Compte rendu
Commission
des affaires économiques
– Suite de l’examen pour avis des crédits budgétaires « Agriculture » (Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis) du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906). 2
Mercredi 22 octobre 2025
Séance de 15 heures 15
Compte rendu n° 9
session ordinaire de 2025-2026
Présidence de
Mme Marie-Noëlle Battistel,
Vice-Présidente
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La commission a poursuivi l’examen, du rapport de Mme Manon Meunier, sur les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906).
Mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales (Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis) (suite)
Article 49 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CE15 de M. Dominique Potier
M. Dominique Potier (SOC). Nous proposons de renforcer le réseau des fermes « Démonstration, expérimentation et production de références dans les systèmes économes en phytosanitaires » (Dephy) en portant leur nombre de deux mille à trois mille. Leur déploiement a été un échec, alors qu’elles sont la démonstration qu’il est possible, dans tous les écosystèmes, de réduire d’au moins 25 % le recours à la phytophamarcie. C’est bon pour le revenu des agriculteurs, bon pour la santé humaine et bon pour la planète.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. Ce budget sabre dans le financement de ce réseau, qu’il nous faut au contraire développer.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE64 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Les mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) constituent un outil essentiel de la transition des exploitations vers l’agro-écologie, qui sert notamment de support dans la lutte contre les algues vertes. Or, le projet de loi de finances divise par deux la part de l’État dans leur financement. Nous proposons non seulement de rétablir les crédits à leur niveau antérieur de 45 millions d’euros (M€), mais d’y ajouter 30 M€. Faute d’un budget suffisant, les agriculteurs manifesteront comme ces deux dernières années devant les préfectures pour réclamer le versement de ces aides.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. Les Maec sont fondamentales : elles accompagnent éleveurs et agriculteurs dans leur transition vers l’agro-écologie. Elles ont simplement un défaut : elles aident ceux qui veulent passer à des pratiques vertueuses mais ne soutiennent pas ceux qui les appliquent déjà – je pense à l’entretien des haies, par exemple. Sabrer dans les budgets de la protection environnementale, c’est aussi réduire les moyens dédiés à la préservation des paysages liés à l’élevage extensif. Or, si l’on ne maintient pas les prairies, les prairies humides en particulier, on favorisera l’avancée des friches et le recul de ce type d’élevage.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE81 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). D’ici à 2030, un quart des agriculteurs et agricultrices partiront à la retraite. Pour assurer la relève, de vingt mille à vingt-cinq mille personnes devraient s’installer chaque année. Or, la Mutualité sociale agricole (MSA) a recensé 13 621 installations seulement en 2023, soit un recul de 3,6 % par rapport à 2022. Le principal frein est la capacité à acquérir des terres. Une solution réside dans le portage foncier par lequel une personne morale achète des terres pour les mettre à disposition d’agriculteurs. Selon l’association Terre de liens, un soutien à hauteur de 1,4 milliard d’euros (Md€) par an permettrait de couvrir 75 % des besoins d’installation. Par notre amendement d’appel, nous invitons le Gouvernement à fixer cet objectif dès 2026.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. J’ai dit toute l’importance que j’accorde à la question de savoir qui possède les outils de production, laquelle renvoie aussi au foncier. Il faut s’interroger à cet égard sur l’accaparement des terres agricoles par des grands groupes agro-industriels, comme le géant céréalier Euricom en Camargue, même si ce phénomène n’est pas encore très prégnant dans nos paysages agricoles. Je vous invite à lire la passionnante enquête de Lucile Leclair, Hold-up sur la terre. Nous devons proposer un encadrement de ces pratiques et, pour aider les agriculteurs à relever ce défi, envisager des solutions comme le financement public du portage par les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer).
M. Dominique Potier (SOC). Je ne partage pas le narratif de la rapporteure. Le grand capitalisme financier ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt : pour l’essentiel, c’est le petit libéralisme qui est en cause dans l’accaparement des terres. Les grandes sociétés, même chinoises, jouent un rôle mineur. Les dix millions d’hectares qui vont être libérés par le départ de la moitié des actifs vont servir à agrandir des surfaces existantes, ce qui appauvrira économiquement et socialement nos territoires.
Dans notre pays, le phénomène massif auquel le monde rural est actuellement confronté, c’est l’abandon par les exploitants de l’élevage et la diversification au profit de gains de superficies, avec la bénédiction de la politique agricole commune (PAC). Or, aucune vigilance ne s’exerce, notamment du fait de l’impuissance des Safer à intervenir sur le marché. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire que l’État reprenne sa place dans la régulation du contrôle des structures, régulation soumise à un délitement à l’échelle territoriale.
Pour avoir un peu étudié ces questions depuis une dizaine d’années, je peux dire que le portage sans partage n’est pas une solution idéale, car la puissance publique ne fait que courir après la spéculation privée. Néanmoins, je voterai en faveur de cet amendement.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Le type d’accaparement que j’évoquais est encore un phénomène mineur, comme je l’ai précisé, mais il appelle notre vigilance. Je reviens à l’élevage porcin. Les éleveurs possèdent encore la terre et les bâtiments, mais les grosses coopératives auxquelles ils sont pieds et poings liés leur imposent, en tant que garants, des cahiers des charges tellement contraignants – cadences, dimensionnement des bâtiments – qu’on en arrive à un système quasiment intégré. Elles ne prennent pas encore le risque d’acheter des surfaces – dans le monde agricole, il y a toujours une culture qui valorise la possession des terres – mais elles promeuvent indirectement un certain type de modèle agricole qui passe notamment par l’agrandissement des superficies.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE8 de M. Dominique Potier
M. Dominique Potier (SOC). En attendant la grande loi foncière qu’on nous promet depuis dix ans, il faut des fonctionnaires capables d’assurer la régulation du foncier. Or, on observe en ce domaine une démission de l’État. Il n’y a plus de professionnels fins connaisseurs des territoires comme il y en avait dans les directions départementales de l’agriculture. Personne n’est plus capable de discerner des opérations de contournement derrière les montages sociétaires, les transmissions d’usage plutôt que de propriété, ou les démembrements de propriété qui s’appuient sur le recours à une ingénierie très sophistiquée. Je propose donc de dégager des crédits pour renforcer le contrôle des structures.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. Le contrôle des structures est fondamental, notamment pour encourager l’installation de nouveaux agriculteurs. Beaucoup de transferts de parts nous échappent. Une loi foncière permettrait aux Safer d’avoir plus de visibilité sur les opérations réalisées actuellement à bas bruit.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE143 de Mme Manon Meunier
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Il s’agit de revoir à la hausse les crédits du pacte en faveur de la haie. Le réseau bocager se réduit d’année en année, ce qui entraîne une perte de biodiversité et une diminution des services rendus à l’agriculture. Les haies, qui réclament un travail intense de la part des agriculteurs, jouent un rôle fondamental pour le maintien des paysages et la rétention de l’eau dans les sols. Les dotations du pacte sont devenues une peau de chagrin : des 110 M€ prévus lors de son lancement en 2024, on n’en est plus qu’à quelques dizaines de millions d’euros. Cela ne suffira ni à planter de nouvelles haies ni, ce qui est tout aussi important, à entretenir celles qui existent déjà.
Mme Mélanie Thomin (SOC). Les bienfaits des haies ne sont plus à démontrer. Elles sont un outil agronomique pour nos agriculteurs, permettent de lutter contre les aléas climatiques et constituent un espace de biodiversité ainsi qu’une ressource en bois-énergie. Le budget du pacte en faveur de la haie a été fortement réduit et le groupe Socialistes et apparentés le déplore : il nous faut une continuité budgétaire pour soutenir une dynamique en faveur des haies.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE71 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Opposés aux coupes dans les effectifs de l’Office national des forêts (ONF), nous voulons inscrire dans le budget les crédits nécessaires à la création d’un emploi supplémentaire par service, soit 478 équivalents-temps plein travaillé (ETPT) à l’échelle nationale. En vingt ans, l’ONF, acteur essentiel de la transition écologique, a perdu près d’un tiers de ses effectifs. Il en résulte un moindre suivi des forêts, un accroissement des risques d’incendie et un retard dans la gestion sylvicole. Les agents alertent : ils ne sont pas assez nombreux pour assurer les tournées et les contrôles nécessaires à la prévention des feux. Face au changement climatique, il importe de renforcer leurs équipes pour garantir, grâce à une présence humaine sur le terrain, la sécurité des promeneurs, la préservation de la biodiversité et une bonne capacité de nos forêts à stocker le carbone. Comme l’a souligné la Cour des comptes dans un récent rapport, l’ONF est un opérateur incontournable.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. L’ONF a subi des coupes budgétaires scandaleuses ces dernières années : cinq mille ETP lui ont été retirés et la baisse des effectifs se poursuit dans ce budget, avec une trentaine d’ETP en moins. Les forêts sont pourtant au cœur des changements climatiques : il faut des agents suffisamment nombreux pour les gérer, sachant prendre en compte les différences entre essences et prévenir les risques accrus d’incendie. L’acharnement du Gouvernement contre l’ONF est incompréhensible. Avis favorable.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Nous le constatons tous dans nos circonscriptions : les agents sont de moins en moins nombreux, alors que les enjeux sont de plus en plus importants. J’adhère donc à ce renforcement des effectifs.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). J’interviens avec ma casquette de rapporteur spécial des crédits relatifs à la sécurité civile au sein de la mission Sécurités. Cet été, alors que la France a connu les plus grands feux de forêt depuis le début du XXIe siècle, le ministre de l’intérieur a invoqué le problème de l’entretien des forêts et des jardins de particuliers. Comment, après un tel discours, réduire les postes à l’ONF ? C’est complètement dingue ! Je ne manquerai pas d’inviter le nouveau ministre de l’intérieur à se coordonner avec les ministres chargées de l’agriculture et du budget pour lutter contre les incendies. On ne saurait se contenter de déplorer le manque de prévention, il faut renforcer les moyens qui lui sont dédiés.
Mme Mélanie Thomin (SOC). Les ressources humaines à l’ONF sont précieuses, en particulier face aux aléas climatiques. Une réflexion approfondie s’impose, en particulier dans la reconstitution stratégique des forêts décimées par les tempêtes – pensons aux forêts bretonnes détruites par la tempête Ciarán durant l’automne 2023. Cela appelle aussi des moyens supplémentaires.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE36 de Mme Hélène Laporte
Mme Géraldine Grangier (RN). Le projet de loi de finances prévoit une nouvelle baisse des crédits du Centre national de la propriété forestière (CNPF). Cette coupe budgétaire (400 000 euros en moins, soit 2 % de son budget) s’inscrit dans une baisse constante des moyens alloués aux acteurs chargés des forêts françaises, qu’elles soient publiques (ONF) ou privées (CNPF). Avec 17,5 millions d’hectares en métropole, la France possède la quatrième surface forestière de l’Union européenne, largement sous-valorisée.
