Compte rendu
Commission
des affaires sociales
– Projet de loi de finances pour 2025 (seconde partie) (n° 324) : Mission Solidarité, insertion et égalité des chances :
• Audition de M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, Mme Agnès Canayer, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance, Mme Charlotte Parmentier Lecocq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap, et Mme Salima Saa, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes 2
– Présences en réunion.................................25
Mardi
12 novembre 2024
Séance de 21 heures
Compte rendu n° 23
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
M. Frédéric Valletoux,
président
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La réunion commence à vingt et une heures.
(Présidence de M. Frédéric Valletoux, président)
La commission auditionne M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, Mme Agnès Canayer, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance, Mme Charlotte Parmentier Lecocq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap, et Mme Salima Saa, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes.
M. le président Frédéric Valletoux. Malgré le rejet de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 en séance cet après-midi, nous reprenons nos travaux avec l’audition, dans le cadre de ce PLF dont l’examen se poursuit au Sénat, des ministres compétents sur la mission Solidarité, insertion et égalité des chances.
M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes. En complément des branches autonomie et famille de la sécurité sociale, la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, dont les crédits excèdent les 30 milliards d’euros, est au cœur de l’action de mon ministère. Elle traduit dans les actes une valeur partagée par les Français : la fraternité face aux difficultés.
La fraternité n’est pas qu’un mot, c’est la volonté d’investir dans notre modèle social – un des plus protecteurs au monde – et dans notre avenir collectif en préparant celui de nos concitoyens les plus vulnérables. Chacun d’entre nous sera vulnérable à un moment de sa vie. C’est pourquoi les textes budgétaires qui relèvent de mon périmètre doivent être abordés dans une optique d’investissement pour l’avenir : au-delà des déficits immédiats, il faut aussi prendre en compte ceux qui se creuseront si nous n’accompagnons pas la transition démographique et ne favorisons pas la participation de chacun à notre modèle de société.
À court terme, et parce qu’un dérapage des finances publiques toucherait en premier lieu les plus vulnérables, nous avons fait des choix, évidemment perfectibles au vu des délais contraints dont nous disposions pour élaborer ce budget. Je me suis attaché à respecter quatre grands principes : l’efficience, car si les Français sont solidaires, ils veulent légitimement que les moyens publics aillent aux personnes qui en ont besoin, au juste montant, et sans jamais renoncer à l’ambition de l’insertion sociale et professionnelle ; le respect des engagements de l’État vis-à-vis des collectivités territoriales, en particulier des départements, chefs de file de l’action sociale ; la lutte contre la pauvreté, notamment celle des enfants, qui, en plus d’être insupportable, peut influencer toute leur vie ; et la sanctuarisation, malgré le contexte budgétaire, des moyens alloués à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Contrairement à ce que pourraient laisser croire les discours dénonçant une prétendue austérité, la fraternité évoquée par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale se reflète notamment par la hausse du budget de cette mission, qui passe de 29,7 milliards d’euros en 2024 à 30,3 milliards en 2025.
Les prestations prévues soutiennent activement notre modèle social, en aidant près de 5 millions de nos concitoyens pour éviter qu’ils ne tombent dans la pauvreté. Pour qui bénéficie de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), du revenu de solidarité actives (RSA) ou de la prime d’activité, chaque euro compte. Pour que nos concitoyens les plus modestes ne s’appauvrissent pas en 2025, ces prestations seront donc revalorisées à hauteur de l’inflation dès avril prochain. L’allocation de solidarité aux personnes âgées augmentera également.
La réforme de France Travail consécutive à l’adoption de la loi pour le plein emploi permet à tous les bénéficiaires du RSA d’entrer dans un parcours actif vers l’emploi. La garde d’enfant étant le premier frein à l’emploi, notamment pour les femmes, mon ministère prendra toute sa part à cet effort à travers le déploiement du service public de la petite enfance.
Je souhaite également que la prime d’activité garde son objet originel, à savoir le soutien au niveau de vie des travailleurs les plus modestes. Contrairement à ce qu’on entend parfois, cette prestation efficacement conçue garantit à ceux qui la perçoivent de toujours gagner à travailler plus. Nous allons par ailleurs procéder à un ajustement pour la recentrer sur l’aide aux cinq premiers déciles de revenus : du fait de la forte augmentation du Smic ces dernières années, des personnes appartenant aux déciles supérieurs peuvent actuellement percevoir la prime d’activité, ce qui n’est pas sans poser question. Nous modifierons donc le mode de calcul pour limiter la hausse de la prime pour les plus aisés lors de sa revalorisation en avril 2025.
À la demande du Premier ministre, je m’engage aussi pleinement à ses côtés dans le projet d’instauration d’une allocation sociale unique, en gardant à l’esprit ce qui marche bien, mais surtout ce qu’il faut améliorer. Il arrive par exemple que le travail procure un gain trop faible, notamment lorsqu’une personne perçoit à la fois le RSA ou la prime d’activité et une aide personnalisée au logement.
Nous devons aussi garantir que les aides soient versées au juste droit. Pour ce faire, il faut certes sanctionner les fraudes individuelles et collectives, mais surtout lutter contre le non‑recours et les erreurs de bonne foi, qui sont fréquentes et pénalisent les ménages lorsque les indus sont réclamés. À partir de 2025, le préremplissage des demandes de RSA et de prime d’activité, expérimenté dans cinq départements, sera généralisé, ce qui contribuera à limiter grandement les indus et à s’assurer que tous accèdent aux prestations auxquelles ils ont droit. Cette évolution apaisera les relations entre les caisses et les bénéficiaires et offrira une stabilité financière indispensable aux plus fragiles. La diminution des erreurs devrait en outre permettre de réaliser des économies, à hauteur d’environ 800 millions d’euros pour la prime d’activité et de 150 millions pour le RSA recentralisé. Ces sommes compenseront la baisse du non‑recours, qui devrait représenter un coût notable.
La lutte contre la pauvreté passe aussi et avant tout par l’action de terrain. Le pacte des solidarités lancé en 2023 prévoit des moyens pour accompagner les personnes vers l’émancipation, accroître leur pouvoir d’agir et leur permettre d’accéder aux prestations auxquelles elles ont droit. Je renouvelle l’engagement du Gouvernement en faveur d’un cadre interministériel de prévention et de lutte contre l’isolement et la pauvreté ainsi que d’aide aux plus exclus. Je crois à l’efficacité de l’action des bénévoles et des professionnels, dont je tiens à saluer l’engagement. Malgré le contexte budgétaire, j’ai choisi de respecter la trajectoire haussière prévue initialement, en abondant le programme 304 de 61 millions d’euros. Je vais même plus loin concernant les crédits alloués à la tarification sociale des cantines – les repas à 1 euro –, qui augmenteront de 35 millions. Ce dispositif, déployé en lien avec les communes rurales, est un succès et mérite d’être encouragé.
En matière de lutte contre la précarité alimentaire, j’ai choisi de poursuivre la transformation du système vers plus de qualité, une plus grande participation des personnes et davantage de produits locaux. Le programme Mieux manger pour tous, qui finance l’achat de fruits et légumes frais et favorise le développement d’initiatives locales comme les chèques alimentaires, verra ses crédits augmenter de 10 millions d’euros, pour atteindre 80 millions. J’ai par ailleurs souhaité pérenniser, pour 6 millions, le programme expérimental Urgence premiers pas, afin que les structures d’aide alimentaire aient le nécessaire pour prendre en charge les tout‑petits.
Parce qu’il faut avoir une adresse postale pour bénéficier des prestations, j’ai aussi proposé d’augmenter de 2 millions d’euros les moyens alloués aux associations et aux mairies qui proposent une domiciliation aux plus grands exclus, souvent sans abri. Ces moyens complètent le financement de l’expérimentation Territoires zéro non-recours.
Je n’oublie pas les territoires d’outre-mer, particulièrement touchés par la pauvreté. Nous renforcerons ainsi de 2 millions d’euros les actions destinées aux plus jeunes dans le cadre de la politique des 1 000 premiers jours de l’enfant.
Enfin, nous financerons à hauteur de 2,5 millions d’euros le dispositif Premières heures en chantier, qui permet aux personnes très éloignées de l’emploi, souvent sans abri, de reprendre confiance en elles en travaillant à la journée, au rythme qui leur convient, dans une démarche d’insertion.
Les crédits alloués aux contrats de locaux des solidarités conclus avec les métropoles et les départements seront sanctuarisés pour prolonger la dynamique très positive enclenchée par ces contrats adaptés à chaque territoire. Parce qu’il est important pour les collectivités et les professionnels d’avoir de la visibilité, l’État a promis de s’engager de manière pluriannuelle. Son action s’étend aux mairies, qui recevront 86 millions d’euros de crédits nouveaux au titre de leur nouvelle compétence d’autorité organisatrice du service public de la petite enfance en 2025. Les moyens consacrés à la contractualisation en matière de protection de l’enfance seront par ailleurs maintenus au niveau de consommation observé en 2024, pour préserver les actions en cours de déploiement.
Pour permettre aux personnes en situation de handicap d’avoir une vie comme les autres, parmi les autres – ce dont le Premier ministre a fait une priorité –, les budgets d’intervention prévus au titre du programme 157 seront préservés.
Enfin, toutes les décisions budgétaires relevant du périmètre des solidarités ont été prises en portant une attention particulière aux femmes, qui sont si souvent en première ligne et dont la vulnérabilité prend parfois des formes diverses. Nous augmenterons ainsi les crédits de lutte contre la précarité menstruelle de 2 millions d’euros. J’ai aussi constaté l’efficacité, sur le terrain, de la nouvelle aide d’urgence aux femmes victimes de violences conjugales.
