Compte rendu
Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République
– Audition de M. Guillaume Kasbarian, ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique, sur la politique du gouvernement en matière de fonction publique et sur les crédits de la mission « Transformation et Fonction publiques » 2
– Examen pour avis et vote des crédits de la mission « Transformation et Fonction publiques » (M. Jiovanny William, rapporteur pour avis) 22
Mercredi
23 octobre 2024
Séance de 17 heures
Compte rendu n° 10
session ordinaire de 2024-2025
Présidence
de M. Florent Boudié, président
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La séance est ouverte à 17 heures.
Présidence de M. Florent Boudié, président.
La Commission auditionne M. Guillaume Kasbarian, ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique, sur la politique du gouvernement en matière de fonction publique et sur les crédits de la mission « Transformation et Fonction publiques ».
M. le président Florent Boudié. Monsieur le ministre, je vous invite à exposer les grandes lignes de votre action, particulièrement sur le plan budgétaire. Cette première audition depuis votre nomination sera également l’occasion de présenter les orientations du nouveau gouvernement en matière de fonction publique.
M. Guillaume Kasbarian, ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique. Je souhaite tout d’abord saluer le travail des 5,7 millions d’agents publics qui font la fierté de notre service public. Leur engagement, leur dévouement quotidien et leur sens du devoir méritent une reconnaissance particulière. J’adresse une pensée spéciale aux agents mobilisés ces derniers jours face aux intempéries dans certains territoires, ainsi qu’à ceux ayant subi des violences et agressions. Ils peuvent compter sur mon soutien indéfectible et sur celui du Gouvernement. Toute agression envers un agent public constitue une atteinte à la République.
Dans le contexte actuel, préserver nos services publics exige d’optimiser l’efficacité de la dépense publique. Mon objectif est ainsi que chaque euro prélevé soit judicieusement utilisé. Malgré les contraintes budgétaires, nous devons poursuivre des transformations ambitieuses avec des investissements visibles, améliorant concrètement le quotidien de nos citoyens. Notre ambition doit s’accompagner d’exemplarité, compte tenu de la situation budgétaire et du taux de prélèvements obligatoires qui s’élève à 43 % du PIB. Sans un effort collectif de réduction des dépenses de fonctionnement de l’État, toute demande d’efforts supplémentaires aux citoyens et entreprises serait inaudible, et les mesures ultérieures n’en seraient que plus drastiques. Chaque ministère doit donc contribuer à cet effort.
Les crédits de paiement de mon ministère ont ainsi été réduits de 407 millions d’euros, soit une baisse de 28 % du budget, sans pour autant que nous renoncions à notre ambition de transformation. Dans le détail, cet effort se répartit entre une diminution de 220 millions d’euros pour la mission « Transformation et fonctions publiques », de 137 millions d’euros au titre du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » et de 49 millions d’euros pour la Direction interministérielle du numérique (Dinum) dont les crédits sont intégralement rapatriés sur l’action 16 du programme 129 depuis le projet de loi de finances (PLF) 2025.
Cette réduction vise notamment à recentrer la Dinum sur sa mission première, qui est celle d’optimiser l’impact des projets numériques tout en réduisant leurs coûts de fonctionnement. Je rappelle à cet égard que la Cour des comptes a estimé à plus de 3,7 milliards d’euros en 2023 les coûts des grands projets numériques de l’État. Bien que ces actions soient essentielles pour adapter les administrations aux enjeux futurs, il est impératif d’en maîtriser les coûts et d’en garantir l’efficacité.
Ces efforts budgétaires nous amènent à réduire le périmètre du fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP) en nous concentrant sur la réalisation des projets actés en 2023. Je m’efforcerai néanmoins de pérenniser au maximum les engagements pris au titre du FTAP, afin de poursuivre la modernisation des traitements informatiques de l’État et d’en réduire les coûts de manière transparente et concrète.
Le programme 112, consacré à l’impulsion et à la coordination de la politique d’aménagement du territoire, renforce une politique concrète en faveur des services publics de proximité. Lancé en 2019 et copiloté avec Catherine Vautrin, il vise notamment le développement des maisons France Services. Nous allouons ainsi plus de 12 millions d’euros en PLF 2025 pour atteindre 68 millions d’euros, afin de poursuivre le maillage territorial et de permettre à chaque Français de disposer d’une maison France Services à moins de 20 minutes de chez lui. Au 1er octobre 2024, 2 753 maisons France Services ont été labellisées, et le Gouvernement tiendra son engagement en atteignant 2 800 structures labellisées d’ici fin 2025.
Au-delà des crédits de la mission, j’insiste sur notre responsabilité collective. Nous devons prendre conscience de la réalité économique de notre pays et opérer un changement radical dans la méthode et le pilotage des effectifs. Dès cette année, avec le soutien du Premier ministre, je souhaite ainsi mettre en œuvre un véritable programme de gestion prévisionnelle des compétences au sein de l’État. Pour garantir un service public de qualité et son efficacité à long terme, nous devons mieux anticiper nos besoins et définir nos objectifs futurs.
Dans un monde en constante mutation où les technologies évoluent rapidement, s’appuyer uniquement sur des stratégies réactives s’avère insatisfaisant et source de frustrations collectives. Nous devons nous assurer que nos outils et nos équipes sont prêts à relever les défis de demain, en adoptant une approche agile pour être plus efficaces et répondre à l’évolution de la société. Cet exercice permettra d’anticiper les besoins futurs des administrations publiques. À terme, la transformation de l’action publique nous permettra de dégager des leviers d’économie en réduisant nos effectifs et en redéployant les moyens humains et financiers là où se trouvent les réels besoins sur le terrain. Nous réaliserons des économies en mettant à profit des gains de productivité, en réduisant les situations de pénuries coûteuses et en adaptant nos objectifs aux attentes des citoyens et des usagers. Grâce à cette méthode de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, nous rendrons les services publics plus efficaces et moins onéreux.
Au-delà de l’aspect budgétaire et des questions d’efficience de la dépense, je souhaite m’engager fortement à améliorer l’attractivité des métiers de la fonction publique. Dès mon arrivée au ministère, j’ai rencontré chacune des organisations syndicales pour des échanges francs sur l’ensemble de mon portefeuille ministériel et sur la situation budgétaire du pays. À la suite de ces discussions, je leur ai proposé des pistes de réflexion pour élaborer un nouvel agenda social visant à améliorer le quotidien et les conditions de vie des agents. Je souhaite avancer concrètement sur ces sujets avec les différents ministères et les parlementaires volontaires dans les prochains mois.
Dans un contexte de marges de manœuvre budgétaire limitées, il est impératif de préserver l’attractivité de ces métiers. Je salue le travail de mon prédécesseur, Stanislas Guerini, dont je souhaite poursuivre les initiatives en collaboration avec les organisations syndicales et les parlementaires. Je propose notamment d’avancer collectivement sur des sujets essentiels tels que l’accès au logement des agents publics, en mettant en œuvre des mesures qui confortent l’investissement des employeurs publics. Je souhaite également renforcer la protection des agents publics contre les agressions et continuer de revaloriser certains métiers essentiels, tels que celui de secrétaire de mairie.
Dans le cadre de ma mission, je m’attacherai en outre à promouvoir les valeurs qui régissent le service public et à défendre les principes d’égalité, de neutralité et de laïcité, fondements de nos services publics.
Je souhaite enfin proposer à tous les Français et à notre administration une véritable cure de simplification. L’intitulé de mon ministère a évolué pour intégrer ce nouveau chantier, et je suis convaincu qu’il est possible et nécessaire de concilier simplification administrative et service public de qualité. Avec le Premier ministre, nous partageons une vision commune : faire mieux, avec moins de normes et moins de paperasserie. La simplification administrative constitue une réponse essentielle aux attentes légitimes de nos concitoyens, garantissant un accès équitable au service public pour tous.
Ce chantier, maintes fois évoqué par le passé, a considérablement progressé ces dernières années grâce à la loi Pacte, à la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (Asap), à la loi pour un État au service d’une société de confiance (Essoc) et à la loi industrie verte. Nous devons néanmoins poursuivre nos efforts.
La transformation numérique des services publics et le recours aux nouvelles technologies ont permis de réduire significativement le temps consacré par nos concitoyens aux démarches administratives. Le prélèvement à la source, le pré-remplissage des déclarations d’impôts, la possibilité de porter plainte en ligne, la réservation de créneaux en préfecture ou encore l’utilisation des identifiants France Connect ont généré des gains de temps considérables. Notre ambition est de reproduire ces succès dans tous les domaines où la paperasserie administrative demeure excessive.
Je m’engage à repenser le parcours des usagers pour les démarches les plus complexes et irritantes du quotidien des Français, afin de les simplifier drastiquement. Notre mission est d’améliorer la vie de nos concitoyens, et nous avons l’obligation d’apporter des résultats concrets, malgré nos éventuelles divergences sur les moyens à mettre en œuvre. Le projet de loi simplification, récemment adopté au Sénat, s’inscrit dans cette logique. La simplification représente un gisement majeur d’économies et de croissance, tandis que la complexité administrative grève notre compétitivité. Ce texte, que je souhaite voir rapidement inscrit à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée nationale, incarne un espoir pour le monde économique. Je salue à ce titre le travail d’Olivia Grégoire et de Bruno Le Maire, ainsi que la mobilisation de tous les acteurs, qui ont permis son adoption en première lecture au Sénat.
La simplification est un combat permanent qui implique un changement culturel radical et global. Je m’attacherai donc à réduire les contraintes réglementaires qui épuisent et exaspèrent nos concitoyens. Nous devons nous attaquer ensemble à la surtransposition des directives ainsi qu’à notre propension commune à élaborer des lois trop détaillées et à légiférer constamment sur des sujets identiques.
En concertation avec le Premier ministre, nous poursuivrons le travail d’élagage du paysage administratif engagé depuis 2017, en visant une réduction de 10 % du nombre d’opérateurs dans les années à venir. Je souhaite également supprimer autant que possible les comités Théodule.
En résumé, mon objectif est de poursuivre la débureaucratisation à tous les niveaux et de simplifier la vie des agents et des Français. Je suis convaincu de pouvoir compter sur le soutien d’une majorité d’entre vous pour avancer dans mon portefeuille ministériel.
