Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Audition de M. Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs, sur la situation et les attentes du monde
agricole.........................................2

 Information relative à la commission....................18

 


Mardi 24 septembre 2024

Séance de 15 heures 30

Compte rendu n° 5

session de 2023-2024

Présidence de

M. Pascal Lecamp,

Vice-président


  1 

La commission des affaires économiques a auditionné M. Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs, sur la situation et les attentes du monde agricole.

M. Pascal Lecamp, président. La commission des affaires économiques poursuit son cycle d’auditions consacrées à la situation et aux attentes du monde agricole, à la suite des manifestations de l’hiver dernier et des travaux menés tout au long du printemps par cette assemblée sur le projet de loi d’orientation agricole (PLOA). Dans ce cadre, nous avons le plaisir de recevoir M. Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs (JA), élu dans ces fonctions en juin dernier à Poitiers, ainsi que M. Julien Rouger, vice-président.

Nous avons également prévu d’entendre à ce sujet, dès demain, les représentants des syndicats agricoles que nous n’avons pas encore reçus : la Confédération paysanne, la Coordination rurale et le Modef – Mouvement de défense des exploitants familiaux.

Nous savons que les attentes de nos agriculteurs sont grandes, d’autant qu’ils ont été confrontés ces derniers mois à des difficultés importantes dans plusieurs filières. Si l’on en croit les premières statistiques, les mauvaises conditions météorologiques vaudront à la filière céréalière de connaître un rendement en net recul, voire un recul record, et à celle de la viticulture, une collecte qui pourrait baisser de 18 % sur un an. Pour ce qui concerne l’élevage, les cheptels sont touchés par trois virus – la fièvre catarrhale ovine 3 et fièvre catarrhale ovine 8 (FCO3 et FCO8) pour les ovins, et la maladie hémorragique épizootique (MHE). Notre commission vient d’ailleurs de lancer deux missions relatives aux questions de l’élevage et de la viticulture.

Nous sommes à votre écoute pour connaître les évolutions législatives qui vous paraissent souhaitables – nous pensons, bien sûr, en premier lieu au PLOA que nous avons examiné puis adopté en première lecture, à l’Assemblée nationale, au mois de mai. Ce texte, qui vise notamment à soutenir l’installation et la transmission des exploitations, devait encore être examiné par les sénateurs, auxquels il avait été transmis le 29 mai dernier. Pour en avoir été rapporteur avec notamment Mme Nicole Le Peih, je sais combien les JA ont participé à son élaboration.

Par ailleurs, quelles sont vos attentes en ce qui concerne les moyens financiers engagés au profit du monde agricole dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, dont nous serons bientôt saisis pour avis ?

Vous aurez peut-être à cœur d’évoquer l’équilibre des relations commerciales au sein de la filière alimentaire, à la suite notamment de la mission conduite auprès du Gouvernement au printemps par les députés Alexis Izard et Anne-Laure Babault en vue de l’élaboration d’une possible loi « Égalim 4 ». Je rappelle que notre commission a d’ailleurs décidé de reconstituer une mission d’évaluation de la loi « Égalim 2 » du 18 octobre 2021, qui a été confiée à nos collègues Julien Dive, Harold Huwart, Richard Ramos et Aurélie Trouvé.

Enfin, n’hésitez pas à nous faire connaître votre opinion concernant l’évolution du cadre législatif et réglementaire applicable à l’agrivoltaïsme, dont nous devons assurer un développement raisonné et raisonnable.

M. Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs. Les attentes sont nombreuses et je vous remercie de me permettre de faire entendre la voix des Jeunes Agriculteurs devant votre commission. Nous avons beaucoup de travail devant nous et Julien Rouger, vice-président de notre syndicat, détaillera tout à l’heure nos propositions.

Nous connaissons en effet un contexte climatique particulier. Après les récoltes de céréales à paille, fortement frappées cet été, celles des céréales d’été, notamment de maïs et de tournesol, ne s’annoncent pas très bonnes. Les vendanges baissent en qualité et en quantité, affectant un marché viticole durement touché par ailleurs par des problèmes de production. Quant à l’élevage qui, même s’il n’était pas exempt de difficultés, ne s’en sortait pas si mal et avait retrouvé des prix de marché corrects pour les bovins, les ovins et le lait, il est maintenant frappé par la crise sanitaire provoquée par les deux types de fièvre catarrhale ovine et la maladie hémorragique. Certes, il ne faut pas exclure certaines maladies propagées par des animaux sauvages, mais il faut bien prendre conscience que les crises sanitaires auxquelles nous devons aujourd’hui faire face sont avant tout l’expression de maladies exotiques liées au changement climatique, qui est au cœur des réflexions des JA.

Les mobilisations historiques du début de l’année ont été l’expression d’une colère sourde face à un système incapable de générer un revenu décent et durable pour les exploitations agricoles.

On parle d’une loi « Égalim 4 », comme on parlerait d’un nouveau modèle d’iPhone ; ce qui importe dans l’immédiat, c’est de rendre du revenu aux agriculteurs et d’aller beaucoup plus loin s’agissant des coûts de production, avec la prise en compte d’indicateurs de coûts de production interprofessionnels plutôt que d’instaurer un prix plancher ou un prix minimum garanti – quel qu’en soit le nom –, puisque la façon de procéder de la grande distribution resterait la même : elle nous contraindrait à maîtriser nos prix et donc à n’avoir que de faibles revenus et on devrait, pour beaucoup, s’y soumettre. Ce n’est évidemment pas ce que nous souhaitons. Nous devons donc être en mesure de proposer quelque chose de plus structurant pour les agriculteurs, sans oublier pour autant que nous nous situons sur des marchés mondiaux pour certains produits. Le marché doit donc avoir une part dans la construction du prix. Il y va de la liberté et du pouvoir d’entreprendre pour nos exploitations.

Dans ce contexte un peu particulier, les Jeunes Agriculteurs ajoutent à ces problèmes conjoncturels et structurels celui de la démographie. On sait que le nombre d’agriculteurs va connaître une importante érosion dans les années à venir – on la prévoyait d’ici à cinq ans, mais les années passent et on l’attend maintenant dans trois ans. La moitié des agriculteurs pourront alors prétendre à la retraite. Si l’on continue ainsi, on ne comptera plus en années, mais en mois. De fait, nous ne disposerons pas à cet horizon des dispositifs dont vous avez pu débattre dans l’hémicycle, tels que, dans la LOA, l’instauration d’un guichet unique destiné à faciliter l’installation des nouveaux agriculteurs et la transmission des exploitations, ainsi que toute autre mesure soutenue notamment par les Jeunes Agriculteurs pour tenter d’apporter un début de réponse à cette question cruciale de la démographie. Le contexte devient donc de plus en plus difficile.

Je saisis cette occasion pour rappeler que, pas plus que les crises climatique et économique, la crise politique que traverse notre pays n’est de nature à rassurer les agriculteurs, et qu’elle ajoute à leur anxiété, comme en témoigne également une certaine érosion de l’accueil fait aux porteurs des projets par les chambres d’agriculture ou par les points accueil - installation.

