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ÉTUDE d’impact

 

 

 

Projet de loi

pour la liberté de choisir son avenir professionnel

 

 

NOR : MTRX1808061L/Bleue-1

 

 

 

 

 

 

27 avril 2018

Table des matières

 

Introduction générale

Tableau synoptique des consultations

Tableau synoptique des mesures d’application

Titre 1er - Vers une nouvelle société de compétences

Chapitre 1er - Renforcer et accompagner la liberté des individus dans le choix de leur formation

Articles 1er et 2 - Rénovation du compte personnel de formation et adaptation des dispositions du compte personnel d’activité et du compte engagement citoyen

Article 3 - Conseil en évolution professionnelle

Chapitre 2 - Libérer et sécuriser les investissements  pour les compétences des actifs

Article 4 - Définition de l’action de formation

Article 5 - Qualité des actions de formation

Article 6 - Plan de développement des compétences

Chapitre 3 - Transformer l’alternance

Articles 7 à 9 - Conditions contractuelles de travail par apprentissage

Article 10 - Orientation

Article 11 - Nouveau régime juridique des centres de formation d’apprentis

Article 12 - Aide unique aux employeurs d’apprentis

Article 13 - Autres formes d’alternance et de professionnalisation

Chapitre 4 – Refonder le système de construction et de régulation des diplômes et titres professionnels

Article 14 - Rénovation de la certification professionnelle

Chapitre 5 – Simplifier la gouvernance et rénover le financement

Article 15 - Rôle des acteurs et organisation institutionnelle en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des demandeurs d’emploi

Article 16 : Gouvernance et France compétences

Articles 17 et 18 - Obligations des employeurs relatives au financement de la formation professionnelle et à l’apprentissage et contributions spécifiques pour certaines catégories d’employeurs

Articles 19 et 20 - Opérateurs de compétences

Article 21 - Contrôle

Article 22 - Dispositions outre-mer

Article 24 - Dispositions diverses

Titre 2 - Une indemnisation du chômage plus universelle et plus juste

Chapitre 1er – Créer de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles

Articles 26 et 27 - Création de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles et ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires

Article 28 - Indemnisation des travailleurs indépendants en cessation d’activité

Article 29 - Lutte contre la précarité et la permittence

Chapitre 2 – Un nouveau cadre d’organisation de l’indemnisation chômage

Articles 30 et 31 - Financement du régime d’assurance chômage et modalités de calcul de la contribution globale

Articles 32 et 33 - Gouvernance du régime d’assurance chômage et période transitoire

Chapitre 3 – Un accompagnement plus personnalisé des demandeurs d’emploi et une meilleure effectivité des obligations liées à la recherche d’emploi

Article 34 - Expérimentation territoriale visant à l’amélioration de l’accompagnement des demandeurs d’emploi

Article 35  -  Dispositions relatives aux obligations de recherche d’emploi

Article 36 - Dispositions relatives au transfert du contrôle de la recherche d’emploi et aux sanctions

Chapitre 4 – Dispositions outre-mer

Article 37 - Dispositions outre-mer

Chapitre 5 – Dispositions diverses

Article 38 - Dispositions diverses

Titre 3 - Dispositions relatives à l’emploi

Chapitre 1er – Favoriser l’entreprise inclusive

Articles 40 à 42 - Dispositions relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les employeurs publics et privés

Article 43 - Renforcement du cadre d’intervention des entreprises adaptées

Article 44 - Accessibilité des services de communication au public en ligne des organismes du secteur public

Article 45 - Amélioration de la disponibilité de documents adaptés

Article 46 - Inclure dans la représentation des salariés les bénéficiaires de contrats uniques d’insertion

Chapitre 2 – Moderniser la gouvernance et les informations relatives à l’emploi

Article 47 - Création du comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi

Article 48 - Suppression de la mention relative à la participation des missions locales aux maisons de l’emploi

Article 49 - Gouvernance de Pôle emploi

Chapitre 3 - Mesures relatives au détachement des travailleurs et à la lutte contre le travail illégal

Articles 50 et 51 - Adaptation des exigences administratives pour certaines situations de détachement

Articles 52 à 55 - Renforcement des outils de contrôle et de l’effectivité des sanctions administratives

Article 56 - Extension des cas de décision préfectorale de cessation d’activité pour des faits de travail illégal

Article 57 - Création d’un nouveau cas d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’activité en cas d’activité habituelle, stable et continue en France

Article 58 - Création d’une amende administrative pour absence de déclaration d’un chantier forestier ou sylvicole

Article 59 - Diffusion automatique de certaines condamnations de travail dissimulé

Article 60 - Renforcement des pouvoirs d’enquête  et droit de communication de l’inspection du travail en matière de travail illégal

Chapitre 4 – Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes et lutte contre les violences sexuelles et sexistes au travail

Article 61 - Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes

Article 62 - Obligation pour l’employeur d’afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel  et des coordonnées des services compétents.

Chapitre 5 - Mesures relatives au parcours professionnel dans la fonction publique

Articles 63 à 65 - Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique

Chapitre 6 – Dispositions d’application

Article 66 – Habilitation : mise en cohérence, correction et adaptation outre-mer


Introduction générale

Les transformations majeures que connaissent les entreprises du pays et des secteurs entiers de l’économie (révolutions numérique et robotique, émergence d’une économie plus sobre en ressources utilisées) ont des effets importants sur les organisations de travail, les métiers et donc les compétences attendues de la part des actifs. Elles requièrent de refonder une grande partie de notre modèle de protection sociale des actifs autour d’un tryptique conjuguant l’innovation et la performance économique, la construction de nouvelles libertés et le souci constant de l’inclusion sociale.

Pour ne pas subir ces transformations, le Gouvernement a engagé une transformation profonde du système de formation professionnelle initiale et continue, ainsi qu’une réforme substantielle de l’assurance chômage, tout en reprenant certaines orientations issues des accords interprofessionnels nationaux de février 2018.

L’objectif est double :

Structuré autour de trois titres, le présent projet de loi entend poursuivre la dynamique de transformation du marché du travail, en organisant une rénovation en profondeur du système de formation professionnelle et d’apprentissage, en révisant les droits, les contributions et les devoirs en matière d’assurance chômage, en ajustant la gouvernance de la politique de l’emploi et en adaptant et simplifiant la politique d’insertion professionnelle des travailleurs handicapés.


Tableau synoptique des consultations

Article

Objet de l’article

Consultations obligatoires

Consultations facultatives

1er

Rénovation du compte personnel de formation

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d'administration de Pôle emploi

Conseil national d’évaluation des normes

Commission nationale de la négociation collective

 

2

Adaptation des dispositions du compte personnel d’activité et du compte engagement citoyen

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d'administration de Pôle emploi

Conseil national d’évaluation des normes

 

3

Conseil en évolution professionnelle

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d'administration de Pôle emploi

Conseil national d’évaluation des normes

 

4

Définition de l’action de formation

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

 

5

Qualité des actions de formation

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil d'administration de  Pôle emploi

 

6

Plan de développement des compétences

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Commission nationale de la négociation collective

 

7

Conditions de signature du contrat d’apprentissage

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Commission nationale de la négociation collective

Conseil national d’évaluation des normes

 

8

Simplification des conditions d’exécution du contrat

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Commission nationale de la négociation collective

Conseil national d’évaluation des normes

 

9

Rupture des contrats d’apprentissage

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Commission nationale de la négociation collective

Conseil national d’évaluation des normes

 

10

Orientation

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

 

11

Nouveau régime juridique des centres de formation des apprentis

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

 

12

Aide unique aux employeurs d’apprentis

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

 

13

Autres formes d’alternance et de professionnalisation

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

 

14

Rénovation de la certification professionnelle

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

 

15

Rôle des acteurs et organisation institutionnelle en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des demandeurs d’emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

 

16

Gouvernance et France compétences

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil supérieur de l'éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national d’évaluation des normes

Commission nationale de la négociation collective

 

17

Obligations des employeurs relatives au financement de la formation professionnelle et à l’apprentissage

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil supérieur de l’éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil d’administration de l’ACOSS

Conseil d’administration de la CCMSA

 

18

Contributions spécifiques pour certaines catégories d’employeurs

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil supérieur de l’éducation

Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche

Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agro-alimentaire et vétérinaire

Conseil national de l'enseignement agricole

Conseil d’administration de l’ACOSS

Conseil d’administration de la CCMSA

 

19

Opérateurs de compétences

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Commission nationale de la négociation collective

 

21

Contrôle

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

 

22

Dispositions outre-mer

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Départements et collectivités concernées

 

26

Création de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de Pôle emploi

27

Ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de Pôle emploi

28

Indemnisation des travailleurs indépendants en cessation d’activité

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de Pôle emploi

29

Lutte contre la précarité et la permittence

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil d’administration de l’ACOSS

Conseil d’administration de la CCMSA

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

30

Financement du régime d’assurance chômage

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes 

Conseil d’administration de Pôle emploi

31

Modalités de calcul de la contribution globale versée par l’Unédic à Pôle emploi pour les années 2019 et 2020

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles 

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

32

Gouvernance du régime d’assurance chômage

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

33

Période transitoire

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Commission nationale de la négociation collective

 

34

Expérimentation territoriale visant à l’amélioration de l’accompagnement des demandeurs d’emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

35

Dispositions relatives aux obligations de recherche d’emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

36

Dispositions relatives au transfert du contrôle de la recherche d’emploi et aux sanctions

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Comité technique ministériel placé auprès des ministres du travail et de l’emploi

Conseil d’administration de Pôle emploi

 

37

Dispositions outre-mer

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles,

Conseil départemental de Mayotte

 

38

Dispositions diverses

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

 

39

Entrée en vigueur

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil d’administration de Pôle emploi

Conseil départemental de Mayotte

 

40

Dispositions relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les employeurs

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national consultatif des personnes handicapées

41

Transmission de la déclaration annuelle relative à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés via la déclaration sociale nominative

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil national consultatif des personnes handicapées

42

Dispositions relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les employeurs

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles 

Conseil national d’évaluation des normes

Conseil national consultatif des personnes handicapées

Conseil commun de la fonction publique

43

Renforcement du cadre d’intervention des entreprises adaptées

Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles

Conseil national consultatif des personnes handicapées

44

Accessibilité des services de communication au public en ligne des organismes du secteur public

Conseil national d’évaluation des normes

 

46

Inclure dans la représentation des salariés les bénéficiaires de contrats uniques d’insertion

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Commission nationale de la négociation collective

 

47

Création du comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles 

 

48

Suppression de la mention relative à la participation des missions locales aux maisons de l’emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles 

 

49

Gouvernance de Pôle emploi

Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

Conseil d’administration de de Pôle emploi

 

52 à 55

Renforcement des outils de contrôle et de l’effectivité des sanctions administratives.

Conseil national d’évaluation des normes

 

61

Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes

Commission nationale de la négociation collective

Conseil Supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

 

62

Obligation pour l’employeur d’afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel  et des coordonnées des services compétents.

Commission nationale de la négociation collective

Conseil Supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

 

63

Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique de l'État

Conseil commun de la fonction publique

 

64

Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique territoriale

Conseil commun de la fonction publique

Conseil national d’évaluation des normes

 

65

Prise en compte l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique hospitalière

Conseil commun de la fonction publique

Conseil national d’évaluation des normes

 

 


Tableau synoptique des mesures d’application

Article

Objet de l’article

Textes d’application

Administration compétente

1er

Rénovation du compte personnel de formation

- Décrets en Conseil d’État

- Décrets

Ministère du travail

2

Adaptation des dispositions du compte personnel d’activité et du compte engagement citoyen

- Décrets en Conseil d’État

- Décrets

Ministère du travail

3

Conseil en évolution professionnelle

- Décrets

- Arrêté

Ministère du travail

4

Définition de l’action de formation

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

5

Qualité des actions de formation

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

6

Plan de développement des compétences

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

7

Conditions de signature du contrat d’apprentissage

Décrets en Conseil d’État

Ministère du travail

8

Simplification des conditions d’exécution du contrat

Décrets en Conseil d’État

Ministère du travail

9

Rupture des contrats d’apprentissage

Décrets

Ministère du travail

10

Orientation

Décrets

Ministère de l’éducation nationale

11

Nouveau régime juridique des centres de formation des apprentis

- Décrets en Conseil d’État

- Arrêté

Ministère du travail

12

Aide unique aux employeurs d’apprentis

Décret

Ministère du travail

13

Autres formes d’alternance et de professionnalisation

Décret

Ministère du travail

14

Rénovation de la certification professionnelle

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

15

Rôle des acteurs et organisation institutionnelle en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des demandeurs d’emploi

Décrets

Ministère du travail

16

Gouvernance et France compétences

- Décrets en Conseil d’État

- Décret

Ministère du travail

17

Obligations des employeurs relatives au financement de la formation professionnelle et à l’apprentissage

- Décret en Conseil d’État

- Décrets

Ministère du travail

18

Contributions spécifiques pour certaines catégories d’employeurs

- Décret en Conseil d’État

- Décrets

Ministère du travail

19

Opérateurs de compétences

Décrets

Ministère du travail

20

Habilitation : collecte URSSAF

Ordonnance

Ministère du travail

21

Contrôle

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

22

Dispositions outre-mer

Décret

Ministère du travail

Ministère des Outre-mer

26

Création de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles

Décret en Conseil d’État qui précisera les conditions d’application du II de l’article L. 5422-1 du code du travail

Ministère du travail

27

Ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

28

Indemnisation des travailleurs indépendants en cessation d’activité

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

32

Gouvernance du régime d’assurance chômage

Décret en Conseil d’État qui déterminera les conditions d’application de l’article L. 5422-20-1 du code du travail

Ministère du travail

33

Période transitoire

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

34

Expérimentation territoriale visant à l’amélioration de l’accompagnement des demandeurs d’emploi

Décret en Conseil d’État qui définira les modalités de l’expérimentation et de son évaluation

Ministère du travail

35

Dispositions relatives aux obligations de recherche d’emploi

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

36

Dispositions relatives au transfert du contrôle de la recherche d’emploi et aux sanctions

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

37

Dispositions outre-mer

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

Ministère des Outre-mer

38

Dispositions diverses

Décret en Conseil d’État

Ministère du travail

40 à 42

Obligation d’emploi des travailleurs handicapés

- Décrets en Conseil d’État

- Décrets

Ministère du travail

Ministère des solidarités et de la santé

Ministère de l’action et des comptes publics

44

Accessibilité des services de communication au public en ligne des organismes du secteur public

Décret en Conseil d’État pour mettre en œuvre le IV de l’article 47 et fixer les critères de la charge disproportionnée.

