Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus (n° 561) (M. Pascal Lecamp, rapporteur)               2

 Examen de la proposition de loi visant à instaurer un dispositif de sanction contraventionnelle pour prévenir le développement des vignes non cultivées qui représentent une menace sanitaire pour l’ensemble du vignoble français (n° 822) (M. Hubert Ott, rapporteur).              33

– Informations relatives à la Commission

 

 

 


Mercredi 19 février 2025

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 62

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Aurélie Trouvé,

Présidente


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La commission des affaires économiques examine la proposition de loi adoptée par le Sénat, pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, n° 561 (M. Pascal Lecamp, rapporteur).

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous examinons ce matin deux propositions de loi inscrites à l’ordre du jour de la journée réservée du groupe Les Démocrates du 6 mars prochain, et débutons par la proposition de loi pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, pour laquelle notre commission a désigné rapporteur M. Pascal Lecamp.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. L’ambition de cette proposition de loi est simple : protéger nos concitoyens contre les abus du démarchage téléphonique. Cette pratique omniprésente et souvent intrusive affecte le quotidien de millions de Français. Elle se manifeste par des appels intempestifs, une pression commerciale insidieuse et, parfois, de véritables tentatives d’extorsion ciblant les plus vulnérables.

Le constat est accablant : une étude de l’UFC-Que choisir révèle que 72 % de nos concitoyens sont démarchés au moins une fois par semaine, et 38 % quotidiennement – c’est mon cas. Le dispositif Bloctel, censé leur offrir une protection, s’est révélé insuffisant et ne dissuade qu’une partie des entreprises, tandis que de nombreux acteurs frauduleux contournent la législation. Pire encore, les sanctions prévues n’ont pas d’effet dissuasif.

Il était donc impératif d’agir. Je salue l’initiative de notre collègue sénateur Pierre-Jean Verzelen, dont la proposition de loi a posé les bases d’une réforme de grande ampleur. Je remercie également la rapporteure au Sénat, Mme Olivia Richard, ainsi que les sénateurs qui ont enrichi et consolidé le texte au fil des débats. Enfin, je ne veux pas oublier ma collègue Louise Morel, qui a défendu devant la commission des affaires européennes une proposition de résolution portant sur le même sujet. Leur travail a permis d’aboutir à un dispositif équilibré, efficace et conforme aux exigences du droit européen.

L’article 1er propose une avancée majeure en mettant un terme au régime actuel d’opt-out, qui repose sur l’inscription volontaire des consommateurs sur une liste d’opposition, au profit d’un système de consentement explicite, dit opt-in. Désormais, le démarchage téléphonique sera interdit, sauf si le consommateur a préalablement donné son accord de manière libre, spécifique et informée. La réforme aligne le cadre juridique du démarchage téléphonique sur celui des courriels et des SMS en renforçant la protection de la vie privée des consommateurs.

Ce changement de paradigme répond à un double impératif. D’une part, il assure une meilleure conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD), qui impose un consentement explicite et spécifique à toute sollicitation commerciale. D’autre part, il met fin à une logique perverse par laquelle l’absence de refus manifeste était considérée comme une autorisation tacite d’être sollicité qui ouvre la porte à toutes les dérives. Toutefois, afin de garantir l’effectivité du dispositif, un amendement tend à préciser que la charge de la preuve du recueil du consentement incombe au professionnel démarcheur : il ne saurait être question que la responsabilité en repose sur le consommateur.

Le texte introduit plusieurs mesures complémentaires visant à assainir durablement le secteur du démarchage téléphonique.

L’article 2 interdit de subordonner la vente d’un bien ou d’un service à l’acceptation du démarchage téléphonique.

L’article 3 alourdit les sanctions en cas d’abus de faiblesse. Les entreprises qui ciblent les personnes âgées ou fragiles par des pratiques agressives encourront désormais des peines renforcées.

L’article 6 autorise les opérateurs à créer un filtre antispam pour les SMS ; jusqu’à présent, les SMS frauduleux et commerciaux échappaient en partie à la régulation.

L’article 7 aligne le régime de publication des numéros fixes et mobiles dans les annuaires publics ; désormais, les numéros fixes ne seront plus accessibles par défaut aux démarcheurs, sauf consentement explicite du titulaire.

L’article 8 facilite le partage d’informations entre les autorités de contrôle, notamment la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), pour rendre plus efficaces le contrôle et les sanctions. Nous proposons de l’enrichir afin de renforcer leur coordination.

Enfin, l’article 9 prévoit une exception pour les instituts de sondage afin de garantir la poursuite de leur activité dans de bonnes conditions : ils ne seront pas soumis aux mêmes contraintes que les démarcheurs commerciaux.

Toutefois, dans un souci d’équilibre, certaines dispositions introduites au Sénat doivent être reconsidérées. L’article 5, qui instaure un délai de réflexion de vingt-quatre heures avant toute acceptation d’une offre issue d’un démarchage, me paraît devoir être supprimé. De même, les restrictions horaires et de fréquence prévues aux alinéas 3 à 5 de l’article 4 doivent être réexaminées. Si l’encadrement du démarchage est impératif, ces limitations excessives risqueraient d’entraver de manière disproportionnée une activité économique encadrée par des règles claires. Permettez-moi de rappeler que le secteur du démarchage téléphonique représente plus de 40 000 emplois en France.

La proposition de loi apporte une solution pragmatique et sérieuse à un fléau du quotidien. Nous avons la responsabilité de répondre clairement aux attentes de nos concitoyens, qui réclament une protection efficace contre le harcèlement téléphonique, un encadrement strict des pratiques commerciales et une capacité de contrôle renforcée pour sanctionner les abus. C’est pourquoi je vous invite à voter le texte à l’unanimité. Ensemble, mettons un terme aux appels intempestifs et offrons à chacun la tranquillité qu’il est en droit d’exiger.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Louise Morel (Dem). Au nom du groupe démocrate, je salue le rapporteur pour le travail qu’il a effectué, dans des délais relativement contraints, sur un sujet qui constitue une réelle source d’agacement pour nos concitoyens. Comme plusieurs de nos collègues, j’y travaille depuis quelque temps et je suis convaincue que la proposition de loi du sénateur Verzelen est nécessaire. Elle propose un changement de paradigme complet en faisant basculer le modèle du démarchage téléphonique actuel, dit opt-out, vers un modèle de recueil du consentement préalable, ou opt-in.

Nous ne pouvons plus attendre. SignalConso, le service de recueil des plaintes pour démarchage abusif, a recensé 47 000 signalements en 2023. Ce chiffre est bien en deçà de la réalité, puisque les Français ne signalent pas l’intégralité des appels abusifs.

Le démarchage téléphonique nuit à la santé et au bien-être de nos concitoyens, tout particulièrement à celui des personnes âgées. En quelques années, le législateur a adopté une succession de lois pour lutter contre ce phénomène : la loi Hamon, qui a instauré Bloctel ; la loi Naegelen, qui encadre les horaires du démarchage ; la loi visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires ; la loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, qui couvrait le secteur de la rénovation énergétique ; et j’en passe. Le durcissement de la législation n’a visiblement pas suffi. C’est toujours au consommateur qu’il incombe de s’inscrire sur Bloctel et de dénoncer les démarchages abusifs. Compte tenu du nombre d’entreprises, de la baisse massive du coût des appels téléphoniques et de l’essor de l’intelligence artificielle, cela ne peut fonctionner.

Le RGPD donne à l’individu l’autorité sur la gestion de ses données. Nous ne pouvons plus accepter que seul le démarchage téléphonique ne soit pas sanctuarisé par le recueil préalable du consentement. D’autres pays, comme l’Allemagne, ont déjà bousculé le système. Il est temps que la France fasse de même.

Le groupe démocrate soutient la proposition de loi avec beaucoup d’enthousiasme et espère qu’elle recueillera un large soutien. Néanmoins, nous ne ferons pas l’économie d’un débat sur les moyens alloués à la DGCCRF pour la faire appliquer.

Mme Géraldine Grangier (RN). Le démarchage téléphonique est une pratique qui suscite, à juste titre, exaspération et méfiance de la part de nos concitoyens. Trop souvent, il se traduit par une intrusion dans leur quotidien, des appels répétés et insistants et une confusion généralisée sur l’origine des sollicitations. Il était donc nécessaire de légiférer pour mieux encadrer ces pratiques et protéger les consommateurs.

Toutefois, en voulant restreindre les abus, nous devons veiller à ne pas pénaliser des modèles commerciaux légitimes qui ne relèvent pas du démarchage téléphonique à froid. Il y a une distinction essentielle à faire entre le démarchage sauvage, qui repose sur des bases de données non qualifiées et des sollicitations non désirées, et d’autres formes de contact téléphonique fondées sur le consentement ou la recommandation. Le démarchage à froid, véritable fléau pour nos concitoyens, consiste à appeler des personnes sans qu’elles aient manifesté la moindre intention d’être contactées. C’est ce démarchage abusif, agressif et opaque qui doit être encadré de manière stricte, voire interdit dans certaines conditions.

À côté de cela, il existe d’autres pratiques qui ne doivent pas être assimilées à ces méthodes intrusives. Le premier est la sollicitation d’une personne qui a exprimé clairement sa volonté d’être contactée, par exemple en remplissant une demande de devis sur un site internet ou en s’inscrivant à un programme d’information. Dans ce cadre, le consentement est explicite. Le parrainage, quant à lui, permet à un client de recommander un service ou un produit à une personne de son entourage ; l’appel est fondé sur une relation préexistante avec un intermédiaire clairement identifié. Assimiler ce procédé au démarchage téléphonique à froid reviendrait à nier la place du bouche-à-oreille dans notre économie et à mettre en péril les secteurs entiers qui en dépendent.

La proposition de loi a évolué grâce aux travaux du Sénat. Initialement, elle prévoyait un régime de consentement généralisé qui risquait d’interdire purement et simplement la sollicitation et le parrainage. Cette approche excessive a heureusement été corrigée : le cadre du démarchage téléphonique a été rapproché de celui applicable aux courriels et aux SMS. Toutefois, des ambiguïtés subsistent, notamment au sujet de la charge du recueil du consentement, qui ne doit pas fragiliser les particuliers souhaitant recommander un service. Il faut trouver un équilibre : nous devons protéger les Français des abus du démarchage téléphonique à froid, mais nous ne devons pas entraver inutilement l’activité économique et la liberté de choix des consommateurs. Il appartient au législateur de distinguer clairement les pratiques abusives des modèles commerciaux légitimes. C’est à cette condition que la proposition de loi pourra atteindre son objectif.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. L’objectif de la proposition de loi est précisément de faire la distinction entre le démarchage à froid, comme vous dites, et le démarchage responsable. Il faut prendre garde que le parrainage n’ouvre pas la porte au retour du démarchage abusif.

M. Thomas Cazenave (EPR). Je remercie M. le rapporteur d’avoir fait inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour. Il s’agit d’un sujet de préoccupation majeur pour nos concitoyens ; près des trois quarts des Français sont dérangés chaque semaine par ces appels et plus d’un tiers subissent ces sollicitations quotidiennement.

Ces dernières années, nous avons essentiellement agi sous l’angle de la lutte contre la fraude en interdisant le démarchage lié au compte personnel de formation et aux travaux de rénovation énergétique. Cependant, le problème du démarchage téléphonique dépasse la seule question de la fraude. C’est un fléau du quotidien qui sape la confiance des consommateurs et alimente un sentiment d’intrusion permanente. Le dispositif Bloctel, qui reposait sur une logique de refus a posteriori, a hélas montré ses limites.

Nous devons mettre un terme à l’impunité des démarcheurs peu scrupuleux et rééquilibrer le rapport de forces en faveur du consommateur. Le passage à un régime de consentement préalable est une avancée importante. Nos concitoyens ne devraient pas subir une pression commerciale constante dans leur propre foyer. Le modèle proposé, déjà en vigueur pour la prospection électronique, garantit une meilleure protection des consommateurs et aligne notre droit sur les exigences européennes et sur le RGPD. Cette réforme responsabilise les entreprises, réduit le volume d’appels non sollicités et garantit enfin aux Français le droit à la tranquillité.

Le texte apporte une réponse claire et attendue à une préoccupation majeure. Le groupe Ensemble pour la République le soutiendra.

M. Christophe Bex (LFI-NFP). Je remercie nos collègues du Modem d’avoir inscrit cette proposition de loi en première position de l’ordre du jour de leur niche parlementaire. Le groupe La France insoumise-NFP s’est prononcé à plusieurs reprises pour l’interdiction par défaut du démarchage téléphonique. C’est pourquoi nous considérons que cette proposition de loi va dans le bon sens. Elle aurait néanmoins mérité d’être plus ambitieuse.

Le démarchage téléphonique est une nuisance quotidienne pour des millions de Françaises et de Français. Selon l’UFC-Que choisir, en 2023, près des trois quarts d’entre eux le subissent chaque semaine et 38 % chaque jour, avec en moyenne six appels non désirés par semaine. C’est un harcèlement qui fatigue, qui envahit l’intimité, qui mine la confiance dans les outils de communication. Les conséquences sont lourdes : stress, troubles de l’attention, sentiment de violation de la vie privée ; pire, certaines personnes finissent par ne plus répondre au téléphone, au risque de l’isolement. Nous devons y mettre un terme.

La proposition de loi est d’autant plus nécessaire que le démarchage téléphonique persiste malgré le cadre existant. Le dispositif Bloctel, censé protéger les citoyens, est un échec cuisant. Une enquête de la répression des fraudes a révélé qu’en 2020, plus de la moitié des entreprises contrôlées ne respectaient pas les règles. Or, quand un cadre n’est pas respecté, il faut le renforcer. Nous proposons d’interdire purement et simplement le démarchage téléphonique au-delà des quelques secteurs déjà concernés. La tranquillité est un droit : tout comme les nuisances sonores et les troubles du voisinage, les appels non sollicités à toute heure ne devraient plus être une fatalité.