Pour ce qui est du nouveau Gouvernement, je ne commenterai que l’efficacité de ses propositions, au même titre que celles du travail parlementaire.

La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et les JA ont proposé, à la rentrée, un texte de loi intitulé « Entreprendre en agriculture », qui reprend, en les déclinant sous la forme très ergonomique d’articles de loi, les huit points que nous vous avions soumis pendant la campagne des élections législatives. N’y voyez pas d’offense car nous ne prétendons pas remplacer le travail des parlementaires – nous n’en avons pas les compétences et ce n’est pas notre métier –, mais il nous a semblé important de structurer ces propositions de la sorte. Nous sommes, du reste, plutôt favorables à ce que la LOA, actuellement en suspens, soit reprise rapidement, et souhaitons voir sanctuariser dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) certaines mesures relatives notamment au gazole non routier (GNR) et à la fiscalité de la transmission.

Nous allons mettre, comme toujours, beaucoup d’énergie dans ce que nous disons et dans ce que nous faisons, de manière toujours constructive mais aussi, lorsque c’est nécessaire, de manière musclée, car les agriculteurs ont besoin de réponses rapides, concrètes et utiles. Un volet entier de nos propositions est consacré à la simplification, à laquelle les agriculteurs sont très sensibles, et nous exercerons une veille attentive à ce propos. Vous trouverez évidemment chez les JA une force de proposition dans tous ces domaines.

M. Julien Rouger, vice-président des Jeunes Agriculteurs. Parmi les huit engagements que nous vous avons communiqués juste avant ou juste après votre élection, on retrouve des éléments législatifs figurant dans la loi d’orientation que nous soutenons avec la FNSEA, ainsi que des mesures à moyen et long terme, notamment tout un bloc de travail consacré au foncier, que certains d’entre vous connaissent bien. Nous avons travaillé à un rapport d’orientation dans ce domaine, qui s’est concrétisé début juin et que nous souhaitons décliner techniquement et mettre en œuvre à l’automne, puis courant 2025. Des mesures législatives seront nécessaires pour certaines évolutions, tandis que, pour d’autres, des mesures à caractère réglementaire suffiront. Le volet foncier, qui doit être mené en parallèle pour aboutir en 2025, sera un axe de travail important pour nous dans les semaines et les mois qui viennent.

Le titre Ier porte sur des sujets qui ont fait couler beaucoup d’encre pendant les débats parlementaires sur la LOA, notamment à propos de la souveraineté alimentaire – à commencer par la définition de celle-ci – et de l’origine des matières premières agricoles, qui pose la question connexe de l’étiquetage des produits.

Nous formulons aussi des propositions nouvelles issues, pour certaines, de notre rapport d’orientation, comme la création d’un livret d’épargne « souveraineté agricole », afin de capter de l’épargne pour l’orienter vers l’agriculture et augmenter ainsi les financements dévolus à cette dernière.

Le titre II concerne le changement climatique et la nécessaire planification de notre agriculture sur les prochaines décennies, notamment dans les territoires les plus concernés par ce phénomène. Nous proposons à cet égard un contrat et un plan d’avenir, avec une réflexion et un diagnostic à l’échelle territoriale et, au bout du compte, un accompagnement visant à permettre aux agriculteurs de s’adapter au changement climatique dans leur territoire, ce qui peut supposer l’arrêt de certaines cultures et l’introduction de certaines autres ou l’adaptation des cultures existantes. Au-delà du constat, en effet, une vision planificatrice s’impose.

Tout un axe de travail est consacré au revenu et à la compétitivité, sujets largement évoqués par Pierrick Horel et sur lesquels je ne reviendrai pas davantage.

Le titre IV est consacré à l’attractivité du métier d’agriculteur. Il s’agit de libérer les agriculteurs et de leur laisser la possibilité d’entreprendre et d’expérimenter dans l’exercice de leur métier. Il faut revaloriser ce dernier, ainsi que le montant de leurs retraites. En effet, parallèlement à l’installation et à la transmission dans un contexte de choc démographique, il importe aussi que les agriculteurs qui partent puissent continuer à percevoir une retraite comparable à celle des autres secteurs d’activité.

Le titre V porte sur la transmission et l’installation. Nous voulons faire aboutir des dispositifs que nous proposons depuis maintenant quatre ans, notamment pour ce qui concerne le guichet unique. S’il existe un point accueil installation (PAI) sur l’ensemble du territoire français, il n’existe pas de pendant à ce dispositif pour ce qui concerne la transmission. Nous souhaiterions donc que les porteurs de projet puissent disposer d’un guichet unique installation et transmission sur l’ensemble du territoire, avec une vraie offre d’accompagnement, notamment sur les plans économique, fiscal et social, pour les futurs cédants. De nombreux éléments figurant dans la LOA pourraient être repris et celle-ci pourrait simplement poursuivre sa navette pour faire aboutir ces mesures relatives au renouvellement des générations en agriculture (RGA).

Enfin, le titre VI, consacré aux contraintes, reprend de nombreux points relatifs au contentieux et à la réglementation applicable aux agriculteurs que nous avions déjà effleurés dans la LOA. La logique globale consiste donc à accompagner les agriculteurs pour favoriser l’installation et la transmission, à leur assurer un meilleur revenu et une reconnaissance globale afin d’atteindre la souveraineté agricole et alimentaire, ainsi qu’à adopter une vision planificatrice à l’échelle des territoires et des départements en vue d’un accompagnement individualisé des agriculteurs.

M. Pascal Lecamp, président. Si je traduis vos propos, votre proposition de loi « Entreprendre en agriculture » reprend et complète donc la LOA.

Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

Mme Hélène Laporte (RN). Au mois de mai, l’Assemblée nationale a examiné, au prix de longues heures de débat, un projet de loi d’orientation agricole (PLOA) dont la logique d’ensemble a échappé à bon nombre d’entre nous. Derrière un objectif affiché de choc simplificateur pour assurer le renouvellement de nos exploitations, nous avons vu un texte très pauvre en mesures concrètes en faveur de nos agriculteurs, et dont plusieurs dispositions – ce qui n’est pour nous pas acceptable – revenaient à soumettre les exploitants et futurs exploitants à des contraintes supplémentaires, en décalage complet avec leur besoin urgent d’une plus grande liberté.

Alors que le sort de l’examen de ce projet de loi est aujourd’hui des plus incertains, nous retrouvons plusieurs de ses dispositions dans le projet de loi « Entreprendre en agriculture », que vous portez conjointement avec la FNSEA.

C’est le cas de l’article 26, qui reprend in extenso celles de l’article 10 du PLOA, avec l’obligation pour l’exploitant de déclarer son futur départ en retraite cinq ans au moins à l’avance, et celle faite aux candidats à la reprise de suivre un parcours d’accompagnement par France Services agriculture, qui pourra conditionner le bénéfice des aides à l’installation, alors que, je le rappelle, le Conseil d’État avait estimé que ces nouvelles obligations tendaient à contraindre l’exercice de la profession agricole dans des proportions inédites.

Avec l’article 27, on retrouve l’article 9 du PLOA et son diagnostic modulaire préalable à la cession d’une exploitation, qui rendra encore plus complexes les dossiers de transmission, alors que l’urgence serait, au contraire, de simplifier.