M. Jiovanny William, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Dans le cadre de l’examen des crédits de la mission « Transformation et fonction publiques », je souhaite partager quelques observations sur le budget proposé. Cette mission regroupe les crédits destinés à accompagner la transformation de l’action de l’État et de ses opérateurs, avec pour objectif d’améliorer l’efficience et la qualité du service public. C’est la première fois que notre commission se saisit pour avis de l’ensemble de cette mission, ce qui est positif étant donné l’importance des enjeux liés à l’amélioration du service public, tant en France hexagonale qu’en outre-mer.
Je constate tout d’abord que ce projet manque globalement d’ambition. Les crédits diminuent fortement en raison de l’extinction progressive du plan de rénovation des cités administratives et du fonds de transformation de l’action publique, tandis que peu de nouvelles mesures sont prévues.
Je souhaite attirer votre attention sur trois points en particulier. Premièrement, l’année 2025 marquera le lancement du projet de foncière interministérielle de l’État. Cette structure nouvelle, juridiquement distincte de l’État, deviendra propriétaire de biens immobiliers de ce dernier. Les ministères et opérateurs devront lui verser un loyer, qu’elle réinvestira dans l’entretien et le développement des bâtiments. L’objectif de ce projet, qui sera d’abord expérimenté dans les régions Grand-Est et Normandie, est d’accélérer la transition écologique, de professionnaliser la gestion et de valoriser le patrimoine immobilier de l’État, avec pour but principal de réduire les surfaces occupées de 25 % d’ici dix ans. Cela soulève plusieurs questions : quel sera le devenir des locaux libérés ? Seront-ils systématiquement loués ou cédés à des tiers ? Ce projet concerne-t-il uniquement les bureaux ou inclut-il le logement des agents publics ? Quelles seront les conséquences sur l’organisation du travail de ces derniers ? Des dispositions spécifiques seront-elles prises pour tenir compte des réalités ultramarines, notamment en matière de sobriété énergétique, d’accessibilité et d’inclusivité ?
Deuxièmement, concernant la création de l’agence de conseil interne de l’État, annoncée à la suite des travaux de la commission d’enquête sénatoriale sur le recours aux cabinets de conseil privés et de la circulaire « Castex » de janvier 2022, je constate que sa progression est plus lente que prévu. Elle ne comptera ainsi que 55 équivalents temps plein travaillé (ETPT) à la fin de l’année, au lieu des 75 promis. Pouvez-vous expliquer cette moindre ambition ? Je note également que, bien que le recours aux cabinets de conseil privés ait diminué, certaines missions continuent de surprendre : dans les réponses écrites que j’ai reçues, j’ai relevé la trace d’une mission portant sur l’accompagnement à l’élaboration d’une feuille de route pour favoriser l’inscription sur les listes électorales : cela a coûté très cher !
Pour conclure sur une note positive, je me réjouis de la reconduction du budget des classes Prépas Talents et de l’ouverture de nouvelles classes entre 2024 et 2025, dont deux en outre-mer. Ce dispositif avait initié par le président François Hollande en 2014 à La Réunion, et a par la suite été diffusé dans l’Hexagone et en outre-mer. Il montre des résultats encourageants, même si des améliorations restent nécessaires pour renforcer son attractivité. Pour compléter le maillage territorial, que pensez-vous, monsieur le ministre, de la création d’une nouvelle classe Prépa Talents dans le Pacifique ?
Concernant la fonction publique en général, le projet de loi de finances 2025 n’est pas plus ambitieux. Aucune augmentation significative du traitement des agents publics n’est en effet prévue, et la suppression de la garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa) semble même être à l’étude, alors même qu’elle constitue un bouclier anti-inflation pour les agents publics. Selon les données disponibles, la Gipa a bénéficié à environ 200 000 agents en 2023, pour un coût total de 140 millions d’euros. Je souhaiterais donc obtenir des précisions sur vos intentions concernant l’avenir de ce dispositif.
Par ailleurs, le PLF prévoit la suppression d’approximativement 2 200 postes au sein de l’État et de ses opérateurs. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur les motivations concrètes de ces suppressions et, si possible, sur leur répartition entre la France métropolitaine et les territoires ultramarins ?
En outre, l’administration centrale et la Cour des comptes soulignent la nécessité de mieux soutenir et développer l’apprentissage au sein de la fonction publique. Quelle est votre vision de l’apprentissage dans ce secteur ?
J’aimerais enfin aborder les concours nationaux à affectation locale (CNAL), sujet central de mon rapport cette année. Ces concours, à mi-chemin entre les concours nationaux et les concours déconcentrés, apportent une transparence sur la localisation des affectations dès l’ouverture du concours. Ils facilitent le recrutement dans les zones moins attractives, tout en réduisant l’incertitude liée à la localisation des postes pour les candidats, limitant ainsi le risque de refus du bénéfice du concours.
Bien que ce dispositif existe depuis la loi du 6 août 2019 relative à la transformation de la fonction publique, son utilisation reste limitée. Nos travaux ont révélé que les CNAL demeurent sous-exploités, représentant à peine plus de 3 % des postes ouverts par concours. Leur usage se concentre principalement en Île-de-France, notamment pour les recrutements de gardiens de la paix et de surveillants pénitentiaires. Dans les outre-mer, Mayotte et la Guyane y ont davantage recours, particulièrement pour le concours de professeurs certifiés.
Je considère les CNAL comme un outil pertinent qui doit être utilisé avec discernement. Ils peuvent contribuer à résoudre certaines difficultés de recrutement, notamment dans les territoires ultramarins, et répondre à certaines aspirations. Des améliorations sont envisageables, comme accroître la visibilité du dispositif auprès des candidats par des actions de communication ciblées, ou élargir la liste des corps concernés, notamment aux attachés d’administration en lien avec les instituts régionaux d’administration. Monsieur le ministre, quel est votre avis sur ces propositions et, plus généralement, sur les CNAL ?
Je tiens enfin à préciser ma position avant le vote de ces crédits. Nous affrontons incontestablement une crise budgétaire majeure qui nous oblige à des efforts financiers. Il est toutefois hors de question que les contribuables français, de l’Hexagone ou d’outre-mer, en subissent les conséquences. Je reste convaincu qu’une gestion plus rigoureuse des finances aurait pu être menée ces dernières années. Dans l’attente d’éclaircissements sur ce dérapage budgétaire, j’entends, en ma qualité de rapporteur, agir avec responsabilité. Ainsi m’abstiendrai-je lors du vote afin que mon message soit sans ambiguïté : ressaisissez-vous !
M. Jordan Guitton (RN). Nous devons regarder les choses en face : renouer avec la croissance nécessite des réformes et la débureaucratisation s’avère essentielle pour mener une politique ambitieuse. Les propos du ministre font écho à la tribune de Jordan Bardella parue récemment dans Le Figaro, qui préconisait justement de débureaucratiser pour stimuler la croissance. L’État ne peut plus être celui qui étouffe l’initiative, bride la créativité et freine notre économie par des dépenses incontrôlées. Nous devons tout mettre en œuvre pour encourager les initiatives économiques. La croissance que nous souhaitons ne s’obtiendra pas sans volonté politique ni par de simples ajustements marginaux et nous devons mettre un terme aux gaspillages financiers qui minent la confiance des citoyens dans l’action publique.
Comment justifier, auprès de nos compatriotes, que des millions d’euros soient dilapidés pour des services externalisés, notamment auprès de cabinets privés, alors que notre fonction publique regorge de talents et de compétences déjà financés par nos impôts ? Depuis sept ans, les partisans d’Emmanuel Macron tiennent le même discours sur la simplification et les économies, sans que nous constations malheureusement de changements concrets. L’exemple flagrant du recours aux cabinets de conseil, pour plus de 2,5 milliards d’euros en 2021, illustre parfaitement ce manque d’ambition. Les Français subissent une double peine en payant à la fois pour des hauts fonctionnaires compétents et pour des cabinets privés.
Je n’oublie pas non plus les problématiques liées au ministère du renouveau démocratique, qui a financé pendant un an la tournée d’Olivier Véran dans les mairies RN sous couvert de mission ministérielle sans résultat électoral probant.
Une autre aberration réside dans le développement effréné de projets numériques coûteux et inutiles, avec des applications, plateformes et logiciels qui finissent aux oubliettes. Je pense notamment à l’application Agora qui doit être supprimée. Au sein de la direction interministérielle de la transformation publique, l’application Pilote, initialement développée par Capgemini puis reprise par l’administration, a coûté 3,58 millions d’euros selon la Cour des comptes. De nombreux Français s’interrogent aujourd’hui sur l’utilisation de leur argent et ont l’impression de payer des impôts élevés sans en percevoir les bénéfices. En sept ans de Macronie, la bureaucratie s’est accrue au détriment des services publics. Il est temps d’affirmer que l’argent public appartient aux Français et que chaque euro doit être investi judicieusement sans alimenter une machine administrative toujours plus coûteuse et inefficace. Comment expliquer qu’un médecin hospitalier consacre désormais 30 % de son temps aux tâches administratives contre 10 % il y a vingt ans ? Dans son contre-budget, le groupe Rassemblement National propose de réduire le train de vie de l’État de 630 millions d’euros. Nous suggérons également diminuer le budget des agences de l’État de 3,4 milliards d’euros, de réinternaliser certaines missions des opérateurs publics et d’harmoniser les jours de carence entre le public et le privé.
La gestion des finances publiques n’est pas qu’une question comptable, c’est un enjeu moral. Nos concitoyens méritent que chaque euro soit utilisé à bon escient. Il en va du consentement à l’impôt et de la réconciliation entre les citoyens, campagne et ville, public et privé. Malheureusement, le compte n’y est pas.
Monsieur le ministre, comptez-vous réintroduire intégralement la réforme de la fonction publique proposée par M. Guerini, y compris ses dispositions les plus controversées ? Envisagez-vous des adaptations lors du dépôt au Parlement ?
Le Rassemblement National propose de débureaucratiser en instaurant une règle d’or, notamment dans la santé et l’éducation nationale, d’un maximum de 10 % de postes administratifs.