Toutes ces propositions doivent évidemment faire l’objet de discussions, que je suis ravi d’avoir avec vous.
Mme Agnès Canayer, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance. Les financements des politiques publiques conduites par le ministère de la famille et de la petite enfance ne relèvent pas uniquement du PLF 2025, mais également, pour une part non négligeable, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), notamment à travers le Fonds national d’action sociale (Fnas) de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf).
Dans le PLF, c’est l’action 17 du programme 304 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables qui concerne les sujets propres au ministère de la famille et de la petite enfance. Ses budgets ont été préservés, voire renforcés.
Le PLF alloue d’abord 86 millions d’euros à la compensation financière des communes, qui deviendront autorités organisatrices du service public de la petite enfance au 1er janvier 2025. Ce projet capital consacre et renforce le rôle des élus locaux, particulièrement des maires, dans le déploiement de cette politique essentielle. Nous aurons à cœur d’être présents auprès des élus, légitimement vigilants, et de nous montrer à l’écoute des propositions des parlementaires.
Les financements destinés à la création de nouvelles places d’accueil du jeune enfant sont quant à eux inclus dans le Fnas, avec une forte augmentation entre 2023 et 2027, afin de réunir toutes les conditions de la réussite du service public de la petite enfance. Ils permettront de créer des places pour tous les enfants, mais aussi de développer les crèches à vocation d’insertion professionnelle, qui sont particulièrement importantes pour les familles monoparentales. Les différents bonus offriront aussi des solutions en faveur de l’accueil des jeunes enfants défavorisés et permettront de mieux mailler les territoires dépourvus de solutions. Cette politique vise non seulement à accroître le nombre de places d’accueil du jeune enfant, mais aussi à apporter des solutions de qualité, garantes de la cohésion sociale.
Le financement de la protection de l’enfance, qui demeure l’autre enjeu central, sera quant à lui préservé en 2025. Protéger tous les enfants, particulièrement les plus vulnérables, est notre priorité. Beaucoup reste à faire. Ainsi, l’enveloppe de 120 millions d’euros consacrée à la contractualisation entre l’État et les départements dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance sera reconduite. Une attention particulière est portée aux enfants protégés en situation de handicap, qui peuvent également bénéficier de solutions spécifiques dans le cadre du programme 50 000 solutions.
Par ailleurs, 50 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour accompagner les départements dans le maintien des jeunes majeurs dans les structures de l’aide sociale à l’enfance (ASE), afin d’éviter les sorties sèches, dont les effets néfastes sont connus.
La prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA) sera également préservée, 101,3 millions d’euros étant destinés à la mise à l’abri et à l’évaluation de la minorité des personnes se présentant comme MNA, ainsi qu’à leur prise en charge dans le cadre de l’ASE. La contribution exceptionnelle de l’État aux dépenses de l’ASE au titre des MNA décidée en 2018 est d’ailleurs reconduite.
À l’instar des départements, l’État abondera de 4,9 millions d’euros le groupement d’intérêt public France enfance protégée, constitué en 2023 pour mieux coordonner les politiques de protection de l’enfance.
Enfin, nous renforcerons notre action contre les violences faites aux enfants, enjeu qui me tient particulièrement à cœur. Le plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2024-2027 restera ainsi doté de 2 millions d’euros, tandis que le financement de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants sera porté à 700 000 euros, afin de maintenir son activité, notamment sa plateforme d’écoute. Enfin, les unités d’accueil pédiatrique des enfants en danger, qui regroupent dans un lieu unique des soignants spécialisés en santé de l’enfant et de l’adolescent, seront financées à hauteur de 60 000 euros par unité, pour un montant global de 7,4 millions, afin d’assurer une meilleure coordination entre les professionnels mobilisés.
Soyez assurés de notre engagement total en faveur des familles et de tous les enfants, en particulier des plus vulnérables.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap. Les crédits destinés au financement de la politique publique du handicap ne relèvent pas exclusivement du programme 157 Handicap et dépendance : au total, l’effort national de soutien à l’autonomie des personnes en situation de handicap, incluant les dépenses de sécurité sociale, de l’État et des collectivités territoriales, s’est élevé à plus de 61 milliards d’euros en 2023, soit une hausse de 11 milliards par rapport à 2017.
Le PLF et le PLFSS pour 2025 témoignent de la volonté du Gouvernement de préserver et de renforcer ces financements. Le programme 157 traduit cette ambition, avec des crédits en hausse de 4,2 %, soit 650 millions d’euros, qui le portent au-delà des 16 milliards. À titre d’exemple, grâce aux 270 millions prévus dans le budget de la sécurité sociale, 15 000 solutions nouvelles auront été déployées dès l’année prochaine, sur les 50 000 prévues d’ici à 2030.
Je travaille sur ces thématiques avec l’ensemble de mes collègues du Gouvernement et me montre particulièrement attentive à la préservation des budgets et des programmes relatifs aux personnes en situation de handicap dans les différents ministères concernés. Je songe par exemple aux récents progrès obtenus avec Astrid Panosyan-Bouvet et plusieurs députés pour déplafonner la taxe affectée à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) et sanctuariser 50 millions d’euros pour le financement des entreprises adaptées.
Environ 90 % des crédits du programme 157 sont consacrés à soutenir le revenu des personnes en situation de handicap, à travers le financement de l’AAH. Au-delà des revalorisations annuelles pour compenser les effets de l’inflation, plusieurs hausses exceptionnelles sont intervenues depuis 2017, ce qui mérite d’être à nouveau salué. Cette année, la dépense d’AAH reste fortement dynamique, du fait de l’augmentation du nombre de bénéficiaires et de la déconjugalisation de l’aide, effective depuis le 1er octobre 2023. Je me réjouis d’ailleurs du succès de cette réforme, que j’ai défendue avec bon nombre d’entre vous : elle garantit aux bénéficiaires un gain moyen de 556 euros par mois, supérieur aux 370 euros initialement estimés.
Le programme 157 consacre aussi des crédits à favoriser l’emploi et l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Je salue l’engagement constant et précieux de Mme Le Nabour sur ces enjeux. Plusieurs évolutions importantes sont intervenues depuis 2017. Les travailleurs sortant d’établissement et service d’aide par le travail (Esat) bénéficient désormais d’un parcours renforcé en emploi, c’est-à-dire d’un accompagnement au long cours à caractère médico-social et professionnel. Depuis le 1er janvier 2023, les bénéficiaires de l’AAH peuvent travailler simultanément en Esat et en milieu ordinaire de travail, grâce à une modification du calcul de l’AAH qui encourage l’activité professionnelle. À partir du 1er décembre 2024, les travailleurs en situation de handicap continueront enfin de bénéficier de l’AAH 1 s’ils décident de poursuivre leur activité professionnelle après l’âge légal de départ en retraite.
Cette politique se traduit par une progression du taux d’activité et d’emploi des personnes en situation de handicap et par une baisse substantielle du taux de chômage. Ce dernier s’établit néanmoins à 12 %, un niveau significativement supérieur aux 7,3 % observés pour l’ensemble de la population active. Il nous faut donc maintenir notre action au service de l’emploi des personnes en situation de handicap. Le financement de l’aide au poste versée aux Esat au titre de la garantie de rémunération des travailleurs handicapés, dont bénéficient plus de 120 000 personnes, sera donc maintenu. Le but est d’accompagner l’évolution des Esat en poursuivant l’annualisation de cette aide ainsi que les travaux de refonte de leur système d’information, pour faciliter les demandes.
Les financements consacrés à l’emploi accompagné seront eux aussi préservés, à hauteur de 39 millions d’euros, après une hausse déjà de 15 millions en 2024. Cette stabilisation, combinée à une contribution du Fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique et de l’Agefiph, est essentielle pour poursuivre la dynamique en faveur de l’insertion durable dans le milieu ordinaire de travail. Près de 13 000 personnes seront accompagnées vers et dans le maintien dans l’emploi fin 2024 et la cible de 30 000 personnes à l’horizon 2027 est maintenue.
La lutte contre la maltraitance des personnes en situation de handicap comme des personnes âgées relève également du programme 157 et sera significativement renforcée, avec des crédits en hausse pour financer les mesures prévues par la stratégie nationale de lutte contre les maltraitances et la loi « bien‑vieillir » – facilitation des signalements, renforcement des contrôles dans les établissements, prévention des risques par un accompagnement des institutions et des professionnels. Des cellules de lutte contre les maltraitances, placées auprès des agences régionales de santé (ARS), seront installées pour recueillir et suivre le traitement des situations de maltraitance. Un système d’information permettant la centralisation et la circulation sécurisée des informations sera également financé. Enfin, dans une perspective d’efficience et de respect des règles en matière de marchés publics, je vous confirme qu’une plateforme nationale téléphonique contre les maltraitances sera créée, avec un nouveau numéro national.
Le programme 157 inclut par ailleurs des crédits moins souvent valorisés et pourtant essentiels, comme les subventions versées aux associations et fédérations nationales agissant en faveur des personnes en situation de handicap ou âgées et dépendantes. Je songe à l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques, à l’Association nationale des équipes contribuant à l’action médico-sociale précoce, ou encore aux associations Comme les autres et Hypersupers.