On trouve également, à l’article 19, le « bachelor agro », sur la pertinence duquel nous nous interrogeons toujours, étant donné qu’il existe, parallèlement, la licence pro agricole.

L’article 21 reprend un article additionnel qui consacre un droit à l’essai, mesure dont l’utilité pose question dans un contexte de crise majeure du renouvellement des générations, étroitement liée aux difficultés extrêmes que rencontrent nos agriculteurs pour tirer un revenu digne de leur exploitation.

Pouvez-vous donc préciser les effets concrets que vous attendez de ces propositions pour résoudre la grave crise que traverse l’agriculture française ? En outre, alors que votre texte présente un volet fiscal d’une grande pertinence, ne craignez-vous pas qu’au moment où les agriculteurs demandent de réels aménagements et de réelles simplifications, la reprise de ces éléments du PLOA qui ne faisaient pas l’unanimité ne l’expose à un jugement global qui invisibilise vos apports ?

M. Julien Rouger. Cette question me donne l’occasion de revenir sur deux propositions que nous portons depuis longtemps et qui ont peut-être été mal comprises ou mal interprétées. Il s’agissait que France Services agriculture – quel que soit d’ailleurs le nom que l’on donne à ce service, pour lequel notre rapport d’orientation en propose un autre – puisse véritablement faire office de guichet unique, de réelle porte d’entrée à ceux qui veulent accéder au métier et ceux qui veulent en sortir, et donc de souligner, sous une bannière commune permettant une meilleure communication, le lien qui doit être établi entre l’installation et la transmission.

Afin d’éviter la déperdition d’agriculteurs que nous observons depuis plusieurs décennies, il nous a semblé qu’il fallait forcer le trait et imposer une forme d’obligation, de telle sorte qu’un maximum de gens voulant sortir du métier ou y entrer puissent passer par ce guichet unique. Il ne s’agit nullement de contraindre, mais bien davantage de mieux accompagner et de faire en sorte que l’installation soit viable et durable, afin que la transmission soit mieux anticipée et mieux préparée, notamment sur les plans fiscal et social.

Quant au diagnostic modulaire, il a été conçu comme un outil au service des agriculteurs et des porteurs de projet d’installation et de transmission, permettant d’évaluer tant les conséquences du changement climatique sur leur projet que la situation économique de l’entreprise au moment de la transmission. Il ne s’agissait pas, là non plus, d’ajouter une nouvelle contrainte.

Mme Nicole Le Peih (EPR). Sachant combien sont cruciaux les enjeux qui concernent le monde agricole, nous saluons votre engagement constant à défendre les intérêts de cette profession essentielle pour l’avenir de notre pays. Vous avez montré à de nombreuses reprises votre capacité à être une force de proposition et à instaurer des échanges constructifs, comme cela a encore été le cas la semaine dernière à Rennes, lors du Salon des productions animales – carrefour européen (Space), où une délégation de membres de notre commission était présente. Ces discussions ont mis en lumière non seulement les défis sanitaires auxquels vous faites face, mais aussi les solutions que vous proposez, de manière générale, dans le document que vous aviez remis aux candidats aux élections législatives, intitulé « Engagez-vous ! ».

Dans cette charte, vous avancez huit engagements forts pour défendre et valoriser notre agriculture dans un contexte de plus en plus exigeant sur les plans économique, environnemental, social et sociétal. Ces engagements représentent un socle de propositions ambitieuses et nécessaires pour assurer la pérennité de notre modèle agricole.

En tant que signataire de cette charte, je voudrais savoir comment vous hiérarchisez les priorités parmi ces engagements. S’ils sont tous essentiels, il faut néanmoins, dans le contexte actuel où les ressources humaines, financières ou institutionnelles sont limitées, déterminer les actions à mener en priorité.

Pour ce qui est, enfin, de la transmission des exploitations agricoles, enjeu majeur pour leur renouvellement, quelles sont, au-delà de la fiscalité, les mesures d’accompagnement des dirigeants agricoles qui doivent être prises et quelles actions concrètes et pratiques estimez-vous indispensables pour faciliter la transition et soutenir à la fois ceux qui transmettent et ceux qui s’installent ?

M. Pierrick Horel. Bien que nous souhaitions que tout aille plus vite dans ces huit domaines, afin que chacun y trouve son compte, peut-être faut-il en effet, compte tenu de l’urgence et du nombre de dossiers que nous avons à traiter, les hiérarchiser. Si tel est le cas, il me semble primordial de sécuriser ce qui a été promis durant les mobilisations aux agriculteurs, déjà enclins à une certaine défiance envers la parole publique et politique. À défaut, nous manquerions tous l’objectif poursuivi, sans parler des problèmes qui se poseraient en termes de trésorerie ou de fiscalité.

La deuxième urgence est notre capacité, non à générer du revenu pour les agriculteurs, mais à le conserver et à le valoriser sur les exploitations. Comme je l’ai déjà dit, tant qu’on ne traite pas ce problème, on ne peut pas s’extraire de tous les autres. Au-delà des lois « Égalim », qui constituent le véhicule que nous connaissons, il faut aller beaucoup plus loin et beaucoup plus vite.

Cela nous oblige peut-être aussi à poser la question de ce qu’il faut faire du revenu durant la période d’activité car, aujourd’hui, certains jeunes agriculteurs entrent tard dans le métier et en sortent tôt, sans avoir nécessairement une vision patrimoniale de l’agriculture.

La troisième priorité que nous voudrions promouvoir est l’enjeu démographique lié à l’installation et à la transmission, chères aux Jeunes Agriculteurs et qui fait notamment l’objet des mesures que nous soutenons dans la loi d’orientation agricole.

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). « Égalim 1 », « Égalim 2 », « Égalim 3 » et bientôt « Égalim 4 » : ainsi se succèdent et échouent les nombreux gouvernements d’Emmanuel Macron face à une grande distribution qui reste réfractaire à ce qu’on lui impose de payer des prix rémunérateurs aux agriculteurs. D’où ces lois inefficientes qui tentent, avec peu de succès, de faire taire les tensions du monde agricole. Pourtant, d’ici à 2030, un agriculteur sur deux partira à la retraite. Nous sommes donc confrontés à un immense enjeu de renouvellement des générations agricoles et l’une des premières choses à faire, si nous voulons que de jeunes agriculteurs s’installent, est bien de nous assurer qu’ils puissent vivre décemment de leur travail.

La pauvre loi d’orientation agricole de Marc Fesneau, qui était encore ministre de l’agriculture voilà deux jours, ne changera a priori pas grand-chose et il semble que nous soyons d’accord sur ce point, puisque vous avez sorti, en tant que syndicat Jeunes Agriculteurs, votre propre proposition de loi pour pallier les manques du projet de loi existant.

Elle comporte des idées intéressantes. Vous proposez, par exemple, d’accompagner les projets de transition d’agriculteurs, de réaliser un diagnostic et d’offrir un accompagnement, y compris financier, à ceux qui adaptent leur activité pour mieux prendre en compte les enjeux environnementaux et sociaux. Vous proposez également la création d’un droit à l’essai préalable à l’installation. Ce sont autant de solutions auxquelles nous souscrivons.

