Compte rendu
Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République
– Suite de l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au renforcement de la sûreté dans les transports (n° 134) (M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur) 2
Mercredi
27 novembre 2024
Séance de 15 heures
Compte rendu n° 22
session ordinaire de 2024 - 2025
Présidence
de M. Florent Boudié, président
— 1 —
La séance est ouverte à 15 heures.
Présidence de M. Florent Boudié, président.
La Commission poursuit l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au renforcement de la sûreté dans les transports (n° 134) (M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur) ;
M. le président Florent Boudié. Nous poursuivons l’examen de la proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports.
Après l’article 1er
Amendement CL185 de M. Sébastien Huyghe
M. Sébastien Huyghe (EPR). Il s’agit de donner aux agents de sécurité privée la possibilité d’enjoindre aux personnes ayant commis une fraude ou dont le comportement peut mettre en jeu la sécurité des personnes, nuire à la régularité des circulations ou troubler l’ordre public, de descendre d’un véhicule de transport. Ces agents devront être autorisés par les préfets de département ou, à Paris, par le préfet de police. Les modalités de formation et d’autorisation de ces personnels seront définies par un décret en Conseil d’État.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Actuellement, seuls les agents de la SNCF et de la RATP sont formés et assermentés pour interdire l’accès aux véhicules ou procéder à une injonction de descente ; ce n’est pas le cas des acteurs du secteur privé, dont les périodes de formation varient en outre beaucoup selon les sociétés.
Je ne pense pas que cette loi soit le grand soir de l’organisation de notre système de sûreté. Je demande le retrait de cet amendement au profit d’éventuels futurs travaux, plus larges, qui pourraient englober l’ensemble des acteurs. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. Sébastien Huyghe (EPR). Il me semble au contraire important de profiter de ce véhicule législatif pour y inscrire toutes les dispositions utiles à nos concitoyens, car nous ne savons pas quand sera présenté le suivant, surtout dans cette période d’incertitude politique.
Un décret en Conseil d’État déterminera les obligations de formation et les modalités d’autorisation préfectorale : tout est donc bien encadré. Les personnels qui n’auraient qu’une seule semaine de formation ne pourront pas être habilités.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). On observe là une sorte de glissement des agents assermentés vers d’autres qui ne le sont pas. Nous ne sommes pas d’accord : les pouvoirs de coercition, de quelque nature que ce soit, doivent rester l’apanage de la force publique. La sécurité privée finira par avoir plus de prérogatives que les agents de police municipale – c’est quand même incroyable !
Par ailleurs, on ne peut pas travailler ainsi : étendre les pouvoirs de la sécurité privée demande une réflexion globale. Les décisions que nous prenons sont graves, ne serait-ce que pour les agents eux-mêmes. Certes, vous prévoyez de les former, mais vous confiez à des personnes des missions dans lesquelles elles ne se sont jamais projetées. Enjoindre à quelqu’un de descendre d’un bus ou d’un train peut susciter beaucoup de tension. On ne peut pas, au détour d’un texte, procéder à une extension majeure des prérogatives de la sécurité privée. En tant que député, vous pouvez déposer une proposition de loi sur ce sujet.
M. Sébastien Huyghe (EPR). On ne peut pas dire tout et n’importe quoi. Nous examinons un texte sur la sécurité dans les transports, et mon amendement s’inscrit bien dans cet objet. On ne va pas multiplier les outils législatifs. De plus, les sociétés de sécurité privée exercent déjà des prérogatives comparables dans d’autres cadres, par exemple dans les aéroports, sans que cela pose le moindre problème. Je ne vois pas quelle difficulté poserait l’injonction à un contrevenant de descendre d’un véhicule, d’autant que nous fixons un cadre très précis pour la formation et l’habilitation.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL187 de M. Sébastien Huyghe
M. Sébastien Huyghe (EPR). L’amendement vise à obliger les personnes utilisant les transports publics à détenir un titre justifiant de leur identité. Bien souvent, les auteurs d’infractions déclarent des identités fantaisistes lors des contrôles, empêchant la sanction de s’appliquer.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Les passagers doivent déjà être en mesure de justifier de leur identité lorsqu’ils ne disposent pas d’un titre de transport valide. Vous proposez d’étendre le périmètre de cette obligation au-delà des cas de non-respect des règles tarifaires. Or le droit actuel couvre déjà les cas que vous visez, certains agents pouvant exiger la présentation d’une pièce d’identité et, en cas de refus du contrevenant, en aviser l’officier de police judiciaire (OPJ).
Votre dispositif semble en outre peu opérant. En effet, les agents disposeront de peu de moyens face à une personne qui refuserait de donner son identité.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Sébastien Huyghe (EPR). Je maintiens mon amendement, car il répond à une demande pressante des opérateurs.
La commission rejette l’amendement.
Article 2 (art. L. 2251‑1‑4 [nouveau] du code des transports) : Capacité d’intervenir momentanément sur la voie publique pour les agents de sûreté de la SNCF et de la RATP
Amendements de suppression CL36 de M. Roger Vicot et CL98 de Mme Élisa Martin
M. Hervé Saulignac (SOC). L’élargissement du périmètre d’intervention des agents de sécurité de la RATP et de la SNCF aux abords immédiats des gares et des stations présente un risque important d’atteinte aux libertés fondamentales. L’appréciation du caractère inopiné ou urgent de la situation, si elle relève des seuls agents de sécurité, pose un problème sérieux car leur formation juridique est loin d’être équivalente à celle des agents de police ou de gendarmerie. Il appartient à l’État d’assurer le recrutement de policiers et de gendarmes en nombre suffisant pour garantir la sécurité de la population dans les transports et partout ailleurs.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous ne sommes pas d’accord avec l’article 2, qui vise à étendre les prérogatives des agents de sécurité privée afin de substituer ces derniers à la police nationale et à la gendarmerie. De surcroît, l’appréciation du caractère inopiné ou urgent de la situation est très subjective et fait courir le risque d’une surintervention de la part de ces agents. Ces derniers peuvent en outre être dotés d’une arme de poing, ce qui peut faire craindre des dérapages, avec des conséquences lourdes. Nous souhaitons donc que leur aire d’intervention reste cantonnée à l’intérieur des biens immobiliers de la SNCF et de la RATP.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Le droit de poursuite prévu à l’article 2 me paraît parfaitement encadré. Il permet d’intervenir momentanément sur la voie publique, aux abords immédiats des emprises dans lesquelles les agents sont compétents pour des infractions relatives au code des transports. Je ne vois pas pourquoi ils pourraient intervenir dans la gare mais pas aux abords des gares. Avis défavorable.
M. Julien Rancoule (RN). Encore une fois, la gauche véhicule une triste image des agents de sécurité, quels qu’ils soient. Ce sont des professionnels qui ont suivi une longue formation, dont la durée est d’ailleurs passée de 140 à 175 heures.
Par ailleurs, je rappelle que l’article 73 du code de procédure pénale fait obligation à tout citoyen d’intervenir en cas de délit ou de crime. Pourquoi un agent de sécurité formé et même assermenté, dans le cas d’un agent de la RATP et de la SNCF, ne pourrait-il pas empêcher un crime ou un délit sur la voie publique ?
M. Ian Boucard (DR). Permettez-moi de rappeler cette statistique : 20 % des violences à caractère sexuel et des coups et blessures recensés dans notre pays ont lieu soit dans un train, soit dans un périmètre de 750 mètres autour d’une gare. Des infractions peuvent commencer dans la gare et se poursuivre dans ses abords immédiats. Il est donc essentiel que les agents de sécurité puissent intervenir aux abords des gares, qui sont des points de fixation de la délinquance et de l’insécurité.
Ces amendements de suppression ne font qu’illustrer la défiance de leurs auteurs à l’égard des agents de sécurité, qui contrôleraient de manière discriminatoire et souvent raciste. Cela m’inquiète beaucoup.
Mme Sandra Regol (EcoS). L’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que la force publique est « instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée ». Par ailleurs, une décision du Conseil constitutionnel rappelle que l’élargissement des compétences d’une police privée aux abords de l’espace public lui confère une autorité de police ; celle-ci devient alors privative, n’étant pas exercée pour le bien de tous. La rédaction actuelle de l’article 2 est donc très dangereuse ; elle ne respecte pas les principes fondamentaux de notre pays.
M. Boucard a évoqué des statistiques relatives aux lieux qui seraient dangereux. Quand on est une femme, l’endroit où l’on risque le plus de perdre la vie, c’est l’intérieur de sa maison. Si l’on voulait renforcer les effectifs de police dans les lieux où les femmes sont frappées, violées et tuées, il faudrait le faire non pas dans les trains, où elles croisent des étrangers, mais à la maison, où vivent leurs proches.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). L’article 2 met en danger les agents de la Suge et du GPSR en leur confiant des missions régaliennes qui relèvent de la police nationale. Contrairement à celle-ci, ils ne sont pas formés pour intervenir en dehors des emprises ferroviaires et de la RATP. Que se passera-t-il demain ? Leur demanderez-vous d’intervenir encore plus loin, au-delà du parvis de la gare, dans les rues avoisinantes, au risque d’en faire une police supplétive ? Eux-mêmes ne demandent pas de pouvoir intervenir sur la voie publique. Si la police nationale manque d’effectifs, il faut recruter davantage de policiers et les mettre aux abords des gares.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CL79 de M. Guillaume Gouffier Valente et CL211 de M. Vincent Caure
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il s’agit de renforcer le droit de poursuite sur la voie publique inscrit à l’article 2 en prévoyant deux nouvelles facultés : permettre aux préfets d’autoriser les agents de la Suge et du GPSR à exercer des missions, mêmes itinérantes, de surveillance contre les vols, dégradations, effractions et actes de terrorisme visant les biens dont ils ont la garde ; autoriser ces mêmes agents à intervenir spontanément et momentanément sur la voie publique, aux abords immédiats des emprises pour lesquelles ils sont compétents, en cas d’urgence.
M. Vincent Caure (EPR). L’objectif est de renforcer l’efficacité de la disposition autorisant à poursuivre sur la voie publique.