Il contribue également, conjointement avec le ministère de la culture, au soutien du portail national de l’édition accessible et adaptée, qui facilitera la vie quotidienne de millions de personnes en les aidant à trouver dans le commerce des ouvrages qui leur sont accessibles ou à s’en procurer une adaptation. Ces crédits témoignent de la volonté du Gouvernement d’agir en faveur d’une société plus inclusive.
Je conclus en soulignant notre engagement en faveur de l’accès aux soins pour les femmes en situation de handicap et de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, engagement qui s’est récemment traduit par la généralisation du dispositif Handigynéco voté à l’unanimité par l’Assemblée nationale lors de l’examen du PLFSS en séance publique.
Mme Salima Saa, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est avec fierté et responsabilité que je m’exprime pour la première fois devant cette commission en tant que secrétaire d’État d’un gouvernement dont le Premier ministre a souligné, lors de sa déclaration de politique générale, qu’il n’aurait aucune tolérance à l’égard des violences faites aux femmes.
Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, nous avons obtenu que le budget alloué au programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes augmente de 10 %, pour atteindre 85,1 millions d’euros.
J’ai annoncé dès ma nomination que je serai une secrétaire d’État de combats, avec le soutien du ministre Paul Christophe, et que j’y mettrai toute mon énergie. Il s’agit de combats de société, qui nécessitent une politique interministérielle forte et dans lesquels l’ensemble du Gouvernement est engagé.
Les moyens que l’État consacre aux droits des femmes et aux politiques d’égalité entre les femmes et les hommes dépassent très largement le seul programme 137. Pour 2025, le document de politique transversale qui leur est consacré les évalue à 5,78 milliards d’euros.
Dans ces combats, l’État peut compter sur la mobilisation constante d’un réseau dense d’associations, soutenues financièrement par le programme 137. Ce sont des partenaires indispensables dans tous les territoires, que je veux remercier. Nous continuerons à les accompagner.
Ma première priorité concerne la lutte contre toutes les violences faites aux femmes. Nous consacrons ainsi deux tiers des moyens du programme 137, soit 58,7 millions d’euros, à la prévention de toutes les formes de violence. Nous prenons en charge l’accompagnement des femmes qui en sont victimes, que ce soit dans la sphère privée comme dans l’espace public.
Nous poursuivons également notre soutien à des dispositifs qui ont fait leurs preuves. Parmi eux, les dispositifs nationaux d’écoute, d’information et d’orientation comme le 3919, pour lequel nous reconduisons notre contribution à hauteur de 5,3 millions d’euros. Je pense aussi aux structures locales d’accueil et d’accompagnement des femmes victimes : nous consacrons 3,6 millions aux accueils de jour et 5,9 millions aux lieux d’écoute, d’accueil et d’orientation. J’irai d’ailleurs demain à la rencontre des équipes du lieu d’écoute de Ris‑Orangis. Plus largement, je suis très attachée au développement des dispositifs d’aller vers qui s’adressent aux femmes en situation de vulnérabilité et d’isolement, notamment dans les territoires ruraux, les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou les outre-mer.
En 2025, nous accompagnerons la montée en charge de nouveaux dispositifs auxquels je crois beaucoup et qui sont déjà en train de prouver leur efficacité, comme l’aide universelle d’urgence. Celle-ci permet aux victimes attestant de violences conjugales de faire face aux dépenses immédiates en quittant leur conjoint violent. Plus de 26 000 femmes en ont déjà bénéficié entre décembre 2023 et juillet 2024, mais on sait que toutes les victimes n’y recourent pas encore. Compte tenu de son dynamisme, nous consacrerons 20,4 millions d’euros à cette aide, soit 7,4 millions de plus qu’en 2024.
Cette nouvelle aide est appelée à être intégré dans un dispositif plus large : le pack nouveau départ. Je me suis rendue dans le Val-d’Oise, où l’expérimentation est la plus avancée, et je compte bien me rendre dans les quatre autres départements pilotes. En tant qu’ancienne préfète, je sais que l’on peut attendre d’un tel dispositif une coordination sur le territoire. Je suivrai personnellement ces expérimentations et leur bilan, afin que nous puissions évaluer et généraliser le pack nouveau départ dans toute la France.
Par ailleurs, la première stratégie nationale de lutte contre le système prostitutionnel et l’exploitation sexuelle a été lancée le 2 mai 2024. Le Gouvernement lui consacre 3,3 millions d’euros. Il s’agit de répondre à la montée en charge des parcours de sortie de la prostitution proposés par les associations agréées. Le Gouvernement augmente également de 300 000 euros les moyens consacrés au financement de l’aide financière à l’insertion sociale et professionnelle. En outre, la lutte contre l’exploitation sexuelle des mineurs, qui est un axe à part entière de la nouvelle stratégie, bénéficie de 6,2 millions au sein du programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes. Ces moyens pérennes permettront de soutenir les associations et les collectivités, notamment pour assurer la protection des mineurs, les tenir éloignés des lieux d’exploitation et conforter un réseau national.
Tous ces dispositifs représentent des progrès évidents.
Tout n’est pas réglé pour autant, comme le montre l’actualité des dernières semaines. C’est pourquoi j’ai créé une cellule d’urgence qui réunit des experts de plusieurs disciplines, les associations, des professionnels de santé, des représentants des forces de l’ordre, des avocats et des magistrats pour apporter des solutions concrètes. Je présenterai les premières mesures le lundi 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
D’autres mesures suivront, qui tiendront notamment compte des propositions de Sandrine Josso, chargée par le Gouvernement d’une mission sur la lutte contre la soumission chimique. Je veux la remercier et je lui apporte tout mon soutien dans son combat. Je salue aussi l’adoption à l’unanimité, avec le soutien du Gouvernement, de son amendement au PLFSS qui prévoit d’expérimenter la prise en charge des tests pour détecter la soumission chimique même sans dépôt de plainte.
Ma deuxième priorité est d’atteindre l’égalité professionnelle et l’autonomie économique des femmes, mais aussi de mettre un terme à toutes les inégalités et les préjugés qui persistent dans notre société. Nous y consacrons 11,3 millions d’euros, dont 2,6 millions consacrés à l’insertion professionnelle des femmes les plus éloignées de l’emploi et plus particulièrement au soutien des bureaux d’accompagnement individualisé vers l’emploi ou encore des services emploi des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF).
Je souligne que 4 millions d’euros sont mobilisés pour favoriser la mixité des métiers et des orientations professionnelles et pour encourager l’entrepreneuriat au féminin. J’ai suivi des études scientifiques et j’ai travaillé dans l’industrie, où les femmes sont sous‑représentées. C’est pourquoi je serai plus particulièrement attentive aux actions innovantes, aux échelons national et territorial, visant à favoriser la mixité là où elle n’est pas suffisante – notamment pour les métiers de demain comme le numérique, l’intelligence artificielle, le cyber et la tech.
En ce qui concerne l’entrepreneuriat, l’année 2025 sera marquée par le renouvellement de l’accord-cadre national entre l’État et Bpifrance. Cet accord est décliné dans les territoires à travers les plans d’actions régionaux en faveur de l’entrepreneuriat des femmes. Pour cela, les crédits du programme 137 soutiennent la création ou la reprise d’entreprises et d’activités par les femmes, notamment dans les zones rurales. Entre 2021 et 2023, 80 000 femmes ont bénéficié d’un accompagnement.
Enfin, comme mes collègues, je tiens à insister sur mon ambition forte de consolider l’accès des femmes à leurs droits. En 2025, 13,5 millions d’euros sont prévus à cet effet.
L’égalité entre les femmes et les hommes est un combat de société. Au-delà de l’État et des associations, il nécessite l’engagement de toutes les Françaises et Français, de la société civile, des entreprises et des collectivités territoriales – et je sais combien elles y prennent part. Ce combat pour l’égalité a aussi besoin des parlementaires. Je connais votre mobilisation, votre connaissance des territoires, vos conseils précieux et je sais pouvoir compter sur vous.
Mme Christine Le Nabour, rapporteure pour avis. Le budget de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances a augmenté de 10 milliards d’euros depuis 2017, ce qui illustre le degré d’attention dont bénéficient ces politiques dans un contexte de redressement des comptes publics. Je me félicite de la hausse globale, à périmètre constant, des crédits alloués à la mission pour 2025. Ils s’élèvent ainsi à 30,37 milliards, sachant que le programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales a été absorbé par le programme 155 Soutien des ministères sociaux.
Après la hausse de 10 % enregistrée l’année dernière, les crédits du programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes sont quasiment stables. Seuls les crédits prévus pour la prime d’activité sont en baisse, toutes les autres actions du programme étant en hausse.
Le Gouvernement prévoit près de 12,5 milliards d’euros pour la prime d’activité. Celle‑ci joue un rôle central en matière d’incitation à l’emploi et de soutien du pouvoir d’achat. Elle est désormais perçue par près de 4 500 000 foyers, les mesures que nous avions votées à la suite du mouvement des « gilets jaunes » ayant conduit à presque doubler le nombre de bénéficiaires. La légère baisse des crédits prévus dans le PLF est liée à la mise en œuvre de la solidarité à la source, avancée majeure tant pour l’accès au droit que pour réduire les indus.
Le programme 304 finance aussi des dispositifs essentiels d’inclusion sociale, dont le pacte des solidarités, dont les crédits progressent pour la troisième année consécutive, de 23 % cette fois-ci. Il mobilise des crédits de la sécurité sociale et de plusieurs programmes de l’État, avec une forte participation des collectivités territoriales.
Ce pacte s’articule autour de quatre axes principaux.