M. Guillaume Gouffier Valente (EPR). Je souhaite tout d’abord, au nom du groupe EPR, saluer les 5,7 millions d’agents de la fonction publique des trois versants qui œuvrent quotidiennement pour notre République et nos concitoyens. J’adresse une pensée particulière à ceux mobilisés lors des intempéries dans les outre-mer, ainsi qu’à ceux qui ont contribué au succès des Jeux olympiques et paralympiques. Je salue également tous ceux qui ont su répondre présents lors des différentes crises que nous avons traversées ces dernières années.
Depuis 2017, nous sommes engagés dans la modernisation de notre fonction publique. Cela implique d’améliorer la construction des carrières et la reconnaissance du mérite, de favoriser la mobilité entre les trois versants, de réformer la déontologie et de renforcer l’égalité femmes-hommes dans l’évolution professionnelle.
Une réforme de l’État était en préparation avant la dissolution, dans la continuité de celle menée par Olivier Dussopt en 2019. Monsieur le ministre, quels éléments de ce projet envisagez-vous de reprendre ? Où en sommes-nous et quels sont les points de négociation pour la reprise de cette discussion ? Cette réforme est-elle perçue différemment selon les versants de la fonction publique ? Par ailleurs, envisagez-vous des travaux sur la modernisation des concours de la fonction publique dans le cadre de cette réforme ?
Concernant l’accès au service public, nous avons récemment débattu de la proposition de loi de Danièle Obono, qui soulignait la nécessité d’améliorer à la fois l’accès physique et numérique. Quelle sera votre approche pour poursuivre ce déploiement ?
Sur le plan budgétaire, vous avez évoqué la possible suppression de la garantie de pouvoir d’achat des fonctionnaires. Pouvez-vous préciser le devenir de cette garantie, particulièrement importante pour les fonctionnaires aux revenus les plus modestes ? Quelles assurances pouvons-nous leur apporter ?
Des annonces ont été effectuées concernant une réduction du nombre d’agents publics, associée à un discours sur la débureaucratisation. Cela a suscité des inquiétudes, rappelant le souvenir de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et des réductions d’effectifs peu ciblées. Pouvez-vous expliciter la philosophie qui guidera votre politique d’attractivité et d’emploi ?
Enfin, concernant l’attractivité et la qualité de vie des agents de la fonction publique, notamment l’accès au logement, pouvez-vous nous informer de la reprise des discussions avec votre homologue du logement et des pistes de réflexion envisagées ?
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Je ne peux plus supporter les discours creux et les expressions vagues sur l’adaptation continue au terrain et la création de synergies avec les territoires. Ces propos masquent un contenu politique concret, notamment à travers l’action de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) : celle-ci vise à démanteler progressivement l’État tel que nous le connaissons et le statut de la fonction publique, pour se rapprocher du fonctionnement du secteur privé, selon les principes de la nouvelle gestion publique.
Vous tentez même de vous positionner au-delà de cette nouvelle gestion publique en cherchant des palliatifs à ses échecs, car les actions de la DITP se sont soldées par une série de fiascos : la dématérialisation des cartes grises, cartes d’identité et passeports, la réorganisation de l’administration territoriale de l’État avec des secrétariats généraux communs inefficaces, ou encore la réduction des effectifs dans les préfectures. Cette dernière mesure, dogmatique, a d’ailleurs entraîné un recours accru aux contrats courts, plus onéreux, comme l’a souligné la Cour des comptes en 2021.
Face à ce bilan, je me demande s’il ne faudrait pas supprimer totalement les crédits de la DITP, dans l’intérêt de l’État, de l’administration, des fonctionnaires et de l’intérêt général… Vous avez certes internalisé les cabinets de conseil, en nommant un ancien employé de McKinsey à la tête de la DITP et en recrutant d’autres consultants, mais cela ne résout pas le problème de fond.
Votre objectif n’est pas de répondre aux besoins des citoyens mais de rationaliser la dépense publique pour continuer à favoriser les plus aisés. L’exemple de France Services est révélateur : vous vous félicitez d’une enveloppe de 68 millions d’euros, mais cela ne représente que 24 000 euros apportés par l’État par structure, loin de l’engagement initial de 50 000 euros. Le reste est à la charge des collectivités territoriales, auxquelles vous imposez par ailleurs des coupes budgétaires considérables.
Il est exaspérant de vous voir vous enorgueillir d’un bilan désastreux pour les usagers des services publics et qui entraîne une augmentation de l’épuisement professionnel. Quand vous évoquez l’attractivité de la fonction publique, vous omettez systématiquement la question de la rémunération, alors même que vous supprimez unilatéralement la garantie individuelle de pouvoir d’achat.
Enfin, concernant la formation dans les instituts régionaux d’administration, vous revenez à une durée intermédiaire entre un an et six mois, sans admettre l’erreur du passage à six mois. J’appelle à une formation solide des cadres intermédiaires de l’État, essentielle pour son bon fonctionnement.
M. Marc Pena (SOC). La mission transformation et fonctions publiques, que nous examinons, pourrait être ironiquement renommée mission « Start-up nation » tant elle regorge de bonnes intentions apparentes rédigées dans le jargon du management moderne.
Il convient de rappeler que cette mission ne représente qu’une infime part du budget de l’État, à peine 0,13 %. Cette faible proportion soulève une première question de forme : ainsi constituée, elle devrait plutôt être intégrée comme programme d’une autre mission. La Cour des comptes a d’ailleurs déjà critiqué l’instabilité de son périmètre. Ces 0,13 % visent à « optimiser l’efficacité opérationnelle de l’administration en optimisant les moyens financiers et humains alloués, tout en améliorant la qualité du service rendu aux usagers ». Ces formulations sont révélatrices de la novlangue administrative et constituent deux affirmations qui se contredisent. Pour le dire plus clairement : on ne fait pas mieux avec moins.
Cette approche n’est pas surprenante car, depuis 2017, les ambitions du Gouvernement pour la fonction publique se résument à deux axes : réduction des moyens et contrôle bureaucratique. Or, la transformation de l’État ne se décrète pas à coups de slogans, de formules creuses ou de conformité idéologique. Derrière les promesses de transformation et d’efficience se cache une logique de rationalisation qui construit un pouvoir bureaucratique autoritaire au sommet, tout en affaiblissant continuellement les agents du service public à la base, au détriment de l’égalité entre les citoyens.
Deux exemples illustrent ce propos. Tout d’abord, comment interpréter l’augmentation quasi inexistante des crédits alloués à la formation des fonctionnaires, après une réduction de 54 % l’an dernier ? Comment comprendre la diminution de 34 % des crédits destinés aux travaux de transition énergétique des bâtiments publics, face à l’objectif affiché de réduire l’empreinte énergétique des services de l’État, alors que nous partons déjà de montants dérisoires ?
Il est essentiel de rappeler que la fonction publique n’est pas une entreprise et ne doit pas être gérée comme telle. Les véritables enjeux sont l’amélioration des conditions de travail des agents de l’État et le rétablissement du lien de confiance entre l’État et les citoyens. Cette mission pourrait s’en occuper, mais elle ne propose rien. Pire encore, vous réduisez ces crédits de 27 %.
En conclusion, vous nous égarez dans des effets de langage pour masquer l’austérité imposée au budget de l’État. Le groupe socialiste s’en inquiète et appelle à davantage de sérieux, à une véritable réforme de la fonction publique, guidée par des principes radicalement différents, axés sur le service public et la reconnaissance du travail des agents.
M. Philippe Gosselin (DR). Je souhaite partager quelques réflexions sur la modernisation de l’action publique, dont France Services constitue un élément important mais non exclusif. Il convient de trouver un juste équilibre dans le financement de ce dispositif, afin d’éviter qu’il ne repose uniquement sur les collectivités. Des progrès ont été réalisés, mais des améliorations restent possibles.
L’optimisation des ressources humaines et financières ainsi que l’amélioration de l’efficacité des services de l’État sont des attentes légitimes de nos concitoyens et contribuables. La question sous-jacente est celle du rapport qualité-prix du service public. Cette préoccupation n’est pas nouvelle puisque diverses initiatives ont jalonné l’histoire administrative française, à l’image de la rationalisation des choix budgétaires dans les années 1960 ou du renouveau du service public sous Michel Rocard. Aujourd’hui plus que jamais, l’évaluation des politiques publiques s’impose comme une nécessité. Comment maintenir, voire améliorer la qualité des services avec des moyens constants ou en légère diminution ? Cette question souligne l’importance croissante de l’évaluation, qui fait d’ailleurs partie intégrante de nos fonctions de parlementaires, comme le prévoit l’article 24 de la Constitution.
Ma première question porte donc sur votre stratégie, et plus largement celle de l’État, en matière d’évaluation des politiques publiques.
Deuxièmement, concernant la réduction des dotations du fonds de transformation de l’action publique, pouvez-vous préciser vos priorités dans ce contexte de restrictions budgétaires ? Quels projets risquent d’être impactés ou reportés ? Un calendrier prévisionnel est-il disponible ?
Enfin, ces coupes budgétaires substantielles ne risquent-elles pas de freiner la transformation publique et potentiellement d’affecter la compétitivité du secteur public par rapport au privé, notamment en termes d’attractivité des talents ? Bien que le service public bénéficie de l’engagement de grands serviteurs de l’État, le secteur privé dispose de moyens différents pour attirer les compétences. Ne craignez-vous pas que ce ralentissement puisse nuire à cette attractivité ?
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Monsieur le ministre, la fonction publique traverse une crise profonde. Les fonctionnaires et agents publics expriment leur inquiétude face à la dégradation de leurs conditions de travail et à la dévalorisation constante de leur statut. Cette situation affecte également les usagers, dont 70 % constatent une détérioration de la qualité du service public, malgré une image globalement positive des agents.
Votre budget et vos déclarations laissent pourtant présager une aggravation de la situation. Votre feuille de route, axée sur la simplification à tous les niveaux, la suppression de postes, la fusion des services et la facilitation des licenciements, s’appuie sur des restrictions budgétaires sans précédent. Vous prévoyez ainsi la suppression de 2 200 postes dans la fonction publique, avec des coupes significatives dans l’éducation nationale – 2 000 postes – et le ministère du travail – 1 000 postes dont 500 pour France Travail. Ces réductions drastiques nuiront inévitablement à la qualité du service public.