Enfin, il ne faut pas oublier que le démarchage téléphonique est aussi un fléau pour celles et ceux qui travaillent dans le secteur. Dans les centres d’appels, les conditions de travail sont désastreuses : salaires de misère, pression permanente des chiffres, surveillance constante, reporting incessant… Cette cadence infernale a des conséquences lourdes : stress, épuisement, troubles du sommeil. Évidemment, les premières victimes de cette précarité sont les femmes, qui représentent près de 70 % des salariés du secteur. Selon le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, les risques sont trois fois plus importants dans les catégories les plus confrontées à la précarité que sont les employées et les ouvrières. Elles sont aussi plus exposées aux troubles musculo-squelettiques et à la pénibilité. L’argument de la création d’emplois ne tient pas, puisque ces emplois sont massivement délocalisés.

La proposition de loi pourrait être plus ambitieuse. Néanmoins, notre position sera celle des principales associations de consommateurs, dont l’UFC-Que choisir : suivant les amendements adoptés, nous voterons ou non pour le texte.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Vous avez dit deux fois que vous souhaitiez un texte plus ambitieux. Nous le souhaitons tous. Je compte sur vous pour adopter les amendements les plus judicieux et le voter à l’unanimité.

Mme Valérie Rossi (SOC). Il y a bientôt cinq ans, le Parlement adoptait la proposition de loi de notre collègue Christophe Naegelen visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. C’était le texte de la dernière chance pour faire fonctionner le principe de l’opt-out, c’est-à-dire l’interdiction du démarchage téléphonique pour les personnes qui s’inscrivaient sur une liste de refus, la liste Bloctel, et un encadrement renforcé pour les autres.

L’intensification du démarchage téléphonique abusif, y compris auprès des personnes inscrites sur cette liste, est devenue insupportable pour nos concitoyens. Les députés socialistes et apparentés soutiennent donc la logique centrale du texte, à savoir le basculement vers une interdiction de principe du démarchage téléphonique, sauf consentement préalable.

Le Sénat a mené un travail de qualité pour enrichir et préciser le texte. Nous souhaitons adopter la même logique constructive. Le champ des personnes ou activités exclues de l’interdiction doit encore être précisé. La possibilité de démarchage téléphonique auprès de personnes avec lesquelles une relation contractuelle existe déjà doit être circonscrite à l’objet même du contrat ; en effet, lorsqu’on dispose d’un abonnement de téléphonie mobile, on ne souhaite pas être appelé deux fois par semaine par son opérateur pour se voir offrir toute la gamme d’offres connexes ou une box internet.

De la même manière, nous souhaitons que les sollicitations pour les études statistiques, les enquêtes d’opinion et les sondages réalisés de manière automatisée soient réintégrées dans le champ de l’interdiction, car elles irritent nos concitoyens. La rédaction de l’article 9 ne fait aucune distinction entre une étude statistique de l’Insee, dont l’intérêt public est manifeste, et l’enquête de satisfaction d’une chaîne de grande distribution.

À l’inverse, pour certaines activités qui font vivre nos villages et qui apportent des solutions aux personnes isolées, notamment âgées, il faut pouvoir distinguer le type de démarchage en fonction de l’activité visée. La vente ambulante aux particuliers de produits alimentaires, qui nécessite souvent une information téléphonique en amont, devrait être exclue du périmètre de la proposition de loi.

Enfin, nous souhaitons que le texte entre en vigueur rapidement, dès le 1er janvier 2026. Aucune contrainte technique ne justifie un report de plus d’un an.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Merci, madame la députée, pour votre logique constructive. Vous avez ciblé des points importants. En tant qu’ancien maire d’un petit village du sud de la Vienne, je peux témoigner que mes petits voisins de 94 ans ont des besoins téléphoniques qu’il convient d’intégrer dans le texte. Je vous suivrai à ce sujet.

M. Vincent Rolland (DR). Rares sont les sujets qui font l’unanimité dans cette assemblée. Celui-ci nous rassemble, à l’image des millions de Français qui nous font part de leur exaspération. Nous devons donner un coup d’arrêt aux abus de cette pratique commerciale sur laquelle de nombreuses entreprises continuent de miser, puisqu’elle a augmenté de 19 % entre 2019 et 2021. Ces campagnes intensives sont un véritable fléau auquel nous devons apporter un remède.

Le texte en discussion apporte des solutions intéressantes dont les conséquences concrètes pour les Français seront néanmoins limitées. Au 1er janvier 2026, le démarchage téléphonique sans consentement préalable du consommateur sera interdit. Les appels seront limités à une plage horaire de sept heures par jour, contre neuf heures actuellement, ainsi qu’à deux tentatives tous les soixante jours. Le respect du refus sera davantage pris en considération. Un délai de carence de vingt-quatre heures précédera l’acceptation d’une offre commerciale. Enfin, les numéros de téléphone fixe seront automatiquement inscrits sur liste rouge, sauf dispositions transitoires votées pour les numéros actuels.

Même si ces principes nous laissent dubitatifs – ce n’est pas mon excellent collègue Pierre Cordier, qui a défendu en 2018 une proposition de loi à ce sujet, qui dira le contraire –, notre groupe soutiendra ces mesures. Nous appelons néanmoins l’attention des Français qui penseraient que tout va changer : la plupart de ces démarchages téléphoniques sont déjà dans l’illégalité. Il faudrait être naïf pour penser le contraire. Les nouvelles mesures concerneront surtout les entreprises françaises qui respectent déjà le cadre légal. L’essentiel du travail incombe à la répression des fraudes, qui doit fermer les communications issues de plateformes situées à l’étranger. C’est le seul chemin pour que nos compatriotes retrouvent un minimum de tranquillité et de sérénité en ces temps troublés.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Si nous arrivons à filtrer trois appels sur quatre, ce sera déjà très bien. Le plus important est d’identifier les margoulins, pour reprendre un terme entendu en audition, afin de rendre la loi efficace.

Mme Delphine Batho (EcoS). Sept ans. Cela fait sept ans que nous dénonçons l’impuissance du dispositif Bloctel et que nous proposons l’interdiction du démarchage téléphonique non consenti, depuis la proposition de loi qu’avait déposée le groupe Écologie démocratie solidarité sous la quinzième législature. L’Assemblée nationale a manqué trois rendez-vous législatifs, en 2020, 2 021 et 2022, lorsqu’elle a repoussé les amendements proposant l’interdiction du démarchage téléphonique non consenti. Nous nous réjouissons que le Sénat ait adopté un texte qui fait l’unanimité.

Les Français sont excédés de l’invasion permanente de la société d’ultra-consommation dans leur vie privée, que l’on peut assimiler à du harcèlement moral. La République doit garantir à chacun le droit à la tranquillité. Le 27 novembre dernier, notre commission a adopté un amendement en ce sens dans le cadre de la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques ; je remercie l’ancienne ministre Olivia Grégoire pour son intervention décisive lors de ce débat. De ce fait, deux textes ont été simultanément adoptés dans le même but, l’un à l’Assemblée nationale, l’autre au Sénat. Celui du Sénat est plus complet et nous remercions le Modem de l’avoir inscrit à l’ordre du jour de sa journée d’initiative parlementaire.

Au vu de l’urgence, nous aurions été ouverts à une adoption conforme. Toutefois, puisque nous n’en prenons pas le chemin, nous ferons le nécessaire pour perfectionner le texte et nous nous opposerons à tout mécanisme de contournement qui ouvrirait une brèche dans l’interdiction du démarchage téléphonique non consenti ; car tout motif de dérogation, aussi justifié soit-il en apparence, sera immédiatement utilisé pour contourner l’interdiction. Enfin, nous militerons pour une date d’entrée en vigueur plus précoce que celle d’août 2026.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Effectivement, sept ans, c’est long ; toutefois, il y a sept ans, il n’y avait pas autant de sollicitations qu’aujourd’hui. On a cru un temps que Bloctel et la loi Naegelen suffiraient. Nous avions discuté ensemble de la possibilité d’une adoption conforme ; j’entends votre volonté de faire appliquer la loi le plus vite possible.

M. Thomas Lam (HOR). Le démarchage téléphonique peut paraître anecdotique au regard des défis auxquels nos concitoyens sont confrontés chaque jour – pouvoir d’achat, dérèglement climatique, sécurité ou emploi –, mais il ne l’est pas. C’est un irritant dont se plaignent un grand nombre d’entre eux. Près de trois Français sur quatre disent être démarchés au moins une fois par semaine sur leur téléphone portable et un tiers tous les jours. Malgré les mesures fortes prises ces dernières années, le cadre législatif n’est pas suffisant pour assurer la tranquillité téléphonique de nos concitoyens. Seuls 9 % des Français sont inscrits sur la liste d’opposition Bloctel ; ce faible chiffre s’explique principalement par la méconnaissance dont le dispositif fait l’objet.

Le texte prévoit un nouveau cadre adapté qui prend en compte les attentes des consommateurs et la nécessité pour les entreprises de continuer à démarcher de potentiels clients. Le groupe Horizons et indépendants salue le travail réalisé au Sénat pour trouver cet équilibre et rendre le texte applicable.

D’un côté, il faut effectivement favoriser la protection et le consentement des consommateurs. De ce point de vue, le texte répond à une attente légitime des Français. En instaurant le principe du consentement préalable, il renforce le droit de choisir de recevoir ou non des sollicitations commerciales. Les sénateurs ont en partie réécrit le texte pour aligner le régime du démarchage téléphonique sur celui du démarchage électronique, ce qui assure à la fois la lisibilité du cadre juridique et la conformité du dispositif au droit européen.

D’un autre côté, le groupe Horizons et indépendants s’attachera à préserver l’équilibre du texte de notre collègue Pierre-Jean Verzelen tel qu’adopté au Sénat, en s’opposant aux amendements qui visent à restreindre davantage les activités de démarchage téléphonique. N’oublions pas que cette activité génère aujourd’hui 56 000 emplois directs en France et que ce chiffre est en augmentation.

Le groupe Horizons et indépendants votera pour le texte et espère que celui-ci conservera l’équilibre trouvé au Sénat.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Nous voulons en effet aboutir à un texte équilibré. En ce qui concerne le nombre d’emplois concernés, nos chiffres diffèrent. Il ne faut pas non plus oublier l’intelligence artificielle, qui jouera un très grand rôle dans ce type d’activité : nous devons nous projeter d’ici cinq à dix ans.

M. David Taupiac (LIOT). Qui n’a jamais été interrompu au milieu d’un repas, d’une réunion ou d’une soirée entre amis par un appel non sollicité ? Qui ne s’est jamais énervé face à l’insistance intrusive de certains opérateurs ? Le démarchage téléphonique tel qu’il est pratiqué est un fléau.

Ce n’est pas faute d’avoir essayé de l’encadrer. La loi Hamon a posé les premiers jalons, mais elle s’est révélée insuffisante. Elle a été suivie de la loi du 24 juillet 2020, qui durcissait le cadre applicable aux plateformes de démarchage : le dispositif Bloctel devrait permettre aux personnes ne souhaitant pas être sollicitées de ne pas l’être, et les appels ne devraient être émis que du lundi au vendredi de dix à treize heures et de quatorze à vingt heures.

La réalité est bien différente : les sollicitations continuent, sans égard pour nos compatriotes. Comment ne pas être favorable à une nouvelle évolution législative ?

Vous défendez le passage à l’opt-in : les particuliers n’ont plus à s’inscrire sur des listes d’opposition, ce sont les entreprises qui doivent obtenir une autorisation explicite. Nous sommes favorables à cette évolution qui restreindra – à la marge – les sollicitations non désirées.

Mais soyons réalistes : les comportements abusifs, les appels illégaux ne prendront pas fin, d’autant que les centres d’appels sont souvent installés à l’étranger et que nous avons peu de prise sur eux. En revanche, les entreprises qui respectent les règles seront davantage contraintes. Nous nous réjouissons donc que la proposition de loi permette aussi de mieux lutter contre la fraude par un renforcement du bouclier antispam, l’aggravation des sanctions en cas d’abus de faiblesse et la facilitation de la coopération entre la DGCCRF, la CNIL et l’Arcep.

Nous sommes, vous l’avez compris, favorables à cette proposition de loi.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je n’aurais pas mieux dit !

M. André Chassaigne (GDR). Voici un bel exemple de fabrication de la loi : un processus de sédimentation qui, en fonction de la réalité du terrain, améliore peu à peu les décisions prises.

La précédente loi a interdit tout démarchage téléphonique en vue de travaux de rénovation énergétique, secteur où des entreprises peu scrupuleuses profitent des subventions publiques pour abuser des ménages. Les amendes administratives pour démarchage abusif des personnes inscrites sur Bloctel avaient aussi été relevées.

À l’époque, la majorité En marche s’était cependant opposée à la principale innovation du texte – n’autoriser le démarchage téléphonique que des consommateurs ayant donné leur accord explicite à l’utilisation de leurs données personnelles à des fins commerciales – car elle craignait de porter atteinte à la viabilité économique de certains centres d’appels. Nous avions dénoncé cette position, qui revenait à privilégier le business de quelques-uns face à la tranquillité de tous et au droit de chacun à ne pas être importuné à n’importe quelle heure à son domicile.

Sans surprise, le bilan de la loi du 24 juillet 2020 n’a pas été à la hauteur des espoirs suscités – c’est le moins que l’on puisse dire. Les infractions ne se sont pas taries ; les services de la DGCCRF ont confirmé que de nombreux professionnels ne respectaient toujours pas la législation relative à la liste Bloctel, ni l’interdiction de démarchage en vue de rénovations énergétiques. De la même manière, la CNIL a indiqué être régulièrement sollicitée par des plaignants qui recevaient des appels alors même qu’ils avaient exercé leur droit d’opposition ou n’avaient pas donné leur consentement.