Le CNPF n’est pas un acteur secondaire, les forêts françaises étant aux trois quarts privées. Il ne saurait être une variable d’ajustement budgétaire, a fortiori dans un budget de bureaucratisation qui prévoit une hausse de 23 % des moyens de l’administration centrale, laquelle connaît depuis des décennies une multiplication des agences sans gains d’efficacité. Cet amendement vise à dégager 400 000 euros pour stabiliser les moyens du CNPF, somme que nous n’aurons pas de difficultés à trouver parmi les crédits dédiés à l’administration centrale du ministère de l’agriculture, en forte hausse cette année.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Pourquoi ne prendre en considération que le CNPF et la forêt privée ? Certes, il s’agit d’un acteur fondamental, mais il nous faut pouvoir également entretenir correctement les forêts publiques. J’ai du mal à comprendre que vous ayez voté contre l’amendement précédent. Cela dit, si on rapportait les 400 000 euros de crédits que vise votre amendement au nombre d’ETP de l’ONF supprimés qu’il faudrait rétablir, soit 32 ETP, on obtiendrait un salaire mensuel de seulement 1 040 euros. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE9 de Mme Mélanie Thomin
Mme Mélanie Thomin (SOC). Pour le groupe Socialistes et apparentés, la souveraineté de la France en matière d’élevage est un enjeu stratégique majeur, qu’il s’agisse de la sécurité alimentaire, de l’équilibre de nos territoires ruraux ou de la transition agro-écologique. Or, le recul du nombre d’éleveurs, la concentration géographique des productions, la fragilisation des services vétérinaires de proximité, les difficultés d’accès au foncier menacent la résilience de notre modèle d’élevage. Les débats sur la loi du 11 août 2025 visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, dite loi « Duplomb », l’ont mis en évidence : la modernisation des bâtiments d’élevage constitue un levier essentiel pour réduire les impacts environnementaux et sanitaires liés à l’activité agricole. Nos échanges avec les agriculteurs nous montrent qu’elle représente aussi un atout essentiel pour l’attractivité des exploitations au moment de la transmission.
Nous voulons inscrire des crédits supplémentaires pour soutenir l’accompagnement des exploitants dans l’élaboration d’un plan de modernisation fixant des objectifs précis en matière de réduction des nuisances et d’amélioration des conditions sanitaires et environnementales.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Sagesse. Certes, il est souhaitable de soutenir un tel accompagnement, mais il me paraît utile de réfléchir à la manière de bien orienter ces fonds publics vers les éleveurs. Il ne faudrait qu’ils puissent aller à des groupes comme T’Rhéa.
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Il faudrait en effet ajouter des conditions pour le versement de ces fonds afin d’éviter que n’importe quel type d’élevage en bénéficie.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. J’imagine que des critères d’attribution peuvent être définis par voie réglementaire.
Mme Mélanie Thomin (SOC). L’amendement est suffisamment explicite : il vise les exploitations agricoles. Ayons confiance dans l’avenir : des critères pourront être définis ultérieurement.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. J’aurais confiance dans l’avenir si nous n’avions pas le gouvernement qu’on a aujourd’hui. Le portage par les structures agro-industrielles est favorisé par loi Duplomb, voilà ma crainte. Toutefois je ne doute pas que, lorsque viendra le moment d’appliquer cette disposition, le compte rendu de nos débats montrera que ces crédits sont bien considérés comme étant destinés aux exploitants. Aussi vais-je donner un avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE86 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). La filière française de la noisette est confrontée à des difficultés mises en relief lors des débats sur la loi Duplomb et l’acétamipride. Elle a cumulé 45 M€ de pertes depuis cinq ans, du fait des ravages que font subir aux récoltes punaises diaboliques et balanins. Je propose qu’un fonds d’urgence doté de 10 M€ soit mis en place pour la soutenir dans l’attente d’alternatives – les expérimentations menées avec l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) en matière de lutte biologique en sont à leur deuxième année.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable : il importe de soutenir cette filière pour maintenir sa compétitivité. Nous devons pouvoir compter sur des solutions de long terme. Elles ne sauraient passer par la réintroduction de l’acétamipride, car il faut en premier lieu préserver la santé des agriculteurs et des ouvriers agricoles. Je vous renvoie à la proposition de loi que notre groupe, La France insoumise, va défendre lors de sa niche parlementaire : elle vise non seulement à abroger la loi Duplomb, mais aussi à interdire l’importation de produits traités avec l’acétamipride pour réduire la pression qu’exerce la concurrence déloyale et favoriser les producteurs français. Une autre piste réside dans la diversification : mieux vaut éviter de mettre tous ses œufs dans le même manier.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CE90 de M. David Taupiac, II-CE147 de Mme Manon Meunier et II-CE38 de M. Boris Tavernier (discussion commune)
M. David Taupiac (LIOT). Il s’agit de soutenir le déploiement des projets alimentaires territoriaux (PAT) en leur allouant 30 M€. Beaucoup doivent entrer dans une phase opérationnelle, mais les aides ne sont pas au rendez-vous.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Monsieur Taupiac, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement au profit du mien (II-CE147). Je partage le même objectif que vous, mais préfère que la compensation de la dépense passe par le dispositif des travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (TODE). Les PAT sont le plus souvent mis en œuvre par des agentes – oui, ce sont en majorité des femmes – des collectivités territoriales qui, sans budget, ont bien du mal à en faire un outil de transformation pour structurer les filières à l’échelon local – par exemple, en connectant les agriculteurs avec les cantines. N’oublions pas que l’enjeu est de renforcer notre souveraineté alimentaire.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Avec les amendements II‑CE147 et II-CE38, la ponction serait faite sur les crédits destinés au TODE, qui en principe ne seraient plus disponibles compte tenu des amendements précédemment adoptés. Nous compterions donc sur le Gouvernement pour trouver une solution permettant d’abonder à partir d’une autre source les crédits que vous souhaitez renforcer.
M. Boris Tavernier (EcoS). Notre nation a besoin d’une réelle politique de l’alimentation, objet de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (Snanc) qui, selon la loi « Climat et résilience », aurait dû être publiée en juillet 2023 et que nous attendons toujours…
Notre nation a besoin d’une politique de l’alimentation avec des moyens. Tel n’est pas le cas ; c’est déplorable. Pour preuve, l’action Politique de l’alimentation pour la souveraineté alimentaire perd 14,7 % de ses moyens dans le budget de cette année. Ainsi, seuls 5,8 M€ lui sont dévolus alors qu’elle recouvre un large panel d’actions en faveur de la transition alimentaire de nos territoires, comme l’accompagnement de la restauration collective ou le déploiement des projets alimentaires territoriaux.
Cet amendement vise donc à renforcer les moyens budgétaires de l’action Politique de l’alimentation pour la souveraineté alimentaire, afin de soutenir le développement des PAT et la mise en place, que j’espère prochaine, de la stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je suis favorable à ces trois amendements, avec une légère préférence pour le mien. Vous pouvez retirer l’amendement II‑CE90 au profit du II‑CE147, à moins que l’on ne diversifie les fonds, puisque nous appelons collectivement le Gouvernement à lever le gage, et que nous soutenions alors l’amendement de monsieur Taupiac.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). En tant que parlementaires, notre double préoccupation est que l’alimentation soit de qualité – pensons notamment aux cantines de nos enfants – et que des emplois soient créés dans l’agriculture. Les projets alimentaires territoriaux mettent justement en lien collectivités territoriales et producteurs et favorisent le local et le bio. La baisse de leurs moyens serait donc un très mauvais signal.
Par exemple, dans le cadre du projet alimentaire territorial en Haute‑Vienne, Interbio Nouvelle-Aquitaine a réalisé un important travail pour former les cuisiniers et accompagner les vingt communes de Limoges métropole vers le bio et le local.
Certaines communes restent cependant loin de l’objectif, comme Limoges – seulement 10 % de bio, soit 10 % de moins que ce que la loi demande. Ainsi, malgré nos incitations, elles n’en font pas assez. Si, en plus, nous baissons les moyens, les communes déjà loin du compte mais qui ont connu quelques avancées ne vont plus du tout faire d’effort et ce sera compliqué.
M. Dominique Potier (SOC). Vu la tradition politique dans laquelle elle s’inscrit, notre rapporteure pour avis pourrait faire preuve d’altruisme et considérer qu’un amendement autre que le sien peut triompher.
La commission adopte l’amendement II‑CE90.
En conséquence, les amendements II-CE147 et II-CE38 tombent.
Amendement II-CE11 de Mme Mélanie Thomin
Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement cible la stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat, dont découlent les projets alimentaires territoriaux, ces dispositifs locaux qui permettent de travailler avec les acteurs de terrain sur nos stratégies d’alimentation.
Plus de la moitié des adultes en France sont en surpoids ou obèses. La stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat, qui accuse un retard de plus de deux ans, est indispensable pour accompagner de bonnes politiques publiques sur ce sujet. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le coût caché de l’alimentation en France dépasse les 170 Md€, dont 130 Md€ imputables aux maladies chroniques liées à l’alimentation.
Parallèlement, notre pays ne respecte pas ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec une baisse de seulement 0,8 % en 2025, contre un objectif de 5 % par an. Enfin, 117 associations ont récemment interpellé le Gouvernement pour exiger la publication de la Snanc.
Cet amendement vise donc à augmenter les crédits de cette stratégie nationale afin d’articuler les enjeux évoqués, à la fois sur le terrain et au niveau national.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Mon avis est très favorable. La stratégie nationale pour l’alimentation, fondamentale, est aussi la clé de la souveraineté alimentaire. Nous devons pouvoir répondre à des habitudes et des demandes alimentaires. L’analyse de l’alimentation est au cœur des problématiques de souveraineté alimentaire, car il est cohérent d’adapter la production à la demande.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Je suis également favorable à cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
La réunion est suspendue de seize heures à seize heures cinq.
Amendement II-CE14 de M. Dominique Potier
M. Dominique Potier (SOC). Entre 2013 et 2023, à l’échelle française comme européenne, la science et la recherche appliquée, privée comme publique, ont beaucoup progressé – ce bond est l’une des conclusions positives de la commission d’enquête.
Or, cette recherche arrive trop peu dans les fermes. L’une des raisons que nous avons identifiées concerne le déficit de conseil stratégique à caractère public et la prééminence d’un conseil privé, que la séparation du conseil et de la vente n’a absolument pas limité.
Notre proposition consiste, d’une part, à responsabiliser le conseil privé, à travers les certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP), et, d’autre part, à créer un conseil économique global.