Votre discours sur la débureaucratisation masque en réalité des coupes budgétaires sévères. Vous stigmatisez des services prétendument inutiles, dont on réalise l’importance une fois supprimés. L’attractivité des métiers de la fonction publique est gravement menacée. Les difficultés de recrutement touchent aussi bien les petites communes que l’État et les grandes collectivités, avec parfois près de 10 % de postes vacants.
Le rapport annuel 2022 sur l’état de la fonction publique révèle une baisse alarmante du nombre moyen de candidats par poste ouvert, passant de 16 en 1997 à seulement 6 aujourd’hui. On constate une diminution de 45 % des inscrits au concours des professeurs des écoles en seulement quatre ans et une baisse de 22 % des inscrits au concours externe de la fonction publique entre 2021 et 2022. Près de 40 % des employeurs territoriaux rencontrent des difficultés de recrutement, ce chiffre atteignant presque 99 % dans la fonction publique hospitalière.
Ces difficultés entraînent une augmentation du nombre de postes non pourvus et une baisse de la sélectivité. Depuis dix ans, la part des contractuels dans la fonction publique a augmenté, atteignant aujourd’hui plus de 22 %, au détriment des fonctionnaires. Il est pourtant difficile de distinguer la performance d’un fonctionnaire de celle d’un contractuel dans l’exercice de leurs missions.
Monsieur le ministre, dégrader davantage les conditions d’emploi dans la fonction publique est contre-productif et en décalage avec les problématiques évoquées. Nous vous exhortons à rompre avec ces politiques austéritaires inefficaces. Il est urgent d’organiser une conférence sur le financement des services publics et de réunir tous les acteurs pour aborder les enjeux essentiels.
L’amélioration des conditions de travail et l’octroi de moyens adéquats aux fonctionnaires renforceront l’attractivité de la fonction publique, contrairement aux critiques incessantes et aux réductions budgétaires. De même une rémunération juste est-elle indispensable pour maintenir l’attrait des métiers publics. Dans le contexte inflationniste actuel, la rémunération des agents a décroché. L’augmentation dérisoire de 6 centimes accordée à 230 000 agents publics le 1er novembre pour éviter que leur rémunération ne soit inférieure au Smic est loin d’être suffisante.
Monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous pour améliorer les conditions de travail dans la fonction publique, revaloriser les rémunérations et renforcer l’attractivité de ces métiers ?
M. Éric Martineau (Dem). Monsieur le ministre, votre objectif de simplifier la vie des agents et des usagers en rendant les services publics plus accessibles et efficaces apparaît clairement dans votre feuille de route.
Dans une interview donnée ce matin, vous avez souligné l’importance d’adapter les effectifs et les perspectives de recrutement à l’évolution démographique des usagers de nos services publics. Cette démarche permettrait en effet de réduire l’écart entre les moyens alloués à l’action publique et l’évolution des besoins sociaux. Face à des services publics répondant de moins en moins aux attentes des usagers, une offre privée lucrative de prise en charge s’est développée. Que ce soit dans les écoles, les établissements de santé ou les structures d’hébergement pour personnes âgées, ces services privés se caractérisent par un coût supérieur à celui des services publics et une absence d’accueil inconditionnel. Aussi, comment envisagez-vous d’adapter nos services publics aux évolutions démographiques actuelles ?
Il y a quelques semaines, nous avons eu le plaisir de vous accueillir dans la Sarthe pour échanger avec les agents publics de la préfecture, de la maison départementale de l’autonomie, du centre hospitalier du Mans et d’une maison France Services. Je constate le succès des maisons France Services dans le département, qui rapprochent les citoyens des services absents en mairie. Elles offrent un accueil physique rassurant pour les usagers et contribuent à lutter contre le sentiment d’éloignement et de déclassement. Leur mission n’est pas d’effectuer toutes les démarches administratives à la place des usagers, mais de les aider à devenir autonomes avec un ordinateur. Ce point essentiel répond aux problèmes d’illectronisme très présents sur nos territoires.
Dans un rapport publié le 4 septembre dernier, la Cour des comptes souligne que le programme France Services est parvenu depuis 2020 à proposer une offre accrue de démarches et une qualité de service homogène. Le rapport met néanmoins en évidence l’absence de feuille de route pour les années à venir. La pérennisation du réseau nécessite, selon elle, une évolution de la répartition de son financement et des efforts de communication supplémentaires pour atteindre les populations les plus éloignées. Quelles mesures prévoyez-vous pour développer davantage ce programme, dont le succès est indéniable, et pour pérenniser l’action des conseillers au service des usagers ?
Je souhaite également aborder les difficultés des parcours de vie et la complexité des démarches administratives, notamment pour les personnes en situation de handicap. Je suis frappé par les inégalités liées au versement de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), qui varient d’un département à l’autre. J’ai été confronté à un cas dans ma circonscription : un citoyen qui percevait l’AAH de la part de la maison départementale pour les personnes handicapées (MDPH) d’Indre-et-Loire s’est vu refuser cette allocation par la maison départementale de l’autonomie de la Sarthe. Comment expliquer cette différence de traitement entre départements pour un même dossier ? Quelles solutions envisagez-vous pour accompagner au mieux les citoyens en situation de handicap et leur garantir l’accès aux aides dont ils ont besoin ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je remercie le ministre pour sa présence et son exposé sur sa feuille de route et les enjeux budgétaires et m’associe aux remerciements adressés à l’ensemble des agents des fonctions publiques pour leur engagement quotidien.
Le groupe Horizons et Indépendants prend acte de la diminution notable du budget alloué à cette mission, tout en relativisant cette baisse par le transfert du programme 352 Innovations et transformations numériques vers le programme 129 Coordination du travail gouvernemental relevant des services du Premier ministre. Compte tenu de la situation financière de notre pays, nous soutiendrons l’équilibre défendu par le Premier ministre. Le débat sur les hausses d’impôt ne doit pas nous conduire à occulter la nécessité de réduire la dépense publique, d’optimiser le fonctionnement de l’État et d’améliorer l’efficacité avec des moyens réduits.
Les choix budgétaires de cette mission démontrent une volonté responsable de faire contribuer l’État à la réduction des dépenses tout en maintenant l’effort envers les investissements durables. Le budget dédié à la transition énergétique des bâtiments demeure ainsi le principal poste de dépenses de cette mission. La rénovation énergétique du parc immobilier de l’État, des établissements publics et des collectivités territoriales s’avère indispensable. Avec 380 millions de mètres carrés, soit 37 % du parc tertiaire national, l’État et les collectivités locales portent une responsabilité particulière dans ce domaine et se doivent d’être exemplaires. La performance du parc immobilier public constitue un enjeu stratégique pour le service public, et nous saluons à ce titre l’achèvement prévu de la rénovation des 36 cités administratives en 2025.
Nous soutenons d’autre part les priorités visant à améliorer l’accès au service public et à simplifier les relations entre l’État et les usagers. Il est essentiel de préserver les différents guichets tels que France Services, France Expérimentation et France Simplification.
Concernant la simplification, que vous qualifiez de « gisement majeur d’économies », nous partageons votre analyse selon laquelle la complexité engendre des coûts superflus. Si le projet de loi examiné au Sénat se concentre principalement sur la simplification des procédures pour les entreprises, quelles sont vos perspectives pour la simplification dans la fonction publique ? Quels leviers principaux envisagez-vous pour améliorer l’efficacité de notre fonction publique ?
Vous avez également évoqué votre volonté de rationaliser le paysage des agences et opérateurs de l’État, avec une réduction de 10 % sur les quatre prochaines années. Nous estimons qu’une réflexion et une évaluation précises doivent être menées sur l’ensemble des agences de l’État. Nous sommes, tout comme vous, convaincus de notre capacité à améliorer l’efficacité avec des moyens réduits. Néanmoins, ces simplifications ne doivent pas entraîner une dégradation de la qualité des services publics. Ceux-ci demeurent essentiels et je tiens à saluer, au nom des députés du groupe Horizons et Indépendants, l’engagement et le travail des agents publics au service de notre pays et de nos concitoyens.
M. Paul Molac (LIOT). Si les infirmiers, aides-soignants, professeurs, gendarmes, policiers et secrétaires de mairie sont indispensables à notre société, nous constatons néanmoins une paupérisation générale de la fonction publique. Les revalorisations de 2022 et 2023 ont à peine compensé l’inflation, entraînant une baisse globale du pouvoir d’achat.
Nous avons également souligné la diminution des services publics due au désengagement de l’État. La mise en place de France Services était nécessaire, bien que certains citoyens n’aient pas immédiatement saisi l’utilité de ce dispositif. Il est primordial de les orienter vers ces structures. Sans l’implication des collectivités locales, la situation serait encore plus problématique.
Concernant la bureaucratisation, nous partageons votre point de vue sur la nécessité d’alléger la réglementation. Cependant, cette simplification ne relève pas uniquement de la compétence ministérielle. Ces dernières années, de nombreuses lois votées relevaient davantage du domaine réglementaire. Pour réduire efficacement la bureaucratie, il faudrait que ceux qui élaborent la réglementation soient également chargés de l’appliquer. Lorsqu’ils constateront les pertes de temps et d’argent engendrées par des procédures superflues, ils seront plus enclins à simplifier. Cette simplification devrait principalement s’opérer au niveau des collectivités locales car force est de constater que l’application de la loi varie déjà d’une préfecture à l’autre. Le Parlement conserverait son rôle de contrôle et d’harmonisation si nécessaire. La loi devrait se concentrer sur les grands principes sans entrer dans les détails.
En conclusion, l’allègement de la réglementation représente un défi majeur. La complexité administrative actuelle entrave le fonctionnement de notre système et génère des tensions avec nos concitoyens, même pour des démarches simples. Ces irritants alimentent le ressentiment envers l’administration.