Nous nous réjouissons donc que ce texte propose d’instaurer un régime faisant obligation aux professionnels de ne contacter les consommateurs par téléphone à des fins de prospection commerciale qu’après avoir obtenu leur accord explicite. Nous accueillons aussi très favorablement le renforcement des sanctions applicables au délit d’abus de faiblesse lorsque celui-ci est commis à la suite d’un démarchage par téléphone ou télécopie. Ces comportements dont les personnes vulnérables sont les premières victimes doivent être sanctionnés avec la plus grande sévérité.

Il faudra aller plus loin. Je pense en particulier aux 40 000 victimes annuelles de l’abus de faiblesse. Une fois hameçonnée, la victime fait l’objet d’un véritable harcèlement commercial et notre droit n’est pas adapté pour lutter contre ce véritable business. Nous devons réfléchir et mieux protéger nos aînés. Le renversement de la charge de la preuve en matière d’abus de faiblesse ou d’état d’ignorance est une piste ; la présomption d’abus de faiblesse au-delà d’un certain âge en est une autre.

Nous voterons cette proposition de loi.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. J’aime bien l’image de la sédimentation : si nous procédions toujours de cette façon, nous vivrions dans un monde parfait.

Je vous rejoins en ce qui concerne l’importance d’assurer la tranquillité de tous et de protéger les plus vulnérables.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Jean-Pierre Vigier (DR). Nous sommes tous d’accord : le démarchage téléphonique abusif est un fléau. Nos concitoyens en ont assez de ces appels incessants, intrusifs et souvent frauduleux.

Mais il ne faudrait pas que cette interdiction nuise aux nombreuses très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) qui respectent les règles et utilisent le démarchage téléphonique de manière responsable, notamment en milieu rural et auprès d’un public fragile : leur disparition mettrait en péril de nombreux emplois directs dans des territoires déjà fragilisés.

De plus, la mesure ne freinera pas totalement les appels indésirables : les centres d’appels se délocalisent déjà à l’étranger, ce qui rend la réglementation inefficace et laisse nos concitoyens exposés à des fraudes. L’enjeu est donc de renforcer les contrôles et les sanctions, tout en soutenant les entreprises respectueuses des normes.

Protégeons nos concitoyens, soutenons nos entreprises locales et agissons fermement contre les pratiques abusives !

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Venant moi-même d’un territoire très rural, je sais qu’il est important de séparer le bon grain de l’ivraie : nous devons arriver à un texte équilibré et durable qui écarte les acteurs responsables du harcèlement actuel et protège les plus vulnérables.

M. Pierre Cordier (DR). En 2018, dans le cadre de la niche du groupe Les Républicains, j’avais eu l’honneur de défendre une proposition de loi dont l’objet était similaire. J’ai relu ce que disaient les parlementaires qui s’étaient opposés à ce texte et je souris des changements d’avis de certains. Je me réjouis que nous examinions cette proposition de loi, et je ne reproche pas au Modem, qui était membre de la majorité parlementaire avec le groupe La République en marche, son attitude de l’époque : très gênés car favorables au texte, ses députés avaient marché sur des œufs, s’étaient abstenus ou étaient sortis au moment du vote… Je salue cependant la constance du Modem, qui avait soutenu la proposition de loi, notamment son article introduisant l’opt-in. Merci, monsieur le rapporteur, d’avoir remis le sujet à l’ordre du jour.

 M. Pascal Lecamp, rapporteur. Le Modem marche souvent sur des œufs, parce qu’il cherche la constance, le consensus et l’intérêt général ! Vous avez été un précurseur ; il y a toujours des gens qui pensent avant les autres. Nous sommes contents de vous satisfaire par cette proposition de loi, dont nous espérons qu’elle sera votée à l’unanimité.

Mme Delphine Batho (EcoS). On nous parle de distinguer les appels légaux des appels frauduleux. Mais la limite est floue, et les gens ne savent pas, par exemple, que le démarchage pour proposer des rénovations énergétiques est interdit. Par ailleurs, les moyens de la DGCCRF sont insuffisants et le signalement devrait être plus facile : à qui M. et Mme Tout-le-monde doivent-ils s’adresser ?

On nous parle aussi d’un risque de délocalisation des centres d’appels. Je dis à toutes les entreprises de France : mettez en place des services de relations client qui répondent au téléphone ! Il faut redéployer cette activité vers l’accueil de la vraie demande de la clientèle.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Sur la relation client comme sur les moyens de la DGCCRF, je vous rejoins tout à fait.

M. Thierry Benoit (HOR). Nous avons ici l’illustration parfaite de l’incapacité du législateur à aller au fond des choses. En 2018, on nous avait survendu une proposition de loi Naegelen qui ne réglait rien. Or, nous nourrissons la défiance de nos concitoyens en leur disant que le problème est résolu quand, en réalité, au nom de l’emploi, de l’équilibre, de je ne sais quoi, nous ne sommes pas allés au bout de la démarche.

Monsieur le rapporteur, la présente proposition de loi règle-t-elle le problème une fois pour toutes ?

Le régime des sanctions est-il approprié ? Certains de nos concitoyens sont vulnérables et nous devons nous montrer intraitables.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je ne suis pas devin ! Je ne sais pas si cette proposition de loi améliorera la situation. Je le disais, si nous arrêtons trois appels sur quatre grâce aux garde-fous prévus ici, je la considérerai comme un succès.

Quant aux sanctions, nous y reviendrons dans les amendements.

M. Romain Daubié (Dem). Nous connaissons la rigueur du rapporteur ; ce texte va dans le bon sens.

Le texte doit être équilibré. Certains acteurs économiques ont besoin de démarcher des clients potentiels au téléphone. Nous devons nous interroger sur leur capacité d’adaptation : que se passera-t-il s’ils ouvrent des centres d’appels où le droit français ne s’applique pas ? Quels moyens pourrons-nous allouer à l’Arcep et à la DGCCRF pour faire respecter ce texte ?

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Si le système fonctionne, les moyens nécessaires devront figurer dans le projet de loi de finances pour 2026.

Mme Delphine Batho (EcoS). On nous parle d’activités légitimes qui auraient besoin du démarchage téléphonique. Je rappelle qu’il existe un principe de consentement : non aux appels qui ne sont pas consentis, dans tous les domaines, pour tous les secteurs ! Ce qui est légitime peut continuer, si le consentement a été donné.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. On peut se poser la question des sondages, par exemple.

Mme Delphine Batho (EcoS). Je parlais de prospection commerciale.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. La limite est parfois difficile à établir.

 

 

Article 1er : Suppression du régime d’opt-out et alignement du régime du démarchage téléphonique sur celui des courriels et SMS

 

Amendement CE32 de Mme Géraldine Grangier

Mme Géraldine Grangier (RN). Cet amendement renforce la sécurité juridique du texte sans nuire aux pratiques commerciales légitimes. S’il est indispensable d’encadrer plus strictement les appels à froid, effectués sans consentement ni identification claire et souvent à partir de bases de données revendues, il nous paraît important de distinguer les tiers professionnels des particuliers. En effet, le parrainage par un particulier repose sur une logique bien différente : un client recommande une connaissance à une entreprise, avec son accord. Ce modèle est déjà encadré par la CNIL, qui impose des règles strictes : le parrainé doit être informé dès le premier contact de l’identité du parrain ; ses coordonnées ne peuvent être utilisées qu’une seule fois et ne peuvent pas être conservées.

Nous proposons donc de limiter la contrainte aux intermédiaires professionnels, préservant l’équilibre entre la protection du consommateur et la sauvegarde d’un modèle légitime de recommandation.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je comprends votre argument, mais l’explication que vous venez de donner est bien plus précise que ce que prévoit effectivement le dispositif. Je vous conseille donc de réécrire cet amendement qui, ainsi rédigé, ouvrirait une faille très large dans laquelle des démarcheurs s’engouffreraient. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho (EcoS). Si nous adoptons cet amendement, autant ne pas adopter la proposition de loi ! Les démarcheurs prétendraient simplement appeler à titre personnel. Toutes les brèches seront utilisées pour contourner le dispositif.

Par ailleurs, le parrainage est bien un appel commercial qui, comme tel, ne doit pas échapper à la règle du consentement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE1 de Mme Nathalie Oziol et sous-amendement CE50 de Mme Delphine Batho, amendements CE2 de M. Christophe Bex et CE19 de Mme Delphine Batho (discussion commune)

M. Laurent Alexandre (LFI-NFP). Le démarchage téléphonique nuit à la tranquillité de tous nos concitoyens : 97 % d’entre eux se déclarent très agacés par cette pratique. Le dispositif Bloctel est un échec. Il est donc nécessaire d’intervenir efficacement.

L’article 1er n’est pas suffisant : la notion de consentement qu’il contient est trop ambiguë. Nous proposons d’en adopter une qui soit conforme à ce que prévoit le RGPD : le consentement doit être univoque, révocable et préalable.

Écrivons une loi simple et claire. Avec cette formulation, aucun consommateur ne pourra plus être démarché par téléphone sans y avoir consenti. Cette disposition est très attendue.

Mme Delphine Batho (EcoS). L’amendement CE19 propose de calquer strictement la définition du consentement sur celle du RGPD. La rédaction est différente de celle de l’amendement CE1, mais l’objectif est le même.

Le sous-amendement CE50 complète l’amendement CE1, dont l’adoption ferait tomber notre amendement CE19. Nous proposons de préciser que les données recueillies quant au consentement soient en permanence accessibles à la DGCCRF, afin que celle-ci puisse faire facilement son travail.

M. Christophe Bex (LFI-NFP). L’amendement CE2 est un amendement de repli. Il vise également à garantir que le consentement au démarchage téléphonique soit défini de manière claire, opérationnelle et réellement protectrice des consommatrices et des consommateurs. Sans cela, le dispositif d’opt-in risque d’être inapplicable. Nous nous appuyons sur le RGPD : le consentement doit être libre, spécifique, éclairé et univoque. Il doit résulter d’un acte positif clair, être révocable à tout moment et ne jamais être simplement présumé par les entreprises. En oubliant ces éléments, cette proposition de loi laisse une marge d’interprétation excessive et aboutirait à une nouvelle impasse.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis défavorable au sous-amendement présenté par Mme Batho : je défendrai un amendement similaire, mais à l’article 8.

Il me paraît important d’adopter la définition du consentement présente dans le RGPD, ma préférence allant à la rédaction de l’amendement CE2 qui aligne explicitement notre texte sur le droit européen, offrant une protection supplémentaire au consommateur.

Par ailleurs, l’amendement CE1 supprime la dernière partie de l’alinéa 9, qui précise que ladite exception s’applique aussi aux « produits ou des services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat », ce qui n’est pas souhaitable.

Si vous en êtes d’accord, je demande donc le retrait du sous-amendement CE50 et des amendements CE1 et CE19. J’émets un avis favorable à l’amendement CE2.

Le sous-amendement CE50 et l’amendement CE19 sont retirés.

L’amendement CE1 est rejeté.

L’amendement CE2 est adopté.

En conséquence, l’amendement CE20 de Mme Delphine Batho tombe.

 

Amendements identiques CE49 de M. Pascal Lecamp et CE42 de Mme Louise Morel

M. Romain Daubié (Dem). Il s’agit de préciser le régime de preuve.

Mme Delphine Batho (EcoS). Il me semble que ces amendements sont inutiles, puisque nous avons adopté l’amendement CE2, qui renvoie à l’article 7 du RGPD : il est donc déjà prévu que c’est le professionnel qui doit apporter la preuve que le consentement a été donné. Mais il n’est pas grave que la loi se répète.

En revanche, nous rencontrons un problème concret : pour lutter contre la fraude et le contournement de cette loi, il faut faciliter le travail de la DGCCRF. Le texte initial de M. Verzelen prévoyait une sorte d’inverse de Bloctel : une liste nationale du consentement, qui rendait facile la vérification de la réalité du consentement. C’était le sens de l’amendement CE20, qui donnait à la DGCCRF le droit d’accéder en permanence aux données de consentement.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. L’inversion de la charge de la preuve est une sécurité juridique pour la DGCCRF, ses représentants nous l’ont dit. Je ne pense pas que ces amendements soient inutiles.

La commission adopte les amendements.

 

Amendements identiques CE12 de M. Jean-Pierre Vigier, CE28 de Mme Graziella Melchior et CE35 de Mme Mélanie Thomin, amendement CE3 de Mme Nathalie Oziol (discussion commune)

M. Jean-Pierre Vigier (DR). Cet amendement a été travaillé avec les entreprises spécialisées dans la vente de produits alimentaires, notamment Argel, que tout le monde connaît et qui acquiert 95 % de ses nouveaux clients par téléphone.

L’interdiction pure et simple de la prospection téléphonique sans consentement préalable condamnerait ces entreprises et ferait disparaître de nombreux emplois dans des territoires ruraux où les possibilités de reconversion sont très limitées. Ces entreprises s’adressent principalement à des seniors en zone rurale, touchés par la fracture numérique ; leur service est d’utilité sociale là où les commerces et les services publics disparaissent. Elles respectent scrupuleusement les règles françaises et européennes ; il ne faut pas les assimiler à ces opérateurs frauduleux qui harcèlent nos concitoyens à longueur de journée. Elles ne vendent que des produits alimentaires, donc des biens de première nécessité.

Cet amendement propose donc de créer une exception alimentaire pour préserver ces entreprises tout en luttant contre les fraudes et les abus.

Mme Graziella Melchior (EPR). Nous partageons tous l’objectif de lutter contre le démarchage téléphonique. Mais le dispositif proposé aura un impact très négatif sur des entreprises qui offrent des services essentiels, en particulier dans les territoires ruraux. Je pense, par exemple, à l’entreprise de livraison alimentaire à domicile Argel, qui compte 270 000 clients, dont 80 % vivent en zone rurale, notamment des seniors qui ne peuvent pas se déplacer et sont touchés par la fracture numérique. Pour rendre ce service, 300 conseillers experts, répartis dans tout le territoire français et formés aux conseils culinaires individualisés, interviennent par téléphone.