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous pouvons tous comprendre qu’il est parfois nécessaire de poursuivre à l’extérieur une personne qui vient de commettre une agression. Cependant, une telle disposition dépasse très largement le cadre du droit, car elle permet que des missions de police soient exercées au bénéfice de quelques-uns et non de tous. Je m’inquiète des conséquences que peut avoir une telle extension du droit d’intervenir aux abords des emprises. De plus, cela soulève un problème d’interprétation pour les agents, car il leur est très difficile de déterminer jusqu’où ils peuvent intervenir. Cela les place dans une situation juridiquement compliquée.
La commission adopte les amendements.
Amendement CL192 de M. Julien Rancoule
M. Julien Rancoule (RN). Je propose d’étendre à tous les agents de sécurité privée la possibilité d’intervenir aux abords des gares en cas d’infraction urgente et inopinée, comme peut le faire tout citoyen en cas de délit ou de crime flagrant sur la voie publique. Faisons confiance à ces professionnels, qui sont formés, plutôt que de laisser la délinquance prospérer.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Je maintiens qu’il ne faut pas élargir ce texte aux sociétés de sécurité privée.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL80 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il convient de supprimer la condition du caractère urgent ou inopiné de la poursuite.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL81 de M. Guillaume Gouffier Valente et CL212 de M. Vincent Caure
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il s’agit de permettre aux agents de la Suge et du GPSR de constater le délit de vente à la sauvette aux abords immédiats de leurs emprises.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Quel est le rapport entre la vente à la sauvette et la sûreté dans les transports ? N’est-il pas opportuniste, voire manipulatoire d’invoquer des motifs liés à la lutte contre le terrorisme et contre les violences sexistes et sexuelles pour autoriser des interventions aux abords des gares afin de lutter contre les ventes à la sauvette ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il suffit d’échanger avec les opérateurs ou avec les agents sur le terrain pour comprendre que ce sujet est directement lié à la sûreté. Les ventes à la sauvette qui s’installent illégalement aux abords des emprises provoquent des phénomènes de concurrence, voire des rixes. Le rôle des agents est bien d’assurer la sûreté dans les emprises.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’article 2 modifié.
Article 3 (art. L. 2241‑6 du code des transports) : Faculté d’interdire l’accès aux emprises des espaces, gares ou stations pour les agents compétents en matière de police du transport
Amendements de suppression CL37 de M. Roger Vicot et CL112 de M. Thomas Portes
M. Hervé Saulignac (SOC). L’interdiction d’accéder aux gares existe déjà, en dépit de l’atteinte à la liberté d’aller et de venir qu’elle représente, ce qui n’est pas sans soulever quelques interrogations. Or l’article 3 vise à élargir ce régime d’interdiction en octroyant des pouvoirs de police à des agents de sécurité sur la base d’éléments particulièrement difficiles à interpréter, tels qu’un comportement « de nature à compromettre la sécurité des personnes ». Tout cela nous semble tellement flou et risqué que la raison nous commande de supprimer l’article 3.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). L’extension des pouvoirs de police de la Suge et du GPSR tend à faire d’eux non plus une police des transports, mais l’équivalent d’une police générale. Ce glissement dans les missions qui leur sont confiées nous paraît dangereux, d’autant que le motif invoqué est extrêmement flou et peu cadré. Transformer ces agents en policiers ne permettra pas de lutter contre l’insécurité. La seule façon de répondre aux attentes des usagers en matière de sécurité consiste à augmenter le nombre de policiers nationaux. Les agents de sécurité ne sont déjà pas assez nombreux pour faire leur boulot correctement à l’intérieur des trains et des gares ; on ne peut pas leur demander en plus d’étendre leur périmètre d’intervention à effectifs constants.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Cette mesure de bon sens est attendue par les agents de la Suge et du GPSR, qui passent leur journée dans les gares à jouer au chat et à la souris avec les personnes qu’ils tentent d’évincer. En étendant leur pouvoir d’éviction et d’interdiction d’accès aux gares, nous facilitons leur travail. Je précise que cette disposition ne concerne pas certains publics comme les personnes sans domicile fixe.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cette mesure, qui serait réclamée par les agents eux-mêmes – cela reste à vérifier –, n’est pas opérationnelle. Vous affirmez qu’elle permettrait d’augmenter le niveau de sécurité et de rassurer les voyageurs, mais cela ne peut pas fonctionner. C’est tout le modèle économique de la SNCF qui est à revoir : si l’on veut des gares plus accueillantes, plus confortables et plus sécurisantes, il faut que l’État investisse autant que faire se peut. Ce n’est pas en ouvrant à la concurrence que l’on y parviendra.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL82 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Outre quelques modifications rédactionnelles, cet amendement vise à aligner le régime de l’interdiction d’accès aux gares sur les mesures d’éviction existantes, que prévoit déjà le code des transports lorsque la personne concernée est sans domicile fixe. Ainsi, les agents de la Suge et du GPSR ne pourront faire usage de cette injonction sans avoir tenté de trouver à la personne un hébergement d’urgence ou si le plan Grand froid a été déclenché.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL9 de Mme Sandra Regol tombe.
Amendements CL8 et CL12 de Mme Sandra Regol (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). Il s’agit de deux amendements de repli.
L’article 3 concerne notamment toute personne « dont le comportement est de nature à compromettre […] la régularité des circulations » – cette notion est assez floue, puisque les comportements répréhensibles ne sont pas définis –, de même que « toute personne qui refuse de se soumettre à l’inspection visuelle ou à la fouille de ses bagages ou aux palpations de sécurité » – ce qui remet en cause le principe même du consentement à ces contrôles. Aussi l’amendement CL8 vise-t-il à supprimer les dispositions incriminées. Quant à l’amendement CL12, il se borne à supprimer les dispositions relatives au refus des fouilles et des palpations de sécurité.
Pour éviter que l’on déforme mes propos, je précise que nous déplorons, comme tout le monde, les retards dans les transports, parce qu’ils perturbent le quotidien des voyageurs et présentent un coût pour la collectivité. Nous voulons simplement que l’article 3 soit applicable et respecte le droit.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Nous avons un désaccord sur la clarté et l’efficacité du dispositif. Je ne souhaite pas faire de différence entre les diverses conditions justifiant un refus d’accès. Par ailleurs, il me paraît tout à fait justifié de refuser l’entrée dans une gare à une personne qui ne souhaite pas être fouillée ou palpée dans les conditions définies par le texte.
M. Julien Rancoule (RN). Quand une personne refuse de montrer son sac à la sécurité, c’est en général parce qu’il y a un objet illicite à l’intérieur – des stupéfiants ou, pire, une arme de poing ou un couteau. Compte tenu du nombre d’agressions au couteau qui ont eu lieu ces derniers mois dans les gares, je trouve assez irresponsable de ne pas permettre l’expulsion de ces personnes.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte l’article 3 modifié.
Article 4 (art. L. 1632‑3 du code des transports) : Conditions de recours aux équipes cynotechniques
Amendements de suppression CL83 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL102 de M. Pascal Jenft et CL221 de M. Sacha Houlié
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je propose de supprimer cet article, devenu caduc du fait de la fin des Jeux olympiques et paralympiques.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 4 est supprimé.
Article 5 (art. L. 2251‑1‑1 du code des transports) : Extension des compétences de la Suge à tous les transports routiers de substitution
Amendement de suppression CL113 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). La situation des agents de sûreté de la SNCF nous préoccupe. L’extension des compétences qui leur sont confiées les met en danger, car ils sont trop peu nombreux pour les assumer. C’est de la poudre aux yeux, qui n’a d’autre but que de montrer aux gens qu’on se préoccupe de leur sécurité.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable à la suppression de cet article. Il s’agit d’une mesure de bon sens, qui permet d’intervenir dans les transports de substitution de la SNCF.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL84 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il convient de recentrer l’article 5 sur son objet initial : permettre aux agents de la Suge d’intervenir dans tous les transports routiers de substitution, y compris en Île-de-France.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Comment les agents de sécurité pourront-ils se rendre dans les endroits d’où partent les transports de substitution, parfois situés à plusieurs kilomètres d’une gare ? C’est matériellement impossible, car il n’y a pas suffisamment d’agents pour assumer cette capacité de contrôle ou de présence.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il y a bien un nombre suffisant d’agents.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 5 modifié.
Chapitre II
Renforcer le continuum de sécurité pour une meilleure sécurisation de nos transports
Article 6 (art. L. 2241‑1‑1 et L. 3116‑1 du code des transports) : Accès des agents de police municipale aux espaces de transport et aux trains en circulation sur leur territoire
Amendements de suppression CL10 de Mme Sandra Regol et CL114 de M. Thomas Portes
Mme Sandra Regol (EcoS). Il nous semble dangereux d’attribuer à des agents de police municipale ou à des gardes champêtres des fonctions relevant de la sûreté ou de la sécurité ferroviaire, alors qu’ils manquent déjà de temps ou de moyens pour remplir leurs propres missions.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Nous nous opposons fermement à ce que les agents de police municipale ou les gardes champêtres puissent intervenir dans les emprises ferroviaires ou à bord du matériel roulant. Ils n’ont pas suivi la formation de haut niveau dispensée aux agents de la Suge et du GPSR. Lorsqu’ils interviennent dans le cadre des conventions prévues par la loi Savary-Le Roux – qui n’ont d’ailleurs fait l’objet d’aucun retour d’expérience –, ils ne suivent qu’une seule journée de formation : ce n’est pas sérieux ! Le risque est de mettre en danger non seulement les usagers des transports, mais aussi ces agents.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je me félicite que vous reconnaissiez, monsieur Portes, la qualité de la formation suivie par les agents du GPSR et de la Suge ! L’article 6 est important pour renforcer le continuum de sécurité dans les territoires. Je vous en proposerai une réécriture, au travers de l’amendement CL85 visant à rendre obligatoire l’association des opérateurs de transport aux conventions que vous avez évoquées.
