Compte rendu

Commission d’enquête concernant l’organisation des élections en France

–  Audition, ouverte à la presse, de représentants du ministère de l’intérieur : Mme Fabienne Balussou, directrice du management de l’administration territoriale et de l’encadrement supérieur (DMATES), Mme Sylvie Calvès, cheffe du service des élections, de la lutte contre la fraude et de l’innovation numérique, M. Alex Gadré, chef du bureau des élections politiques, M. Christophe Kirgo et Mme Mariam Pontoni, adjoints au chef du bureau des élections politiques.              2

– Présences en réunion................................19

 


Mercredi
12 février 2025

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 13

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
M. Thomas Cazenave,
président de la commission

 


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La séance est ouverte à dix-huit heures quarante-cinq.

 

M. le président Thomas Cazenave. Nous avons aujourd’hui le plaisir d’accueillir les représentants du ministère de l’intérieur, plus précisément de la direction du management de l’administration territoriale et de l’encadrement supérieur (DMATES). Sont présents madame la préfète Fabienne Balussou, directrice, secrétaire générale adjointe du ministère de l’intérieur, madame Sylvie Calvès, son adjointe, cheffe du service des élections, de la lutte contre la fraude et de l’innovation numérique, monsieur Alex Gadré, chef du bureau des élections politiques, ainsi que monsieur Christophe Kirgo et madame Mariam Pontoni.

Le ministère de l’intérieur étant responsable de l’organisation des élections en France, cette audition s’inscrit parfaitement dans l’objet de notre commission d’enquête. Nous aborderons de nombreux sujets, celui du cadre général de l’organisation des élections au niveau central comme local, du répertoire électoral unique, de la distribution de la propagande électorale, de la réglementation applicable à la sécurisation des procédures de vote, et notamment la question des machines à voter, qui a fait l’objet de nos dernières auditions.

Je propose de donner la parole à madame la directrice pour une intervention liminaire, fondée sur le questionnaire qui vous a été adressé par monsieur le rapporteur. Nous engagerons ensuite un échange.

Avant de commencer, je vous rappelle que, conformément à l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, les personnes auditionnées par une commission d’enquête doivent prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(Mmes Fabienne Balussou et Sylvie Calvès, MM. Alex Gadré et Christophe Kirgo et Mme Mariam Pontoni prêtent successivement serment.)

Mme Fabienne Balussou, directrice du management de l’administration territoriale et de l’encadrement supérieur (DMATES). L’organisation des élections politiques, confiée au ministère de l’intérieur depuis le milieu du XIXe siècle, est une mission fondamentale pour notre démocratie et à laquelle nous consacrons toute notre énergie et nos ressources. Le bureau des élections politiques, composé d’une vingtaine de personnes, pilote l’organisation des élections au sein du secrétariat général du ministère. Ses responsabilités couvrent la production de textes juridiques, les opérations logistiques liées à la propagande électorale, le pilotage des démarches en ligne pour les électeurs, la centralisation des résultats et le remboursement des comptes de campagne. Cette approche intégrée assure une grande réactivité dans la conduite d’opérations complexes et imbriquées.

Le bureau des élections collabore avec la direction de la transformation numérique et la direction de la communication du ministère de l’intérieur, ainsi qu’avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et le ministère des outre-mer. Il coordonne également l’action des responsables des élections dans les 106 préfectures et hauts-commissariats, représentant environ 390 personnes, qui travaillent en lien avec les communes et leurs 70 000 bureaux de vote. Dans le cadre des élections, les maires agissent en effet en tant qu’agents de l’État.

La pertinence de cette organisation a été démontrée lors des élections législatives de 2024, organisées en seulement vingt-quatre jours. Pour garantir le bon déroulement des scrutins, le ministère émet des circulaires détaillées et fournit un accompagnement juridique et organisationnel aux communes et préfectures. En parallèle, nous procédons systématiquement à des retours d’expérience pour améliorer continuellement notre dispositif et identifier d’éventuelles pistes d’évolution du cadre juridique. Compte tenu de l’importance du processus électoral pour le fonctionnement démocratique et de l’évolution de la société, il est en effet nécessaire de réinterroger les procédures en place, tout en conservant les principes fondamentaux de notre système, qui fondent sa légitimité.

Les quatre principes qui guident notre action sont les suivants :

Premier principe, la transparence, qui s’applique aux listes électorales, aux conditions de candidature et au processus de dépouillement et de remontée des résultats.

Deuxième principe, la simplicité pour l’électeur : le système de vote est conçu pour être facilement compréhensible et utilisable par tous les citoyens. Cette simplicité permet une remontée rapide des résultats et garantit le caractère auditable de l’ensemble des opérations électorales

Troisième principe, l’égalité et la liberté de candidature : tous les candidats ont accès aux mêmes informations et peuvent solliciter l’aide des autorités compétentes.

Enfin, quatrième principe, l’encadrement juridique : le système électoral est soumis au contrôle du juge, permettant aux électeurs et aux candidats un recours effectif. En cas de dysfonctionnement ayant altéré la sincérité du scrutin, le juge peut annuler un scrutin et les électeurs se prononcent alors à nouveau.

Ces principes contribuent à la robustesse de notre système électoral et à la confiance qu’il inspire aux citoyens, comme l’a souligné la Cour des comptes dans un récent rapport.

L’organisation s’appuie sur une certaine permanence mais laisse Cependant, des évolutions sont mises en œuvre pour faciliter l’exercice du suffrage par nos concitoyens.

La création du répertoire électoral unique (REU) en 2018 a permis de fiabiliser et de simplifier la gestion des listes électorales. La date limite d’inscription avant un scrutin a été réduite à six semaines. La demande d’inscription sur les listes électorales peut désormais se réaliser entièrement en ligne. Un module « Interroger sa situation électorale » a été développé. Ces changements ont entraîné une augmentation significative du nombre d’inscriptions sur les listes électorales, notamment chez les jeunes. Ainsi, en 2024, selon l’Insee, 99 % des jeunes de moins de 30 ans et 95 % des Français en âge de voter étaient inscrits, contre respectivement 88 % et 85 % en 2018.

S’agissant des procurations, en quatre ans, nous sommes passés d’une procédure majoritairement papier à une démarche pouvant être effectuée à 100 % en ligne pour les détenteurs de l’identité numérique certifiée France Identité. L’interconnexion avec le REU a permis de déterritorialiser les procurations, autorisant un électeur à donner procuration à un électeur inscrit dans une autre commune. En 2024, 75 % des électeurs ayant fait une procuration ont utilisé cette téléprocédure, pour un total de 4,4 millions de procurations établies.

Enfin, le ministère a entièrement refondu son système de centralisation des résultats en 2023, ce qui a permis une remontée sécurisée et rapide des résultats, lesquels sont directement transmis à la presse et publiés sans délai sur le site du ministère.