Je vous propose donc d’exclure du périmètre de la loi les entreprises de services de livraison alimentaire, qui ont joué un rôle essentiel durant la crise sanitaire : sachons leur rendre un peu de ce qu’elles donnent à nos seniors et aux personnes vulnérables.

Mme Mélanie Thomin (SOC). L’amendement CE35, qui a été élaboré avec le groupe coopératif Even ainsi qu’avec les représentants des salariés de la CFDT Agri-Agro du territoire finistérien, a pour objet d’inclure les entreprises de livraison alimentaire à domicile parmi les exceptions au principe du consentement préalable.

Argel, qui est un acteur majeur de ce secteur, exerce principalement son activité auprès de clients vivant en zone rurale. Pour cette clientèle majoritairement âgée, qui se déplace difficilement et maîtrise mal l’outil numérique, ce service offre un accès de proximité aux courses alimentaires. En outre, la remise en cause du modèle économique de cette entreprise menacerait 800 emplois directs dans nos territoires, dont ceux de 300 téléopérateurs et de 300 livreurs.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). UFC-Que choisir qualifie le démarchage téléphonique de « harcèlement marketing ». La loi actuelle part du principe que, par défaut, les consommateurs et consommatrices souhaitent être harcelés par téléphone. Force est de constater que le dispositif Bloctel, qui leur permet de le refuser, n’est pas efficace. Les exceptions prévues à l’article 1er rendraient le régime de l’opt-in tout aussi inefficient. L’amendement de repli CE3 vise donc à limiter ces exceptions.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. L’amendement CE3 tend à supprimer la fin de l’alinéa 9, où il est précisé que l’interdiction du démarchage téléphonique n’est pas applicable lorsqu’il s’agit « de proposer au consommateur des produits ou des services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat en cours ou de nature à améliorer ses performances ou sa qualité ». Or cette mention me paraît nécessaire en ce qu’elle permet de démarcher un consommateur pour lui proposer une offre moins chère ou des solutions plus avantageuses. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Quant aux trois amendements identiques, qui tendent à instaurer une exception pour les entreprises proposant la livraison de produits alimentaires, en particulier en zone rurale, ils me paraissent essentiels dès lors qu’une large partie de la population concernée souffre de la fracture numérique. J’ajoute que ce secteur bénéficie des mêmes dérogations que la presse. Toutefois, par souci de cohérence, je demanderai à leurs auteurs de bien vouloir retirer ces amendements au profit de leurs amendements CE13, CE29 et CE33, qui ont un objet similaire et que nous examinerons après l’article 1er.

M. Jean-Pierre Vigier (DR). Quel est l’intérêt d’introduire cette mention après l’article 1er plutôt qu’à l’article 1er ?

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Le dispositif sera plus lisible.

Les amendements CE12, CE28 et CE35 sont retirés.

M. Thierry Benoit (HOR). Ces amendements soulèvent la question du statut des vendeurs à domicile, notamment de vêtements, dont le démarchage n’a rien à voir avec les escroqueries qui ont cours dans le secteur de l’isolation énergétique, par exemple.

Mme Delphine Batho (EcoS). À chaque fois que l’on crée une exception, même pour de bonnes raisons, on ouvre une brèche dans laquelle s’engouffreront immédiatement les responsables du harcèlement téléphonique actuel. Par ailleurs, une entreprise comme Argel possède un fichier clients de 270 000 personnes. Il lui sera donc très facile de poursuivre ses activités – à laquelle l’élue rurale que je suis ne veut certainement pas mettre fin – soit parce que le démarchage s’effectuera dans le cadre d’un contrat en cours, soit parce que ses clients y auront consenti.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Pour que l’interdiction du démarchage téléphonique soit efficace, nous devons être ambitieux. Si l’on prévoit des exceptions, on risque de rendre la proposition de loi aussi inefficace que la législation actuelle. Il s’agit ici de contraindre et d’interdire. C’est pourquoi j’insiste sur la pertinence de notre amendement CE3.

Mme Louise Morel (Dem). Nous devons être courageux. Depuis plusieurs semaines, M. le rapporteur et moi sommes appelés par une multitude d’acteurs qui nous réclament des dérogations, qui pour l’exception culturelle française, qui pour le monde rural, qui pour la vente de surgelés à domicile… Soit nous prévoyons des exceptions, dont la liste fera l’objet d’un décret, et nous ouvrirons une véritable brèche, car chaque secteur ira négocier avec le Gouvernement ; soit nous affirmons avec fermeté le principe du consentement préalable des consommateurs, consentement qui, je le rappelle, ne devra être recueilli que pour les nouveaux clients. Au demeurant, tous nos concitoyens ne souhaitent pas forcément être appelés, sans avoir donné préalablement leur consentement, pour qu’on leur vende des produits surgelés. Je m’oppose donc aux amendements CE12, CE28 et CE35.

M. Antoine Armand (EPR). Les nombreuses évolutions législatives ou réglementaires passées ont démontré que chaque exception – qu’il s’agisse de l’appel personnel ou de l’exécution du contrat en cours, par exemple – ouvre une brèche, même implicite, dans laquelle les démarcheurs s’engouffrent.

On invoque la sauvegarde de l’emploi et la spécificité des territoires ruraux. Mais l’exception que nous allons examiner après l’article 1er a trait aux denrées alimentaires, et non à la ruralité. Le décret d’application ferait référence à une région administrative, de sorte qu’un habitant du centre de Lyon pourrait être appelé par un livreur de surgelés d’Ambérieu-en-Bugey. En multipliant les exceptions – qui, en outre, seront précisées par décret et échapperont, de ce fait, au contrôle du Parlement –, nous commettrions une erreur, même si l’enjeu de l’emploi mérite d’être mentionné. Il y va de l’efficacité de la loi. Nous ne pouvons pas adopter une nouvelle loi sur le démarchage téléphonique tous les deux ans : nous devons poser un principe et nous y tenir.

M. Didier Le Gac (EPR). Il est vrai, madame Batho, que chaque entreprise possède un fichier de ses clients. Mais Argel, par exemple, doit, pour maintenir son activité, renouveler celui-ci à hauteur de 15 % chaque année, car sa clientèle est composée de personnes âgées qui, pour certaines, décèdent ou partent en maison de retraite. Par ailleurs, si nos concitoyens sont excédés par les appels qu’ils reçoivent de plateformes situées à l’étranger, ils ont une perception complètement différente de ceux qui proviennent de leur région ou de leur département.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je vous remercie pour ce débat très enrichissant. Moi-même, je m’interroge. Mes petits voisins de 94 et 95 ans, que je passe voir chaque matin, utilisent ce système de livraison à domicile. Or, ils n’ont aucun moyen de déclarer leur consentement. Je voudrais donc être assuré qu’ils pourront toujours être démarchés une fois que leur contrat aura expiré. Pour le reste, je suis d’accord avec Mme Morel, M. Armand et Mme Batho : si nous faisons une loi, autant qu’elle s’applique uniformément à tous et qu’on en finisse avec les exceptions.

Je me suis engagé à approuver les amendements CE13, CE29 et CE33. Je comprends également l’argument de M. Benoit. J’entends les uns et les autres ; je souhaiterais que leurs positions puissent être conciliées simplement dans la loi. Manifestement, ce n’est pas possible. Peut-être devons-nous faire en sorte, pour préserver la portée du texte, que le filtrage soit le plus strict possible.

La commission rejette l’amendement CE3.

 

Amendement CE21 de Mme Delphine Batho

Mme Delphine Batho (EcoS). Cet amendement, issu d’une proposition de l’UFC-Que choisir, tend à resserrer les mailles du filet en précisant que la sollicitation autorisée dans le cadre d’un contrat en cours doit avoir un rapport direct avec l’objet dudit contrat.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis également favorable à une restriction de l’exception client. La démarche ne doit, en effet, être autorisée que si elle présente un rapport direct avec l’objet d’un contrat en cours d’exécution.

Toutefois, l’adoption de votre amendement aurait pour conséquence de supprimer la fin de l’alinéa 9, où il est précisé que cette exception s’applique aux produits ou aux services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat. Or, cette mention me paraît nécessaire, car elle permet au consommateur d’être démarché pour se voir proposer une offre moins chère ou plus avantageuse. Je suis donc défavorable à cet amendement, auquel je préfère mon amendement CE47, qui tend uniquement à préciser que le rapport avec le contrat doit être direct.

Mme Delphine Batho (EcoS). Je remercie le rapporteur d’avoir déposé l’amendement CE47, pour lequel nous voterons si le nôtre n’est pas adopté.

La commission rejette l’amendement.

 

La commission adopte l’amendement CE47 de M. Pascal Lecamp, rapporteur.

 

Amendement CE23 de Mme Valérie Rossi

Mme Valérie Rossi (SOC). Il s’agit de supprimer la précision relative aux sollicitations ayant un rapport avec le contrat en cours, celles-ci ayant plutôt pour effet d’étendre le champ de l’exception. En effet, une part substantielle du démarchage porte sur ces offres connexes ou de remplacement, de sorte que leur autorisation limiterait la portée du texte.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Défavorable, pour les raisons exposées précédemment.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE22 de Mme Valérie Rossi

Mme Valérie Rossi (SOC). Je le retire au profit de l’amendement CE33 de Mme Thomin.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE10 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). L’intention des auteurs du texte est louable : le démarchage téléphonique pourrit la vie de l’ensemble de nos concitoyens. Toutefois, on ne peut pas assimiler le commerçant local qui informe un ancien client d’une promotion aux grandes centrales de démarchage téléphonique situées à l’étranger. Je propose donc que l’interdiction du démarchage ne s’applique pas aux commerçants-distributeurs installés dans un rayon de 10 kilomètres autour du lieu de résidence du consommateur. Il s’agit de défendre David contre Goliath, le petit commerçant local contre les grandes structures hors sol.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Il paraît légitime de protéger les artisans locaux, mais l’amendement ouvrirait une brèche dans laquelle pourraient s’engouffrer les démarcheurs. Ainsi, un commerçant-distributeur implanté au cœur de Paris pourrait démarcher l’ensemble des habitants de la capitale. La mesure serait inopérante et contraire à l’objectif que vous poursuivez. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho (EcoS). Les amendements du Rassemblement national tendent, de fait, à vider le texte de sa substance. En l’espèce, on permettrait à Amazon ou à n’importe quelle autre grande enseigne de démarcher les consommateurs vivant dans un rayon de 10 kilomètres autour de leurs entrepôts. Le démarchage téléphonique ne serait absolument pas interdit : ce serait open bar !

M. Pierre Meurin (RN). Inutile d’en faire des tonnes à propos de cet amendement, qui pourrait être considéré comme un amendement d’appel. Peut-être est-il mal rédigé, mais j’ai le sentiment, monsieur le rapporteur, que vous êtes d’accord sur le principe, à savoir la protection des commerces de proximité. On pourrait donc y retravailler en vue de la séance publique, en limitant éventuellement la taille de l’entreprise – et peu importe que l’amendement soit signé ou non par notre groupe.

M. Thierry Benoit (HOR). Une entreprise peut très bien obtenir auprès d’un client les coordonnées d’un potentiel nouveau client dont elle aurait préalablement vérifié le consentement. C’est ainsi que procédaient, il y a trente ou quarante ans, les entreprises de vente à domicile qui employaient des personnes ayant le statut de voyageur, représentant et placier (VRP) ou de vendeur à domicile.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Nous devons rester concentrés sur l’objet du texte : l’interdiction du démarchage téléphonique abusif. Nous avons tous envie de protéger nos artisans locaux, mais je ne vois pas comment le dispositif proposé pourrait être opérant.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE15 de Mme Delphine Batho

Mme Delphine Batho (EcoS). La proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques, dont M. Cazenave était le rapporteur et qui est en cours de navette, vise notamment à étendre le régime d’interdiction stricte du démarchage téléphonique aux offres de prestations de service et aux travaux d’adaptation au vieillissement et au handicap. Nous proposons de reprendre cette disposition de manière à regrouper les différentes modifications apportées à l’article L. 223-1 du code de la consommation en vue de restreindre le démarchage téléphonique.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement, qui créerait une nouvelle interdiction absolue de démarchage. En effet, dès lors que nous instaurons un régime reposant sur le consentement des consommateurs, il me paraît inutile de créer des interdictions sectorielles.

M. Thomas Cazenave (EPR). La question qui se pose est celle de savoir si l’on maintient, en sus du régime d’opt-in, l’interdiction stricte du démarchage téléphonique s’agissant des dispositifs aidés : compte personnel de formation (CPF), MaPrimeRénov’… J’y suis, pour ma part, favorable, mais il faut que, d’ici à la séance publique, nous nous assurions de sa compatibilité avec la jurisprudence récente.

Mme Louise Morel (Dem). Si nous adoptons le régime du consentement préalable, je ne vois pas en quoi il serait nécessaire de maintenir une interdiction stricte dans certains secteurs. Par ailleurs, une jurisprudence administrative récente soulève la question de la concurrence déloyale. De fait, ce n’est pas parce que des abus ont été commis dans le secteur des travaux de rénovation énergétique que toutes les entreprises de ce secteur pratiquent un démarchage abusif.

Mme Delphine Batho (EcoS). En fait, il s’agit, dans cette proposition de loi, de compléter par un régime d’opt-in le régime d’interdiction stricte que nous avons adopté pour le démarchage concernant les dispositifs aidés, et sur lequel nous ne saurions revenir. D’autant que des procédures de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sont en cours.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis sensible à l’argument selon lequel certains acteurs pratiquent le démarchage pour obtenir ou détourner de l’argent public, ce qu’il nous appartient, en tant que législateur, de prévenir. Sagesse.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE34 de Mme Géraldine Grangier

Mme Géraldine Grangier (RN). Il vise à rétablir une distinction essentielle entre appels non sollicités, qui doivent être strictement encadrés, et appels sollicités, qui répondent à une démarche volontaire du consommateur. L’alinéa 12, tel qu’il est rédigé, impose des restrictions uniformes à tous les appels commerciaux sans tenir compte de leur nature.

