Compte rendu

Commission d’enquête concernant l’organisation des élections en France

– Audition, ouverte à la presse, de M. François Xavier Arnoux, docteur en droit, auteur d’une thèse sur l’histoire du vote blanc et de l’abstention.              2

– Présences en réunion................................13

 


Jeudi
23 janvier 2025

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 5

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
Mme Eléonore Caroit,
Vice-présidente de la commission
Puis de M. Pierre-Yves Cadalen, vice-président.

 


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La séance est ouverte à onze heures trente.

 

Mme Eléonore Caroit, présidente. Nous accueillons M. François Xavier Arnoux, docteur en histoire du droit et de la pensée politique, enseignant à l’université catholique de Lyon, auteur d’une thèse de doctorat intitulée Histoire du vote blanc et de l’abstention : analyse juridique d’un refus (apparent) de choisir. Des travaux plus récents l’ont amené à porter un regard comparatif sur les élections européennes de 2024 sous l’angle de l’abstention, dont nous sous-estimerions la dimension contestataire.

L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

(M. François Xavier Arnoux prête serment.)

M. François Xavier Arnoux, docteur en droit, auteur d’une thèse sur l’histoire du vote blanc et de l’abstention. Pour moi qui ai longtemps rôdé dans les couloirs des Archives nationales, où j’ai parcouru les vieux discours des députés et les comptes rendus des travaux législatifs sur l’écriture de la loi électorale, c’est un honneur d’être ici et peut-être, un jour, de finir moi-même dans un cahier oublié à Pierrefitte-sur-Seine !

Ne nous y trompons pas : l’étude de l’histoire juridique permet de comprendre l’écriture du droit actuel pour mieux préparer les réformes de l’avenir. Or l’histoire de l’abstention et du vote blanc est largement méconnue : si les sociologues et les historiens s’y sont penchés, je suis le premier juriste à m’être intéressé à l’écriture de la loi et aux fondements historiques de la théorie du droit ayant conduit à exclure les abstentions et, plus largement, toutes les voix contestataires. Pourtant, c’est d’autant plus important que nous traversons une crise de la démocratie représentative, et que les pouvoirs publics et les élus cherchent sinon à réenchanter la vie démocratique, du moins à ramener les électeurs dans les bureaux de vote – votre commission d’enquête en est l’illustration.

Dans un contexte de tensions sociales émerge l’idée qu’il serait possible, à travers les élections et la participation à la vie électorale, de neutraliser une violence qui, sinon, s’exprimerait hors les urnes. En 1848, Jean Macé écrivait ceci : « Si tous ne votent pas, la volonté de tous ne sera pas représentée, et si la représentation nationale n’est pas l’expression fidèle du vœu public, elle pourra se trouver un jour en désaccord avec lui, ce qui est un cas de guerre civile. » Deux ans plus tard, Victor Hugo déclarait à la tribune de l’Assemblée nationale : « […] le côté profond, efficace, politique, du suffrage universel, ce fut d’aller chercher dans les régions douloureuses de la société, dans les bas-fonds, comme vous dites, l’être courbé sous le poids des négations sociales, l’être froissé qui, jusqu’alors, n’avait eu d’autre espoir que la révolte, et de lui apporter l’espérance sous une autre forme, et de lui dire : Vote ! ne te bats plus. […] C’est […] le droit d’insurrection aboli par le droit de suffrage. » Tout est dans cette formule : en légalisant une forme de contestation et en soutenant la participation à la vie politique, on désamorce, à travers les élections, une contestation qui, sans quoi, trouverait forcément d’autres biais d’expression, parfois plus malheureux pour la stabilité de l’État.

Toutefois, pour le pouvoir politique, il est difficile d’accepter que les suffrages puissent ne pas se porter sur les candidats, et dès 1789, les révolutionnaires cherchent à neutraliser toutes les voix contestataires, notamment les abstentionnistes – les royalistes et les ultras qui souhaitent délégitimer l’action de l’Assemblée nationale nouvellement proclamée en n’y participant pas. Talleyrand et Sieyès construisent alors la théorie du régime représentatif, devenu le b.a.-ba du droit constitutionnel. Telle est la première raison qui explique pourquoi les abstentions ne sont pas prises en compte.

Chargé de neutraliser les membres des États généraux issus de la noblesse et du clergé qui ne soutiennent pas la Révolution française, Talleyrand théorise ensuite le principe du mandat représentatif. Les délibérations et votes des élus de l’Assemblée devaient jusque-là répondre aux revendications inscrites dans les cahiers de doléances. En 1789, le roi, refusant que les députés de la noblesse se servent de ces cahiers pour faire obstacle au vote de la réforme électorale, s’était bien gardé de rendre les mandats impératifs. Ils n’auraient en effet guère de sens, explique Talleyrand : le pointeur le moins habile connaîtrait l’issue du vote avant même la délibération, et toute abstention serait vaine. Tout l’intérêt d’une assemblée délibérante est précisément de délibérer, c’est-à-dire de confronter puis harmoniser les points de vue pour que chacun s’exprime. Pour cela, il faut que les élus soient libres.

