Compte rendu
Commission d’enquête
sur les causes de l’incapacité de la France à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l’exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire
– Audition de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires 2
– Présences en réunion................................18
Mardi
21 novembre 2023
Séance de 18 heures 30
Compte rendu n° 34
session ordinaire de 2023-2024
Présidence de
M. Frédéric Descrozaille,
Président de la commission
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Mardi 21 novembre 2023
La séance est ouverte à dix-huit heures trente.
(Présidence de M. Frédéric Descrozaille, président de la commission)
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La commission procède à l’audition de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. le président Frédéric Descrozaille. Nous entamons notre dernière semaine d’auditions en accueillant ce soir M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Monsieur le ministre, je vous remercie d’être parmi nous. Votre audition nous permettra de poursuivre l’examen critique d’une politique publique interministérielle qui repose sur quatre des plus grosses administrations centrales. Notre examen porte en particulier sur la dimension interministérielle de cette politique publique qui, de manière générale, n’est pas le fort de notre pays. Elle se caractérise par de nombreux arbitrages ex post et des concertations auxquels il manque peut-être une cohésion préalable permettant de hiérarchiser les différents objectifs. C’est particulièrement vrai dans le domaine de la transition écologique, qui voit plusieurs objectifs se concurrencer au sein du Gouvernement : réduction des émissions de gaz à effet de serre, gestion de l’eau, préservation de la souveraineté alimentaire ou protection du revenu agricole. Comment appréhendez-vous cet ensemble complexe ?
Comment votre ministère s’est-il emparé de la question plus spécifique de la réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques ? Quelle est votre perception de l’articulation entre les objectifs des différents ministères impliqués, le vôtre, mais aussi celui de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, celui de l’enseignement supérieur et de la recherche et celui de la santé et de la prévention ?
Avant de vous laisser la parole pour une intervention liminaire, je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale. Je rappelle aussi que l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous demande donc de lever la main droite et de dire « Je le jure ».
(M. Christophe Béchu prête serment.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Je salue votre initiative qui vise à essayer de comprendre pourquoi nous n’avons pas atteint des objectifs pourtant affirmés à plusieurs reprises par des majorités différentes. Alors qu’un nouveau plan Écophyto est en cours d’élaboration, il est en effet utile de s’interroger sur ce qui n’a pas fonctionné dans les précédents plans.
La transition écologique exige la réduction des usages des produits phytosanitaires, qui était l’objectif de ces plans, mais elle ne se limite pas à cet enjeu puisqu’elle concerne également la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation au changement climatique ou encore la stratégie nationale pour la biodiversité. La réduction des usages des produits phytopharmaceutiques favorise la préservation de la biodiversité, mais elle ne présente pas de lien direct avec le stockage du carbone puisque les produits phytopharmaceutiques permettent d’éviter l’utilisation de lourds engins mécaniques à moteur thermique, principale cause du tassement des sols. Quant à l’enjeu de l’adaptation, il concerne bien sûr l’agriculture et l’usage des intrants, la diminution des volumes d’eau pouvant être prélevés entraînant une concentration accrue de certains intrants dans les points de captage.
J’ai bien compris que votre commission s’intéresse également aux améliorations à apporter au travail interministériel. Notons que chaque nouveau plan Écophyto s’est accompagné d’un élargissement du nombre de ministères concernés. Il a d’abord été décidé dans le cadre du plan Écophyto II qu’un deuxième ministère, le ministère de l’environnement en l’occurrence, devait être impliqué en plus du ministère de l’agriculture, seul responsable du premier plan Écophyto qui avait pour échéance 2018. Cette décision n’est sans doute pas étrangère aux recommandations du rapport du 23 décembre 2014 écrit par M. le rapporteur Dominique Potier qui prônait, dans le cadre d’une nouvelle version du plan Écophyto, la prise en compte des questions liées à la biodiversité, notamment celle de l’impact de ces produits sur les milieux aquatiques. Le plan Écophyto II + a élargi la coordination interministérielle aux ministères de la santé et de l’enseignement supérieur. À ce stade, nous n’avons pas prévu de nouvel élargissement dans le cadre du plan Écophyto 2030 puisque les ministères déjà impliqués couvrent toutes les dimensions : celle de l’impact sur la santé des produits phytopharmaceutiques classés CMR (cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction) pour le ministère de la santé et celle de la recherche sur des alternatives et de l’amélioration de l’information des futures générations d’agriculteurs pour le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Le sujet de votre commission d’enquête concerne mon ministère à deux chefs : celui, bien sûr, de la transition écologique mais aussi celui de la cohésion des territoires, puisqu’il intéresse les élus locaux, au titre notamment de la compétence des communes aujourd’hui et des intercommunalités demain sur la gestion des points de captage d’eau. La stratégie nationale pour la biodiversité, une des premières déclinaisons de la COP15, sera bientôt présentée. Elle dresse d’abord le constat d’une érosion de la biodiversité. La cause première en est l’artificialisation des sols, mais l’usage des produits phytopharmaceutiques est également une cause importante, principalement pour les populations d’oiseaux et pour les insectes pollinisateurs.
Entre 2008, date du premier plan Écophyto, et 2022, le niveau d’utilisation des produits phytosanitaires est resté le même, malgré les engagements des plans successifs. Cela dit, cette stabilité sur une longue période n’est pas linéaire puisque, après une période de hausse, nous connaissons ces dernières années une période de baisse de certains usages. C’est encourageant. On observe notamment un recul spectaculaire, de l’ordre de 93 % à 96 %, tant en quantité de substances actives (QSA) qu’en nombre de doses unités (Nodu), dans l’usage de produits phytopharmaceutiques classés CMR 1. Les produits classés CMR 2 accusent un recul moins marqué, de l’ordre de 20 %. Quant aux usages non agricoles de produits phytopharmaceutiques, ils ont été réduits de plus de 95 %, notamment grâce à la loi du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, dite loi Labbé.
Je n’entrerai pas dans les détails du plan Écophyto 2030 – vous aurez sans doute l’occasion de me questionner plus spécifiquement à ce sujet. Je souhaite simplement souligner qu’il traduit un engagement de réduction de 50 % des usages des produits phytopharmaceutiques, soutenu par les moyens nécessaires. La réduction de ces usages doit en effet s’accompagner du financement dès à présent – sans attendre que la dangerosité de tel ou tel produit soit avérée – de programmes de recherche afin d’offrir des alternatives aux utilisateurs. Il s’agit d’éviter la procrastination à chacune des phases. J’ajoute que ce plan Écophyto doit être articulé avec le plan Eau qui, grâce à l’augmentation des moyens alloués aux agences de l’eau dans le projet de loi de finances pour 2024 – préalable à la réalisation d’actions concrètes d’accompagnement des gestionnaires de réseau – et grâce à la systématisation des plans de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (PGSSE), permettra un suivi des points de captage, qui est aujourd’hui une faiblesse des dispositifs de protection, tout particulièrement d’un point de vue sanitaire.