Le ministère s’engage depuis plusieurs années à réduire la mal-inscription. Nous menons des actions spécifiques, notamment une communication sur les réseaux sociaux avant chaque élection pour promouvoir l’inscription, en ciblant principalement les jeunes. En 2024, nous avons renforcé nos démarches proactives. Nous avons envoyé un courrier à 150 000 personnes ayant récemment déménagé pour les inviter à actualiser leur inscription. Nous avons formé 800 conseillers France Services à la détection des mal-inscrits et non-inscrits et diffusé des supports de communication dans les 2 900 guichets de France Services. Nous avons également communiqué sur les réseaux sociaux et le site service-public.fr, acheté des espaces publicitaires en ligne et collaboré avec des partenaires institutionnels comme les impôts ou la sécurité sociale, pour faciliter l’inscription lors des changements d’adresse.

Concernant l’acheminement de la propagande électorale, nous avons tiré les leçons de des dysfonctionnements constatés en 2021, lors d’un double scrutin incluant une semaine d’écart seulement entre les deux tours, Nous avons ainsi conclu un marché pérenne avec La Poste et conçu un plan d’organisation robuste. Cela a permis de mener avec succès les opérations de propagande lors des sept tours de scrutin suivants, y compris dans des délais très contraints en 2024. Chaque préfecture dispose désormais d’un plan de secours et les externalisations des mises sous pli ne sont accordées que par dérogation, après une analyse rigoureuse des garanties proposées par le prestataire choisi par la préfecture. Cette organisation, bien que sollicitant fortement les services de l’État, garantit l’égalité d’information des électeurs.

Plus de 70 000 bureaux de vote sont ouverts simultanément lors de chaque scrutin, assurant un maillage dense et un accès aisé pour tous les citoyens. Les membres des bureaux de vote peuvent bénéficier de formations en lien avec le Centre national de la fonction publique territoriale et s’appuyer sur un guide du bureau de vote, actualisé en 2024, de même que sur l’accompagnement permanent des préfectures le jour du scrutin. Les dysfonctionnements, bien que possibles, restent ponctuels et peuvent être soumis à l’appréciation du juge électoral.

Pour conclure, l’organisation des élections sur la période 2017-2023 a fait l’objet d’une enquête de la Cour des comptes, dont les conclusions publiées en septembre dernier démontrent la robustesse du système électoral français et des dispositions prises par le ministère de l’intérieur pour garantir l’exercice du droit de vote de chaque électeur.

M. Antoine Léaument, rapporteur. Il est possible de radier des électeurs des listes électorales dans la période de six semaines au cours de laquelle il est impossible de se réinscrire pour une élection nationale. Considérez-vous que c’est normal ou qu’une modification législative serait nécessaire ? Cette situation peut en effet empêcher des citoyens de participer à des élections nationales s’ils sont radiés d’une liste sans être inscrits ailleurs.

Estimez-vous que cette durée de six semaines est suffisante ? Par exemple, lors d’une dissolution de l’Assemblée nationale, nous n’avons que trois semaines pour organiser les élections législatives, ce qui ne permet pas aux citoyens de se réinscrire s’ils constatent qu’ils sont mal inscrits ou non inscrits.

Concernant les mesures que vous mettez en place pour faciliter l’inscription, et sachant que la mal-inscription est un phénomène massif, j’avais adressé une série de propositions à la ministre Sabrina Agresti-Roubache en mars 2024. Je voudrais savoir si elle vous en a fait part. Ces propositions incluaient de mener des campagnes d’inscription dans les universités et les IUT, où la mal-inscription est fréquente ; d’ajouter des questions sur la situation électorale dans le cadre de la déclaration de revenus ; d’organiser des campagnes d’affichage, notamment sur les réseaux sociaux ; d’envisager l’information par SMS, qui a un taux d’ouverture élevé. Réfléchissez-vous à l’utilisation des SMS comme outil d’information sur l’inscription électorale ? Vous avez mentionné des partenariats avec les réseaux sociaux. Pouvez-vous nous en dire plus ?

J’aimerais avoir votre avis sur des propositions à plus long terme, notamment l’idée d’une inscription automatique sur les listes électorales. La France est en effet l’un des rares pays où une démarche volontaire est nécessaire pour s’inscrire ou mettre à jour son inscription. Avez-vous envisagé la possibilité d’une inscription automatique sur les listes électorales et ses éventuelles limites ?

Par ailleurs, concernant l’outil de vérification de l’inscription sur les listes électorales, j’avais précédemment interrogé monsieur Darmanin lors d’une séance de questions au Gouvernement. Cet outil était très utilisé, notamment par les personnes faisant du porte-à-porte pour vérifier l’inscription des citoyens et les encourager à s’inscrire si nécessaire. Cependant, l’ajout de l’étape France Connect a rendu cette pratique inefficace, les personnes étant réticentes à partager leurs codes France Connect. La justification donnée était le risque potentiel d’accès à l’adresse des personnes via leur inscription électorale. Or les informations disponibles se limitent généralement à la ville et au bureau de vote, ce qui ne permet pas de déterminer si la personne est correctement inscrite. Pensez-vous qu’il soit vraiment nécessaire de maintenir France Connect pour cet outil, sachant que cela entrave les campagnes d’inscription sur les listes électorales ?

Mme Mariam Pontoni, adjointe au chef du bureau des élections politiques. Concernant les radiations des listes électorales, la législation actuelle confère le pouvoir de radiation pour perte d’attache communale aux maires. Cette procédure est aujourd’hui moins utilisée en raison de la radiation automatique lors de l’inscription dans une autre commune. Néanmoins, ce pouvoir subsiste pour le maire et est encadré par des dispositions légales strictes. Pour procéder à une radiation, le maire doit s’appuyer sur des preuves tangibles démontrant que la personne ne réside plus à l’adresse indiquée, comme le retour d’une carte électorale ou d’un pli électoral pour non-distribution. Une procédure contradictoire est ensuite menée par le maire avant toute décision de radiation. À chaque étape, l’électeur peut faire appel, d’abord auprès de la commission de contrôle des listes électorales, puis devant le tribunal judiciaire si nécessaire. En cas de non-respect de la procédure contradictoire, l’électeur peut saisir directement le tribunal judiciaire.

Il est vrai que dans les six semaines précédant un scrutin, une personne radiée ne peut pas se réinscrire ailleurs, ce qui peut poser problème si elle a effectivement déménagé. Nous ne disposons pas actuellement de données précises sur le nombre de radiations pour perte d’attache communale effectuées durant cette période. Ce sujet, soulevé par la Cour des comptes, est en cours d’examen au ministère. Deux questions principales se posent : d’une part, quantifier le nombre de radiations pour évaluer l’ampleur du problème et, d’autre part, étudier la possibilité d’une dérogation permettant la réinscription de l’électeur dans ce cas spécifique durant les six semaines précédant le scrutin.

Ce délai de six semaines représente le minimum nécessaire pour l’organisation des communes. Les inscriptions sont possibles jusqu’au sixième vendredi précédant le scrutin ; s’ensuit le traitement des dossiers par les communes, particulièrement chargé durant la dernière semaine. La commission de contrôle des listes électorales se réunit ensuite entre le vingtquatrième et le vingtième jour avant le scrutin, période durant laquelle toutes les radiations et inscriptions sont rendues publiques. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs souligné, dans sa décision du 20 juin 2024 relative aux élections législatives anticipées, que ce délai de six semaines représentait un minimum pour l’organisation du scrutin, d’autant plus que dans la plupart des communes, les services chargés des inscriptions gèrent également l’organisation des élections.