Toutefois, confier l’action politique à l’élu, et non plus à l’électeur, entraîne un transfert de pouvoir : la souveraineté ne réside plus dans le peuple mais dans la nation, une entité abstraite qui s’exprime à travers une assemblée. Le mandat représentatif conduit donc à neutraliser la volonté politique de l’électeur. Cette notion est si importante qu’elle est consacrée à l’article 27 de notre Constitution : « Tout mandat impératif est nul ». Dès lors que la volonté politique réside dans les acteurs politiques, et que ces derniers ne sont pas les électeurs, peu importe qu’il y ait un ou mille électeurs : la légitimité politique appartient aux élus, pas à ceux qui les choisissent. C’est la délibération qui légitime l’action publique ; l’élection, au contraire, n’est qu’un outil de neutralisation de la volonté politique. Il n’y a donc aucun intérêt à prendre en compte les abstentions, comme l’explique Bruno Daugeron dans sa thèse sur l’apport du droit électoral en droit constitutionnel.

Tous ces éléments se retrouvent dans notre droit positif : l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation » – la nation, donc, et non le peuple. En écho, l’article 3 de la Constitution dispose que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants […] ».

Le pouvoir politique appartenant aux élus, l’abstention est donc sans effet. Tous les régimes électoraux – royaliste, impérial, républicain, socialiste ou conservateur, peu importe – se fondent sur le régime représentatif. L’Empire a même renforcé l’idée de l’élection comme désignation, qui privilégie la finalité du choix, par opposition à celle de sélection où le choix, plus large, est avant tout un processus de réflexion. L’élection n’est donc pas un acte de gouvernance mais une simple désignation parmi un panel de candidats choisis – n’oublions pas que jusqu’en 1795, les candidatures sont interdites. Le terme de suffrage exprimé, qui sert à ignorer les votes blancs et l’abstention, n’est inscrit dans la loi qu’en 1817 – en l’occurrence la loi Lainé, sous la Restauration. Inspirés par Edmund Burke et Joseph de Maistre, les monarchistes ont d’abord érigé l’abstention en moyen d’opposition mais une fois revenus au pouvoir, ils se sont empressés de conceptualiser la notion de suffrage exprimé, c’est-à-dire le suffrage qui désigne. La mention du bulletin blanc considéré comme nul n’apparaît dans la loi que le 15 mars 1849, juste après l’avènement du suffrage universel.

À l’époque, les bulletins sont manuscrits, donc parfois illisibles : comment les interpréter ? Notons d’ailleurs que dans la plupart des cas, les bulletins nuls portent la mention « ni l’un, ni l’autre » ; le sens de ce vote est beaucoup plus clair.

Dernier point : pendant longtemps, les députés vérifiaient eux-mêmes les élections, validaient les mandats de leurs pairs et arbitraient les contestations. C’est donc dans la jurisprudence des parlementaires eux-mêmes qu’on trouve les définitions pratiques de ce qui constitue un bulletin blanc et de ce qu’il faut considérer ou non comme un bulletin exprimé.

M. Antoine Léaument, rapporteur. Vous soulignez à juste titre que la délibération destinée à trancher le débat doit amener chacun à prendre position en fonction de l’intérêt général – comme le voudrait du moins la théorie républicaine. Dans les premières assemblées parlementaires, il existait des députés qui n’étaient rattachés à aucun groupe politique – on parlait alors du « marais » – et pouvaient faire basculer le vote en faveur de l’un ou l’autre des blocs aux positions plus structurées. Or, dans la situation politique actuelle, il est rarissime que les interventions conduisent les députés à changer d’avis et à adopter une position différente de celle de leur groupe. Selon vous, au regard de ce système d’organisation des partis, les assemblées de la Ve République peuvent-elles toujours être considérées comme des assemblées délibératives ?

La Constitution de 1793 – celle de la Ire République, vous connaissez mon intérêt pour Robespierre et les révolutionnaires de cette époque – consacrait le droit à l’insurrection et en faisait même un devoir : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. »

Un mot sur l’intéressante distinction entre peuple et nation : selon la théorie républicaine, la nation, c’est le peuple, c’est-à-dire l’assemblée des citoyens qui participent à la prise de décision politique et détiennent la souveraineté. Ajoutons qu’à l’époque révolutionnaire, le peuple rassemblait tous les habitants du pays, indépendamment de leur nationalité – car, en 1793, était citoyen de la République française toute personne née sur le sol de la République ou toute personne qui avait épousé un citoyen français ou travaillait sur le sol de la République depuis au moins un an ; l’accès à la citoyenneté était bien plus rapide qu’aujourd’hui.