Pour ce qui est, cependant, du prix, je reste sur ma faim. Certes, votre proposition de loi comporte neuf propositions de nouveaux crédits d’impôts ou d’exonérations fiscales dans certains secteurs. Si un travail s’impose du côté des charges pour rééquilibrer et faire en sorte que les petits paient petit et que les gros paient gros, je ne suis, en revanche, pas certaine que cette succession de crédits d’impôts réponde au problème de fond de la rémunération agricole. Faire passer les agriculteurs d’une dépendance à la grande distribution à une dépendance à l’argent public et au crédit d’impôt me semble être, dans le contexte d’austérité voulu par le Gouvernement, un pari risqué. D’ailleurs, ce que demandent la plupart du temps les agriculteurs n’est pas de vivre d’argent public, mais bien de leur travail : ils demandent donc des prix rémunérateurs.

Sur ce point, qui fait l’objet de l’article 12 de votre proposition de loi, vous en restez à un modèle Égalim. D’une certaine façon, vous avez écrit « Égalim 4 » pour notre nouvelle ministre, qui saura certainement reprendre cette proposition, laquelle s’en tient en effet à un système de contractualisation laissant sur le bord de la route certaines filières qui n’ont, par exemple, pas d’organisation de producteurs et où les agriculteurs sont plus isolés pour négocier. Nombreux sont, par exemple, les éleveurs du Limousin qui fustigent ce fonctionnement Égalim, qui semble à peine les concerner et prive les éleveurs d’un rapport de force pour négocier leurs prix.

Il existe pourtant des solutions plus protectionnistes : la mise en place de prix planchers, de prix rémunérateurs minimum issus de la réflexion de conférences de filière et soumis à une évolution flexible dans le temps en fonction des aléas extérieurs, avec des contours auxquels nous pourrions réfléchir ensemble, mais qui donnent toujours le premier mot aux agriculteurs.

Pourquoi donc ne pas réguler plus franchement le marché et la grande distribution ?

Pierrick Horel. Cette question est effectivement d’une importance capitale : c’est bien l’amélioration du revenu qui permettra de régler bon nombre des problèmes conjoncturels et structurels dont souffre notre modèle agricole. Si nous souhaitons en rester à l’esprit des lois Égalim, c’est d’abord parce que la logique de contractualisation n’a pas été menée à son terme, notamment pour les éleveurs, dont certains ont du mal à s’intégrer dans ce système. La filière bovine, par exemple, a toujours fonctionné de gré à gré, en s’appuyant sur des maquignons. Or, les habitudes ont la vie dure : il n’est pas toujours facile de convaincre un éleveur que ce n’est pas parce qu’un marchand le paiera ponctuellement 20 centimes de plus que le voisin que le problème du revenu agricole sera résolu.

Voilà pourquoi nous promouvons la contractualisation prévue par les lois Égalim : un agriculteur qui contractualise sa production sécurise son revenu et couvre une partie de ses charges d’exploitation, lesquelles sont soumises à des variations impossibles à maîtriser. Cette démarche doit s’effectuer sur la base d’indicateurs de coûts de production, et non d’un prix de marché, car, en la matière, la grande distribution dispose d’un arsenal très efficace pour contraindre les agriculteurs – je songe notamment à la loi de modernisation de l’économie (LME), qui n’a pas été réformée depuis 2008.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Vous soulignez à raison que, dans un contexte de crise politique, nombre des dossiers qui suscitent des inquiétudes dans le monde agricole restent sans réponse. Plusieurs épizooties, comme la MHE et la fièvre catarrhale ovine, prolifèrent dangereusement sur le territoire national. Cette progression inquiète les éleveurs, déjà fortement éprouvés par la crise économique marquée par la hausse des coûts de production et des prix des matières premières agricoles, ainsi que par la perte de productivité due aux aléas climatiques. Ces épizooties entraînent des pertes massives dans les cheptels et d’importantes baisses de revenu. Dans ma circonscription, à Hanvec, tout un élevage volailler a ainsi été abattu après que le virus de l’influenza aviaire y a été détecté, l’épidémie ayant probablement été transmise par des goélands.

Ces graves crises sanitaires appellent un soutien fort de l’État. Une réponse coordonnée, rapide et d’ampleur est cruciale afin d’éviter des pertes trop grandes et de circonscrire les maladies. Or, nombreux sont les agriculteurs qui se plaignent de la lenteur du déploiement de la stratégie vaccinale et déplorent un accès insuffisant aux vaccins. Cette stratégie vous semble-t-elle suffisamment efficace pour garantir l’immunité des troupeaux ? Quelles adaptations devraient être opérées, notamment dans l’industrie pharmaceutique vétérinaire, pour que la France soit plus résiliente, plus réactive et plus souveraine face aux crises sanitaires ? Enfin, comment jugez-vous les procédures d’indemnisation des aléas sanitaires et l’efficacité du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) ?

Pierrick Horel. Si une stratégie est proposée chaque fois que les éleveurs sont affectés par une maladie, elle repose bien peu souvent sur la prévention et la détection. La FCO n’est pourtant pas un phénomène nouveau, puisqu’elle survient chaque année – même si la force avec laquelle elle frappe varie en fonction du climat. Nous devrions être capables de définir les schémas vaccinaux en amont, plutôt que de réagir une fois que les épidémies sont présentes et de subir les situations.

Il en va de même de notre stratégie de production de vaccins : les vaccins contre la FCO étant fabriqués à l’étranger, nous en sommes privés lorsque les pays producteurs sont eux-mêmes touchés, puisqu’ils les utilisent en priorité pour le bénéfice de leurs propres agriculteurs. La question de la fabrication des vaccins en France mérite donc d’être creusée, au moins pour l’élevage. Se contenter de commander le plus rapidement possible des doses chaque fois qu’on en a besoin n’est pas une stratégie opportune, d’autant que nous serons sans nul doute confrontés à de nouvelles maladies remontant du Sud dans les années à venir et que cette tendance est appelée à s’inscrire dans le temps.

Le FMSE, quant à lui, est un outil qui fonctionne plutôt bien, mais qui commence à prendre de l’âge et qui mériterait probablement d’être renforcé.

M. Julien Dive (DR). Je ne m’attarderai pas sur le PLOA, même si notre groupe a soutenu ce texte, certes faillible, au cours de la précédente législature : nous aurons certainement l’occasion d’y revenir dans les prochaines semaines.

La question qui s’impose à l’ensemble des exploitations est celle de la trésorerie. Les épizooties condamnent certains cheptels ovins ou bovins, voire des élevages de volailles, qu’il faudra reconstituer en 2025. La moisson 2024 a été fortement dégradée, les rendements en blé ayant chuté de 30 % à 50 %. Les catastrophes climatiques ont affecté plusieurs cultures – dans une exploitation de l’Oise, par exemple, 17 hectares de lin ont été retournés par le passage d’une tempête. Même la campagne betteravière qui commence ne s’annonce pas bonne. Chacun le comprend donc bien, l’année 2024 a été catastrophique et les problèmes de trésorerie concerneront presque toutes les filières.