Mme Fabienne Balussou. Concernant la problématique de la mal-inscription évoquée par monsieur le rapporteur, il est important de clarifier ce que recouvre ce terme. Selon l’étude de l’Insee de 2024, sur les 7,7 millions de personnes inscrites hors de leur commune de résidence principale en 2022, on distingue plusieurs catégories : 2,2 millions de jeunes de moins de 26 ans, qui ont légalement la possibilité d’être inscrits chez leurs parents ; 1,7 million de personnes ayant récemment déménagé et potentiellement en cours de réinscription ; 3,7 millions de personnes sans caractéristiques particulières, sachant que certains électeurs, même au-delà de 26 ans, peuvent légitimement rester inscrits sur le lieu de leur résidence secondaire s’ils y ont des intérêts avérés. Les non-inscrits sont estimés à environ 2,9 millions d’électeurs.

Face à ces constats, nous avons réfléchi à des moyens visant à redynamiser l’inscription sur les listes électorales et à encourager la mise à jour en cas de déménagement, d’où les démarches proactives mentionnées précédemment.

Concernant votre suggestion d’utiliser les SMS, dont nous n’avons pas été spécifiquement saisis, elle soulève des questions liées à la disponibilité des numéros de téléphone et à l’alimentation du REU. Des réflexions sont néanmoins en cours sur ce point. Quant à l’inscription automatique, elle nécessiterait une refonte importante du système actuel, dans lequel le maire joue un rôle central pour gérer les inscriptions sur la liste électorale. Bien que nous ayons déjà un système d’inscription d’office pour les jeunes lors de leur première inscription, une automatisation plus poussée soulèverait des questions culturelles et pratiques propres à la France.

Pour mettre en place un tel système, il faudrait pouvoir connaître précisément l’adresse et la nationalité de chaque électeur à tout moment. Deux modèles existent ainsi chez nos voisins européens : premier modèle, le registre de population, contenant au minimum le nom, le prénom, la filiation, l’adresse, le lieu et la date de naissance, la nationalité et éventuellement des informations sur la propriété. Un tel registre n’existe pas en France, notamment pour des raisons culturelles et historiques. Second modèle, la déclaration obligatoire de résidence auprès de la mairie, comme en Allemagne ou en Suisse. L’adoption de l’une ou l’autre de ces options nécessiterait un changement significatif des pratiques actuelles en France.

M. le président Thomas Cazenave. Tout d’abord, concernant l’objet de notre commission d’enquête sur la bonne tenue des élections, pouvez-vous nous indiquer le nombre d’irrégularités constatées et consignées par le ministère de l’intérieur lors des dernières élections législatives ? Comment ont-elles évolué ces dernières années et décennies ? Au-delà des irrégularités, avez-vous un recensement des difficultés rencontrées dans la tenue des bureaux de vote, incluant les dégradations de matériel, l’arrachage d’affiches, etc. ? Pouvez-vous nous décrire le déroulement des dernières élections et son évolution, en abordant à la fois les irrégularités et les difficultés rencontrées ?

Vous avez ensuite indiqué ne pas disposer de chiffres concernant les radiations pour perte d’attache communale. Est-il possible d’obtenir ces données, notamment pour les six semaines précédant le scrutin ? Si oui, pouvez-vous en donner une analyse territoriale ? Certaines communes se caractérisent-elles par une pratique plus importante de ces radiations, particulièrement lors des dernières élections ?

Pourriez-vous revenir sur la décision de geler les machines à voter ? Les maires qui les utilisent et l’association des maires qui en défendent la promotion se retrouvent dans une situation délicate. Quelle est la position du ministère de l’Intérieur à ce sujet ? Pourquoi maintenir ce moratoire plutôt que de lever ce gel ?

Vous avez indiqué que les procurations seraient 100 % dématérialisées en 2024. Cependant, il me semble qu’il subsiste toujours un acte matériel dans l’usage de la procuration, notamment celui de se rendre au commissariat. Pouvez-vous préciser ce point ? Pourriez-vous également revenir sur l’utilisation de l’identité forte et expliquer en quoi cela permettrait une dématérialisation complète et favoriserait l’utilisation des procurations ?

Étudiez-vous l’impact des réseaux sociaux sur la bonne tenue des élections ? Ce sujet, évoqué avec l’Arcom, est-il une préoccupation pour le ministère de l’intérieur, notamment en ce qui concerne les risques d’ingérence étrangère et de manipulation de l’opinion ?

Enfin, au-delà de la bonne tenue des élections, les travaux de cette commission d’enquête ont soulevé la question de la participation électorale. Quelles sont les réflexions du ministère de l’intérieur pour favoriser le retour aux urnes ? Envisagez-vous des mesures pour faciliter le vote à distance, le vote sur plusieurs jours ou même le vote obligatoire ?

Mme Sylvie Calvès, cheffe du service des élections, de la lutte contre la fraude et de l’innovation numérique. En ce qui concerne les dysfonctionnements dans les scrutins, la meilleure source d’information réside dans les décisions prises par les juges sur les contentieux dont ils sont saisis. Pour les dernières élections législatives, nous avons eu 84 contentieux, dont 16 sont encore en cours d’examen devant le Conseil constitutionnel. Depuis 1959, nous comptons seulement 77 annulations d’élections. Ces chiffres concernent les irrégularités majeures portées devant le juge.

Il faut également noter que les électeurs ont la possibilité de signaler des irrégularités observées lors du déroulement des votes sur les procès-verbaux. Ces observations sont analysées à chaque niveau de recensement des votes et annexées aux différents procès-verbaux. Enfin, tout électeur peut contester le résultat des élections, et il appartient alors au juge d’apprécier la validité de ces contestations.

Mme Fabienne Balussou. Le moratoire sur les machines à voter est en place depuis 2008. Cette décision a gelé la possibilité pour les communes de se doter de nouvelles machines à voter, bien que celles qui en disposaient déjà puissent continuer à les utiliser. Ce moratoire a été instauré en raison des risques potentiels en termes de sécurité informatique, soulevés notamment par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI).

En décembre 2021, le Gouvernement a remis au Parlement un rapport sur les possibilités de recourir à des machines à voter intégrant des dispositifs de sécurisation, fondées sur les préconisations de l’ANSSI. L’une des pistes envisagées était l’utilisation de machines permettant l’édition d’un bulletin papier pour vérification et audit du vote, pratique déjà en place dans d’autres pays comme la Belgique. En 2023, mes services et des équipes de l’ANSSI ont rencontré l’association des villes pour le vote électronique ainsi que l’entreprise France Élections pour discuter des enjeux techniques. Le sujet reste à l’étude.