Pour Victor Hugo, nous dites-vous, le suffrage universel abolit le droit d’insurrection. Comme nous le montre une gravure de 1848, on délaisse peu à peu le fusil – réservé à « l’ennemi du dehors » – pour lui préférer le bulletin de vote car c’est ainsi que se combattent loyalement les « adversaires du dedans ». Mais il arrive qu’un gouvernement, même élu au suffrage universel, aille à l’encontre des droits et de la volonté du peuple, en particulier en cas de forte abstention. La réforme des retraites, par exemple, a été massivement rejetée, mais les citoyens n’avaient aucun moyen d’intervenir. Le référendum d’initiative citoyenne pourrait-il permettre de concilier démocratie représentative et démocratie directe ? D’autres outils pourraient-ils permettre aux citoyens d’exercer leur droit à l’insurrection et de renverser le gouvernement de manière pacifique et démocratique – par exemple une pétition insurrectionnelle, que nous préférons appeler référendum d’initiative citoyenne révocatoire et qui prendrait effet au-delà de cinq millions de signataires ?

Enfin, pensez-vous que rendre le vote obligatoire permettrait de faire reculer l’abstention ? La prise en compte du vote blanc vous semble-t-elle de nature à encourager la participation électorale ? On pourrait par exemple imaginer qu’une élection est nulle si aucun des deux candidats n’obtient plus de 50 % des voix en raison du nombre de bulletins blancs visant à exprimer un non-choix entre deux options qui semblent insatisfaisantes – le fameux « ni l’un, ni l’autre » dont vous avez parlé. L’évocation de Robespierre me stimule particulièrement…

M. François Xavier Arnoux. Robespierre avait une position un peu particulière sur l’abstention : sous la Terreur, est considéré comme ennemi du peuple quiconque n’agit pas activement pour la République. L’abstention est donc assimilée à un acte répréhensible qui attente directement à l’État. C’est sans doute l’une des raisons qui expliquent que les élections ont alors été suspendues.

Peut-on considérer que l’Assemblée nationale est aujourd’hui encore une assemblée délibérante ? La Constitution est conçue de telle manière que les députés délibèrent librement puisque tout mandat impératif – d’où qu’il provienne – est nul. En théorie, donc, ils peuvent s’affranchir des consignes de vote de leur groupe – même si, en l’espèce, la pratique diffère souvent.

Jusqu’à récemment, la Chambre des représentants des États-Unis était une excellente illustration de ce que peut être une assemblée délibérative : les députés votaient très librement, indépendamment de la position du bloc en faveur duquel ils s’étaient déclarés lors des élections. Mais les discours sont devenus plus radicaux, moins tolérants, si bien qu’à force de caricaturer l’autre camp, d’en faire le parti des « méchants », il devient plus difficile d’expliquer aux électeurs qu’on vote comme lui. À trop vouloir démonter l’adversaire pendant la campagne, on finit par oublier tout ce qui peut faire consensus.

J’en viens au droit à l’insurrection. C’est précisément pour justifier l’insurrection du parlement anglais, qui vient d’écarter un roi catholique intransigeant au profit d’un roi plus conciliant, que John Locke l’a théorisé dans son Deuxième traité du gouvernement civil, expliquant que le législateur a pour mission fondamentale de protéger les droits et libertés civils des citoyens. Cette mission repose sur un trust, un contrat assorti de clauses résolutoires qui, si elles ne sont pas respectées, entraînent le renversement du pouvoir.

S’agissant de la lutte contre l’abstention, aucune des réformes techniques menées depuis 1789 afin de favoriser la participation électorale n’a eu d’effet concret. En revanche, dès lors que l’enjeu politique est important et que les électeurs y sentent un intérêt viscéral, ils vont voter. Pour redonner du sens à l’élection, il faut donc donner de véritables moyens d’action à l’élu. Si l’électeur a l’impression que l’Assemblée nationale est une simple chambre d’enregistrement “gouvernementale”de la législation européenne ou nationale, il n’a que peu d’intérêt à participer aux élections législatives – ce qui explique que la participation soit plus importante à l’élection présidentielle.

Comment contrôler l’action de l’élu ? Le référendum d’initiative citoyenne permettrait certainement aux citoyens de reprendre leur place dans la vie politique. Le premier à l’avoir théorisé est Condorcet qui, dès 1785, voyait – à raison – dans les élections et la participation du peuple au pouvoir un moyen de pacifier la vie politique.

On peut aussi envisager des moyens de récuser les élus ne respectant pas les engagements pris devant leurs électeurs sans contrecarrer la logique du mandat représentatif. L’élection révocatoire existe déjà aux États-Unis – ce sont les recall elections qui ont souvent lieu à mi-mandat – et dans plusieurs pays d’Amérique latine. En effet, pourquoi le pouvoir exécutif aurait-il seul un droit de regard sur la façon dont les parlementaires exercent leur mandat ? Les électeurs eux aussi pourraient être fondés à faire ainsi valoir leur bon sens politique. Cette piste, bien qu’intéressante, est toutefois très éloignée de la tradition française et n’a jamais été envisagée lors des révisions constitutionnelles.