Au vu des sommes en jeu et de la diminution drastique du budget, il ne manque finalement que 70 M€ pour assurer à chaque agriculteur la présence d’un conseiller qui, deux fois par an, au printemps et à l’automne, l’accompagnerait dans ses décisions non seulement sur les phytos, mais aussi sur l’air, l’eau, le sol et la biodiversité.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. Lors du vote de la loi Duplomb, nous avons pu revenir sur les questions de séparation du conseil et de la vente. Nous étions nombreux dans cette salle à déplorer le fait que le conseil ne puisse pas fonctionner s’il n’était pas financé par ailleurs.
Avoir des fonds alloués à un conseil de qualité, soutenu par des acteurs publics, dans un objectif de réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires, me semble pertinent.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE76 de M. Benoît Biteau
M. Charles Fournier (EcoS). L’amendement de mon collègue Benoît Biteau concerne la réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques. Le plan Écophyto, soutenu à l’échelle nationale, fixe des cibles ambitieuses. Pour qu’il se traduise dans les faits, un accompagnement global des exploitants agricoles est cependant nécessaire, notamment par un conseil en stratégie indépendant de toute logique commerciale.
Ce dispositif de conseil avait été prévu par la loi, mais il est resté très limité en l’absence de ligne budgétaire pour le soutenir. Cet amendement propose donc la création d’une ligne budgétaire de 50 M€ pour son déploiement.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE53 de M. Robert Le Bourgeois
M. Robert Le Bourgeois (RN). Je suis très heureux de présenter cet amendement que la rapporteure pour avis a raillé en introduction de nos discussions. En effet, une économie de 30 000 euros ne changera pas la face du monde, mais permettra de clarifier les positions de chacun en matière de baisse des dépenses publiques.
Notre pays est en effet exposé à une situation budgétaire alarmante, face à laquelle il serait irresponsable de fermer les yeux. J’ai donc déposé et maintenu cet amendement afin de savoir si le pays peut compter ou non sur la gauche et sur l’extrême gauche pour baisser la dépense publique inutile, comme l’attendent les Français.
Je n’ai rien contre les conseillers régionaux aux affaires agricoles, rattachés à nos ambassades. Nous pouvons cependant nous accorder sur le fait que la hausse de l’enveloppe de leurs frais de déplacements et de représentation n’est pas prioritaire à ce stade. Il me paraît donc raisonnable de leur demander un effort comme on le demande au reste du pays.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Le contexte d’austérité budgétaire est imposé par le Gouvernement, qui nous demande de faire des économies. Vous répondez que vous êtes d’accord pour aller les chercher.
Nous remettons en question le fait même de couper en permanence dans les dépenses, comme vous le faites dans cet amendement comme dans tous ceux que vous avez déposés – puisque vous n’avez déposé aucun amendement pour augmenter le budget. Vous cherchez les économies dans le budget du ministère de l’agriculture.
Pourquoi ne votez‑vous pas la taxe Zucman ? Pourquoi n’essayez‑vous pas de faire contribuer les plus grandes fortunes de ce pays en allant chercher, en commission des finances, 20 Md€ supplémentaires avec la taxe Zucman ? Pourquoi ne faites‑vous pas cet effort ? Après, vous allez nous parler de souveraineté, de souveraineté alimentaire, de contexte international et de nécessaire protection des agriculteurs de la concurrence !
En supprimant les moyens des conseillers agricoles en ambassade, comme vous le faites, comment voulez‑vous que nous ayons des voix pour nous représenter à l’international, pour porter la position de la France, pour dire que nos politiques agricoles doivent être respectées et que les agriculteurs français ne doivent pas subir la concurrence ?
Comment fait‑on dans un contexte qui est aussi celui du Mercosur ? Comment fait‑on dans un contexte international aussi tendu ? Comment fait‑on pour couper encore et encore dans le budget du ministère de l’agriculture, avec 1,4 Md€ en moins ? L’agriculture, dites-vous, doit être une priorité ; mais où sont vos amendements pour les fonds d’indemnisation pour les agriculteurs et les éleveurs qui traversent les crises sanitaires ? Il n’y en a pas. Vous ne les avez pas entendus. Pourtant, le Gouvernement n’a prévu aucune hausse pour les éleveurs victimes de la dermatose ou de l’influenza aviaire.
Ce budget est insuffisant et vous ne proposez aucune hausse. Vous n’avez aucun projet pour l’agriculture française. Je suis donc très défavorable à cet amendement.
M. René Pilato (LFI-NFP). Le Conseil d’État, dans son délibéré du 11 mars 2024, après un recours de votre part contre l’étiquette « extrême droite » qui vous est accolée, vous a débouté et a confirmé que LFI est de gauche, comme les écologistes et le parti communiste, l’extrême gauche étant renvoyée au NPA et à Lutte ouvrière. J’aimerais que vous arrêtiez, parce que l’extrême, c’est vous. Nous, nous sommes la gauche.
M. Hervé de Lépinau (RN). Je répondrai sur la taxe Zucman, qui s’invite dans le cadre des débats de la commission des affaires économiques, puisque notre rapporteure pour avis y voit une objection contre cet amendement.
Ce qui est important dans la fiscalité, c’est son efficience. Vous n’avez toujours pas compris que les ultrariches sont des nomades fiscaux. Vous pourrez voter toutes les lois que vous voulez, ils échapperont à l’impôt parce qu’ils ont les moyens de se déplacer dans des pays où la fiscalité est beaucoup plus favorable. La taxe Zucman ne règlera donc pas le problème de l’agriculture.
Nous proposons en revanche d’arrêter d’augmenter les dépenses de fonctionnement – puisque nous faisons des propositions et que les Français le demandent. Il faut trouver des sources d’économies, analyser pour cela ce qui est inefficace dans les budgets, notamment du ministère de l’agriculture, et le supprimer des dépenses pour pouvoir affecter le montant à des actions plus efficaces.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Bien sûr qu’il y a de l’exil fiscal, mais il existe aussi des dispositifs pour lutter contre lui. Les États‑Unis le font, par exemple. Pourquoi ne pourrions-nous pas le faire ? C’est précisément ce que nous proposons avec le dispositif de la taxe Zucman. Dans les cinq années suivant sa mise en place, les riches qui fuiront le pays seront imposés quand même.
Il faut que vous puissiez avouer ce que vous faisiez déjà l’année dernière, quand les rangs macronistes étaient vides : protéger les plus grandes richesses de ce pays.
En attendant, ce n’est pas la partie « Recettes » du budget qui nous intéresse aujourd’hui. Pourtant, elle conditionne tout ce que vous êtes en train de faire par ailleurs. Vous n’avez programmé que des coupes budgétaires dans le budget du ministère de l’agriculture. Vous abandonnez les agriculteurs.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CE12 de Mme Mélanie Thomin, II-CE142 de Mme Manon Meunier et II-CE91 de M. David Taupiac (discussion commune)
Mme Mélanie Thomin (SOC). Revenons aux débats budgétaires qui concernent directement l’agriculture, car la plupart des parlementaires siègent dans cette commission parce qu’ils ont envie de parler des sujets agricoles.
Mon amendement part du constat que près de la moitié des Françaises et des Français jugent essentiel d’acheter des produits locaux et de saison et de privilégier les circuits courts. Néanmoins, les ventes de ces produits ne représentent que 3 % du chiffre d’affaires des supermarchés.
L’Institut national de l’origine et de la qualité (Inao) joue un rôle essentiel dans la valorisation des produits locaux, à travers les processus de labellisation, d’identification et de certification de qualité et d’origine. Pour les filières, cette reconnaissance de leur production locale s’avère particulièrement stratégique. Elle doit en effet être préservée et soutenue, notamment pour mieux lutter contre la concurrence déloyale de produits venus de l’étranger. L’échalote de Bretagne, cultivée sur un territoire où je suis élue, mérite ainsi d’être reconnue par le biais de ces processus de certification.
Cet amendement vise à déployer des campagnes de promotion encourageant les consommateurs français à privilégier les produits locaux, renforçant ainsi les débouchés des agriculteurs.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. L’Inao est en effet un organisme fondamental, puisqu’il structure ce qu’il reste de protectionnisme dans notre pays. Les appellations d’origine contrôlée ou les appellations d’origine protégée (IGP), comme l’agneau du Limousin, offrent ainsi une protection à ces produits et apportent de la valeur ajoutée à l’agriculture française par rapport à la concurrence internationale.
Affaiblir l’Inao, comme dans ce budget, ne permet pas de valoriser ces produits ni de bénéficier de ce qu’il reste de protectionnisme. L’objectif collectif doit être au contraire de l’améliorer, d’autant que la concurrence internationale est de plus en plus forte.
Nous proposons donc de rétablir l’équilibre du budget de l’Inao. Cet amendement a été travaillé avec la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux‑de‑vie de vin à appellations d’origine contrôlées (Cnaoc), qui souligne l’enjeu de cette mesure et la nécessité, pour lutter contre la concurrence, que cet outil public soit puissant.
M. David Taupiac (LIOT). Mon amendement vise lui aussi à soutenir le budget de l’Inao. Dans un contexte de difficultés agricoles, les signes officiels de qualité sur nos productions garantissent à nos agriculteurs une valeur ajoutée plus importante et nous permettent de conquérir des marchés extérieurs. Par exemple, 60 % de la production du vin IGP Côtes-de-Gascogne est exportée.
L’effet de levier est important : les 26 M€ de budget de fonctionnement de l’Inao génèrent 42 Md€ de chiffre d’affaires pour les productions sous signe officiel de qualité. Il me semble donc que cette dépense, qui génère des ressources pour nos agriculteurs, est largement justifiée.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Mon avis est favorable pour ces trois amendements. Le mien répond à une demande précise de la Cnaoc, mais nous pouvons soutenir celui de madame Thomin, qui va plus loin.
M. Hervé de Lépinau (RN). D’abord, nous regrettons que l’amendement II-CE12 soit de nouveau gagé sur les TODE. Au vu de nos débats, il ne doit plus y avoir un kopeck dans cette caisse et je vois mal comment nous pourrions continuer à gager sur elle.
Ensuite, l’Inao est absolument indispensable pour préserver l’originalité de nos appellations, mais il doit aussi se réformer : la durée d’instruction des dossiers, dix ans en moyenne, est beaucoup trop longue eu égard à la concurrence internationale.
Avant d’augmenter les crédits, il faudra donc réfléchir avec l’Inao. La Cnaoc est d’ailleurs d’accord pour qu’en interne, les procédures d’instruction des dossiers soient révisées pour être accélérées.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Monsieur de Lépinau nous fait de la bouillie sur les aspects économiques, en expliquant que les plus riches partiront si on les taxe, alors qu’une analyse de Matignon montre qu’ils ne seraient que 0,03 % dans ce cas. Notre collègue confond peut-être sa volonté d’être avocat fiscaliste et député pour aider le peuple.