Mme Mariam Pontoni. Concernant les procurations, depuis 2024, nous avons effectivement mis en place une procédure 100 % dématérialisée. Le contrôle au commissariat ou en brigade de gendarmerie a été remplacé par un contrôle via France Identité pour les utilisateurs disposant du niveau certifié, ce qui nécessite une carte d’identité au nouveau format, l’application France Identité et une vérification biométrique en mairie. Cette procédure a été très appréciée lors des élections européennes et législatives, puisqu’elle permet aux électeurs de valider leur procuration en quelques minutes depuis chez eux. Ce niveau certifié est conforme aux règlements européens en matière de vérification d’identité pour les démarches sensibles.

S’agissant des radiations pour perte d’attache communale dans les six semaines précédant le scrutin, nous pourrions obtenir les chiffres auprès de l’INSEE et nous sommes en train de regarder comment. Nous ferons le maximum.

M. Alex Gadré, chef du bureau des élections politiques. En réponse à votre interrogation sur le dispositif de prévention des ingérences étrangères et de régulation des réseaux sociaux, le ministère de l’intérieur est pleinement investi dans le cadre d’un écosystème interministériel assez dense et complexe, en lien avec l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), qui est la première concernée, en application, en particulier, des dispositions de la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique (SREN), dans un certain nombre de dispositifs qui permettent d’imposer des obligations renforcées à l’attention des réseaux sociaux et des plateformes numériques, dans l’objectif notamment de prévenir des ingérences étrangères. La mission principale du bureau des élections politiques consiste à superviser l’ensemble des opérations électorales, dans le cadre d’une circulaire de sécurisation des opérations de vote, et à sensibiliser les préfets à la lutte contre les ingérences et aux dispositifs de signalement qui s’appuient sur Viginum,  service créé en 2017 afin de prévenir et faire connaître toute tentative d’ingérence, et notamment de campagne de désinformation. Son travail est extrêmement dense. Pour la régulation des réseaux sociaux, en cas d’imputation pénale, le dispositif Pharos est intégré au ministère de l’intérieur. Dans les faits, le bureau des élections relaie ce dispositif et est intégré à cet écosystème de veille, lequel relève en premier lieu de l’Arcom, de Viginum et de Pharos.

Mme Fabienne Balussou. Vous nous interrogez sur les réflexions qui pourraient être conduites sur la façon de favoriser davantage encore les inscriptions et la participation des concitoyens au scrutin. Mon propos liminaire cherchait à vous démontrer que nous avons conduit un certain nombre de réflexions et introduit un certain nombre de démarches de façon proactive pour favoriser la sensibilisation aux inscriptions sur liste électorale. À ce stade, et je parle sous contrôle de mes équipes, nous n’avons pas investigué le champ que vous nous avez décrit des modalités nouvelles que pourraient être le vote sur plusieurs jours ou d’autres aspects de mobilisation autour du scrutin, le vote par Internet étant une modalité qui existe, pour les Français de l’étranger, et qui est pilotée par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères.

M. le président Thomas Cazenave. Il n’existe donc pas de travaux ni d’études au ministère de l’intérieur sur l’opportunité de changer les modalités de vote, par exemple en étendant le vote à distance sur le territoire national, en envisageant un vote sur plusieurs jours et autres questions ?

Mme Fabienne Balussou. Depuis que je suis en poste à la DMATES, c’est-à-dire depuis le mois d’août 2023, ce ne sont pas des questions sur lesquelles nous avons été amenés à travailler. Sur le vote par Internet, nous avons été saisis par le ministère des affaires étrangères, mais la réflexion n’a pas prospéré et nous n’avons pas engagé de démarche particulière en lien avec nos autorités.

Mme Mariam Pontoni. Nous avons pu en échange également avec d’autres pays pour déterminer si le changement de modalité de vote peut augmenter ou non la participation. Mes collègues canadiens notamment m’ont expliqué que ce sont toujours les mêmes personnes qui votent et qu’ils n’arrivent pas à enrayer la baisse de la participation.

Le vote par Internet est en place pour les Français l’étranger pour répondre à leurs caractéristiques très spécifiques. Dans cette mesure, nous considérons que faciliter au maximum leur vote a du sens. Les Français résidant sur le territoire national sont dans une autre situation, puisqu’il existe 70 000 bureaux de vote et que ce maillage est justement conçu pour qu’un bureau de vote soit à côté de chaque électeur. Par ailleurs, le vote par Internet peut présenter un risque de contentieux en cas de dysfonctionnement. Les études menées dans les autres pays montrent ainsi que le vote par Internet a tendance à faire baisser la confiance dans le vote. En effet, il est possible de demander de recompter les résultats sortis des urnes, mais pas en cas de vote par Internet.

M. Antoine Léaument, rapporteur. Le ministère de l’intérieur estime donc que le vote sur Internet créerait plus de difficultés que de bénéfice. J’ai été interpellé par ce que vous avez dit : « Nous avons été saisis par le ministère des affaires étrangères. » Est-ce pour des raisons techniques, parce que des problèmes se sont posés, notamment pour accéder au site Internet lors des élections de 2022 ? Avez-vous été saisis sur la possibilité d’une extension de ce vote sur Internet ? Par ailleurs, puisque vous avez parlé des risques en termes de rapport des citoyens au vote par Internet et au vote papier, n’existe-t-il pas un risque de manipulation des résultats et d’ingérence étrangère, certaines personnes pouvant par exemple essayer de “hacker” le serveur qui donne les résultats ? On sait par exemple que les Suisses, qui utilisent le vote par Internet, mettent en place des programmes de “bug bounty” afin de déceler les bugs dans leur système. Réfléchissez-vous à ce sujet ?

M. Alex Gadré. Il est important de rappeler que le vote par Internet est principalement piloté par le ministère des affaires étrangères, qui est responsable de l’organisation des opérations électorales pour les Français établis hors de France. Notre implication fait suite aux annonces du ministre Jean-Noël Barrot lors de la conférence des ambassadeurs, évoquant des réflexions sur l’extension du vote par Internet pour certains scrutins.

Il convient de souligner que ce système présente des vulnérabilités notamment face aux risques de piratage et aux problèmes de performance, comme l’ont démontré les annulations survenues lors du précédent scrutin. La vigilance doit être renforcée, particulièrement si on envisage d’étendre ce dispositif aux scrutins à circonscription nationale. Dans ce cas, le Conseil constitutionnel pourrait être amené à invalider l’ensemble de l’élection en cas d’irrégularité.

Le vote papier bénéficie d’un haut niveau de confiance de la part des électeurs français. Ce système est généralement peu contesté devant les juridictions, hormis quelques cas liés à la comptabilisation des procès-verbaux. Sa robustesse, sa transparence et la possibilité de contrôle précis par les électeurs et le juge en font un dispositif particulièrement fiable.

M. le président Thomas Cazenave. Avez-vous des informations sur les difficultés rencontrées lors des opérations de vote, au-delà des décisions de justice ? Le ministère de l’intérieur dispose-t-il d’un système pour agréger toutes les difficultés constatées lors de la tenue des élections ? Ces données pourraient être utiles pour éclairer les travaux de la commission d’enquête sur le bon déroulement des élections.