M. Julien Rancoule (RN). Je ne comprends pas votre position, collègues de gauche : après vous être opposés au recours à des agents privés, vous refusez maintenant l’intervention dans les transports et les gares d’agents publics formés et assermentés ! Vous parlez du danger que cela pourrait représenter, mais le danger vient surtout des individus portant des couteaux ou troublant l’ordre public ! Soyez cohérents et assumez qu’au fond, vous êtes contre la sécurité.
Mme Sandra Regol (EcoS). Au sein du Nouveau Front populaire, nous défendons la cohérence de l’action et considérons que les agents doivent remplir les tâches pour lesquelles ils ont été formés. Nous estimons de ce fait que, pour assurer la sûreté des personnes et lutter contre les violences dans les transports, il ne faut pas faire intervenir n’importe quelle force de police ou société privée, mais plutôt des agents dont c’est le métier.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CL85 de M. Guillaume Gouffier Valente et CL230 de M. Jean Moulliere
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Comme je viens de l’indiquer, cet amendement vise à rendre obligatoire l’association des opérateurs de transport aux conventions locales de sûreté de transports collectifs.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cet amendement ne résout pas le problème de fond, mais il a le mérite de remettre la police municipale à sa place, sous la responsabilité des maires. C’est une avancée.
La commission adopte les amendements et l’article 6 est ainsi rédigé.
En conséquence, l’amendement CL115 de M. Thomas Portes tombe.
Article 7 (art. L. 1241‑4‑1 A [nouveau] et L. 1631‑3 du code des transports) : Possibilité d’affectation des agents d’Île‑de‑France Mobilités au centre de coordination opérationnel de la sécurité (CCOS)
Amendements de suppression CL38 de M. Roger Vicot, CL116 de Mme Élisa Martin et CL222 de M. Sacha Houlié
M. Hervé Saulignac (SOC). Dans un souci de respect des droits et libertés garantis par la Constitution, il ne nous semble pas souhaitable de permettre aux agents d’Île-de-France mobilités (IDFM) de visionner les images de vidéosurveillance. Cette possibilité doit être réservée à la puissance publique.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). La vidéosurveillance, particulièrement intrusive, remet en cause la liberté d’aller et venir et le respect du droit à la vie privée ; elle devrait être réservée à la police nationale. La présence d’agents d’IDFM dans un lieu de supervision ne nous semble pas raisonnable – mais va de pair, malheureusement, avec le glissement général des compétences que l’on observe.
M. Sacha Houlié (NI). La présence d’agents d’IDFM au sein du centre de coordination opérationnel de la sécurité (CCOS) est une demande de Mme Pécresse. Or le nombre de personnes ayant accès aux images devrait au contraire être limité. Je suggère donc la suppression de l’article 7, qui présente peu d’intérêt sur le plan opérationnel et soulève des interrogations relatives aux libertés fondamentales.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Vous ne pouvez pas dire que cet article répond à une demande de Mme Pécresse : celle-ci souhaite aussi qu’un rôle de coordination soit attribué à IDFM, ce que je ne souhaite pas et je défendrai dans un instant un amendement à ce sujet. IDFM a rejoint le CCOS durant les Jeux olympiques et paralympiques, et l’expérience fut positive. Sa présence aux côtés des opérateurs de transport – y compris Optile, l’organisation professionnelle des transports d’Île-de-France – est indispensable. C’est ce qu’a rappelé le préfet de police, Laurent Nuñez, lors de son audition hier matin. L’enjeu est de faciliter le travail de coordination de l’État. Je précise que les missions attribuées à IDFM par la loi ne seront pas élargies. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL193 de M. Julien Rancoule
M. Julien Rancoule (RN). Nous proposons d’ouvrir l’accès des salles de commandement aux sociétés de sécurité privée ayant signé un contrat avec IDFM, dans le but d’améliorer la coordination des moyens de sécurité, quels qu’ils soient. Une habilitation individuelle serait accordée à certains agents. Il nous semble en effet important qu’une société déployant des milliers d’agents pour IDFM puisse envoyer un coordinateur au CCOS, pour accroître son efficacité et sa réactivité sur le terrain.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Ce sont les opérateurs et les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) qui doivent être présents au CCOS. Du reste, une fois qu’IDFM aura rejoint celui-ci, elle pourra transmettre les informations aux sociétés qu’elle emploie.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL235 et CL236 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL234 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. S’il faut permettre la présence d’IDFM au sein du CCOS dès la promulgation du présent texte, il convient aussi d’y cantonner le rôle de l’opérateur à sa mission définie au 6° du I de l’article L. 1241-2 du code des transports.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements identiques CL23 de M. Ian Boucard et CL189 de M. Sébastien Huyghe tombent.
Amendement CL233 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet amendement supprime le report de l’entrée en vigueur de l’article 7, afin qu’elle puisse avoir lieu dès la promulgation du texte.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 7 modifié.
Après l’article 7
Amendement CL163 de M. Thomas Portes
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous proposons de supprimer l’article du code des transports permettant aux agents de la Suge et du GPSR d’accéder aux images de vidéosurveillance. Ce visionnage n’a aucun intérêt et n’accroît en rien leur capacité d’intervention. Nous préférons qu’ils soient présents au milieu des voyageurs plutôt que derrière des écrans.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Chapitre III
Une sécurisation de l’offre de service par la technologie
Article 8 (art. L. 2241‑6‑1 [nouveau] du code des transports) : Pérennisation de l’usage des caméras-piétons pour les agents de contrôle
Amendements de suppression CL117 de M. Thomas Portes et CL180 de M. Paul Molac
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Nous ne souhaitons pas que soit pérennisé l’usage des caméras-piétons pour les agents de contrôle, d’abord parce que la première organisation syndicale de la SNCF regrette l’absence de retour d’expérience de cette expérimentation, ensuite parce que nous préférons une présence humaine accrue dans les transports et dans les gares. La direction de la SNCF allègue de l’usage des caméras-piétons pour refuser l’affectation d’agents supplémentaires à la Suge. Avant qu’un dispositif initialement présenté comme expérimental soit généralisé, nous préférons qu’une étude d’impact confirme son efficacité dans la lutte contre les incivilités, les agressions et les infractions.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Un rapport d’évaluation a bien été remis par le gouvernement. Il en ressort que le dispositif est unanimement salué par les opérateurs, en particulier par les agents. Pour les quatre opérateurs ayant transmis un bilan de l’expérimentation, 80 % à 94 % des agents jugent que le port des caméras-piétons joue un rôle dissuasif face aux menaces et agressions, 85 % à 92 % considèrent qu’elles permettent d’apaiser les situations, et 79 % à 96 % se sentent plus en sécurité. On constate également une forte réduction de l’accidentalité, notamment une baisse de 35 % des accidents du travail avec arrêt consécutifs à des faits d’atteinte ou d’outrage. J’ai moi-même constaté sur le terrain que la fin de l’expérimentation suscitait un réel mécontentement, et que les agents attendaient sa pérennisation le plus rapidement possible.
M. Jordan Guitton (RN). La gauche s’oppose systématiquement aux caméras de protection, qu’il s’agisse d’en installer dans les prisons, dans les villes, dans les transports ou à l’occasion des Jeux olympiques. Nos collègues devraient sans doute écouter les humains qu’ils souhaitent voir plus nombreux dans les transports, et entendre leur avis quasi unanimement favorable aux caméras-piétons – avis partagé par l’Union des transports publics et ferroviaires. J’ajoute que les professionnels mettent en avant un autre effet, que l’on ne peut pas mesurer : le rôle dissuasif de ces caméras. Dans une société de plus en plus violente, celles-ci sont vraiment nécessaires.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il est toujours délicat, pour nous qui sommes députés, de commenter les positions syndicales ; chacun doit rester dans son rôle. Quant au bilan qui semble avoir été fait de l’expérimentation, il me paraîtrait normal – pour ne pas dire démocratique ! – qu’il nous soit transmis, puisque nous travaillons sur le sujet. Comment pouvons-nous évaluer l’action gouvernementale si l’on ne nous transmet même pas ce type de rapport ? En attendant, nous maintiendrons notre demande de suppression de l’article 7.
M. Paul Molac (LIOT). Je tenais à ce que nous ayons ce débat. M. le rapporteur nous ayant transmis des informations intéressantes, qui corroborent ce que j’ai entendu par ailleurs, je retire mon amendement.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Le rapport évoqué a été remis au Parlement le 11 avril dernier. Il est disponible à la bibliothèque.
La commission rejette l’amendement CL117, l’amendement CL180 ayant été retiré.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL86 et CL87 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL194 de M. Julien Rancoule
M. Julien Rancoule (RN). Cet amendement vise à étendre la possibilité de porter une caméra-piéton aux agents des sociétés de sécurité privée intervenant dans les gares et les transports en commun. Il devrait intéresser la gauche, qui dit se soucier de la santé au travail : ces caméras contribuent à la sécurité des agents, ainsi qu’à celle des tiers. Les forces de l’ordre et les sapeurs-pompiers qui en sont équipés en sont très satisfaits, car elles permettent non seulement de désamorcer les conflits, mais aussi de conserver une trace des incidents, le cas échéant. Si les conducteurs d’autobus et d’autocars peuvent porter une caméra-piéton, comme le prévoit l’article 8 bis, il serait cohérent que les agents de sécurité le puissent aussi.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je suis favorable à ce qu’une expérimentation soit menée en ce sens, comme cela sera le cas pour les conducteurs. Je vous invite, dans cette perspective, à retirer votre amendement.
L’amendement est retiré.
Amendements CL11 de Mme Sandra Regol et CL54 de M. Roger Vicot (discussion commune)
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Notre groupe reconnaît le bilan positif de ces caméras mais propose qu’elles enregistrent de façon permanente, afin d’éviter que leur activation volontaire ne suscite une suspicion – parfois légitime.