M. Hervé de Lépinau (RN). Je suis avocat !
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Je ne le savais pas. Il nous dit maintenant que l’on ne pourrait pas récupérer d’argent parce qu’il n’y aurait plus d’argent dans l’un des dispositifs. Or, nous sommes en commission saisie pour avis : nous pouvons poursuivre notre étude du budget, sans quoi les administrateurs nous l’auraient dit. Cela va être un peu long s’il faut vous expliquer à la fois l’économie et le fonctionnement de cette commission de l’Assemblée nationale.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Pour rappel, nous espérons évidemment que le Gouvernement trouve un autre financement pour les amendements ainsi « gagés ».
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je suis ravie que le Rassemblement national change encore une fois d’avis sur un sujet et dise que l’Inao est important, alors que, l’année dernière, lors de l’examen du budget comme du projet de loi de simplification économique, ses membres défendaient des amendements pour le supprimer purement et simplement.
Si vous considérez désormais qu’un traitement plus rapide des dossiers par l’Inao est un enjeu, nous n’y arriverons pas en faisant des coupes budgétaires. Je nous invite donc collectivement à voter ces hausses de budget pour l’Inao, qui est un organisme fondamental.
La commission adopte l’amendement II‑CE12.
En conséquence, les amendements II-CE142 et II-CE91 tombent.
Amendements II-CE60 de Mme Murielle Lepvraud, amendements identiques II-CE75 de M. Benoît Biteau, II-CE95 de M. David Taupiac et II-CE98 de M. Julien Brugerolles (discussion commune)
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Mon amendement vise à instaurer un fonds d’indemnisation pour les élevages confrontés aux crises sanitaires animales majeures. Les dispositifs actuels ne couvrent que partiellement les pertes, alors que les épidémies entraînent des conséquences économiques bien au‑delà des abattages ordonnés.
En Bretagne, par exemple, une épidémie de fièvre catarrhale ovine (FCO) touche 2 800 foyers, dont 88 % de bovins, avec des impacts massifs sur la production et la trésorerie des exploitations. Or, le code rural impose des obligations strictes en cas de maladie animale, sans assurer une indemnisation complète, fragilisant ainsi durablement les élevages.
L’amendement propose donc la création d’un guichet unique, accessible à tous les élevages touchés par une maladie animale soumise à déclaration obligatoire, la prise en charge des pertes directes, indirectes et en aval, ainsi que des frais vétérinaires associés. Ce fonds permettra de sécuriser nos filières et de garantir aux éleveurs une réparation juste et transparente des préjudices subis.
Le 1er août dernier, ma collègue Mathilde Hignet et moi-même avions écrit à la ministre Annie Genevard à ce sujet, mais en vain. Cet amendement devrait permettre d’aller plus vite.
M. Boris Tavernier (EcoS). Ces dernières années, nos éleveurs ont été confrontés à des crises sanitaires à répétition, comme la grippe aviaire ou la fièvre catarrhale ovine. À l’heure où je vous parle, mon département, le Rhône, est entièrement placé en zone de surveillance pour la dermatose nodulaire contagieuse.
La réponse publique se caractérise bien souvent par son inadéquation : absente ou défaillante, dans certains cas ; rigide, inhumaine et peu adaptée aux réalités de terrain, dans d’autres. À cela s’ajoutent des dispositifs de biosécurité inapplicables dans les élevages en plein air.
Si les abattages prescrits par l’administration donnent lieu à des indemnisations, elles ne couvrent ni l’ensemble des pertes directes, ni, a fortiori, des pertes indirectes subies par les éleveurs : baisse de la fertilité, chute de la production laitière, perte de chiffre d’affaires, frais vétérinaires, ou encore impact sur les ateliers de transformation à la ferme.
Ces conséquences économiques sont pourtant bien réelles et ne sauraient rester sans réponse. Le présent amendement vise donc à ouvrir un fonds d’indemnisation spécifique pour couvrir les pertes économiques directes et indirectes subies par les éleveurs lors d’épizooties animales. Face à des réponses publiques souvent inadaptées, il vise à garantir une équité de traitement entre élevages, quels que soient leur taille ou leur modèle. Financé par redéploiement de crédits, ce dispositif renforcerait la résilience des filières d’élevage.
M. David Taupiac (LIOT). Il s’agit de mettre en place un guichet d’indemnisation de 300 M€ afin de faire face aux pertes directes, indirectes et en aval et de prendre en charge les frais vétérinaires.
Le Sud-Ouest, mon département, s’est trouvé en première ligne lors de la plupart des problèmes sanitaires : grippe aviaire – nous venons d’ailleurs de changer de niveau de vigilance en raison d’un foyer dans le Lot-et-Garonne –, MHE (maladie hémorragique épizootique) et FCO.
Ces problèmes récurrents mettent à mal les filières animales. Nous avons besoin de nous doter d’un guichet d’indemnisation qui prenne en compte l’ensemble des pertes subies par nos éleveurs.
M. Julien Brugerolles (GDR). Mon amendement vise à créer un fonds d’indemnisation public pour prendre en charge l’ensemble des pertes directes et indirectes liées aux épizooties. Ce fonds devrait s’intégrer à une réforme globale de la gestion des risques et des aléas en agriculture, incluant un volet sanitaire dans un grand régime public.
Les 300 M€ prévus par cet amendement doivent au moins couvrir l’ensemble des pertes et frais non couverts par le dispositif d’indemnisation des élevages, prévu par l’arrêté préfectoral de déclaration d’infection du 30 mars 2001 « fixant les modalités de l’estimation des animaux abattus et des denrées et produits détruits sur ordre de l’administration ».
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Ce sujet important affecte durement notre agriculture, particulièrement l’élevage. Lorsque la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a explosé en Savoie et en Haute-Savoie, cet été, je me suis rendue sur place pour comprendre les conséquences des abattages totaux pour les éleveurs : c’est la pire chose qui puisse leur arriver. Les services de l’État étaient insuffisamment nombreux et ont très peu assuré leurs missions. Quand les vaccins sont arrivés, ce sont les éleveurs et les vétérinaires qui ont dû s’organiser pour procéder à la vaccination. Il est même arrivé que des éleveurs qui venaient de subir des abattages totaux vaccinent les troupeaux d’autres éleveurs. Les animaux contaminés sont parfois restés sur place plusieurs jours parce que les services d’équarrissage et les directions départementales de la protection des populations étaient en sous-effectifs. De toute évidence, nous ne sommes pas prêts et nous n’avons pas anticipé ces crises sanitaires. Nous laissons sur le carreau des éleveurs qui subissent le pire, y compris sur le plan psychologique. Ils n’ont pas eu accès à une cellule de soutien psychologique sur le coup ; j’en ai d’ailleurs alerté la ministre. L’on m’a répondu qu’une cellule était attendue, mais c’est immédiatement qu’elle doit intervenir, pas des mois plus tard !
Nous devons interroger le principe même de l’abattage total. Le rapport de l’Agence européenne de sécurité des aliments (European Food and Safety Authority, Efsa), qui est aussi l’autorité sanitaire européenne, indique qu’une fois que la vaccination est effective sur un territoire, un abattage total et un abattage partiel ont la même efficacité sanitaire. J’insiste sur ce point, car il y a des zones où des éleveurs continuent à subir des abattages totaux alors que la vaccination a été effectuée. Le Gouvernement doit se remettre en question. L’abattage total est traumatisant ; il fait perdre des années de préservation des races, de préservation génétique, de constitution de troupeaux. Il frappe des éleveurs qui sont à quelques années de la retraite et ne pourront pas se relancer ; il frappe des jeunes éleveurs qui ne savent pas s’ils seront assurés à l’avenir.
Le fonds d’indemnisation que nous proposons a certes un montant non négligeable (300 M€), mais il est absolument fondamental. J’aimerais que nous le votions collectivement.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Il est savoureux que vous citiez l’Efsa alors que cette agence s’est dite favorable à l’utilisation de l’acétamipride jusqu’en 2033.
Il faut évidemment soutenir les agriculteurs. Nous avons eu récemment un cas de dermatose dans ma région ; une cellule psychologique a accompagné les éleveurs lors de l’abattage, expérience très dure. Le groupement de défense sanitaire (GDS), les autres éleveurs et les élus leur ont apporté un soutien moral – ne faisons pas croire que les agriculteurs sont toujours laissés tout seuls.
Je vous ai tous écoutés attentivement, mais il y a une chose que je n’arrive pas à comprendre : comment avez-vous évalué le montant de 300 M€ ? C’est tout de même une somme ! Je note que l’un de vos amendements est gagé sur le TODE-AG…
Autre question : comment articulez-vous votre dispositif avec le fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) ?
Vous déplorez un manque d’anticipation, madame la rapporteure pour avis ; mais vous, comment faites-vous donc pour anticiper toutes ces crises, qu’elles soient liées à des évolutions climatiques ou à des moucherons et autres insectes ? Comment proposez-vous d’anticiper ces événements scientifiquement ?
M. Hervé de Lépinau (RN). Créer ce fonds d’indemnisation, ce serait anticiper un constat d’échec. D’ailleurs, quand l’exportation de viande française a été interdite, c’est parce que le ministère de l’agriculture n’avait pas anticipé la vaccination : on manquait de doses.
Privilégions la constitution d’un stock suffisant de vaccins et vaccinons le cheptel : voilà une bonne politique d’anticipation. À partir du moment où l’ensemble du cheptel sera vacciné, vous n’aurez plus besoin de ce fonds d’indemnisation. Les abattages traumatiques que nous avons connus ces derniers mois ne se reproduiront pas l’année prochaine.
M. Inaki Echaniz (SOC). Le protocole de l’abattage total est excessivement vertical. Mon territoire a subi des épidémies virulentes de tuberculose et de grippe aviaire, mais grâce à la mobilisation des éleveurs, il a été à l’initiative du premier protocole alternatif à l’abattage total. Ce protocole repose sur des tests plus précis, avec un abattage partiel et sélectif, et sur une évaluation globale des possibilités. Il en ressort que l’abattage systématique n’est pas la solution. Avant de parler d’indemnisation, il serait bon que notre commission et le ministère se saisissent du sujet et revoient le protocole de l’abattage total, qui n’a pas changé depuis vingt ans et s’avère inefficace. La ministre a indiqué qu’un groupe de travail s’y consacrait, mais nous n’en connaissons toujours pas les résultats. Il faut avancer, en s’inspirant notamment des expériences du Pays basque et du Béarn.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Monsieur Echaniz a raison d’élargir le sujet.