Mme Sylvie Calvès. Nous ne disposons pas d’un recensement global des difficultés rencontrées. Notre suivi se concentre sur les aspects liés à l’organisation des scrutins, notamment la distribution de la propagande électorale. Nous suivons par exemple le nombre de plis non distribués. Cependant, nous ne centralisons pas les informations concernant les incidents qui pourraient survenir au sein des bureaux de vote.

M. Alex Gadré, rapporteur. Il existe deux catégories principales de dysfonctionnements et d’irrégularités. Pour chaque élection, une commission de contrôle et de recensement des votes est mise en place en préfecture. Présidée par un magistrat indépendant, elle vérifie tous les procès-verbaux et les compare aux données remontées dans le système d’information. Ces procès-verbaux sont centralisés en préfecture et connus du ministère de l’intérieur. Il est important de noter que toutes les irrégularités ne conduisent pas nécessairement à l’annulation de l’élection. Par exemple, lors des dernières législatives, sur 84 requêtes introduites devant le Conseil constitutionnel, plus des deux tiers ont été rejetées, 16 étant encore en cours d’examen.

Par ailleurs, concernant les dispositifs directement pilotés par le ministère de l’intérieur, nous assurons un suivi précis, notamment sur la distribution de la propagande. Nous surveillons attentivement le taux de plis non distribués, fixé par nos marchés. Grâce à l’organisation mise en place suite à l’affaire Adrexo, les préfectures peuvent aujourd’hui contrôler et intervenir efficacement en cas de dysfonctionnement.

M. Kévin Pfeffer (RN). Bien que la distribution de la propagande électorale se soit effectivement améliorée depuis les problèmes de 2021, des difficultés persistent pour les candidats et les partis. Les délais de livraison imposés sont de plus en plus courts, parfois plus de dix jours avant le scrutin, ce qui pose problème notamment pour les seconds tours. La décentralisation des décisions entraîne en outre des disparités entre les départements concernant les dates de livraison. De plus, la multiplication des points de livraison complique la logistique. Le ministère est-il conscient de ces problématiques ? Quelles solutions envisagez-vous ? Une uniformisation des consignes données par les préfectures serait souhaitable.

Par ailleurs, la composition et le fonctionnement des commissions de propagande semblent obsolètes. Ne faudrait-il pas faire évoluer le code électoral pour mieux l’adapter à la réalité actuelle de l’organisation des élections ?

Enfin, concernant le serpent de mer de la dématérialisation de la propagande électorale, quelles sont les réflexions actuelles de vos services ? Bien que nous y soyons généralement opposés, estimant que la réception physique de la propagande contribue à la mobilisation des électeurs, la question pourrait se poser pour les Français de l’étranger. En effet, la distribution est souvent aléatoire et tardive, et le coût estimé à 3,5 millions d’euros pourrait représenter une source d’économie.

M. Christophe Kirgo, adjoint au chef de bureau des élections politiques. Tout d’abord, sur les délais d’impression de la propagande et sa validation par la commission de propagande, il est important de comprendre les contraintes temporelles, particulièrement en cas de dissolution. Le délai constitutionnel de vingt jours pour organiser l’élection impose un processus serré. Ce dernier se déroule ainsi : après l’impression par les candidats, la mise sous pli est effectuée soit en régie dans les préfectures, soit par un routeur externe spécialisé dans le courrier industriel. Cette opération est complexe et chronophage, nécessitant généralement une semaine à dix jours, selon le volume des plis. Pour les élections européennes, par exemple, avec une moyenne de vingt-sept documents par pli, le temps de traitement est considérablement plus long. L’acheminement doit être finalisé le mercredi précédant le scrutin pour le premier tour et le jeudi pour le second tour, conformément au code électoral. Ces délais contraints imposent une coordination précise entre l’impression, la mise sous pli et la distribution. Pour faciliter ce processus, le bureau des élections politiques communique en amont aux candidats via un mémento. Nous centralisons également les informations sur les lieux de livraison et les quantités maximales de propagande à imprimer.

Concernant les commissions de propagande, il est possible de solliciter un avis préalable du président de la commission avant sa tenue officielle. Cet avis usuel est ensuite confirmé dans le procès-verbal de la commission départementale de propagande. La composition de la commission, présidée par un magistrat et incluant un fonctionnaire désigné par le préfet ainsi qu’un représentant de l’opérateur postal, garantit son indépendance, son impartialité et son expertise. Cette commission joue un double rôle : juridique pour la validation des documents, et logistique pour coordonner l’ensemble du processus.

Les règles juridiques pour l’impression des documents sont relativement simples. Pour les circulaires, il s’agit principalement d’éviter l’utilisation des couleurs du drapeau national et d’un emblème national. Pour les bulletins de vote, les règles varient selon les élections mais se limitent généralement à l’inclusion des noms des candidats, et éventuellement de leurs remplaçants pour les élections législatives.

Enfin, la tenue des commissions de propagande est conditionnée par la clôture des candidatures. Il est donc impossible de les organiser avant la fin de cette période. Le bureau des élections recommande une date pour l’ensemble des préfectures, tout en permettant une certaine flexibilité pour s’adapter aux contraintes locales, notamment géographiques, afin d’assurer une distribution équitable à tous les électeurs.

Mme Fabienne Balussou. Depuis le bureau des élections politiques et la DMATES, nous n’avons pas une vision fine de l’organisation territoriale. Nous accordons une grande importance à ce que les préfets conservent la responsabilité de définir les détails des opérations, car ils connaissent mieux que nous les réalités du terrain et les difficultés spécifiques que peuvent rencontrer les acteurs locaux.

M. Vincent Caure (EPR). En tant qu’élu de la circonscription de l’Europe du nord, je souhaite apporter un éclairage sur le vote des Français de l’étranger. Je sais que notre commission prévoit une audition dédiée à ce sujet. J’entends les risques d’ingérence et les difficultés évoquées, qui sont particulièrement pertinents dans le contexte mondial actuel. Cependant, je voudrais insister sur l’importance de faciliter l’accès au vote pour nos concitoyens à l’étranger, malgré les difficultés initiales inhérentes à toute nouvelle modalité de scrutin. Concernant la flexibilité, les contraintes de déplacement existent également pour les élections présidentielles ou européennes sur le territoire national. Je m’interroge donc sur les obstacles potentiels et les pistes envisageables pour étendre le vote à distance. Serait-il possible d’envisager une extension, peut-être pas pour un scrutin à circonscription unique pour les Français de l’étranger, mais pour les circonscriptions sur le territoire national ?

Par ailleurs, je suis favorable à la modernisation de l’envoi de la propagande électorale pour les Français de l’étranger. Les risques juridiques évoqués pour le vote en ligne doivent également être pris en compte lorsque la propagande électorale arrive altérée ou en retard, ce qui peut induire en erreur les électeurs éloignés des sources d’information.

Enfin, serait-il envisageable, peut-être uniquement pour les Français de l’étranger, d’opter pour un envoi dématérialisé de la propagande électorale, en utilisant la liste électorale consulaire déjà largement exploitée ? Je poserai également cette question à l’administration du ministère des affaires étrangères.