M. Hervé Saulignac (SOC). Notre amendement CL54 permettra au Rassemblement national de constater que la gauche est favorable à la sécurité publique et qu’elle n’est pas hostile à la technologie, dès lors que les usages qui en sont faits, encadrés et réglementés, garantissent le respect des libertés. Nous souhaitons nous aussi que l’enregistrement réalisé par les caméras-piétons soit systématique, afin d’éviter à l’agent d’avoir à décider, de façon subjective, de son déclenchement. Cette position est cohérente avec la doctrine que nous avons défendue s’agissant des policiers, des gendarmes et des agents de l’administration pénitentiaire.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il me semble que cette fois-ci, c’est vous qui allez trop loin ! Un enregistrement continu représenterait une atteinte disproportionnée aux libertés publiques. En outre, lorsqu’un agent active sa caméra-piéton, il doit le signaler. Demande de retrait ou avis défavorable.
Mme Sandra Regol (EcoS). Notre priorité, je le répète, est le respect du droit. Ne sombrant ni dans la technophobie ni dans la technophilie idolâtre, nous demandons un meilleur encadrement du dispositif. Le déclenchement de l’enregistrement par l’agent présente l’inconvénient de ne pas être décidé selon des critères prédéterminés. Un enregistrement continu permettra de documenter et d’objectiver une situation – et, peut-être, d’empêcher toute suspicion.
M. Julien Rancoule (RN). Je trouve étrange, voire liberticide, de filmer l’activité d’un agent du début à la fin de son service ; c’est en contradiction avec vos positions habituelles. Il me semble plus pertinent de déclencher la caméra en cas d’altercation, sachant que les trente secondes précédentes sont enregistrées. Un enregistrement continu poserait de surcroît un problème vis-à-vis de la Cnil, car les conversations des passagers pourraient être enregistrées sans qu’ils en soient informés.
M. Hervé Saulignac (SOC). Nos amendements ne proposent pas que les caméras enregistrent en continu, mais uniquement pendant les interventions. Ce que vous dites aux agents, finalement, c’est de déclencher leur caméra s’ils le veulent et de ne pas le faire dans le cas où cela pourrait leur poser un problème. Nous pensons au contraire que pour des raisons de clarté, l’enregistrement des interventions doit être systématique.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Ces amendements fragiliseraient l’expérimentation. Le Conseil constitutionnel, lorsqu’il s’est prononcé sur les caméras-piétons, a toujours souligné la nécessité que l’enregistrement ne soit pas permanent.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL88 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL231 de M. Jean Moulliere
M. Jean Moulliere (HOR). Cet amendement vise à ce que les caméras-piétons puissent être déclenchées sur la voie publique, et non pas uniquement dans les véhicules de transport ou les emprises ferroviaires.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. La possibilité d’enregistrer est déjà élargie par l’alinéa 11 et le sera davantage encore si mon amendement CL90 est adopté. Votre amendement renvoie en outre à un décret, ce qui est contestable. Je vous invite à le retirer au profit du mien.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL89 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL90 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux agents de la Suge et du GPSR de poursuivre l’enregistrement audiovisuel par caméra-piéton dans leur véhicule.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 8 modifié.
Article 8 bis : Expérimentation de l’usage des caméras‑piétons pour les conducteurs d’autobus et d’autocars
Amendement de suppression CL118 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous sommes devenus très vigilants à l’égard des expérimentations ; le déploiement envisagé de la vidéosurveillance algorithmique nous donne d’ailleurs raison. En l’occurrence, l’expérimentation de caméras-piétons qui seraient utilisées par les conducteurs soulève le problème de l’enregistrement des voix des passagers et, de ce fait, de la protection des données personnelles.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Cette expérimentation est attendue. Rappelons que les atteintes physiques à l’égard des conducteurs ont augmenté de 12 % en 2023 par rapport à l’année précédente et que cette tendance s’observe depuis plusieurs années. Les conducteurs sont les premières victimes des outrages et menaces.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL55 de M. Roger Vicot
M. Paul Christophle (SOC). Nous souhaitons que les syndicats soient consultés préalablement à la mise en œuvre de l’expérimentation.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL91 et CL92 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL93 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je propose de porter la durée de l’expérimentation de deux à trois ans.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 8 bis modifié.
Article 8 ter (art. L. 2121‑1‑1, L. 2121‑3 et L. 2121‑12 du code des transports) : Mise en place d’un numéro téléphonique national unique pour les usagers des services publics de transport ferroviaire
Amendement CL175 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que le numéro 3117 est commun à tous les opérateurs.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 8 ter modifié.
Après l’article 8 ter
Amendement CL1 de M. Sacha Houlié
M. Sacha Houlié (NI). Cet amendement, sur lequel j’ai travaillé avec notre ancienne vice-présidente Élodie Jacquier-Laforge, vise à ce qu’à titre expérimental, la voie publique puisse être filmée à Mayotte. Il s’agit de prévenir les caillassages de bus scolaires, qui y sont récurrents et empêchent l’accès des élèves aux établissements scolaires.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Saluant les travaux que vous aviez menés avec notre ancienne collègue, j’émets un avis favorable.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Est-il vraiment certain que la présence de caméras-piétons fera cesser le caillassage des bus scolaires ? Sans doute serait-il intéressant que nous nous penchions sur les raisons qui poussent à la multiplication de ces actes.
M. Sacha Houlié (NI). Il s’agirait non pas de caméras-piétons mais de caméras frontales ou latérales, embarquées dans les bus, visant à identifier les auteurs des caillassages. Elles sont demandées tant par les exploitants que par le rectorat, les parents d’élèves et les élus, et me semblent constituer une bonne solution.
La commission adopte l’amendement.
Amendements de suppression CL94 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL3 de Mme Sandra Regol, CL39 de M. Roger Vicot, CL119 de M. Thomas Portes et CL181 de M. Paul Molac
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L’article 9 autorise les services de sûreté de la SNCF et de la RATP à utiliser des logiciels de vidéosurveillance algorithmique a posteriori pour sélectionner et exporter des images le plus rapidement possible, dans le seul cadre des réquisitions judiciaires et à condition que ce traitement respecte le droit des données personnelles. Ne faisons pas d’amalgame : cette disposition est tout à fait différente de celle adoptée dans le cadre de la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, qui permettait, à titre expérimental, l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique pour détecter en temps réel des événements prédéterminés susceptibles de présenter des risques pour la sécurité de manifestations sportives, récréatives ou culturelles. Cette expérimentation doit s’achever au plus tard en mars 2025.
La Cnil m’a clairement expliqué que l’article 9 était inutile : son collège a jugé qu’il n’était nécessaire de légiférer que pour autoriser le traitement algorithmique en temps réel. Autrement dit, les services de sûreté de la SNCF et de la RATP peuvent très bien utiliser à droit constant un logiciel de vidéosurveillance algorithmique dans les conditions prévues à l’article 9. En outre, en prévoyant une autorisation spécifique pour ce seul usage a posteriori, cet article risque de fragiliser le dispositif existant, au détriment des collectivités territoriales et des autres acteurs qui l’utilisent déjà, dans le respect du droit. Je vous propose donc de le supprimer.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Nous demandons également la suppression de l’article 9, pour des raisons peut-être un peu différentes de celles exposées par le rapporteur. La Quadrature du net considère que le recours systématique au traitement algorithmique, même a posteriori, marque un changement de paradigme important dans notre État de droit et le passage à un modèle de surveillance généralisée des espaces publics auquel nous sommes défavorables.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 9 est supprimé et les amendements CL56 de M. Roger Vicot, CL59 de Mme Marie-France Lorho et CL120 de M. Thomas Portes tombent.
Après l’article 9
Amendements identiques CL48 de M. Roger Vicot et CL121 de Mme Élisa Martin
M. Hervé Saulignac (SOC). La loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 a ouvert la possibilité, jusqu’en mars 2025, de recourir au traitement algorithmique de la vidéosurveillance. Or, au-delà de l’étude d’impact de ce texte, déjà très explicite, le Conseil d’État et la Cnil ont clairement souligné le risque d’atteinte aux droits et libertés fondamentales garantis par la Constitution. La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et le Conseil national des barreaux (CNB) ont tous deux appelé à l’abandon de cette expérimentation. Aussi demandons-nous l’abrogation de l’article concerné dans la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous souscrivons à ces arguments. Nous savons tous que cette disposition particulièrement liberticide n’a qu’un seul objectif : surveiller.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Ce n’est pas le débat qui nous occupe aujourd’hui. Du reste, l’expérimentation arrive bientôt à son terme. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Article 10 (art. L. 2251-11 du code des transports [nouveau]) : Traitement et collecte de certaines données sensibles en cas de flagrance par la Suge et le GPSR
Amendements de suppression CL122 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL13 de Mme Sandra Regol, CL40 de M. Roger Vicot, CL124 de Mme Élisa Martin et CL223 de M. Sacha Houlié
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L’article 10, qui avait été supprimé par la commission des lois du Sénat avant d’être rétabli en séance publique, autorise les agents du GPSR et de la Suge à collecter des données sensibles afin d’améliorer la constatation des infractions dans les transports collectifs de voyageurs. En effet, ils sont actuellement limités à la description vestimentaire des personnes mises en cause. Si je souscris à l’objectif de l’article, mes échanges avec la Cnil et la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ) du ministère de l’intérieur m’ont amené à considérer que la collecte de telles données pouvait être autorisée par voie réglementaire et qu’il n’était donc pas nécessaire de légiférer sur ce point. Je vous propose donc de supprimer cet article.
Mme Sandra Regol (EcoS). Il faut protéger les données hautement sensibles. C’est pour ce motif que la commission des lois du Sénat avait supprimé cet article, avant qu’il soit rétabli en séance publique. Il nous appartient désormais de le supprimer définitivement.
M. Hervé Saulignac (SOC). Quiconque rêve d’embrasser une carrière professionnelle lui permettant d’utiliser des superpouvoirs n’a qu’une option : devenir agent de sécurité ! La collecte et le traitement de données sensibles sont loin d’être anecdotiques ; peu de gens y sont d’ailleurs autorisés. Il faut revenir à la raison et supprimer cette disposition particulièrement préoccupante.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). On ne sait pas très bien dans quel cadre seront traitées ces données sensibles, a fortiori par des organismes privés. Du reste, cette disposition pourrait avoir un effet domino : ce qui est autorisé aujourd’hui dans certaines conditions pourrait être étendu demain à d’autres situations, voire à d’autres données, comme les données biométriques. La prudence nous commande de supprimer cet article.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 10 est supprimé.