Monsieur Fugit, l’exposé sommaire de l’amendement détaille l’usage qui sera fait des 300 M€ du fonds d’indemnisation. Celui-ci ne concernera pas uniquement la dermatose, mais aussi la tuberculose bovine et la fièvre catarrhale ovine (FCO). La vaccination est un levier fondamental. Malheureusement, les épidémies s’accélèrent année après année et les variants se multiplient. Il est par exemple compliqué de vacciner contre la FCO, car cela demande de s’adapter à tous les variants qui apparaissent un peu partout. Un fonds d’indemnisation est donc absolument fondamental, ne serait-ce que pour les éleveurs qui ont déjà subi des crises : que leur direz-vous ? Qu’on vaccinera leurs prochains troupeaux ?
La commission rejette l’amendement II-CE60.
Elle adopte les amendements II-CE75, II-CE95 et II-CE98.
Amendement II-CE72 de Mme Murielle Lepvraud
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous nous opposons à la baisse de près de 50 % des budgets destinés à la gestion des crises et des aléas de la production agricole. Du fait des restrictions, pas un seul bovin n’a pu être présenté aux Journées limousines de ce week-end. Les producteurs frappés par la suspension des exportations sont dans la plus grande incertitude, sachant que 85 % des élevages de broutards limousins partent en Italie, en Espagne ou en Grèce. Dans un tel contexte, on pourrait attendre un soutien de l’État plutôt qu’une réduction de moitié des crédits consacrés à la gestion des crises et des aléas agricoles : c’est à n’y rien comprendre à l’heure où les crises se multiplient.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Il est fondamental d’abonder les fonds destinés à la recherche sur les crises et les aléas agricoles, car les épidémies s’accélèrent sous l’effet du changement climatique et du recul de la biodiversité. Nous devons avoir une réflexion stratégique sur l’évolution des politiques qui nous incombent, qui transposent le plus souvent la réglementation communautaire. L’Union européenne nous impose des protocoles parfois violents, comme l’abattage total systématique, que nous devons remettre en question. En effet, les épisodes actuels ébranlent profondément certaines filières économiques. Des races pourraient se retrouver en danger, malgré le travail réalisé par les éleveurs pour sélectionner les animaux. Ce fonds me semble donc indispensable : je vous appelle à voter cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CS148 de Mme Manon Meunier (LFI-NFP)
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Le fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) est l’un des fonds qui subissent les coupes les plus importantes, puisque le projet de loi de finances prévoit de réduire son budget de moitié.
Pour rappel, il recouvre le FMSE et l’assurance récolte. J’ignore ce qu’il en est dans vos territoires, mais en Haute-Vienne, les agriculteurs constatent que depuis la réforme Fesneau, l’assurance récolte ne fonctionne plus du tout. Pourtant, les aléas climatiques s’accélèrent ; les prairies sont jaunies dès le mois de juin. L’assurance récolte repose désormais sur des systèmes privés qui soumettent aux éleveurs des offres trop chères et inadaptées. Les assureurs rechignent à leur proposer des forfaits plus appropriés, parce qu’ils n’y trouvent pas d’intérêt économique. Le système est complètement dysfonctionnel ; le nombre d’agriculteurs assurés diminue tandis que les aléas climatiques augmentent. Le Gouvernement s’est délesté de l’accompagnement des agriculteurs sur des acteurs privés – et rassurez-vous, ceux-ci y trouvent leur compte dans certaines filières rentables. De fait, des éleveurs se retrouvent sans couverture. Et l’on voudrait réduire encore ce système d’assurance dans le budget de l’État, pour s’en remettre davantage à des acteurs privés réticents à prendre en charge les éleveurs ? Ce serait courir un grand risque et laisser les agriculteurs seuls face aux aléas du changement climatique. C’est pourquoi je vous invite à voter le rétablissement du budget du FNGRA.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE63 de Mme Murielle Lepvraud, amendements identiques II-CE62 de M. Charles Fournier, II-CE96 de M. David Taupiac et II-CE99 de M. Julien Brugerolles (discussion commune)
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Il convient d’augmenter les crédits alloués à la recherche sur les épidémies, pour trouver les moyens de nous y adapter et identifier des outils de prévention.
M. Charles Fournier (EcoS). En santé animale comme en santé humaine, l’enjeu est d’éviter de tomber malade. Pour cela, nous avons besoin d’une recherche qui anticipe les risques en santé animale et plus largement en santé globale, en lien avec la santé humaine – le rapport que j’ai produit avec notre collègue Philippe Bolo sur la grippe aviaire le rappelait. Nous proposons donc d’augmenter les crédits alloués à la recherche, afin qu’elle puisse tirer les enseignements des crises passées et anticiper, voire éviter, les crises futures. Nous avons besoin d’éclairages scientifiques sur des sujets comme l’organisation des élevages, leur densité, etc.
M. David Taupiac (LIOT). Nous proposons d’abonder de 100 M€ les crédits de la recherche afin de mieux anticiper les crises sanitaires et agricoles, de tirer les enseignements des crises passées mais aussi de mener des expérimentations sur le plein air. Dans mon département, des volailles sont actuellement confinées en raison d’un foyer voisin. Nous devons approfondir nos connaissances sur les enjeux du confinement des volailles et des canards dans les situations de grippe aviaire, entre autres.
Cet effort budgétaire devrait nous permettre de faire des économies en matière d’indemnisation des éleveurs.
M. Julien Brugerolles (GDR). Comme nos collègues, nous voulons abonder les fonds de la recherche de 100 M€ afin d’anticiper l’émergence de nouvelles maladies et de crises sanitaires agricoles. Dermatose nodulaire contagieuse, fièvre catarrhale ovine, maladie hémorragique épizootique, influenza aviaire, tuberculose bovine, salmonellose, peste porcine africaine sont autant de maladies qui ont déclenché des crises sanitaires violentes dans les élevages français ou qui pourraient les toucher dans les années à venir. Il est fondamental que la recherche travaille sur l’ensemble de ces pathologies.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je soutiens évidemment ces amendements en faveur de la recherche. J’ajouterai que celle-ci doit s’intéresser aux variants – j’en parlais plus tôt pour la FCO. Il faut apprendre à s’adapter à des pathogènes qui changent très rapidement et trouver en permanence de nouveaux vaccins.
Par ailleurs, je le répète, nous devons réfléchir à la réindustrialisation de la production des vaccins afin d’acquérir une véritable souveraineté en la matière. Songez que nous avons dû importer des vaccins contre la fièvre catarrhale ovine de sérotype 8 depuis l’Espagne et des vaccins contre la dermatose nodulaire contagieuse depuis l’Afrique du Sud. Nous ne pouvons pas nous permettre une telle dépendance – d’autant que quand nous sommes en concurrence avec d’autres pays pour nous approvisionner, nous ne sommes pas forcément prioritaires.
Enfin, il est fondamental que la recherche s’intéresse à la génétique – je vous renvoie à l’ouvrage de Lucile Leclair, Pandémies, une production industrielle. Les élevages standardisés induisent une perte de diversité génétique qui affaiblit considérablement la barrière contre les maladies.
La commission adopte l’amendement II-CE63.
En conséquence, les amendements II-CE62, II-CE96 et II-CE99 tombent.
Amendement II-CE141 de Mme Manon Meunier
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je vous propose de créer un fonds de 25 M€ en faveur de la préservation des races anciennes, levier fondamental d’adaptation au changement et aux aléas climatiques. Les races anciennes se caractérisent par une diversité génétique importante ; souvent locales, elles sont adaptées aux conditions, notamment climatiques, propres à un territoire. Elles présentent aussi un intérêt sanitaire. A contrario, la filière industrielle avicole par exemple, dans laquelle quelques firmes ont standardisé la production, y compris à l’échelle européenne, a une résistance génétique quasi nulle face aux pathogènes.
La diversité génétique a considérablement reculé. On la trouve encore dans les races anciennes, mais les rares éleveurs qui contribuent à les préserver, souvent en plein air, sont très peu soutenus. Ils subissent une double injustice, puisqu’ils sont soumis à des normes de biosécurité imposées par le modèle agro-industriel qui ne correspondent pas à leur situation. Par exemple, si un sas de désinfection peut avoir une logique entre deux bâtiments, il n’en a pas entre deux parcelles… Nous devons soutenir les éleveurs ancrés dans les territoires, qui préservent des races adaptées aux conditions locales et riches d’une diversité génétique indispensable pour se prémunir contre les crises de demain.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Aux races que vous citez dans l’exposé sommaire de votre amendement, je me permettrai d’ajouter la villarde de l’Isère. (Sourires.)
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE87 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). La campagne de vaccination contre la grippe aviaire a d’abord été prise en charge à 70 % par l’État, mais ne l’est plus qu’à 40 % depuis le 1er octobre 2025. La révision du règlement délégué européen sur la vaccination, attendue avant la fin de l’année 2025, devrait permettre de mieux cibler la surveillance des animaux vaccinés et ainsi de réduire le coût des campagnes. La charge supportée par l’État devrait diminuer d’environ 18 M€. Il ne faudrait pas qu’en conséquence, la participation de l’État soit mathématiquement ramenée à 27 %. La prise en charge doit être maintenue à 40 % malgré la révision du règlement, conformément aux engagements pris par le Gouvernement en début d’année.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. La hausse des crédits destinés aux actions sanitaires – quasiment la seule hausse de la mission qui nous occupe – s’explique par le contrôle vaccinal de l’influenza aviaire, qui n’avait pas été anticipé les années précédentes. Ainsi, le budget ne prévoyait pas les conséquences économiques du contrôle vaccinal obligatoire pour les services de l’État. En dehors des zones réglementées, ce contrôle repose sur certains éleveurs. Nous devons revaloriser ce budget et accompagner les éleveurs concernés.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE88 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). Un nouveau foyer de grippe aviaire s’est déclaré, il y a quelques jours, dans le Lot-et-Garonne. Lors de la campagne 2023‑2024, un dispositif d’indemnisation avait été créé pour les élevages situés dans la zone de protection. Il a disparu depuis. Seuls les foyers sont désormais indemnisés ; les élevages situés dans le périmètre de protection ne le sont plus, alors qu’ils subissent une perte de production. Nous souhaitons restaurer le dispositif de la précédente campagne, pour un montant de 260 000 euros.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je suis favorable à votre amendement sur le fond mais je vous demanderai de le retirer, car nous avons déjà inclus ce volet dans le fonds que nous venons de voter, doté de 300 M€.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). J’en profite pour réitérer ma question, madame la rapporteure pour avis : comment avez-vous évalué ces 300 M€ ? Vous nous demandez de voter des budgets considérables, la moindre des choses est d’expliquer comment ils ont été calculés.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Comme je vous l’ai dit, la réponse figure dans l’exposé sommaire de l’amendement II-CE60. Pour procéder au calcul, nous avons pris en considération les éleveurs touchés par les épisodes de FCO, de DNC et de grippe aviaire des années passées, en incluant : les pertes directes – mortalité quels que soient l’âge, l’espèce et la maladie – fondées sur les barèmes « Prédation » récemment fixés, qui tiennent compte de la réalité économique et de la diversité des élevages ; les pertes indirectes – baisse de lactation ou de productivité, avortements, baisse de fertilité, coût d’éventuels prêts de trésorerie, pertes de marge brute dues aux restrictions à la montée en estive… ; les pertes en aval – ateliers de transformation à la ferme ; les frais vétérinaires – soins aux animaux, tests de fertilité. Tout cela aboutit à 300 M€. Une fois encore, je vous invite à lire l’exposé sommaire de l’amendement, qui a été travaillé avec des éleveurs de la Confédération paysanne. Je vois que les députés du Rassemblement national réagissent : avez-vous un problème avec la Confédération paysanne ?