Deux solutions sont envisageables pour y répondre. La première, proposée par les syndicats, réside dans l’octroi de prêts garantis par l’État (PGE). Un tel dispositif avait déjà été déclenché en 2016, pour une durée de huit ans. Alors qu’il arrive à son terme, êtes-vous favorable à l’instauration de nouveaux PGE – sous réserve qu’elle soit acceptée par les ministères ?

La deuxième possibilité serait de verser par avance les aides de la politique agricole commune (PAC). La Commission européenne a donné son feu vert pour que les agriculteurs perçoivent dans ce cadre 70 % des aides directes et 85 % de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN). Avant 2016, cette proportion pouvait atteindre 90 %. Vous semblerait-il nécessaire d’aller au-delà des 70 % envisagés pour l’heure ?

Enfin, nous découvrons les conclusions du dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture de l’Union européenne, qui pose les jalons de la PAC qui entrera en vigueur après 2027. Quel est votre avis sur cette question ?

Pierrick Horel. Certains exploitants ne sont pas en mesure de contracter un nouveau PGE et de s’imposer des remboursements supplémentaires. Leur nombre n’est d’ailleurs pas négligeable, notamment dans la région Occitanie, durement touchée par les aléas climatiques. Peut-être conviendra-t-il de réfléchir à un accompagnement différent pour eux.

La création d’un nouveau PGE faisait toutefois partie des revendications exprimées lors des mobilisations organisées il y a maintenant plus de huit mois. Or, aucun dossier n’a pu être déposé, car aucun dispositif opérationnel n’a été mis à notre disposition, ce qui accentue les crispations et exaspère tous les professionnels. Des prêts garantis par BPI France doivent nous être proposés au plus vite : les difficultés se sont accentuées depuis l’année dernière et concernent désormais les trois quarts de la ferme France.

Le versement anticipé des aides de la PAC sera lui aussi indispensable. Nous avons été informés de difficultés concernant les délais d’instruction. Tout retard de paiement poserait de gros soucis et nous ne parviendrons pas à le justifier sur le terrain. Nous serons donc très attentifs sur ce point.

M. Benoît Biteau (EcoS). La vision à long terme est l’ADN des Jeunes Agriculteurs : étant, par définition, jeunes, vous essayez de vous projeter dans la durée et d’intégrer, dès l’installation, les facteurs susceptibles de menacer une carrière d’agriculteur. Or, force est de constater que ce qui menace les exploitants au fil des années – qui, malheureusement, se suivent et se ressemblent –, c’est le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité. Nous, élus, devons donc élaborer des politiques publiques et des réglementations qui vous permettent de poursuivre votre activité dans ce contexte. Si nous n’y parvenons pas, nous ne parviendrons plus à attirer de nouveaux agriculteurs à l’avenir.

Il faut ainsi travailler sur les deux piliers qui constituent leur revenu : la juste rémunération de leurs produits, que nous essayons imparfaitement de garantir à travers les lois Égalim – nous devons progresser significativement sur ce point –, mais aussi une forme de paiement pour services écosystémiques rendus, qui pourrait offrir une certaine visibilité aux agriculteurs quant à leur rémunération et renforcerait donc l’attractivité du métier. Sans contester l’intérêt des aides versées aux jeunes agriculteurs au moment de leur installation, j’estime que nous devons avant tout leur donner une vision de long terme des politiques publiques qui seront déployées en matière de rémunération, afin qu’ils puissent se projeter dans la durée, sur fond de dérèglement climatique et d’effondrement de la biodiversité.

Voilà l’équation que nous devons nous efforcer de résoudre avec vous, qui représentez les générations futures. Comme mon collègue Julien Dive, j’aimerais donc vous entendre sur le dialogue stratégique engagé par l’Union européenne et sur la façon dont la prochaine PAC pourrait répondre à ces questions. De nombreux agriculteurs, dont je fais partie, s’apprêtant à partir à la retraite, il importera en effet de trouver des forces vives pour reprendre le flambeau.

M. Julien Rouger. Il est effectivement indispensable d’avoir une vision de long terme au moment de l’installation : idéalement, on ne s’installe pas pour six mois ni pour deux ou trois ans, mais pour une décennie, voire pour une carrière entière. Nous voulons donc être capables, à cette occasion, de mettre à l’épreuve – osons le terme – le projet du jeune au regard du changement climatique dans le territoire où il souhaite s’installer. Il est désormais possible, grâce à des modélisations, d’anticiper un scénario type en cas de réchauffement de 4 degrés, par exemple. Pour être durables et viables, les futures installations doivent prendre en compte le changement climatique. Nous partageons cette vision.

M. Thierry Benoit (HOR). À l’occasion de l’examen du PLOA, j’ai regretté, avec d’autres, l’absence d’un volet consacré à l’accès au foncier, qui constitue pourtant la première préoccupation des jeunes agriculteurs. Je m’étonne d’ailleurs que le président de la FNSEA soit si discret sur cette question, qui renvoie à celles de l’accaparement des terres et de la spéculation – même si le prix du foncier en France reste acceptable comparé à ceux pratiqués chez nos voisins européens. Quelle est votre position sur ce point ?

Ensuite, même si nous travaillons depuis de nombreuses années sur le revenu agricole, nous avons toujours du mal à faire la vérité sur le partage de la valeur. Vous avez rappelé votre souhait d’en revenir à la démarche originellement promue par la loi Égalim, à savoir le versement de prix rémunérateurs calculés sur la base d’indicateurs de coûts de production. Cette logique se heurte toutefois à la réalité des prix des marchés européens et internationaux.

Je suis, par ailleurs, très inquiet de la situation de l’élevage, par exemple dans le bassin laitier de Fougères, en Ille-et-Vilaine, dans ma circonscription. Depuis quarante ans, les aides de la PAC sont versées en fonction des surfaces. Dans le même temps, la question des élevages hors-sol se pose avec acuité. Rappelons par exemple que la consommation de volaille a augmenté de 54 % depuis 1999, mais qu’un poulet de chair sur deux est importé. Quelles mesures promouvez-vous pour soutenir l’élevage hors-sol ?

Enfin, alors que le nombre de cotisants diminue sévèrement, ne devrions-nous pas envisager d’adosser le régime de retraite des agriculteurs au régime général, comme cela a été fait pour les indépendants il y a quelques années ?

M. Julien Rouger. L’accès au foncier est effectivement un point très important, absent du projet de loi d’orientation agricole. Nous partageons vos préoccupations à ce sujet. Force est de constater, néanmoins, que si chacun partage la même ambition, des désaccords se font jour, au sein même de la profession agricole, dès qu’il s’agit de rentrer dans le détail des mesures à prendre concrètement – l’exemple du dispositif Sempastous l’a bien montré. Pour traiter cette question complexe, nous avons consulté notre réseau et établi des propositions, qui figurent désormais dans notre rapport d’orientation et ont été validées par l’ensemble de nos congressistes et de nos représentants locaux. Nous souhaitons maintenant les défendre, auprès de la profession agricole mais aussi auprès des parlementaires, pour les voir aboutir.