Il y a enfin le droit à l’insurrection. Au fond, le vote blanc permet de donner corps à une insurrection passive. Pierre-Joseph Proudhon fut le premier à théoriser le vote blanc, une forme d’insurrection passive qui signifie le refus de cautionner la loi a priori et exprime tout à la fois l’avertissement que l’électeur adresse à l’État pour lui signifier qu’il ne lui donne aucun blanc-seing et qu’il a repéré une anomalie, mais aussi le signal qu’il envoie aux autres électeurs pour faire savoir qu’il conteste le choix proposé. Autrement dit, le vote blanc permet de manifester légalement sa désapprobation du système ou des candidats en présence. Précisons que Proudhon écrit cette analyse dans un manifeste paru en 1863, sous un gouvernement qui maîtrise complètement les élections grâce au système de la candidature officielle qui, en favorisant les candidats approuvés par Napoléon III, donne lieu à un choix tronqué.

Dès lors que le suffrage universel ne permet pas de procéder à un choix véritable, il faut, selon Proudhon, le désamorcer pacifiquement, en vidant les élections de leur sens par une contestation visible. Concrètement, il s’agit de déposer un papier blanc dans l’enveloppe. Autrement dit, voter blanc est une forme d’abstention, étant entendu que l’abstention est toujours contestataire – même s’il en existe d’autres formes. Or, encore une fois, elle est d’autant plus faible que l’enjeu est important, ce qui démontre qu’elle est aussi faite de désintérêt.

Le vote blanc peut être un moyen de donner un fondement à l’insurrection. Faut-il annuler une élection si la proportion de bulletins blancs est supérieure à un certain seuil, par exemple 50 % ? Il existe déjà des seuils relatifs ou absolus, par exemple deux tiers des inscrits ou 10 000 électeurs – au Pérou par exemple. Reste à déterminer le seuil au-delà duquel on considère que la contestation est trop vigoureuse pour permettre de valider l’élection des candidats en présence.

J’ai la conviction – qui se fortifie au fil de mes recherches – que l’État a tout intérêt à reconnaître le vote blanc, parce que ce faisant, il légalise les voix contestataires et, ainsi, renforce la légitimité de l’élu et du système représentatif. L’élu, en effet, exerce alors le pouvoir malgré le vote des abstentionnistes ; nul ne peut plus agiter l’épouvantail d’une légitimité contestable au motif que certains citoyens ne se sont pas exprimés. La prise en compte du vote blanc permet de réduire la pression, comme une cocotte-minute celle de la vapeur d’eau.

Le vote obligatoire est un tout autre débat. En France, il ne s’applique qu’aux élections sénatoriales. Il me semble que, s’agissant d’un droit, il faut conserver une certaine liberté et s’en tenir à la coutume constitutionnelle établie en 1792 par un décret de la Convention selon laquelle les présents délibèrent valablement pour les absents.

L’audition est suspendue de douze heures dix à douze heures trente.

Mme Eléonore Caroit, présidente. Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Avez-vous relevé une évolution des raisons de l’abstention au cours de l’histoire ? La nature des élections est-elle en cause, comme cela semble être le cas ? Vous avez travaillé sur les élections européennes de 2024. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet ?

S’agissant de la possibilité de récuser les élus ne respectant pas les engagements pris, dont nous avons débattu à plusieurs reprises, elle complique la représentativité qui est censée être la nôtre. Que faire si les citoyens optent pour la déchéance d’un élu ? Faut-il procéder à une nouvelle élection, sachant que nous vivons une période caractérisée par la prédominance des réseaux sociaux où l’argumentation est souvent binaire et limitée ?

Faut-il tenir compte du vote blanc à l’identique au premier et au second tours ? Que faire si un vote visant à départager deux personnes aboutit à une majorité de votes blancs ?

M. François Xavier Arnoux. S’agissant de l’évolution de l’abstention, il est difficile, dans la mesure où il y a eu une évolution du corps électoral, de comparer 1789 et 2024. On peut toutefois distinguer des tendances.

Pendant la période révolutionnaire et ensuite, l’abstention est très forte, de l’ordre de 80 % du corps électoral. La participation enthousiaste du peuple aux élections mise en regard du désenchantement actuel, présenté comme inédit, est un mythe. Au reste, lorsque les premières études sur l’abstention, notamment celle d’Alain Lancelot, ont été publiées dans les années 1980, le discours selon lequel l’abstention allait s’aggravant a faibli.

Ce qui est sûr, c’est que les pics de participation sont étroitement corrélés à des enjeux politiques clairs, importants et bien compris. Pour inciter les citoyens à voter, sans doute faut-il travailler dans cette direction plutôt que chercher à réduire l’abstention par des solutions techniques, qui n’ont que peu d’impact sur la participation. Prenons l’exemple des élections européennes, qui présentent l’intérêt de faire voter simultanément des pays aux législations électorales diverses : les électeurs n’ont pas toujours les clés nécessaires pour en comprendre l’enjeu. Ainsi, lors des récentes élections européennes, c’est en Estonie – où le vote électronique existe – que l’abstention a été parmi les plus élevées, même si elle s’explique aussi en partie par un facteur particulier, la pression russe.