Je me tiens à votre disposition pour essayer de répondre à vos questions, grâce à mon expérience de ministre depuis ma nomination en juillet de l’année dernière, une période à la fois suffisamment longue pour me permettre d’avoir du recul et trop courte pour certains sujets pointus.
M. le président Frédéric Descrozaille. Je vous remercie pour la clarté et la concision de vos propos.
M. Dominique Potier, rapporteur. Je m’associe aux remerciements de M. le président. J’ai également apprécié votre humilité face à la situation et la bonne disposition que vous avez manifestée, comme vos collègues que nous avons auditionnés, à l’égard de notre commission dont le but est d’être utile au débat public en faisant des propositions, à un moment où plusieurs « atterrissages politiques » sont attendus dans les mois à venir. Je pense à l’annonce du plan Écophyto 2030 au début de l’année prochaine ; à l’adoption dans les prochains jours par le Parlement européen d’une position à propos du règlement sur l’utilisation durable des pesticides – dit règlement SUR –, qui représente une étape importante sur un long chemin ; à l’horizon de programmes de recherche européens en cours de conception.
Nous ne souhaitons pas dresser l’inventaire des responsabilités des différents ministres impliqués dans ce dossier au cours des dix dernières années ni vous demander de justifier leurs choix. Nous souhaitons en revanche connaître votre point de vue sur ce que nous pouvons qualifier d’incurie, même si les plans successifs ont connu des succès : à ceux que vous avez mentionnés, on pourrait ajouter la prise de conscience et la formation des agriculteurs ou encore la création du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides.
Ma première question concerne les objectifs. Certains font valoir qu’ils étaient trop ambitieux et prônent la prudence avec des objectifs de réduction de 20 %. Ils craignent que des objectifs inatteignables ne découragent le peuple. Pensez-vous au contraire qu’il faut maintenir un objectif de 50 %, auquel il serait urgent de consacrer les moyens nécessaires si nous voulons l’atteindre en 2030 ?
M. Christophe Béchu, ministre. Rétrospectivement, je regrette que les plans Écophyto n’aient pas affiché deux objectifs de réduction : l’un global et l’autre spécifique aux produits phytopharmaceutiques classés CMR 1. La réduction drastique de l’usage de ces derniers m’a surpris en tant que ministre lorsque j’en ai pris connaissance, d’autant plus que, en tant que citoyen, j’entendais les discours pointant l’échec de ces plans. Un objectif propre aux produits classés CMR aurait donné confiance aux citoyens dans l’action publique, qui doit se nourrir d’objectifs ambitieux accompagnés des bons indicateurs permettant de mesurer qu’elle va dans la bonne direction.
L’objectif d’une réduction de 50 % n’est pas un chiffre magique visant à frapper les esprits. Ce n’est pas un hasard s’il a été retenu à ce stade par le plan Écophyto 2030 et par le règlement SUR : c’est que nous sommes capables aujourd’hui de mesurer l’impact des produits phytopharmaceutiques sur la santé, mais également sur la biodiversité. Dans ce dernier cas, le constat est malheureusement accablant : à l’échelle de la planète, un million d’espèces sont menacées et cette menace est corrélée à l’usage des produits phytopharmaceutiques. On le constate notamment pour les oiseaux, dont la mortalité en milieu urbain et en milieu forestier est bien plus faible qu’en milieu rural. La carte des conséquences néfastes de l’usage de ces produits sur l’eau, le sol et l’air s’y superpose à celle des menaces sur la biodiversité. L’objectif de 50 % est donc celui que nous devons atteindre si nous sommes sincères dans nos efforts pour préserver la biodiversité.
M. Dominique Potier, rapporteur. Après des heures d’audition, nous constatons que ce qui a d’abord permis la baisse de l’usage des produits phytopharmaceutiques classés CMR 1, ce n’est ni l’agroécologie, ni le conseil aux agriculteurs, ni le marché, mais le retrait des molécules à la suite des travaux de l’Efsa, l’autorité européenne de sécurité des aliments et de l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Or, ces travaux ont été contestés par des membres de votre majorité et le ministre de l’agriculture a tenu des propos ambigus sur la loi de 2014, laissant entendre qu’il la remettait en cause, notamment dans ses dispositions modifiant le code de la santé publique pour attribuer à l’Anses une compétence d’évaluation et de gestion des risques en lieu et place du ministère de l’agriculture. Dans ces conditions, pouvez-vous nous confirmer que vous ne remettrez pas en cause la loi de 2014 et que vous vous opposerez, le cas échéant, à la proposition de loi « ferme France » que le Sénat a adoptée ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je n’ai aucune difficulté à vous répondre, que ce soit à titre personnel ou en tant que ministre, mais je ne peux vous donner la position du Gouvernement – ce serait m’élever au-dessus de ma condition –, même si je ne doute pas de sa teneur. Il n’est pas question de revenir sur un principe reposant sur la confiance en la science et donc en les avis rendus par des agences scientifiques, car il est le gage de la transparence vis-à-vis des citoyens. Cela dit, le système à double niveau complique parfois l’analyse : la mise sur le marché dépend des positions de la Commission et de l’avis des agences européennes, alors qu’il peut exister des divergences entre les agences européennes et les agences nationales, ce qui n’est pas de nature à favoriser la confiance des citoyens en la science.
M. Dominique Potier, rapporteur. Le président de la commission et moi-même aimerions voir émerger, lors du prochain mandat de la Commission européenne, une harmonisation de l’évaluation et de la gestion du risque à l’échelle européenne, qui tienne bien sûr compte des contextes climatiques et politiques divers des pays membres. Une telle harmonisation est une question de crédibilité et permettrait de réduire les distorsions de concurrence auxquelles sont soumis nos producteurs. Partagez-vous ce souhait ?
M. Christophe Béchu, ministre. L’absence de clauses miroirs pose question, car elle permet l’importation en France de produits fabriqués avec des molécules que nous avons interdites pour nos agriculteurs. Si nous ne luttons pas contre de telles distorsions de concurrence, comment répondre aux acteurs qui, de bonne foi, se demandent si on ne les conduit pas vers des impasses économiques pour des raisons écologiques ?
Je suis moins enthousiaste que vous quant à la perspective d’une harmonisation au niveau européen en raison des votes du Parlement européen au cours de ces derniers mois, particulièrement celui sur le règlement relatif à la restauration de la nature, qui a été adopté avec une marge très ténue. La tonalité de nombreux discours reflète une tension de plus en plus forte sur la transition écologique exprimée par un nombre croissant de députés européens et de pays qui trouvent que trop de contraintes sont imposées et que l’Union européenne doit ralentir dans ce domaine. Cette tension a été particulièrement prégnante lors des débats sur la restauration des zones humides. Dans ces conditions, je ne suis pas sûr que l’harmonisation se fasse sur la base du mieux disant et je m’inquiète de voir l’Union européenne prendre une direction moins favorable à la protection de l’environnement.
