. Je ne parlerai donc pas de priorisation mais d’intérêt certain de l’armée à l’égard de certains services publics. Ensuite, le plan Famille ne suffira pas à lui seul pour favoriser le recrutement de militaires. Il s’agit d’un outil qui contribue à la fidélisation. La rémunération a été revue à la hausse, mais les améliorations sont trop récentes pour nous permettre de nous rendre compte de leur efficacité.

Pour répondre à M. Laqhila, les réponses des ministres à nos interrogations en matière de suivi médical ne sont pas suffisantes pour satisfaire les besoins des militaires. Cependant, comme je l’ai indiqué précédemment, il faut mentionner les espaces Atlas, ces guichets d’accueil uniques au sein des bases militaires qui permettent de faciliter les démarches administratives. Des psychologues y sont aussi parfois disponibles.

Enfin, je veillerai à ce que les améliorations à destination des emprises militaires soient maintenues, même si elles sortent du plan Famille. Je n’ai pas eu le temps de visiter d’autres emprises que celle de la base aérienne de ma circonscription, qui est en très bon état et dispose même d’un espace de convivialité : l’ancien mess a été transformé en espace de convivialité.

M. le président Éric Coquerel. J’interroge la commission afin qu’elle autorise la publication de ce rapport d’information sur la thématique d’évaluation du rapporteur spécial.

La commission autorise, en application de l’article 146, alinéa 3, du Règlement de l’Assemblée nationale, la publication du rapport d’information de M. Emeric Salmon, rapporteur spécial.

*

*         *

La commission examine, en application de l’article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi visant à élargir l’assiette de la taxe sur les transactions financières (n° 1145) (M. Christophe Naegelen, rapporteur).

Le tableau ci-dessous récapitule le sens des avis émis par la commission sur les amendements.

 

N° Amdt

Place

Auteur

Groupe

Avis de la commission

 16

 1

 M. BRUN Fabrice

 LR

 Repoussé

 31

 1

 M. NAEGELEN Christophe

 LIOT

 Repoussé

 8

 1

 Mme PIRES BEAUNE Christine

 SOC

 Repoussé

 9

 1

 Mme PIRES BEAUNE Christine

 SOC

 Repoussé

 6

 1

 Mme PIRES BEAUNE Christine

 SOC

 Repoussé

 21

 1

 M. TANGUY Jean-Philippe

 RN

 Repoussé

 27

 1

 M. JULIEN-LAFERRIÈRE Hubert

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 28

 1

 M. BEN CHEIKH Karim

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 3

 ap 1

 M. SALA Michel

 LFI - NUPES

 Repoussé

 19

 ap 1

 Mme PIRES BEAUNE Christine

 SOC

 Repoussé

 2

 ap 1

 M. BOMPARD Manuel

 LFI - NUPES

 Repoussé

 17

 ap 1

 M. BRUN Fabrice

 LR

 Repoussé

 12

 ap 1

 Mme PIRES BEAUNE Christine

 SOC

 Repoussé

 23

 ap 1

 M. BEN CHEIKH Karim

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 24

 ap 1

 M. JULIEN-LAFERRIÈRE Hubert

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 36

 ap 1

 M. NAEGELEN Christophe

 LIOT

 Repoussé

 30

 2

 M. JULIEN-LAFERRIÈRE Hubert

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 29

 2

 Mme ARRIGHI Christine

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 1

 2

 M. DESSIGNY Jocelyn

 RN

 Repoussé

 25

 2

 M. JULIEN-LAFERRIÈRE Hubert

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 26

 2

 M. BEN CHEIKH Karim

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 10

 2

 M. JULIEN-LAFERRIÈRE Hubert

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 11

 2

 M. BEN CHEIKH Karim

 Ecolo - NUPES

 Repoussé

 14

 2

 M. VUIBERT Lionel

 RE

 Repoussé

 38

 2

 Mme BAZIN-MALGRAS Valérie

 LR

 Repoussé

 5

 ap 2

 M. SITZENSTUHL Charles

 RE

 Repoussé

 32

 ap 2

 M. LABARONNE Daniel

 RE

 Repoussé

 13

 ap 2

 M. TANGUY Jean-Philippe

 RN

 Repoussé

 22

 ap 2

 M. TANGUY Jean-Philippe

 RN

 Repoussé

 35

 ap 2

 M. LABARONNE Daniel

 RE

 Repoussé

 37

 ap 2

 M. NAEGELEN Christophe

 LIOT

 Repoussé

 33

 Titre

 M. LEFÈVRE Mathieu

 RE

 Repoussé

 34

 Titre

 M. LABARONNE Daniel

 RE

 Repoussé

 

*

*         *

 


 

29Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 7 juin 2023 à 9 heures

 

Présents. - M. David Amiel, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, Mme Émilie Bonnivard, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Florian Chauche, M. Éric Coquerel, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, M. Benjamin Dirx, Mme Alma Dufour, Mme Stella Dupont, Mme Sophie Errante, Mme Marina Ferrari, M. Luc Geismar, Mme Félicie Gérard, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Victor Habert-Dassault, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Marc Le Fur, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, M. Mathieu Lefèvre, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, M. Benjamin Lucas, Mme Lise Magnier, M. Denis Masséglia, M. Bryan Masson, M. Jean-Paul Mattei, M. Kévin Mauvieux, M. Benoit Mournet, M. Christophe Naegelen, Mme Mathilde Paris, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Alexandre Sabatou, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Philippe Schreck, M. Charles Sitzenstuhl

Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Joël Giraud, Mme Karine Lebon, M. Louis Margueritte, Mme Marianne Maximi

Assistait également à la réunion. - M. Jean-Marc Tellier

 

 


[BR1]Très curieux.