 

Secrétariat d’État chargé des personnes handicapées

Secrétariat d’État chargé du numérique

45

Amélioration de la disponibilité de documents adaptés

Décret en Conseil d’État

 

47

Création du comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi

Décret d’application fixant les règles de composition et de fonctionnement

Ministère du travail

50 et 51

Adaptation des exigences administratives pour certaines situations de détachement

 

- Arrêté du ministre chargé du travail qui fixe la liste des entreprises entrant dans le champ de l’article L. 1262-7 (nouveau)

- Décret en Conseil d’État qui prévoit le cas échéant les aménagements de l’obligation prévue à l’article L. 1263-7

Ministère du travail

59

Diffusion automatique de certaines condamnations pour travail illégal

Décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL concernant les modalités de diffusion sur le site internet du ministère du travail des condamnations

Ministère du travail

60

Renforcement des pouvoirs d’enquête de l’inspection du travail

Décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL, concernant les informations relatives à des personnes non identifiées

Ministère du travail

61

Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes

Décret

Ministère du travail

62

Obligation pour l’employeur d’afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel  et des coordonnées des services compétents.

Décret simple pour préciser les services compétents visés

Ministère du travail

63

Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique de l'État

- Décret en Conseil d’État afin de modifier le titre V du décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions

- Décret en Conseil d’État afin de modifier les décrets portant statuts particuliers des corps qui possèdent un grade à accès fonctionnel

Ministère de l’action et des comptes publics

64

Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique territoriale

- Décret en Conseil d’État afin de modifier le titre III du décret n°86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration

- Décret en Conseil d’État afin de modifier les décrets portant statuts particuliers des corps qui possèdent un grade à accès fonctionnel

Ministère de l’action et des comptes publics

65

Prise en compte l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique hospitalière

- Décret en Conseil d’État afin de modifier le titre IV du décret 88-976 du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, à l'intégration et à certaines modalités de mise à disposition

- Décret en Conseil d’État afin de modifier les décrets portant statuts particuliers des corps qui possèdent un grade à accès fonctionnel

Ministère de l’action et des comptes publics

66

Habilitation : mise en cohérence,  correction et adaptation outre-mer

Ordonnance

 

 


Titre 1er - Vers une nouvelle société de compétences

Chapitre 1er - Renforcer et accompagner la liberté des individus dans le choix de leur formation

Articles 1er et 2 - Rénovation du compte personnel de formation et adaptation des dispositions du compte personnel d’activité et du compte engagement citoyen

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le compte personnel de formation (CPF) s’inscrit dans une logique d’autonomie de l’individu et de sécurisation de son parcours professionnel, par une plus grande portabilité des droits, notamment dans le cadre de droits acquis à titre individuel.

Le compte personnel de formation vise à favoriser l’accès à la formation qualifiante et remédie aux insuffisances du droit individuel à la formation (DIF), crée par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, dont la portabilité a été institué par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui n’avait pas rencontré le succès attendu en raison d’une articulation faible avec les autres dispositifs de formation professionnelle continue, d’un encadrement collectif insuffisant pour rendre les droits réellement accessibles aux personnes et d’un manque de financements dédiés.

Par l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013, les partenaires sociaux ont donné corps au compte personnel de formation, qui a été traduit dans la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale puis est entré en vigueur le 1er janvier 2015. La visée qualifiante du compte personnel de formation a nécessité un ciblage des formations accessibles, qui s’est matérialisé par des listes de formations éligibles établies par les partenaires sociaux et encadrées par le décret n° 2014-1119 du 2 octobre 2014 relatif aux listes de formations éligibles au titre du compte personnel de formation.

Le compte personnel de formation est ouvert à toute personne en emploi ou à la recherche d’emploi. C’est un droit, converti en nombre d’heures portées au compte du salarié chaque année, alimenté dans des conditions fixées à l’article L. 6323-11 du code du travail et mobilisables jusqu’à la retraite : 24 heures par année de travail à temps complet jusqu’à un maximum de 120 heures, puis de 12 heures par année de travail à temps complet jusqu’à 150 heures. Par ailleurs, les anciens droits DIF accumulés jusqu’à la fin 2014 peuvent être convertis en heures au sein du compte personnel de formation depuis le 1er janvier 2015 et pourront être mobilisés jusqu’au 1er janvier 2021

Au-delà de ces heures acquises, l’article L. 6323-4 du code du travail prévoit la possibilité, à la demande du titulaire du compte, d’abondements en heures complémentaires pour assurer la formation et la possibilité d’un financement notamment par l’État, les régions, Pôle emploi, l’Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées – Agefiph, et le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP).

Il constitue fondamentalement une modalité d’accès individuel à la formation comme le précise l’article L. 6111-1 du code du travail : « Afin de favoriser son accès à la formation professionnelle tout au long de la vie, chaque personne dispose dès son entrée sur le marché du travail et jusqu’à la retraite, indépendamment de son statut, d’un compte personnel de formation qui contribue à l’acquisition d’un premier niveau de qualification ou au développement de ses compétences et de ses qualifications en lui permettant, à son initiative, de bénéficier de formations ». Il ne relève pas du plan de formation (qui constitue une prérogative de l’employeur) et ne présente pas l’ambiguïté originelle dont souffrait le DIF, droit du salarié conditionné à l’accord de son employeur.

Quel que soit le statut de son titulaire, le compte personnel de formation est mobilisable pour suivre une formation, dès lors que cette dernière est éligible. Il en découle que seul le titulaire peut décider de mobiliser son compte personnel de formation. Cela signifie, d’une part, que l’accord du titulaire doit être recueilli avant la mobilisation des heures de compte personnel de formation et, d’autre part, que le refus d’utiliser les heures de compte personnel de formation ne constitue jamais une faute.

En outre, il est rendu véritablement universel par l’intégration dans le dispositif des agents publics (fonctionnaires et contractuels) et des agents des chambres consulaires depuis le 1er janvier 2017, et des travailleurs indépendants depuis le 1er janvier 2018.

L’usage des droits est étendu au-delà du champ initial de la formation qualifiante pour permettre aux usagers d’accéder à d’autres types de prestations utiles à la construction et à la sécurisation de leur parcours professionnel : bilan de compétences, accompagnement personnalisé à la création ou à la reprise d’entreprise, préparation du permis de conduire (ce dernier usage étant destiné à lever le frein à l’emploi que constitue la non-possession du permis pour un public significatif, notamment les jeunes).

Une modulation des droits est aussi introduite au bénéfice des publics ayant le plus besoin d’accéder à la formation : doublement du rythme d’acquisition des droits (48 h au lieu de 24 h et plafond porté à 400 h au lieu de 150 h) pour les salariés et agents publics non qualifiés.

Enfin, le portefeuille de droits mobilisables est enrichi à travers la création du compte d’engagement citoyen, qui permet d’acquérir des droits à formation par la réalisation d’activités d’intérêt général (bénévolat associatif, maître d’apprentissage, diverses activités de réserves citoyennes, service civique, etc.). Les droits acquis par ce biais peuvent soit compléter le financement d’une formation à vocation professionnelle, soit financer des formations destinées à professionnaliser l’exercice de l’activité citoyenne.

Lancé dans des délais particulièrement restreints, le compte personnel de formation a éprouvé, au cours du premier semestre 2015, des difficultés de démarrage, essentiellement dues à une méconnaissance initiale du dispositif par les salariés et au temps d’appropriation de la méthodologie de construction des listes ainsi que d’élaboration de celles-ci – afin d’offrir un périmètre de choix suffisamment large. Un système d’information du compte personnel de formation (SI CPF), développé par la Caisse des dépôts et consignations, a été mis en place pour tenir les comptes de droits des personnes et suivre la mobilisation du compte personnel de formation.

Au-delà de cette première phase, il a été constaté, à partir de juillet 2015, une montée en charge progressive du compte personnel de formation qui s’est fortement intensifiée en 2016 et 2017. Les années 2016 et 2017 ont également été marquées par un rééquilibrage de l’usage du compte personnel de formation au profit des salariés, alors qu’il avait été très majoritairement utilisé par les demandeurs d’emploi en 2015 suite à un abondement exceptionnel prévu dans la convention cadre 2015-2017 entre l’État et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels 2015-2017. Cette dotation a permis d’abonder le compte personnel de formation des demandeurs d’emploi dans la limite de 100 heures.

En 2017, 579 836 dossiers de formation ont été validés dont 277 936 dossiers salariés et 301 900 dossiers demandeurs d’emploi.

Au 1er février 2018, 5 368 534 comptes étaient ouverts contre 2 496 809 à fin 2015. Plus de 1 350 000 dossiers de formation ont été validés, depuis l’origine, au 18 février 2018, dont 60 % de dossiers demandeurs d’emploi (818 960 dossiers validés ou clos) et 40 % de dossiers salariés (535 962 dossiers validés ou clos). À titre de comparaison, le démarrage du DIF a été plus faible que le compte personnel de formation puisque 498 135 salariés ont mobilisé leur DIF entre 2005 et 2007.

S’agissant des formations utilisées dans le cadre du compte personnel de formation, le SI CPF permet d’extraire les 10 certifications les plus choisies par les salariés et demandeurs d’emploi depuis la mise en place du compte personnel de formation.

Source : SI CPF - TOP 10 des certifications mobilisées par les salariés et demandeurs d’emploi depuis la mise en place du CPF – données au 18 février 2018

Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales  de juillet[1] précise que les données sur les formations mobilisées dans le cadre du compte personnel de formation témoignent avant tout d’une forte concentration de la demande sur un nombre restreint de certifications. Ainsi, en 2016, 34 % des certifications éligibles aux demandeurs d’emploi et 29 % de celles accessibles aux salariés avaient été effectivement mobilisées.

Plus précisément, au regard des données du SI CPF, les certifications de langues étrangères sont les plus souvent choisies par les salariés (le TOEIC et le BULATS), suivies par les certifications liées à la bureautique (le TOSA et le PCIE) et l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience (VAE). Cette typologie d’usages se vérifie quel que soit le niveau de qualification.

Les formations de langue et de bureautique sont moins fréquemment mobilisées par les demandeurs d’emploi, particulièrement par ceux disposant d’un faible niveau de qualification. Les formations aux savoirs de base permettant d’acquérir le certificat professionnel CléA sont les plus fréquentes. Les titres liés à la création d’entreprise, les certificats d’aptitude à la conduite ainsi que certains titres professionnels (aide-soignant, infirmier) y sont également fréquents.

Aujourd’hui, il est possible de considérer que le compte personnel de formation est ancré dans le paysage comme l’un des principaux leviers permettant aux personnes d’accéder, à leur initiative, à une formation. L’Inspection générale des affaires sociales  dans son rapport de juillet 2017 sur le compte personnel de formation précité souligne, sur la base d’une enquête portant sur la notoriété du compte personnel de formation, que le dispositif est connu de des deux tiers des salariés du privé et de la moitié des demandeurs d’emploi. Sa notoriété est plus forte chez les plus âgés, les diplômés et les salariés des grandes entreprises, et plus faible pour les moins qualifiés et les moins internautes. Cette notoriété, toutefois, n’emporte pas compréhension : moins de la moitié des salariés a une idée précise de ce dont il s’agit et moins de 30 % en connaît les modalités (nombre d’heures sur le compte, formations disponibles, modes de financement etc.).

1.2.  Éléments de droit compare

Des expériences nationales de comptes individuels de formation se sont multipliées au niveau européen et international depuis le début des années 2000. Elles ont permis de faire apparaître deux grandes catégories de dispositifs :

S’agissant de la première catégorie, de très nombreuses expériences ont eu lieu, souvent au niveau local ou régional, dans différents États européens. Ainsi, le Royaume Uni, suite à une expérimentation dans le Kent, a mis en place un dispositif national (Individual Learning Account – ILA) à partir de septembre 2000 : toute personne âgée de plus de 19 ans qui décidait d’ouvrir un compte formation dans une banque en versant au moins £25 recevait une bourse du gouvernement de £150. Le bénéficiaire devait dépenser ce compte pour financer une formation auprès d’un prestataire enregistré. Le compte pouvait servir pour financer plusieurs formations mais expirait au bout d’un an s’il n’était pas utilisé. Le gouvernement espérait ouvrir un million de comptes en 2 ans, pour une dépense de £150 millions. En un an plus de 2 millions et demi de comptes étaient finalement ouverts. Le programme fut suspendu essentiellement à cause des nombreuses fraudes dues à une absence de réglementation. Des évaluations permirent de détecter les motifs de ces fraudes (notamment l’absence de contrôle réel des prestataires et de leur activité) et conclure qu’il ne fallait pas abandonner le concept des ILA mais améliorer leur fonctionnement.

Reposant sur des idées attrayantes, mais insuffisamment pensées et testées en amont, implémenté en une période de temps trop courte, l’expérience du dispositif ILA a été de courte durée. Elle est toutefois riche d’enseignements. L’ILA a montré que le public peut avoir une grande appétence pour la formation professionnelle tout au long de la vie. Son succès florissant en témoigne : une offre de formation individualisée qui repose sur l’autonomie et la responsabilisation des bénéficiaires peut être une stratégie gagnante dans le cadre d’une politique publique qui cherche à accroître les compétences des actifs. Toutefois, la question du cadre réglementaire est primordiale pour s’assurer de la qualité des formations dispensées, et pour se prémunir contre les abus et les fraudes.

En Belgique, c’est la région Flandres qui a bénéficié de ce type d’expérimentation. Le système italien a également privilégié une approche régionale, tout comme l’Autriche tandis que les Pays Bas ont procédé à la mise en place de plusieurs projets pilotes de dimension relativement réduite.

Les expériences de véritables comptes épargne formation sont finalement assez rares. À l’exception des dispositifs mis en place directement par les entreprises, seule la Suède et l’Autriche semblent avoir déjà expérimentés ce type de modèle. Aux États-Unis c’est une fondation privée, le CAEL (Council for Adult and Experimential Learning), qui développe des expériences de comptes individuels, appelé LiLA (Lifelong Learning Account). La Suède, après de longues années d’expérimentation, a finalement abandonné le projet, tandis que le modèle autrichien, inspiré d’une initiative régionale tyrolienne a été étendu au niveau national en 2005 : dans le cadre de ce dispositif, le gouvernement autrichien complète l’épargne d’un particulier avec 3 % à 8 % de sa somme totale par an. Les banques coopératives nationales offrent aux particuliers des prêts subventionnés par l’État qui leur permettent de financer leurs formations (continues).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Même si le compte personnel de formation est installé, des critiques récurrentes sont portées sur des modalités d’accès encore difficiles aux formations, un système de listes dont l’enchevêtrement n’apparait plus compréhensible, d’un plafond d’acquisition jugé trop bas, ainsi qu’une gouvernance éclatée donnant peu de lisibilité et de possibilité de régulation financière d’ensemble. Ces limites identifiées freinent le recours au dispositif.