Il vise d’abord la prévention de la pauvreté dès l’enfance, en finançant un fonds d’innovation pour la petite enfance, des petits déjeuners gratuits dans les écoles, outre-mer et dans les territoires les plus fragiles de l’Hexagone, ainsi que le Pass colo qui permet aux enfants de participer à des séjours, sous condition de ressources.
Le pacte soutient également la sortie de la pauvreté par l’emploi, avec des dispositifs comme Premières heures en chantier, destiné à faciliter l’insertion des personnes les plus éloignées du marché du travail. Afin de garantir l’accès aux droits essentiels, il finance l’expérimentation Territoires zéro non-recours dans trente-neuf territoires, le renforcement de la domiciliation et la lutte contre la précarité menstruelle. Enfin, il contribue à la transition écologique solidaire grâce à la tarification sociale des cantines et au programme Mieux manger pour tous, destiné à améliorer la qualité de l’offre d’aide alimentaire en proposant des produits plus sains et plus respectueux de l’environnement.
Le programme 304 prévoit également une augmentation de près de 2 % des crédits pour l’aide alimentaire, répondant ainsi à la croissance des besoins dont font part les associations. L’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables voit ses crédits augmenter de 21 %. Près de 420 millions d’euros sont ainsi alloués à la stratégie nationale de protection de l’enfance, qui englobe la prise en charge des MNA, le soutien aux unités d’accueil pédiatrique des enfants en danger, la prévention des sorties sèches de l’ASE, les revalorisations salariales et le financement du service public de la petite enfance, pour accompagner les communes.
J’en viens au programme 157 Handicap et dépendance, dont les crédits sont en hausse de 4 % et atteignent 16 milliards d’euros. Cette progression résulte principalement du dynamisme des dépenses relatives à l’AAH, qui constituent l’essentiel du programme. Nous avons revalorisé son montant, qui s’établit aujourd’hui à 1 016,5 euros par mois pour une personne sans enfant, contre 819 euros en octobre 2018. Elle bénéficie à 1 300 000 personnes.
Le programme 157 finance également l’aide au poste versée aux Esat, pour un total de 1,6 milliard d’euros, et l’emploi accompagné pour 38,5 millions. Enfin, il finance les mesures visant à lutter contre la maltraitance des personnes en situation de handicap et des personnes âgées, notamment grâce au numéro d’alerte 3977.
La mission comprend un troisième programme, le 137, consacré à l’égalité entre les femmes et les hommes, politique publique que nous avons érigée comme grande cause nationale. Le PLF y consacre 85 millions d’euros, soit une hausse de 10 %.
Ce programme repose sur deux piliers : l’accès aux droits et l’égalité professionnelle, d’abord, qui est doté de près de 25 millions d’euros permettant de soutenir les associations et finance les CIDFF, les espaces de vie affective, relationnelle et sexuelle, mais aussi des projets visant à garantir l’égalité professionnelle et à favoriser l’entrepreneuriat féminin ; et la lutte contre les violences faites aux femmes, dont les crédits permettent de soutenir des dispositifs pour aller vers les victimes, les accueillir et les mettre en sécurité.
Le programme 137 finance aussi l’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales. Elle a bénéficié à plus de 26 000 personnes entre décembre 2023 et juillet 2024 et ses crédits sont portés à 20,4 millions d’euros.
La partie thématique de mon avis porte sur l’insertion dans l’emploi des personnes en situation de handicap.
Les jeux Paralympiques de 2024 resteront dans l’histoire. Ils ont permis un changement à grande échelle du regard que la société porte sur les personnes en situation de handicap. Nous devons poursuivre dans cette voie pour lutter contre les stéréotypes et garantir une société pleinement inclusive.
À ce titre, l’emploi des personnes en situation de handicap constitue un enjeu majeur. Depuis 2017, on observe une baisse historique du taux de chômage de ces personnes, ramené de 17,6 % à 12 %.
Ces résultats sont le fruit de l’amélioration globale du marché du travail mais aussi des politiques publiques conduites par les gouvernements précédents. Ainsi, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a simplifié l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés et rendu obligatoires les référents handicap dans les entreprises de plus de 250 salariés. La loi « 3DS » a quant à elle cherché à favoriser l’insertion en milieu ordinaire. Plus récemment, la loi pour le plein emploi, dont j’ai été rapporteure avec M. le ministre, a érigé le principe d’orientation professionnelle en milieu ordinaire en droit universel et poursuivi les efforts pour la convergence des droits entre les travailleurs handicapés en milieu ordinaire et en Esat.
Malgré ces améliorations, nous ne pouvons pas nous satisfaire du fait que le taux de chômage reste deux fois plus élevé pour les personnes en situation de handicap. Trente‑sept ans après la loi du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés, le taux d’emploi direct des bénéficiaires de l’obligation d’emploi a atteint 5,66 % en 2023 dans la fonction publique et 3,5 % en 2022 dans le secteur privé, l’obligation étant de 6 %. Les discriminations à l’embauche demeurent. Le handicap reste le premier motif de discrimination dans les réclamations effectuées auprès du Défenseur des droits. Le chemin à parcourir pour rendre le monde du travail pleinement inclusif reste donc encore long.
Dans mon rapport, je formule plusieurs recommandations s’articulant autour de trois axes principaux.
Le premier concerne les efforts que nous devons produire pour rendre le milieu ordinaire plus inclusif. Pour cela, il nous incombe de renforcer les incitations à l’emploi, notamment en rendant possible le cumul entre l’AAH et les revenus d’activité au‑delà du mi‑temps. Nous devons également mieux garantir l’accès à la formation, y compris initiale, ce qui suppose de rendre l’école et les études supérieures véritablement inclusives.
Autre point essentiel, l’accompagnement des employeurs. Il faut rappeler que les entreprises de moins de 20 salariés ne sont pas soumises à l’obligation d’emploi et que celles de moins de 250 salariés n’ont pas l’obligation d’avoir un référent handicap. Or elles sont un vivier majeur d’emplois. Ces entreprises ont besoin d’être accompagnées pour déployer des politiques de ressources humaines inclusives. Les réseaux d’entreprises peuvent jouer un rôle déterminant – je pense par exemple à la communauté « Les entreprises s’engagent ». Il existe par ailleurs de nombreuses aides, notamment via l’Agefiph, qui peuvent encore gagner en efficacité et en lisibilité.
Pour atteindre l’objectif fixé lors de la dernière conférence nationale du handicap de 30 000 personnes accompagnées d’ici à 2027, il nous faut aussi développer l’emploi accompagné, grâce à des moyens financiers accrus et à une rénovation de sa gouvernance. La liste des catégories d’emplois exigeant des conditions d’aptitude particulière doit être revue. Établie en 1988, elle est aujourd’hui largement obsolète et contribue aux stéréotypes sur le handicap. Je souhaite qu’une nouvelle concertation s’engage en vue de sa révision.
Le deuxième axe concerne le soutien aux secteurs protégés et aux entreprises adaptées, que nous devons accompagner dans leurs efforts de transformation.
Les Esat jouent un rôle majeur en matière d’accompagnement social et d’insertion dans le monde professionnel pour près de 120 000 travailleurs handicapés. Le plan de transformation des Esat, lancé en 2021, reste compliqué à mettre en œuvre. Dans la continuité de ce plan, nous devons favoriser la montée en compétence et l’employabilité des travailleurs en Esat. La convergence des droits est essentielle, mais elle a de lourdes conséquences financières qui nécessitent un soutien renforcé de l’État. À ce titre, je souhaite que l’on réactive le fonds d’accompagnement de la transformation des Esat (Fatesat), qui s’est révélé très efficace pour soutenir leur modernisation.
Nous souhaitons encourager l’insertion en milieu ordinaire de travailleurs en Esat, qui ne concerne que 0,6 % d’entre eux. Pour cela, il faut développer les Esat hors les murs et préciser les modalités du parcours renforcé en emploi. Lors des auditions, les représentants d’associations ont insisté sur la nécessité de mettre en place un simulateur permettant aux travailleurs en Esat de calculer leurs ressources en cas de passage vers le milieu ordinaire. J’ai également noté les fortes inquiétudes des entreprises adaptées au sujet des conséquences de la réforme de l’obligation d’emploi. Les entreprises adaptées permettent à des personnes en situation de handicap d’accéder à l’emploi dans des conditions qui correspondent à leurs capacités. Nous devons les soutenir, favoriser le recours à la sous-traitance et actionner davantage le levier de la commande publique.
Mon troisième axe de réflexion concerne la simplification du parcours de l’usager.
La loi pour le plein emploi doit permettre des améliorations significatives en la matière, à condition que le réseau pour l’emploi soit pleinement en ordre de marche. Les bonnes pratiques observées sur nos territoires doivent nous inspirer. Je pense notamment à l’initiative Cap Jeune dans mon département, qui propose un accompagnement unique assurant la coordination entre les missions locales, les Cap emploi et France Travail.
En 2021, l’ONU a invité la France à se mettre en conformité avec la convention internationale des droits des personnes handicapées en respectant un modèle fondé sur les droits de l’homme. Elle a jugé le modèle français trop paternaliste, car il met l’accent sur l’incapacité des personnes handicapées et fait de l’institutionnalisation la norme. Les mesures prises depuis 2017, et en particulier celles de la loi pour le plein emploi de 2023, permettent un changement de paradigme. La commission des affaires sociales a décidé de confier à Sébastien Peytavie et moi‑même une mission afin d’évaluer la loi de 2005. Nous y sommes prêts. Alors poursuivons ensemble cette transformation vers un avenir où chacun, quelle que soit sa situation, trouvera pleinement sa place dans la société.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
Mme Christine Loir (RN). La mission Solidarité, insertion et égalité des chances est cruciale et nous nous demandons tous si le budget 2025 lui donnera les moyens de répondre pleinement aux besoins de nos concitoyens les plus vulnérables et les plus précaires.