Mme Fabienne Balussou. Effectivement, comme vous l’avez souligné, nous sommes sur un domaine qui relève principalement du Quai d’Orsay et non du ministère de l’intérieur. Comme l’a expliqué le chef du bureau des élections, nous sommes une force concourante mais pas décisionnaire dans l’organisation du vote pour les Français de l’étranger. Néanmoins, nous pouvons vous apporter des éclairages complémentaires sur certains points que vous avez soulevés.

M. Alex Gadré. Le vote par Internet soulève deux enjeux principaux, en dehors du cadre juridique que nous avons longuement abordé. Premièrement, il y a le risque d’ingérence et les enjeux de sécurité des systèmes d’information. Le ministère de l’intérieur maintient ses réserves traditionnelles à ce sujet. Deuxièmement, concernant l’avantage en termes de flexibilité et de disponibilité, permettez-moi de rappeler deux points. D’une part, les chiffres sont éloquents : lors du dernier scrutin, nous avons constaté un taux de recours élevé au vote par Internet chez les Français de l’étranger, atteignant environ 75 %. Cependant, nous savons que cela a peu d’influence marginale sur la participation électorale. La grande majorité des électeurs qui utilisent le vote par Internet auraient voté de toute façon, ce n’est donc pas nécessairement un facteur incitatif. D’autre part, un point fondamental auquel le ministère est très attaché : ce que l’on peut gagner en flexibilité, on le perd en rituel républicain. La symbolique du vote, consubstantielle à la démocratie française depuis plus de 150 ans, est très importante. Le fait de se rendre au bureau de vote avec sa carte d’électeur ou sa carte nationale d’identité, de faire son choix dans le secret de l’isoloir, de glisser son bulletin dans l’urne, d’être appelé, de signer la liste d’émargement et d’entendre « A voté » constitue un ensemble de gestes qui forment un rituel républicain fort auquel le ministère est attaché, nonobstant la position qui sera celle du ministère des affaires étrangères en la matière.

M. Jean-Victor Castor (Gauche démocrate et républicaine). La taille de nos territoires dans les outre-mer pose des défis considérables. Par exemple, la Polynésie a une superficie équivalente à celle de l’Europe, ce qui complique grandement la campagne électorale et la distribution du matériel de vote. Je suis particulièrement sensible aux questions liées à la taille, à l’isolement et à l’enclavement de nos territoires, tant en termes de mobilité que d’insuffisance du maillage numérique. Paradoxalement, en Guyane, d’où partent les satellites, à peine 20 % du territoire est couvert par le réseau numérique.

Permettez-moi d’illustrer ces difficultés par un exemple concret. Dans ma circonscription, qui partage 700 kilomètres de frontière avec le Brésil, nous avons rencontré un problème dans la commune de Camopi. À 10 heures du matin, il n’y avait plus de bulletins à mon nom dans le bureau de vote. Il a fallu interpeller le préfet, qui a d’abord demandé au maire de faire des photocopies, ce que j’ai contesté, puis a réquisitionné un hélicoptère pour acheminer des bulletins. Il faut savoir que Camopi comprend non seulement le bourg principal, mais aussi un bureau de vote à Trois-Sauts, qui peut être à trois ou quatre jours de trajet en saison sèche. Ces conditions particulières nécessitent une approche spécifique, peut-être similaire à celle des circonscriptions de l’étranger. Il est crucial d’adapter les procédures à tous les niveaux, dès l’inscription des candidats.

L’isolement et l’enclavement posent également des problèmes pour la campagne électorale. Dans les communes situées le long des fleuves, la préfecture ne met pas de pirogues à disposition des candidats. Il n’y a pas de transports en commun. Cela favorise les candidats les plus fortunés qui peuvent payer des transporteurs pour amener des électeurs, souvent avec leurs bulletins de vote déjà en main. Cette pratique est connue et perdure depuis des décennies sans que personne n’intervienne.

Concernant la propagande audiovisuelle e, nous rencontrons un problème majeur. La propagande nationale fait référence à un vote le dimanche alors que, dans certains territoires comme la Guadeloupe, nous votons le samedi. Cela crée une confusion chez les électeurs, ce qui explique en partie les faibles taux de participation, souvent autour de 25 à 30 %.

J’aurais souhaité que les maires de l’Association des communes et collectivités d’Outre-mer (ACCD’OM) soient auditionnés pour qu’ils puissent exposer les difficultés qu’ils rencontrent dans l’organisation des élections sur nos territoires.

Les procurations posent également problème. Les procurations papier, envoyées par La Poste, n’arrivent presque jamais à temps.

Tous ces éléments démontrent que les conditions d’organisation des élections dans nos territoires ne garantissent pas un fonctionnement véritablement démocratique, que ce soit pour la mise en place des candidatures, la propagande, ou même parfois le dépouillement. Les mairies peinent à trouver du personnel pour le jour du scrutin, et les candidats ont du mal à mobiliser suffisamment de personnes pour participer au dépouillement en raison de l’éloignement et des coûts associés.

M. le président Thomas Cazenave. Nous allons examiner avec le rapporteur la possibilité d’organiser une audition qui permettrait de bien comprendre les spécificités et les contraintes de l’organisation des élections dans ces territoires.

Mme Fabienne Balussou. Je tiens à préciser que nous travaillons en étroite collaboration avec le ministère des outre-mer pour la préparation des scrutins et l’élaboration des textes encadrant les campagnes électorales. Pour les scrutins nationaux, nous prenons en compte les spécificités juridiques et organisationnelles des outre-mer. Le ministère des outre-mer est d’ailleurs pilote dans l’organisation des scrutins territoriaux, et nous agissons en tant que force concourante. Je voulais vous assurer que nous sommes pleinement conscients de la spécificité de l’organisation des élections dans les territoires ultramarins.

M. Christophe Kirgo. Concernant les spécificités de l’envoi de propagande électorale pour les outre-mer, le ministère de l’intérieur adapte les modalités d’envoi des bulletins de vote et de la propagande électorale aux territoires ultramarins. Nous avons mis en place des procédures spécifiques pour de nombreux départements d’outre-mer. Les partis politiques peuvent faire appel à des imprimeurs locaux, ce qui permet d’imprimer la propagande sur place et facilite l’acheminement. Pour la Polynésie française, qui représente un cas particulier, nous effectuons des largages aériens sur les territoires les plus reculés afin de garantir l’accès au vote dans tous les bureaux.

L’objectif de l’organisation des élections est d’adapter à la fois les pratiques organisationnelles et le droit aux spécificités des territoires ultramarins, en tenant compte de leurs situations particulières pour assurer un scrutin sincère dans l’ensemble de ces territoires.

Concernant les dysfonctionnements constatés en outre-mer lors des dernières élections, nous n’avons pas relevé de problèmes significatifs. Les taux de plis non distribués sont relativement proches de ceux constatés en métropole. Pour les bureaux de vote particulièrement isolés, des moyens exceptionnels sont déployés, comme l’acheminement par hélicoptère d’un bureau de vote en Guyane, une situation qui a été dûment consignée et gérée de manière transparente.