Or, une telle généralisation risque d’avoir des effets contre-productifs. En supprimant l’alinéa 12, nous rétablissons une approche équilibrée. Les restrictions strictes s’appliqueront uniquement aux appels non sollicités, ce qui garantira une protection efficace des consommateurs contre les abus, tout en préservant la liberté de chacun d’interagir avec les entreprises de son choix.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Cet amendement vise à la précision rédactionnelle de l’article L. 223-1 du code de la consommation. Nous avons travaillé avec plusieurs acteurs à une rédaction plus fine, prévue à l’amendement CE48, qui résout le problème que vous soulevez. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement CE48 de M. Pascal Lecamp, rapporteur.

 

Amendement CE17 de Mme Delphine Batho

Mme Delphine Batho (EcoS). S’agissant des appels passés dans le cadre d’un contrat en cours, donc consentis, nous souhaitons resserrer la maille horaire. Nous avons été profondément choqués par le décret du 13 octobre 2022 relatif à l’encadrement des jours, horaires et fréquence des appels téléphoniques à des fins de prospection commerciale non-sollicitée, qui autorisait les appels téléphoniques jusqu’à vingt heures. Notre position est maximaliste à l’opposé.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Avis défavorable. Nous basculons dans le régime de l’opt-in, qui réduit drastiquement le démarchage téléphonique – je défendrai même un amendement permettant à un consommateur d’être rappelé un dimanche à l’heure de son choix. Dans ces conditions, il est inutile de restreindre davantage la possibilité pour les démarcheurs de pratiquer leur activité.

Mme Delphine Batho (EcoS). Les appels que je vise sont ceux reçus dans le cadre d’un contrat en cours ou d’un démarchage consenti. Les horaires prévus par le décret précité sont très larges ; c’est contourner la volonté du législateur. Nous devons guider davantage la rédaction du décret.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. La loi du 24 juillet 2020 prévoit des mesures en matière d’encadrement des horaires.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE24 de Mme Valérie Rossi et CE16 de Mme Delphine Batho (discussion commune)

Mme Valérie Rossi (SOC). Il s’agit d’avancer du 11 août 2026 au 1er janvier 2026 la date d’entrée en vigueur de l’article 1er. Techniquement, rien n’y fait obstacle.

Mme Delphine Batho (EcoS). L’adoption de l’amendement CE16 permettrait d’être efficace dès l’été prochain.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je partage la volonté d’avancer l’entrée en vigueur de l’article 1er. J’émets un avis favorable à l’amendement CE24, qui offre un bon compromis entre l’amendement CE16, dont je suggère le retrait, et la date d’expiration de la concession Bloctel, sur laquelle nous ne devrions pas trop anticiper puisque la concession a été financée par de l’argent public.

L’amendement CE16 est retiré.

La commission adopte l’amendement CE24.

 

Elle adopte l’article 1er modifié.

 

 

Après l’article 1er

 

Amendement CE11 de M. Didier Le Gac, amendements identiques CE13 de M. Jean-Pierre Vigier, CE29 de Mme Graziella Melchior et CE33 de Mme Mélanie Thomin (discussion commune)

M. Didier Le Gac (EPR). Il s’agit d’introduire une nouvelle exception à l’interdiction de prospection commerciale téléphonique si celle-ci est réalisée dans la région ou le département – un décret en déciderait – où vivent les personnes visées. Ce qui exaspère nos concitoyens, ce sont les appels provenant de plateformes externalisées, souvent basées à l’étranger.

Plusieurs députés bretons se sont exprimés ; tous connaissent une entreprise de la région dont la prospection commerciale est prise en charge par des salariés qui en ont la culture et en connaissent les produits, et n’a rien à voir avec le démarchage téléphonique sauvage de personnes peu scrupuleuses appelant de l’étranger et ignorant tout des produits qu’elles vantent. Certains de ces salariés, inquiets, nous ont contactés. Ils aiment leur métier – souvent dénigré – et y ont été formés.

M. Jean-Pierre Vigier (DR). Nous en avons déjà parlé : l’amendement CE13 vise à introduire une exception au profit des denrées alimentaires. Les personnes qui les proposent ne se livrent à aucun abus, mais fournissent un véritable service à l’échelle d’un territoire, en particulier dans les territoires ruraux. Les personnes qui ne peuvent pas se déplacer, notamment les personnes âgées, sont demandeuses.

Ce service est assimilable à une action d’aménagement du territoire ou à un service social. Il n’y en a pas d’autre ; il assure des emplois dans des territoires fragiles qui en ont bien besoin. Je ne vois que des avantages à maintenir ce service de qualité et de proximité.

Mme Graziella Melchior (EPR). Dans les territoires ruraux, les personnes qui ne peuvent pas se déplacer sont demandeuses de livraisons alimentaires. Les entreprises qui œuvrent dans ce domaine offrent un service de proximité et de qualité. Elles servent le bien public. Il faut les soutenir.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous partageons tous l’exaspération des Français. Il importe d’assurer l’effectivité de la loi. Les opérateurs offshore que nous dénonçons sont délocalisés et pratiquent un démarchage au caractère abusif avéré. Faire bénéficier la livraison alimentaire à domicile d’une exception, c’est aussi assurer le respect des modes de vie et des pratiques locaux.

Aux dires des entreprises comme Argel, il est impossible de changer de modèle à court terme. Si la loi est adoptée telle quelle, sans contrepartie immédiate pour les entreprises locales, elles auront du mal à s’adapter. Or, elles offrent un véritable service à la clientèle âgée des zones rurales.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suggère le retrait de l’amendement CE11 au profit des amendements identiques CE13, CE29 et CE33, auxquels je me suis engagé à donner un avis favorable.

Mme Delphine Batho (EcoS). Coca-Cola, Friskies et autres marques de l’agroalimentaire auront donc le droit d’appeler partout en France.

Il existe pourtant des solutions juridiques pour que les entreprises dont il n’est pas question de menacer l’activité soient dans les clous. Ainsi, depuis l’entrée en vigueur du RGPD, nous devons donner notre consentement au stockage de certaines données. Cela n’a rien d’insurmontable. Les entreprises que nous défendons ne couleront pas, leurs emplois ne seront pas supprimés.

Tels qu’ils sont rédigés, les amendements ouvrent la porte à des pratiques diamétralement opposées à celles que défendent leurs auteurs.

Mme Louise Morel (Dem). Dans les zones de montagne telles que celle où je suis élue, les services de proximité sont généralement connus de la population. Ils sont à quelques kilomètres, dans la ville centre. Les personnes âgées y font leurs courses, ce qui offre l’occasion de recueillir leur consentement.

Nous ne pouvons pas, sous prétexte de les protéger, autoriser à appeler tout client potentiel. Vivre en milieu rural et être attaché au commerce de proximité n’implique pas que l’on accepte d’être démarché sans son consentement pour son fleuriste, son garagiste ou son boulanger. Voter ces amendements serait une erreur.

M. Thierry Benoit (HOR). L’entreprise Les Magasins bleus, près de Rennes, vend des vêtements à domicile. Cette entreprise sérieuse a pignon sur rue ; ses vendeurs connaissent leurs produits comme les vendeurs de surgelés à domicile les leurs.

Monsieur le rapporteur, comment voter un amendement permettant de vendre par téléphone des produits alimentaires et des croquettes pour animaux de compagnie, mais pas des vêtements, au détriment d’entreprises de nos territoires aux caractéristiques rigoureusement identiques à celles des entreprises visées ici ? Nous devons parvenir, d’ici l’examen du texte en séance publique, à une rédaction satisfaisante centrée sur la question fondamentale, celle du consentement.

M. Vincent Rolland (DR). Nous soutenons les amendements identiques CE13, CE29 et CE33. Tous les démarchages ne sont pas de même nature. La précision apportée est frappée au coin du bon sens. Si la rédaction des amendements peut être améliorée d’ici l’examen du texte en séance publique, nous y sommes favorables sur le fond.

M. Julien Dive (DR). Vous êtes tous, chers collègues, des consommateurs potentiels en plus d’être des citoyens. Vous avez donc tous une expérience certaine en matière de démarchage téléphonique pour avoir été enquiquinés par cette pratique, comme la plupart de nos concitoyens.

Parmi les appels que vous avez reçus, quelle est la proportion de ceux visant à vous vendre du Coca-Cola ou des Friskies ? Lorsque l’on est démarché, c’est toujours pour des formations, des forfaits de téléphonie mobile ou des contrats énergétiques, et jamais pour autre chose. J’ignore si les auditions menées par M. le rapporteur permettent de procéder à une évaluation statistique de ce que j’avance, mais je tiens à ce que la loi régule sans excès d’esprit liberticide.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Nous pourrions travailler à un sous-amendement permettant de mieux encadrer et cibler les entreprises de proximité.

La commission rejette l’amendement CE11.

Elle adopte les amendements identiques CE13, CE29 et CE33.

 

Amendement CE31 de M. Pierre Meurin

Mme Géraldine Grangier (RN). Il vise à obtenir un rapport concernant la possibilité d’ouvrir une plateforme unique de dénonciation citoyenne des personnes continuant à réaliser des démarchages téléphoniques en dépit de leur interdiction.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Si l’objectif de renforcer l’effectivité de l’interdiction du démarchage téléphonique est tout à fait louable, l’ouverture d’une plateforme de dénonciation citoyenne soulève plusieurs réserves. Son efficacité est incertaine. Un tel outil pourrait poser problème en matière de prospection des données personnelles et comporte un risque d’abus, même placé sous l’égide d’une autorité administrative indépendante.

Par ailleurs, l’opportunité d’un tel mécanisme doit être appréciée à l’aune des moyens nécessaires pour assurer son bon fonctionnement. Je préfère que nous nous contentions, dans un premier temps, d’évaluer l’efficacité du dispositif que nous proposons. Enfin, dès lors que nous ambitionnons de mettre un terme au démarchage téléphonique abusif, l’intérêt d’une plateforme de dénonciation disparaît. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Article 2 : Interdiction de la subordination d’un acte de vente à l’acceptation du démarchage téléphonique

 

Mme Delphine Batho (EcoS). L’article 2 est issu de l’adoption à l’unanimité, par le Sénat, d’un amendement du groupe Écologiste-Solidarité et Territoires. Il vise à proscrire les clauses abusives consistant à obtenir le consentement au démarchage téléphonique par des voies détournées, par exemple en en faisant dépendre certains services.

 

La commission adopte l’article 2 non modifié.

 

 

Article 3 : Renforcement des sanctions en cas d’abus de faiblesse lié au démarchage

 

Amendement CE5 de Mme Nathalie Oziol

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Il vise à supprimer l’article 3, qui prévoit une surenchère pénale qui nous semble inutile et inefficace, au détriment du renforcement des moyens de contrôle des principales autorités de lutte contre le démarchage téléphonique abusif. Les sanctions en cas d’abus de faiblesse nous semblent suffisantes.

Il serait préférable de s’atteler à doter l’interdiction prévue par la proposition de loi d’une réelle force exécutoire, grâce à une définition du consentement ambitieuse, à une extension du texte à toute forme de démarchage et à un encadrement strict des heures et des jours auxquels le démarchage téléphonique consenti peut avoir lieu.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. La suppression de cet article priverait la lutte contre le démarchage abusif d’un levier supplémentaire, celui des sanctions, alors même que les sanctions administratives existantes sont insuffisamment dissuasives. Au demeurant, renforcer les moyens de contrôle n’exclut en rien l’alourdissement des sanctions pour endiguer les pratiques frauduleuses. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 3 non modifié.

 

 

Article 4 : Encadrement des horaires et des fréquences du démarchage

 

 

Amendements identiques CE18 de Mme Delphine Batho, CE25 de Mme Valérie Rossi et CE41 de Mme Louise Morel, amendement CE6 de M. Christophe Bex (discussion commune)

Mme Delphine Batho (EcoS). Je retire l’amendement CE18, l’amendement CE17 n’ayant pas été adopté.

Mme Valérie Rossi (SOC). L’amendement CE25 vise à supprimer les précisions apportées aux alinéas 3 à 5 sur la fréquence des appels téléphoniques et des amplitudes horaires, qui, à nos yeux, relèvent du domaine réglementaire. Il conviendrait que le Gouvernement durcisse le cadre réglementaire en vigueur, par cohérence avec la volonté exprimée par les sénateurs, que nous partageons dans son principe. Sur le fond, si la situation actuelle est clairement insatisfaisante, la modification proposée semble quelque peu excessive, plus encore dans le cadre d’un basculement vers un système d’opt-in.

Mme Louise Morel (Dem). L’amendement CE41 vise à supprimer les alinéas 3 à 5. La nécessité d’encadrer plus strictement les horaires du démarchage téléphonique m’échappe, dès lors que cette forme de sollicitation commerciale est licite.

L’article 1er de la proposition de loi dispose qu’« on entend par consentement toute manifestation de volonté libre, spécifique et informée par laquelle une personne accepte que des données à caractère personnel la concernant soient utilisées à des fins de prospection commerciale par voie téléphonique ». Cette définition offre un cadre satisfaisant.

M. Christophe Bex (LFI-NFP). L’amendement CE6 vise à encadrer strictement les horaires et la fréquence du démarchage téléphonique, même s’il a été consenti. La fixation des règles par décret ne constitue pas une garantie suffisante pour protéger les consommateurs et consommatrices.

Nous proposons d’inscrire dans la loi l’interdiction du démarchage les week-ends et jours fériés, ainsi que la réduction des plages horaires autorisées, qui s’étendraient désormais de dix heures à treize heures et de quatorze heures à dix-sept heures au lieu de vingt heures. Par ailleurs, nous limitons la fréquence des appels à deux maximum sur une période de quatre-vingt-dix jours, contre soixante actuellement.