Il est vrai que, contrairement à d’autres, cette mission bénéficie d’une augmentation – très légèrement inférieure à l’inflation, ses crédits passant de 29,9 milliards à 30,4 milliards d’euros. Loin de renforcer la capacité de soutien de la mission, cette hausse risque plutôt de diluer l’effet de ses actions. En d’autres termes, l’augmentation apparente des crédits est en fait un gel déguisé.
Les crédits consacrés à l’AAH, à la prime d’activité et au RSA augmentent de 500 millions d’euros pour tenir compte de l’inflation et de l’accroissement du nombre de bénéficiaires.
Si nous nous félicitons de la déconjugalisation de l’AAH, mesure qui figurait dans le programme présidentiel de Marine Le Pen, les personnes en situation de handicap continuent de se heurter à des obstacles majeurs en matière d’insertion professionnelle. L’aide est essentielle pour ceux qui en dépendent. Les chiffres montrent une réalité alarmante : 19,5 % des adultes handicapés vivent sous le seuil de pauvreté et leur niveau de vie médian est inférieur de 300 euros à celui des personnes valides. Par ailleurs, 12 % des personnes en situation de handicap sont au chômage, un taux qui reste beaucoup trop élevé.
L’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales, prévue par la loi du 28 février 2023, est un progrès indispensable. Elle consiste en une aide ou un prêt sans intérêts accordés dans les trois jours aux victimes par la caisse d’allocations familiales (CAF) ou la Mutualité sociale agricole (MSA). Encore faut-il garantir les moyens humains nécessaires : les CAF et les agences de la MSA, déjà surchargées, risquent de ne pas pouvoir respecter ce délai.
La dernière rentrée scolaire illustre une nouvelle fois les lacunes de l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Malgré les demandes formulées auprès des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), de nombreux enfants n’ont toujours pas d’accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH). Nous sommes tous interpellés dans nos circonscriptions par des familles désemparées. Ce matin encore, dans l’Eure, deux nouvelles familles ont signalé que l’accompagnement de leur enfant était compromis. Les délais de traitement des dossiers par les MDPH se sont encore allongés. Pour que l’école soit réellement inclusive, il est impératif de stabiliser puis d’augmenter le nombre de postes d’AESH et d’accompagner les formations.
Enfin, la lutte contre la pauvreté, notamment des enfants, demeure une priorité insuffisamment financée. La tarification sociale des cantines scolaires à 1 euro est un pas en avant, mais elle n’efface pas la précarité qui gangrène notre société. Je rappelle par ailleurs que nous avons voté pour le repas à 1 euro pour les étudiants les plus précaires.
Ce budget est présenté comme un soutien à la solidarité, mais il en reste au stade de l’intention. C’est un souffle froid, qui manque de corps, de cœur et d’ambition.
M. Jean-François Rousset (EPR). Je tiens tout d’abord à saluer le remarquable travail mené par Christine Le Nabour pour son rapport.
Le champ de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances est particulièrement vaste et elle finance de nombreuses mesures élaborées par la précédente majorité. Ainsi, le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes contribue à la mise en œuvre du pacte des solidarités de 2023 – qui succède à la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. On y trouve entre autres la tarification sociale appliquée aux cantines, les repas à 1 euro et la distribution de petits déjeuners gratuits pour les enfants issus de milieux défavorisés. Ce même programme finance le déploiement du service public de la petite enfance, notamment par le biais d’un accompagnement des communes autorités organisatrices de l’accueil du jeune enfant, afin de soutenir une dynamique de création de nouvelles solutions d’accueil.
Si le programme 157 Handicap et dépendance finance principalement l’AAH – déconjugalisée depuis 2023, à notre initiative – il couvre également les mesures de lutte contre la maltraitance des personnes âgées que nous avons votées dans le cadre de la loi « bien‑vieillir ».
Enfin les crédits du programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes financent les mesures prises à la suite du Grenelle des violences conjugales, dont la montée en puissance du pack nouveau départ lancé par la ministre Isabelle Rome en 2023. Celles et ceux d’entre nous qui siégeaient sous la XVIe législature se souviennent sans doute de l’adoption unanime par notre Assemblée de la proposition de loi créant une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales, qui constitue une composante importante de ce pack.
Cette énumération non exhaustive méritait d’être faite non seulement pour mettre en valeur l’importance de cette mission budgétaire, mais également pour rappeler à certains ici présents les nombreuses mesures sociales mises en œuvre depuis 2017 – celles-ci étant curieusement occultées dans de nombreuses déclarations des groupes d’opposition.
Malgré une légère diminution de l’enveloppe du programme 304, de l’ordre de 0,16 %, les crédits de la mission augmentent, avec une hausse de 4 % pour le programme 157 et de près de 10 % pour le programme 137.
Nous aurions voté en faveur des crédits de cette mission si elle avait été examinée demain matin en commission.
M. Elie Califer (SOC). La mission que nous examinons revêt une importance cruciale pour la cohésion sociale et républicaine. Solidarité, insertion, égalité des chances : ces mots sont porteurs de valeurs fortes. Toutefois le budget connaît une baisse de 22 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 104 millions en crédits de paiement, alors même que l’inflation fragilise davantage de foyers.
Si certaines actions bénéficient d’une légère hausse, celle-ci ne permet guère que de maintenir une situation précaire, sans ambition réelle de transformation des parcours de vie. L’aide alimentaire augmente de 1,95 %. Est-ce suffisant quand on sait que la demande d’aide alimentaire a bondi de près de 22 % en un an et que, depuis 2020, nous comptons 400 000 nouveaux demandeurs, de profils toujours plus divers ?
Il en est de même pour la protection de l’enfance. L’augmentation des crédits qu’elle connaît est en grande partie liée au transfert des responsabilités vers les collectivités territoriales, désormais chargées du service public de la petite enfance.
Quant à l’égalité entre les femmes et les hommes, désignée grande cause du quinquennat, ses crédits plafonnent à 85 millions d’euros, soit une somme insuffisante pour mener des actions préventives et promouvoir l’égalité réelle.
Les crédits destinés à l’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales augmentent de 56 %. C’est un pas dans la bonne direction, mais cela ne permet pas de s’attaquer aux causes profondes de ces violences, toujours plus nombreuses.
Vous avez affiché de grands desseins, mesdames et monsieur le ministre. Cependant, comptez-vous obtenir des moyens supplémentaires pour rendre la société plus inclusive ? Il y va de notre ambition républicaine et de solidarité.
Mme Justine Gruet (DR). Dans le contexte économique et social actuel, l’examen des crédits de cette mission était attendu par nos concitoyens. Nous regrettons de ne pouvoir défendre nos propositions par voie d’amendement, la partie « Recettes » du PLF 2025 ayant été rejetée en raison des hausses monumentales de taxes votées par certains groupes.
De manière générale, notre groupe se réjouit que les politiques concernant le handicap, la dépendance ou l’égalité entre les femmes et les hommes, qui sont essentielles, ne soient pas affectées par les baisses budgétaires. Ce budget traduit notamment la poursuite de la déconjugalisation de l’AAH, entrée en vigueur en octobre 2023.
Grâce à l’engagement des professionnels des entreprises adaptées et des Esat, le travail est mieux considéré et valorisé. Je participerai au DuoDay et vous invite à vous rendre dans ces établissements pour mieux comprendre leur fonctionnement.
Le PLF sanctuarise l’aide universelle d’urgence, qui permet aux femmes victimes de violences conjugales de faire face aux dépenses immédiates qui se présentent quand elles quittent leur domicile. C’est essentiel alors que, selon les derniers chiffres, 271 000 victimes de violences commises par le ou la partenaire ou ex-partenaire ont été enregistrées en 2023, soit 10 % de plus qu’en 2022.
Mieux protéger et mieux sensibiliser la société et la jeunesse quant à l’utilisation des réseaux sociaux est aussi un enjeu important.
Néanmoins, nous regrettons que la réforme de l’action publique soit bloquée. Nous devons notamment simplifier les procédures de renouvellement des prestations handicap auprès des MDPH ; moins d’administratif et plus de bon sens faciliteraient le quotidien des bénéficiaires.
Sur les questions de solidarité, je déplore qu’aucune piste de réflexion n’ait été envisagée quant à la création d’une allocation sociale unique plafonnée en fonction du Smic, même si ce sujet relève du PLFSS.
Notre groupe a à cœur de défendre le travail qui paye. Or la prime Ségur oublie encore de nombreuses catégories socioprofessionnelles et n’est pas toujours compensée. Les financements publics doivent en priorité valoriser la France qui travaille ou qui a travaillé toute sa vie, et non continuer à encourager l’assistanat. Dans notre contexte budgétaire difficile, nous avons déposé un amendement visant à geler la revalorisation du RSA en 2025. En outre, nous nous interrogeons sur la pertinence de certaines aides, comme l’allocation de rentrée scolaire ou la prime de fin d’année, allouées aux bénéficiaires d’allocations alors que certaines personnes qui travaillent n’y ont pas droit.