La possibilité de récuser une élection est intéressante mais il faut se garder de toute forme de bashing irréfléchi. La procédure devrait être soumise à conditions – par exemple un seuil d’électeurs inscrits – et encadrée par un organe de contrôle et des délais. Aux États-Unis, les scrutins révocatoires sont souvent concomitants des élections de mi-mandat. Au demeurant, cette possibilité existait d’une certaine manière en France avant l’inversion du calendrier électoral. Peut-être faudrait-il envisager le retour à la situation antérieure.

J’en viens à la prise en compte des votes blancs. Selon le Conseil constitutionnel et la doctrine, elle soulève plusieurs difficultés d’ordre juridique.

Le premier argument est facile à écarter : c’est celui de la tradition jurisprudentielle. Le Conseil constitutionnel rappelle « l’ancienneté de la règle » : puisqu’on a toujours fait ainsi, il n’y a pas de raison de changer de pratique. Certes, le premier avis rendu par le Conseil d’État à ce sujet, sollicité par Napoléon Ier et par son ministre de l’intérieur, date de 1807. Toutefois, il n’est pas surprenant que le juge applique la loi. Si la loi est pensée pour exclure les votes blancs et les abstentions, le juge, qui ne fait pas de politique, ne peut faire autrement que les exclure.

Le deuxième argument repose sur l’ambiguïté d’interprétation des bulletins blancs, l’abstention pouvant revêtir plusieurs formes. Avec le recul historique, il apparaît clairement que l’obstacle est aisé à surmonter : il suffirait que les bulletins de vote portent non seulement les noms des candidats mais aussi une mention excluant explicitement l’un et l’autre, ce qui permettrait de signifier clairement une contestation non du système mais des élus en présence.

Intégrer la contestation dans le système permet de déporter la contestation sur les élus et pas sur le système en lui-même, qui s’en trouve conforté. En Inde, le bulletin de vote comporte une case « Aucun des choix en présence ». Il suffit de concevoir le bulletin blanc par-delà sa réalité matérielle d’enveloppe vide ou de papier vierge, en lui donnant une visibilité juridiquement explicite.

La tradition et l’ambiguïté étant écartées, nous en venons aux difficultés techniques selon la nature de l’élection. Dans un scrutin proportionnel, la prise en compte des votes blancs serait complexe et pourrait même aboutir à la situation absurde où tous les sièges ne seraient pas pourvus. Pourtant l’Espagne, qui utilise ce mode de scrutin, prend en compte les bulletins blancs, ce qui a pour seul effet d’accroître la difficulté, pour chaque parti, à atteindre le quotient électoral en fonction duquel les sièges lui sont attribués, donc de conforter le système, à tout le moins d’en renforcer la stabilité, en favorisant les partis les plus solides et l’émergence de majorités. Si, en France, la volonté politique était de favoriser la stabilité au sein de l’Assemblée nationale en dégageant une majorité forte, comme c’était l’objectif des constituants de 1958 qui ont préféré le scrutin majoritaire, alors intégrer le vote blanc en adoptant le scrutin proportionnel offrirait un correctif supplémentaire favorisant l’émergence de majorités. Au demeurant, la participation est nettement plus élevée en Espagne qu’en France. Nous avons connu aux élections de 2024 un taux d’abstention historiquement bas de 33 % ; ce même chiffre, en Espagne, est historiquement haut. Ainsi, la prise en compte des bulletins blancs, dans un pays où les élections ont lieu au scrutin proportionnel, offre une voie de contestation.

S’agissant du scrutin majoritaire, il faut distinguer plusieurs cas. Première hypothèse : le second tour pourrait être compliqué si aucun candidat ne recueille la majorité des suffrages exprimés, bulletins blancs compris. Tel n’aurait pas été le cas aux élections présidentielles de 2017 et 2022 : dans les deux cas, l’actuel Président de la République aurait recueilli plus de la moitié des suffrages exprimés même en tenant compte des bulletins blancs et le résultat n’aurait donc pas été modifié.

Toutefois, depuis que les bulletins blancs sont décomptés à part, il est clair que leur part au sein des bulletins nuls est très majoritaire. Leur prise en compte, introduite par la loi du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections et appliquée depuis 2017, permet de les distinguer plus nettement des autres bulletins nuls – ceux qui comportent des ratures, des insultes, des dessins et mille autres choses intéressantes, tous étant conservés aux Archives nationales.

Présidence de M. Pierre-Yves Cadalen.