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Vous me renvoyez à l’exposé sommaire comme si je ne savais pas lire, c’est un peu désobligeant, madame la rapporteure pour avis. Il est tout aussi désobligeant que vous vous référiez à l’Efsa, comme vous l’avez fait tout à l’heure, alors que vous critiquez par ailleurs cet organisme.
Une fois encore, je souhaite savoir comment vous avez abouti à ce montant de 300 M€ et quelles en sont les grandes masses. Avec le même exposé sommaire, vous auriez pu évaluer le fonds à 280 M€ ou 320 M€ ! Des données précises sont-elles disponibles quelque part ? Nous devons de la clarté à nos concitoyens.
M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Je ne comprends pas pourquoi nos collègues macronistes perdent leurs nerfs. La rapporteure pour avis a répondu à votre question, monsieur Fugit. Elle a indiqué combien de bêtes étaient concernées et avec quel barème. Vous auriez peut-être souhaité que l’on recopie dans l’exposé sommaire les montants des barèmes d’indemnisation arrêtés par les autorités publiques, mais ne faites pas semblant de ne pas avoir compris que cet amendement était extrêmement sérieux et qu’il était calculé sur la base des pertes réelles, directes et indirectes des éleveurs. Si vous voulez ergoter sur le niveau d’indemnisation dû à nos éleveurs, vous vous trompez de chemin. Les éleveurs qui subissent des épidémies supportent un préjudice économique mais aussi moral, car il est extrêmement éprouvant de devoir faire abattre son troupeau. Ils méritent mieux que vos chicaneries et vos insinuations.
M. Pascal Lecamp (Dem). Il s’agit d’un débat budgétaire, dont l’objectif est un avis budgétaire. Or, lorsqu’une mission est dotée, comme celle dont nous débattons, d’un budget de 3 ou 4 Md€ et que chaque amendement représente entre 2 % et 10 % de ce budget, c’est qu’on va dans le mur. Il me semblerait plus intelligent de considérer le projet de loi de finances tel qu’il nous est proposé, d’identifier les ajustements possibles et de cibler les priorités. Il faut remettre l’église au milieu du village, sous peine de nous orienter vers un budget complètement irréaliste.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE108 de M. Robert Le Bourgeois
M. Robert Le Bourgeois (RN). L’amendement a une double portée. Son objectif est d’abord de faire des économies en diminuant les crédits de la sous-action Structuration des filières biologiques, redondante dans le programme 149 avec la sous-action Mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) et aides à l’agriculture biologique. Cette dernière est déjà dotée de 85 M€ en crédits de paiement. En outre, et c’est heureux, le ministère de l’agriculture a annoncé en juillet dernier que les 257 M€ de crédits européens non consommés seraient prioritairement alloués à l’agriculture biologique.
Notre volonté est une fois encore de rationaliser les politiques menées et de rassembler au sein des ministères concernés les différents dispositifs qui soutiennent chacune d’entre elles.
Ensuite, cet amendement vise à financer avec une part des économies réalisées la hausse des crédits de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), qui manque cruellement de financements, comme nous l’avons dit la semaine dernière pendant nos débats sur la ressource halieutique. Je suis élu d’un département littoral où les éoliennes en mer fleurissent. Nos pêcheurs demandent que la recherche sur le sujet soit soutenue, ce que recommande aussi le rapport de nos collègues écologistes et Ensemble pour la République adopté la semaine dernière.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis défavorable, bien évidemment. Les mesures agroenvironnementales et climatiques sont fondamentales.
Elles contribuent particulièrement à la préservation de l’élevage extensif, notamment bovin et tel qu’il existe en Limousin. Il y a là-bas, par exemple, des éleveurs qui travaillent sur des prairies humides – des zones difficiles à utiliser et d’ailleurs réservées à l’élevage extensif, puisqu’il est impossible d’y cultiver quoi que ce soit d’autre. Les Maec viennent compenser la difficulté à exploiter de tels environnements et valorisent le fait de les préserver, puisqu’ils apportent des externalités positives en termes de biodiversité et de filtration de l’eau. En réalité, lorsque vous supprimez les Maec, vous accompagnez le recul de ce type d’élevage – qui tient en partie grâce à la valorisation financière des services rendus pour l’agroécologie et le maintien des paysages – et, in fine, le recul de tout l’élevage en France.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE70 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Cet amendement vise à mettre en place une aide à la restauration collective, pour l’encourager à utiliser des produits bios, durables et produits par les agriculteurs du territoire.
Cet amendement est triplement vertueux. D’une part, son application permettrait d’augmenter l’offre bio en restauration collective et la rendrait accessible à une majorité de la population, ce qui n’est pas le cas pour l’instant. Or, de nombreuses études scientifiques démontrent les bienfaits de l’alimentation bio sur la santé.
D’autre part, cet amendement permettrait de soutenir les filières d’agriculture biologique locales en leur donnant un débouché stable, alors que les surfaces bios françaises ont diminué de 2 % en 2024.
Enfin, la part de produits biologiques en restauration collective publique, de seulement 13,1 % en 2022, reste bien en deçà de l’objectif de 20 % fixé par la loi Egalim. Je vous invite donc à voter cet amendement pour la santé, l’équité sociale et l’avenir économique d’une filière essentielle.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable sur cet amendement, que nous avions voté l’année dernière.
Si nous voulons que la restauration collective de demain soit au service des agriculteurs locaux, il faut adapter nos cuisines, former nos cuisiniers et avoir des financements importants pour orienter la commande publique vers l’agriculture locale. C’est ce que déclarent tous les acteurs qui mettent les agriculteurs en relation avec les cantines. Nos produits alimentaires sont largement standardisés, contrairement aux produits cultivés localement en agriculture biologique : il faut donc du temps, du personnel et des matériaux adaptés. Or, l’amendement II-CE70 va dans ce sens. Il permettrait, en outre, de servir de la nourriture française dans les cantines.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Je soutiens cet amendement. Comme la rapporteure pour avis, je suis député du Limousin, une terre d’élevage. Aujourd’hui, un quart des éleveurs vivent sous le seuil de pauvreté. En lieu et place du soutien dont ils ont besoin, ces derniers ont vu augmenter la concurrence. L’accord de libre-échange UE-Mercosur permet en effet l’importation en France de tonnes de viande que nous produisons déjà, et dans de meilleures conditions.
Nous devons donc protéger les éleveurs en les assurant, par exemple, que les marchés publics prendront en priorité leur production plutôt qu’une production étrangère. Les Français qui font leurs courses choisissent en majorité d’acheter de la viande française, contrairement au secteur de la restauration, et notamment de la restauration collective, qui achète surtout de la viande importée. Nos propres marchés publics font donc entrer de la viande étrangère dans nos assiettes.
Je voterai cet amendement qui favorise l’alimentation locale ; mais il faudra bientôt aller plus loin et carrément interdire la viande importée dans les marchés publics afin de manger français. C’est le sens de la proposition de loi que j’ai déposée. Une étude du Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) montre que, si les cantines servaient de la nourriture française, le marché s’élèverait à 3 Md€.
Mme Mélanie Thomin (SOC). Les membres du groupe Socialistes n’ont pas pris la parole depuis un certain nombre d’amendements, car ils voient les dépenses s’envoler au fur et à mesure de leur adoption : un amendement à 300 M€, l’autre à 100 M€, le dernier à 50 M€…
Le groupe Socialistes n’est évidemment pas opposé au soutien de la restauration collective et nous nous sommes d’ailleurs fortement engagés sur l’aide à l’agriculture biologique ou le soutien aux labels. Pour autant, si l’adoption de nombreux amendements pour soutenir l’agriculture est une très bonne chose, leur cohérence, ainsi que la cohérence du budget global pour l’agriculture – une de nos préoccupations majeures – posent question. Elle se posera à nouveau très concrètement lors de l’examen en séance.
M. Pascal Lecamp (Dem). Je suis tout à fait d’accord avec ce qui vient d’être dit. Il faut identifier des priorités.
À propos de l’amendement II-CE70, j’ai été élu maire d’une commune de trois mille habitants comptant 150 élèves en 2022. En moins d’un an, nous avions atteint les objectifs de 20 % d’alimentation biologique et de 50 % de produits locaux en restauration collective. La grande majorité des maires, quelle que soit leur étiquette politique, travaillent d’ailleurs dans ce sens pour les écoles primaires, qui relèvent des compétences des municipalités. Ils n’ont pas eu besoin pour cela de 50 M€ ou de formation spécifique : si on a envie de le faire, on le fait, on forme et on fait des aménagements.
En outre, cet amendement enlève encore 50 M€ au TODE, qui a été tellement prélevé qu’il n’existe même plus. Les crédits deviennent donc totalement incohérents et ne pourront pas être votés.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Après décompte, je vous informe que nous avons prévu, avec les amendements jusqu’ici adoptés, des redéploiements de crédits qui dépasseraient de 380 M€ les crédits initialement disponibles pour le TODE. Toutefois, nous savons bien que ces « gages » sont proposés pour des raisons de procédure et, lorsque nous déposons nos amendements, chacun de nous espère que le Gouvernement trouvera d’autres moyens de financer les hausses de crédits proposés.
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Nous demandons en effet au Gouvernement de « lever le gage », mais notre rôle à nous, en tant que législateur, est de pointer les besoins de l’agriculture. C’est ensuite que le projet de loi passera en commission des finances.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Effectivement, la commission des affaires économiques est saisie pour avis sur les crédits de cette mission : elle doit pouvoir mener de tels débats et proposer ces évolutions de crédits.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je rappelle qu’alors même que l’agriculture et la souveraineté alimentaires sont des priorités, le budget du ministère de l’agriculture a perdu 1,4 Md€ en deux ans. Il faut que le Gouvernement réfléchisse aux manières de trouver de nouvelles recettes plutôt que d’aller chercher l’argent sur ces budgets cruciaux.
J’approuve aussi ce que dit madame Lepvraud sur notre rôle de législateur. Nous ne pouvons pas nous interdire de pointer les besoins signalés dans nos territoires sous prétexte que le Gouvernement nous a offert sa version du projet de loi de finances et que nous devons nous y conformer.