Enfin, si les mécanismes de retour vers l’emploi sont à saluer, nous mettons en garde contre les effets de bord d’autres dispositifs. Ainsi, un nombre croissant d’artisans ou de chefs d’entreprise font état de salariés refusant une augmentation de peur de perdre le bénéfice de la prime d’activité. Un travail doit être mené à ce sujet.
Vous pourrez compter sur notre groupe pour avancer sur ces sujets essentiels pour nos concitoyens.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). La hausse des crédits alloués à la solidarité ne couvre toujours pas les besoins. Ainsi, l’augmentation en trompe-l’œil de 4 % des crédits consacrés au handicap ne permet pas de répondre à la promesse d’insertion professionnelle en milieu ordinaire des personnes handicapées, qui devrait être la norme. Alors que l’Agefiph a dû suspendre le versement de plusieurs aides en raison d’imprévus budgétaires, le plafonnement de ses ressources dans le PLF est inacceptable. Les personnes handicapées, dont l’insertion professionnelle est l’enjeu crucial, n’ont pas à subir ces restrictions budgétaires.
L’aide à l’embauche pour les contrats de professionnalisation, limitée à 90 % du surcoût lié à la compensation du handicap, a chuté à 2 000 euros par personne. L’aide à la recherche et au maintien de l’emploi a tout bonnement été suspendue. Comment comptez‑vous y remédier ?
Par ailleurs, vingt ans après son adoption, la France respectera-t-elle enfin la loi du 11 février 2005 en allouant la prestation de compensation du handicap (PCH) aux personnes âgées de plus de 60 ans ? Aujourd’hui, une personne victime d’un accident vasculaire cérébral après 60 ans ne peut en bénéficier.
Le budget consacré à la concrétisation de l’égalité de genre est lui aussi insuffisant. L’absence de compensation financière de la prime Ségur oblige la Fédération nationale des CIDFF à lancer un fonds d’urgence pour aider les associations, qui sont en détresse financière. Avec un budget qui ne représente que 0,5 % de celui de l’État, l’ex-grande cause du quinquennat a bon dos ! Alors que les violences commises dans le cinéma, le sport ou l’église ne sont plus taboues et que résonne le combat de Gisèle Pelicot et de notre collègue Sandrine Josso contre les violences sexuelles commises sous soumission chimique, quand ce budget sera‑t‑il à la hauteur de la révolution féministe ?
Alors que seuls 1,5 million d’euros sont consacrés aux campagnes de prévention, la campagne massive réclamée par toutes les associations pourra-t-elle être lancée ? Reconnaissez-vous la nécessité de sensibiliser également la population aux violences par soumission chimique, dont les auteurs bénéficient encore d’une large impunité ?
Enfin, s’agissant de la solidarité envers les plus vulnérables, qu’envisagez-vous pour protéger la santé des enfants placés ? Généraliserez-vous l’expérimentation du dispositif Santé protégée, qui doit s’achever en fin d’année et qui prend en charge à 100 % le parcours de soins des enfants avec un suivi médical régulier et un accès à des soins psychiques précoces ? La santé et le bien-être des enfants placés seront-ils enfin une priorité du Gouvernement ?
M. Olivier Falorni (Dem). La question de la perte d’autonomie est une sorte de fil rouge entre vos ministères. Je souhaite aborder plus précisément l’adaptation de notre société au vieillissement de la population.
L’allongement de l’espérance de vie et la baisse de la natalité modifient profondément notre pyramide des âges. Les personnes de plus de 65 ans représentent déjà 22 % de la population française et leur part ne fait qu’augmenter, alors que le renouvellement des générations est moins dynamique que durant les dernières dizaines d’années. Dès 2030, les personnes de plus de 65 ans seront plus nombreuses que celles de moins de 20 ans.
Selon le rapport de la concertation grand âge et autonomie de Dominique Libault, remis en 2019, le nombre de personnes âgées en perte d’autonomie – les bénéficiaires de l’APA – doublera d’ici à 2050 pour atteindre 2,5 millions d’euros. Pour adapter notre société à la transition démographique et améliorer la reconnaissance de tous les handicaps, nous devons fournir divers efforts, en faveur, entre autres, de la préservation de l’autonomie, de l’adaptation à l’environnement, de la facilitation du maintien à domicile ou de la lutte contre l’isolement.
En notre qualité de législateur, nous avons le devoir d’empêcher que la vieillesse soit un naufrage, selon les mots du général de Gaulle. Le 8 avril dernier, le Parlement a adopté la loi « bien‑vieillir », qui prévoit de nombreuses dispositions allant dans le bon sens, notamment en matière de lutte contre l’isolement et les maltraitances, mais qui est insuffisante. Les difficultés structurelles sont nombreuses : moyens limités des départements pour les actions en faveur de l’autonomie, manque d’attractivité des métiers du soin, absence de programmation pluriannuelle des investissements pour faire face à la transition démographique... De quelle manière vous engagerez-vous pour adapter la société au vieillissement ? Nous soumettrez‑vous prochainement un projet de loi de programmation pour prévenir la perte d’autonomie ou un projet de loi relatif au grand âge ?
Enfin, j’appelle votre attention sur le fonctionnement des CIDFF, qui informent les femmes sur leurs droits et promeuvent une culture de l’égalité dans le cadre d’une convention de moyens et d’objectifs signée avec l’État. Chaque année, les équipes des 98 associations locales accompagnent et informent plus de 150 000 femmes sur leurs droits, dont plus de 60 000 qui sont victimes de violences. Dans mon département de la Charente-Maritime, vingt‑trois salariés interviennent auprès de 4 000 femmes ou hommes victimes de violence. Je me réjouis de l’extension de la prime Ségur aux salariés du secteur médico-social le 6 août dernier, mais comment sera compensée cette mesure, dont le coût pour ce CIDFF s’élève à 80 000 euros ? Alors que les violences conjugales n’ont jamais été aussi nombreuses, le soutien financier des pouvoirs publics est essentiel.
Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). Le budget de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, qui dépasse les 30 milliards d’euros, est stable. La part la plus importante est consacrée au financement de l’AAH et de la prime d’activité. Malgré l’absence de hausse des crédits, nous voterons en sa faveur : si l’État continuait de dépenser sans compter, ce sont les conditions de vie des plus fragiles qui se dégraderaient en premier.
Le programme 157 Handicap et dépendance finance les premières réformes voulues par l’Assemblée nationale, telles que la déconjugalisation de l’AAH.
Les 38,4 millions d’euros du programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes, en légère hausse, financent d’une part la prévention des violences sexistes et sexuelles, en particulier au sein du couple, avec des actions d’accueil, d’information, d’accompagnement et d’orientation des femmes victimes, et d’autre part la lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains. J’insiste toutefois sur la nécessité de créer un budget consacré spécifiquement à la lutte contre les violences faites aux femmes, notamment intrafamiliales, pour accompagner les victimes dans ce qui reste un parcours du combattant. Les collectivités locales et les associations ont besoin de l’État à leurs côtés.
Enfin, dans le programme 304, l’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables est dotée de 418,8 millions d’euros, en hausse de 21 %. Le pacte des solidarités 2023-2027, doté de 253,8 millions et en augmentation de 23 %, s’articule autour de quatre axes prioritaires : le renforcement du service public de la petite enfance, l’accès aux droits fondamentaux, l’accompagnement vers l’emploi des publics éloignés du marché du travail et le soutien aux travailleurs précaires. Pourriez-vous nous faire un point d’étape détaillant les avancées concrètes réalisées dans chacun de ces domaines ? Envisagez-vous des ajustements ou la poursuite des priorités fixées par le pacte ? Cela nous éclairerait pleinement sur l’orientation et l’ampleur de votre engagement en faveur des plus vulnérables.
M. Yannick Monnet (GDR). Il existe deux marchés du travail pour les personnes en situation de handicap : le marché ordinaire, où elles ont le statut de salarié et bénéficient de la protection du code du travail, et le marché protégé, où elles sont considérées comme des usagers du secteur médico-social et relèvent du code de l’action sociale. Néanmoins, le précédent gouvernement a rapproché les droits de ces travailleurs de ceux du milieu ouvert.
Pour que les nouveaux droits des travailleurs en Esat soient effectifs, les Esat ont besoin d’être soutenus par les pouvoirs publics. Or le programme 157 n’est pas doté, par exemple, de crédits supplémentaires pour le financement de la complémentaire santé des travailleurs. Notre rapporteure pour avis évoque un fonds spécifique pour venir en aide aux établissements en difficulté. Mais cette proposition à court terme, certes utile, ne saurait être la traduction d’une politique publique engagée aux côtés de ces établissements.
De nombreuses associations et syndicats s’interrogent sur la convergence des droits entre travailleurs en Esat et salariés, notamment au regard de leur rémunération et des droits attachés. Pourquoi ne pas créer un statut de salarié protégé, en accompagnant les Esat dans cette transition, plutôt que de les soumettre à un statut d’assimilé salarié, qui ne leur permet pas de bénéficier d’un salaire décent et de droits acquis grâce aux cotisations ?
On ne peut par ailleurs pas examiner les questions de l’insertion professionnelle et du maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap sans réfléchir au renforcement de la médecine du travail, qui souffre d’un manque de moyens et d’effectifs – en 2020, on dénombrait 4 800 médecins du travail pour plus de 29 millions d’actifs, dont 2,7 millions reconnus en situation de handicap. Le périmètre de ses missions doit également être revu afin qu’elle ait un véritable pouvoir sur les conditions de travail, qui fabriquent aussi du handicap. C’est une lacune de la loi pour le plein emploi, qui a systématisé l’orientation vers le marché du travail ordinaire sans renforcer la santé au travail et les obligations des employeurs en matière d’accessibilité et d’aménagement des postes de travail, ni prendre en compte l’environnement, notamment l’accessibilité des transports qui est un frein avéré à l’emploi. Le salariat ne peut être inclusif et synonyme d’autonomie que si, au préalable, les conditions de travail et d’emploi sont adaptées aux personnes en situation de handicap. Il s’agit d’une des limites des politiques publiques qui doivent favoriser leur insertion professionnelle.