M. Pascal Lecamp, président. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Julien Gabarron (RN). Vous avez évoqué la question démographique, qui pose celle de notre modèle agricole. La France métropolitaine comptait 390 000 exploitations agricoles en 2020, soit 100 000 de moins qu’en 2010. Même si son rythme ralentit, la baisse est continue depuis cinquante ans et les départs à la retraite y contribueront mécaniquement dans les années à venir. Selon vous, qui incarnez l’avenir de l’agriculture française, le salut de notre modèle passe-t-il par un maintien du nombre d’exploitations assorti d’une planification des cultures ou, au contraire, par un regroupement et une concentration toujours plus poussés, afin de concurrencer les super exploitations des géants agricoles ?

À travers vous, je tiens à saluer le courage et la résilience dont les jeunes agriculteurs font preuve dans un contexte plus que heurté.

M. Stéphane Travert (EPR). La souveraineté alimentaire repose sur trois piliers : l’installation et le renouvellement des générations, la compétitivité des exploitations et la capacité d’adaptation au changement climatique. En matière d’installation, la politique foncière et la lutte contre l’accaparement des terres constituent des enjeux majeurs. Nous avions proposé, dans la première version du PLOA, de créer un nouveau dispositif, le groupement foncier agricole d’investissement (GFAI). Comment devrions-nous, à votre sens, le faire évoluer pour aboutir à un mécanisme efficace ? Comme l’a justement souligné Thierry Benoit, garantir l’accès au foncier sera indispensable pour assurer le renouvellement des générations.

M. Laurent Alexandre (LFI-NFP). La propagation de maladies touchant les bêtes d’élevage, comme la FCO, provoque une grave crise agricole et inquiète de nombreux éleveurs, y compris dans mon département de l’Aveyron. Elle s’ajoute aux dégâts provoqués par l’importation de viande néo-zélandaise à bas prix et à une dérégulation des marchés soutenue par la Commission européenne et le gouvernement Macron. Le dogme du libre-échange favorise ainsi la diffusion des foyers infectieux. Face à la réponse de l’État que nous sommes nombreux à considérer comme insuffisante, les députés du groupe LFI-NFP proposent de prendre en charge intégralement les vaccins et d’accélérer la recherche sur les maladies virales.

La réponse de l’État vous semble-t-elle à la hauteur de l’urgence ? Quelles sont les mesures à prendre en priorité pour conjurer la crise ?

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Si, dans un premier temps, la FCO ne touchait pas particulièrement les massifs de montagne, elle s’y est largement développée. Dans mon département de l’Isère, la descente des alpages à Grenoble, qui permet depuis quinze ans de créer un lien entre les agriculteurs et le grand public, a dû être annulée cette année en raison d’un taux de contamination évalué à 35 % de la population ovine. Cette situation est source de détresse pour les éleveurs.

Disposez-vous d’informations particulières concernant les zones de montagne ? Les mesures prises par l’État vous semblent-elles adaptées ? Quelle action préventive préconisez-vous pour répondre aux besoins de trésorerie des exploitations ?

M. Patrice Martin (RN). La semaine dernière, la commission des affaires économiques s’est rendue au Space de Rennes, en particulier sur le stand des JA, pour échanger avec des agriculteurs. Conscients des défis à venir, notamment du départ à la retraite de près de 200 000 exploitants dans les prochaines années, ces derniers doivent répondre à une double exigence : renouveler la profession et préserver l’autonomie alimentaire de la France. Pour ce faire, ils insistent sur la nécessité de garantir des revenus suffisants aux agriculteurs et de moderniser les exploitations afin de relever les défis économiques et environnementaux de demain.

Au-delà, ils soulignent l’importance cruciale de la transmission des exploitations. Ils expriment notamment des réserves quant à l’article 8 du PLOA relatif aux transmissions et réclament un allègement fiscal adapté à leur situation. Quelles sont, selon vous, les mesures fiscales à prendre pour faciliter la transmission des exploitations ?

M. Jean-Pierre Vigier (DR). Les élevages ovins, bovins et caprins français sont touchés par la FCO et la MHE, qui font des ravages dans les cheptels : jusqu’à 30 % des troupeaux sont touchés et certaines exploitations sont en danger, sans parler du moral des éleveurs, qui est au plus bas. Or, ces exploitations permettent de maintenir une vie économique et agricole dans des zones rurales et de montagne, de garder des paysages ouverts et de renforcer l’attractivité des territoires. Il faut d’urgence prendre des mesures fortes.

Quel regard portez-vous sur la situation actuelle ? Surtout, quelles sont vos recommandations pour faire face à cette grave crise ? Le versement d’aides exceptionnelles vous paraîtrait-il indiqué ?

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NFP). On le sait, les prix rémunérateurs sont, à juste titre, au cœur des revendications des jeunes agriculteurs : ils sont la clef du renouvellement des générations, parce qu’il ne saurait y avoir d’installation sans la perspective de percevoir des revenus dignes. Or, le PLOA ne prévoyait aucune mesure susceptible de garantir des prix véritablement rémunérateurs – je crois que nous partageons ce constat. Pire, la nouvelle ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt, Mme Genevard, ne propose rien non plus en la matière. J’en suis d’autant plus sidérée que les agriculteurs connaissent une année marquée par des crises sanitaires, des rendements en baisse et des prix faibles dans le bio, les produits sous signe de qualité ou l’élevage. D’après l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), 20 % des agriculteurs ont gagné moins de 6 100 euros par an entre 2010 et 2022, et ce alors que les marges des grands industriels de l’agroalimentaire atteignent 40 %, contre 35 % il y a cinq ans.

Quelles sont, à votre sens, les premières mesures que Madame la ministre devrait annoncer pour garantir des prix rémunérateurs aux agriculteurs ?

M. Benoît Biteau (EcoS). La question de la transmission est d’importance, car c’est précisément à ce moment qu’on peut imaginer comment réinventer les pratiques agricoles et permettre aux jeunes agriculteurs de se projeter dans l’avenir. Vous avez notamment fait référence au Point d’accueil installation transmission (PAIT), le guichet unique auquel les futurs exploitants peuvent s’adresser. Pourquoi ne parvient-on pas à faire vivre ce guichet, à permettre la rencontre entre les cédants et les candidats à l’installation ? Comment favoriser ce dialogue et faire de cette étape l’occasion de penser l’évolution des pratiques, donc de l’outil de travail ?

Pierrick Horel. La FCO et à la MHE inquiètent particulièrement les agriculteurs. Vos interrogations concernent principalement les zones de montagne, mais le phénomène ne se cantonne pas aux massifs – ce serait trop facile. Il est vrai que ces systèmes, qui reposent sur la transhumance et sur un mode d’exploitation très extensif, sont particulièrement exposés, et le revenu, qui se fait en grande partie sur la période estivale, peut s’en trouver affecté.