Mme Émeline K/Bidi (GDR). Je tiens à exprimer les préoccupations du groupe GDR concernant votre volonté de « débureaucratiser à tous les étages », annoncée dès votre prise de fonction le 23 septembre dernier. Cette déclaration a suscité l’inquiétude des syndicats, qui s’interrogent sur la signification concrète de cette démarche.
Vous présentez un budget en baisse significative de 13 % en autorisations d’engagement et de 27 % en crédits de paiement qui soulève une question fondamentale : comment améliorer l’efficacité de l’action de l’État et la qualité des services aux usagers avec des moyens réduits ?
Tous les secteurs des services publics, qu’il s’agisse de l’enseignement, de la justice, de la santé, du système pénitentiaire, ou de la police, nous alertent quotidiennement sur le manque de personnel. Comment assurer des soins de qualité sans personnels soignants en nombre suffisant ? Comment garantir une surveillance adéquate des prisons sans effectifs suffisants de surveillants pénitentiaires ? Comment dispenser un enseignement de qualité avec un manque d’enseignants ? Votre budget ne semble pas apporter de réponse à ces questions pressantes.
Si le recrutement n’est pas augmenté, voire si les effectifs de la fonction publique sont réduits, est-il réellement envisageable d’améliorer les performances avec moins de moyens ? Si le problème se limitait à la bureaucratisation excessive, à la multiplication des procédures et des paperasseries, nous pourrions envisager de vous suivre, mais la difficulté réside également dans le manque d’attractivité de la fonction publique.
La pénurie de personnels dans certains secteurs s’explique par le manque de candidats aux concours, notamment en raison de conditions de travail dégradées et insuffisamment valorisées. Lorsque la rémunération à l’issue d’un concours de la fonction publique est inférieure à celle du secteur privé, et que s’y ajoutent des pressions administratives pour accroître la productivité avec moins de moyens, il n’est pas surprenant que l’on soit contraint de recruter des enseignants contractuels de niveau baccalauréat, là où un niveau master serait nécessaire.
La dématérialisation excessive pose également question. Censée générer des économies, elle aboutit en réalité à une déshumanisation de la fonction publique, engendrant une perte de confiance des usagers et, bien souvent, un manque d’efficacité. Il semble paradoxal de poursuivre la dématérialisation tout en prônant la débureaucratisation. Nous nous interrogeons donc : comment relancer l’attractivité de la fonction publique sans revaloriser les salaires des agents ? Comment remettre l’humain au cœur de notre service public en remplaçant le personnel par des machines et des algorithmes ?
En définitive, êtes-vous réellement convaincu par le budget que vous nous présentez, ou tentez-vous simplement de faire passer des mesures d’austérité sous couvert de bon sens, en laissant croire qu’une réduction des crédits améliorera nécessairement l’efficience de la fonction publique ? Vous comprendrez que nous sommes particulièrement préoccupés par cette situation.
Mme Sophie Vaginay (UDR). Les positions de notre groupe se veulent objectives et dictées par le seul intérêt général, conformément au sérieux et à l’esprit de responsabilité qui nous animent face à la situation dramatique dont a hérité votre gouvernement. Je fais référence à l’explosion de la dette publique, avec 1 000 milliards d’euros supplémentaires en sept ans de gestion macroniste, nous plaçant à la merci d’un revirement des agences de notation et des intérêts étrangers détenteurs de notre dette publique.
Il est donc impératif de réduire drastiquement notre dépense publique. Nous saluons l’effort réalisé dans votre périmètre, avec une baisse d’un quart des crédits de paiement par rapport à 2024, soit 407 millions d’euros, atténuée par le transfert de certains crédits. Cela reste néanmoins insuffisant face à l’ampleur de la dette.
Afin d’offrir de réelles perspectives, il serait nécessaire d’entreprendre des réformes structurelles ambitieuses du statut de la fonction publique, actuellement trop rigide, inadapté et peu attractif pour les jeunes diplômés. Il conviendrait également de remettre en question l’emploi à vie, de créer des passerelles entre le public et le privé, de valoriser les compétences, d’offrir des opportunités d’avancement et de sanctionner les insuffisances professionnelles. Ces mesures doivent être mises en œuvre rapidement pour retrouver des marges de manœuvre budgétaires sur la gestion des ressources humaines.
Le statut actuel de la fonction publique restreint la capacité de l’État à adapter ses effectifs et donc ses dépenses. Avec une masse salariale représentant la part majeure des dépenses publiques, des réformes structurelles s’imposent, tant pour maîtriser les coûts que pour améliorer l’efficacité des services rendus. Ces réformes sont essentielles pour moderniser l’administration, la rendre plus flexible, plus efficace et davantage en adéquation avec les réalités économiques et sociales actuelles.
En conclusion, bien que vous soyez sur la bonne voie, un effort supplémentaire s’impose pour incarner le sérieux budgétaire et gouvernemental et engager une véritable réforme du statut de la fonction publique. L’UDR ne s’opposera pas à votre proposition de réduction du budget de votre périmètre ministériel, qui témoigne d’un réel effort budgétaire indispensable dans le contexte actuel.
M. Sacha Houlié (NI). Monsieur le ministre, mes interrogations portent sur trois aspects.
Je m’inquiète tout d’abord d’avoir entendu le Rassemblement national vous féliciter pour votre volonté de développer les services publics avec moins de fonctionnaires. Cette approche ne me paraît pas judicieuse, particulièrement si vous partagez cette vision avec M. Bardella. Je m’inquiète également de l’a direction prise par l’évolution des effectifs de fonctionnaires. Nous avons examiné hier plusieurs missions dans cette commission, notamment la mission « Sécurités », qui prévoyait un schéma d’emploi nul pour les gendarmes et les policiers, alors que nous avions voté une loi de programmation prévoyant le recrutement d’au moins 8 000 agents supplémentaires. Vous venez de qualifier de « démarche salutaire » la suppression de 4 000 postes d’enseignants, ce qui me surprend. Je m’étonne aussi que vous trouviez encourageant que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) n’augmente pas suffisamment pour recruter davantage de fonctionnaires dans nos hôpitaux, et que la loi de programmation pour la justice ne soit pas respectée, entraînant un déficit de 1 300 postes par rapport à ce que nous avions voté. J’aimerais comprendre comment vous comptez améliorer les services avec moins de moyens.
Deuxièmement, concernant la réforme de la fonction publique, certaines propositions étaient novatrices et intéressantes, comme la suppression des catégories pour regrouper les fonctionnaires selon leurs métiers. Envisagez-vous de maintenir cette idée ? D’autres propositions semblaient plus aventurières, telles que le licenciement ou la rémunération au mérite. Que comptez-vous faire de ces dispositions préparées par votre prédécesseur ?
Enfin, vous avez exprimé votre intention de réduire les « comités Théodule ». Pourriez-vous préciser lesquels ? S’agit-il de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), qui protège nos libertés fondamentales, de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada), qui garantit notre accès aux documents administratifs, de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), chargée de la régulation audiovisuelle, de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), à laquelle nous venons de confier une nouvelle mission, du Défenseur des droits, ou encore du Contrôleur général des lieux de privation de liberté ? Pourriez-vous nous donner des exemples concrets de comités que vous envisagez de supprimer ?
Mme Monique Griseti (RN). Monsieur le ministre, au cours des interventions qui ont suivi votre nomination, vous avez évoqué l’intelligence artificielle comme un outil novateur permettant de simplifier les démarches administratives des usagers et d’améliorer la qualité du service public. Cette orientation se reflète dans le projet de loi de finances pour l’exercice 2025. Vous justifiez cet investissement dans l’IA en mettant en avant l’optimisation du temps de réponse opérationnel de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et la mise en place d’un chatbot nommé Albert dans les maisons France Services, utile aussi bien aux usagers qu’aux fonctionnaires. De surcroît, le budget 2025 prévoit une allocation de 22,45 millions d’euros à la direction interministérielle de la transformation publique, chargée de mettre en œuvre l’innovation dans le secteur public.
Bien que la volonté de transformer la fonction publique soit louable et nécessite effectivement un investissement de la part de l’État, il convient de ne pas précipiter les choses en se focalisant uniquement sur les ambitions technologiques. L’amélioration de l’accès au service public et du traitement des demandes des usagers doit certes s’inscrire dans une démarche de modernité, intégrant les nouvelles technologies, mais il ne faut pas oublier qu’une partie des citoyens de la République ne maîtrise pas ces outils ou se trouve en situation de fracture numérique. Selon l’Insee, cette fracture concerne en effet 17 % des Français, soit plus de 11 millions de personnes, principalement localisées dans les zones rurales du territoire.
Aussi, quels projets concrets envisagez-vous pour réduire cet écart et ne pas marginaliser cette partie de la population qui risque de rencontrer des difficultés à s’adapter aux diverses transformations que vous souhaitez mettre en place ?
Mme Béatrice Roullaud (RN). Monsieur le ministre, lors de la passation de pouvoir avec votre prédécesseur Stanislas Guerini, vous avez affirmé notre devoir de libérer les Français du fardeau des démarches administratives en débureaucratisant à tous les étages. Vous avez souligné que cette simplification ne devait en aucun cas compromettre la qualité du service public, votre objectif déclaré étant de faciliter la vie des citoyens et des agents publics.
Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par « débureaucratiser » et « simplifier » ? Quelle forme de simplification envisagez-vous ? Si votre projet consiste à supprimer des obligations déclaratives ou à réduire le millefeuille administratif, nous y adhérons pleinement. En revanche, si l’intention est d’automatiser à outrance certains services publics, nous émettons des réserves.
Une préoccupation croissante se fait jour au sein de la population concernant l’automatisation et l’introduction de l’intelligence artificielle dans certains services publics. Bien que l’IA puisse effectivement simplifier et accélérer certaines tâches, elle soulève également la crainte de voir des emplois supprimés, notamment dans les secteurs où l’intervention humaine demeure essentielle. Quelles garanties pouvez-vous offrir aux citoyens pour éviter que l’automatisation ne s’opère au détriment de l’humain ?
Enfin, pourriez-vous nous indiquer quelles dispositions du projet de loi pour l’efficacité de la fonction publique de Monsieur Stanislas Guerini vous comptez reprendre ?
Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Le groupe La France insoumise estime qu’il est impératif de gouverner par les besoins, qu’il convient d’identifier pour y allouer les ressources appropriées, en les prélevant là où elles se trouvent. Vous ne partagez manifestement pas cette approche puisque, le 21 octobre dernier, vous déclariez que nous devions améliorer notre efficacité avec moins de moyens, tout en affirmant qu’il n’était pas envisageable de réduire la qualité du service public. Pourtant, depuis trois décennies, sous couvert d’avancées technologiques et de gains d’efficience, toutes les réformes entreprises – conventions d’objectifs de gestion, révision générale des politiques publiques, réforme de l’administration territoriale de l’État, modernisation de l’action publique – n’ont abouti qu’à des réductions d’effectifs et à une détérioration des services publics. La proportion de fonctionnaires dans l’emploi total a diminué, passant de près de 16 % en 2006 à 14 % en 2021.
Votre politique s’inscrit dans la continuité de celles qui ont orchestré ce démantèlement, avec des budgets en baisse, une recherche constante de performance et une réduction des effectifs. Les conséquences sont désastreuses, tant pour les agents que pour les usagers. L’enquête du collectif Nos Services Publics sur la perte de sens chez les agents du service public, réalisée en 2021, a révélé que les principaux problèmes évoqués par les fonctionnaires étaient le manque de moyens à 63 %, la perte de sens et de mission à 54 % et les mauvaises conditions de travail à 41 %. En parallèle, les usagers des services publics se sentent abandonnés, comme en témoignent les 92 % de réclamations reçues par le Défenseur des droits en 2023 sur ce sujet. En 2021, cette autorité constatait que les politiques de modernisation et de transformation publiques, souvent conçues sous l’angle de l’optimisation et de la simplification, ont indéniablement affecté l’accès aux droits de tous les citoyens. Ce constat a été confirmé lors du dernier test de plateforme téléphonique, puisque 40 % des appels n’ont pas abouti et que le temps d’attente moyen pour obtenir un interlocuteur dépassait les 9 minutes.
Monsieur le ministre, à combien évaluez-vous, en termes humains et financiers, le coût de trente années de démantèlement de la fonction publique ? Quand envisagez-vous enfin de modifier votre approche politique ?
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous constatons une diminution de 7 % des crédits de paiement et de 92 % des autorisations d’engagement sur l’action 14 relative à la résilience des bâtiments. Cette réduction intervient dans un contexte où nous subissons collectivement les effets du changement climatique, nécessitant des investissements conséquents dans nos infrastructures. Selon les prévisions budgétaires actuelles, moins de 1 % de ces bâtiments bénéficieraient d’une rénovation complète, sur un parc de plus de 192 000 bâtiments représentant une surface totale de 94 millions de mètres carrés. Face à l’objectif affiché d’aider le pays à s’adapter au réchauffement climatique, pouvez-vous expliquer les raisons de cette baisse budgétaire et préciser les mesures envisagées pour y remédier ?
M. Guillaume Kasbarian, ministre. Concernant les cabinets de conseil, l’État fait preuve d’une totale transparence sur ses dépenses en la matière. Un rapport est remis annuellement au Parlement, le dernier ayant été publié avant-hier. Avant la création d’une agence de conseil interne en 2024, des actions avaient déjà été entreprises. Ainsi, entre 2021 et 2022, les commandes aux cabinets de conseil ont été réduites pour passer de 271 millions d’euros à 80 millions d’euros. Nous avons suivi les recommandations des rapports parlementaires préconisant la création d’une agence de conseil puisque la DITP intègre aujourd’hui des effectifs pour mener ces missions de conseil. Nous disposons actuellement de 55 consultants, ce qui permet de réaliser des économies en réinternalisant certaines missions. Il convient de clarifier nos objectifs : souhaitons-nous réinternaliser ou poursuivre l’externalisation ? J’ai entendu M. Bernalicis critiquer l’internalisation des missions de conseil mais nous ne pouvons pas mener les deux approches simultanément.
Concernant les prépas Talents, nous disposions, à la rentrée 2024, de 100 classes offrant 1 984 places. Pour les outre-mer, nous en avons ouvert deux à Mayotte et en Guyane, en plus de celles existant déjà en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion. Nous allons faire un bilan de ces classes. J’entends votre demande d’une ouverture nouvelle, M. le rapporteur : je vous propose que nous en reparlions avec mes équipes après l’évaluation du dispositif.
Concernant la validation des acquis de l’expérience (VAE), elle peut effectivement être utilisée pour intégrer la fonction publique. De nombreux titres professionnels dans la base France VAE permettent de rejoindre la fonction publique, notamment territoriale et hospitalière. La VAE permet également de progresser dans la carrière. Nous souhaitons développer davantage cette solution, qui reste encore sous-exploitée selon la Cour des comptes.
Concernant la foncière d’État, lancée le 29 février dernier par M. Thomas Cazenave, elle vise à optimiser 94 millions de mètres carrés bâtis, dont 23 millions de mètres carrés de bureaux. Un rapport d’information de 2023 réalisé par Mme Véronique Louwagie et M. Robin Réda, députés, a estimé un gain potentiel de 3 milliards d’euros. Le secrétariat général des ministères sociaux affirme qu’au mieux 60 % des agents sont présents en même temps, avec une moyenne de 50 %. Nous poursuivrons donc cette démarche.
Je suis en outre favorable aux concours nationaux à affectation locale, qui répondent aux difficultés de recrutement dans certaines zones géographiques. Il faut garder à l’esprit la nécessaire mobilité tout au long de la carrière. Une réflexion sera lancée pour les IRA et potentiellement l’Institut national du service public (INSP) : je m’y engage devant vous suite à votre interpellation, M. le rapporteur.
Quant à l’emploi dans les outre-mer, le PLF 2025 prévoit une réduction de 2 000 ETP au niveau national. Pour les outre-mer spécifiquement, nous observons une diminution de 35 ETP au titre du service militaire adapté, mais le nombre de stagiaires reste inchangé. Le titre 2 du programme 138 augmente de près de 1 %. Globalement, l’effectif d’emploi public ultramarin devrait rester stable, à l’exception des 35 postes du service militaire adapté.
Je tiens également à préciser que mon action en matière de débureaucratisation a débuté bien avant la tribune de M. Jordan Bardella. J’ai en effet porté la loi d’accélération et de simplification de l’action publique du 7 décembre 2020, qui contient des mesures de simplification et des suppressions de comités, ainsi que la loi industrie verte. J’ai utilisé le terme « débureaucratisation » dès ma prise de fonction au ministère et n’ai donc pas attendu la tribune de M. Jordan Bardella pour agir. Le RN a l’habitude de s’approprier des initiatives, comme ce fut le cas pour ma loi anti-squat que nous avions votée et portée ensemble, monsieur Houlié, lorsque nous appartenions à la même majorité. Le RN l’a soutenue par la suite, mais ne l’a pas créée. Revendiquons donc les acquis et les chantiers que nous avons mis en œuvre lors de la précédente législature.
MM. Bernalicis et Guitton proposent la suppression de la DITP, ce qui me semble paradoxal puisqu’elle inclut l’agence de conseil interne préconisée par les parlementaires pour internaliser des prestations auparavant externalisées. Comment poursuivre cette internalisation, recommandée par les parlementaires, si nous supprimons l’entité qui en est chargée ? Cela entraînerait une hausse de l’externalisation des missions de conseil, ce qui serait plus coûteux pour les finances publiques. La DITP évalue par ailleurs précisément les politiques publiques et les priorités gouvernementales aux niveaux national, départemental et local. Elle joue un rôle moteur dans l’évaluation de l’efficacité de l’action gouvernementale, y compris sur les territoires. Elle a également contribué à des succès notables comme la plainte en ligne, la dématérialisation du renouvellement des passeports et des améliorations dans le domaine fiscal. Je vous exhorte donc à ne pas supprimer la DITP, essentielle à la transformation de l’action publique.
Monsieur Gouffier Valente, vous avez évoqué la réforme de la haute fonction publique initiée par mon prédécesseur. J’ai indiqué aux syndicats que toutes les options restaient ouvertes et que je souhaitais reprendre la concertation sur les différents aspects du projet de loi. Certaines mesures sont controversées, comme la question des catégories, la rémunération au mérite ou le licenciement pour insuffisance. D’autres volets sont davantage consensuels, comme l’amélioration de l’accès au logement social pour les fonctionnaires ou le renforcement de la protection fonctionnelle. Je souhaite conserver cette ambition réformatrice tout en poursuivant la concertation avec les syndicats. Nous verrons quelle solution sera finalement retenue : une reprise totale, partielle ou par blocs du projet initial, un projet ou une proposition de loi Je ne peux me prononcer définitivement sur les choix qui seront faits, car je souhaite respecter le dialogue social et la concertation que j’entends mener avec les syndicats. J’ai donc inscrit cette question à l’agenda social en laissant toutes les options ouvertes.
Quant à la Gipa, je rappelle qu’elle avait été créée en 2008 pour une durée initiale de deux ans, et qu’il n’avait alors pas été question prévoir un dispositif pérenne. En 2023, son coût s’est élevé à 146 millions d’euros. Son mode de calcul s’est révélé insatisfaisant, bénéficiant principalement aux agents de catégorie A, qui représentent 56 % des bénéficiaires, et peu aux catégories C. Compte tenu de la décroissance de l’inflation, du fait que tous les agents n’en bénéficient pas, et du fait qu’elle concerne surtout les agents en fin de carrière ayant atteint le plafond de leur grade, j’ai effectivement proposé dans l’agenda social d’examiner la suppression de la Gipa. Nous en discuterons avec les organisations syndicales.
Le terme de « débureaucratisation » suscite des réactions diverses. Certains l’encouragent, d’autres s’en inquiètent. Il est nécessaire de dédramatiser cette notion, qui n’est pas nouvelle et était déjà prévue lors du dernier comité interministériel de la transformation publique. Les agents eux-mêmes demandent une simplification administrative. Lors de visites de terrain, notamment dans un hôpital, nous avons constaté la souffrance de secrétaires hospitalières face aux complexités administratives liées à des systèmes d’information défaillants, concernant la réservation de créneaux de soins. L’objectif de la débureaucratisation n’est pas de supprimer des postes, mais d’améliorer l’efficacité du travail quotidien des agents et de répondre aux attentes des usagers. Ce travail minutieux doit être mené fonction publique par fonction publique, ministère par ministère, procédure par procédure, au bénéfice de tous les Français.