2.1.1.      L’unité de compte actuelle, en heures

Issu du compromis initial des partenaires sociaux, ce système exerce sur l’offre un effet régulateur classique : les financeurs demeurent l’interface incontournable entre le titulaire du compte et l’organisme de formation, ce qui permet l’articulation avec leurs propres politiques d’achat et préserve au moins en théorie leur capacité à peser sur un marché de la formation encore peu challengé par ailleurs.

Toutefois, ce dispositif est :

En outre, la complexité et un manque de lisibilité persistent sur les possibilités réelles d’utilisation. Au-delà du nombre d’heures inscrites et consultables sur le compte personnel, il reste difficile pour les usagers de savoir à quoi cela leur donne droit. Selon les financeurs, une heure de compte personnel de formation peut avoir un taux de prise en charge allant de 10 à 85 € par heure, ce qui peut provoquer du découragement et du renoncement de la part d’usagers à s’engager dans un projet de formation. Des mécanismes d’abondement existent, mais sont méconnus et très opaques pour les usagers. Enfin, les démarches concrètes de mobilisation des heures restent excessivement complexes et quasiment impossibles sans l’intermédiation de l’employeur ou d’un conseil en évolution professionnelle, ce qui freine l’objectif pourtant recherché et assumé d’autonomisation des personnes dans la construction de leur parcours.

2.1.2.      Le contenu des objets éligibles au compte personnel de formation

La constitution de listes de certifications éligibles au compte personnel de formation, au niveau national, au niveau des branches et au niveau régional (notamment pour les demandeurs d’emploi) est trop complexe.

Les listes sont établies à trois niveaux :

Le système des listes éligibles ne met pas au centre du dispositif le projet professionnel de la personne. Sa vocation légitime est de flécher les financements du compte personnel de formation vers les besoins identifiés des branches et des territoires. Cependant, ce système est critiqué pour sa complexité et la pertinence des choix de formations inscrites sur ces listes.

L’organisation du marché de la formation ne permet pas non plus aux usagers de choisir réellement l’organisme de formation avec lequel ils vont se former, les financeurs ayant une influence forte sur l’élaboration des catalogues de formation.

a)      La gouvernance du compte personnel de formation

La gouvernance du compte personnel de formation est organisée selon deux dimensions de concertation : quadripartite (État, régions, partenaires sociaux) à travers le conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) et les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (CREFOP), et paritaire, via le comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF) et les comités paritaires interprofessionnels nationaux pour l’emploi et la formation (COPAREF).

Toutefois, elle reste largement institutionnelle: le quadripartisme (CNEFOP et CREFOP) est effectivement en place mais reste souvent formel, ce qui freine le rôle de « stabilisateur » et de référence que sa composition devrait lui conférer. La gestion paritaire (COPANEF et COPAREF, fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels - FPSPP) n’a pas toujours su mettre en place de stratégie de régulation globale et elle est d’autant moins légitime que le champ du compte personnel de formation s’est élargi aux indépendants et à la fonction publique.

b)     La soutenabilité financière du dispositif

Le financement du compte personnel de formation est assuré par deux leviers distincts :

Compte tenu des règles d’accumulation des heures dans le cadre de ce dispositif, le régime de croisière sera atteint en 2023 pour les salariés du secteur privé. À cette date, au regard du nombre d’heures accumulées par les actifs et sous une hypothèse réaliste de recours au CPF avec maintien des conditions actuelles de prise en charge, les demandes de formation engendreraient des dépenses qui ne pourraient être financées par les OPCA pour la partie CPF salariés, comme prévu actuellement par la loi, car ils dépassent largement les ressources que ces institutions peuvent consacrer au financement du CPF. Par conséquent, à moins de restreindre considérablement l’accès aux formations suivies dans le cadre du CPF, ces demandes de formation ne pourront être réalisées qu’à condition de réorienter vers le CPF les autres fonds de la formation professionnelle (plan formation, CIF, etc.).

A contrario, sans évolution, les financements CPF en faveur des personnes en recherche d’emploi resteraient assez limités. Le faible besoin de financement s’explique par le fait que les personnes en recherche d’emploi n’auront accumulé que peu d’heures CPF (30 heures en moyenne). Une proportion importante ont en effet des trajectoires d’emploi très fragmentées ou sont des jeunes qui ne disposent quasiment d’aucun crédit d’heures.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent article se donne pour objectif fondamental de créer une liberté de formation pour chaque actif, par un compte personnel de formation facile d’accès, financé, opérationnel et ouvert sur des formations de qualité.

La première étape de construction du compte personnel de formation demande à être approfondie, afin de renforcer l’autonomie et la liberté des actifs, sa place dans le système de formation professionnelle et de simplifier substantiellement les mécanismes d’accès à la formation et de gestion des comptes.

Dans ce souci d’accessibilité et de lisibilité, il est mis fin à l’unité de mesure en heures qui n’est pas satisfaisante, celle-ci prenant mal en compte les nouvelles formes d’actions de formation relativisant les notions de présence sur un lieu en un temps donné. Le système en heures est donc remplacé par un système en euros. Cette monétisation du compte personnel de formation (CPF) vise à simplifier la conception et l’usage du compte personnel par l’individu, à accroître son autonomie, à rendre plus équitable le dispositif de formation professionnelle et à améliorer sa viabilité à coûts constants.

Avant la création du CPF, le congé individuel de formation (CIF) a longtemps représenté le seul droit de formation à la main du salarié, faisant l’objet d’un financement propre. De la création du DIF à sa transformation progressive en compte personnel de formation, les partenaires sociaux et le législateur ont construit des dispositifs alliant droits individuels et personnels. L’un, le CIF, est passé d’une logique de promotion sociale à une logique de reconversion professionnelle. L’autre, le CPF, s’est construit dans une logique de sécurisation des parcours professionnels actant les évolutions du marché du travail et s’inscrivant dans une perspective de droit attaché à la personne plutôt qu’au statut. Par leur finalité, assurer l’exercice d’un véritable droit de liberté professionnelle sorti du lien de subordination juridique, les deux droits se rapprochent de plus en plus. Cependant, par sa construction même, le CIF peine à remplir de manière collective et générale une véritable fonction de reconversion professionnelle (39 000 CIF par an environ pour 19 millions de salariés).

Le CPF doit donc devenir l’unique droit personnel à la main des individus dans une logique d’appropriation directe, c’est-à-dire d’autonomie sans intermédiaire obligatoire. Ses possibilités de mobilisation doivent devenir simples et transparentes. À cette fin, le gouvernement s’est donné pour objectif de mettre à disposition de tous les salariés et demandeurs d’emploi une application numérique permettant de connaître en temps réel les droits individuels acquis sur le compte personnel de formation, les offres d’emploi disponibles, les formations préparant à l’acquisition des compétences requises par ces emplois et les taux d’insertion dans l’emploi à l’issue des formations proposées. L’application permettra également de connaître les dates des sessions de formation et de s’inscrire en formation, sans avoir à solliciter obligatoirement un intermédiaire et sans avoir à effectuer de démarches administratives et de déclencher, à terme, le paiement direct de l'organisme de formation par la caisse des dépôts et consignations.

L’encadrement de l’utilisation du CPF se fait aujourd’hui notamment à travers le système des listes de formation éligibles au compte. Pour autant, et bien que les listes de formation éligibles aient permis un investissement sans précédent des partenaires sociaux sur l’identification des certifications professionnelles, le système d’éligibilité au CPF par des listes restreint les possibilités d’accès à la formation et rajoute un niveau de complexité supplémentaire à un ensemble déjà peu lisible. Il est également peu transparent et crée de l’iniquité entre les bénéficiaires potentiels d’une même certification. Il doit donc être mis fin à cette condition d’utilisation du CPF.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Appelées à négocier par la Ministre du travail suite à la diffusion du document d’orientation relatif à la réforme de la formation professionnelle le 15 novembre 2017, les organisations représentatives de salariés et d’employeurs sont parvenues à la conclusion d’un accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance le 22 février 2018.

Les parties signataires de l’accord ont souligné que si l’usage du compte personnel de formation (CPF) connait, depuis sa création, une progression constante pour les salariés comme pour les demandeurs d’emploi, l’information des personnes doit encore être améliorée pour permettre à chacun de connaître et mobiliser ses droits. Aussi, l’accord propose de simplifier l’accès et la lisibilité du CPF en faisant du CPF le réceptacle unique de l’ensemble des droits liés à la formation, rattachés à l’individu et mobilisables à son initiative ou avec son accord et en facilitant ses modalités d’accès dans un cadre individuel ou co-construit avec l’employeur ou avec des tiers.

Parmi les propositions des organisations représentatives de salariés et d’employeurs relevées dans l’accord, il faut citer une augmentation du rythme d’alimentation et du plafond de droits (35 heures par an avec un plafond de 400 heures) , la fin du système de listes de formations éligibles au CPF, la création d’une nouvelle modalité de mobilisation du CPF en vue d’un projet de transition professionnelle ou encore la modification du montant de la contribution dédiée au financement du compte personnel de formation.

Ces mesures répondent pour partie aux objectifs formulés par la Ministre du travail dans le document d’orientation. En effet, l’accord fait l’impasse sur la détermination d’une nouvelle unité de mesure du CPF devant se substituer aux heures et ne répond pas à la volonté de désintermédiation dans la gestion du CPF nécessaire au développement d’un CPF pleinement autonome.

3.2.   Option retenue

3.2.1.      Un financement unique du compte personnel de formation et du congé individuel de formation dans un compte personnel de formation rénové.

La refonte du financement du compte personnel de formation (CPF) passe par une mutualisation des contributions des entreprises au financement du congé individuel de formation (CIF) et du CPF : un nouveau taux de contribution suivant la masse salariale sera déterminé et pourra évoluer dans le temps en fonction des besoins de financement.

Ainsi, le financement dédié au CPF (contribution CDD incluse) peut s’estimer, compte tenu de l’évolution de la masse salariale, à 2,1 milliards d’euros[4], par année, en 2019 et 2020, à 2,2 Md€ en 2021 et à 2,3 Md€ en 2022.

La contribution sera collectée par les opérateurs de compétences (qui remplacent les organismes paritaires collecteurs agréés) dans un premier temps, puis par l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) en 2021. À l’intérieur de cette contribution, l’affectation des moyens se fait de la façon suivante :

Enfin, il convient de noter que le projet de loi supprime la possibilité pour les entreprises occupant au moins 11 salariés d’une gestion internalisée du CPF par le biais de la conclusion d’un accord collectif triennal prévoyant qu’au moins 0,2 % du montant des rémunérations versées pendant chacune des années couvertes par l’accord est consacré au financement du CPF. Ce système était peu utilisé en pratique et a parfois été détourné par certaines entreprises pour ne pas s’acquitter de la contribution à la formation professionnelle continue (8 090 entreprises ont affirmé internaliser la gestion interne du CPF, mais seulement 40 entreprises étaient réellement actives). En outre, elle rend impossible la mobilisation par le salarié de son CPF de manière autonome qui est contraint de passer par son employeur.

3.2.2.      Un compte personnel de formation consolidé comme droit personnel garanti collectivement

a)      Des principes fondamentaux du compte personnel de formation conservés

Le compte personnel de formation (CPF) continue de s’inscrire dans le cadre plus large du compte personnel d’activité, outil au service de l’autonomie de l’individu et de la sécurisation de son parcours professionnel, avec le compte professionnel de prévention et le compte d’engagement citoyen.

Plusieurs principes essentiels du CPF sont conservés. Ainsi, les conditions d’ouverture – pour tout actif (salarié, demandeur d’emploi, travailleur indépendant…), âgé d’au moins 16 ans – et les conditions de fermeture – à la date du décès du titulaire - restent identiques. Le CPF demeure un outil d’accès individuel à la formation ce qui implique de recueillir l’accord de son titulaire avant sa mobilisation et que le refus de le mobiliser ne peut constituer une faute. En outre, les droits demeurent acquis en cas de changement de situation professionnelle ou de perte d’emploi de son titulaire.

b)     La monétisation du compte personnel de formation: une comptabilisation des droits en euros pour une plus grande lisibilité et une meilleure appropriation du droit

Si la plupart des principes communs du compte personnel de formation (CPF) édictés par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale sont conservés, le projet de loi acte d’un changement majeur dans le fonctionnement du CPF : le système d’acquisition et de mobilisation des droits en heures est remplacé par un système en euros dans une logique d’accessibilité et de lisibilité renforcée pour son titulaire.

Cette monétisation permet à chaque actif d’avoir une connaissance précise de la valeur du capital acquis et d’être mis en responsabilité s’agissant de l’achat de la prestation choisie. De plus, le montant du capital acquis ne varie pas d’un statut à un autre, d’une branche à une autre contrairement aux pratiques rencontrées avec le mécanisme en heures. La portabilité des droits, ou la lisibilité de celle-ci, est donc favorisée.

L’alimentation sera fixée par décret  à hauteur de 500 € par année de travail dans la limite d’un plafond de 5 000 € pour le salarié ayant effectué une durée de travail supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle du travail sur l’ensemble de l’année. Lorsque le salarié a effectué une durée de travail inférieure à la moitié de la durée légale ou conventionnelle du travail sur l’ensemble de l’année, l'alimentation est calculée à due proportion du temps de travail effectué.

Ainsi, tous les salariés qui travaillent à mi-temps ou plus bénéficieront des mêmes droits que les salariés à temps plein. Les femmes qui représentent 80 % des salariés à temps partiel seront donc les premières bénéficiaires. Cette mesure vise à renforcer l’accès des femmes à la formation professionnelle et à pallier les impacts d’un temps de travail à temps partiel très majoritairement subi.