Article 11 (art. L. 1632-2-1 du code des transports [nouveau]) : Captation et enregistrement du son dans les véhicules roulants de transport collectif
Amendements de suppression CL41 de M. Roger Vicot, CL103 de M. Pascal Jenft, CL129 de M. Thomas Portes et CL224 de M. Sacha Houlié
M. Hervé Saulignac (SOC). L’article 11 tend à autoriser les opérateurs à installer des systèmes de captation du son dans les véhicules de transports en commun. Je sais que capter un son ne revient pas à installer un système d’écoute généralisé, mais quand même ! On ne se parle déjà pas beaucoup dans les transports, alors si en plus on a l’impression d’être écouté… Je suis curieux de voir comment la presse internationale réagira à ce genre d’initiative. La commission des lois du Sénat avait décidé de supprimer cet article ; nous serions bien inspirés d’en faire autant.
M. Pascal Jenft (RN). Cette disposition, tout expérimentale qu’elle soit, porte une atteinte disproportionnée à la vie privée. Nous proposons donc de supprimer l’article 11.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Mesurez-vous réellement la portée de cet article ? Un chauffeur de bus, qui n’est pas assermenté, pourra déclencher la captation du son dans l’ensemble d’un véhicule de transport collectif, pour des motifs très divers. Cette surveillance généralisée et cette collecte de données nous interrogent. Ayons le bon sens de supprimer cet article !
M. Sacha Houlié (NI). Monsieur Portes, l’article 8 autorise les agents assermentés à faire usage d’une caméra-piéton. Les chauffeurs peuvent naturellement être assermentés : prévoir un dispositif spécifique pour la captation sonore est donc superfétatoire.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a censuré l’article 3 de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice pour les années 2023 à 2027 (LOPJ) au motif que l’activation à distance de certains appareils pour poursuivre des infractions pourtant considérées comme très graves constituait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée. Dans ces conditions, je vois donc mal comment, en l’état, l’article 11 pourrait être jugé constitutionnel. Je vous invite donc moi aussi à le supprimer.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je vais tenter de vous convaincre de l’intérêt de maintenir l’expérimentation – et si je n’y parviens pas, nous en reparlerons d’ici à l’examen en séance.
La voix constituant une donnée personnelle encore plus protégée que l’image, je comprends que, d’un point de vue juridique, la captation du son soit source d’interrogations. Cependant, il s’agit de ne l’autoriser qu’autour de l’habitacle des conducteurs, qui sont, je le rappelle, les agents qui subissent la plus forte hausse du nombre d’agressions. C’est donc bien pour les protéger que nous proposons cette expérimentation, tout comme celle du port de caméras-piétons.
En outre, de tels dispositifs sont déjà largement déployés par les opérateurs – je pense notamment à l’alarme discrète, dont l’activation par le chauffeur déclenche une captation sonore depuis le poste de contrôle (PC) de sécurité de l’opérateur. Si nous votons contre l’expérimentation, ils devront cesser d’y avoir recours.
Il me semble donc important de maintenir cette expérimentation, tout en l’encadrant strictement : la captation doit être limitée au seul habitacle du conducteur et, sauf impossibilité majeure, l’ensemble des passagers doivent être avertis de son déclenchement. Dans un souci d’harmonisation avec toutes les autres expérimentations, je vous proposerai d’ailleurs d’en allonger la durée à trois ans.
Je vous demande donc de retirer vos amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme Sandra Regol (EcoS). Je partage les craintes de mes collègues quant à d’éventuelles dérives. Je pense notamment à des journalistes qui seraient enregistrés à leur insu parce qu’ils discutent à proximité de la cabine du conducteur – un cas que nous avions déjà évoqué lors du premier examen du texte, pendant la précédente législature.
Le problème, en réalité, c’est que nos collègues sénateurs ont rédigé cet article avec les pieds ! C’est bien cette rédaction floue qui nous pousse à vouloir supprimer l’article, ce qui m’ennuie d’autant plus que les chauffeurs eux-mêmes demandent légitimement à bénéficier de tels dispositifs d’alerte – qui ne sont même pas discrets puisqu’en l’espèce, le déclenchement de l’enregistrement est signalé par un son –, et que nous nous devons de répondre à leur besoin de protection. C’est ubuesque !
M. Ian Boucard (DR). Le métier de conducteur de transports en commun, et particulièrement de chauffeur de bus, est malheureusement devenu à risque. On ne peut pas faire abstraction de cette triste réalité. Face à la recrudescence des agressions, nous devons mieux protéger ces agents de service public.
Je comprends les inquiétudes de mes collègues : moi le premier, je ne suis pas très emballé par la captation sonore. Cependant, contrairement à ce que certains ont laissé entendre, l’article 11 n’autorise pas une captation permanente dans l’ensemble du véhicule, mais seulement le déclenchement de l’enregistrement de l’environnement sonore autour de la cabine du conducteur si ce dernier est menacé, insulté ou agressé.
Monsieur Saulignac, plutôt que de vous inquiéter de ce que penseront les médias étrangers de cette expérimentation, vous devriez vous émouvoir de leur perception du taux d’agression dans les transports en commun de notre pays. Grâce à une loi ad hoc bien écrite et à l’important déploiement d’agents de sécurité et de forces de l’ordre dans les transports en commun, les Jeux olympiques se sont heureusement très bien passés, mais avant l’événement, des centaines de touristes étrangers avaient peur de prendre le métro en région parisienne à cause des agressions dont ils avaient eu vent. Voilà qui devrait davantage inquiéter les membres de la représentation nationale, a fortiori s’ils appartiennent au même camp que la maire de Paris, puisqu’en dix ans de mandat, la délinquance a explosé ! Je ne vise pas les Insoumis, monsieur Portes, parce que j’ai bien compris que M. Grégoire n’en voulait pas dans son équipe…
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Le problème tient aussi à la nature des données collectées : la voix est une donnée biométrique très sensible, et son enregistrement un sujet problématique qu’on ne peut pas évacuer d’un revers de manche, d’autant que l’article ne précise pas dans quelles conditions la captation peut être déclenchée.
Non seulement le dispositif prévu est particulièrement intrusif et attentatoire aux libertés publiques et à la vie privée, mais en plus, rien ne garantit qu’il protégera réellement les conducteurs de bus et de tramway. Pour ma part, j’en doute fort : renforcer la présence humaine et déployer davantage d’agents de médiation, en particulier la nuit, serait probablement plus efficace.
M. Sacha Houlié (NI). Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur Boucard, les chiffres des infractions commises dans les transports sont stables.
Par ailleurs, je le répète, cet article est entaché de vices qui ne sont pas régularisables – en témoignent les nombreux amendements déposés par le rapporteur. Si vous nous proposez en séance une réécriture globale de cet article sous une forme acceptable permettant de régulariser le dispositif d’alerte discrète, je le voterai volontiers. D’ici là, je maintiens mon amendement de suppression.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Les chiffres des infractions sont effectivement stables, monsieur Houlié, sauf en ce qui concerne les conducteurs de bus.
Supprimer cette expérimentation ne serait pas sans conséquence sur les dispositifs déjà en place, ce qui risque de susciter de nouvelles inquiétudes dans un secteur qui a déjà toutes les peines du monde à recruter, car le métier est difficile. Nous devons trouver un moyen de protéger nos agents tout en garantissant nos libertés publiques : la captation n’y suffira pas à elle seule – je vous rejoins sur ce point, madame Martin –, mais c’est un des dispositifs participant à leur sécurité.
Madame Regol, aussi surprenante qu’elle puisse paraître, la rédaction des sénateurs a le mérite d’aller au fond des choses. Certains opérateurs sont opposés à cet article uniquement parce qu’ils ne souhaitent pas que le législateur réglemente des dispositifs qu’ils utilisent déjà, au risque de devoir composer avec des défections dans les effectifs.
Avec cet article, les sénateurs ont choisi de mettre le sujet sur la table : c’est une décision courageuse, responsable et légitime. Il nous appartient désormais d’améliorer cette disposition. Plutôt que de supprimer cet article – ce qui serait, à mes yeux, une erreur –, travaillons à sa réécriture à travers les différents amendements que je vous propose.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 11 est supprimé et tous les autres amendements tombent.
Chapitre IV
De nouveaux dispositifs pénaux pour mieux réprimer les délits relatifs aux transports
Article 12 (art. L. 2242-6 du code des transports) : Création d’un délit « d’incivilité d’habitude »
Amendements de suppression CL14 de Mme Sandra Regol, CL42 de M. Roger Vicot, CL104 de M. Pascal Jenft, CL132 de Mme Élisa Martin et CL225 de M. Sacha Houlié
Mme Sandra Regol (EcoS). En créant un délit d’incivilité d’habitude, l’article 12 met sur un pied d’égalité toutes les infractions : importuner les voyageurs, fumer, tout est dans tout, et inversement ! Sa rédaction est si floue qu’on peine à comprendre l’intention du législateur et qu’on va au-devant de grandes difficultés d’application. Il est proprement scandaleux de devoir discuter d’un article qui stigmatise autant. Comme d’autres groupes, nous demandons donc sa suppression.
M. Roger Vicot (SOC). En l’état actuel du droit, les personnes qui voyagent habituellement sans titre de transport sont déjà passibles de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende. Étendre cette peine à des incivilités aussi diverses que la vente à la sauvette, la méconnaissance des règles relatives au transport d’animaux, l’utilisation d’appareils sonores ou le vapotage nous semble particulièrement excessif. Une telle disposition méconnaît le principe de proportionnalité des peines consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Incivilité ne signifie pas délinquance, et inversement. Introduire un animal dans les transports en commun, déclencher une alarme ou gêner le stationnement d’un bus ne justifie pas une telle répression. Du reste, ces incivilités sont déjà sanctionnées par des contraventions.
Cette surenchère relève de ce qu’on appelle le populisme pénal : elle procède à la fois d’un affichage un peu démago et de l’idée que la disproportion des sanctions est de nature à réduire les infractions.