M. Dominique Potier, rapporteur. Une telle contradiction entre notre idéal européen et la réalité doit être difficile à vivre politiquement, mais je vous remercie de vous être prêté au jeu de cette question de pure prospective, pour laquelle nous ferons des propositions dans le cadre du rapport.
M. Christophe Béchu, ministre. Je voudrais compléter mon propos par le cas pratique du glyphosate. La Commission européenne a proposé de le réintroduire, sans limitation, pour une durée de dix ans. Dix-sept pays sont prêts à valider cette proposition alors que d’autres cherchent à diminuer l’usage du glyphosate, dont l’impact sur la biodiversité est indiscutable. On voit ici combien l’idéal européen peut se heurter à la diversité des positions et des histoires et on mesure l’immense difficulté à trouver un consensus parmi les dix pays ne souhaitant pas voter en faveur de cette proposition : même à cette échelle, la non-régression environnementale est complexe.
M. Dominique Potier, rapporteur. Il est un autre domaine dans lequel existent à la fois une politique européenne et une très grande subsidiarité nationale, celui de la politique agricole commune (PAC). La subsidiarité nationale, qui apparaît à certains comme une régression, est un fait. La France a eu la faculté d’établir un contrat entre ses producteurs et la nation. Le fait que figure dans le plan Écophyto 2030 la volonté d’engager – certes lentement, et de façon un peu floue à nos yeux – une révision du plan stratégique national (PSN) un an après sa mise en œuvre, n’est-il pas un aveu que ce plan ne serait pas à la hauteur des enjeux écologiques ?
Vous pourriez me répondre, comme l’a fait le ministre de l’agriculture, que la situation n’est guère plus favorable dans les autres pays, qu’aucun d’entre eux ne prend de mesures élitistes, et que les mesures populaires que nous avons prises ne changeront rien – bref, que nous sommes finalement dans la moyenne européenne. Mais une telle réponse n’est pas à la hauteur des enjeux. Nous aimerions vraiment savoir si votre ministère a pesé dans les débats qui ont prévalu à la fixation des règles du PSN, ou bien si le dialogue n’a eu lieu qu’entre la profession et le ministère de l’agriculture.
M. Christophe Béchu, ministre. À l’occasion de l’un des derniers conseils européens des ministres de l’environnement, juste après le premier vote sur la position de la Commission, tous mes homologues – y compris ceux de pays de petite taille, où l’on aurait pu imaginer que les décisions interministérielles étaient plus fluides – ont expliqué qu’ils ne pouvaient pas arrêter une position à titre personnel sans avoir consulté leur ministre de l’agriculture.
J’ajoute – sans critique aucune – que le temps que nous avons passé avec nos homologues lors du Conseil des ministres franco-allemand nous a permis de constater que sur d’autres sujets – celui du loup, par exemple –, les débats entre les ministères allemands de l’environnement et de l’agriculture sont comparables à ceux que nous avons en France.
J’en viens au PSN et à la place du ministère de la transition écologique. Les produits de protection des plantes (PPP) étant aujourd’hui réservés à des usages agricoles – puisque les autres usages ont été progressivement bannis –, la discussion interministérielle consacre évidemment le rôle important du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. La discussion n’est cependant pas de façade et ne vise pas simplement à offrir une voix au chapitre aux autres ministères – ni dans les discussions que nous avons en vue d’arbitrages et de prises de position vis-à-vis de Matignon, ni dans les débats que nous avons entre ministres.
Quant au besoin d’ajuster certaines politiques européennes, il est d’autant moins surprenant qu’un laps de temps est nécessaire entre leur conception et leur mise en application, pour que nous nous mettions d’accord à l’échelle européenne. Certes, on lance déjà une révision du PSN alors qu’il a été arrêté il y a peu de temps. Mais en réalité, des mois se sont écoulés entre la genèse du dispositif et son entrée en application, après une véritable course de haies au niveau européen. Pendant ce temps, la société, la science et la connaissance ont continué d’évoluer. Et au moment d’enclencher une nouvelle procédure, nous savons qu’elle prendra de nouveau plusieurs mois avant d’aboutir. Je soutiens donc évidemment sans réserve la révision du PSN, qui me semble logique. Elle est même rassurante, puisqu’elle démontre que les différentes politiques sont cohérentes et qu’il est tenu compte de nos plans Écophyto : ceux-ci ne visent pas simplement à répondre à une pression citoyenne mais correspondent à un engagement et à une volonté sincères de réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques.
M. Dominique Potier, rapporteur. Vous avez collaboré à l’élaboration de ce PSN dont tout le monde – scientifiques, ONG et même syndicats, à demi-mot – admet aujourd’hui qu’il ne modifiera pas de façon significative les pratiques agroécologiques. Il y avait pourtant une opportunité. Alors qu’il fallait revoir les critères, on aurait pu estimer que c’était le bon moment pour inciter davantage à la culture biologique et favoriser les mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec). Au lieu de cela, l’ensemble des dispositifs de l’écorégime ont été revus à la baisse de façon homogène – alors que l’on savait déjà que les changements opérés n’étaient pas à la hauteur des enjeux écologiques, qui sont dans l’intérêt des agriculteurs eux-mêmes. Avez-vous pris cette décision de façon commune avec le ministère de l’agriculture, ou la lui avez-vous déléguée ?
M. Christophe Béchu, ministre. Par définition – ce n’est ni une lubie, ni un slogan –, ce qui est interministériel fait l’objet de discussions entre l’ensemble des ministères concernés puis est arbitré, à la fin, par Matignon – c’est le seul moyen de trancher à ce niveau. Lors de la mise en œuvre, ensuite, la place prééminente qu’occupe naturellement le ministère de l’agriculture n’échappe à personne. Elle ne nous empêche cependant ni de faire valoir nos arguments, ni de considérer qu’il existe encore des marges d’amélioration avec la révision du PSN. On peut objectivement considérer que les cahiers des charges souffrent d’une trop grande complexité et que le renforcement des mesures agroenvironnementales aurait pu être plus ambitieux et mieux financé, mais l’histoire n’est pas totalement écrite, monsieur le rapporteur, vous le savez.
M. Dominique Potier, rapporteur. En tout état de cause, l’arbitrage rendu ne favorise en rien les mesures agroécologiques. Cette révision budgétaire est une occasion perdue mais nous entendons votre volonté, monsieur le ministre, de revenir sur ce PSN.