Ce rythme d’acquisition des droits plus favorable vise à atténuer les inégalités rencontrées par les salariés à temps partiel dans leur accès à la formation professionnelle et à corriger la faiblesse de leur niveau de qualification. En effet, deux constats majeurs peuvent être faits :

Taux (en %) d'accès à la formation professionnelle certifiante par niveau de diplôme

 

 

 

 

 

Temps complet

Temps partiel

Ensemble

E- Supérieur à BAC+2

12,4

9,0

11,9

D- Bac+2

17,3

7,8

15,7

C- Bac ou équivalent

15,5

11,7

14,9

B- CAP, BEP ou équivalent

15,3

6,6

13,9

A- Sans diplôme ou BEPC

11,0

4,7

9,5

Ensemble

14,4

7,8

13,3

Source : AES 2016

Source : Insee, enquête Emploi 2011 ; calculs Dares

Le choix du seuil de 50 % du temps de travail s’est effectué en tenant compte du fait que les durées de travail inférieures à un mi-temps sont très courtes. En effet, 22 % des salariés à temps partiel ont une quotité inférieure à 50 % et travaillent en moyenne 12 heures par semaine. Par ailleurs, en moyenne, les salariés à temps partiel travaillent 40 % de moins que les salariés à temps complet. Ce seuil apparait dès lors comme permettant de cibler les salariés dont la durée de travail est significative.

Source : Insee, enquête Emploi 2011 ; calculs Dares

 

Pour les salariés non qualifiés visés à l’article L. 6323-11-1 du code du travail, l’alimentation sera fixée par décret à hauteur de 800 € par année de travail dans la limite d’un plafond de 8 000 €.

S’agissant des travailleurs indépendants et des travailleurs handicapés des établissements et services d'aide par le travail (ESAT), il est également acté la monétisation du CPF par une modification des articles L. 6323-27 et L. 6323-34 du code du travail.

Le projet de loi prévoit que les heures acquises au titre du CPF et du droit individuel à la formation (DIF) jusqu’en 2018 sont converties en euros selon des modalités définies par décret. 

Afin de garantir la pleine portabilité des droits entre les différents statuts professionnels, il convient de préciser que la transformation des heures en euros a vocation à s’appliquer également au CPF des agents publics et des agents consulaires. Une modification des dispositions réglementaires régissant leur CPF sera nécessaire.

Outre l’alimentation régulière par des droits acquis chaque année qui constitue le socle du CPF, ce dernier peut également faire l’objet d’abondements complémentaires notamment lorsque le coût de la formation est supérieur montant des droits inscrits sur le compte conformément aux dispositions de l’article L. 6323-4 du code du travail.

c)      Formations éligibles au compte personnel de formation: une simplification par la suppression du système de listes éligibles

Le projet de loi simplifie l’éligibilité des formations au compte personnel de formation (CPF) en supprimant le « système de listes ». Le nouvel article L. 6323-6 du code du travail prévoit que sont éligibles au CPF les formations suivantes :

d)     Une nouvelle gouvernance pour une meilleure régulation plus efficace et plus efficiente

Le rôle de France compétences sera essentiel dans l’accompagnement du mouvement de monétisation et de l’encadrement du coût des formations. Afin de prévenir des comportements abusifs d’organismes de formation qui seraient tentés d’accroître leurs prix du fait de leur connaissance de la capacité de financement des détenteurs de comptes personnels de formation, il est nécessaire de mettre en place un mécanisme de régulation du marché et d’observation des coûts. France compétences, instance de régulation, sera chargée d’observer de façon permanente la transparence des coûts. Le niveau des droits individuels ainsi que le montant affecté au financement du compte pourront évoluer le cas échéant afin de réguler le système.

3.2.3.      Un système de gestion simplifié

a)      La Caisse des dépôts et consignations, organisme gestionnaire du compte personnel de formation sur le plan financier et technique

La Caisse des dépôts et consignations est identifiée comme l’organisme gestionnaire du compte personnel de formation (CPF) sur le plan financier et technique pour l’ensemble des actifs hors fonctions publiques.

Elle reçoit et mutualise l’ensemble des fonds « CPF » collectés par les opérateurs de compétences (sauf pour la part CPF transition professionnelle) – à terme par le réseau des URSSAF - et est saisie en direct par l’actif souhaitant mobiliser son CPF. La Caisse des dépôts et consignations, qui était jusque-là simple gestionnaire du système d’information CPF, se voit donc attribuer un nouveau rôle.

La Caisse des dépôts et consignations a vocation à devenir un acteur central de la gestion du compte CPF autonome et co-construit par abondements (tenue et visibilité du compte, simulateur), de la mise en visibilité de l’offre de formation (actions et organismes de formation), de l’inscription aux sessions et du paiement direct à l’organisme de formation.

Les nouveaux articles L. 6333-1 à L. 6333-9 du code du travail encadrent ce nouveau rôle de la Caisse des dépôts et consignations. L’article L. 6333-1 du code du travail prévoit les ressources que la Caisse des dépôts et consignations est habilitée à recevoir ainsi que leurs finalités notamment le financement des droits acquis des dossiers CPF. L’article L. 6333-3 du code du travail prévoit également que la Caisse des dépôts et consignations conclut avec l’État une convention triennale d’objectifs et de performance qui définit la part des ressources mentionnées à l’article L 6333-1 du code du travail destinée à financer les frais de mise en œuvre de ses missions.

b)     La consécration d’un compte personnel de formation désintermédié pour l’ensemble des actifs, par le recours à une application numérique « compte personnel de formation »

Dans une logique de désintermédiation et de renforcement de l’autonomie et de la liberté des actifs, le projet de loi permet à l’ensemble des actifs - salariés, demandeurs d’emploi, travailleurs indépendants hors agents de la fonction publique - de saisir en direct la Caisse des dépôts et consignations, sans opérateur intermédiaire. Ces modalités sont déterminées par le nouvel article L. 6323-8 du code du travail.

Les actifs pourront choisir et payer eux-mêmes leur formation : l’application numérique CPF leur permettra de connaître en temps réel les droits individuels acquis au titre du compte personnel de formation (CPF), les formations disponibles, les taux d’insertion et de satisfaction de ces formations, de s’inscrire en formation et de payer la formation. L’organisme de formation sera directement payé par la Caisse des dépôts et consignations.

Lorsque le montant des droits acquis par le titulaire du compte sera insuffisant pour couvrir le coût de la formation choisie, ce dernier pourra bénéficier notamment d’abondements par son employeur ou sa branche.

c)      Des modalités d’accès au compte personnel de formation rénovées pour les demandeurs d’emploi

A l’instar des « actifs occupés », les demandeurs d’emploi bénéficient du compte personnel de formation (CPF) autonome, permettant à ces derniers de saisir la Caisse des dépôts et consignations  en direct pour le financement d’une formation, sans opérateur intermédiaire tel que Pôle emploi.

Le projet de loi permet ainsi de répondre à la situation actuelle des demandeurs d’emploi pour lesquels il n’existe pas véritablement de possibilité d’utiliser de façon autonome leur CPF. En effet, un demandeur d’emploi qui finance seul sa formation par les heures acquises sur son CPF et éventuellement par ses ressources propres, doit en pratique rencontrer son conseiller Pôle emploi pour mobiliser son CPF, ce qui amène le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels à refinancer Pôle emploi. Ce mécanisme exclut donc que le demandeur d’emploi puisse s’adresser directement à un organisme de formation sans passer par Pôle emploi et en l’absence de liens entre Pôle emploi et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Dans une logique de renforcements des droits et des devoirs des demandeurs d’emploi, le projet de loi prévoit dans la nouvelle rédaction de l’article L. 6323-22 du code du travail que lorsque le demandeur d’emploi accepte une formation financée par la région, Pôle emploi ou l’Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph), son CPF est débité du montant de l’action de formation réalisée. Il est rappelé que Pôle emploi ne pourra jamais contraindre un demandeur d’emploi à suivre une formation. Le projet de loi supprime en effet le refus de formation par un demandeur d’emploi comme un motif de radiation.

d)     Le CPF Transition professionnelle

Suite à la suppression du dispositif de congé individuel de formation, le projet de loi met en place une nouvelle modalité de mobilisation du compte personnel de formation (CPF) en vue d’un projet de transition professionnelle, prévue par les nouveaux articles L. 6323-17-1 à L. 6323-17-11 du code du travail.

Une part de la contribution CPF est dédiée au financement de ces projets à destination des salariés dont l’emploi est menacé au regard des mutations techniques, organisationnelles et professionnelles. Le CPF est dans cette hypothèse adossé à un congé spécifique si la formation est effectuée en tout ou partie durant le temps de travail.

En application des dispositions de l’article L. 6323-17-2 du code du travail, le projet fait l’objet d’un accompagnement par un organisme habilité au titre du conseil en évolution professionnelle. Le dossier de demande de prise en charge est construit avec le conseiller-référent de l’organisme retenu au titre du conseil en évolution professionnelle. Le projet est présenté à la commission regroupant les représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel mentionnée à l’article L. 6123-3 du code du travail qui apprécie sa pertinence et décide ou non de l’autoriser. La décision de la commission est motivée et prise au nom de l’opérateur de compétences dont relève l’entreprise qui emploie le salarié (affiliation de la branche).

Le projet est présenté à l’opérateur de compétences qui décide de la prise en charge financière du projet en statuant au regard de ses réserves de disponibilités financières et du respect de critères privilégiant les démarches de véritable reconversion. Sa décision doit être motivée.

La prise en charge recouvre tout ou partie des frais pédagogiques et des frais annexes du CPF ainsi que le versement au salarié de la rémunération dès lors que celle-ci se déroule sur le temps de travail et dans la limite définie par la réglementation.

Par ailleurs, en supprimant la section consacrée au congé individuel de formation, le projet de loi procède à l’abrogation des articles L. 6322-1 à L. 6322-64 du code du travail relatifs aux congés de formation suivants :

Les deux premiers congés de formation précités sont intégrés de fait dans le CPF transition professionnelle. En premier lieu, le bilan de compétence est une action de formation éligible au CPF et donc au CPF de transition professionnelle. Un salarié pourra ainsi bénéficier d’un congé dans ce cadre pour suivre un bilan de compétence. Compte tenu de la faible durée de ce bilan (24 heures) et des possibilités de modulation (notamment en conjonction avec un CEP rénové), il est probable que les personnes voulant suivre un bilan de compétences le fassent dans le cadre de l’usage du CPF hors temps de travail ou pendant le temps de travail. En second lieu, le congé de formation pour les salariés de 25 ans et moins est une variante du CIF et, à ce titre, est repris par le CPF de transition professionnelle. Les conditions d’ancienneté du CPF de transition professionnelle doivent être définies par décret et il pourra être spécifié une obligation d’ancienneté moindre pour les moins de 25 ans sans diplôme.

Enfin, concernant le congé d’enseignement ou de recherche, celui-ci n’a pas de justification formelle au sein des sections consacrées à la formation professionnelle et son financement par l’obligation légale dans la mesure où ce congé ne bénéficie pas de financement dédié pour son bénéficiaire. Il s'agit, avant tout, d’un accord entre le salarié et son employeur visant à octroyer au salarié un temps d’absence en vue de dispenser un enseignement ou de réaliser des recherches. Le salarié n’a ainsi pas le statut de stagiaire de la formation professionnelle, mais de formateur ou de chercheur et sa rémunération relève, le cas échéant, de dispositions conventionnelles.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Les présentes dispositions du projet de loi impliquent une refonte importante de l’ensemble des dispositions législatives du code du travail: articles L. 6323-2, L. 6323-3, L. 6323-4, L. 6323-6, L. 6323-8, L. 6323-9, L. 6323-10, L. 6323-11, L. 6323-11-1, L. 6323-12, L. 6323-13, L. 6323-14, L. 6323-15, L. 6323-16, L. 6323-17, L. 6323-20, L. 6323-20-1, L. 6323-21, L. 6323-22, L. 6323-23, L. 6323-25, L. 6323-26, L. 6323-27, L. 6323-28, L. 6323-29, L. 6323-30, L. 6323-31, L. 6323-32, L. 6323-33, L. 6323-34, L. 6323-35, L. 6323-36, L. 6323-37, L. 6323-38, L. 6323-41, L. 6111-7, L. 6121-5, L. 4162-5, L. 4163-8, L. 6323-20, L. 6323-23, L. 6323-32, L. 6323-41.

Le chapitre unique du titre V du livre I de la cinquième partie du code du travail sera également modifié.

Seront insérés dans le code du travail les articles L. 6323-17-1 à L. 6323-17-5, L. 6323-24-1 et L. 6323-42.

Le chapitre III du titre III du livre III de la sixième partie du code du travail sera renommé.

Les articles L. 6323-5, L. 6323-7 et L. 6322-1 à L. 6322-64 du code du travail sont abrogés.

Des modifications interviendront enfin dans la rédaction de l’article L. 432-12 du code de la sécurité sociale.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact sur les entreprises

La réforme se traduit pour les entreprises par une mutualisation de leurs contributions au financement du CIF et du compte personnel de formation (CPF). Ainsi, un nouveau taux de contribution, suivant la masse salariale brute, est retenu pour les entreprises de 11 salariés et plus et pourra évoluer dans le temps en fonction des besoins de financement.

Il n’est plus possible pour les entreprises occupant au moins 11 salariés d'internaliser la  gestion  du CPF par  la conclusion d’un accord collectif triennal.

4.2.2.      Impact budgétaire

Le financement dédié au compte personnel de formation (contribution CDD incluse) peut s’estimer, compte tenu de l’évolution de la masse salariale, à 2,1 Md€, par année, en 2019 et 2020, à 2,2 Md€ en 2021 et à 2,3 Md€ en 2022.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Le nouvel article L. 6323-4 du code du travail donne la possibilité à l’ensemble des collectivités territoriales d’abonder le compte personnel de formation lorsque les droits acquis par son titulaire sont insuffisants pour couvrir le coût de la formation.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

La mise en œuvre des dispositions du projet de loi relatives au compte personnel de formation (CPF) implique de redéfinir le rôle et les missions de la Caisse des dépôts et consignations qui devient gestionnaire financier et technique du CPF. L’appréhension du volet financier nécessitera indéniablement un renfort des moyens techniques, humains et matériels de la Caisse des dépôts et consignations, cette dernière ayant vocation à devenir un acteur central de la gestion du CPF. En outre, le transfert de la gestion financière du CPF à la Caisse des dépôts et consignations  implique la mise en place d’un circuit financier entre le collecteur des fonds CPF – les opérateurs de compétences puis à terme l’URSSAF.

L’URSSAF se substitue aux opérateurs de compétences en tant que collecteur de la contribution dédiée au financement de la formation professionnelle, ce à partir de 2021.

4.5.  Impacts sociaux

4.5.1.      Impact sur les personnes en situation de handicap

Pour les travailleurs handicapés accueillis dans un établissement ou service d’aide par le travail (ESAT), les dispositions du projet de loi portent le rythme d’acquisition des droits de ces salariés à 800 € par année de travail, dans la limite d’un plafond de 8 000 €.