Je souhaite en outre faire prospérer le travail parlementaire en soumettant une proposition de loi sur le sujet du logement. La question de la clause de fonction est primordiale. Pour inciter les opérateurs publics à investir dans le logement social destiné aux fonctionnaires, il est nécessaire qu’ils conservent la maîtrise des logements construits. Si un hôpital public décide par exemple d’investir dans le logement social, il doit être assuré que le bénéfice en revienne à ses agents, même en cas de départ de l’un d’entre eux vers une clinique privée, par exemple. Cette proposition vise à garantir que les investissements des opérateurs publics dans le logement restent au bénéfice des agents publics.
À mon sens, les termes « démantèlement » et « austérité » sont excessifs. Notre pays compte actuellement 5,7 millions d’agents publics, avec une masse salariale de 240 milliards d’euros qui augmente naturellement de 3 % par an, indépendamment du point d’indice ou des décisions politiques. Des revalorisations historiques ont été effectuées, notamment par mon prédécesseur qui rappelait que la revalorisation du point d’indice décidée en 2022 était sans précédent depuis 37 ans. Dans le cadre de la revue des dépenses, nous envisageons de réduire les recrutements de 4 000 postes sur un total de 5,7 millions d’agents publics. D’autres pays ayant réellement appliqué des plans d’austérité ont procédé à des coupes franches, ce qui n’est pas notre approche. Notre prudence en matière de dépenses publiques vise justement à éviter que nos successeurs ne soient contraints de prendre des décisions drastiques à l’avenir, notamment pour des questions de souveraineté. J’assume pleinement cette position et considère qu’un discours de vérité sur l’état de nos finances publiques est salutaire pour notre pays. Sans ce travail, nous risquerions demain de devoir procéder à des coupes sévères, comme certains de nos voisins européens ont dû le faire par le passé. Nous ne sommes pas dans une situation d’austérité, mais plutôt dans une démarche de sérieux budgétaire et de transparence. Rationaliser la dépense publique, c’est précisément répondre aux besoins du public. Je suis convaincu que nous pouvons faire mieux avec moins, différemment, y compris dans la fonction publique qui ne peut rester figée.
Concernant la DITP, j’ajoute que je souhaite réintroduire et moderniser les baromètres mis en place par mes prédécesseurs afin de poursuivre ce travail d’évaluation et d’en rendre compte aux élus et aux citoyens.
J’admets que la baisse opérée sur le FTAP est importante. Je ne prétends pas prendre des décisions faciles, mais je les assume pleinement et m’efforce de les expliquer au mieux.
Sur la question de l’attractivité, nous poursuivrons les chantiers lancés en 2023. Mes priorités sont de renforcer nos outils numériques et de développer les compétences. Je souhaite notamment mettre l’accent sur une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) plus complète.
L’attractivité ne se résume pas aux aspects financiers. La question du logement est primordiale. Si nous parvenons à accroître l’investissement dans le logement social et intermédiaire pour les fonctionnaires, nous réduirons les charges qui pèsent sur les agents en difficulté pour se loger. Cela fait partie intégrante de notre stratégie globale pour renforcer l’attractivité des métiers de la fonction publique. Je souhaite utiliser ces leviers pour renforcer l’attractivité de la fonction publique, notamment dans les grandes villes ou dans les zones confrontées à de réelles difficultés d’accès au logement.
Concernant les remarques de M. Duplessy sur les baisses drastiques d’effectifs, je tiens à préciser qu’il n’a pas mentionné toutes les hausses prévues en contrepartie. S’il est exact que des postes sont supprimés à la direction générale des finances publiques (DGFiP), des augmentations significatives sont toutefois planifiées dans l’armée, la police et la justice. Nous assumons pleinement les choix effectués. Il appartient aux parlementaires de décider, dans le cadre des discussions budgétaires, des amendements à apporter au projet de loi de finances et d’en rendre compte à leurs électeurs.
Quant à la revalorisation en lien avec le Smic, je souhaite apporter des précisions sur la polémique des « six centimes ». La revalorisation du Smic au 1er novembre le porte à 1 801,80 euros brut mensuel, soit une augmentation de 34,88 euros. Le salaire minimum dans la fonction publique est supérieur de 34,82 euros au Smic actuel. Avant la décision du Premier ministre, le salaire et l’indemnité des agents publics dépassaient déjà le Smic. Nous avons donc ajusté les salaires minimums pour 231 500 agents, dont 140 200 dans la fonction publique d’État, afin qu’ils s’établissent au niveau du Smic. Il convient de noter que la grande majorité des 5,7 millions d’agents de notre pays perçoit une rémunération supérieure au Smic. La polémique sur ces six centimes doit être relativisée, car 96 % des agents ne sont pas concernés par cette mesure.
Monsieur Martineau, je vous remercie pour votre accueil dans la Sarthe. Lors de notre visite, nous avons effectivement pu constater l’importance de la GPEC. Mon objectif est de construire un projet donnant des perspectives sur l’évolution des effectifs dans la fonction publique à moyen et long terme, plutôt que de procéder à des ajustements annuels lors de chaque exercice budgétaire. Nous avons observé des mesures de simplification intéressantes, notamment à l’hôpital du Mans, permettant de gagner du temps administratif. De même, de nouveaux outils et logiciels améliorent le travail des agents en préfecture et en maisons France Services. Concernant l’autonomie, un meilleur transfert de données entre départements éviterait des procédures redondantes pour les personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie qui déménagent. Face aux évolutions démographiques et technologiques, notamment l’arrivée de l’intelligence artificielle, il est essentiel d’en anticiper les impacts sur les différents services et d’évaluer les besoins en recrutement. Une gestion prévisionnelle rationnelle, basée sur des variables partagées, permettra de dédramatiser cette question à chaque projet de loi de finances et d’offrir des perspectives d’évolution des effectifs, à la hausse comme à la baisse, en fonction des besoins réels. Cette approche rejoint la proposition de Mme Obono de « gouverner en partant des besoins », qui est précisément l’objectif de la GPEC : partir des besoins des usagers pour définir les effectifs nécessaires à la réalisation des différents services.
Je tiens à vous remercier, Madame Firmin Le Bodo, pour votre soutien aux différents chantiers que nous menons. Vous avez évoqué France Services, France Simplification et France Expérimentation. Nous poursuivrons assurément ces initiatives. Concernant les agences et les comités, vous pouvez compter sur notre vigilance pour en supprimer. Un projet de loi sur la simplification, récemment adopté au Sénat et bientôt examiné à l’Assemblée nationale, contient des dispositions vous permettant d’agir sur ce sujet. Cela répond également à la question de M. Houlié sur les comités susceptibles d’être supprimés. La décision vous reviendra. J’ai quelques suggestions que je vous soumettrai humblement. En 2020, dans le cadre de la loi Asap, j’avais déjà proposé la suppression d’une quinzaine de comités. Cependant, à chaque proposition, des parlementaires s’y opposaient, probablement parce qu’ils y siégeaient eux-mêmes. La commission supérieure du numérique et des postes illustre bien cette difficulté. J’avais tenté de la supprimer en 2020, mais face à l’insistance de ses membres, nous avions échoué malgré le fait que nous étions alors en situation de majorité absolue. Le sujet est à nouveau d’actualité dans le projet de loi de simplification, les sénateurs ayant refusé sa suppression. Nous devons garantir une cohérence entre nos déclarations sur la nécessité de réduire le nombre de comités et d’agences et nos actes lorsque l’occasion se présente. Il s’agit d’un exercice de transparence, car de nombreux parlementaires siègent dans ces comités, comme en témoignent les récents appels à candidatures.
Parmi ces instances, on trouve notamment le conseil supérieur de l’énergie, le conseil supérieur de la forêt et du bois, le conseil national de l’habitat, le conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, le comité national de l’initiative française pour les récifs coralliens, le haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, la commission nationale d’agrément des associations représentant les usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique, le conseil d’administration de l’office franco-allemand pour la jeunesse, le comité stratégique de l’agence du service civique, le conseil national de la mer et des littoraux, le conseil supérieur des gens de la mer, le conseil national du numérique, le conseil national des villes, le conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique, le comité du massif jurassien, le comité de bassin Loire-Bretagne et le conseil national de l’air ! Des comités comme cela, vous en avez des dizaines, des centaines ! J’ai des idées pour rationaliser ces comités en fonction de leur activité et de leur efficacité, mais la décision finale reviendra aux parlementaires. Ce sera l’occasion de vérifier la cohérence entre les discours et les actes concernant la réduction du nombre global de comités et d’agences.
Monsieur Molac, je vous remercie pour vos encouragements. Vous avez souligné l’importance de montrer l’exemple, et je partage pleinement votre avis. Le projet de loi sur la simplification prévoit d’ailleurs une disposition appelée « test PME », visant à vérifier l’applicabilité des nouvelles normes par les TPE-PME avant leur adoption. Cette mesure mérite d’être débattue.
Il arrive de même que le Gouvernement et le Parlement prennent des décisions qu’ils ne s’appliquent pas à eux-mêmes. Je doute par exemple que toutes les cantines des ministères et de la fonction publique aient été les premières à appliquer les conditions de la loi Egalim sur le bio et les circuits courts. Je suis d’accord avec vous sur la nécessité d’être vigilant à ne pas imposer des conditions que nous ne nous appliquons pas à nous-mêmes. Le devoir d’exemplarité est essentiel.
Vous avez également soulevé un point intéressant : la loi doit énoncer des principes et non des détails. Le secrétaire général du Gouvernement, en collaboration avec les secrétaires généraux des ministères, mène déjà des actions de simplification et de délégalisation. Ces chantiers visent à identifier les dispositions législatives trop détaillées qui ne relèvent pas du domaine de la loi, résultant parfois de textes gouvernementaux ou d’amendements parlementaires trop prolixes. Ces chantiers de délégalisation permettent d’arriver devant le Conseil constitutionnel avec un décret substitutif, autorisant la suppression de plusieurs pages de code. En les éliminant, nous passons au niveau réglementaire de manière plus souple, avec une procédure maîtrisée. Ces chantiers s’avèrent pertinents pour les cas évoqués où la loi ne devrait pas entrer dans tous les détails au risque de rigidifier l’action publique et de créer des complications supplémentaires.