M. Pierre-Yves Cadalen, président. Ce qui, à mes yeux, ressort de votre propos liminaire, est la tension fondamentale entre le régime représentatif – qui, à l’origine, exclut le peuple – et la démocratie. Or, si elle trouve sa résolution historique grâce à l’adoption du suffrage universel accordé d’abord aux hommes puis son extension aux femmes en 1944, elle traverse toujours nos sociétés et nos institutions.

Notre rapporteur apprécie Robespierre ; moi Karl Marx – qui n’a pas davantage perdu son potentiel subversif. Opposant souveraineté du peuple et souveraineté du monarque, il écrit ceci dans sa Critique de la philosophie du droit de Hegel : « L’État est un abstrait ; seul le peuple est le concret ». Une tension traverse, me semble-t-il, la Révolution française, entre ceux qui comptent remplacer le roi par l’abstrait de la nation et ceux qui considèrent qu’il appartient désormais au peuple de gouverner et de maîtriser son destin – tension qui ne me semble avoir été résolue dans aucun texte de droit.

Rapportons cette tension des souverainetés à la question du vote : vous nous apportez une première réponse précieuse en affirmant que nos concitoyens votent davantage s’ils estiment que leur vote est crucial pour leur existence et peut déterminer le changement – bref s’il a du sens. Mais à quelles conditions cela peut-il se produire ?

Dans son roman La Lucidité, qui illustre fort bien cette tension entre souveraineté de l’État et souveraineté du peuple, José Saramago met en scène une ville où le gouvernement est saisi de panique et décrète l’état de siège au motif que les votes blancs y sont plus nombreux que les suffrages exprimés. Autre exemple, plus récent : les manifestations de Sainte-Soline, à propos desquelles je viens de publier un article dans une revue, ont opposé la souveraineté de l’État, incarnée par Gérald Darmanin considérant qu’il avait affaire à des éco-terroristes, à la souveraineté populaire des manifestants qui disaient défendre l’intérêt général et la planète, bien au-delà du seul champ restreint des lois et des normes.

La question fondamentale est donc celle de l’interaction entre la société et les institutions – sur laquelle votre éclairage d’historien du droit est utile.

Autre question, qui est liée : en tant que députés de gauche, nous sommes particulièrement concernés par la question de l’abstention différentielle. Comme le montrent les travaux de Julia Cagé et Thomas Piketty, c’est souvent quand les citoyens pensent massivement que la politique peut changer la vie que la gauche gagne, parce que l’électorat des communes populaires se mobilise autant qu’ailleurs – mais ce n’est pas toujours le cas. Quel regard l’historien du droit porte-t-il sur l’abstention différentielle ?

M. François Xavier Arnoux. En fait, il faut redonner du sens à la loi électorale. L’État s’égare s’il s’intéresse à l’abstention seulement dans le but de conforter sa légitimité. Le vote obligatoire est un leurre, car il y a un vice du consentement si l’on force quelqu’un à voter. Croire que la vie politique serait facilitée en augmentant la participation de cette manière est une illusion. D’où mes réticences s’agissant du vote obligatoire. Au reste, la Belgique se garde bien de reconnaître le vote blanc alors que le vote y est obligatoire – sans pour autant que cela ait abouti à une stabilité politique enviable. Le vote obligatoire n’est pas une solution magique. L’Autriche et l’Italie ont d’ailleurs fini par y renoncer, car cela créait des situations politiquement intenables.

Redonner du sens aux élections implique plus largement de réfléchir à la manière de donner du pouvoir aux représentants – ce qui est valable pour les députés mais aussi pour le président de la République.

On a évoqué la possibilité de révoquer les élus, mais nous n’avons pas parlé des seuils minimums. Ils sont prévus pour les élections départementales et les élections législatives. Pour être élu au premier tour, il faut obtenir la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de suffrages au moins égal au quart des électeurs inscrits. C’est un mécanisme intéressant car il oblige le candidat à tenir aux électeur un discours pertinent afin de recueillir suffisamment de suffrages pour être valablement élu. On trouve aussi très souvent des règles de seuils en droit des sociétés, notamment pour déterminer la validité des délibérations d’un conseil d’administration.

Ce sujet avait déjà été abordé par Condorcet, à qui l’on revient toujours, lequel considérait qu’un candidat devait parvenir à attirer à lui suffisamment de votants pour être élu. Il ne s’agit donc pas de forcer l’électeur à voter mais d’inciter le candidat à réfléchir à ce qu’il propose.

Pourquoi ne pas généraliser les seuils qui sont en vigueur lors des élections départementales ? Certes, il faut obtenir 12,5 % des inscrits pour pouvoir se présenter au deuxième tour des élections législatives, mais c’est un seuil très faible. N’aurait-on pas intérêt à combiner des éléments de seuils et de vote blanc ?

Enfin, le vote blanc est souvent reconnu au premier tour alors que s’appliquent aussi des conditions de seuils, tandis qu’au deuxième tour on peut être élu seulement avec une majorité relative, ce qui permet de désigner les élus et d’éviter l’inconvénient – si du moins c’en est un – d’organiser un troisième tour. Il vaut mieux que la contestation ait lieu au cours de la campagne électorale plutôt que dans la rue après l’élection. Encore une fois, le vote est une manière d’institutionnaliser l’insurrection.