4.5.2.      Impact sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Le projet de loi prévoit que tous les salariés qui travaillent à mi-temps ou plus bénéficieront des mêmes droits que les salariés à temps plein (500 € par année de travail crédités sur le compte personnel de formation).

Les femmes qui représentent 80 % des salariés à temps partiel seront donc les premières bénéficiaires. Cette mesure aura pour conséquences de renforcer l’accès des femmes à la formation professionnelle et de pallier les impacts d’un temps de travail à temps partiel très majoritairement subi.

4.6.  Impacts sur les particuliers

Le projet de loi renforce l’autonomie des individus dans le recours au compte personnel de formation (CPF). La modification des modalités d’alimentation et de mobilisation du CPF en passant d’une logique d’heures à celle d’euros contribue indéniablement à l’accessibilité et à la simplification du CPF. L’ensemble des actifs, hors fonction publique, auront à disposition une application numérique permettant de connaitre en temps réel les droits individuels acquis au titre du CPF, de choisir une formation en cohérence avec leur projet professionnel, les évolutions de l’emploi et des compétences recherchées sur un territoire de leur choix, ainsi que des taux d’insertion à son issue, et de s’y inscrire.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

En application de l’article L. 1 du code du travail, les consultations préalables ont été menées suite à la diffusion par la Ministre du travail du document d’orientation relatif à la réforme de la formation professionnelle le 15 novembre 2017. Elles ont permis de recueillir les points de vue des partenaires sociaux, des régions, de branches professionnelles. Un accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance a été adopté par les organisations représentatives de salariés et d’employeurs le 22 février 2018. 

La Caisse des dépôts et consignations a été associée à la réflexion afin de s’assurer de la faisabilité et de la viabilité du nouveau schéma de gestion du compte personnel de formation et du nouveau rôle qui lui est confié.

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mise en œuvre de certaines dispositions du projet de loi relatives au compte personnel de formation (CPF) fait l’objet de mesures transitoires. Il est prévu, dans une logique de désintermédiation, que la Caisse des dépôts et consignations  devienne, en substitution des opérateurs de compétences, l’unique gestionnaire du CPF sur le plan financier et technique, pour le CPF autonome et co-construit.

Ainsi, dans un premier temps, la gestion du CPF, tant sur le volet autonome que co-construit, demeure au sein des opérateurs de compétences, selon le schéma de gestion actuelle. Au plus tard en 2020, cette gestion sera transférée à la Caisse des dépôts et consignations. Cette dernière recevra via France Compétences la part CPF de la collecte formation professionnelle qui sera réalisée par le réseau des URSSAF à la place des opérateurs de compétences à compter de 2021.

Ces mesures transitoires sont nécessaires afin de permettre à la Caisse des dépôts et consignations d’assurer son nouveau rôle de gestionnaire technique et financier du CPF et de développer l’application numérique permettant à l’usager de mobiliser son CPF de façon désintermédiée.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Plusieurs dispositions réglementaires sont nécessaires pour mettre en œuvre les mesures prévues dans le projet de loi.

Un décret en Conseil d’État devra être pris suite à l’évolution nécessaire du système d'information du compte personnel de formation, mis en œuvre par la Caisse des dépôts et consignations.

Pour le compte personnel de formation (CPF) « transition professionnelle », un décret devra notamment préciser l’ancienneté minimale requise pour bénéficier d’un projet de transition professionnelle, la durée maximale de l’accompagnement au titre du conseil en évolution professionnelle, les modalités de mises en œuvre de l’avis de l’organisme en charge du conseil en évolution professionnelle auprès de l’opérateur de compétences.

Un décret en Conseil d’État devra déterminer les conditions et les délais de présentation de la demande de projet de transition professionnelle à l'employeur et les règles selon lesquelles est déterminée, pour un salarié, la périodicité des congés auxquels il peut prétendre.

Un décret devra déterminer les règles de prise en charge des dépenses afférentes au projet de transition professionnelle et le montant de la rémunération due aux salariés pendant la durée du projet de transition professionnelle ainsi que les modalités de versement de cette rémunération.

S’agissant de la prise en charge de frais de formation, un décret en Conseil d’État devra déterminer ses modalités lorsque la formation se déroule pendant le temps de travail ou lorsque le coût de la formation implique des abondements.

Un décret en Conseil d’État devra fixer les conditions d’application de la mise en œuvre du compte personnel de formation pour les personnes handicapées accueillies dans un établissement ou service d'aide par le travail.

S’agissant de la monétisation du CPF, il conviendra de prévoir par décret :


Article 3 - Conseil en évolution professionnelle

1.         État des lieux

Conçu et initié par les partenaires sociaux au travers de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés et créé par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, le conseil en évolution professionnelle (CEP) constitue une mesure d’accompagnement gratuite et personnalisée des projets professionnels. Il doit permettre à chacun de trouver un « espace » pour réfléchir à sa situation et ses perspectives d’évolution professionnelle. Universel, ce conseil s’adresse à l’ensemble des actifs, quels que soient leur statut, leur situation et leur âge, de l’entrée dans la vie active jusqu’à la retraite. Il a pour ambition de favoriser l’évolution et la sécurisation du parcours des personnes actives. Le conseil en évolution professionnelle s’inscrit ainsi dans une logique anticipatrice afin de prévenir les mobilités professionnelles « subies » et au contraire favoriser les mobilités professionnelles volontaires et réfléchies.

L’offre de service du CEP est définie par un arrêté ministériel en date du 16 juillet 2014 (publié au Journal officiel du 24 juillet 2014) fixant le cahier des charges du CEP. L’offre de service telle que définie par l’arrêté est structurée sur 3 niveaux et s’inscrit dans le cadre du service public régional de l’orientation :

Les services rendus aux bénéficiaires sont répartis quantitativement comme suit[5] :

Le conseil en évolution professionnelle est mis en œuvre par cinq opérateurs définis dans la loi : Pôle emploi, l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), CAP Emploi, les missions locales et les organismes paritaires collecteurs agréé au titre du congé individuel de formation (OPACIF). Afin de permettre une adaptation aux spécificités territoriales (besoins spécifiques des publics en termes d’accompagnement et de couverture territoriale), la loi a également ouvert la possibilité aux régions de désigner des opérateurs régionaux du CEP, après avis du bureau du comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (CREFOP).

Le nombre de bénéficiaires du CEP a doublé entre 2015 et 2016 passant ainsi de 732 195 bénéficiaires en 2015 à 1,5 million de bénéficiaires en 2016, pour les niveaux 2 et 3. Le schéma ci-dessous donne des indications sur la manière dont se répartissent les prestations en conseil en évolution professionnelle, par réseau :

Les statistiques montrent par ailleurs que la grande majorité des prestations d’accompagnement du CEP est réalisée au bénéfice des demandeurs d’emploi :

Le rapport du conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CNEFOP) fait ressortir que la mise en œuvre du CEP a supposé une évolution importante du métier de l’accompagnement, sur lequel tous les opérateurs doivent se retrouver. Les avancées pour assurer un service sur les trois niveaux ne sont pas négligeables depuis la création du CEP. Les opérateurs se sont notamment professionnalisés sur le développement des compétences d’ingénierie de parcours, incluant l’ingénierie financière.

Les opérateurs nationaux et régionaux doivent cependant être en capacité d'assurer une offre de service commune, indépendamment de leurs spécificités. Si la professionnalisation « croisée » des conseillers CEP reste, selon le rapport publié en 2017 par le CNEFOP, l’un des enjeux majeurs de la mise en œuvre du CEP, la mise en œuvre des plans de professionnalisation du CEP reste principalement  basée sur des démarches propres à chaque réseau et continue donc à poser la question des complémentarités tant entre opérateurs qu’entre le niveau national et territorial. Par ailleurs, le rapport du CNEFOP pointe une communication insuffisante auprès du grand public, ainsi que la question des moyens dont disposent les opérateurs du CEP afin d’assurer la montée en charge du dispositif. Cette montée en charge du CEP pour les actifs, et notamment les actifs occupés, ne pourra ainsi se réaliser qu’avec la prise en compte de ces enjeux.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le présent projet de loi promeut un nouveau conseil en évolution professionnelle qui doit permettre de développer les capacités des actifs à choisir leur avenir professionnel et à être accompagné dans la maîtrise de leur parcours sur le marché du travail.

Le nouveau conseil en évolution professionnelle (CEP) devrait permettre un meilleur accès aux droits à la formation professionnelle - au travers de la mise en œuvre du compte personnel de formation notamment - qui aura pour conséquence, potentiellement de mieux accompagner les salariés les plus fragilisés. Ainsi, 50 % des salariés accèdent à la formation professionnelle en France, contre près de 60 % au Danemark et aux Pays Bas, et environ 70 % en Suède et en Suisse. C’est surtout pour les salariés non diplômés que les écarts sont importants : près de 50 % des salariés non diplômés se forment en Suède, contre moins de 30 % en France.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le premier objectif poursuivi par le Gouvernement consiste à mettre en place sur l’ensemble du territoire, un conseil en évolution professionnelle pour les salariés, permettant de les accompagner dans leurs projets d’évolution professionnelle, conformément à l’accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles du 22 février 2018. Le conseil portera sur l’évaluation des compétences du salarié, la définition de son projet professionnel, les différentes formations disponibles.

Le second objectif consiste à organiser dans chaque région, la mise en place d’un opérateur du conseil en évolution professionnelle qui sera sélectionné par appel d’offres, selon un cahier des charges, co-construit entre l’État, les partenaires sociaux et les régions, et bénéficiant d’un financement dédié.

Enfin, le nouveau conseil en évolution professionnelle doit permettre de réduire les inégalités d’accès à la formation.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Afin d’améliorer l’accès des actifs et notamment des actifs occupés au conseil en évolution professionnelle (CEP), il a notamment été envisagé de réinterroger la liste des opérateurs pouvant délivrer le conseil en évolution professionnelle, aujourd’hui définis « de droit » par la loi. Les partenaires sociaux, dans le cadre de l’accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance du 22 février 2018, se sont accordés sur le fait que les actuels opérateurs CEP devaient être confirmés dans leur mission d’accompagnement des évolutions professionnelles des actifs. En matière d’accompagnement de l’évolution professionnelle des salariés, la démarche privilégiée par les partenaires sociaux est celle qui consiste à affecter, en priorité, plus de moyens au CEP et non d’agir sur les acteurs déjà en place

3.2.  Option retenue

Le présent projet de loi vise à permettre une nouvelle montée en charge du conseil en évolution professionnelle (CEP), en lui conférant un financement dédié, notamment à destination des actifs occupés. Les opérateurs désignés aujourd’hui par la loi comme opérateurs « de droit » du CEP (missions locales, Pôle emploi, OPACIF, APEC, Cap emploi) sont en effet à ce jour financés dans le cadre de conventions d’objectifs et de moyens (COM) conclues avec l’État. Ainsi, seules les prestations de conseil en évolution professionnelle destinées aux actifs occupés seront financées, via une partie de la contribution formation professionnelle. Il incombera à « France compétences » d’assurer la mission de financer le conseil en évolution professionnelle des actifs occupés, hors agents publics, dans des modalités fixées par décret.

Dans chaque région, un opérateur de conseil en évolution professionnelle sera sélectionné par appel d’offres organisé par France compétences, selon un cahier des charges national publié par voie d’arrêté du ministère du travail. Ce cahier des charges national permettra l’homogénéité des prestations délivrées dans le cadre du conseil en évolution professionnelle et la mise en place d’un appel à candidature dans les territoires doit quant à lui permettre d’organiser un maillage territorial plus fin en lien avec les entreprises.

Enfin, un nouvel article de cohérence est prévu afin d’assurer que les opérateurs du CEP transmettent les données relatives à leurs actions d’accompagnement aux financeurs de la formation professionnelle, ainsi qu’à l’opérateur gérant le compte personnel de formation, la Caisse des dépôts et consignations. Ainsi, en lien avec l’obligation déjà existante qui demande aux organismes de formation de fournir les données relatives aux stagiaires accueillis, serait créé un environnement d’échange d’informations entre les principaux acteurs sur l’ensemble de la chaine formation et orientation professionnelles rendant l’ensemble du système plus efficace.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La rédaction du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code du travail sera modifiée.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Le financement du conseil en évolution professionnelle des actifs occupés aura pour conséquence une montée en charge et en qualité de l’accompagnement des individus dans leurs projets d’évolution professionnelle et ainsi une meilleure adaptabilité des actifs occupés aux constantes évolutions du marché du travail et aux compétences nouvelles associées.

On peut escompter qu’une meilleure gestion des compétences des actifs et l’investissement dans le capital humain permettront notamment de gagner en compétitivité. Le renforcement du développement des capacités de maîtrise des changements technologiques, économiques et organisationnels devrait constituer non seulement un facteur d’amélioration durable de la compétitivité mais également un  facteur potentiel de croissance pour l'économie française[6].

4.2.2.      Impact budgétaire

Les prestations de conseil en évolution professionnelle destinées aux actifs occupés seront financées via une partie de la contribution formation professionnelle.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

À ce jour, les conseils régionaux peuvent désigner des opérateurs, après concertation au sein du bureau du comité régional de l'emploi, de l'orientation et de la formation professionnelles (CREFOP). Le projet de loi supprime cette possibilité, puisque les opérateurs régionaux seront désignés par France compétences suite à des appels d’offre régionaux. Il convient de noter que depuis 2014, date de mise en œuvre du conseil en évolution professionnelle (CEP), les régions n’ont que très peu voire pas utilisé cette possibilité d’habiliter des opérateurs régionaux du CEP. Les conseils régionaux qui ont usé de la faculté qui leur est ouverte depuis 4 ans pourront toutefois continuer de subventionner les opérateurs désignés.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

La structure chargée de sélectionner, après appels d’offres régionaux, les opérateurs du conseil en évolution professionnelle (CEP) en charge des salariés sera France compétences, qui prendra la forme d’un établissement public administratif. Cet établissement recevra à ce titre la partie de la contribution formation professionnelle dédiée au CEP et aura la charge d’assumer l’ensemble des procédures administratives et de gestion découlant des missions qui lui seront assignées.

4.5.  Impacts sur les particuliers

Le coût moyen actuel d’un conseil en évolution professionnelle (CEP) en fonds de gestion des congés individuels de formation (FONGECIF) est de 227 €. Le financement du CEP pour les actifs occupés permettra à environ 200 000 actifs supplémentaires d’être accompagnés par an.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les nouvelles dispositions sont applicables au 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Un premier décret devra être pris afin de préciser les modalités de financement du conseil en évolution professionnelle (CEP) à destination des actifs occupés, hors agents publics, par France compétences. 