Ces mesures garantissent un vrai droit à la tranquillité et à la déconnexion pour les consommateurs et pour les salariés. Le démarchage téléphonique reste une intrusion dans la sphère privée et une pression commerciale constante, qui ne sert ni les consommateurs et les consommatrices, ni la transition écologique.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Les amendements CE25 et CE41 permettent de revenir sur la restriction accrue des fréquences et horaires d’appel. Cette solution est cohérente avec le dispositif de l’article 1er, qui fait passer le régime du démarchage téléphonique en opt-in. Dans ces conditions, il n’y a pas de raison d’être plus sévère que le régime actuel, puisque le démarcheur ne contactera le consommateur qu’après avoir recueilli son consentement. J’émets un avis favorable à ces amendements.

Avis défavorable à l’amendement CE6. La réduction drastique du démarchage téléphonique due à l’introduction d’un régime d’opt-in rend inutile toute restriction supplémentaire de cette activité.

L’amendement CE18 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques CE25 et CE41.

En conséquence, les amendements CE6 et CE7 tombent.

 

La commission adopte l’article 4 modifié.

 

 

Article 5 : Instauration d’un délai avant l’acceptation d’une offre issue du démarchage

 

Amendement CE45 de Mme Louise Morel

Mme Louise Morel (Dem). Il vise à supprimer l’article 5, introduit par le Sénat, fixant un délai minimal de vingt-quatre heures avant que le consommateur ne signe l’offre que lui a adressée le professionnel, sur papier ou tout autre support durable, pour s’engager à la suite d’un démarchage téléphonique. Légistiquement, cet article est fragile. Il contrevient à une disposition d’une directive européenne protégeant les consommateurs en la matière. La coexistence de deux dispositions distinctes en la matière n’est pas souhaitable.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Avis favorable. Les États membres ne peuvent adopter ou maintenir des dispositions nationales divergentes de la directive 2011/83/UE dans le domaine qu’elle coordonne dès lors qu’elle ne le prévoit pas expressément.

Mme Delphine Batho (EcoS). Je suis favorable au maintien de l’article 5. André Chassaigne a rappelé la question des abus de faiblesse. Nous avons renforcé les sanctions qu’ils entraînent, mais nous n’avons pas résolu le problème des conditions dans lesquelles sont souscrits les contrats ; nous devons être plus protecteurs. Par ailleurs, une directive n’est pas un règlement.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Fidèle au tropisme européen de mon groupe, je suis sceptique vis-à-vis de tout écart par rapport aux textes européens et demeure favorable à la suppression de l’article 5.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CE26 de Mme Valérie Rossi tombe et l’article 5 est supprimé.

 

 

Article 6 : Mise en place d’un filtre antispams SMS

 

La commission adopte l’article 6 non modifié.

 

 

Article 7 : Alignement du régime de publication des numéros fixes et mobiles dans les annuaires publics

 

La commission adopte l’article 7 non modifié.

 

 

Article 8 : Facilitation du partage d’informations entre les autorités de contrôle pour lutter contre le démarchage téléphonique abusif

Amendements identiques CE46 de M. Pascal Lecamp et CE43 de Mme Louise Morel

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Le I. de l’article 8 de la proposition de loi autorise les agents de la DGCCRF, de l’Arcep et de la CNIL à échanger toute information et tout document obtenus dans le cadre de leurs missions respectives et nécessaires à la recherche et à la constatation des infractions et manquements aux dispositions du code de la consommation.

Les responsables de la DGCCRF que nous avons auditionnés ont souhaité que la communication des informations entre ces trois entités à des fins d’efficacité de l’action de régulation publique soit améliorée. Tel est l’objet de l’article 8.

Mme Delphine Batho (EcoS). Favorable à l’amendement, je le suis aussi à l’exploration de ses aspects opérationnels d’ici l’examen du texte en séance publique. Il ne faut pas que la possibilité offerte à la DGCCRF exige d’elle un travail fastidieux. Si un appel non consenti est porté à son attention, il faut qu’elle puisse procéder aux vérifications qui s’imposent de façon simple et rapide, sans que l’efficacité de la lutte contre le démarchage illégal en pâtisse.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis d’accord. Il faudra revenir vers la DGCCRF pour savoir ce qu’il en est.

La commission adopte les amendements.

 

Amendement CE8 de Mme Nathalie Oziol

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Aucune mesure d’encadrement ou d’interdiction ne saurait être efficace sans moyens dédiés aux autorités de contrôle. La CNIL est confrontée à d’importantes difficultés dans la conduite de ses investigations parce que certains opérateurs téléphoniques invoquent le secret professionnel pour s’opposer à la communication de l’identité des sociétés de démarchage, en infraction au droit à la protection des données. Cet article ne vise qu’à faciliter les échanges entre les entités de contrôle, alors que l’un des principaux problèmes est l’insuffisance de leurs moyens financiers et humains. Nous proposons donc de renforcer ces moyens.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Si je partage totalement votre constat, je ne pense pas qu’il faille inscrire dans un texte de loi un vœu sans réel effet juridique. Je préfère la solution pragmatique consistant à se retourner vers les trois entités concernées et à accroître les prérogatives de la DGCCRF. Avis défavorable.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). En réponse à mon amendement à l’article 3, vous avez déclaré que renforcer les moyens et alourdir les sanctions ne s’excluaient pas. Nous vous proposons précisément d’ancrer dans la loi le déploiement de moyens humains et financiers permettant de garantir l’application de votre article. C’est le moment de l’écrire noir sur blanc.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. C’est un vœu que vous souhaitez inscrire dans la loi, non une garantie. Je maintiens mon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 8 modifié.

 

La réunion est suspendue de douze heures à douze heures cinq.

 

 

Article 9 : Exception à l’obligation d’utilisation de numéros dédiés pour les sondages

 

Amendements de suppression CE14 de Mme Delphine Batho, CE27 de Mme Valérie Rossi et CE44 de Mme Louise Morel

Mme Delphine Batho (EcoS). Nous craignons que l’article 9 n’ouvre la voie à du démarchage téléphonique illégal en affaiblissant les outils techniques qui permettent à nombre d’opérateurs de proposer un affichage sur les smartphones signalant qu’un appel entrant est probablement indésirable.

Mme Valérie Rossi (SOC). L’article 9 ne prévoit aucune distinction entre ce qui pourrait relever d’une étude statistique d’intérêt public, de type Insee, et une enquête de toute autre nature. Il permettrait ainsi la réalisation d’enquêtes d’opinion et de sondages – souvent à l’aide de robots – particulièrement honnis par nos concitoyens. Cela restreindrait la portée du texte.

M. Romain Daubié (Dem). Les acteurs économiques étant toujours prêts à s’adapter à un nouveau cadre législatif, nous craignons que l’article 9 ne suscite la création de sociétés ad hoc dont l’objet social serait la réalisation de sondages et qui multiplieraient ensuite les appels.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis favorable à ces amendements, la rédaction actuelle de l’article pouvant favoriser l’apparition de nouvelles pratiques frauduleuses : des démarcheurs posant quelques questions en début d’appel, en feignant de chercher à réaliser des statistiques ou des sondages, se trouveraient exonérés de l’obligation d’utiliser des NPV (numéros polyvalents vérifiés). Certes, j’ai été sensible à l’argument des sondeurs qui avaient été chargés par l’État du recensement agricole, ce qui implique de contacter 400 000 exploitations. Mais même si cela doit augmenter les coûts, je privilégie la tranquillité du consommateur plutôt que l’intérêt des sondeurs.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 9 est supprimé.

 

 

Après l’article 9

 

Amendement CE9 de M. Christophe Bex

M. Christophe Bex (LFI-NFP). Il s’agit de demander au Gouvernement un rapport évaluant les effets de cette réforme sur les conditions de travail des télévendeurs et téléprospecteurs. Ce secteur est marqué par des conditions de travail particulièrement pénibles – cadences infernales, objectifs de performance oppressants, surveillance constante, stress intense, précarité structurelle – et même alarmantes dans le télémarketing – fatigue, stress chronique. Ces maux touchent en majorité des femmes et des jeunes précaires, surreprésentés dans ces emplois. À cela s’ajoute beaucoup de sous-traitance, souvent à l’étranger, aggravant l’insécurité des travailleurs. Alors que cette proposition de loi pourrait bouleverser le secteur, il est impératif d’évaluer l’impact de ces transformations et de s’assurer que les droits des salariés sont mieux protégés.

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Votre amendement soulève le sujet essentiel de la pénibilité du métier du démarchage par téléphone et de l’amélioration des conditions de travail des télévendeurs. Je me demande toutefois si cette question doit être abordée dans le présent texte, qui porte spécifiquement sur la protection du consommateur contre le démarchage abusif. En adoptant votre amendement, nous risquons de déséquilibrer l’économie générale du texte. Toutefois, au vu de l’importance du sujet, je m’en remets à votre sagesse.

La commission rejette l’amendement.

 

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

M. Pascal Lecamp, rapporteur. Je suis très heureux de constater que nous sommes proches de l’unanimité sur ce texte, même si je suis un peu déçu qu’il y ait quelques voix contre. J’espère que nous parviendrons, avec quelques aménagements, à obtenir l’unanimité en séance.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Batho, je ne peux pas vous redonner la parole.

Mme Delphine Batho (EcoS). Je n’ai pas demandé d’explication de vote, mais j’aurais pu le faire, car elles sont de droit.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Pas en commission. Je vous l’autorise tout à fait exceptionnellement, mais je vous assure qu’il n’y a pas d’explications de vote en commission.

Mme Delphine Batho (EcoS). Traditionnellement, si, et je crois avoir un peu d’expérience.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Non, je vous l’assure. Il est d’usage qu’il n’y ait pas d’explication de vote en commission sur une proposition de loi. Néanmoins, je vous laisse la parole ; c’est tout à fait exceptionnel.

Mme Delphine Batho (EcoS). Le texte est inscrit à l’ordre du jour de la journée d’initiative parlementaire du Modem le 6 mars. Nous savons ce que représente, pour chaque groupe, la gestion d’une journée d’initiative parlementaire et du temps qui y est consacré à chaque texte. Nous sommes donc demandeurs d’échanges entre les chefs de file des différents groupes avant le dépôt des amendements pour que l’on ne fasse pas durer artificiellement les débats en séance.

 

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* *

 


Puis, la commission examine la proposition de loi visant à instaurer un dispositif de sanction contraventionnelle pour prévenir le développement des vignes non cultivées qui représentent une menace sanitaire pour l’ensemble du vignoble français (n° 822) (M. Hubert Ott, rapporteur).

M. Hubert Ott, rapporteur. La proposition de loi se veut une solution simple et pragmatique à un problème majeur pour les viticulteurs de toutes les régions de France : la prolifération des vignes abandonnées. Si l’on ne fait rien, ce fléau couvrira l’ensemble du territoire national, y compris ma région, l’Alsace, qui est la moins affectée.

Les vignes en friche présentent un réel danger phytosanitaire car elles constituent des foyers de contamination par le mildiou, le black-rot et la flavescence dorée. Cette dernière est un phytoplasme – une bactérie sans paroi cellulaire – qui infecte le liber, présent dans la partie ligneuse des végétaux et composé de canaux permettant à la sève élaborée de circuler – cette dernière, enrichie par la photosynthèse, descend pour nourrir l’ensemble du tissu de la plante, des feuilles jusqu’aux racines.

Cette maladie est transmise par un vecteur. Il s’agit d’un insecte : la cicadelle de la vigne, dont on peut observer les larves cachées dans une sorte de mucus mousseux qu’on appelle vulgairement les « crachats de coucou ». On les trouve sur de nombreuses plantes quand on se promène dans la nature. Les études scientifiques menées par l’Institut français de la vigne et du vin (IFV) démontrent un lien très fort et irréfutable entre une parcelle de vigne non gérée, donc abandonnée, et le développement de cette maladie qui provoque le dépérissement des ceps contaminés et peut conduire à priver de rendement l’intégralité d’une parcelle. La flavescence dorée est considérée comme un organisme nuisible de quarantaine selon le règlement européen (UE) 2 019/2 072. Cela signifie que des mesures de lutte et de prévention doivent être imposées par chaque État membre pour éviter son arrivée et sa diffusion sur le sol européen.

Selon l’IFV, les traitements permettent de maîtriser les populations de vecteurs de la flavescence dorée. Or, une vigne mal ou non gérée, qui constitue un réservoir de cicadelles capables de se déplacer facilement vers un vignoble voisin, ne fait par définition l’objet d’aucun traitement insecticide. La lutte contre la propagation de cette maladie est une priorité dans le monde viticole.

De leur côté, le mildiou et le black-rot, beaucoup plus répandus, causent également des dégâts dévastateurs dans les plants de vigne. Ces maladies cryptogamiques, causées par des champignons, ne sont toutefois pas considérées comme des organismes nuisibles réglementés et ne peuvent donc pas faire l’objet de mesures de lutte imposées, contrairement à la flavescence dorée. Il apparaît pourtant que les vignes non gérées favorisent leur propagation. Lutter contre la flavescence dorée contribue à limiter les effets des champignons qui prospèrent sur les vignes abandonnées, sans toutefois les faire disparaître, ces organismes endémiques constituant des inoculums présents dans le sol à partir desquels les maladies se développent. Des études complémentaires doivent cependant être menées par l’IFV pour établir ce lien de manière irréfutable ; la prochaine, qui sera réalisée en 2025, vise à caractériser plus précisément l’influence de la friche.

Le renforcement des moyens de lutte contre le développement des vignes abandonnées est d’autant plus légitime que la propagation de ces maladies entraîne des conséquences désastreuses sur les plans économique, social et environnemental. Sur le plan économique, les graves difficultés auxquelles font face les vignerons, dans un contexte de crise multifactorielle, sont décuplées par ces maladies. En extrapolant les résultats des études faites par l’IFV dans certains territoires, on estime à plus de 10 % la perte de productivité due aux seules mesures de lutte contre la flavescence dorée.