Concernant la bureaucratisation, je ne partage pas le point de vue de Mme K/Bidi, car l’efficacité avec un budget amoindri est possible grâce aux évolutions technologiques. Des expérimentations sont en cours dans certains services de police, de gendarmerie et de justice, utilisant l’intelligence artificielle pour améliorer la prise de plainte, permettant ainsi un gain de temps administratif. Dans d’autres pays, l’intelligence artificielle est utilisée pour faciliter l’analyse des dossiers. Nous partons de loin : aujourd’hui encore, certains hôpitaux utilisent le fax. Je ne souscris pas à l’idée selon laquelle la dématérialisation à outrance soit néfaste : en 2024, nous pouvons disposer de systèmes d’information plus performants que le fax. La modernisation du système d’information améliore à la fois le quotidien des agents et la qualité du service rendu aux usagers.
Je tiens à indiquer à Mme Vaginay que je prends mes responsabilités et assume un budget en baisse significative. Cette préoccupation doit être partagée par l’ensemble des parlementaires. Il est certes plus aisé d’augmenter les impôts que de réduire la dépense publique, mais j’assume cette dernière option dans mon ministère. Concernant la valorisation des compétences, nous mettrons en place une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, en associant tous les parlementaires à ce projet.
Quant aux priorités sur la transition écologique et la rénovation du bâti, les actions lancées en 2023 se poursuivent en 2024. Cependant, pour des raisons budgétaires, nous n’initierons pas de nouveaux grands programmes de transformation au-delà de ce qui a été entrepris en 2023 sur la rénovation des bâtiments de l’État. Nous assumons de rechercher des pistes d’économies sur ce sujet.
M. le président Florent Boudié. Nous procédons sans délai à l’examen des amendements de la mission transformation et fonctions publiques pour donner suite à l’audition du ministre.
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La Commission procède à l’examen pour avis et au vote des crédits de la mission « Transformation et Fonction publiques » (M. Jiovanny William, rapporteur pour avis).
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CL189 et II-CL188 de M. Jordan Guitton
M. Jordan Guitton (RN). À un moment où l’état critique des finances publiques requiert des économies et où le Gouvernement envisage de priver les collectivités territoriales de plusieurs milliards d’euros, il serait logique que le train de vie de l’État soit réduit et que des choix soient faits en matière d’investissements. Je pense notamment, au sein du programme 348, à l’action 12, Travaux et gros entretien à la charge du propriétaire, qui prévoit l’installation de panneaux photovoltaïques et des travaux de mise aux normes environnementales, dont crédits s’élèvent à près de 700 millions d’euros. Pourquoi l’État ne réduirait-il pas le montant de ses investissements alors qu’il va demander aux collectivités locales de le faire de façon massive ? L’amendement II-CL189 propose donc de diminuer de 100 millions d’euros les crédits de l’action 12 du programme 348, Performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs.
L’amendement II-CL188 tend à réduire les moyens de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Je n’ai rien compris à la réponse du ministre sur le sujet. Certaines applications ne servent à rien. Quand on voit que Pilote, application de pilotage des réformes, a été facturée 3,58 millions d’euros par Capgemini, c’est tout de même scandaleux. On se demande d’ailleurs à quoi servent les 197 emplois de la DITP, quand nombre d’instances telles que la Cour des comptes font déjà des rapports. Nous nous réjouissons de la baisse de 300 millions d’euros du budget de l’action 04, Renouveau démocratique, mais nous plaidons pour la suppression pure et simple de ce budget. M. Olivier Véran s’est en effet déplacé à Fréjus, Moissac, Beaucaire, Perpignan, Hayange et Hénin-Beaumont dans les deux mois qui ont précédé les élections européennes, faisant campagne contre le Rassemblement national aux frais du contribuable.
M. Jiovanny William, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable sur l’amendement II-CL189 pour deux raisons : la première est que les crédits du programme 348 vont fortement baisser entre 2024 et 2025, de sorte que ce programme contribue déjà à la réduction des dépenses publiques ; la seconde est que l’action 12 prévoit des investissements utiles qui sont susceptibles d’engendrer des économies d’énergie à l’avenir.
J’émets aussi un avis défavorable à l’amendement II-CL188, parce que la DITP réalise des missions utiles dont je peux vous citer deux exemples : le projet « lutte contre le décrochage scolaire » devrait permettre d’automatiser les tâches administratives pour favoriser les actions d’accompagnement des jeunes, tandis que le projet « Histologe » doit permettre d’accélérer la prise en charge du mal logement en facilitant la détection, le signalement et le suivi par l’administration des personnes mal logées.
M. Jordan Guitton (RN). La DITP est clairement une tranche du millefeuille, du micmac administratif. Les deux exemples que vous venez de donner concernent des sujets qui devraient être traités, l’un par le ministère de l’éducation nationale et l’autre par le ministère du logement. Pourquoi faire ces doubles et triples couches qui, pour reprendre une expression fameuse, coûtent un « pognon de dingue » à l’administration ? Pourquoi ne pas aller chercher les économies à cet endroit ? Quant à l’action 12, elle prévoit peut-être des investissements utiles mais, puisque l’heure est aux choix en matière d’économies, ce sont ceux du Rassemblement national.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CL190 de M. Jiovanny William
M. Jiovanny William, rapporteur pour avis. L’Agence de conseil interne de l’État a été créée au printemps, au sein de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Ce nouveau service s’appuie sur l’existant puisque la DITP menait déjà des missions de conseil interne.
Le Gouvernement avait annoncé que l’Agence emploierait soixante-quinze personnes à la fin de 2024, mais elle ne devrait finalement en compter que cinquante-cinq. De plus, le projet de loi de finances (PLF) prévoit un schéma d’emploi nul pour 2025. Le présent amendement vise à prélever 2 millions, en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), sur l’action 12 du programme 348, Travaux et gros entretien à la charge du propriétaire, pour les réaffecter à l’action 02 du programme 368, Pilotage des actions de modernisation. Cela permettra d’embaucher vingt agents, afin d’éviter de recourir à des conseils extérieurs.
M. Jordan Guitton (RN). Nous voterons contre. Doter la DITP d’agents supplémentaires n’empêchera pas les cabinets ministériels de faire appel à des cabinets privés, comme le fait la Macronie depuis 2017 : c’est le fait d’une volonté politique. On se souvient qu’un cabinet privé avait rendu un rapport de cinquante pages qui avait alourdi la dette de 900 millions. Les grands ministères emploient déjà des hauts fonctionnaires compétents pour accomplir ce travail.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CL163 de M. Paul Molac
M. Paul Molac (LIOT). Le présent amendement vise à économiser au budget de la fonction publique le coût d’Agora. Cette énième application mobile développée par le ministère était déjà dotée de 1,8 million d’euros l’an dernier. Outil de sondage qui ne dit pas son nom, elle est un échec : seuls 38 000 citoyens ont répondu aux consultations, menées sans contrôle externe indépendant. Son coût n’est donc pas justifié ; si l’État tient à consulter les citoyens, il peut organiser des référendums.
M. Jiovanny William, rapporteur pour avis. Avis favorable.
M. Guillaume Gouffier Valente (EPR). Nous soutenons cet amendement, même si l’idée était bonne. Il ne s’agissait pas tant de sonder nos concitoyens que de les associer à la conduite des politiques publiques. L’application n’a pas rencontré son public. Peut-être faut-il en garder l’idée.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CL162 de M. Paul Molac
M. Paul Molac (LIOT). Je veux vous alerter sur les conséquences d’un nouveau gel du point d’indice de la fonction publique en 2025. Les revalorisations de 2022 et 2023, respectivement de 3,5 % et de 1,5 %, faisaient suite à dix années de gel et sont restées très inférieures à l’inflation. L’Insee indique qu’en septembre 2024, cette dernière atteignait 1,2 % sur un an ; en période d’inflation, un gel entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les agents publics. Indexer le point d’indice sur l’inflation de septembre, soit 1,2 %, coûterait environ 1,2 milliard en année pleine pour la seule fonction publique d’État. Pour assurer sa recevabilité financière, le présent amendement, d’appel, tend à augmenter symboliquement les crédits de titre 2 du programme 148 Fonction publique de 1,2 million d’euros.
M. Jiovanny William, rapporteur pour avis. Je partage votre position mais le programme 148 n’est pas adapté. C’est un amendement d’appel. Je vous propose de le retirer ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
L’amendement II-CL190 de M. Jiovanny William, rapporteur pour avis, est retiré.
La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Transformation et fonction publiques, modifiés.
Après l’article 64
Les amendements II-CL193 et II-CL192 de M. Jiovanny William, rapporteur pour avis, sont retirés.
La séance est levée à 19 heures.
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Membres présents ou excusés
Présents. - Mme Marie-José Allemand, M. Pouria Amirshahi, M. Ugo Bernalicis, M. Florent Boudié, Mme Colette Capdevielle, M. Vincent Caure, M. Emmanuel Duplessy, Mme Elsa Faucillon, Mme Agnès Firmin Le Bodo, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Monique Griseti, M. David Guerin, M. Jordan Guitton, Mme Émeline K/Bidi, Mme Pauline Levasseur, M. Éric Martineau, Mme Élisa Martin, M. Stéphane Mazars, M. Ludovic Mendes, M. Paul Molac, Mme Danièle Obono, M. Marc Pena, M. Julien Rancoule, Mme Sandra Regol, Mme Béatrice Roullaud, M. Jean Terlier, Mme Sophie Vaginay, M. Jiovanny William
Excusés. - M. Ian Boucard, M. Marc Fesneau, Mme Marietta Karamanli, M. Andy Kerbrat, M. Laurent Marcangeli, Mme Naïma Moutchou
Assistait également à la réunion. - M. Sacha Houlié