Par ailleurs, l’offre de service du CEP est à ce jour définie par un arrêté ministériel fixant le cahier des charges du CEP. Le nouveau cahier des charges national qui sera publié par voie d’arrêté du ministère du travail devra être  construit sur la base des recommandations de l’accord national interprofessionnel.

Une disposition règlementaire devra également être prise afin de déterminer les modalités par lesquelles les opérateurs du CEP assurent l’information des personnes sur les modalités d’accès à ce conseil.

Un décret devra enfin être pris afin de définir les conditions dans lesquelles les opérateurs du CEP transmettent les données relatives à leur activité de conseil.

Chapitre 2 - Libérer et sécuriser les investissements  pour les compétences des actifs

Article 4 - Définition de l’action de formation

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le marché de la formation est particulièrement diversifié en France avec plus de 75 000 organismes de formation ayant déclaré une activité en 2016[7].

Cette déclaration est une obligation pour toute personne qui réalise des prestations de formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 du code du travail doit : déposer : « […] auprès de l'autorité administrative une déclaration d'activité, dès la conclusion de la première convention de formation professionnelle ou du premier contrat de formation professionnelle, conclus respectivement en application des articles L. 6353-2 et L. 6353-3. ». Cette déclaration ne constitue pas un agrément délivré par l’État. Chaque année ces organismes retracent leurs activités conduites dans un bilan pédagogique et financier (BPF). Ces bilans sont exploités pour l’information des parlementaires dans le cadre du « Jaune budgétaire Formation professionnelle »[8]

Communément considéré par les acteurs comme définissant la notion d’action de formation, l’article L. 6353-1 du code du travail précise plus exactement les conditions de réalisation des actions de formation dans les termes suivants : « Les actions de formation professionnelle mentionnées à l'article L. 6313-1 sont réalisées conformément à un programme préétabli qui, en fonction d'objectifs déterminés, précise le niveau de connaissances préalables requis pour suivre la formation, les moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement mis en œuvre ainsi que les moyens permettant de suivre son exécution et d'en apprécier les résultats.

Les actions de formation peuvent être organisées sous la forme d'un parcours comprenant, outre les séquences de formation, le positionnement pédagogique, l'évaluation et l'accompagnement de la personne qui suit la formation et permettant d'adapter le programme et les modalités de déroulement de la formation.

Elle peut s'effectuer en tout ou partie à distance, le cas échéant en dehors de la présence des personnes chargées de l'encadrement. Dans ce cas, le programme mentionné au premier alinéa précise […]. »

Cet article a été modifié par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale pour mieux prendre en compte les modalités de formation qui font appel aux formations ouvertes et à distance.

En effet, la digitalisation remet en cause le partage entre présentiel et non présentiel, entre formation pendant et hors du temps de travail, et accentue le développement les combinaisons possibles entre présentiel et non-présentiel, temps de travail et hors temps de travail. Il devient donc nécessaire de développer des modalités pratiques d’accès à la formation, de pédagogie active, plus souples et plus adaptées à la rapidité des évolutions du marché du travail et donc des besoins en compétence des salariés.

Or, la France se caractérise toujours par un moindre accès des salariés des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises (TPE-PME) à la formation. Ces entreprises sont pourtant, elles aussi, fortement impactées par la révolution digitale et elles n’ont pas souvent les capacités internes pour faire face à ces bouleversements de leur modèle économique et social. Il est donc indispensable de simplifier les voies d’accès à la formation pour leurs salariés permettant le développement des compétences.

C’est pourquoi, il a été de nouveau proposé d’élargir, avec l’article 82 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels - les conditions de réalisation des actions de formation. Cette évolution a visé à prendre davantage en compte le recours aux différentes modalités de formation et formes d’apprentissage et à privilégier des parcours individuels de formation adaptés et modulables.

S’agissant du financement des actions de formation, la responsabilité de l’employeur est clairement posée : en application de l’article L. 6331-1 du code du travail, « Tout employeur concourt au développement de la formation professionnelle continue en participant, chaque année, au financement des actions mentionnées aux articles L. 6313-1 et L. 6314-1 du code du travail.

Ce financement est assuré par : « 1° Le financement direct par l'employeur d'actions de formation, notamment pour remplir ses obligations définies à l'article L. 6321-1, le cas échéant dans le cadre du plan de formation prévu à l'article L. 6312-1 ; […] ».

La loi du 5 mars 2014 susmentionnée accorde donc davantage de latitude aux entreprises comme principal acheteur de formation pour décider de leurs choix d’investissement formation (fin de l’imputabilité de dépenses exception faite de la gestion interne du CPF).

Ce nouvel espace de liberté s’accompagne aussi de repères plus exigeants s’agissant de l’accès aux fonds publics et aux fonds mutualisés (renforcement de la priorité donnée à la qualification professionnelle, individualisation des parcours - compte personnel d'activité / compte personnel de formation -, renforcement des critères de prise en charge, qualité des actions de la formation).

Toutefois, cette liberté se heurte à une typologie des actions de formation décomposée en quatorze catégories d’actions. Entre également dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue la participation d'un salarié, d'un travailleur non salarié ou d'un retraité à un jury d'examen ou de validation des acquis de l'expérience. La régulation du marché de la formation relève d’une responsabilité partagée avec les financeurs de la formation (y compris par les individus eux-mêmes) pour que les fonds destinés à la prise en charge des actions de formation permettent d’atteindre les objectifs d’évolution professionnelle et de sécurisation des parcours assignés par le législateur. Cette régulation nécessite des repères juridiques clairs pour les acteurs amenés à financer des actions de formation ou assimilées permettant de développer les compétences des actifs.

1.2.  Éléments de droit comparé

Un travail de définition et d’harmonisation internationale des concepts de formation a été mené depuis les années 1970, aux fins de comparaisons internationales qui s’affranchissent des spécificités nationales.

En particulier, en s’appuyant sur le travail de l’Organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco)  dans le cadre de la Classification Internationale Type de l’Éducation (CITE, ISCED en anglais), Eurostat a établi un manuel européen intitulé Classification of Learning Activities (CLA) afin d’assurer une collecte harmonisée des données sur la formation tout au long de la vie dans les pays européens quel que soit leur système d'enseignement et d'apprentissage. La CLA propose des critères opérationnels afin de classer les activités d’apprentissage entre formation et apprentissage informel. La CLA a vocation à s'appliquer de manière générale aux enquêtes statistiques visant à collecter des données quantitatives sur les divers aspects de la participation personnelle à l'apprentissage.

Selon le CLA, une formation doit satisfaire les critères suivants :

(a) le participant doit avoir l’intention d’apprendre

(b) l’activité d’apprentissage doit être planifiée / organisée

(c) le cadre doit être institutionnalisé

(d) les techniques et le contenu doivent être prédéterminés

Une activité est considérée comme un apprentissage informel pourvu que le critère (a) soit respecté (qu’il y a bien l’intention d’apprendre). Ainsi, le fait d’apprendre au hasard sans en avoir eu l’intention n’est pas considéré comme de l’apprentissage au sens de la CLA.

Par ailleurs, le centre européen pour le développement de la formation professionnelle a établi un glossaire pour harmoniser les concepts et définitions[9].

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le code du travail doit apporter un point de repère juridique et pratique aux différents acteurs sur la notion d’action de formation au regard des obligations incombant aux entreprises, aux conditions de réalisation de ces actions par les dispensateurs de formation et bien entendu pour les organismes financeurs.

Dans le même temps, il est nécessaire aussi de prendre en compte les évolutions des pratiques de formation en lien et d’encourager l’innovation technologique et pédagogique.

L’ambition d’évolution du contenu de l’action de formation était déjà portée par l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013. Elle s’inscrivait en effet dans le schéma général d’obligation faite à l’employeur d’exposer ses dépenses de formation pour « se libérer » de son obligation de formation de ses salariés. Il convenait donc de repenser les possibilités de se former avec des dispositifs de plus en plus individualisés (CPF/CPA) et des demandes d’entreprises en forte évolution (digitalisation, ajustement au plus près des besoins).

En parallèle, les pratiques de formation évoluent également, sur le plan technique (outils numériques) et pédagogique (blended formation, multimodalité, e-learning…).

L’extension des contours de l’action de formation est engagée.

La typologie des actions de formation est devenue au fil du temps peu lisible et ne permet en outre pas de saisir les innovations pédagogiques permettant de répondre efficacement aux besoins exprimés par les entreprises en matière de digitalisation ou de réalisation d’actions plus en rapport avec les situations réelles de travail.             

L’adaptation du droit a pour objectif favoriser l’émergence des nouvelles modalités de on, est devenue une nécessité, comme à titre d’exemple les formations digitalisées, mixées, les formations avec pédagogies inversées, à base de serious games, les formations en situation de travail (FEST), etc.

 

 

Encadré – le nécessaire accompagnement des formations en situation de travail :

 

Il s’agit de développer ce support formatif, notamment au sein des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises (TPE-PME), afin de permettre aux employeurs de se saisir des espaces d’innovation potentiellement ouverts par un usage stratégique de la formation au service de la compétitivité des entreprises, en rupture avec une approche à dominante gestionnaire et administrative.

Depuis 2016, le comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation (COPANEF) et l’État ont donc engagé des expérimentations relatives à la mise en place d’actions de formation en situation de travail et ont assuré leur suivi pour modéliser ce type de formations plus articulées aux contenus des activités productives, avec la construction de compétences par construction en phase avec les besoins, les contraintes d’action des entreprises et à en évaluer les effets.

À ce jour, les textes indiquent que lorsqu'elle comporte un enseignement pratique, la formation peut être donnée sur les lieux de travail. Dans ce cas, un compte rendu des mesures prises pour que l'enseignement réponde aux conditions fixées à l'article D. 6321-1 du code du travail  est adressé au comité d'entreprise ou aux délégués du personnel ou, à défaut, à la commission spéciale mentionnée à l'article R. 2323-3 du code du travail.

Au vu des enseignements de l’expérimentation des formations en situation de travail (FEST), cette dernière disposition pourrait être actualisée pour mieux prendre en compte les engagements et la traçabilité nécessités par des mises en situation formatives sur le poste de travail, qui se distingueraient de l’activité de production.

Les enseignements de l’observation permettent aujourd’hui de dessiner les contours d’une action de formation en situation de travail : des séquences articulées de mise en situation de travail et d’interprétation de ce qui s’est produit ; une intention pédagogique ; des mécanismes de traçabilité adaptés ; etc.

Les apprentissages en situation de travail sont fréquents dans toutes les activités, mais souvent peu visibles et peu valorisés. De surcroît, ils peuvent parfois manquer d’efficacité pédagogique s’ils n’adviennent que de manière fortuite et non délibérée.

L’enquête DEFIS, initié par le Conseil national d’évaluations de la formation professionnelle (CNEFP), financé par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels et réalisé par le Céreq, montre que 12 % des salariés des entreprises de plus 10 salariés ont bénéficié d’un apprentissage en situation de travail, cette situation étant plus fréquente dans les entreprises de grande taille.

Dès lors, la formalisation de ces apprentissages constitue une opportunité pour qu’ils puissent contribuer aux objectifs assignés à la formation continue des salariés (et plus largement des actifs) en matière de sécurisation des parcours professionnels.

Les actions de formation en situation de travail (AFEST) représentent une modalité pédagogique intéressante, plus individualisée, qui peut permettre à des publics éloignés des schémas classiques de « départ en stage de formation » de trouver dans la mobilisation de situations de travail, ou de situations proches de l’environnement réel de travail, une autre manière d’apprendre.

Elles répondent aux préoccupations des entreprises de trouver des solutions plus adaptées à leurs besoins et leur offre la possibilité de valoriser le lieu de travail comme espace de formation de leurs collaborateurs.

Elles permettent aussi, dans certaines conditions, de compléter l’offre de formation externe (à laquelle les entreprises françaises ont communément recours, contrairement à nos voisins européens) reconnaissant l’entreprise comme lieu apprenant. Ces expérimentations ont été soutenues par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels et organisées par le réseau Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) – Association régionale pour l'amélioration des conditions de travail (ARACT). Elles ont été mises en œuvre par 11 onze organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), dans 21 vingt-et-un projets mobilisant plus de 50 cinquante TPE - PME.

Elle s’inscrit facilement dans une logique de parcours en intégrant par exemple en amont une séquence de positionnement et en aval une séquence d’évaluation des acquis, et des séquences d’une autre nature visant à compléter les apprentissages (FOAD, formation interne en salle, stage externe classique, etc.).

Elle ne se confond en revanche pas avec la validation des acquis de l’expérience (VAE), qui permet l’accès à la certification – en mobilisant parfois la situation de travail comme terrain d’évaluation – mais n’implique pas de processus pédagogique intentionnel de développement des compétences.

Il convient désormais d’adapter le corpus légal et réglementaire à la fois pour assurer la sécurité juridique de ces actions de formation en situation de travail et pour en préciser les conditions de mise en œuvre, notamment afin d’éviter les confusions possibles entre actions de formation en situation de travail et simples situations de travail.

 

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent projet d’article poursuit plusieurs objectifs :

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Dans ce cadre du document d’orientation remis en novembre 2017 aux partenaires sociaux pour réformer notre système de formation professionnelle, le Gouvernement a proposé de réorganiser les modalités par lesquelles l’entreprise contribue à la formation de ses salariés, tant par obligation que pour des raisons de compétitivité.

Dans cette perspective, les partenaires sociaux ont été invités à négocier sur la question suivante : « Quelle doit être la nouvelle définition simple et opérationnelle de l’action de formation, favorisant toutes les formes de formation et l’innovation pédagogique ? ».

En réponse l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 propose une définition partagée de l’action de formation dans les termes suivants : « Une compétence est une combinatoire de ressources (connaissances, savoir-faire techniques et relationnels) finalisée (vise l’action), contextualisée (dépend de la situation), construite (acquise ou apprise) et reconnue ».

L’action de formation vise à acquérir, maintenir, développer des compétences ainsi définies. Elle se définit comme le processus pédagogique d’apprentissage par lequel tous les moyens sous quelque forme que ce soit sont déployés au regard de la situation de la personne pour lui permettre d’adapter, d’acquérir ou de développer des compétences professionnelles ou d’obtenir une qualification, sur la base d’objectifs préalablement déterminés.

Ce processus a pour objectif de maintenir ou de développer des connaissances, capacités et compétences sous différentes formes (FEST, formel, non formel, présentiel, distantiel, etc...).