Sur le plan logistique, La Poste dispose d’une organisation territoriale spécifique et n’hésite pas à déployer des renforts, notamment de son personnel de direction, dans les départements ultramarins pour piloter les opérations dans les situations particulièrement complexes. Au niveau central, le bureau des élections politiques assure une veille continue, jour et nuit, pour gérer les enjeux liés aux décalages horaires. Nous recevons des informations en temps réel, ce qui nous permet de pallier les éventuels dysfonctionnements pour les départements d’outre-mer, notamment sur les aspects matériels.

M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Tout d’abord, concernant la vérification de l’inscription sur les listes électorales, il semble que l’utilisation de France Connect soit désormais nécessaire. Cette procédure pourrait être perçue comme une complexification par rapport au système précédent. J’aimerais avoir plus d’informations à ce sujet.

Ensuite, concernant la possibilité d’étaler le vote sur plusieurs jours, j’avais personnellement évoqué une autre idée : faire des jours d’élection des jours fériés. Cette proposition est fondée sur le constat que de nombreux électeurs travaillent le dimanche et n’osent pas toujours demander une autorisation à leur employeur pour aller voter, malgré ce que permet la loi. En Bolivie, où j’ai mené une partie de mes recherches doctorales, le vote est obligatoire, le vote blanc est reconnu et les jours d’élection sont fériés. Ces dispositions ont conduit à une augmentation considérable de la participation électorale.

Enfin, je souhaite aborder la question des machines à voter. Dans ma circonscription, deux tiers des électeurs votent avec ces machines. Nous avons auditionné l’association des maires qui défend cette méthode, ainsi que des informaticiens qui ont soulevé des problèmes de fiabilité et de risques de piratage. Plus fondamentalement, ces machines posent un problème de vérification des votes, laquelle vérification, par nature, n’est pas possible avec ce système. Étant donné que le moratoire sur les machines à voter existe depuis 2008 et que cette situation crée une disparité entre les électeurs, je m’interroge : si les craintes exprimées par la littérature scientifique sont toujours d’actualité, pourquoi ne sommes-nous pas déjà revenus au vote papier ? Ce dernier permet, par sa forme, l’exercice d’un rituel républicain important.

Mme Mariam Pontoni. Concernant France Connect, nous avons pris cette décision suite à un signalement de la CNIL. Une requête massive avait en effet été envoyée par un individu violent recherchant son ex-conjointe, ce qui a mis en lumière un problème de protection des données personnelles contenues dans les listes électorales. Pour résoudre ce problème, nous avons décidé de permettre à la seule personne concernée d’avoir accès à ses informations personnelles via France Connect ou un via compte service public, qui est facile à créer. Cette évolution, mise en place en 2024, a été saluée par la Cour des comptes et devrait être maintenue pour des raisons de sécurité des personnes.

Quant à l’idée de faire du jour d’élection un jour férié, il faut noter que le vote a historiquement lieu le dimanche précisément parce que c’est un jour non travaillé. En France, l’expérience montre que les jours fériés ou les ponts ont tendance à faire baisser la participation électorale. Nous ne sommes pas certains qu’un jour férié augmenterait la participation, mais c’est un sujet qui n’a pas été étudié en profondeur.

Mme Fabienne Balussou. La question des machines à voter est toujours à l’étude. L’ANSSI n’a pas totalement exclu leur utilisation, mais a émis des recommandations spécifiques. Ces recommandations visent à garantir la vérification et le caractère auditable du vote, notamment par l’impression d’un bulletin en parallèle du vote électronique. Ce système est déjà en place dans d’autres pays comme la Belgique et l’Inde, ce qui laisse la porte ouverte à son adoption en France. Il faut noter que les communes utilisant actuellement ces machines y sont très attachées, ce qui se traduit par des interpellations régulières du ministre de l’intérieur. Le ministère reste engagé dans un dialogue continu avec les élus sur ce sujet, d’où la poursuite des discussions et des études.

Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Concernant le recensement des incidents dans les bureaux de vote, il est important de noter que des perturbations volontaires du dépouillement nécessitant l’intervention de la police se produisent parfois. Ces incidents, consignés dans les documents officiels, devraient être remontés au niveau national pour en évaluer la fréquence. Cela permettrait de mieux comprendre les difficultés auxquelles sont confrontés les bénévoles dans les bureaux de vote.

Au sujet de la propagande électorale, bien que le système actuel avec La Poste soit plus simple qu’avec Adrexo, des problèmes persistent. J’ai l’exemple, dans ma circonscription, d’une commune nouvelle à cheval sur deux départements, où des erreurs d’envoi ont créé une confusion totale, des documents inadaptés ayant été envoyés en direction de deux circonscriptions ayant la même numérotation, dans deux départements distincts.

Cette situation soulève la question de l’efficacité du système actuel d’envoi de propagande électorale. L’envoi massif de documents papier, souvent ignorés par les électeurs, semble désuet. Cet envoi de surcroît est particulièrement coûteux, notamment dans les outre-mer. Ne pourrions-nous envisager un système mixte, alliant numérique et papier, pour réduire les coûts et l’impact environnemental tout en maintenant l’accessibilité pour tous ?

Enfin, concernant les recommandations de la Cour des comptes sur l’intégration des dépenses de campagne officielle dans les comptes de campagne, je m’interroge sur la faisabilité et la pertinence de cette mesure, étant donné la complexité actuelle de la gestion des dépenses de campagne.

M. Vincent Caure (EPR). Considérant les défis logistiques et les coûts importants liés à l’organisation des élections dans ces territoires, ne serait-il pas envisageable d’étendre le vote en ligne à nos concitoyens du Pacifique ou d’autres territoires ultramarins ? Cette option pourrait faciliter l’organisation des élections, augmenter la participation et réduire les coûts, notamment ceux liés au transport aérien du matériel. Les communes du Sud-Guyane, par exemple, pourraient constituer un territoire d’expérimentation intéressant pour ce dispositif.

M. Kévin Pfeffer (RN). Vous n’avez pas répondu à ma question précédente concernant les projets du ministère quant à la possible dématérialisation de la propagande électorale. Concernant l’utilisation de France Connect, j’ai effectué un test qui démontre que le système ne remplit pas son objectif de protection des données personnelles. En me connectant avec mon compte France Connect, j’ai pu non seulement consulter ma situation, mais aussi celle de n’importe qui d’autre, y compris celle de mon père. Bien que cela puisse permettre une traçabilité des consultations, cela soulève des questions importantes sur la protection de la vie privée.

M. Antoine Léaument, rapporteur. J’ai constaté, lors de mes démarches d’aide à l’inscription, que l’outil en ligne n’accepte pas les photos supérieures à 2 mégaoctets. Cela pose problème, car les téléphones portables actuels produisent des images plus lourdes, et il est difficile de les compresser sur le moment. Une modification de cette limite serait utile pour faciliter le processus d’inscription.

Concernant les réseaux sociaux, au-delà des ingérences étrangères, la question des fake news et de la manipulation de l’information par l’intelligence artificielle générative se pose. Cette technologie permet de créer des vidéos et des images falsifiées, pouvant faire croire qu’un candidat a dit quelque chose qu’il n’a pas dit en réalité. Avez-vous mis en place des outils pour contrer ce phénomène ? Envisagez-vous, notamment dans le cadre d’une élection présidentielle, des capacités d’intervention sur les réseaux sociaux pour faire retirer des contenus véhiculant de fausses informations, par exemple à la demande d’un candidat ? Ces questions font-elles partie de vos réflexions actuelles ? Des cas de manœuvres visant des candidats ont été observés dans des pays étrangers, ce qui est préoccupant.