Plus largement, cette situation renvoie au problème de l’accès aux vaccins et à notre ambition en la matière. La stratégie actuelle n’est pas la bonne. Une fois l’épizootie déclarée, sa diffusion est plus rapide que notre réponse, car celle-ci n’est pas opérationnelle, du fait d’un tissu vétérinaire en milieu rural qui se dégrade et des difficultés d’accès aux vaccins, faute de production en quantité suffisante. Plutôt que des prêts relais, les agriculteurs demandent une stratégie diagnostique des maladies susceptibles de se diffuser et de leur vitesse de diffusion.

Cela étant, l’accès à la trésorerie préoccupe également. Il est encore trop tôt pour disposer d’une vue d’ensemble des pertes de production, notamment laitière et animale, mais il faudra les estimer dès que possible et financer les agriculteurs touchés pour leur éviter une impasse. Je pense notamment aux agriculteurs de montagne, dont les bêtes semblent pour l’heure surtout affectées par la FCO, un peu moins par la MHE.

J’entends qu’on puisse prendre des postures vis-à-vis du libre-échange ; moi, je m’intéresse aux solutions offertes aux agriculteurs. S’agissant d’Égalim, aucun de ceux qui ont signé des contrats déterminés, pour 60 % ou 80 %, par leurs coûts de production et, pour la part restante, par les prix de marché ne s’en plaindra ; cela fonctionne.

Ce qui est compliqué, c’est de déployer la démarche, à cause de la mondialisation, mais aussi des distributeurs qui ne sont pas prêts à se remettre en question. Ils sont habitués à ce que la loi de modernisation de l’économie les protège pour certains services, et empêchent de fait les agriculteurs de discuter avec eux d’une possible remise en question de ces dispositifs. Renverser la vapeur demandera du temps.

Les agriculteurs également doivent être plus ouverts à la contractualisation. Les quelques producteurs de fruits et légumes de mon territoire y sont, par exemple, réticents, à cause de la saisonnalité de leur production et de la mondialisation du marché. Mais enfin, il faut sanctuariser le coût de la matière agricole pour régler la question du revenu des agriculteurs.

Selon moi, Égalim est le bon véhicule pour y parvenir, pourvu qu’il évolue, et que chacun abandonne les postures. En tout cas, pour ceux qui sont allés au bout de la démarche de contractualisation, Égalim fonctionne.

M. Julien Rouger. Notre vision du modèle agricole implique le maintien du maximum d’agriculteurs. Selon les chiffres de l’Insee, de la Mutualité sociale agricole (MSA) et de l’Agence de services et de paiement (ASP), le nombre annuel d’installations, aidées ou non, approche 14 000. Celui des départs à la retraite est aux alentours de 20 000. Le déficit structurel est donc d’environ 6 000. Les départs à la retraite étant amenés à augmenter d’environ 30 %, si nous nous contentons de maintenir le nombre actuel d’installations, ce déficit augmentera encore de 5 000 ou 6 000. La priorité absolue est donc d’accroître l’attractivité du métier, du point de vue à la fois du revenu et de l’installation-transmission. Nous voulons une agriculture familiale, pour que nos campagnes et le milieu rural soient les plus vivants possible.

De nombreuses solutions, pas forcément toutes adaptées, existent déjà pour favoriser l’installation : les fonds de portage, l’accompagnement financier ou le guichet unique PAI qui couvre l’ensemble du territoire national. Or, l’équivalent n’existe pas pour la transmission, qui est véritablement le parent pauvre des politiques publiques. Il faudrait créer une sorte de point accueil transmission, pour mieux accompagner ceux qui souhaitent partir à la retraite ou simplement s’informer sur la transmission, en les sensibilisant à ses enjeux. Il faut, en outre, mieux articuler les structures dédiées à l’installation et à la transmission, car actuellement, elles travaillent chacune dans leur coin, excepté dans quelques départements où elles arrivent à collaborer. Pour faire face au choc démographique, nous devrons forcément travailler tous ensemble, pour nous répartir les tâches et les missions, car chacun a ses domaines de prédilection et de compétences.

Sur la vingtaine de mesures fiscales qui concernent l’agriculture, seulement six concernent l’installation ou la transmission. C’est très peu, et leur budget est très faible. Nous souhaitons ainsi que le ministère de l’agriculture publie les recommandations, fiscales ou non, émises dans le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) sur la transmission. Elles doivent servir de base aux discussions sur le PLF et le PLFSS.

J’en viens aux groupements fonciers agricoles d’investissement (GFAI) qui ont été proposés dans le cadre des débats sur le PLOA. Cet outil a cristallisé les discussions, à tort. Selon nous, la question n’est pas de savoir comment ressusciter ce projet, mais comment apporter à ceux qui souhaitent s’installer le capital nécessaire, et pas forcément pour acheter du foncier. De fait, la hausse de 10 % du coût global de l’installation au cours des vingt dernières années ne s’explique pas par le foncier, dont le coût est resté stable, mais par l’augmentation du prix des biens immeubles, les bâtiments d’exploitation et les corps de ferme. Du reste, le faire-valoir direct a connu un petit recul, qui a permis aux jeunes de décaler l’investissement foncier.

Le foncier est certes un problème, mais ce n’est pas le seul. Ce dont nous avons besoin, c’est une vision globale de l’aide financière nécessaire à l’installation des jeunes agriculteurs, en prenant en compte l’ensemble des moyens de production. C’est surtout pour l’immobilier et les moyens de production qu’il faudra déployer des moyens colossaux, notamment dans des filières très capitalistiques, comme la viticulture ou l’élevage. Dans la viticulture, les repreneurs ne rachètent quasiment jamais les stocks, car ils sont trop coûteux et il leur faut repartir de zéro ; dans l’élevage, il est incontournable de racheter le cheptel, mais la rentabilité des exploitations est si faible que le financement pose problème.

M. Dominique Potier (SOC). La dégradation du revenu des agriculteurs s’explique largement par le secteur amont, notamment à cause du surcoût de mécanisation, pointé par la fédération des coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma), et de la fiscalité. Or, vous ne formulez aucune proposition en la matière. Pour notre part, nous demandons que l’Observatoire de la formation des prix et des marges intègre le secteur amont à son domaine de compétence, pour y voir plus clair et apporter les régulations nécessaires. Seriez-vous prêt à accompagner notre demande ? Sans vouloir vous mettre la pression, M. Arnaud Rousseau nous a indiqué que lui l’était.

Vous êtes favorables à un « big bang fiscal ». Mais seriez-vous prêts à étudier une réforme de la fiscalité agricole permettant une répartition plus juste entre les différentes catégories d’exploitations, à niveau de fiscalité égal, voire à travers une réduction des mesures fiscales dans ce domaine ? Je rappelle qu’elles coûtent plus de 4 milliards d’euros, soit la moitié du budget de la PAC. L’enjeu est énorme.

Votre syndicat, depuis que je le connais, promet de s’engager en faveur d’une réforme de la politique foncière. Quand le fera-t-il ? Dans le cadre de la reprise de l’examen du PLOA ? Après les élections des chambres d’agriculture ? À La Saint-Glinglin ?

Mme Mélanie Thomin (SOC). Comment optimiser la gestion de l’eau ? Cette ressource étant amenée à se raréfier, quel est votre point de vue, en tant que jeunes agriculteurs, sur la priorisation de l’accès à celle-ci dans les territoires ruraux ?