3.2.  Options retenues

Dans un souci de simplification et de lisibilité, quatre types d’actions entrant dans le champ des actions concourant au développement des compétences ont été retenus et font écho à l’accord national interprofessionnel précité puisqu’on y retrouve les bilans de compétences et les actions de validation des acquis et de l’expérience (VAE)  Par ailleurs, il est retenu une définition plus simple et plus  opérationnelle de l’action de formation.

En effet, en raison de la finalité de la construction de son parcours professionnel, recourir çà une prestation de formation ne constitue pas qu’un acte de consommation banal et régulier, pour lequel le rapport coût-qualité revêt un caractère difficilement évaluable. Il s’inscrit parfois dans une histoire personnelle et dans un rapport difficile à la formation. Rendre les personnes plus libres, c’est aussi leur permettre de faire des choix éclairés et en toute connaissance de cause. Outil majeur de promotion et d’émancipation sociale, l’action de formation est aussi une construction sociale qui souffre depuis trop longtemps d’une forme de déterminisme.

La définition de l’action de formation vise à répondre à cette exigence en n’imposant pas un formalisme préétabli et uniformisant, qui empêcherait l’efficacité des parcours de formation. Elle doit permettre davantage de plasticité et d’individualisation dans ses modalités.

Il est retenu une définition simple et opérationnelle : l’action de formation se définit comme un processus pédagogique permettant l’atteinte d’un objectif professionnel. Elle fait l’objet de modalités d’apprentissage identifiées pouvant comprendre des séquences de positionnement pédagogique, de formation et d’accompagnement de la personne qui suit l’action, dont les acquis sont évalués. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance. Elle peut être réalisée en situation de travail.

L’apprentissage entre désormais dans la catégorie des actions de formation et est créée, par ailleurs, une préparation à l’apprentissage qui doit permettre de bien préparer un jeune à l’entrée en apprentissage et d’éviter ainsi le nombre de ruptures précoces du contrat. Cette disposition répond, en outre, à une demande exprimée lors de la concertation sur l’apprentissage  par l’ensemble des acteurs du champ.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La clarification opérée permettra aux entreprises de disposer de repères leur permettant de valoriser le financement d’actions concourant au développement des compétences au titre de leur obligation légale de formation de leurs salariés (notamment dans sa traduction lors des entretiens professionnels prévus à l’article L. 6315-1 du code du travail).

Plus concrètement, la présente mesure conduira aux changements suivants : modification de l’intitulé du livre III de la sixième partie du code du travail, modification de la rédaction de différentes dispositions contenues dans le chapitre III du titre Ier du livre III de la sixième partie du code du travail. L’article L. 6322-44 du code du travail sera abrogé.

4.2.  Impacts économiques et financiers

Les entreprises, principal financeur de la formation professionnelle (avec 14,3 Md€) peuvent financer directement des actions de formation, au sens de l’article L. 6313-1 du code du travail pour participer au développement de la formation professionnelle de leurs salariés disposeront d’une définition simple et opérationnelle leur permettant de choisir librement et de manière plu sécurisée leurs investissements formation et les modalités de réalisation que ce soit en mode présentiel, à distance ou dans le cadre d’actions de formations en situation de travail.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les collectivités territoriales disposeront comme tout financeur de formation de points de repères utiles pour assurer leurs achats de formation.

4.4.  Impacts sur les particuliers

Les particuliers, qui contribuent au financement à hauteur de 1,4 Md€ disposeront de points de repères utiles sur les actions qui entrent dans le champ des actions concourant au développement des compétences qui facilitera leurs achats sur le marché de la formation professionnelle

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (au titre du a) du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail est consulté au titre de cet article du projet de loi.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions proposées rentrent en vigueur 1er janvier 2019

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’État pris en application de l’article L. 6313-18 du code du travail précise les conditions d’application du présent chapitre.

Article 5 - Qualité des actions de formation

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le marché de la formation, qui se caractérise par une extrême diversification en France avec plus de 75 000 organismes de formation ayant déclaré une activité en 2016[10],  se traduit par une hétérogénéité dans la qualité des pratiques que le législateur, à la suite de l’accord interprofessionnel de décembre 2013, a voulu harmoniser avec la loi n°2014-288 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et au dialogue social. Cette loi crée un nouveau chapitre dans le code du travail, le chapitre 16 intitulé : « Qualité des actions de la formation professionnelle continue ». L’article unique de ce chapitre dispose que désormais les organismes collecteurs paritaires agréés mentionnés à l'article L. 6332-1, les organismes paritaires agréés mentionnés à l'article L. 6333-1, l'État, les régions, Pôle emploi et l'institution mentionnée à l'article L. 5214-1 s'assurent, lorsqu'ils financent une action de formation professionnelle continue et sur la base de critères définis par décret en Conseil d'État, de la capacité du prestataire de formation mentionné à l'article L. 6351-1 à dispenser une formation de qualité.

Conformément au décret n° 2015-790 du 30 juin 2015, six critères de qualité servent de base commune à l’analyse de la capacité des organismes de formation à dispenser des actions de qualité :

  1. L'identification précise des objectifs de la formation et son adaptation au public formé ;
  2. L'adaptation des dispositifs d'accueil, de suivi pédagogique et d'évaluation aux publics de stagiaires ;
  3. L'adéquation des moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement à l'offre de formation ;
  4. La qualification professionnelle et la formation continue des personnels chargés des formations ;
  5. Les conditions d'information du public sur l'offre de formation, ses délais d'accès et les résultats obtenus ;
  6. La prise en compte des appréciations rendues par les stagiaires.

Les financeurs doivent également :

Le décret du 30 juin 2015 susmentionné ouvre deux possibilités, qui peuvent être articulées, pour vérifier la capacité des organismes de formation à dispenser une action de qualité :

Pour éviter la multiplication des procédures, le comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation (COPANEF) a impulsé un cadre de coopération qui a favorisé une approche conjointe des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) et des organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF). Cette démarche s’est concrétisée par la création d’indicateurs communs permettant l’évaluation des six critères qualité et la création d’un répertoire informatique qui permet aux organismes de formation de s’enregistrer en déposant des éléments de preuves attestant leur respect des indicateurs : le Datadock.

Les financeurs n’ayant pas choisi Datadock comme base de données pour structurer leur démarche de référencement mettent en place leur propre procédure pour vérifier la conformité des organismes de formation aux critères du décret qualité, en particulier s’agissant de organismes de formation non attributaires de marché et non connus du financeur. Par exemple Pôle emploi a publié une instruction en avril 2017 décrivant sa procédure de mise en application du décret qualité.

1.2.  Éléments de droit comparé

La coopération européenne en termes de formation professionnelle est orientée par le processus de Copenhague de 2002. Il a pour objectifs de soutenir la qualité des systèmes, de favoriser la mobilité et de faciliter l’accès à la formation tout au long de la vie. Le processus de Copenhague est amendé tous les deux ans et son évolution peut être suivie au travers des communiqués de Maastricht (2004), d’Helsinki (2006), de Bordeaux (2008) et de Bruges (2010).

Ce processus  a permis d’élaborer des outils communs en faveur de la transparence des systèmes de formation professionnelle et de qualifications :

-          l’investissement dans la formation des enseignants,

-          la comparaison entre les taux de participation à des programmes de formation,

-          les taux d’achèvement et les taux d’accès à l’emploi à l’issue de la formation,

-          l’utilisation des acquis sur le lieu de travail,

-          l’identification des besoins des entreprises,

-          la participation des groupes vulnérables,

-          et les moyens mis en place pour faciliter l’accès à la formation professionnelle.

Enfin, le centre européen pour le développement de la formation professionnel (CEDEFOP) a publié en 2012 les résultats d’une étude conduite entre 2009 et 2010 sur le rôle de l’accréditation des prestataires de formation professionnel dans l’amélioration de la qualité. Le rapport encourage dans ses conclusions les États membres à développer les certifications et labels qualité pour les tous les organismes concourant à la formation, initiale ou continue.

Le degré d’engagement dans les démarches qualité pour les prestataires de formation varie selon les pays. Ainsi, en Allemagne, depuis 2009, la loi de promotion de perfectionnement professionnel impose aux organismes de formation de faire la preuve de leur capacité à conduire des actions de formation continue. Cette preuve doit être établie au moyen d’un certificat attestant que l’organisme de formation est agréé selon le règlement d’accréditation et d’agrément AZAV (accréditation et agrément en matière de promotion de l’emploi) ou qu’il met en œuvre un système d’assurance qualité. La norme AZAV est gérée par le département en charge du travail au sein du gouvernement fédéral allemand. Elle s’inspire des principes énoncés par les normes ISO 9001 et ISO 29990 (désormais caduque), mais ses exigences sont inférieures à ces deux normes ISO. Ainsi, un organisme de formation devra obtenir la certification AZAV pour chaque action de formation qu’il souhaite faire prendre en charge par l'Agence fédérale pour l'emploi (Bundesagentur für Arbeit). En effet, les « bons de formation » accordés aux demandeurs d’emploi par l'Agence fédérale pour l'emploi ne peuvent être utilisés que dans un organisme de formation et pour une formation certifiée sur la base de la norme AZAV.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le cadre juridique de l’obligation de qualité n’emporte actuellement qu’une partie des actions de formation. En effet, la loi ne vise que les actions de formation continue stricto sensu suivies par les salariés du secteur privé ou les demandeurs d’emploi. Il s’agit aujourd’hui d’étendre les obligations de qualité à toute les actions de formation, alternance et apprentissage inclus, et pour tous les financements publics ou mutualisés.

Les moyens d’assurance qualité développés suite à la réforme de 2014 (catalogue de référence, liste des certifications et labels du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles - CNEFOP, Datadock) n’ont pas permis une harmonisation complète des pratiques lisibles par les entreprises, les actifs, et le grand public. Le nombre de labels et de certifications publiés par le CNEFOP s’est multiplié, pour atteindre 51 en mars 2018. Un focus des différentes pratiques mises en place par les financeurs a été rédigé par le Centre-Inffo, qui en actualise régulièrement le contenu, notamment la liste des certifications et labels qualité du CNEFOP[11].

Aussi il est nécessaire de créer un référentiel national unique de la qualité sur la base duquel les organismes de formation pourront se faire certifier. Cette évolution fait notamment suite à la préconisation du CNEFOP dans son rapport faisant synthèse des démarches Qualité menées dans le champ de la formation professionnelle, en liaison avec les financeurs 2017 : « Dans cette perspective, profitant de la convergence forte des acteurs sur les critères et indicateurs Qualité initiée à l’occasion de la mise en œuvre du décret du 30 juin 2015, il serait désormais relativement  aisé  de créer par voie réglementaire  une  certification qualité tout en assurant la reconnaissance des labels portés par les  pouvoirs  publics, assumant  un objectif «grand public». La mise en œuvre serait assurée par des certificateurs accrédités par le Cofrac ou par des instances de labellisation répondant au même niveau d’exigence que celui de l’accréditation (…) »[12].  

Ce référentiel prendra en compte les spécificités de l’apprentissage : alternance entre centre de formation et entreprises, formation de mineurs, objectifs de formation initiale.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent projet d’article poursuit plusieurs objectifs :

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Il a été envisagé de laisser le choix de la certification à l’organisme de formation sur la base du volontariat. Cependant, la volonté du gouvernement de donner la maîtrise du choix de sa formation à l’individu, en renforçant le compte personnel de formation et en supprimant en partie l’intermédiation, a remis en cause cette option. La disparition de la responsabilité du financeur fait courir un risque au bénéficiaire sur la qualité de l’action de formation qu’il a choisie de suivre. Pour offrir le maximum de garanties aux individus et aux entreprises, il est proposé d’obliger tous les organismes désirant travailler sur fonds publics ou mutualisés à faire la preuve de sa compétence qualité au moyen d’une certification lisible et reconnaissable par le bénéficiaire. Cette option ne relève pas les financeurs concernés de leur responsabilité puisqu’ils disposent toujours de la capacité de diligenter des contrôles complémentaires sur la qualité des prestataires qu’ils financent.

3.2.  Options retenues

3.2.1.      Créer une obligation de certification (ou labellisation publique) pour tous les organismes désireux travailler sur fonds publics ou mutualisés.

L’article L. 6316-1 du code du travail est réécrit en transformant l’ancienne obligation des financeurs à s’assurer de la capacité de l’organisme qu’ils financent à dispenser une action de qualité par une nouvelle obligation pour les organismes dispensateurs de formation d’être certifiés. Cette obligation ne concerne que les organismes qui dispensent des actions financées par des fonds publics (État, régions) et les fonds mutualisés (les nouveaux opérateurs de compétence créés par la réforme, Pôle emploi, l’Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées – Agefiph, la Caisse de dépôt et consignation qui financera le compte personnel de formation).

3.2.2.      Les certifications doivent être délivrées par des organismes dûment accrédités ou par des instances de labellisation reconnues par France Compétence

Le marché de la certification est vaste et de nombreuses certifications ou labels inscrits sur la liste du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles  (CNEFOP) prévue par le décret n° 2015-790 du 30 juin 2015 relatif à la qualité des actions de la formation professionnelle continue[13] ne sont pas accrédités par le Comité français d'accréditation (Cofrac), instance unique d’accréditation des certificateurs en France. La démarche qualité enclenchée par la loi du 5 mars 2014, tenant compte des échecs passés, a privilégié une approche ouverte et prudente sur le sujet, et n’a pas qualifié de «certifications de service» les certifications et labels qu’il demande au CNEFOP de recenser. Le CNEFOP a alerté sur les risques de disparité de qualité selon les certificateurs (rapport CNEFOP susmentionné, page 33 : « C’est la raison pour laquelle la liste du CNEFOP se compose de certifications et de labels qui ne présentent  pas  tous  les mêmes garanties effectives de  qualité, sans que le Conseil ait disposé des moyens juridiques d’être plus exigeant. Ne disposant pas, par ailleurs, de moyens de contrôle, il est certain que la liste du CNEFOP n’apporte pas aujourd’hui toutes les  garanties qu’elle  devrait  apporter. (…) Rendre obligatoire l’accréditation des certificateurs qui proposent une certification ou un label Qualité au titre du décret du 30  juin  2015, par le COFRAC, est  la  première,  minimale,  des  réformes à  prévoir. » )

Il existe en revanche des labels portés par des instances publiques qui, sans être accrédités par le Cofrac, apportent une garantie suffisante de qualité des organismes labélisés. Il peut s’agir de labels régionaux comme « Certif LR-MP » en Occitanie ou « Performance vers l’emploi » en Provence-Alpes-Côte d'Azur, de labels ministériels comme Eduform (Education nationale) ou de labels spécialisés comme le label qualité des formations au sein des écoles de conduite (Intérieur), E2C (École de la deuxième chance), le label qualité français langue étrangère (FLE) du ministères des affaires étrangères ou issus de dispositifs d’évaluations conduits par les ministères (par exemple, HCERES dans l’Enseignement supérieur). La liste des labels portés par des instances publiques et ayant apportés la preuve de garantie suffisante même hors accréditation Cofrac serait élaborée par le nouvel établissement public France compétences.