Mme Salima Saa, secrétaire d’État. Chacun a noté l’augmentation de 10 % des crédits du programme 137. Un budget consacré à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et à la prévention contre les violences faites aux femmes n’est jamais suffisant, mais dans le contexte actuel, cette hausse est un effort consenti par Paul Christophe et par le Premier ministre.
Madame Colin-Oesterlé, plutôt que de créer un budget spécifique pour la lutte contre les violences faites aux femmes, je propose plutôt d’additionner les crédits des actions 25 Prévention et lutte contre les violences et la prostitution et 26 Aide universelle d’urgence pour les personnes victimes de violences conjugales : cela fait 58 millions d’euros consacrés aux femmes victimes. L’essentiel, me semble-t-il, est de financer le réseau territorial et national qui accompagne les victimes. À cet égard, l’augmentation de l’aide universelle d’urgence répond à une demande très forte des territoires.
Enfin, le budget de communication du programme 137 peut paraître insuffisant, mais il faut réaliser que chaque ministère dispose de crédits consacrés à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes : l’enveloppe globale dépasse les 5 milliards d’euros.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. S’agissant de l’emploi des personnes en situation de handicap d’abord, nous continuons à lutter pour changer le regard des employeurs et pour que les entreprises et le milieu ordinaire s’engagent en faveur d’une société plus inclusive. L’intégration des personnes en situation de handicap est encore trop vue comme une contrainte ou une difficulté. Or handicap rime avec performance, comme nos para‑athlètes l’ont démontré. Le DuoDay et la semaine européenne de l’emploi pour les personnes en situation de handicap qui arrivent permettent de valoriser la valeur ajoutée qu’elles apportent aux entreprises.
Pour les accompagner, nous devons soutenir les Esat. Mme Le Nabour a évoqué le Fatesat : en tout état de cause, nous devons réfléchir au moyen de soutenir les Esat dans leur démarche de transformation. Nous nous orientons vers des Esat hors les murs, qui puissent accompagner les personnes dans l’entreprise afin qu’elles intègrent progressivement le milieu ordinaire – certains Esat travaillent déjà dans cette logique. Par ailleurs, le PLF alloue des crédits aux mesures d’emploi accompagné et de soutien aux entreprises adaptées.
S’agissant du plafonnement des ressources de l’Agefiph prévu dans le PLF initial, le problème est résolu puisque l’amendement du groupe EPR visant à le faire disparaître est pleinement soutenu par Astrid Panosyan-Bouvet, Paul Christophe et moi-même. Mais de façon générale, compte tenu des difficultés conjoncturelles rencontrées par les entreprises, nous devons éviter d’alourdir la pression fiscale et les contraintes, qui pèsent en premier lieu sur l’emploi et les personnes en situation de handicap.
S’agissant de la médecine du travail et de la santé au travail, sujets qui me sont chers, la loi pour renforcer la prévention en santé au travail s’applique. Elle prévoit notamment la création de cellules de prévention de la désinsertion professionnelle pour favoriser le maintien dans l’emploi en prévenant l’usure professionnelle. J’invite les parlementaires à poursuivre le travail d’évaluation de l’application de ce texte que j’avais entamé.
Quant à l’école inclusive, certains enfants qui devraient en bénéficier manquent effectivement toujours d’un AESH. Nous sommes pourtant dans une logique de forte croissance des effectifs et de professionnalisation – mais qui va de pair avec la croissance des notifications des MDPH. Le PLF a prévu de recruter 2 000 AESH supplémentaires, mais ce n’est pas la seule réponse : le dispositif des 50 000 solutions permettra de faire entrer dans l’école des professionnels du milieu médico-social pour accompagner les enseignants et les enfants. C’est en construisant une école et une université plus inclusives que la société le deviendra davantage. Le PLF traduit notre pleine mobilisation sur ce sujet.
La simplification et la fluidification des procédures des MDPH doit se poursuivre. Cela se fait déjà dans le cadre de la feuille de route MDPH 2022, mais j’ai aussi chargé un membre de mon cabinet de piloter un groupe de travail pour aboutir à des améliorations significatives. Ce travail sera mené avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les professionnels des MDPH, qui proposent eux-mêmes des pistes d’amélioration.
L’adaptation de la société au vieillissement est une préoccupation importante pour les personnes en situation de handicap et leur famille. Là encore, le plan des 50 000 solutions finance des mesures en faveur d’une société plus inclusive, y compris pour les personnes handicapées qui vivent plus longtemps.
Enfin, je ne ferai pas d’annonces relatives à la PCH sans consulter au préalable les départements qui la financent.
M. Paul Christophe, ministre. Je commencerai par confirmer que le budget de la mission est en hausse : 4,2 %, ce n’est pas un « trompe-l’œil », c’est la simple réalité.
C’est vrai, monsieur Califer, beaucoup de nos actions se font en réparation – par exemple, l’aide universelle d’urgence. Nous avons beaucoup de progrès à faire sur la prévention et les questions d’égalité.
La lutte contre l’assistanat n’est pas un vœu pieux, madame Gruet. Le dispositif de préremplissage simplifie la procédure et assure un meilleur accès aux prestations – je l’ai vérifié vendredi dernier à la CAF de Pau. Désormais, les personnes qui ont subi un indu n’hésitent plus à revenir exercer leurs droits – leurs justes droits. Les indus ont sensiblement diminué et les discordances sont plus facilement identifiées, ce qui laisse plus de temps aux agents de la CAF pour se consacrer à leurs missions d’aller vers, par exemple en vérifiant pourquoi le bénéficiaire d’une prestation n’en perçoit pas une autre qui lui est normalement liée. Je pense à la mère d’une étudiante boursière qui était convaincue de n’avoir droit à rien, et à qui la CAF a appris qu’elle pouvait percevoir une aide au logement du centre régional des œuvres universitaires et scolaires.
Le dispositif Santé protégée, qui a été expérimenté dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018, fait l’objet d’une évaluation très favorable. Nous y croyons beaucoup et sommes en train de discuter avec les parties prenantes des conditions de sa généralisation.
S’agissant des CIDFF, la revalorisation a été décidée par les partenaires sociaux. Ces centres n’étant pas des établissements et services sociaux et médico-sociaux comme les autres, la décision n’emportait pas l’accompagnement financier de l’État. Je porte néanmoins une attention particulière à ces structures, qui présentent un grand intérêt dans le cadre de notre politique d’accompagnement des femmes victimes de violences. Je conduis donc une discussion interministérielle afin qu’une contribution financière soit apportée aux CIDFF dans le programme 137.
Enfin, madame Colin-Oesterlé, je vous confirme que le PLF accorde des moyens au pacte des solidarités, notamment dans les programmes 13, 14 et 23. Je ne m’interdis pas d’évaluer certaines actions pour vérifier qu’elles touchent leur cible, en m’appuyant sur vos travaux ; nous devrons travailler de manière collaborative. Je songe par exemple aux petits déjeuners gratuits, qui ont un intérêt en outre-mer mais moins en métropole, où ils peuvent conduire un même enfant à cumuler les repas du matin.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux questions des autres députés.
Mme Sylvie Bonnet (DR). La décentralisation a conféré aux conseils départementaux les compétences de la protection de l’enfance et de la prévention des difficultés familiales. Si l’on additionne les différentes compensations, l’État verse moins de 100 millions d’euros aux départements pour la prise en charge des MNA, soit environ 6 % de la charge totale, estimée à 1,5 milliard. Les dépenses de mise à l’abri et de prise en charge des MNA devraient être compensées aux départements à l’euro près, pour que ces jeunes soient accueillis et soutenus dans de bonnes conditions.
Le 25 juin dernier, un accord a été agréé par le Gouvernement pour étendre la prime Ségur aux professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif qui n’en avaient pas encore bénéficié. Nous convenons tous qu’il faut rendre les métiers médico-sociaux plus attractifs pour susciter des vocations, ce qui implique de revaloriser les salaires les plus bas. Toutefois, les départements ne peuvent en supporter la charge, estimée à 170 millions d’euros en année pleine. Prévoyez-vous une compensation intégrale par l’État de cette extension du Ségur ?
M. Thibault Bazin (DR). J’avoue ma déception à la lecture du budget pour 2025. J’attendais des changements en matière de politique familiale ; hélas, je n’y trouve rien ou presque pour soutenir les familles qui travaillent et qui ont des enfants à charge, hormis les dispositions déjà prévues, qui se concentrent sur les familles monoparentales. Celles-ci doivent bien sûr être aidées, mais n’oublions pas les autres familles, dont le pouvoir d’achat a baissé ces dernières années – le dernier rapport de la Cour des comptes le démontre. Ayant présidé une commission d’enquête sur la qualité de l’accueil en crèche, j’ai beaucoup de mesures à défendre. J’espère que votre gouvernement prendra le temps d’écouter nos recommandations. Heureusement, les territoires n’ont pas attendu le concept de service public de la petite enfance pour trouver des solutions. Les élus ont surtout besoin d’être mieux soutenus par la CAF.