M. Antoine Léaument, rapporteur. Reconnaître le vote blanc lors d’un scrutin à la proportionnelle, dites-vous, aurait pour effet d’élever la barre à franchir pour obtenir des élus, mais on pourrait aussi envisager d’autres modalités. Comme voter blanc revient à ne pas choisir entre les différents candidats – et d’une certaine manière à critiquer l’ensemble de l’offre politique disponible –, au pourcentage obtenu par le vote blanc correspondrait une part de sièges pourvus par tirage au sort parmi tout ou partie du corps électoral. Cela permettrait de donner à la représentativité des assemblées délibérantes une dimension sociologique plus que politique. Mon groupe politique propose notamment de rendre possible le vote pour qu’une partie des députés puisse être désignée par tirage au sort. Une telle mesure permettrait-elle d’augmenter la participation aux élections ?

Un mot sur l’insurrection. La violence lors des manifestations connaît une baisse tendancielle – contrairement à ce qu’on entend parfois – et, quoi qu’il en soit, notre mouvement politique a toujours été clair sur la question de la violence dans les manifestations. Vous avez utilisé l’image de la cocotte-minute : l’histoire et l’actualité montrent pourtant, en France comme à l’étranger, que lorsqu’on n’est pas capable de fournir des solutions politiques convaincantes, ça explose. Or l’une des fonctions de la démocratie représentative et du système électoral consiste précisément à faire en sorte que ça n’explose pas, ou du moins sans violence à l’égard des personnes et des biens.

Dans l’hypothèse où le vote blanc deviendrait majoritaire, dites-vous, il permettrait une forme d’insurrection pacifique – ce qu’un certain nombre d’entre nous appellent de leurs vœux. Serait-il envisageable, par exemple, d’imposer, si les votes blancs dépassent 50 % des suffrages, la convocation d’une assemblée constituante pour changer le système électoral ? Cela permettrait aux citoyens de faire savoir que la Constitution ne leur convient plus. Rappelons que la Constitution de 1793, qui m’est chère, consacre comme droit naturel et imprescriptible « le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution », car « [u]ne génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures. » Comment faire ? Actuellement, les électeurs n’ont d’autre option, pour exprimer leur désaccord avec la Constitution, que de choisir un candidat qui propose d’en changer – mais dans un cadre constitutionnel qu’ils réprouvent.

Enfin, puisque vous avez étudié les travaux des assemblées parlementaires dans l’histoire, pourriez-vous me dire quels sont, selon vous, les pouvoirs du rapporteur d’une commission d’enquête ? Son pouvoir de contrôle sur pièces et sur place est-il illimité ? Comment a-t-il été utilisé dans le passé ?

M. François Xavier Arnoux. Dans son ouvrage éclairant intitulé Contre les élections, David Van Reybrouck décrit les expériences historiques de tirage au sort, en faveur duquel il plaide.

Comme l’ont expliqué Aristote puis Montesquieu, le tirage au sort est d’essence démocratique tandis que l’élection est d’essence aristocratique puisqu’elle permet à une élite de gouverner.

Quel serait l’intérêt du tirage au sort pour désigner des membres de l’Assemblée nationale ou du Sénat ? Si l’objectif est d’améliorer leur représentativité, alors le tirage au sort est la solution la plus radicale et appropriée. S’il s’agit de s’assurer que les représentants soient les plus capables pour prendre des décisions et faire la loi, mieux vaut alors affermir les conditions d’éligibilité – ce à quoi les révolutionnaires avaient d’ailleurs travaillé ; Condorcet a beaucoup insisté sur l’importance de la présélection.

À mon sens, il faut trouver un équilibre entre ces deux objectifs, représentativité et compétence. On ne peut nier que l’action politique nécessite certaines aptitudes, mais il faut également ne pas perdre de vue qu’elle doit s’exercer au service de l’intérêt général, autrement dit du peuple.

L’idée de pourvoir par tirage au sort une partie des sièges non pourvus du fait du vote blanc est intellectuellement séduisante ; il faut y réfléchir.

Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Que se passe-t-il si ceux qui sont tirés au sort ne veulent pas être parlementaires ?

M. François Xavier Arnoux. Alors que le mot démocratie ne figure pas dans la Constitution américaine, Alexis de Tocqueville définit ce régime comme démocratique uniquement parce qu’il y a des élections. Le glissement sémantique associant démocratie et élections s’amorce dans les années 1820 et il est parachevé lors de la publication de De la démocratie en Amérique en 1835. Or Tocqueville est assez favorable au tirage au sort car il considère que c’est un moyen de responsabiliser le peuple et de lui montrer qu’il n’est pas si facile de prendre des décisions, pour que, forts de cette expérience, les citoyens tirés au sort comprennent mieux en quoi consiste l’action politique. Cette solution est donc intéressante, même s’il faut la pondérer par d’autres mécanismes.