M. Sacha Houlié (NI). En mélangeant des infractions de nature différente pour caractériser le délit d’incivilité, cet article méconnaît le principe de proportionnalité. C’est tout à fait confondant. Encore une fois, il n’y a malheureusement pas grand-chose à sauver : il faut donc supprimer cet article.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je pense au contraire qu’il y a des choses à sauver, monsieur Houlié. Objectivement, toutes ces petites incivilités créent un continuum qui, à la longue, fatigue et agace, en particulier lorsqu’elles finissent par perturber, voire totalement bloquer, le fonctionnement des transports en commun – j’en suis régulièrement le témoin, et je ne suis probablement pas le seul ici.
Pour ma part, je souscris donc à l’objectif de cet article, même si je vous concède que son champ d’application doit être restreint : vapoter, s’installer à la place d’un autre voyageur ou ne pas étiqueter son bagage ne peut pas caractériser une incivilité d’habitude. Reste que ce dispositif n’est pas nouveau, puisque le droit prévoit déjà un délit d’habitude pour le non-respect des obligations tarifaires. Ce qui est inédit, en revanche, c’est de retenir le cumul de dix infractions différentes pour caractériser le délit : cela n’est ni applicable, ni souhaitable. Je défendrai tout à l’heure un amendement tendant à rétablir la rédaction initiale de l’article, qui prévoit que le délit d’incivilité d’habitude est constitué dès lors qu’une infraction a été répétée à cinq reprises.
Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CL136 de M. Guillaume Gouffier Valente et CL215 de M. Vincent Caure
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Vapoter, s’installer à la place d’un autre voyageur ou ne pas étiqueter son bagage ne cause pas des désagréments justifiant un tel niveau de répression. Maintenir ces comportements dans la liste des infractions caractérisant le délit d’incivilité d’habitude risquerait de fragiliser la constitutionnalité du dispositif.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, les amendements CL16 et CL17 de Mme Sandra Regol tombent.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL138, CL139, CL140 et CL141 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL49 de M. Roger Vicot ; amendements identiques CL142 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL15 de Mme Sandra Regol, CL57 de M. Roger Vicot, CL176 de M. Paul Molac, CL216 de M. Vincent Caure et CL232 de M. Jean Moulliere (discussion commune)
M. Roger Vicot (SOC). L’alinéa 14 prévoit de sanctionner plus sévèrement les incivilités d’habitude si elles sont commises par des personnes sans domicile fixe. Or, si ces dernières en sont réduites à mendier dans les trains et sur le domaine public ferroviaire, c’est évidemment parce qu’elles sont totalement insolvables ! Cette disposition hallucinante est d’un cynisme total : aussi mon amendement CL49 vise-t-il à la supprimer.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L’amendement CL142 vise à supprimer la mendicité de la liste des infractions caractérisant le délit d’incivilité d’habitude.
L’amendement CL49 de M. Vicot prévoit, outre cette suppression, que les services de sûreté sollicitent la brigade d’assistance aux personnes sans abri pour garantir une prise en charge adaptée : j’y suis donc favorable.
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Plutôt que de s’attaquer à la pauvreté, on s’en prend aux pauvres ! L’alinéa 14 est vraiment caricatural : le supprimer relève donc du bon sens.
M. Paul Molac (LIOT). Cette disposition est l’une de celles qui m’ont le plus choqué dans ce texte.
La commission adopte l’amendement CL49.
En conséquence, les autres amendements tombent.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL143, CL144, CL145, CL146, CL147, CL148 et CL149 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendements identiques CL150 de M. Guillaume Gouffier Valente et CL217 de M. Vincent Caure
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je propose que le délit d’incivilité d’habitude soit caractérisé par la réitération à cinq reprises de la même infraction au cours des douze derniers mois, et non par la commission de dix infractions différentes.
M. Vincent Caure (EPR). Il s’agit de rétablir l’article dans sa rédaction initiale, qui nous paraît plus juste. L’extension du délit d’incivilité doit rester limitée.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’article 12 modifié.
Après l’article 12
Amendement CL153 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Pour répondre à la demande de la RATP et dans un souci d’harmonisation avec l’interdiction de fumer, cet amendement vise à étendre l’interdiction de vapoter en vigueur dans les véhicules de transports en commun aux espaces fermés affectés au transport public de voyageurs – autrement dit, sur les quais de métro, où cette pratique crée des tensions et peut déclencher les alarmes incendie. Les quais à l’extérieur ne seraient pas concernés.
M. le président Florent Boudié. Vous ne me semblez pas convaincu, monsieur Vicot !
M. Roger Vicot (SOC). Je le suis d’autant moins que l’interdiction de vapoter dans les lieux publics fermés n’a pas empêché Élisabeth Borne de continuer à se livrer à cette pratique dans l’hémicycle, bien que nous lui en ayons fait la remarque à plusieurs reprises.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. La loi est bien censée s’appliquer à tous. Encore une fois, il s’agit de répondre à la demande des opérateurs, qui m’ont indiqué que cette pratique entraînait des désagréments et des tensions entre les usagers, en particulier pendant les heures de pointe. Je répète que les quais à l’extérieur ne seront pas concernés.
La commission rejette l’amendement.
Article 13 (art. L. 1633-3 du code des transports [nouveau], art. 230-19 du code de procédure pénale et art. L. 121-8 du code de la justice pénale des mineurs [nouveau]) : Création d’une peine complémentaire d’interdiction de paraître dans les transports en commun
Amendements de suppression CL155 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL43 de M. Roger Vicot, CL58 de Mme Sandra Regol, CL133 de M. Thomas Portes, CL218 de M. Vincent Caure et CL226 de M. Sacha Houlié
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Pour les raisons que j’ai déjà exposées, je propose de supprimer l’article 13.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Cet article tend à créer une peine complémentaire d’interdiction de paraître dans un réseau de transport public, applicable à la fin de la privation de liberté. Non seulement cela nuirait à la réinsertion des personnes condamnées, qui ont besoin de pouvoir se déplacer, mais en plus, ce dispositif est complètement inopérant : à moins de recourir à la vidéosurveillance algorithmique, il est humainement impossible de vérifier à l’entrée de chaque gare qu’une personne n’a pas l’interdiction de paraître dans l’enceinte ferroviaire.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 13 est supprimé et les amendements CL18 de Mme Sandra Regol, CL32 et CL33 de M. Yoann Gillet, CL71 de Mme Elsa Faucillon et CL34 de M. Yoann Gillet tombent.
La réunion est suspendue de dix-sept heures cinq à dix-sept heures quinze.
Article 14 (art. L. 2242-4-1 et L. 2242-4-2 [nouveaux] du code des transports) : Délictualisation de l’oubli par négligence d’objets et de bagages dans les transports en commun
Amendements de suppression CL44 de M. Roger Vicot, CL134 de Mme Élisa Martin, CL177 de M. Paul Molac et CL227 de M. Sacha Houlié
M. Roger Vicot (SOC). Avec cette proposition de loi, un SDF qui vapoterait sur un quai puis y oublierait son sac devrait payer une amende équivalente à douze mois de revenus ! Il faut supprimer l’article.
M. le président Florent Boudié. Monsieur Vicot, nous avons exclu du champ du délit d’incivilités d’habitude les personnes sans domicile fixe, de même que les actes de mendicité et le vapotage sur un quai.
M. Roger Vicot (SOC). Soit. Cet article prévoit tout de même de punir l’oubli d’un bagage d’une amende de 2 500 euros. C’est excessif.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous nous opposons à cet article et à la vidéosurveillance algorithmique qu’il implique. En effet, c’est seulement avec cette technologie qu’il sera possible d’identifier la personne qui a abandonné son sac, de manière intentionnelle ou non. Que se passera-t-il d’ailleurs, une fois qu’elle le sera ?
Cet article repose sur l’idée que les problèmes disparaissent grâce à des sanctions. Je n’y crois pas, d’autant que les abandons de bagage s’expliquent souvent par des étourderies, dont le responsable est la première victime. Il faut plutôt faire comprendre à nos concitoyens quelles en sont les conséquences : l’instauration d’un périmètre de sécurité, le blocage de la circulation et ainsi de suite.
M. Paul Molac (LIOT). La création d’un délit d’oubli de bagage dans les transports publics me semble disproportionnée. Au passage, si le bagage oublié est jugé suspect, les démineurs le font exposer. Le responsable de l’oubli y perd ses affaires, ce qui lui donne déjà une leçon !
M. Sacha Houlié (NI). Le 5° de l’article°2242-4 du code des transports sanctionne déjà le jet ou le dépôt d’un matériau ou objet quelconque dans un train ou dans une gare de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende.
Et puis bon courage pour prouver que ces oublis sont intentionnels ! Faudra-t-il envisager que des infractions non intentionnelles ont une composante intentionnelle ? Ces innovations juridiques me laissent très perplexe.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Les chiffres sont éloquents : le nombre de colis abandonnés traités par la RATP est passé de 624 en 2019 à 2 269 en 2023, soit une multiplication par 3,6 en quatre ans seulement. Quant aux objets délaissés dans les emprises de la SNCF qui ont donné lieu au déclenchement de la procédure Vigipirate et ont donc entraîné des perturbations lourdes, leur nombre est passé de 7 681 en 2019 à 11 460 en 2023 ; ils ont donc augmenté de moitié en quatre ans.
Au regard des perturbations entraînées par ces oublis sur les réseaux de transports collectifs, il faut trouver de nouveaux moyens pour en réduire le nombre. Cet article a été élaboré avec les opérateurs du secteur, qui déploient déjà des campagnes de sensibilisation. Les usagers des gares connaissent ainsi la campagne « attentifs ensemble ».
Je m’oppose donc à ces amendements de suppression. Toutefois, selon moi, il faut réécrire cet article, afin de mieux proportionner les sanctions. C’est l’objet de mon amendement suivant, le CL159. Il tend à distinguer trois cas : l’abandon non intentionnel de bagage, puni d’une contravention de quatrième classe ; l’abandon non intentionnel de bagage dans un contexte où l’étiquetage est obligatoire, puni d’une contravention de cinquième classe ; et l’abandon de bagage dont le caractère intentionnel a pu être prouvé, y compris grâce à la vidéosurveillance, puni d’une amende de niveau délictuel, d’un montant de 3 750 euros.