J’en viens à un dispositif qui a bénéficié du PSN : la Haute Valeur environnementale (HVE). J’ai demandé à pouvoir consulter l’ensemble des pièces relatives aux débats qui ont prévalu aux décisions concernant ce label. Je fais partie de ceux qui considéraient que l’on ne pouvait pas conditionner l’évolution agroécologique au marché du bio et que la HVE constituait, à cet égard, un levier important, une étape accessible à un grand nombre d’agriculteurs, qui leur permettrait d’enclencher une démarche agroécologique. Mais la taxonomie retenue ménage la possibilité de s’engager dans diverses démarches, qui détournent l’attention de celles qui concernent directement l’ambition de réduction des produits phytopharmaceutiques. Avez-vous un regret quant aux arbitrages que vous avez rendus, monsieur le ministre, ou qu’a rendus votre ministère, si vous n’étiez pas présent à ce moment‑là ? Ce sujet a été beaucoup investi par le ministère. Regrettez-vous que le label HVE n’enclenche pas vraiment le moteur de la réduction de la phytopharmacie ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je voudrais d’abord préciser que je n’ai pas été associé personnellement à l’instauration du label, pour une raison non pas fonctionnelle mais de date. J’entends, monsieur le rapporteur, qu’à titre personnel vous avez évolué sur ce sujet. Ma réponse est la suivante : nous avons besoin de miser sur l’agroécologie et sur le bio ; nous avons besoin de faire progresser tout ce qui nous permet de diminuer les intrants et la pression sur les ressources. La planification écologique repose sur un doublement des surfaces en bio d’ici à 2030, pour des raisons de préservation de la biodiversité notamment. Mais nous ne pourrions pas nous satisfaire d’une situation dans laquelle 20 % des agriculteurs seraient en bio tandis que 80 % d’entre eux n’auraient pas bougé. Je ne dis pas que c’est ce que vous dites, monsieur le rapporteur, mais c’est ma réponse ! Or, je considère que des labels comme HVE permettent de faire bouger les choses, d’enclencher des démarches. Par rapport à l’industrie, l’agriculture est confrontée à trois difficultés particulières lorsqu’il s’agit de changer de modèle : d’abord, elle repose sur du vivant ; ensuite, l’âge moyen des exploitants explique que certains ne souhaitent pas se lancer dans des processus de conversion qu’ils n’auront pas le temps d’amortir ; enfin, les réalités de marché doivent être prises en compte. S’il faut évidemment se pencher sur les critères des labels, il convient aussi de veiller à ce que ceux qui sont vertueux bénéficient des décisions que nous prenons. Cela passe par l’application de la loi Egalim, par le suivi de la part de repas bio dans les cantines mais aussi par la vigilance au moment de signer des accords internationaux afin d’éviter des importations qui ne sont bonnes ni pour l’écologie ni pour le revenu d’une partie de nos agriculteurs. C’est ainsi que nous pourrons crédibiliser les ambitions affichées sur le cahier des charges.
Lorsque j’ai rencontré, à leur demande, de jeunes agriculteurs, j’ai été frappé de constater que la génération qui arrive ne se soucie pas des labels et se préoccupe plutôt de prendre concrètement le wagon de la transition.
M. Dominique Potier, rapporteur. Vous vous êtes investi au premier plan dans l’exercice de planification d’Antoine Pellion, dont j’ai eu l’occasion de saluer le remarquable travail sur les cycles du carbone, de la biomasse et de l’azote. Alors que je dois l’interroger prochainement – en espérant m’épargner une saisie de documents –, j’aimerais savoir comment s’articulent la réduction de 50 % de l’usage de produits phytopharmaceutiques, la décarbonation, la défense de la souveraineté alimentaire et le besoin en biomasse. Avez-vous le souvenir d’avoir participé à des débats au cours desquels ces différents enjeux auraient été mis en contradiction les uns avec les autres ? Je vous pose la question car on entend dire, dans la société civile, que la priorité serait la décarbonation, et que la réduction de l’usage des produits phytosanitaires pourrait passer en second plan. Il est vrai que l’équation est complexe et difficile à résoudre. Avez-vous eu à participer à des arbitrages, ou avez-vous été amenés à comprendre la façon dont la trajectoire proposée permettait de concilier les différents enjeux ? Je poserai la question à Antoine Pellion, mais j’aimerais avoir la version de Christophe Béchu.
M. Christophe Béchu, ministre. C’est effectivement une question complexe. Nous y avons consacré un an de travail et des dizaines de réunions. Lorsque les enjeux évoqués relevaient de la transition écologique, mon ministère avait objectivement le lead. Sur d’autres enjeux, le lead était partagé avec d’autres ministres. À d’autres moments, lors de discussions très techniques sur certaines filières, j’ai été plus spectateur qu’acteur.
Sur les questions relevant de mon périmètre ministériel, comme les transports ou les bâtiments, nous avons produit des propositions ; nous avons discuté des hypothèses, négocié les orientations et discuté des sous-jacents budgétaires permettant de crédibiliser les objectifs de rénovation et d’accompagnement des collectivités territoriales.
Nous avons beaucoup travaillé, avec le ministère de l’agriculture, sur le sujet de la biomasse. En effet, la planification ne se limite pas à l’atténuation du réchauffement climatique : elle englobe également la stratégie nationale pour la biodiversité, et prévoit l’adaptation à une hausse de la température de quatre degrés. Or, la forêt est au croisement des enjeux de stockage et de préservation de la biodiversité. Nous avons également échangé sur les biodéchets et sur la production de compost – qui relève des collectivités territoriales – pour remplacer certains engrais, et avons trouvé sur ce sujet des points de jonction.
Je n’ai pas participé personnellement, en revanche, à un temps spécifiquement consacré à la trajectoire d’usage des produits phytopharmaceutiques en lien concret avec la planification écologique. Pour autant que je m’en souvienne, nous avons rapidement évoqué les questions liées à la production et à l’importation des engrais azotés, et sur les conséquences potentielles pour leurs fabricants, mais ces points sont marginaux par rapport aux questions que vous posez sur notre contribution effective.
M. Dominique Potier, rapporteur. Je le regrette, car cela fait des années que nous alertons sur la trajectoire de diminution des engrais azotés, intimement liée à celle de phytopharmacie. Nous avons interpellé Julien Denormandie plusieurs fois devant le Parlement, lorsqu’il était ministre, en lui disant qu’il fallait anticiper, au risque de se retrouver dans une impasse. Nous lui avons expliqué que les dépenses en ressources fossiles auraient des effets sur le dérèglement climatique, qu’elles ne seraient bientôt plus acceptées et qu’elles allaient soulever des problèmes de souveraineté. Or, la loi dite climat et résilience n’a pas fixé d’objectif précis à court terme. N’y a-t-il pas eu des débats sur la façon de maîtriser l’usage des engrais azotés et des produits phytosanitaires tout en conservant la biomasse nécessaire ? Ce sont des sujets capitaux, qui relèvent directement de l’énergie et du climat. Je ne vous en fais pas le reproche, monsieur le ministre, mais je vais poursuivre mes investigations. Nous aimerions en effet, dans notre rapport, pouvoir indiquer si ces questions ont été traitées par le Gouvernement, dans un cadre ou dans un autre. Cela nous rassurerait d’entendre qu’il s’est emparé de cette question, qui consiste à concilier la nécessité de diminuer l’usage des engrais azotés – au-delà de celui des produits phytosanitaires – avec les besoins alimentaires.