M. Antoine Léaument, rapporteur. Notre assemblée est structurée en groupes politiques qui défendent chacun des orientations économiques et politiques cohérentes, même si elles sont très différentes. Mais c’est en effet une forme d’élite produite par le système électoral qui gouverne. Je nuancerai la notion de déconnexion par rapport aux aspirations populaires en préférant citer Robespierre : « Je suis du peuple, je n’ai jamais été que cela, je ne veux être que cela ; je méprise quiconque a la prétention d’être quelque chose de plus ».

L’avantage immense du tirage au sort est qu’il placerait à l’intérieur d’une assemblée dans laquelle existent des groupes aux orientations politiques arrêtées des gens dont les positions sont moins tranchées. Peut-être arrivera-t-il qu’un militant politique soit tiré au sort par hasard, auquel cas il siègera au sein d’un groupe existant, mais la plupart des tirés au sort – qu’ils soient abstentionnistes, électeurs votant blanc par refus du système représentatif, voire monarchistes, pourquoi pas – se réjouiront d’avoir été désignés et pour enfin avoir voix au chapitre dans des institutions dont ils estiment qu’elles ne les représentaient pas. Ils joueraient alors un rôle charnière entre les différents groupes politiques et ramèneraient les autres élus à des réalités dont ils se sont parfois éloignés. Au reste, les États généraux étaient bien composés de trois blocs, le tiers état ayant la moitié des sièges de députés ; il a fini par l’emporter sur tous les autres. Tout a commencé par la vérification par les représentants du peuple de la validité des mandats de leurs pairs.

Imaginons qu’on ajoute 577 députés tirés au sort aux 577 qui sont élus : ce serait une façon intéressante de renouveler le personnel politique de l’Assemblée nationale.

M. François Xavier Arnoux. L’idée d’un contrepoids au sein d’une même assemblée est intéressante mais il faut s’interroger sur la responsabilité du gouvernement dans un tel régime parlementaire. Dans le cadre actuel, chaque vote serait l’occasion de remettre en cause le gouvernement, ce qui mettrait la stabilité gouvernementale en péril. En revanche, il pourrait être intéressant d’envisager un contrepoids dans une autre chambre. La lucidité populaire y serait représentée – je dis cela sans condescendance aucune – par des personnes qui ne connaissent pas les affaires publiques et qui voteraient de manière plus indépendante. Cela permettrait d’instaurer un dialogue entre des députés qui proposent un projet politique et des répondants qui y réagissent ; on pourrait ainsi démocratiser le débat parlementaire.

Je ne peux qu’abonder dans votre sens s’agissant de la diminution historique des violences. Les premières élections en 1790 ont été très violentes. Il y a même des morts et le roi intervient. C’est là qu’est né un droit de police électorale spécifique qui impose notamment de déposer les armes avant d’entrer dans les assemblées électorales et confie à leur président des pouvoirs de police. Les élections sont devenues plus pacifiques, ce dont on ne peut que se féliciter.

Quant aux pouvoirs du rapporteur d’une commission d’enquête, je ne peux dire que ceci : il a un pouvoir non négligeable puisqu’il rédige le rapport – c’est donc sa parole qu’on retient.

M. Pierre-Yves Cadalen, président. Bien souvent, une décision peut être effective tant qu’elle ne trouve pas de juge – Emmanuel Macron en a apporté la preuve récemment. Notre commission peut donc se rendre où elle le souhaite ; les parlementaires ne sont pas des sous-fifres. Les commissions ont une grande histoire qui repose non seulement sur leurs pouvoirs de contrôle mais aussi sur leurs initiatives.

M. François Xavier Arnoux. Votre commission d’enquête souhaite se pencher sur des problèmes tels que l’information insuffisante sur l’accès aux bureaux de vote, le coût de l’organisation des élections pour les communes et les difficultés de recrutement des assesseurs. Un autre sujet mérite d’être évoqué : le vote par correspondance. Il a été pratiqué en France, mais dans de très mauvaises conditions. Le sénateur Éric Kerrouche a déposé une proposition de loi visant à instaurer ce mode de vote. Par-delà le dispositif technique proposé, l’exposé des motifs est intéressant parce qu’il analyse les causes de l’échec précédent. Le vote par correspondance a entraîné une forte hausse de la participation aux États-Unis et surtout en Allemagne, où il constitue une part considérable du vote. C’est une solution pour alléger la charge de l’organisation des opérations de vote par les communes, soulager leur budget et, surtout, faciliter le vote.

La séance s’achève à treize heures quinze.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - M. Pierre-Yves Cadalen, Mme Eléonore Caroit, M. Thomas Cazenave, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Antoine Léaument, M. Stéphane Rambaud, M. Thierry Tesson

Excusé. - M. Xavier Breton.