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Nous nous sommes opposés à la création des GFAI, car ils auraient conduit à abandonner les terres agricoles au marché, en ouvrant leur propriété à de grands investisseurs spéculatifs.

Le Crédit Agricole prévoit de devenir actionnaire d’exploitations porcines et de volailles l’an prochain, en Bretagne, à titre de test. N’est-ce pas la porte ouverte à la financiarisation des exploitations agricoles ? Je note au passage que Madame la ministre de l’agriculture n’a pas eu un mot sur ce risque.

M. Hervé de Lépinau (RN). Vous évoquez le besoin de libérer les jeunes agriculteurs des contraintes administratives et de l’empilement de normes qui les ralentit. Or, le projet de loi d’orientation agricole prévoyait en son article 13 une forme de « stage de rééducation » des agriculteurs en cas d’atteinte non intentionnelle à l’environnement ou à la biodiversité. Cet article avait été réécrit avec la collaboration, entre autres, de Madame Genevard lorsqu’elle était députée, et les députés du groupe Les Républicains l’avaient voté favorablement – nous avions voté contre. Comptez-vous demander à la nouvelle ministre l’abandon d’une telle procédure, humiliante, inutile et extrêmement coûteuse en temps et en argent, puisque les stages prévus seront financés par les agriculteurs ?

Mme Valérie Rossi (SOC). Aux conséquences sanitaires et économiques des épizooties qui ravagent nos élevages, on pourrait ajouter les conséquences psychologiques, tout aussi dramatiques.

Les dysfonctionnements en matière de vaccination – administration dans l’urgence, fort déficit des doses vaccinales – n’en sont malheureusement pas à leur première fois. Avons-nous suffisamment analysé les crises précédentes pour anticiper celle qui est en cours et les éventuelles prochaines ?

Depuis le 5 août, un nouveau sérotype de fièvre catarrhale ovine, le BTV-3, se diffuse en France. Pensez-vous que les Pays-Bas, où il est apparu à la fin de 2023, fournissent suffisamment de données et que les structures de recherche, notamment l’Inrae, sont suffisamment financées pour mieux anticiper les crises ?

M. Fabien Di Filippo (DR). La décapitalisation de certaines filières agricoles est une tendance de long terme. Dans quelle mesure la fièvre catarrhale ovine qui décime les cheptels risque-t-elle de l’accélérer ? Quelles solutions proposez-vous pour recapitaliser ces filières, alors qu’elles concernent des marchés où nous sommes déjà largement importateurs ?

M. Pierrick Horel. Évidemment, nous ne demandons pas de réserver les ressources en eau prioritairement à l’agriculture ; il faut trouver une solution satisfaisante pour tous. Je viens d’un territoire où trois départements bénéficient de la déviation de deux rivières des Alpes, qui permet à la fois d’irriguer les cultures, d’apporter de l’eau potable et de faire fonctionner la centrale hydraulique de Serre-Ponçon. Cette déviation, d’une autre ampleur que les mégabassines actuelles, sert ainsi toute la population. Tant qu’on n’abandonnera pas les postures politiques, on ne réglera pas la question de l’eau potable, qui devient de plus en plus prégnante du fait du changement climatique, celui-ci modifiant le régime des précipitations. S’entendre pour la capter, la valoriser et la partager est aussi vital que l’eau est essentielle à la vie.

Le Crédit Agricole, qui finance l’agriculture française depuis un certain temps, a effectivement annoncé tester l’entrée au capital de certaines exploitations en Bretagne l’an prochain. Il répond ainsi à un besoin de capitaux dans les exploitations concernées, ni plus ni moins. Un marché s’ouvre. Le groupe Invivo a également évoqué des investissements cet été. Cela doit nous alerter sur la nécessité de proposer rapidement un modèle fonctionnel de transmission des exploitations à haute valeur capitalistique, pour éviter que des acteurs qui ne sont plus tout à fait des agriculteurs décident dans les fermes.

En outre, au vu notamment du profil des nouveaux exploitants, il est crucial de mener à bien le difficile travail de définition des actifs agricoles. Une prise de conscience a eu lieu en ce sens, dans le cadre du dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture de l’Union européenne. Nous restons force de proposition en la matière.

M. Julien Rouger. Nous sommes bien évidemment favorables à l’élargissement du champ de compétence de l’Observation de la formation des prix et des marges au secteur amont. Il est vrai que la part du coût de la mécanisation dans le coût de l’installation a bondi ces dernières années, non seulement à cause du covid, mais aussi pour des raisons structurelles.

La réforme de la politique foncière, qui est stratégique, doit être menée selon le bon timing. La priorité ira cet automne aux engagements donnés par le Gouvernement, à la question du revenu des agriculteurs et aux mesures relatives à l’installation et à la transmission. Nous pourrons nous consacrer au foncier dans un second temps, en 2025. Un événement au Salon international de l’agriculture permettrait, par exemple, de marquer le coup.

Enfin, en matière fiscale, nous n’avons qu’un mot d’ordre : la fiscalité doit permettre aux nouveaux exploitants de s’installer en plus grand nombre et dans les meilleures conditions.

M. Pascal Lecamp, président. Je vous remercie pour la clarté et la précision de vos réponses. Nous partageons votre souci d’améliorer les conditions du développement de l’agriculture française. Je retiens le déficit annuel de 6 000 installations et vos demandes d’éviter la financiarisation de l’agriculture et de faciliter les transmissions – vous appelez à une forme de pacte Dutreil agricole. Je note que vous tenez Égalim pour un bon véhicule, quoique perfectible. Nous, législateurs, devrons nous atteler à ces défis dans les années ou les mois qui viennent.

 


 

Information relative à la commission

La commission a désigné Mme Louise Morel rapporteure pour avis sur les crédits du commerce extérieur dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, en remplacement de M. Richard Ramos, celui-ci ayant renoncé à cette fonction.

 


Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 24 septembre 2024 à 15 h 30

Présents.  M. Laurent Alexandre, M. Maxime Amblard, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Karim Benbrahim, M. Thierry Benoit, M. Benoît Biteau, M. Julien Dive, M. Julien Gabarron, M. Antoine Golliot, M. Harold Huwart, Mme Chantal Jourdan, Mme Hélène Laporte, Mme Nicole Le Peih, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Guillaume Lepers, M. Hervé de Lépinau, M. Patrice Martin, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, M. Paul Midy, Mme Sandrine Nosbé, M. Jérôme Nury, M. Dominique Potier, Mme Valérie Rossi, Mme Mélanie Thomin, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. Frédéric Weber

Excusés.  M. Antoine Armand, M. André Chassaigne, Mme Christine Engrand, Mme Olivia Grégoire, Mme Valérie Létard, M. Laurent Lhardit, M. Max Mathiasin, Mme Louise Morel, M. Philippe Naillet, Mme Agnès Pannier-Runacher, M. Stéphane Peu

Assistaient également à la réunion.  M. Arnaud Bonnet, M. Pierre Cordier, M. Fabien Di Filippo, Mme Mathilde Hignet