M. Christophe Béchu, ministre. Vous ne m’avez pas demandé si le Gouvernement s’était penché sur la réduction des engrais azotés lors de la discussion de la trajectoire, mais si j’avais personnellement participé à la discussion. La planification écologique comprend cinquante-deux leviers, très détaillés. De mémoire, la question des engrais a fait l’objet de discussions avec le ministère en charge de l’industrie sous l’angle que vous évoquez : celui de la souveraineté. L’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) évite d’empiéter sur des espaces agricoles dont nous aurons besoin à l’avenir – dans un contexte où le rendement à l’hectare ne va pas augmenter et où les ressources, notamment en eau, vont diminuer. Cela implique des modes de production plus sobres, privilégiant les circuits courts et la production locale. L’ensemble de ces sujets font bien l’objet d’une prise en compte cohérente dans le cadre de la planification écologique. En revanche, mon ministère n’a pas apporté de solutions de façon proactive dans ce domaine : sur plus de la moitié de la trajectoire, c’était déjà à nous d’expliquer les types de gisements que nous avions identifiés et de discuter avec le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) pour confronter ses analyses avec les besoins budgétaires et avec la place des collectivités territoriales dans le bouclage global – croyez-moi, cela nous a pas mal occupés !
M. Dominique Potier, rapporteur. J’aurais préféré que vous ne parliez pas du ZAN car nous manquons de temps, si bien que je ne pourrai pas vous dire tout le mal que je pense de la loi qui a été adoptée ! (Sourires.)
Revenons maintenant sur un sujet capital directement placé sous votre autorité, qui est celui qui m’a le plus bouleversé en tant que rapporteur : la mise en danger des milieux aquatiques et de l’accès à l’eau potable par le dérèglement climatique et la concentration des pollutions, qui risquent d’avoir des effets tragiques. S’agissant du coût de la pollution de l’eau, j’ai été très surpris de constater que le seul chiffre figurant dans le document du Gouvernement – qui vient forcément de votre ministère – est issu d’une étude menée en 2015-2016. N’y a-t-il pas de référence plus récente ? En huit ans, les effets du dérèglement climatique ont progressé ; j’ai ainsi reçu aujourd’hui des informations alarmantes au sujet de la forêt. Peut-on établir un plan Écophyto 2030 en se référant à des études de 2015, sans pouvoir mieux documenter le coût public de la pollution de l’eau et les risques avérés pour la sécurité alimentaire de nos concitoyens ?
M. Christophe Béchu, ministre. L’été de mon arrivée, j’ai vécu aux premières loges un épisode de sécheresse qui m’a conduit à mesurer les « trous dans la raquette » en matière de politique de l’eau. Vous qui vouliez parler d’interministériel, sachez que je manquais de remontées d’information en temps réel concernant les communes concernées par des difficultés d’accès à l’eau potable, parce que le sujet était géré par les Agences régionales de santé – qui relèvent du ministère de la santé et de la prévention. La mission d’inspection sur la gestion de la sécheresse a d’ailleurs bien documenté ce que nous devions améliorer, et le retour d’expérience réalisé dans la foulée a nourri le plan Eau et les mesures annoncées le 30 mars 2023.
Il est exact que le coût de la pollution de l’eau n’a pas été actualisé. C’est la raison pour laquelle nous lançons une mission sur le sujet, qui sera menée conjointement par l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Elle me sera d’autant plus utile que j’ai, dans beaucoup de domaines, une marotte : je souhaite que nous puissions renseigner nos concitoyens sur le coût de l’inaction. Si l’on ne tient pas compte, dans le débat sur le coût des politiques à mettre en œuvre, du coût de l’inaction – en matière de dépollution ou de prévention, par exemple –, on n’a pas tous les éléments nécessaires pour décider ! Le coût de l’inaction relativise parfois le coût de l’action – à tout le moins, il l’objective.
Le chiffre actualisé nous permettra à l’avenir, dans le cadre de nos politiques d’adaptation, de démontrer qu’il est rationnel d’augmenter un budget ou de renforcer la responsabilité des metteurs sur le marché. C’est le cas s’agissant par exemple des microbilles de plastique : l’eau et les milieux aquatiques sont malheureusement mis en danger par d’autres types de polluants, dont il faut réduire les usages ou à l’encontre desquels il faut prendre des mesures spécifiques.
M. Dominique Potier, rapporteur. À la croisée du plan Eau et du plan Écophyto 2030, qui sont évidemment articulés, les propositions relativement audacieuses qui ont été faites en matière de protection des captages ne nous paraissent pas suffisamment ambitieuses. Je pense en particulier au droit de préemption dont vous savez bien, en tant qu’élu, qu’il ne peut être exercé qu’au moment d’une vente. Ne faudrait-il pas aller plus loin ? Cela fait une, voire deux décennies, que dans certains territoires on met de l’argent public, que l’on négocie et que l’on tergiverse. Mais nous n’avons plus le temps, car nous allons manquer d’eau potable ! La puissance publique ne devrait-elle pas faire preuve d’une plus grande autorité et ne pas laisser les préfets sous la pression des acteurs locaux ? Une certaine verticalité ne devrait-elle pas s’exprimer, au nom de l’intérêt général ? Des procédures plus unifiées, à l’échelle nationale, ne devraient-elles pas être mises en œuvre ?
M. Christophe Béchu, ministre. J’entends vos propos, mais il existe une mesure très ambitieuse, qui pourra servir de base à d’autres décisions par la suite : c’est l’obligation, pour chaque captage, de disposer d’un plan de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (PGSSE). Une part significative d’entre eux n’en disposent pas, alors qu’un tel plan permet d’enregistrer des résultats concrets et, parfois, de prendre les mesures appropriées. Alors qu’elle est une mesure du plan Eau, la systématisation des PGSSE n’a pas été particulièrement mise en avant car, compte tenu du contexte, tout le monde s’est focalisé sur les enjeux de quantité. Dans quatre-vingt-quinze départements, des arrêtés préfectoraux restreignant l’utilisation de l’eau ont été pris ; dans soixante-quinze d’entre eux, cette utilisation a été limitée à l’eau potable ; 1 000 communes ont été privées d’eau : cet épisode de sécheresse a été vécu comme la fin de l’abondance et le signal qu’il faudrait faire sans, ou avec moins.
Une partie du plan Eau concerne pourtant la qualité. En effet, plus de la moitié de nos masses d’eau ne sont pas en bon état sur le plan écologique, et la perspective de leur diminution ne va faire que renforcer le problème.
À partir des indicateurs objectifs dont nous disposerons, nous pourrons prendre des mesures. Permettez-moi de vous rappeler à cet égard que nous ne sommes pas uniquement dans une logique de sanctuarisation mais que nous évoquons des projets de conversion à l’agroécologie, pour lesquels des crédits sont prévus dans le plan Eau. Une augmentation de la redevance pour pollutions diffuses (RPD) figure dans le projet de loi de finances pour 2024 : elle nous permettra de sortir d’une logique visant à utiliser l’argent public pour contrer les effets que l’on cherche à réduire. Nous avons ainsi abouti à quelque chose d’équilibré, avec des mesures visant à accompagner les gestionnaires de proximité et d’autres visant à augmenter la redevance, afin de limiter la cause de la pollution.