Si nous ne redressons pas le modèle économique des établissements d’accueil du jeune enfant et que nous n’enrayons pas le déficit d’attractivité des métiers de la petite enfance, nous n’apporterons pas les réponses attendues – et l’ingénierie à l’échelle des établissements publics de coopération intercommunale n’y fera rien. Je tire la sonnette d’alarme : il y a urgence. La natalité a chuté, nous enregistrons 100 000 naissances de moins par an qu’il y a dix ans ; seuls 678 000 bébés sont nés en 2023 ; le taux de fécondité a chuté à 1,68, alors que le désir d’enfant par femme est de 2,3 en moyenne. Comptez-vous bâtir une politique familiale ambitieuse, à même d’assurer le renouvellement de la nation ? Le programme de Michel Barnier pour l’élection présidentielle de 2022 serait une excellente source d’inspiration en la matière.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Je reviendrai sur les mineurs isolés et les jeunes suivis par l’ASE. Nous pouvons tout d’abord regretter que la loi qui interdit de les héberger à l’hôtel ne soit pas pleinement appliquée. Certains départements ont eu l’heureuse initiative de créer un passeport santé pour assurer leur suivi médical, physique et psychologique. Est-il prévu de l’étendre ? Nous savons enfin que les jeunes de l’ASE sont exposés à la prostitution. Que comptez-vous faire pour les protéger ?
Par ailleurs, si beaucoup a heureusement été fait pour protéger les femmes victimes de violences intrafamiliales, le suivi des auteurs est insuffisant. Après la garde à vue, puis souvent la maison d’arrêt, il manque une prise en charge au niveau par exemple de l’hébergement, du logement ou encore de l’emploi.
Mme Annie Vidal (EPR). Le vieillissement de la population accroît les risques de perte d’autonomie et d’exposition aux maltraitances. Certes, les crédits alloués au programme 157 augmentent, mais les acteurs du grand âge traversent de profondes difficultés. La crise des vocations, le manque de personnel et les financements insuffisants renforcent le risque de maltraitance. Quels sont vos engagements dans ce domaine, en dehors des expérimentations qui ont été lancées dans le cadre de la LFSS 2024 et de la loi « bien‑vieillir » ?
M. Fabien Di Filippo (DR). Les revalorisations du Ségur de la santé ont été étendues au-delà des soignants, mais certains personnels en restent exclus, notamment ceux qui exercent des fonctions techniques ou de support dans le secteur médico-social. Dans deux établissements voisins, il arrive qu’un agent bénéficie du Ségur mais pas son homologue – et parfois aussi dans un même bureau ! Il y a là un vrai problème d’équité. Vous me répondrez que les revalorisations ont un coût, mais le Gouvernement dit vouloir revaloriser le travail. L’augmentation du RSA d’avril dernier a coûté 700 millions d’euros aux départements ; dans le cas présent, les revalorisations coûteraient 170 millions et bénéficieraient à des personnes qui exercent des fonctions essentielles pour le pays. Elles peuvent être financées, si nous faisons certains choix tranchés en matière de dépenses sociales.
Concernant la politique familiale, le débat ne devrait pas être de savoir qui, des crèches privées ou publiques, fait bien son travail, mais comment permettre aux mères qui veulent poursuivre leur carrière professionnelle d’obtenir plus facilement des places de garde.
Mme Josiane Corneloup (DR). Nous connaissons votre attachement au droit au répit, monsieur le ministre, et je voudrais appeler votre attention sur la situation des assistants familiaux. Le code de l’action sociale et des familles leur accorde un week-end de répit par mois, mais il leur est difficile d’en jouir faute de familles relais susceptibles d’accueillir les enfants pendant leur absence. Il serait plus pertinent de leur garantir quarante-huit heures de repos consécutif, sans nécessairement les fixer le samedi et le dimanche – et je dis bien garantir, car le code de l’action sociale et des familles prévoit que le contrat « peut » et non « doit » comporter un temps de répit. Il me semble essentiel de transformer cette possibilité en droit effectif pour tous les assistants familiaux.
M. Pierre Marle (HOR). Nombre d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sont en difficulté financière et ne peuvent réaliser des investissements pourtant nécessaires. Peut-on les aider, et envisagez‑vous de le faire ?
Mme Agnès Canayer, ministre déléguée. Plusieurs d’entre vous ont évoqué les MNA. Ils relèvent de la compétence des départements, qui disposent de dotations à ce titre. Le PLF contient aussi des crédits pour leur prise en charge : 101,3 millions d’euros pour 2025, au même niveau qu’en 2024, après une augmentation de 32 millions l’année précédente. Ces crédits se répartissent en 66,2 millions pour la mise à l’abri et l’évaluation de la minorité, et 35,1 millions au titre de la compensation financière de l’État pour les MNA confiés à l’ASE.
Vous l’avez souligné, monsieur Bazin, il y a un écart entre le désir d’enfant et le taux de natalité. Relancer la natalité, c’est avant tout sécuriser les parents et les aider à concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale. Telle sera la priorité du service public de la petite enfance, qui se déploiera dès janvier 2025 sous l’autorité des communes. Les besoins seront recensés localement afin de trouver des solutions adaptées aux territoires ; dans les zones rurales par exemple, qui connaissent les plus grandes difficultés, la solution passe par des structures de petite taille. Nous comptons sur l’engagement des élus en la matière. Cette nouvelle compétence des communes et des intercommunalités sera compensée à hauteur de 86 millions d’euros. La Cnaf accorde également des moyens importants au financement de places de crèche. À cela s’ajoutera un plan de lutte contre l’infertilité. Nous espérons que tout cela enrayera le déclin de la natalité.
La lutte contre la prostitution des mineurs se voit allouer 6,2 millions d’euros, destinés à la prévention ainsi qu’à la mise à l’abri et à l’accompagnement des jeunes.
Je partage votre préoccupation quant aux assistants familiaux, madame Corneloup. Cette profession manque d’attractivité et est exercée par un personnel vieillissant. Elle doit être revalorisée et davantage considérée – et pas seulement sur le plan salarial. Le droit au répit, en particulier, n’est pas appliqué partout de la même façon. Un comité de filière travaillera sur l’attractivité, la reconnaissance et les conditions d’exercice de ce métier.
M. Paul Christophe, ministre. S’agissant du Ségur de la santé, l’accord conclu entre les parties prenantes – y compris les départements – se chiffre à 600 millions d’euros. Il se décompose en 300 millions à la charge de la sécurité sociale – la somme a été provisionnée et mise à disposition des ARS –, 130 millions à la charge de l’État et 170 millions à la charge des départements. Le financement de l’État relève de plusieurs ministères, et nous faisons en sorte qu’il soit budgétisé pour 2025. Quant à la somme qui incombe aux départements, je note qu’elle équivaut peu ou prou aux 150 millions d’économies permises par le remplissage à la source des demandes de prime d’activité et de RSA.
Je porte une attention particulière aux départements, dont la situation financière est fragile. Nous nous efforçons de faire converger les compensations des aides aux personnes âgées et aux personnes handicapées, notamment dans le cadre des concours de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui seront bientôt au nombre de quatorze. Il faut assurer une plus grande équité des participations et des compensations financières.
Par ailleurs, un système d’information relatif aux maltraitances envers les personnes âgées ou en situation de handicap devrait être finalisé en 2025. Des crédits sont prévus à cet effet dans le programme 157.
Une enveloppe de 6,2 millions d’euros est quant à elle consacrée à la lutte contre la prostitution des mineurs.
Un travail de prévention et de lutte contre la récidive doit être mené auprès des auteurs de violences sur des femmes. Une autre piste intéressante est de veiller à ce que les femmes n’aient pas à quitter le domicile conjugal, mais plutôt l’époux violent.
En ce qui concerne les Ehpad, plusieurs axes de travail se dessinent. La fusion des sections tarifaires soins et dépendance, qui sera expérimentée dans vingt-trois départements volontaires, devrait dégager des marges de manœuvre. Des aides à l’investissement sont par ailleurs prévues. J’appelle de mes vœux une transformation de l’offre grâce à l’association de différents crédits : aide au répit, accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes, etc. J’invite les gestionnaires d’Ehpad à travailler de façon plus horizontale et à mutualiser des moyens, en matière d’ingénierie par exemple. Les Ehpad font face à des difficultés structurelles – il n’y a qu’à voir combien ils peinent à atteindre des taux de remplissage satisfaisants depuis la crise du covid et le scandale Orpea. Un travail plus fin doit être réalisé avec leurs gestionnaires.
M. le président Frédéric Valletoux. Merci pour toutes ces réponses, mesdames et monsieur les ministres.
La réunion s’achève à vingt-deux heures cinquante-cinq.
Présents. – M. Thibault Bazin, Mme Sylvie Bonnet, M. Elie Califer, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, Mme Josiane Corneloup, Mme Sophie Delorme, M. Fabien Di Filippo, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Olivier Falorni, M. François Gernigon, Mme Justine Gruet, M. Cyrille Isaac-Sibille, M. Michel Lauzzana, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, Mme Christine Loir, M. Pierre Marle, Mme Joséphine Missoffe, M. Christophe Mongardien, M. Yannick Monnet, M. Sébastien Peytavie, M. Jean-François Rousset, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal
Excusés – Mme Anchya Bamana, Mme Béatrice Bellay, Mme Karine Lebon, M. Yannick Neuder, M. Jean-Philippe Nilor, M. Laurent Panifous, M. Jean-Hugues Ratenon