Groupe d’amitié France-Népal

Entretien en visioconférence avec Mme l’Ambassadrice de France au Népal, Virginie Corteval, le mercredi 9 avril de 11h à 12h

Compte-rendu

 

 

Mme Virginie Corteval : Depuis l'avènement de la République népalaise en 2008, le contexte népalais est marqué par une forte instabilité politique. Le Népal a connu en dix ans sept gouvernements successifs. Les coalitions se font et se défont entre trois grands partis : le « Nepali Congress » ou « Congrès népalais » ; le parti maoïste dirigé par M. Prachanda ; le parti marxiste-léniniste (PML) dirigé par M. Oli, Premier ministre au Népal depuis juillet 2024. Actuellement, le congrès népalais et le PML sont au pouvoir.

 

Quelques nouveaux partis émergent dans l’opposition comme le Rastriya Swatantra Party (RSP) (Parti national indépendant), dirigé par M. Rabi Lamichhane. Cette figure venue du monde médiatique a suscité beaucoup d’espoir dans la population népalaise. Mis en accusation pour des faits de corruption, il est actuellement en prison. Il y a également quelques figures politiques indépendantes appréciées de la population népalaise comme le maire de Katmandou, M. Balen Shah. De manière générale, les népalais manifestent une grande lassitude face à la classe politique au pouvoir et aspirent à un renouveau.

 

Sur le plan économique, la situation demeure fragile. Des freins importants à l’investissement et à la liberté d’entreprendre demeurent auxquels s’ajoutent des problèmes de corruption. Il y a peu de créations d’emploi et également un faible d’investissement dans les infrastructures de base (routes, tunnels, ponts, etc.). Faute de perspectives d’emploi, on estime à 2 000 le nombre de népalais quittant le pays chaque jour. En 2025, le taux de croissance est estimé à 4,5-5 %.

 

Le Népal aspire néanmoins à sortir de la liste des pays les moins avancés (PMA). Trois priorités « croissance », « gouvernance » et « inclusion » pourraient permettre le développement du pays.

 

Sur le plan social, il y a des signes de frustration et de fébrilité avec un fort rejet de la classe politique au pouvoir. Le Népal s’est doté d’une Constitution fédérale en 2015 dont la mise en œuvre n’est pas achevée. Récemment, le 28 mars 2025, une grande manifestation s’est tenue à Katmandou et a donné lieu à des violences et des dégradations. On note également ces derniers mois un regain d’intérêt pour le régime monarchiste (le dernier roi du Népal a été destitué en 2008).

 

La relation bilatérale entre la France et le Népal est ancienne (depuis 1949). Elle peut être qualifiée d’amicale avec la venue de nombreux touristes français au Népal ; les népalais considèrent également la France comme un partenaire fiable même si les relations commerciales et financières ne sont pas si développées. Le contexte politico-économique du Népal peut freiner les investissements français ; l’aviation népalaise demeure par exemple sur la liste des compagnies aériennes interdites dans l’Union européenne.  

 

Quelques succès sont néanmoins à notifier : la compagnie aérienne nationale népalaise est équipée exclusivement d’appareils ATR produits à Toulouse. Toutes les compagnies népalaises d’hélicoptères sont équipées par Airbus. Vinci est présent sur les questions de traitement de l’eau. Une star-up BWI travaille sur les questions hydrauliques. De grandes marques françaises dans l'automobile et les cosmétiques sont également implantées. Le groupe Accor a récemment ouvert un hôtel Mercure.

 

L’année 2025 sera l’occasion de fêter le 75ème anniversaire de l’ascension de l’Annapurna par une équipe franco-népalaise.

 

L’Alliance française est également active au Népal. Elle offre notamment des cours de français aux militaires népalais déployés dans des pays francophones ; le Népal étant le premier contingent de casques bleus dans le monde.

 

Mme Béatrice Piron, députée, présidente du groupe d’amitié : Quelles sont les causes de l’instabilité politique ?

 

Mme Virginie Corteval : Depuis l’instauration de la République, le régime se caractérise par des luttes politiques entre les trois partis au pouvoir. Les gouvernements se font et se défont au gré des alliances entre ces partis. Les parlementaires sont par ailleurs élus pour cinq ans ; les prochaines élections se tiendront en 2027.

 

Mme Graziella Melchior, députée, secrétaire du groupe d’amitié : J’ai eu l’occasion de rencontrer une députée népalaise issue du parti indépendant. Nous confirmez-vous que le Népal respecte une certaine parité en politique ?  

 

Mme Virginie Corteval : Sur les questions de genre mais aussi de défense des droits LGBT, le Népal fait partie des pays les plus avancés en Asie du Sud-Est. Il y a notamment des quotas pour favoriser la parité en politique.

 

Mme Béatrice Piron : Pouvez-vous caractériser davantage la population de népalais qui quittent le pays pour le travail ?

 

Mme Virginie Corteval : La majorité des émigrés népalais sont peu qualifiés et s’orientent vers les métiers de la restauration, du bâtiment ou encore de la santé dans les pays voisins. Mais il y a également des jeunes diplômés qui quittent le pays ; ceux-là peuvent néanmoins faire le choix de revenir. Il existe par exemple un groupe de doctorants revenus au Népal pour y développer l’intelligence artificielle (IA) notamment dans le domaine de la santé.

 

Mme Graziella Melchior : Il y a également des népalais en Haute-Savoie qui travaillent en haute-montagne, dans les refuges par exemple.

 

Mme Virginie Corteval : Les relations franco-népalaises sont effectivement historiquement riches et denses en lien avec la haute montagne. Je pense au financement de formations aux métiers de la haute montagne au bénéfice de népalais, ou encore à un partenariat existant avec une école hôtelière de Thonon.  

 

Il y a aujourd’hui des projets de coopération à mener entre la France et le Népal sur le thème du tourisme durable en montagne (gestion des déchets générés par les expéditions, conditions de vie des communautés locales, etc.).

 

Mme Béatrice Piron : Quelle est la langue d’études ?

 

Mme Virginie Corteval : Traditionnellement, la langue utilisée est l’hindi ; l’Inde étant une destination traditionnellement privilégiée des étudiants. Mais c’est moins le cas aujourd’hui avec l’anglais et l’attractivité des pays anglo-saxons. Le chinois est aussi répandu.

 

Il existe une petite école française au Népal aux effectifs réduits (une cinquantaine d’élèves actuellement) dont un tiers de Français, un tiers de népalais, un tiers d’élèves issus de nationalités tierces.

 

Mme Béatrice Piron : Quelles sont les conditions actuellement chez vous (horaires, météo) ?

 

Mme Virginie Corteval : Le décalage horaire est de 3h45 en été et 4h45 l’hiver à partir du mois d’octobre. Katmandou est actuellement et d’une manière générale une ville fortement touchée par la pollution, au même titre que l’Inde (Delhi) ; tout particulièrement en ce moment du fait d’incendies.

 

Mme Graziella Melchior : Pouvez-vous nous rappeler les bases de l’économie népalaise ?

 

Mme Virginie Corteval : C’est un pays peu industrialisé ; l’économie népalaise repose essentiellement sur l’agriculture et les services (le tourisme notamment).

 

Pour conclure l’échange, Mme l’Ambassadrice propose de mettre en relation les membres du groupe d’amitié avec leurs homologues au Parlement népalais qui aurait reconstitué récemment des groupes d’amitié. Elle évoque également une prise de contact prochaine avec la mairie de Chamonix. La présidente du groupe d’amitié invite l’Ambassadrice à signifier sa venue en France pour une rencontre à l’Assemblée nationale.