M. le président Frédéric Descrozaille. Je trouve très intéressant que vous ayez rencontré un syndicat agricole. Je peux témoigner, en tant qu’ancien directeur de l’interprofession des fruits et légumes frais, que les professionnels du secteur agricole ne sont pas les bienvenus au ministère de la transition écologique ou au ministère de la santé – c’est du vécu. Ce sont en outre des administrations centrales que je perçois – y compris en tant que député depuis quelques années – comme rivales, et qui font arbitrer par le Premier ministre des positions souvent inconciliables.
Ma question est la suivante : en tant que ministre de la transition écologique, considérez-vous qu’il faille s’orienter vers une agriculture totalement débarrassée de la chimie ? Ou bien pensez-vous qu’il faille continuer de considérer le recours à la chimie comme pertinent, dans un objectif de re-conceptualisation des systèmes, de réintroduction de polycultures et d’autonomie protéique ? Vous savez bien que le glyphosate, que vous avez évoqué durant votre propos liminaire, est emblématique de cette question. On touche là à la différence entre le danger et le risque – qui est l’exposition au danger. Le politique peut décider que sous certaines conditions, de façon réglementée, l’exposition au danger peut être acceptable parce que souhaitable dans l’intérêt général : le glyphosate, par exemple, peut être utile à la transformation agroécologique dans certains cas, avec des restrictions d’usage drastiques. Votre ministère fait-il arbitrer par la Première ministre un écart entre une administration centrale qui veut promouvoir une agriculture sans chimie, et une autre qui estime que l’on ne se passera jamais du recours à la chimie ?
M. Christophe Béchu, ministre. Compte tenu de l’ampleur actuelle de l’utilisation des produits phytosanitaires, nous sommes bien loin d’un monde agricole dont la chimie serait absente ! Si nous respectons l’objectif du plan Écophyto et parvenons à réduire de 50 % l’usage de ces produits, je propose qu’ensuite nous regardions ensemble le nombre de nouvelles réductions de 50 % que nous pourrions atteindre ! Pour un certain nombre d’usages, il n’existe pas aujourd’hui de réponse sans chimie. Une approche simpliste pourrait consister à dire qu’il faut tout supprimer, mais dans la réalité, la chimie nous permet parfois de limiter les impacts environnementaux des solutions alternatives, comme le tassage des sols.
On ne peut pas contester en revanche notre trop grande dépendance à la chimie et à des produits dont la dangerosité n’est pas seulement potentielle mais avérée. Nous avons à cet égard des marges considérables d’amélioration avec des auxiliaires, des schémas de cultures combinées, des programmes de recherches alternatives ou encore grâce au biocontrôle – pour lequel six solutions supplémentaires sont mises sur le marché chaque mois !
De là où je vous parle, et avec un horizon temporel qui ne va pas beaucoup plus loin que 2030 – c’est presque manquer d’humilité que d’imaginer comment se terminera la décennie, compte tenu de la rapidité des changements –, je n’imagine pas une agriculture qui pourrait se passer totalement de chimie. Je vois cependant des marges de diminution qui sont telles que cela vaut le coup de se concentrer sur elles.
M. le président Frédéric Descrozaille. La loi de 2014, déjà évoquée par le rapporteur, a eu pour mérite évident de renforcer la confiance que peuvent avoir nos concitoyens dans les décisions de mise sur le marché et la gestion du risque en faisant appel à une agence indépendante et vous avez vous-même souligné, monsieur le ministre, qu’il ne serait jamais question de remettre en cause le rôle de la science. D’un autre côté, la gestion du risque fait l’objet de décisions politiques en fonction de ce qui est jugé acceptable. Confier ce dernier point à une agence indépendante, au sujet de laquelle se pose la question de savoir devant qui elle est responsable, participe au discrédit du politique, et paradoxalement à la crise de confiance dans les élus et dans les institutions. Quelle est votre position à cet égard ?
M. Christophe Béchu, ministre. C’est une question à la fois très philosophique et très politique à laquelle je ne vous répondrai pas en tant que ministre, mais en tant que citoyen. Je considère que la décision doit revenir, à la fin, au politique, pour une raison très simple : sinon, on renforcera une forme de discrédit des scientifiques dans un certain nombre de cas, parce que personne n’assumera la décision, mais que tout le monde, pour m’exprimer d’une manière un peu triviale, se repassera la patate chaude. Par ailleurs, il arrive parfois, et le covid en a été un exemple, que tous les scientifiques ne soient pas d’accord. Il y a des nuances entre ce qui est probable, potentiel ou avéré et entre les degrés de risque selon l’intensité de l’exposition ou la distance. Il me paraît souhaitable que ce soit une instance bénéficiant d’une légitimité démocratique qui tranche à la fin. Je ne crois pas en un monde dans lequel celui qui assume la responsabilité serait celui qui a eu la meilleure note à un concours. Il faut suivre une logique dans laquelle celui qui décide se prononce en prenant en compte l’intégralité des paramètres.
M. le président Frédéric Descrozaille. Je reviens sur l’harmonisation européenne, domaine dans lequel nous ne nous sommes pas privés de rêver, le rapporteur et moi… Je précise aussi, au passage, qu’on ne peut pas à la fois prétendre être le meilleur élève de la classe et avoir le sens du compromis requis pour une harmonisation. Vous avez dit qu’il était à craindre que celle-ci ne soit pas alignée sur les exigences françaises – celles de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), notamment pour le glyphosate. Il est important d’en avoir conscience et de le dire.
Peut-on rêver d’un troisième pilier de la PAC qui serait consacré à l’adaptation au réchauffement climatique et à la transition agroécologique ? C’est une question qui a été soulevée à plusieurs reprises ces dernières années, y compris par des députés européens. S’agissant du PSN, on sait bien que les ministres de l’agriculture ont toutes les peines du monde à arbitrer entre les différentes filières agricoles pour changer les règles du jeu. Compte tenu de l’ampleur de la mutation forcée qui va se dérouler – les projections du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat laissent penser que des cultures seront au moins déplacées du Sud au Nord –, peut-on envisager une augmentation du budget européen pour financer un troisième pilier ou est-ce de la science-fiction ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je voudrais le redire avec beaucoup de simplicité et beaucoup de force : nous ne pouvons pas continuer à importer autant de produits agricoles en Europe sans faire preuve d’une certaine hypocrisie environnementale ou écologique. Qu’il s’agisse de bilan carbone ou de réglementation, j’ai du mal à comprendre qu’on ne soit pas beaucoup plus clair au sujet des clauses miroirs.