Je suis ouvert à une modification de cette rédaction en séance publique, dès lors qu’elle reste lisible. Peut-être faudrait-il renoncer à instaurer un délit d’oubli de bagage et rester dans le champ du contraventionnel.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL159 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je viens de le présenter : il vise à mieux proportionner les sanctions.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Je vous remercie pour votre effort de rédaction, mais comment distinguer entre les abandons volontaires et involontaires, y compris à partir d’images de vidéosurveillance ? Il n’est pas besoin d’être premier prix au cours Florent pour feindre l’étourderie ! Cet article ne vise-t-il pas simplement un effet d’affichage ?
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL201 de M. Philippe Latombe, les amendements identiques CL106 de M. Pascal Jenft et CL202 de M. Philippe Latombe ainsi que les amendements CL158 et CL157 de M. Guillaume Gouffier Valente tombent.
Amendement CL105 de M. Pascal Jenft
M. Pascal Jenft (RN). L’article prévoit de punir l’abandon intentionnel de matériaux ou objets dans les espaces et véhicules et transport public d’une amende de 3 750 euros. Il prévoit également que, pour tous les contrevenants, l’action publique pourra être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire de 300 euros, pouvant être minorée à 250 euros ou majorée à 600 euros. Or nous refusons que les récidivistes puissent bénéficier d’une amende forfaitaire, compte tenu des désagréments causés par leur acte. Ce n’est pas suffisamment dissuasif.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Nous renforçons déjà le régime de sanctions.
La commission rejette l’amendement.
Amendements CL108 de M. Pascal Jenft et CL21 de Mme Sandra Regol (discussion commune)
M. Pascal Jenft (RN). L’article prévoit, à juste titre, des amendes d’un montant moins élevé lorsque l’abandon de bagage est involontaire – dans sa rédaction initiale, l’alinéa 5 prévoyait ainsi une amende de 2 500 euros quand un abandon involontaire déclenche l’ouverture d’un périmètre de sécurité et entrave la circulation des trains.
L’article prévoit par ailleurs la possibilité d’éteindre l’action publique par le versement d’une amende forfaitaire, mais uniquement en cas d’abandon volontaire de bagage. C’est injuste ! Cette possibilité devrait plutôt être réservée aux cas d’abandon involontaire sans récidive. C’est l’objet de cet amendement de repli.
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Par l’’amendement de repli CL21, nous demandons d’étendre la possibilité d’éteindre ’l’action publique par le versement d’une amende forfaitaire aux cas d’abandon involontaire de bagage. De fait, pour le contrevenant, il risque d’être financièrement plus intéressant de renoncer à récupérer son bagage que de payer l’amende.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. ’’’Je vous demanderai un retrait, s’agissant d’amendements de repli par rapport à la rédaction du Sénat sur laquelle nous venons de revenir en supprimant l’amende de 2 500 euros.
Les amendements CL108 et CL21 sont retirés.
La commission adopte l’article 14 modifié.
Après l’article 14
Amendement CL161 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Il faut permettre aux opérateurs de procéder à l’enlèvement des véhicules embourbés sur les voies de tramway.
Certains conducteurs empruntent les voies réservées aux tramways afin de doubler les autres véhicules. Si leur véhicule reste embourbé sur ces voies, l’opérateur ne peut pas procéder au déplacement du véhicule, cette faculté étant réservée à la compagnie d’assurance de son conducteur, ce qui entraîne des retards et des désordres.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Êtes-vous certain que dans ces cas, seule l’assurance du conducteur puisse décider du déplacement du véhicule ? Pourtant, c’est l’équivalent d’un stationnement très gênant.
La commission adopte l’amendement.
Article 15 (art. L. 1633-5 [nouveau] L. 2242-4 et L. 3116-3 du code des transports) : Création d’un délit de « transport surfing »
Amendements de suppression CL45 de M. Roger Vicot et CL137 de M. Thomas Portes
M. Roger Vicot (SOC). Cet article prévoit une peine de six mois de prison et 3 750 euros d’amende pour ceux qui s’installent sur un train ou un bus ou s’y accrochent. L’action publique pourrait être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire de 300 euros.
Si ces actes doivent être prohibés, n’y a-t-il pas d’autres solutions que ces sanctions ? Il faudrait plutôt sensibiliser les jeunes au danger de ces pratiques. Nous demandons donc la suppression de l’article.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cette pratique, qui concerne surtout les jeunes gens, est dangereuse, mais ce n’est pas en la sanctionnant davantage que nous permettrons d’éviter les accidents.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Ces dispositions, après avoir été adoptées par notre assemblée, avaient été censurées, au motif qu’elles constituaient un cavalier législatif. Elles trouvent finalement leur place dans ce texte.
Les pratiques de train surfing se sont amplifiées ces dernières années – les exploitants ont recensé 177 incidents en 2022, 118 en 2021 et 106 en 2020. Elles concernent, outre les bus, les métros, à la station Bir-Hakeim, par exemple. Or elles sont très dangereuses ; elles ont donné lieu à un accident mortel en 2017. Le phénomène perdure malgré les campagnes de sensibilisation des opérateurs. Il faut donc aller plus loin.
La commission rejette les amendements.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL162 et CL165 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendement CL109 de M. Pascal Jenft
M. Pascal Jenft (RN). Cet article vise à combler le vide juridique concernant les utilisations détournées de véhicules de transport public telles que le bus surfing ou le train surfing. Ces comportements dangereux et nuisibles seraient désormais passibles d’une amende délictuelle de 3 750 euros.
L’article prévoit également la possibilité d’éteindre l’action publique à travers le versement d’une amende forfaitaire délictuelle d’un montant allant de 250 à 600 euros, afin de sanctionner les contrevenants plus rapidement et de leur donner une seconde chance. Or, selon nous, cette possibilité devrait être fermée aux récidivistes ; sinon, le dispositif ne serait pas suffisamment dissuasif.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Amendement CL164 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L’amendement tend à préciser la liste des agents pouvant constater le délit de train surfing.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte l’article 15 modifié.
Chapitre V
Transmission d’informations au ministère public
Article 16 (art. L. 2243-1, L. 2243-2 et L. 2243-3 [nouveaux] du code des transports) : Création d’un fichier au bénéfice des agents de la Suge et du GPSR réunissant les données des contrevenants à la police des transports
Amendements de suppression CL166 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL46 de M. Roger Vicot, CL151 de Mme Élisa Martin et CL219 de M. Vincent Caure
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Puisque nous avons supprimé l’article 13, je vous propose de supprimer également l’article 16.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 16 est supprimé.
Chapitre VI
Mesures relatives à la sécurisation du recrutement et de l’affectation en lien avec les transports
Article 17 (art. L. 225-5 du code de la route) : Information automatique des opérateurs de transport public routier relative à la perte de permis de conduire d’un conducteur
Amendement de suppression CL152 de M. Thomas Portes
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). L’article prévoit que la décision de retirer le permis de conduire à un conducteur de transport public soit automatiquement transmise à son employeur, y compris dans les cas où elle ne s’accompagne pas d’une interdiction de conduire dans un cadre professionnel. Ce serait une violation majeure de la vie privée ; il faut donc supprimer l’article.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Cet article répond à une demande des opérateurs de transport public. Je comprendrais que vous vous interrogiez sur les modalités de cette mesure de bon sens, mais je ne comprends pas que vous souhaitiez sa suppression.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Le problème principal est l’impact de la mesure sur le respect de la vie privée, qu’il faut équilibrer avec l’objectif de sécurité.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Les conducteurs des transports publics doivent disposer du permis de conduire.
Mme Aurore Bergé (EPR). Madame Martin, je m’étonne que vous demandiez la suppression de cet article de bon sens. Ceux qui empruntent le bus seront rassurés de savoir que le conducteur est titulaire du permis de conduire !
Pour la sécurité des usagers, il faut que l’opérateur de transport soit informé en cas de retrait de permis. Votre manière de privilégier la préservation de la vie privée au détriment de la sécurité des personnes est révélatrice.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’article 17 non modifié.
Article 18 (art. L. 6342-4 du code des transports) : Simplification des procédures administratives de recrutement des agents de sûreté aéroportuaire
Amendement de suppression CL154 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). L’article vise à supprimer l’agrément par l’État des agents de sécurité procédant aux fouilles de bagage dans les zones aéroportuaires.
Au nom de la sécurité, vous ouvrez les vannes concernant la palpation des usagers ou la fouille des bagages, au point que l’on ne comprend plus trop quel sera leur fondement. Il faut préserver la vie privée, en évitant les actes les plus intrusifs.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. Les agents des zones aéroportuaires procédant à des fouilles sont très contrôlés. Ils sont soumis à une accumulation d’enquêtes administratives.
Des procédures d’enquête sont ainsi prévues pour obtenir l’autorisation préalable d’entrer en formation ; pour la carte professionnelle, délivrée pour cinq ans ; pour l’habilitation préfectorale, d’une durée de trois ans maximum, avec un criblage semestriel par le service national des enquêtes administratives de sécurité ; pour l’agrément du préfet et du procureur de la République, délivré pour une durée de cinq ans. Nous proposons de supprimer cette dernière procédure, qui apparaît redondante, le contrôle des antécédents étant suffisant.
M. Julien Rancoule (RN). L’agrément préfectoral était justifié quand les préfets étaient compétents pour délivrer les cartes professionnelles dans le domaine de la sécurité privée. Or c’est désormais le Cnaps (Conseil national des activités privées de sécurité) qui est chargé de l’enquête de moralité et du contrôle des antécédents judiciaires ; son travail est d’ailleurs plus pointilleux que celui des services préfectoraux ne l’était dans le passé. Il faut donc actualiser la loi pour gagner en efficacité.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL168 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
La commission adopte l’article 18 modifié.