Bien que l’Arcom soit le régulateur, elle semble ne pas disposer de pouvoir de sanction direct, celui-ci relevant désormais du niveau européen. Ne serait-il pas judicieux de lui confier un rôle de sanction autonome, si cela est envisageable ? Par ailleurs, au-delà des ingérences étrangères, un nouveau risque émerge : celui des ingérences capitalistes dans les élections. Certains milliardaires, qu’ils soient classés à droite, à l’extrême-droite ou au centre de l’échiquier politique, ont exprimé leur volonté de participer aux élections. Avez-vous les moyens d’étudier et de contrer cette influence potentielle des pouvoirs capitalistes ? Enfin, des révélations récentes concernant monsieur Boyard font état d’une campagne de diffamation qui aurait été orchestrée par le directeur de Canal Plus. C’est particulièrement inquiétant, d’autant plus que monsieur Boyard a été candidat à deux élections depuis le début de cette opération. Cette problématique, compte tenu de la puissance financière croissante de certains milliardaires, fait-elle partie des enjeux que vous surveillez ?

Mme Fabienne Balussou. Les incidents sont effectivement consignés dans les procès-verbaux et conservés en cas de contentieux. Cependant, nous ne disposons pas d’un suivi historique permettant une vision globale de la situation. Je précise cela sous le contrôle de mes collègues du bureau des élections. Nous manquons d’outils de pilotage qui permettraient, depuis Paris, d’avoir une vision d’ensemble synthétique de tous les incidents signalés dans les bureaux de vote et rapportés aux préfectures.

Mme Sylvie Calvès. L’envoi de la propagande électorale aux électeurs est une tradition française. La modifier impliquerait un changement significatif des habitudes des électeurs et des candidats, nécessitant un arbitrage politique important. Il convient toutefois de rappeler que le coût de l’envoi de la propagande électorale représente entre 50 et 65 % du coût total d’une élection. Par exemple, pour les élections législatives de 2022, cela a coûté 95 millions d’euros. Sur le cycle électoral 2019-2022, le coût total s’est élevé à 566 millions d’euros. Ces sommes considérables soulèvent des questions. L’impact environnemental est également majeur : pour le premier tour de l’élection présidentielle de 2022, plus de 1 milliard de pages ont été imprimées.

La dématérialisation de la propagande serait techniquement possible. Le ministère de l’intérieur a d’ailleurs mis en place l’application Programme candidat, qui contient tous les programmes et circulaires des candidats. Plusieurs options pourraient être envisagées, allant d’une dématérialisation totale à des dispositifs hybrides, comme l’envoi d’une lettre informative aux électeurs ou la possibilité pour eux de choisir de recevoir ou non la propagande électorale. Toute modification nécessiterait des changements législatifs, réglementaires et informatiques, ainsi que des études d’impact approfondies.

Concernant l’intégration des dépenses de la campagne officielle dans les dépenses électorales, la situation actuelle est complexe pour les candidats. Les dépenses de campagne sont gérées par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, tandis que le remboursement de la propagande électorale est effectué par le ministère de l’intérieur. Un avis du Conseil d’État de 2023 a ajouté à cette complexité en stipulant que le mandataire du candidat doit désormais gérer à la fois les dépenses de campagne et celles liées à la propagande électorale.

Des réflexions sont en cours pour intégrer les dépenses de propagande électorale dans les comptes de campagne. Cela pourrait impliquer une augmentation du plafond global des dépenses de campagne ou la création d’un double plafond. Ces changements nécessiteraient une expertise approfondie, notamment en ce qui concerne le calendrier des remboursements, actuellement différent pour la propagande électorale et les dépenses de campagne.

Mme Fabienne Balussou. Concernant l’extension du vote en ligne aux zones Pacifique et Sud-Guyane, je renvoie aux éléments évoqués précédemment sur la portée du vote en ligne. À ce stade, nous n’avons pas engagé de réflexion approfondie sur ce sujet. Je considère plutôt cela comme une proposition ou une piste d’étude. De même, la possibilité d’augmenter le poids des fichiers joints, notamment pour les photos lors de l’inscription en ligne sur les sites électoraux, est notée. Monsieur le président, si vous en êtes d’accord, nous considérerons ces deux aspects comme des propositions à étudier.

M. Alex Gadré. Il est important de rappeler le rôle central de l’Arcom dans le dispositif. Concernant l’élection présidentielle, la Commission de contrôle de la campagne en vue de l’élection présidentielle (CNCCEP) joue aussi un rôle crucial. Présidée par le vice‑président du Conseil d’État, elle est composée de membres de la Cour de cassation, de la Cour des comptes et du Conseil d’État. Cette commission supervise l’ensemble des opérations et met traditionnellement en place une cellule de veille sur les questions liées aux réseaux sociaux. Il est essentiel de souligner que le ministère de l’intérieur, et notamment le bureau des élections, n’a pas vocation à intervenir dans ce cadre.

Je souhaite également attirer l’attention sur un autre dispositif issu de la loi du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l’information. Il s’agit de la procédure de référé prévue à l’article L. 163-2 du code électoral. Cette procédure permet, dans les trois mois précédant toute élection générale, de saisir le juge en cas d’allégations ou d’imputations inexactes, potentiellement des fake news, qu’elles soient ou non générées par l’intelligence artificielle. L’intelligence artificielle bouleversera probablement notre rapport à l’information et la caractérisation des faits. Cette procédure relève du juge, puisqu’elle fait intervenir le tribunal judiciaire, lequel statue dans un délai de 48 heures. Bien que peu utilisée jusqu’à présent, elle a été récemment complétée par la loi dite « SREN » et permet aux candidats comme aux participants de la campagne de s’en saisir sous le contrôle du juge des référés.

Mme Fabienne Balussou. Sur les pouvoirs de sanction de l’Arcom, nous ne disposons pas d’éléments techniques nous permettant d’apporter un éclairage particulier sur ce volet.

M. le président Thomas Cazenave. Je pense que le rapporteur attendait des informations sur les ingérences économiques. Ces éléments figureront peut-être dans le questionnaire écrit que vous nous adresserez.

Mme Fabienne Balussou. Concernant les ingérences, c’est plutôt l’Arcom qui est pilote, et la CNCCEP. Le ministère de l’intérieur, et particulièrement le bureau des élections, n’est pas directement concerné par ce champ d’action.

M. le président Thomas Cazenave. Je vous remercie vivement pour cette audition de grande qualité et vos réponses précises, qui seront complétées par vos réponses écrites.

 

 

La séance s’achève à vingt heures treize.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. – M. Pierre-Yves Cadalen, M. Jean-Victor Castor, M. Vincent Caure, M. Thomas Cazenave, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Antoine Léaument, M. Kévin Pfeffer