Un règlement particulièrement courageux a été adopté dans le domaine de la lutte contre la déforestation : les fournisseurs de caoutchouc, d’huile de palme ou de viande de bœuf de certains pays devront certifier que leurs produits ne proviennent pas de terres déboisées et un contrôle par satellite est prévu. Quand je vois les récriminations actuelles des Brésiliens, la personnalité du nouveau président argentin, élu hier, la tentation d’un certain nombre de pays européens de ratifier l’accord de libre-échange avec le Mercosur et les débats que nous avons parfois en Europe, je me dis qu’on ne mesure pas que la première urgence est de limiter les échanges mondiaux dans ces domaines afin de pouvoir discuter avec nos agriculteurs dans un cadre dans lequel la question de leurs revenus et de leurs pratiques est abordée sans distorsion extérieure : il me semble que c’est la priorité. Si l’on n’assume pas l’idée que les règles que nous établissons, quelle que soit leur ampleur, ne doivent pas conduire à ce que des produits moins chers qui ne viennent pas d’Europe puissent concurrencer ceux qu’on fabrique ici, on aura de toute façon des difficultés à nouer un pacte de confiance, et même un pacte tout court avec les agriculteurs.
Je ne suis pas persuadé, en revanche, qu’on ait besoin d’un troisième pilier. Nous pouvons continuer à assurer un rééquilibrage entre le premier et le deuxième. Je comprends quelle pourrait être la tentation d’aller plus loin, mais je vous avoue très humblement que ce n’est pas un sujet auquel j’ai réfléchi. Mes responsabilités ne m’ont pas donné le loisir de me pencher sur cette question, mais je suis rassuré, pour notre pays, de voir que des membres du Parlement travaillant sur ce type de sujets se posent cette question. Je ne manquerai pas de vous questionner lorsque je m’occuperai à mon tour d’une commission d’enquête. (Sourires.)
M. Dominique Potier, rapporteur. Je note la position du ministre de l’écologie que vous êtes à l’égard du Mercosur. Nous partageons tout à fait votre méfiance, et je trouve que c’est une bonne nouvelle que vous l’exprimiez aussi clairement. Le discours du Gouvernement et parfois celui du Président de la République peuvent être plus ambigus.
Vous avez parlé des clauses miroirs. Certains interlocuteurs nous ont alertés en nous disant que ces clauses qui devraient être un antidote contre le mauvais commerce peuvent devenir son prétexte : si on a des mesures miroirs, on peut commercer avec tout le monde. Or on peut se poser des questions sur l’efficience de ces mesures. Quand un pesticide est interdit chez nous, la limite maximale de résidus devrait être égale à zéro dans les produits importés. Que pensez-vous de cette hypothèse à peine esquissée à ce stade par le Gouvernement ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je partage l’idée qu’il ne faut pas se tromper d’indicateur. La clause miroir vise non pas à se dédouaner, mais à assurer une mise en cohérence, même si j’entends l’argument selon lequel il faut savoir ne pas aller trop loin. Cela devrait être un principe de base, et non l’objet de discussions thème par thème : quand on applique une règle, celle-ci doit, de manière générale, s’appliquer aussi à l’extérieur. Très concrètement, à partir du moment où on exige de ceux qui produisent ici un résidu nul, on ne peut pas tolérer qu’il ne soit pas également nul pour ceux qui veulent vendre chez nous.
Vous avez évoqué l’idée que l’information citoyenne et la prise de conscience font partie des bienfaits des plans Écophyto. Or, les gens sont persuadés, quand on leur explique qu’on réduit l’usage de certains produits, que cela vaut aussi pour l’alimentation qu’ils achètent eux-mêmes. L’absence de clauses miroirs peut contribuer à induire en erreur nos concitoyens : ils pensent de bonne foi qu’ils n’achèteront pas des produits comportant des substances interdites.
M. Dominique Potier, rapporteur. Si je comprends bien, vous n’êtes pas fermé à l’idée d’un durcissement et d’une capacité de contrôle sur place, ce qui suppose un redéploiement des moyens européens, à moins qu’on ne retienne une hypothèse sur laquelle je suis en train de travailler, qui serait une sorte d’inversion de la charge de la preuve pour ceux qui exportent chez nous. Après tout, en effet, est-ce au contribuable européen de financer les contrôles ? Nous y réfléchissons, mais nous pensons en tout cas que le statu quo ou l’ambiguïté sur ces questions contribuent à une sorte de découragement, aussi bien des consommateurs, des producteurs que des citoyens. Il faut davantage de clarté.
Même si nous poursuivrons demain le dialogue avec la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, avec qui j’ai déjà eu l’occasion de m’entretenir de ces questions, au pied de l’hémicycle, je dois dire que nous n’avons pas connaissance d’un véritable programme européen One Health – une seule santé. Il existe des programmes français, relevant du ministère de la santé et de votre ministère, en cours ou en préparation, et des dispositions ont également été prises dans le cadre onusien, grâce à des coopérations entre l’OMS (Organisation mondiale de la santé), la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) et l’ex-OIE (Organisation mondiale de la santé animale), mais un chaînon semble manquer, celui d’une architecture européenne en la matière. Pensez-vous que cela serait souhaitable ?
M. Christophe Béchu, ministre. J’ai essayé de passer en revue mentalement, pendant que vous parliez, la liste des dispositifs que je connais. Je n’ai pas spontanément trouvé d’exemples, mais Sylvie Retailleau sera beaucoup plus qualifiée que moi pour vous répondre sur ce point.
M. Dominique Potier, rapporteur. Un des grands enjeux des débats portant sur les agences, comme l’Anses et l’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) porte sur leur prise en compte de l’exposome et des effets cocktails. Or, on ne peut pas appréhender la question de l’exposome si notre capacité à mesurer des impacts multifactoriels, dans le temps et en allant au-delà de l’agriculture, ne progresse pas. Le défi des connaissances produites par la recherche fondamentale, mais aussi appliquée, et mises à la disposition des agences est particulièrement important.
M. Christophe Béchu, ministre. C’est d’autant plus vrai que l’absence de programme de recherche européen peut conduire à ce que ce soient les acteurs qui sont sur la sellette, pour un certain nombre de choses, qui fournissent les seules données sur lesquelles les décisions peuvent ensuite se baser.
M. Dominique Potier, rapporteur. Nous y avons déjà un peu pensé, en effet, et nous allons travailler dans les jours qui viennent sur le poids de la recherche privée et de la recherche publique, notamment en matière de phytopharmacie.
Vous avez souligné l’importance des PGSSE. Il me semble les agences de l’eau nous ont dit que 70 % des captages n’avaient pas de plan de gestion établi. Est-ce le bon ordre de grandeur ?
M. Christophe Béchu, ministre. Pour moi, c’est plutôt 50 %.
M. Dominique Potier, rapporteur. Par ailleurs, il y a le dispositif ORE – des obligations réelles environnementales –, qui est intéressant, des mesures existent aussi en matière de préemption foncière, mais elles sont peu efficientes en l’absence de vente des terrains, et vous avez dit que vous alliez activer les ZSCE – les zones sous contrainte environnementale – d’une façon plus volontariste dans le cadre du plan Écophyto 2030. Quels sont les freins pour l’utilisation de ces dispositions qui semblent les plus prometteuses aux agences de l’eau ? Si elles ne sont pas activées, est-ce la faute de l’ARS ou des préfets ? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas ?