Article 18 bis (art. 706-53-7 du code de procédure pénale) : Possibilité pour les entreprises de transport public de consulter, par l’intermédiaire des préfets, le fichier automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais)
Amendement de suppression CL156 de M. Thomas Portes
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). L’article prévoit d’ouvrir à l’employeur l’accès à des fichiers judiciaires concernant ses salariés – fichiers qui ne sont, au passage, pas forcément fiables ni actualisés. La mesure, si elle ne semble pas illogique à première vue, est en fait disproportionnée, car ces fichiers comportent de nombreuses informations personnelles. D’autres solutions seraient envisageables : il serait par exemple possible de demander à un opérateur tiers de supprimer les informations les plus personnelles avant de transmettre le dossier à l’employeur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. L’article 706‑53‑7 du code de procédure pénale prévoit déjà qu’un certain nombre d’acteurs publics peuvent être destinataires des informations contenues dans le Fijais (fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes) dans le cadre des procédures de recrutement ou d’affectation.
Je conviens toutefois que dans sa rédaction actuelle, l’article étend trop largement l’accès à ces fichiers, puisqu’il concernerait toutes les « entreprises de transport public de voyageurs ». J’ai donc déposé un amendement visant à limiter l’extension de l’accès à ces fichiers à la seule SNCF, sachant que les autorités organisatrices de transport peuvent déjà accéder à ces informations à travers les présidents d’exécutifs locaux. C’est une mesure de bon sens.
Sachez par ailleurs que le gouvernement travaille sur un dispositif de fiabilisation du contrôle de l’incapacité à exercer une activité en lien avec des mineurs, en lien avec la proposition de loi de Mme Mercier que le Sénat vient d’adopter. Un amendement devrait être présenté en séance publique.
M. Jordan Guitton (RN). C’est à se demander si, pour la gauche, le conducteur de bus idéal n’est pas un auteur d’infraction sexuelle privé de son permis de conduire ! Au nom du respect des droits et des libertés, vous protégez toujours les mêmes, et jamais les usagers des transports publics. Pour ces derniers, y compris quand ils sont mineurs, la gauche est absente.
Mme Aurore Bergé (EPR). C’est à se demander si les amendements de suppression de La France insoumise ne sont pas rédigés automatiquement. On renonce donc d’abord à les lire, mais quand on les lit, on est scandalisé.
Pour vous, il est normal que les employeurs ignorent qu’ils recrutent des personnes inscrites au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes pour transporter des mineurs et assurer leur sécurité ! Quel citoyen responsable pourrait l’accepter ? J’espère que vous renoncerez à votre amendement.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). À l’instant, le rapporteur lui-même a souligné que la rédaction actuelle de l’article posait problème et qu’il fallait restreindre l’élargissement de l’accès au fichier à la seule SNCF.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL170 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet amendement tend à ouvrir l’accès au Fijais à la SNCF, dans le cadre des procédures de recrutement.
M. Julien Rancoule (RN). C’est trop restrictif. La RATP et les compagnies de transport scolaire devraient également disposer de cet accès.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. La RATP en dispose déjà.
Mme Claudia Rouaux (SOC). Et les compagnies de transport scolaire ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Elles en disposent également, à travers les exécutifs locaux.
La commission adopte l’amendement et l’article 18 bis est ainsi rédigé.
Chapitre VII
Mesures relatives au renforcement de la lutte contre la fraude dans les transports
Article 19 (art. L. 2241-2-1 du code des transports et art. L. 166 F du livre des procédures pénales) : Extension du droit de communication de données fiscales aux agents des transports publics
Amendements de suppression CL47 de M. Roger Vicot et CL160 de Mme Élisa Martin
M. Roger Vicot (SOC). Nous demandons la suppression de cet article, non pas par automatisme, madame Bergé, mais parce qu’il ne faut pas permettre la transmission de données fiscales et sociales aux agents de la Suge. Seule la puissance publique devrait en disposer. Le risque d’atteinte à la vie privée de la mesure est évident.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il est inacceptable que des agents non assermentés puissent accéder à ces données, même si c’est par l’intermédiaire des agents du trésor public. Demandez à ces derniers ce qu’ils pensent de la mesure. Ils sont débordés, à cause des suppressions de poste, qui se poursuivront l’an prochain.
Préservons la capacité de contrôle de l’administration fiscale, notamment pour lutter contre la délinquance en col blanc, plutôt que de mobiliser ses agents pour ce genre de tâches.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je salue tout d’abord le travail de Gilles Savary et Bruno Le Roux, qui avaient prévu un dispositif permettant de vérifier l’adresse des contrevenants dans la loi du 22 mars 2016. Sa mise en œuvre a été retardée par le délai de publication du décret, mais cet article permettra de le compléter en autorisant les agents de l’exploitant du service de transport à vérifier si l’adresse fournie est bonne – sachant qu’ils n’auront pas directement accès aux données privées.
J’en profite pour évoquer le recouvrement des contraventions dressées pour infraction aux règles applicables dans les transports, qui est très faible, puisqu’il est de moins de 10 % pour l’ensemble du pays.
Les données transmises par la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) pour 2022 sont éclairantes. Les agents de la SNCF ont dressé 2,2 millions de procès-verbaux, ce qui représente 254 millions d’euros. Seulement 20,7 millions ont été recouvrés dans les délais légaux, soit un taux de 8,1 %. Pour la RATP, la fraude représente une perte de recettes de 171 millions par an. Le taux de recouvrement atteint 8,5 % des 2,6 millions de procès-verbaux émis. Le taux de recouvrement des procès-verbaux de la régie des transports de la métropole d’Aix-Marseille-Provence est de 5,7%, soit 420 000 euros sur un montant total de 7,41 millions.
La fiabilisation des adresses indiquées par les contrevenants est donc un sujet majeur. Les adresses indiquées dans les procès-verbaux dressés sur le réseau Voyageurs de la SNCF sont erronées dans 50 % des cas – avec en Île-de-France un célèbre Mickey Mouse résidant à Marne-la-Vallée, dont le nom est régulièrement donné sans qu’il soit possible de procéder à un contrôle.
L’article 19 modifie l’article L. 2241-2-1 du code des transports, introduit par la loi « Le Roux-Savary » de 2016. Afin de fiabiliser les identités et les adresses des contrevenants, le nouveau texte permet aux agents de l’exploitant du service de transport chargés du recouvrement d’obtenir communication auprès des administrations publiques ou des organismes de sécurité sociale des nom, prénoms, date et lieu de naissance et de l’adresse de leur domicile. Ces renseignements ne peuvent être utilisés que dans le cadre des transactions permettant d’éteindre l’action publique.
Ces mesures sont indispensables pour lutter contre le fléau de la fraude, qui représente une perte comprise entre 700 et 800 millions pour les opérateurs – soit un montant équivalent aux efforts budgétaires demandés au ministère des transports en matière d’infrastructures cette année.
En plus des agents chargés du recouvrement, qui interviennent a posteriori, l’article propose tout d’abord d’étendre l’accès aux données aux agents assermentés de l’exploitant du service de transport et aux agents assermentés d’une entreprise de transport agissant pour le compte de l’exploitant – c’est-à-dire les contrôleurs. Il le permet également pour les agents assermentés missionnés par les services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP – la sûreté ferroviaire et le groupe de protection et de sécurité des réseaux (GPSR).
Les modifications proposées permettraient aux contrôleurs et aux agents de sûreté d’accéder en temps réel aux données destinées à fiabiliser leurs procès-verbaux – et donc à améliorer le recouvrement.
Il est nécessaire de rejeter ces amendements de suppression et de mettre en œuvre cet article le plus vite possible.
M. Jordan Guitton (RN). Je remercie le rapporteur de nous avoir fourni ces données. Dans nos circonscriptions, nous connaissons tous les difficultés rencontrées par les délégataires de service public de transport pour recouvrer les amendes, avec des fraudeurs qui donnent des adresses inexactes lorsqu’ils sont verbalisés.
Cette proposition est perfectible, mais son article 19 a au moins le mérite d’exister. Lutter contre la fraude est une question d’équité car, alors que la plupart des usagers payent leur ticket ou leur abonnement, certains individus fraudent et n’en supportent pas les conséquences parce qu’ils fournissent de fausses adresses.
Les sommes qui pourront être recouvrées grâce au dispositif proposé contribueront aux investissements dans les transports publics et à l’amélioration de la qualité du service.
Nous voterons donc contre ces amendements de suppression et pour cet article. Encore une fois, on ne peut jamais compter sur la gauche pour lutter contre la fraude, quel qu’en soit le type.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL171 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Actuellement, un arrêté détermine le nombre maximal d’agents de la personne morale unique pouvant avoir accès aux données fiscales. L’amendement propose de supprimer cette limite dans un souci de simplification.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte les amendements rédactionnels CL173 et CL172 de M. Guillaume Gouffier Valente.
La commission adopte l’article 19 modifié.
Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
*
* *
La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Pouria Amirshahi, Mme Aurore Bergé, Mme Émilie Bonnivard, M. Ian Boucard, M. Florent Boudié, Mme Gabrielle Cathala, M. Vincent Caure, M. Paul Christophle, M. Jean-François Coulomme, M. Emmanuel Duplessy, M. Moerani Frébault, M. Jonathan Gery, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Monique Griseti, M. David Guerin, M. Jordan Guitton, M. Sébastien Huyghe, M. Jérémie Iordanoff, Mme Pauline Levasseur, Mme Marie-France Lorho, Mme Élisa Martin, M. Ludovic Mendes, M. Paul Molac, M. Jean Moulliere, M. Thomas Portes, M. Julien Rancoule, Mme Sandra Regol, Mme Claudia Rouaux, M. Jean-François Rousset, M. Hervé Saulignac, M. Jean Terlier, M. Roger Vicot, Mme Caroline Yadan
Excusés. - Mme Émeline K/Bidi, M. Roland Lescure, Mme Naïma Moutchou, Mme Valérie Rossi, M. Antoine Villedieu, M. Jiovanny William
Assistaient également à la réunion. - M. Sacha Houlié, M. Pascal Jenft