Il faut donc pointer les besoins là où ils sont, aller chercher l’argent là où il est, et inciter le Gouvernement à lever le gage pour des enjeux aussi fondamentaux que la transition écologique de l’agriculture ou les fonds d’indemnisation pour les éleveurs ayant subi des pertes à cause des crises sanitaires.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CE35 de M. Boris Tavernier et II-CE39 de M. Charles Fournier (discussion commune)
M. Boris Tavernier (EcoS). En France, la précarité alimentaire s’installe et touche des catégories de la population de plus en plus nombreuses ; parallèlement, le monde agricole rencontre d’importantes difficultés. Les injonctions à mieux manger et mieux produire se font de plus en plus fréquentes. La reconnaissance d’un droit à l’alimentation et, à terme, la création d’une sécurité sociale de l’alimentation (SSA) sont des réponses.
Ces dernières années, partout en France, en ville comme à la campagne, des initiatives inspirées de la sécurité sociale de l’alimentation émergent sous la forme de caisses locales de l’alimentation. Pour accompagner ces expérimentations et leur changement d’échelle, le présent amendement vise à les soutenir financièrement en créant un nouveau programme doté de 20 M€ et dédié à leur développement.
Cet amendement s’articule à la proposition de loi visant à expérimenter la sécurité sociale de l’alimentation de notre collègue Charles Fournier, que notre commission a adoptée en février dernier.
M. Charles Fournier (EcoS). L’amendement II-CE39 est de repli.
Quand on travaille nos amendements, on ne connaît ni les amendements, ni les financements des amendements des autres. Et quand on vient les défendre en commission, on s’engage sur des mesures. On peut très bien considérer que les uns ou les autres sont sérieux, pas sérieux, responsables ou irresponsables, mais chacun a le droit, dans une commission pour avis, de penser que la mesure qu’il défend est particulièrement importante.
Pour nous, c’est le cas avec la SSA, sur laquelle il faut avancer avec des moyens dédiés. C’est un travail engagé, prolongé par une proposition de loi adoptée en commission.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je remercie les camarades écologistes de mettre le sujet de la sécurité sociale de l’alimentation sur la table. La souveraineté alimentaire, c’est aussi l’accès à l’alimentation de nos concitoyens, alors que trop de personnes n’arrivent toujours pas à se nourrir correctement et à faire des repas complets.
La création d’une sécurité sociale de l’alimentation permettrait de refonder notre système et de garantir à la fois un meilleur accès à l’alimentation et des rémunérations correctes pour les agriculteurs. Oui, cela ressemble à une révolution, mais la création de la sécurité sociale pour la santé, qui fonctionne, en était une aussi. Il est donc temps de mener des expérimentations sérieuses et budgétées sur la sécurité sociale de l’alimentation.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CE23 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Cet amendement vise la création d’un fonds pour le financement, et, le cas échéant, la systématisation des contrats de transition agroécologiques, sur le modèle du contrat territorial d’exploitation. Alors que l’urgence écologique s’intensifie, nous devons en effet accélérer la transformation de notre modèle agricole.
Ces contrats de transition permettraient d’accompagner durablement les agriculteurs avec un soutien pluriannuel, un cahier des charges très concret et des engagements clairs – conversion au 100 % bio, réduction des émissions de gaz à effets de serre, transition des élevages hors-sol vers le plein air.
Dans mon département, les surfaces en agriculture biologique ne couvrent par exemple que 42 000 hectares, soit un peu plus de 10 % de la surface agricole totale, et ont même reculé de 1 % sur un an. Nous sommes donc bien loin des objectifs nationaux de transition écologique.
Nous n’avons plus le temps d’attendre pour mener cette transition. Ce fonds fournirait enfin des moyens concrets pour accompagner les agriculteurs vers un modèle plus durable et plus résilient.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. Ce fonds pourrait contribuer à l’accompagnement d’installations en agriculture et d’installations durables – c’est-à-dire des installations qui pourront résister aux conséquences du changement climatique et relever les défis de la transition agroécologique.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE24 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Cet amendement vise la création d’un nouveau fonds d’aide à l’installation et à la transmission en élevage, domaine le plus durement frappé par la crise agricole. La France a ainsi perdu 63 500 exploitations spécialisées en élevage ces dix dernières années, soit les deux tiers de la diminution totale des exploitations.
Il s’agit d’abonder et de transformer les aides versées à l’installation pour les candidats qui choisissent des formes d’élevages correspondant à l’adoption ou au maintien de systèmes d’élevage pâturant en prairie, de pratiques agroécologiques, de pratiques d’amélioration du bien-être animal, du cahier des charges de labels transparents pour les consommateurs.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable. L’élevage est en effet particulièrement touché en matière d’installation et de transmission. Si l’élevage porcin rencontre moins d’obstacles, les éleveurs s’installant en élevage bovin sont mal accompagnés par les banques, ce qui rend ce fonds de soutien d’autant plus pertinent.
Selon Interbev, l’accompagnement d’élevages bovins aurait d’ailleurs un impact négatif sur la notation des banques, ce qui expliquerait leur refus d’accompagner les éleveurs. Il faut nous poser collectivement ces questions dans la mesure où l’élevage bovin français est majoritairement familial (notamment pour la filière allaitante), externe, herbager et extensif et qu’il apporte des externalités positives en termes de préservation de la biodiversité et des paysages.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE67 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Nous proposons par cet amendement d’augmenter de 60 M€ le budget de l’aide complémentaire au revenu des jeunes agriculteurs (ACJA). Renforcer le soutien à l’installation agricole est en effet urgent, dans la mesure où le nombre d’exploitations agricoles a été divisé par quatre en cinquante ans.
En Bretagne, le coût de l’installation ne cesse d’augmenter : de 250 000 euros en 2021, nous sommes passés à 283 000 euros en 2024. Le renouvellement des générations devrait être une priorité pour assurer la continuité de l’activité agricole française.
Or, la France n’a consacré que la part minimale légale du budget à allouer à l’installation des jeunes agriculteurs dans son plan stratégique national (PSN), avec seulement 1,5 % du premier pilier de la politique agricole commune (PAC) dédié à l’ACJA. Dans ces conditions, l’arrêté du 23 septembre 2025 qui abaisse, pour 2025, l’ACJA à 3 100 euros (contre 4 469 euros pour 2024) est d’autant plus inacceptable. Cet amendement vise à garantir une ACJA au moins au niveau de 2024.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Le renouvellement générationnel en agriculture est un enjeu majeur. D’ici à 2030, la moitié des agriculteurs et agricultrices vont partir à la retraite. Nous ne pouvons pas nous permettre de « couper » sur les aides à l’installation. Pouvoir redonner du souffle à l’ACJA est fondamental. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE146 de Mme Manon Meunier
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Nous proposons, avec cet amendement, de rétablir les crédits de l’aide à la relance des exploitations agricoles (Area), autour du même objectif que l’amendement précédent : le maintien du nombre d’agriculteurs et agricultrices en France. Nous ne pouvons pas nous permettre de couper sur ces sujets-là.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE22 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Cet amendement s’appuie sur le travail de nos collègues Mathilde Hignet et Manon Meunier, qui révèle que les stéréotypes de genre affectent encore les femmes qui souhaitent s’installer en agriculture.
Selon une étude de la Mutualité sociale agricole (MSA), 66 % d’entre elles considèrent qu’il reste plus difficile pour une femme que pour un homme de travailler dans le secteur agricole. En outre, les femmes représentent un quart des chefs d’exploitation et 36 % des salariés agricoles. Cependant, elles rencontrent encore des difficultés spécifiques en matière de statut, de retraite, d’accès aux responsabilités et à la formation. Par exemple, selon les données de la chambre d’agriculture, en Bretagne, même si les femmes sont de plus en plus nombreuses à s’installer, elles le font plus tardivement que leurs collègues masculins. Elles constituent pourtant un vecteur important du renouvellement de la démographie agricole. Les statistiques montrent également qu’elles s’orientent davantage vers le bio et l’agriculture extensive : elles sont donc l’avenir de l’agriculture !
Nous proposons donc la création du nouveau programme Fonds pour l’égalité de genre dans le secteur agricole.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. C’est une question importante, qui nous est régulièrement remontée.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable, évidemment.
Un petit clin d’œil : je suis persuadée que la ministre de l’agriculture Annie Genevard soutiendra ce fonds pour l’égalité de genre. Nous avions pourtant eu des débats houleux sur la loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole pendant lesquels ma collègue Mathilde Hignet et moi-même avions mis en avant ces problématiques majeures. Les femmes sont en effet constamment confrontées à de puissants stéréotypes : les banques les incitent à ne surtout pas s’installer seules, les matériels agricoles ne seraient pas adaptés aux femmes, etc. Historiquement, leur travail a également été sous-évalué, avec des salaires, donc des retraites, inférieures à celles des hommes. Leur statut mériterait d’autres travaux de recherche. Or, maintenant que Mme Genevard est ministre de l’agriculture, elle semble avoir changé d’avis sur la question : elle s’est emparée du sujet en proposant des consultations d’agricultrices afin d’y travailler. Je me réjouis donc qu’elle ait enfin réalisé son importance.
Ce signal positif de la ministre de l’agriculture nous permet de voter collectivement en faveur de ce fonds pour l’égalité de genre.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CE145 de Mme Manon Meunier et II-CE80 de M. Jean-Luc Fugit (discussion commune)
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Cet amendement vise simplement à rétablir les crédits de l’accompagnement à l’installation-transmission en agriculture (Aita). Nous ne pouvons pas couper sur les enjeux d’installation-transmission.
Toutefois, ce rétablissement de crédits ne va pas bien loin. Nous devrions fixer ensemble un objectif ambitieux sur ces périodes décisives dans la vie des agriculteurs.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Cet amendement, qui participe du même esprit, vise à augmenter le budget de l’Aita pour le faire passer de 13 à 20 M€. Ces fonds supplémentaires permettront de financer France Services agriculture, un outil créé pour faciliter les transmissions et les transitions et mis en expérimentation dans vingt départements. Cet amendement donne donc les moyens de mieux transmettre les exploitations, faciliter l’entrée en agriculture et garantir notre souveraineté alimentaire.
Mon amendement est moins-disant, et, au vu toutes nos dépenses, je vous incite à le préférer à celui de la rapporteure pour avis afin de ne pas aggraver la situation du TODE, auquel il ne touche pas.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Si j’étais un peu taquine, je demanderais à monsieur Fugit de me donner son calcul pour parvenir exactement à 7 M€ pour l’Aita. Pourquoi 7 M€ ? Je ne doute pas que vous me transmettrez ces chiffres. C’est un avis favorable, quoique je vous invite à choisir mon amendement plutôt que l’amendement de repli. Nous ne pouvons pas transiger sur l’Aita et ses enjeux : il faut rétablir ses crédits et nous pouvons faire mieux pour seulement quelques millions d’euros de plus.