M. Christophe Béchu, ministre. Nous n’allons pas faciliter l’usage des ZSCE, mais le systématiser. Un dépassement des seuils signifiera une fermeture automatique. C’est ce que prévoit le plan Eau du 30 mars.
M. Dominique Potier, rapporteur. C’est la verticalité que j’appelais de mes vœux.
M. Christophe Béchu, ministre. Oui, mais elle ne concernera pas la préemption des terrains ou la conversion agroécologique. Si les seuils sont dépassés, un arrêté préfectoral de fermeture du captage tombera automatiquement, car c’est un impératif de santé. Des instructions très claires seront publiées dans les semaines qui viennent, sans doute avant Noël.
Nous avons un peu plus de 30 000 captages en France, dont 3 000, au moment même où nous parlons, sont fermés pour des raisons sanitaires. Le dispositif que je suis en train de vous présenter permettra de changer totalement le niveau de protection de nos concitoyens et de renforcer l’intérêt de la réalisation de mesures.
Les ZSCE fonctionneront de manière graduée : des contraintes seront d’abord imposées en matière de suivi. On laissera du temps ; un couperet ne tombera pas automatiquement : on ne coupera pas tout, en laissant les intéressés se débrouiller pour que nos concitoyens aient de l’eau potable. En revanche, le dépassement des seuils entraînera de manière automatique l’application de dispositifs de suivi qui permettront à la préfecture et aux différents partenaires concernés d’imposer des mesures, y compris en ce qui concerne les intrants, pour qu’on revienne à une situation normale, c’est-à-dire qu’on repasse sous les seuils. Nous aurons l’occasion de vous présenter la procédure de suivi d’une manière un peu plus spécifique si vous le souhaitez.
C’est un dispositif clef qui n’a pas été totalement vu quand nous avons présenté le plan, parce que tout le monde se focalisait sur les fuites, la réutilisation des eaux usées, les moyens, les plafonds mordants et la gouvernance, compte tenu de la multiplicité des plans et des zones de captage. Si nous voulons, à cet égard, que le système soit résilient, nous ne pourrons pas continuer à avoir 12 000 gestionnaires d’eau potable. Si chacun d’entre eux ne gère qu’un point de captage, le schéma de distribution risque, face à ce type de difficultés, de s’écrouler. Il est donc nécessaire d’intercommunaliser les dispositifs et de mettre en place des circuits de sécurisation, avec un rebouclage sur plusieurs usines, etc. Je n’entre pas davantage dans le détail, mais vous comprenez notre philosophie : il s’agit d’assurer une mise en cohérence, en ne se contentant pas de simples éléments d’observation. Si les seuils sont dépassés, un arrêté préfectoral est pris, ce qui conduit à des mesures de contrainte et de suivi ; si cela ne suffit pas, une mesure de fermeture est prononcée. Voilà la chaîne mise en place.
M. Dominique Potier, rapporteur. La question des tuyaux de financement se pose par ailleurs. Vous allez mobiliser la RPD (redevance pour pollutions diffuses) afin d’alimenter un fonds de 250 millions d’euros dont tout le monde se demande à quoi il servira. Nous ne pouvons pas être hostiles, a priori, à cette annonce, mais nous aimerions participer au débat. Est-il question de technosolutions, d’agronomie ou d’un changement de système ? Personne ne semble vraiment le savoir.
Un rapport d’inspection, qui portait sur l’ensemble des financements au titre du programme Écophyto et qui a été un peu publié sous la contrainte, montre que nous avons affaire à une usine à gaz, qu’il y a beaucoup de pertes et qu’il n’existe pas de gouvernance partagée. Le délégué interministériel nous a dit lui-même qu’il n’y avait pas de politique interministérielle, et c’est encore pire quand on regarde les financements. Comme l’ont souligné les inspections, les agences sont parfois amenées à financer l’agriculture biologique à 100 % dans les territoires, devant la défaillance des autres outils du ministère de l’agriculture, et la coordination n’est pas toujours parfaite entre l’action conduite par les agences et les autres politiques menées dans le cadre d’Écophyto… La situation est incroyable.
Outre l’impression que tout cela n’est pas bien gouverné, les circuits financiers sont, non pas opaques, mais complexes. Une agence de l’eau s’occupe de la collecte, produit les résultats, s’agissant des indicateurs, un an et demi plus tard, et l’argent est ensuite redistribué. Selon les conclusions du rapport d’inspection, la situation est incroyablement complexe, les pertes d’énergie sont de grande ampleur et il n’y a pas de commandement centralisé, qu’il s’agisse du financement ou de la manière de dépenser les crédits. En ce qui concerne le pilotage stratégique d’Écophyto, admettez-vous qu’il existe une défaillance majeure et que rien dans le plan Écophyto 2030 tel qu’il a été présenté par le Gouvernement ne permet d’envisager qu’il en soit autrement à terme ?
M. Christophe Béchu, ministre. Votre commission d’enquête mène ses travaux à un moment où nous sommes en train d’ajuster des dispositifs. Vos conclusions pourront donc nous éclairer, notamment en ce qui concerne l’interministérialité dont vous questionnez les limites pour le plan précédent.
Nous avons obtenu des engagements financiers, mais je n’ai pas toutes les réponses aux questions qui se posent. Doit-on caler les montants pour une année, 2024, et ensuite nous autoriser à faire bouger les choses par rapport à la maquette ? Nous avons besoin d’un budget ambitieux, afin de montrer que ce sujet est pris au sérieux, mais aussi, sans doute, de garder de la souplesse et de l’humilité, parce que les besoins au début de la période ne correspondront pas forcément à ce qu’on constatera par la suite. Sans vous renvoyer complètement la balle, je dirai que nous n’arrêtons pas un plan qui a vocation à être gravé dans le marbre. S’il y a bien une chose qu’il faut retenir des quinze dernières années, c’est la nécessité d’être humble sur ce sujet, d’avoir une ambition et une détermination qui ne varient pas, mais d’être capable de renforcer ou de repositionner les choses, dans le temps, en étant ouvert à la réalisation de points d’étape sans attendre le dernier jour pour regarder ce qui doit bouger.
Vous aurez l’occasion de nous dire ce qui, selon vous, semble expliquer le succès rencontré ou au contraire, relativiser en partie les résultats obtenus. Je ne vois pas comment cela pourrait ne pas donner matière à déplacer des curseurs, en regardant comment on peut tenir compte des conclusions de votre commission. Comme vous l’avez dit au début de la réunion, ces sujets font non seulement l’objet d’une coordination interministérielle, mais aussi de positionnements transpartisans, qui transcendent en partie les clivages. Des questions peuvent se poser en ce qui concerne le rythme et les alternatives, mais l’orientation suivie est globalement très partagée. Aidez-nous à regarder comment on peut préserver une partie des acquis et être plus efficace.
M. le président Frédéric Descrozaille. Un grand merci, monsieur le ministre, pour la qualité de vos réponses et le temps que vous avez passé avec nous.
La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.
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Présents. – Mme Anne-Laure Babault, M. Frédéric Descrozaille, M. Grégoire de Fournas, M. Dominique Potier