De leur côté, les organismes de défense et de gestion (ODG) imputent à ces maladies l’essentiel de la perte de leur rendement, lequel a chuté de près de 30 % en vingt ans pour l’ODG du muscadet. La plupart des producteurs sont exsangues ; le nombre d’exploitations en difficulté financière dans les Pays de la Loire a triplé entre 2022 et 2024. Il devient important de les aider à lutter efficacement contre ces maladies.

Sur le plan environnemental, les mesures de prévention et de lutte contre ces maladies obligent les viticulteurs à utiliser régulièrement des produits phytosanitaires, notamment des insecticides. La présence de friches proches de leurs parcelles les contraint à multiplier les recours à ces produits, ce qui peut entraîner des conséquences sanitaires pour eux et pour l’environnement. C’est en outre une source de tensions très fortes avec les voisins non agriculteurs, alors que la destruction de certaines friches conduirait à réduire considérablement l’usage de ces produits.

Tant que les ceps ne sont pas arrachés, la maladie ne peut pas être éradiquée. Il est dès lors nécessaire de faire une ceinture de protection à l’aide de produits insecticides, qu’il faut sans cesse renouveler. C’est tout à fait contraire à l’esprit de l’évolution du monde viticole – en Alsace, par exemple, l’agriculture biologique représente 36 % de la surface viticole. Si l’on entend utiliser des produits plus indolores pour l’environnement, les moyens d’action contre ces fléaux sont très limités. Les situations induites par ce phénomène sont très graves.

Sur le plan social, les auditions ont permis de mettre en avant le traumatisme que représente pour le viticulteur la découverte de ces maladies sur ses parcelles, dans un contexte particulièrement difficile, alors que les solutions de traitement sont limitées.

Nous devons donc répondre à la détresse qui règne dans le monde viticole. La mesure proposée ne prétend pas régler la crise profonde, mais elle apporte une brique à l’édifice. Elle est d’ailleurs très attendue par la profession, qui souhaite s’en sortir sans solliciter le contribuable, grâce à des évolutions réglementaires qui l’aiderait à gérer les parcelles de façon plus sûre et efficace.

Le dispositif proposé vise à limiter efficacement le développement des vignes abandonnées. Bien qu’il reste difficile d’établir un chiffre à l’échelle nationale, les acteurs que nous avons interrogés sont unanimes : le nombre de friches augmente chaque année. Il est estimé à près de 2 000 hectares en Paca et en Gironde et à plus de 400 hectares en Pays de la Loire. Dans le contexte économique que vous connaissez, cette augmentation n’est pas étonnante.

Plusieurs cas de figure peuvent être distingués. Le cas le plus fréquent semble être celui des propriétaires non exploitants qui ne trouvent pas de viticulteurs pour travailler leurs parcelles. Ce métier peine à attirer de nouvelles générations, surtout lorsque les propriétaires n’ont qu’un lien très distant avec le monde rural ou avec leurs parcelles. Les vignes sont alors laissées à l’abandon. Un cas moins fréquent, mais tout aussi délicat à traiter, est celui des propriétaires qui laissent délibérément les friches se développer dans un but de spéculation et pour entraîner une modification des plans locaux d’urbanisme.

Viennent ensuite les viticulteurs ou vignerons en difficulté, qui n’ont pas les ressources pour s’occuper de leurs vignes. Dans ce cas, les interprofessions que nous avons consultées nous ont assuré que les friches étaient rarement laissées à l’abandon très longtemps. Il existe en effet une solidarité, les ODG s’organisant pour aider ou accompagner les viticulteurs. Il en va de même des viticulteurs qui ne peuvent plus prendre soin de leur vigne eux-mêmes pour des raisons personnelles – âge, maladie. Les professionnels s’organisent entre eux pour aider à l’arrachage.

Enfin, il existe des cas de négligence de la part de certains propriétaires ou viticulteurs. En l’état actuel de la réglementation, il est très difficile de contraindre un propriétaire ou un exploitant à arracher ses vignes. Ce ne serait d’ailleurs possible que dans le cadre de mesures de lutte imposées contre des organismes nuisibles réglementés comme la flavescence dorée. Il existe dans ce cas de nombreuses dispositions relatives au contrôle et à la surveillance des parcelles. Des injonctions d’arrachage peuvent être prises par les autorités compétentes lorsque des friches sont détectées dans ces zones de lutte imposées.

Le non-respect de ces obligations, de nature délictuelle, est puni par une sanction de six mois de prison et de 150 000 euros d’amende. Or, cette peine, disproportionnée, est totalement inopérante car elle n’est quasiment jamais appliquée, à juste titre : dans la plupart des cas, il ne paraît pas justifié de sanctionner aussi sévèrement ce qui peut relever d’une négligence ou de difficultés économiques ou sociales. Le texte a donc pour objet l’établissement d’une peine suffisamment crédible pour jouer son rôle dissuasif et ainsi faciliter la lutte contre les vignes abandonnées. Lorsqu’une mesure de lutte impose un arrachage, le non-respect de cette obligation serait désormais sanctionné d’une simple amende de 1 500 euros et de 3 000 euros en cas de récidive.

L’objet de ce texte très attendu par la profession n’est pas de créer une amende pour toucher les propriétaires au porte-monnaie ou pour engendrer de nouvelles recettes publiques. L’efficacité de la mesure réside dans son caractère dissuasif. Il est improbable qu’en menaçant un propriétaire ou un viticulteur d’une peine de prison qu’il sait inapplicable, on le conduise à changer d’attitude. En revanche, la menace d’une sanction pécuniaire crédible a de grandes chances de favoriser la prise de conscience et de limiter l’inaction.

Je préfère privilégier la sanction administrative pour des infractions mineures : c’est plus rapide et plus clair. On évite la procédure pénale qui donne le sentiment d’être un grand délinquant. Lorsque vous garez mal votre voiture, vous avez une amende ; lorsque vous exécutez mal une procédure, sans impact majeur sur l’intérêt public, vous encourez aussi une amende : cela paraît raisonnable.

Cette simple mesure de bon sens permettra de renforcer la lutte contre la propagation des organismes nuisibles tels que la flavescence dorée.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Patrice Martin (RN). La flavescence dorée s’est propagée comme un véritable fléau dans l’ensemble des vignobles français. Face à cette menace, certaines régions viticoles tentent de s’adapter tandis que d’autres optent pour une stratégie d’éradication rigoureuse en raison de l’aggravation continue de cette maladie.

En Bourgogne, en 2022, la fédération régionale de lutte et de défense contre les organismes nuisibles de Bourgogne-Franche-Comté a rapporté que 11 % des échantillons de vigne analysés étaient contaminés, contre seulement 0,9 % en 2017. Cette évolution alarmante a conduit à l’arrachage de 750 pieds infectés, un chiffre qui a plus que doublé en un an. En Champagne, la situation s’est également détériorée en 2024 : 10 000 pieds atteints ont été recensés, soit 1 000 de plus qu’en 2023. Dans le sud de la Gironde, près de 6 500 pieds infectés ont été identifiés sur plus de 500 parcelles en 2022.

À l’échelle nationale, la propagation fulgurante de cette maladie impose une vigilance accrue et des actions immédiates. Toutes les régions viticoles sont touchées, à des degrés divers, et l’urgence d’une mobilisation collective ne fait plus aucun doute. Depuis des années, de nombreuses fédérations professionnelles alertent sur l’inaction face à cette crise et sur l’absence d’obligation réglementaire pour les propriétaires de vignes non entretenues et laissées à l’abandon, qui deviennent ainsi des foyers de contamination pour les exploitations voisines. L’absence de mesures adaptées et le manque de concertation avec les professionnels du secteur freinent la mise en place d’une réponse législative efficace, pourtant essentielle à la survie de nos vignobles. Malgré l’urgence de la situation, le cadre juridique actuel ne permet qu’une sanction délictuelle, appliquée au cas par cas sous l’autorité du procureur. Ce dispositif individualisé allonge considérablement les délais d’intervention et empêche toute réponse globale et immédiate.

La vigne est bien plus qu’une filière économique : elle est une composante essentielle de notre patrimoine, de notre culture, de nos territoires ; elle façonne nos paysages, fait vivre des milliers de familles et participe activement à l’identité de la France. Peut-on seulement imaginer notre pays sans vignoble, sans vin et sans vigneron ? Face aux difficultés croissantes que traverse le secteur viticole, il est impératif de prendre des mesures fortes et adaptées. Les viticulteurs appellent à l’aide. C’est pourquoi le groupe Rassemblement national soutiendra cette proposition de loi, qui représente une avancée nécessaire pour protéger nos vignobles, garantir l’avenir de l’exploitation et préserver un héritage qui fait la fierté de notre pays.

M. Hubert Ott, rapporteur. Les friches constituent un foyer massif de maladie. Alors que la situation a brutalement changé, la réactivité n’est pas au rendez-vous. La raison d’être de ce texte est de régler le problème et d’enrayer le fléau.

Le vignoble français est non seulement une fierté nationale, mais aussi une force économique majeure. Nous avons le devoir de préserver sa dimension culturelle et de soutenir l’approche qualitative des viticulteurs, fondée sur des pratiques culturales de plus en plus respectueuses des attentes sociétales. Si nous voulons éviter la paralysie, nous devons agir.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). La viticulture française traverse une crise profonde en raison des effets du dérèglement climatique. À cela s’ajoute une pression sanitaire de plus en plus forte, marquée par la persistance de maladies bien connues qui affectent nos vignobles dans l’ensemble du territoire, comme le mildiou ou la flavescence dorée. Cette dernière maladie est très présente dans certaines régions comme le Bordelais, mais aussi dans mon département du Rhône, où les vignes du Beaujolais sont durement affectées.

L’un des facteurs aggravants de sa propagation est le développement de nombreuses friches viticoles. Ces parcelles abandonnées, non entretenues, deviennent des foyers de contamination pour les vignes voisines, ce qui détériore leur production. Face à ce risque, les viticulteurs sont contraints d’intensifier les traitements phytosanitaires au détriment de leur santé et de celles des sols. Ce n’est pas l’orientation que nous souhaitons pour notre viticulture.

Dans le cas de la flavescence dorée, la législation impose l’arrachage des pieds isolés contaminés ainsi que des parcelles affectées à plus de 20 %, mais elle n’est pas respectée, car le dispositif manque cruellement d’efficacité. En effet, le régime de sanction couvre l’ensemble des mesures de prévention, de surveillance et de lutte contre les dangers phytosanitaires liés aux organismes nuisibles. La sanction de nature délictuelle alourdit les procédures pénales et ne semble pas proportionnée aux obligations d’arrachage des vignes. Il est en effet rare que des condamnations soient prononcées compte tenu de la sévérité de la sanction, à savoir six mois d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Peut-on accepter que celles et ceux qui travaillent dur pour entretenir leurs vignes soient contraints de compenser l’inaction de certains propriétaires ? Pascal Lavergne, député de Gironde jusqu’en 2024, nous avait alertés sur ce sujet à l’occasion du débat sur le projet de loi d’orientation agricole, au printemps dernier, mais son amendement n’avait pas trouvé d’accrochage législatif.

La proposition de loi pallie les manques évoqués en sanctionnant le non-respect des obligations de lutte contre les organismes nuisibles par une contravention de cinquième classe. Nous soutenons cette mesure, car ce n’est ni une sanction aveugle, ni une punition arbitraire, mais un outil indispensable pour responsabiliser les propriétaires. Elle ne vise pas à fragiliser les viticulteurs les plus précaires. Elle s’adresse en priorité aux propriétaires qui ont hérité de parcelles et les laissent à l’abandon, parfois même selon une logique purement spéculative, dans l’espoir d’un reclassement foncier. Quant aux viticulteurs en difficulté, les fédérations viticoles, pleinement conscientes de ces enjeux, œuvrent déjà pour les soutenir financièrement.

Le texte apporte une réponse concrète à une demande explicite des viticulteurs de différentes régions et permet d’agir avec détermination en faveur de nos vignobles. C’est pourquoi le groupe Ensemble pour la République votera en faveur de cette proposition de loi.

M. Hubert Ott, rapporteur. Monsieur Fugit, je connais votre implication dans la défense du monde viticole. Il est important de définir les causes de cette difficulté et les types de propriétaires ou d’exploitants concernés pour adopter une réponse proportionnée et efficace.

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Je tiens à remercier M. Ott pour m’avoir permis d’assister aux très instructives auditions de la semaine passée avec différents ODG, l’Institut français du vin ou encore la Confédération nationale des appellations d’origine contrôlées (Cnaoc). Le vignoble girondin, plus spécifiquement celui de l’entre-deux-mers, fait face à une crise gravissime qui détruit les emplois de salariés et d’exploitants agricoles. Je pense aussi à la situation de l’entreprise Yvon Mau à Gironde-Sur-Dropt, dont 80 % des emplois sont menacés.

Cette crise multifactorielle, amplifiée par une déconsommation globale du vin, renvoie surtout à des logiques et à des choix de production guidés par une vision industrielle de la viticulture au sein des gouvernements successifs, aggravés par une absence de planification écologique et sanitaire. Elle témoigne de l’échec des politiques agricoles menées jusqu’ici : les logiques de marché dans lesquelles sont enferrés nos agriculteurs entravent trop souvent la diversification et la reconversion, empêchent la garantie d’une juste rémunération pour les producteurs et ne permettent ni le renouvellement des générations, ni la transmission des exploitations.

Dans un tel contexte, cette proposition de loi nous semble insuffisante. Néanmoins, elle paraît correspondre à la demande d’une grande partie de la filière dans le cadre de la lutte contre la flavescence dorée. Pour éviter la propagation de cette maladie, il est primordial de ne pas laisser les vignes à l’abandon, car cela peut entraîner des externalités négatives pour les exploitants voisins, affectant particulièrement celles et ceux qui ont fait le choix de produire en bio. Le dispositif de sanction contraventionnelle a pour but d’inciter à agir et répond à une revendication des ODG et de la Cnaoc.