Successivement, la commission rejette l’amendement II-CE145 et adopte l’amendement II-CE80.
Amendement II-CE144 de Mme Manon Meunier
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Cet amendement vise une fois de plus à rétablir des crédits, ceux liés aux stages à l’installation. L’installation est un moment fondamental dans les trajectoires agricoles et nous devons l’accompagner : les stages ne peuvent pas être une variable d’ajustement. Il faut qu’un porteur de projet, qui cherche sa filière agricole et son modèle, puisse faire des stages et des expérimentations. Sur le terrain, on voit que les agriculteurs et agricultrices qui tiennent le plus longtemps sont ceux qui ont pu faire des stages, surtout lorsqu’ils ne sont pas issus d’un milieu agricole. Or, il y a un vrai enjeu à installer des non-issus du milieu agricole afin d’assurer le renouvellement générationnel.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE25 et II-CE77 de Mme Murielle Lepvraud II
M. René Pilato (LFI-NFP). L’amendement II-CE25 vise à installer un réseau d’expérimentation afin de soutenir la création et la diffusion de projets de restructuration et de diversification au sein d’exploitations agricoles volontaires.
Pourquoi ? Nous l’avons dit maintes fois : la moitié des agriculteurs vont partir à la retraite ; or, nous avons un problème de transmission de plus en plus criant.
Une étude de la Fondation pour la nature et l’homme (FNH), de Terre de liens et de la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab) a permis l’évaluation de douze fermes diversifiées et restructurées. Cette analyse confirme les multiples bénéfices économiques et environnementaux de cette modalité de transmission.
L’amendement II-CE77 vise à créer un fonds pour soutenir la diversification agricole. Ce serait un investissement. En effet, cette modalité de transmission permet de créer trois à quatre fois plus d’ETP dans les fermes après leur restructuration. Elle renforce également la propension à l’agriculture biologique et l’autonomie pour l’alimentation des animaux ; elle contribue au développement de circuits courts et de proximité et se positionne parfois sur des productions déficitaires, ce qui accroît la souveraineté alimentaire. Enfin, elle améliore les conditions de travail des éleveurs et favorise l’installation de porteurs de projet qui ne sont pas issus du monde agricole.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable aux deux amendements parce qu’ils accompagnent la restructuration-diversification que nous appelons de nos vœux pour assurer la durabilité et la résilience de l’agriculture française.
On dit souvent qu’il ne faut pas « mettre tous ses œufs dans le même panier ». À cet égard, la polyculture-élevage est très intéressante, puisqu’elle permet de diversifier en jouant sur la complémentarité entre les productions végétales et les productions animales. Les agriculteurs qui défendent la diversification le disent : ils sont plus résilients et plus autonomes en cas de crise d’une filière.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CE68 de Mme Murielle Lepvraud
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Il s’agit de renforcer le service de remplacement pour permettre aux agriculteurs et agricultrices de prendre de véritables congés ou se former sans négliger leurs responsabilités.
Dans de nombreuses exploitations, ils ne prennent pas suffisamment de repos, ce qui pèse sur leur santé, leur bien-être, leur vie familiale ainsi que sur leur capacité à transmettre leur activité.
Le service de remplacement, qui est déployé dans de nombreuses communes, offre une prise en charge partielle des congés jusqu’à dix-sept jours par an. Nous proposons d’étendre cette durée à vingt-huit jours, à taux de financement constant.
Cette mesure permet de garantir un véritable droit au repos aux agriculteurs et agricultrices et de soutenir l’emploi local. Les agents de remplacement, souvent précaires, bénéficieraient d’une stabilité accrue favorisant le renouvellement des générations agricoles.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Avis favorable.
J’en profite pour évoquer le congé de maternité. J’ai recueilli le témoignage d’une maraîchère corrézienne. Le service de remplacement étant en sous-effectif et sous-financé, elle continuait à huit mois de grossesse à ramasser ses carottes. Je vous laisse imaginer la difficulté de l’exercice.
Le service de remplacement est indispensable pour accompagner les femmes, qui ne doivent pas avoir à choisir entre leur projet de famille et leur projet professionnel. Il l’est tout autant pour permettre aux agriculteurs de prendre une pause, en particulier dans les activités telles que l’élevage qui requièrent une présence permanente.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE140 de Mme Manon Meunier
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. L’amendement vise à rétablir à hauteur de 0,5 M€ les crédits liés à l’aide à la cessation d’activité.
Cette aide, qui est ouverte aux agriculteurs confrontés à des difficultés économiques, permet de financer une reconversion, de la formation, etc. Elle est d’autant plus précieuse que les agriculteurs ne bénéficient pas de l’assurance chômage.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE84 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). Cet amendement d’appel vise à ouvrir une enveloppe de 200 M€ pour financer de nouveaux prêts garantis par l’État (PGE) à destination des viticulteurs.
Les prêts de consolidation, garantis par BPIFrance et octroyés depuis février, sont inopérants dans les zones où les entreprises agricoles sont en grande difficulté, comme le Sud-Ouest.
Après cinq années de mauvaises récoltes, la situation de la viticulture est catastrophique : 40 % des viticulteurs de mon territoire sont au bord d’une procédure pour défaillance d’entreprise et un seul dossier dans mon département a pu bénéficier d’un prêt de consolidation.
De l’aveu même des banques qui proposent les prêts de consolidation, deux critères sont trop restrictifs : les fonds propres et le ratio excédent brut d’exploitation sur chiffre d’affaires. En les assouplissant, près de 70 % des prêts aujourd’hui refusés pourraient être reconsidérés.
La situation est grave. J’espère que nous pourrons, avec le soutien de la ministre de l’agriculture, modifier les critères actuels ou créer de nouveaux PGE afin d’accompagner nos exploitations agricoles dans une nécessaire restructuration.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je vous demande le retrait de l’amendement, car les garanties apportées par l’État relèvent du programme 114 de la mission Engagements financiers de l’État.
M. David Taupiac (LIOT). Je maintiens l’amendement, car je souhaite envoyer un signal fort au Gouvernement.
La commission adopte l’amendement.
M. Thierry Benoit (HOR). À l’issue de nos travaux, je voulais interroger la rapporteure pour avis : avons-nous une idée du solde résultant des amendements que nous avons adoptés ? De quel montant le budget de l’agriculture a-t-il été revalorisé ?
Je pose cette question, car nos travaux en commission préfigurent ce qui se passera dans l’hémicycle. Si toutes les commissions nous imitent, nos concitoyens comprendront mieux pourquoi la machine se grippera inévitablement.
Lors d’un débat budgétaire, chacun défend ses convictions – et c’est bien normal – mais, compte tenu de la précarité financière et politique dans laquelle nous sommes, peut-être faut-il chercher des convergences pour parvenir à un budget acceptable par le plus grand nombre.
Mme Marie-Noëlle Battistel, présidente. Il serait difficile de donner immédiatement une évaluation précise et complète pour toutes les lignes budgétaires. Toutefois, je peux déjà vous annoncer que le solde des crédits relatifs au TODE, si l’on prend en compte l’ensemble des amendements adoptés qui prévoient de réduire ses crédits pour en abonder d’autres, est désormais négatif de 490 M€…
Je rappelle que nous sommes saisis pour avis. Chaque parlementaire défend ici ses convictions, mais tout se jouera à la commission des finances et surtout en séance.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Monsieur Benoit, vous déplorez le fait que l’on dépense de l’argent que l’on n’a pas, mais votre groupe a refusé, lors de l’examen des recettes en commission des finances, de récupérer de l’argent là où il y en a !
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Selon nos calculs, le budget du ministère de l’agriculture serait revalorisé de 1 Md€ environ, ce dont nous pourrions nous féliciter collectivement, considérant que l’agriculture est un enjeu fondamental pour notre pays.
Cette hausse n’est pas démesurée, puisque le budget 2024 était supérieur de 1,4 Md€ à ce qui nous est proposé. Nous pourrions faire plus, chers collègues, et il y a de l’argent à aller chercher.
Amendement II-CE92 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). L’amendement concerne encore la viticulture, qui traverse une période très compliquée. Dans mon département et en Occitanie, les rendements ont été divisés par deux. Si on veut sauver le minimum de viticulteurs, il faut créer un fonds d’urgence doté de 100 M€ pour compenser les dommages liés à la grêle dans certains endroits et à la sécheresse dans d’autres, sans compter le coup de chaleur de cet été.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Demande de retrait. Les 100 M€ que vous demandez pourront être prélevés sur les 200 M€ prévus pour les PGE par votre amendement II-CE84.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE93 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). La Coopération agricole nous alerte sur le fait que les difficultés de la viticulture vont amener à une restructuration des caves coopératives. L’année dernière, avait été demandée la création d’un fonds d’accompagnement à cette restructuration sur trois ans. Nous avions finalement obtenu 10 M€, qui ne sont à ce jour toujours pas débloqués.
L’amendement sollicite 30 M€ cette année et 90 M€ sur trois ans pour aider les coopératives à s’adapter aux évolutions de la production et du marché.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Demande de retrait pour les mêmes raisons que précédemment.
La commission adopte l’amendement.
Mme Manon Meunier, rapporteure pour avis. Je remercie nos collègues qui ont permis d’améliorer le budget de l’agriculture. Nous pouvons nous en féliciter, car de l’agriculture dépendent non seulement notre alimentation, mais aussi notre souveraineté alimentaire, notre place dans la compétition internationale dans un contexte tendu, notre santé et notre environnement. Je suis favorable à l’adoption des crédits.
La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, modifiés.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du Mercredi 22 octobre 2025 à 15 heures 15
Présents. – M. Laurent Alexandre, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Karim Benbrahim, M. Thierry Benoit, M. Julien Brugerolles, M. Romain Daubié, M. Arthur Delaporte, M. Inaki Echaniz, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, M. Julien Gabarron, Mme Géraldine Grangier, Mme Nicole Le Peih, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Hervé de Lépinau, Mme Murielle Lepvraud, M. Laurent Lhardit, Mme Sandra Marsaud, M. Patrice Martin, M. Damien Maudet, Mme Manon Meunier, Mme Louise Morel, M. René Pilato, M. Dominique Potier, Mme Valérie Rossi, M. David Taupiac, M. Matthias Tavel, M. Boris Tavernier, Mme Mélanie Thomin, M. Lionel Tivoli, Mme Aurélie Trouvé, M. Frédéric Weber
Excusés. – M. Christophe Barthès, Mme Hélène Laporte, M. Aurélien Lopez-Liguori, M. Max Mathiasin, M. Philippe Naillet, M. Jean-Hugues Ratenon, M. Joseph Rivière, M. Stéphane Travert