Nous proposerons d’amender le dispositif afin de prendre en compte la grande diversité des situations, notamment celle des plus précaires. La contravention ne doit advenir qu’en dernier recours, après que le détenteur a été informé des solutions existantes pour financer l’arrachage. Il faudra tenir compte de ses difficultés financières ou techniques pour accompagner cet arrachage, le cas échéant, et s’assurer que les hectares de vigne seront réattribués à une production agricole.

Contraints par l’article 40 de la Constitution, nous demandons un rapport exhaustif sur les moyens adoptés par l’État pour lutter contre les maladies de la vigne. Ces moyens doivent être pérennisés. Détecter et prévenir est un impératif pour permettre aux viticulteurs de travailler dans des conditions sereines qui ne mettent en danger ni leur récolte ni leur santé. L’État doit jouer son rôle d’accompagnateur et organiser la recherche pour anticiper l’élaboration de solutions aux maladies émergentes qui risquent de provoquer de nouveaux dégâts.

M. Hubert Ott, rapporteur. Je partage votre diagnostic. La crise qui touche la viticulture, autrefois filière de réussite et moteur des exportations françaises, est grave et les réponses ne pourront pas toutes figurer dans ce petit texte à l’objectif bien précis. Il me semble néanmoins que lutter contre les ravages de la flavescence est indispensable pour éviter que les viticulteurs voisins de ceux qui ont abandonné leurs parcelles ne soient frappés par des difficultés nouvelles qui seraient pour eux une double peine. Il faut enrayer ce fléau.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je partage votre préoccupation. Le vin du Bordelais est en pleine crise, car les prix excessivement bas ne permettent pas de couvrir les coûts de production. Cela a des répercussions pour de nombreux agriculteurs, qu’ils soient salariés ou exploitants.

Mme Pascale Got (SOC). Je remercie la commission de m’accueillir en tant que députée de Gironde, plus précisément du Médoc.

La proposition de loi n’est évidemment pas la solution à la crise profonde que traverse la viticulture française, dont les facteurs sont multiples : la baisse des exportations, les évolutions de la consommation et de la commercialisation ou encore le changement climatique.

La majeure partie des vignobles est soumise à un double phénomène : des précipitations de plus en plus abondantes et des températures de plus en plus élevées. Résultat : l’état sanitaire des vignobles se dégrade sous l’effet de maladies diverses comme la flavescence dorée, mais aussi le mildiou, l’oïdium, etc. Ces maladies prolifèrent dans les vignes en friche, qui deviennent des foyers contaminants pour les parcelles à proximité. Les raisons de leur état sont diverses : abandons de fermage, problèmes juridiques de succession, réduction de la taille de la propriété…

La prolifération des maladies est extrêmement difficile à endiguer. Il n’existe aucun traitement contre la flavescence dorée, si ce n’est l’arrachage sanitaire préventif. Pour les autres, les dégâts peuvent être limités au prix de traitements répétitifs et coûteux, dont les modalités contredisent les efforts pour une viticulture plus vertueuse. Elles mettent en danger les exploitations biologiques, détournent ceux qui voudraient opérer une transition et aggravent la crise pour tout le monde. La veille sanitaire assurée par les GDON (groupement de défense contre les organismes nuisibles) et les Fredon (fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles) pour repérer les foyers de flavescence dorée à endiguer est vitale et leurs recommandations doivent être respectées au mieux et au plus vite.

Cependant, ne pas proposer aux propriétaires des parcelles touchées une étape intermédiaire avant la pénalité maximale, c’est méconnaître les raisons de l’existence de vignes en friche. Face au changement climatique et à l’accroissement des maladies dans le vignoble, la veille sanitaire ne peut se résumer à des sanctions ou à des mesures conjoncturelles ; elle nécessite une prise en compte structurelle et une politique nationale. Il est important de maintenir la productivité du vignoble, de poursuivre les efforts de recherche pour mieux anticiper les émergences de maladies, de structurer des données dans le cadre d’un observatoire et d’assurer la pérennité financière des fonds de soutien. C’est le sens de plusieurs amendements que présentera le groupe Socialistes et apparentés.

M. Hubert Ott, rapporteur. Je ne peux que souscrire à ces propositions, qui tendent à améliorer la connaissance et le suivi des phénomènes qui touchent le vignoble.

En complément de la réponse déjà apportée à Madame Feld, je rappelle que l’objectif de la sanction mise en place par ce texte est effectivement de dissuader les propriétaires d’abandonner leur parcelle afin que l’arrachage soit réalisé dans les temps. Ce n’est pas un problème d’information, car la Draaf (direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt) et les ODG les préviennent de l’existence d’un plan de lutte imposée. Il y aura bien évidemment d’autres mesures à prévoir pour accompagner le vignoble.

M. Julien Dive (DR). Le premier objectif de la proposition de loi est de lutter contre les foyers de flavescence dorée. Le second est de réduire l’usage des insecticides pour les raisons liées à l’existence de parcelles laissées en friche.

Les viticulteurs sont confrontés aux aléas climatiques, à des difficultés économiques du fait des négociations commerciales – je suis d’accord avec Mme la présidente pour dire que le prix du vin de Bordeaux est anormalement bas –, aux pressions douanières qui s’annoncent outre-Atlantique et à la pression environnementale. Nous devons leur apporter des solutions adaptées et les accompagner dans la lutte contre les maladies qui menacent leurs exploitations.

La propagation de la flavescence dorée, une maladie qui peut anéantir les récoltes, est liée, entre autres facteurs, à la présence de vignes en friche, abandonnées par négligence ou en raison de problèmes financiers. Les viticulteurs doivent multiplier les efforts pour protéger les vignes, souvent au prix de traitements coûteux et chronophages et au détriment de l’environnement. La lutte contre la flavescence dorée n’est pas seulement une question de traitement, c’est un engagement constant qui pèse lourdement sur les ressources humaines et financières des exploitations viticoles.

Le dispositif actuel de lutte contre cette maladie repose sur un arsenal juridique inadapté. Le non-respect des mesures de lutte est passible d’une amende démesurée de 150 000 euros, assortie d’une peine de prison de six mois. Cette sanction, en plus d’être excessive, témoigne d’un esprit contre-productif qui stigmatise les vignerons et les considère comme des délinquants alors qu’ils sont avant tout des acteurs essentiels qui méritent notre soutien.

Monsieur le rapporteur, vous proposez de changer cette logique en passant d’une approche punitive à une approche incitative : plutôt que de sanctionner à tout prix, responsabiliser les propriétaires des vignes et les encourager à adopter les bonnes pratiques pour lutter au mieux contre la flavescence dorée. Vous proposez une sanction plus juste et plus proportionnée sous la forme d’une contravention de cinquième classe punie d’une amende de 1 500 euros pouvant être majorée en cas de récidive. Outre qu’elle sera plus facilement applicable, cette disposition sera plus dissuasive que l’amende actuelle. Elle conjugue deux impératifs : lutter contre la prolifération des maladies végétales et, surtout, permettre aux services de l’État de disposer d’outils plus adaptés.

Le groupe de la Droite républicaine votera donc pour la proposition de loi, tout en rappelant que la question de la sanction ne doit pas occulter la nécessité d’un accompagnement renforcé des vignerons. Nous devons être à leurs côtés et leur offrir un soutien à la replantation des vignes tout en encourageant la recherche et le développement de solutions innovantes et efficaces pour lutter contre les maladies.

 

M. Hubert Ott, rapporteur. Je l’ai dit, la seule lutte contre ces fléaux entraîne une baisse de la productivité estimée à 10 %, alors même que les rendements sont tombés à 30 ou 35 hectolitres par hectare – sachant que 50 hectolitres ne suffisent déjà pas à atteindre un objectif économique minimal. Le combat ne s’arrêtera donc pas avec la proposition de loi, mais celle-ci marque une nouvelle étape, qui doit ouvrir la voie à un travail plus approfondi avec les ODG et les services de l’État.

M. Benoît Biteau (EcoS). Le diagnostic est incontestable, de même que l’urgence d’agir. Les productions de nos plus prestigieux vignobles sont menacées.

Alors que la situation économique est difficile, la lutte contre la flavescence dorée dépend des seuls vignerons, sur lesquels elle fait peser de lourdes charges. Dans ces conditions, on ne peut pas laisser perdurer des foyers de maladie. De plus, pour des raisons écologiques, il faut réduire le recours aux insecticides, donc faire disparaître ces foyers.

Mais c’est ce même contexte économique qui conduit des vignerons à abandonner leurs vignobles. Si je ne conteste pas l’idée qu’il faut sanctionner cet abandon, notamment en raison de ses conséquences sanitaires sur ceux qui poursuivent leur activité, je regrette que le texte ne comporte pas de mesures d’incitation à l’arrachage – qui devraient évidemment aller de pair avec l’interdiction de replanter. On peut manier de temps en temps le bâton, mais je préfère la carotte. Un peu d’audace !

M. Hubert Ott, rapporteur. Une proposition de loi ne peut contenir de mesure financière que sous certaines conditions. En revanche, il existe des mesures ponctuelles, et la solidarité, grâce aux ODG et aux interprofessions, permet de limiter les coûts. Mais il manquait un outil pour que le dispositif soit opérationnel.

Des viticulteurs abandonnent leurs parcelles, mais d’autres, qui continuent de tenir leur exploitation à bout de bras, sont victimes de ces abandons et nous devons absolument les accompagner. Le texte constitue le début de cet accompagnement.

Je vous rejoins entièrement en ce qui concerne les effets écologiques délétères de la situation, alors que la viticulture française a fait des efforts significatifs au cours des vingt dernières années pour aller vers des pratiques respectueuses de l’environnement – avec succès, les inventaires de biodiversité montrant la réapparition de certaines plantes commensales. Il faut soutenir ces nouvelles pratiques ; la mesure que nous proposons y contribue.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. La politique européenne de subvention à l’arrachage des vignes, qui a existé jusque dans les années 1990, était très efficace ; elle a hélas disparu avec la vague de libéralisation des marchés et de la politique agricole commune.

M. David Taupiac (LIOT). Le Gers, dont le vin faisait la richesse, est particulièrement affecté par la crise de la filière viticole. La baisse de la demande conduit à une accumulation des stocks qui entraîne une chute des prix et une perte de rentabilité pour les agriculteurs ; à cela s’ajoutent les effets délétères du dérèglement climatique et les menaces sanitaires, dont la flavescence dorée.

Celle-ci, très épizootique, peut contaminer plus de 20 % d’une parcelle en trois ans sans traitement insecticide adéquat ; il faut alors tout arracher. Tout l’enjeu est donc de détecter vite les pieds contaminés. Mais certaines parcelles abandonnées deviennent des foyers infectieux sans que l’on s’en aperçoive et la procédure administrative pour contraindre un propriétaire à arracher ses vignes est complexe et longue, ce qui laisse à la maladie le temps de se propager.

Les outils actuels ne sont évidemment pas efficaces, mais la proposition de loi permettra-t-elle de faire mieux ? Sans doute représentera-t-elle un gain de temps et une piqûre de rappel à l’intention des propriétaires réfractaires, mais elle ne résout pas le problème du repérage des parcelles contaminées ni celui de l’identification du propriétaire. En outre, pour ceux qui ont dû abandonner leur vignoble pour des raisons économiques, ce sera la double peine.

Nous appelons donc à renforcer les mesures d’accompagnement des exploitants en difficulté, pour éviter une contravention punitive sans discernement.

M. Hubert Ott, rapporteur. En effet, le dispositif actuel est inefficace, car trop lent, et il faut accompagner les viticulteurs touchés par ce fléau. Tous nos interlocuteurs sur le terrain en sont conscients. Affaire à suivre, donc, avec la plus grande vigilance.

M. Richard Ramos (Dem). Merci, monsieur le rapporteur, de votre combat constant en faveur de la biodiversité.

Nous voterons évidemment pour la proposition de loi. Les vignobles qui ne sont pas concernés pourraient l’être demain en raison des changements climatiques. Rien de pire qu’une loi inapplicable ; en allégeant les sanctions, vous les rendrez effectives. Il faudra évidemment veiller à ce qu’elles soient mises en œuvre avec discernement.

M. Hubert Ott, rapporteur. Merci !

 


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Information relative à la commission

 

La commission a nommé M. Stéphane Travert rapporteur sur la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire (n° 954).


 

 

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 19 février 2025 à 9 h 30

Présents. - M. Laurent Alexandre, M. Charles Alloncle, M. Maxime Amblard, M. Antoine Armand, M. Christophe Barthès, Mme Delphine Batho, M. Karim Benbrahim, M. Thierry Benoit, M. Christophe Bex, M. Benoît Biteau, M. Jean-Luc Bourgeaux, Mme Blandine Brocard, Mme Françoise Buffet, M. Thomas Cazenave, M. André Chassaigne, M. Romain Daubié, M. Julien Dive, M. Inaki Echaniz, M. Frédéric Falcon, Mme Mathilde Feld, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, M. Julien Gabarron, M. Antoine Golliot, Mme Pascale Got, Mme Géraldine Grangier, Mme Mathilde Hignet, M. Maxime Laisney, M. Thomas Lam, Mme Hélène Laporte, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Hervé de Lépinau, M. Laurent Lhardit, M. Bastien Marchive, M. Patrice Martin, M. Paul Midy, M. Christophe Naegelen, M. Philippe Naillet, M. Hubert Ott, M. René Pilato, M. Dominique Potier, M. Richard Ramos, M. Vincent Rolland, Mme Valérie Rossi, M. Boris Tavernier, Mme Mélanie Thomin, M. Lionel Tivoli, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. Stéphane Vojetta, M. Frédéric Weber

Excusés. - M. Pouria Amirshahi, M. Max Mathiasin, M. Jérôme Nury,
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Joseph Rivière, M. Stéphane Travert