Par ailleurs les établissements secondaires ou supérieurs publics ou établissements supérieurs privés d’intérêt général dont les actions sont déjà évaluées par des services ministériels ou par la Commission des titres d’ingénieurs sont réputés satisfaire à l’obligation de certification pour les actions dispensées par apprentissage. Ces établissements notamment sont évalués au moment de la reconnaissance, du grade par le ministère, puis par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) pour le renouvellement du grade et enfin par la commission consultative des établissements d'enseignement supérieur privés (CCESP) qui examine le degré de participation de ces établissements à une mission de service public.

3.2.3.      Donner une base légale pour la création d’un référentiel national qualité

Le nouvel article L. 6316-3 du code du travail prévoit la création d’un référentiel national sur la qualité qui se basera sur les six critères du décret qualité du 30 juin 2015, éventuellement complétés ou renforcés, ainsi que sur une liste d’indicateurs permettant d’apprécier ces critères. Ces indicateurs feront la synthèse des indicateurs développés par le Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation (COPANEF), utilisés dans la procédure d’enregistrement au Datadock, et ceux développés par le CNEFOP pour instruire les certifications et labels de sa liste. Ce référentiel est complété par un guide d’audit sur lequel s’appuieront les futurs certificateurs accrédités. Ce référentiel national devra pouvoir être adapté à l’hétérogénéité du marché, que ce soit notamment en termes de public ou d’action (notamment à l’apprentissage).

3.2.4.      Une entrée en vigueur au 1er janvier 2021

La rédaction du référentiel national exigera une concertation des différents acteurs intervenant sur le marché de la formation et devrait demander plusieurs mois de développement. Il faudra également laisser le temps aux certificateurs de s’inscrire dans une démarche d’accréditation dont la durée dépendra de leur niveau d’accréditation précédent. Enfin il s’agira pour les organismes de formation de se faire certifier, ce qui peut prendre de trois à douze mois.

Pour laisser le temps nécessaire aux différents acteurs concernés de se mettre en situation de pouvoir répondre aux nouvelles obligations légales, l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions se fera au 1er janvier 2021.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La présente mesure conduira à modifier la rédaction du chapitre VI du titre Ier du livre III de la sixième partie du code du travail.

Il est à noter que l’article 26, paragraphe 1, de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dite « directive Services », prévoit que :

 « Les États membres, en collaboration avec la Commission, prennent les mesures d'accompagnement pour encourager les prestataires à garantir, à titre volontaire, la qualité des services, en particulier à travers l'utilisation de l'une des méthodes suivantes : a)              la certification ou l'évaluation de leurs activités par des organismes indépendants ou accrédités; (…) »

Cet article n’a fait l’objet d’aucune interprétation de la Cour de justice de l’Union européenne et le manuel de la Commission relatif à la mise en œuvre de la directive « services » n’apporte pas d’éclairage particulier sur cet article.

4.2.  Impacts économiques et financiers

L’impact pour les organismes de formation dépendant de la commande publique ou des fonds mutualisés sera réel puisqu’ils devront faire appel à un organisme accrédité par le Comité français d’accréditation (Cofrac). Le coût d’une certification est en moyenne de 3 000 €.

En 2016, 23 809 organismes de formation ont travaillé exclusivement avec des fonds des entreprises, sans déclarer de financement paritaire ou public et 2 973 organismes de formation n’ont déclaré que des fonds issus de contrats conclus avec des particuliers. Il peut être donc estimé le nombre d’organismes qui n’auront pas l’obligation d’obtenir une certification à environ 27 000, soient environ 48 000 organismes qui devront entrer dans un processus de certification.

En ajoutant les centres de formation d’apprentis et l’évolution du nombre d’organismes, 50 000 organismes pourraient être concernés, soit un investissement global de 150 M€. Le renouvellement de la certification est également payant, soit annuellement, soit tous les trois ans selon les certifications.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les collectivités territoriales devront prévoir pour leurs achats de formation de ne conventionner qu’avec des organismes certifiés.

4.4.  Impacts sociaux

Le handicap sera pris en compte dans les indicateurs du nouveau référentiel national sur la qualité.

4.5.  Impacts sur les particuliers

Chacun disposera d’une information complète sur les résultats concrets de chaque formation, de chaque accompagnement (retour à l’emploi, impact sur la trajectoire salariale…) car tous les organismes seront obligés de se soumettre à la certification et d’afficher leurs performances : plus personne ne s’engagera dans une formation sans savoir à quoi elle mène ni quelle est sa qualité.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions proposées rentrent en vigueur au 1er janvier 2021.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’État pris en application de l’article L. 6316-4 du code du travail déterminera les modalités d’application de l’article.

 


Article 6 - Plan de développement des compétences

1.         État des lieux

Le plan de formation est une des voies d’accès du salarié à la formation professionnelle continue, au même titre que le compte personnel de formation et les congés de formation. L’article L. 6312-1 du code du travail retient l’initiative comme critère de distinction des différentes modalités d’accès à la formation. Ainsi, l’accès des salariés à des actions de formation à l’initiative de l’employeur est assuré dans le cadre d’un plan de formation. Juridiquement, il constitue l’expression du pouvoir de direction de l’employeur, ce dernier décidant unilatéralement à la fois du choix des salariés qui partiront en formation et des actions de formation qui seront inscrites dans le plan de formation. Dans la pratique, l’inscription des actions de formation relève d’un travail de recensement des besoins, d’appels à manifestations d’intérêt, de partage de résultats sur les formations passées et donc, d’une co-construction recherchées entre les services de ressources humaines des entreprises et les salariés.

Le plan de formation comporte deux types d’actions prévues à l’article L. 6321-1 du code du travail : les actions visant à assurer l’adaptation du salarié au poste de travail ou liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi dans l’entreprise et les actions ayant pour objet le développement des compétences. À ces deux catégories, correspondent des statuts spécifiques des heures passées en formation : les premières sont pleinement assimilables à du temps de travail, les secondes doivent faire l’objet d’un accord entre employeur et salarié et ont des conditions de mise en œuvre, notamment hors temps de travail, particulières.

S’agissant du financement du plan de formation, la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a supprimé l’obligation fiscale de financement du plan de formation, avec son corollaire l’imputabilité des dépenses et sa conséquence, une approche de consommation du disponible budgétaire. Les entreprises occupant au moins 11 salariés ne sont pas pour autant libérées de toutes obligations en la matière.

En effet, l’article L. 6331-1 du code du travail rappelle que tout employeur concourt au développement de la formation professionnelle continue en participant chaque année au financement d’actions de formation professionnelle continue. Ce financement est assuré selon deux modalités distinctes : le financement direct par l’employeur d’actions de formation, notamment pour remplir ses obligations, le cas échéant dans le cadre du plan de formation et le versement de contributions.

Dans le cas du financement direct par l’employeur, le plan de formation vise l’enveloppe financière consacrée par l’entreprise à la réalisation de toutes les actions de formation engagées ou réalisées. Aucune exigence de dépenses minimum n’est imposée à l’entreprise en la matière. En défiscalisant partiellement le financement de la formation professionnelle continue des entreprises occupant au moins 11 salariés, la loi du 5 mars 2014 a permis aux entreprises de définir les conditions de leur investissement formation pour tenir compte de leurs caractéristiques propres.

Pour information, d’un point de vue quantitatif, le plan de formation tel que mutualisé par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), correspond à une contribution de 0,40 % de la masse salariale brute pour les entreprises de moins de 11 salariés ; de 0,20 % de la masse salariale brute pour les entreprises de 11 à 49 salariés et de 0,10 % de la masse salariale brute pour les entreprises de 50 à 299 salariés. Les entreprises de 300 salariés et plus contribuent au développement de la formation professionnelle continue à hauteur de 1 % de la masse salariale, comme toutes les entreprises occupant 11 salariés et plus, mais leur contribution ne fait l’objet d’aucune affectation au titre du plan de formation ; c’est donc par le biais de financement direct de la formation ou de versements conventionnels ou volontaires à un OPCA que les entreprises assurent le financement de leur plan de formation.

Les états statistiques et financiers des OPCA au titre de l’année 2016 font état des données suivantes relatives au plan de formation :

Sections

Plan 50 à moins de 300

Plan 11 à 49

Plan < inférieur à 11

Nombre d’OPCA concernés

20

20

20

Collecte comptabilisée en 2016

109 M€

183 M€

389 M€

Nombre d’entreprises versantes au titre de l’année 2016

34 325

144 080

1,2 million

Nombre de salariés concernés

3,5 millions de salariés

3 millions de salariés

6,3 millions de salariés

Actions de formation financées

163 160

227 685

415 648

Nombre de bénéficiaires d’une action de formation*

597 969

470 961

390 019

Source : Annexe au projet de loi de finances pour 2018 - Formation professionnelle


2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

Le présent projet de loi vise une transformation globale de l’appareil de formation en renouant avec l’inspiration de la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l’éducation permanente  : « l’adaptation des travailleurs au changement des techniques et des conditions de travail, de favoriser leur promotion sociale par l’accès aux différents niveaux de la culture et de la qualification professionnelle et leur contribution au développement culturel, économique et social. »

L’enjeu est aujourd’hui d’être à la hauteur de la compétition mondiale de la compétence en réussissant tout à la fois à massifier les systèmes de formation initiale et professionnelle tout en leur assurant une qualité à même de donner à chacun la liberté individuelle de saisir toutes les opportunités professionnelles qui se présenteront.

Compte tenu du fait que l’évolution de la compétence des salariés relève d’abord de la responsabilité des entreprises, c’est à elles que revient pleinement d’anticiper les changements, de faire évoluer les organisations et d’innover pour être compétitives sur des marchés de plus en plus concurrentiels. Ces évolutions fondamentales, ces libertés offertes aux acteurs pour l’innovation pédagogique, répondent à celles offertes par la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 sur un dialogue économique et social au plus près des besoins et aujourd’hui par le présent projet de loi au travers d’un compte personnel de formation monétarisé, d’un accompagnement individuel et gratuit pour tous les actifs par le conseil en évolution professionnelle.

Cela suppose aussi pour l’État une vigilance sur la qualité des formations, la transparence du marché de la formation et de l’accompagnement par la création d’une agence gardienne de la qualité et de l’efficacité du nouveau système de la formation professionnelle : France compétences.

2.1.  Nécessité de légiférer

Les entreprises, les salariés et les partenaires sociaux rencontrent des difficultés récurrentes pour distinguer effectivement les différentes catégories du plan. Dans les dernières années, plusieurs modifications ont été apportées, par les partenaires sociaux et le législateur, à cette classification. À titre d’exemple, la loi du 4 mai 2004 susmentionnée définissait trois types de catégories d’actions (action d’adaptation au poste de travail, actions liées à l’évolution des emplois ou au maintien dans l’emploi, actions liées au développement des compétences). Dans un contexte de mondialisation et de mutation à grande échelle de l’appareil productif (un métier sur deux est appelé à être fortement impacté par les transitions numériques et écologiques sur les prochaines années selon le Conseil d’orientation pour l’emploi en 2017), la distinction entre les adaptations au poste de travail ou liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi dans l’entreprise et les actions de développement des compétences ne se justifie plus. De fait, les entreprises, comme les salariés, peinent à classer les actions et le font, de plus, de façon « générique », alors que fondamentalement, cette classification est individuelle : une même action peut être d’adaptation pour un salarié, et correspondre à un développement de compétences pour un autre. Pour être comprise et opérante, la classification doit correspondre à une réalité. Les partenaires sociaux, dans l’accord national interprofessionnel du 23 février 2018, en « rebaptisant » le plan de formation, « plan de développement des compétences », traduisent cette évolution.

Le plan de formation ( comme la définition de l’action de formation) doit pouvoir répondre à une évolution considérable des modalités d’acquisition, de développement et de validation des compétences en situation de travail ou hors temps de travail, en présentiel ou en non-présentiel (formation à distance, formation digitale, formation en situation de travail (FEST) et/ou entre pairs, blended learning….). . Il devient donc indispensable de favoriser  des modalités d’accès à la formation plus souples, en tenant en compte des avancées pédagogiques et de la rapidité des évolutions du marché du travail et des besoins en compétences des salariés qui y répondent.

Enfin, l’accès des salariés des petites et moyennes entreprises à la formation professionnelle demeure insuffisant. C’est en ce sens que le présent projet de loi propose une définition de l’action de formation modernisée, la simplification de la classification des actions de formation et une mutualisation financière inédite, autour d’un système de solidarité financière entre petites et grandes entreprises pour le financement d’un plan de formation nécessairement plus souple, tenant compte des difficultés pratiques et des besoins concrets des employeurs et des salariés considérés.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le renforcement du compte personnel de formation, sa monétisation et sa simplification d’accès par la suppression des listes de formation éligibles et la création d’une application dédiée vise à répondre au besoin d’autonomie des individus.

L’entreprise se voit au contraire renforcée dans son rôle central d’acquisition des compétences pour ses salariés. Ses obligations en la matière demeurent : participation au financement bien évidemment, adaptation du salarié à l’évolution de son emploi, mais également organisation bisannuelle d’un entretien professionnel et concertation sur l’élaboration du plan de formation avec les représentants du personnel.

Il en résulte un plan de développement des compétences recouvrant tout à la fois les deux anciennes catégories du plan et visant, avec l’appui des opérateurs de compétences et des travaux des différents observatoires de branche à appuyer une stratégie de développement des compétences pour faire face aux évolutions techniques, réglementaires et organisationnelles auxquelles les entreprises doivent faire face.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Les parties signataires de l’accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance du 23 février 2018 ont convenu de remplacer le plan de formation, à l’initiative de l’employeur, par un plan d’adaptation et de développement des compétences ayant pour objet de préparer les compétences nécessaires à l’entreprise pour faire face aux évolutions techniques, réglementaires et organisationnelles et de satisfaire à son obligation d’adapter les salariés à leur poste de travail. Il comprend également l’ensemble des actions liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi dans l’entreprise, les actions liées au développement des compétences ainsi que, le cas échéant, les actions d’accompagnement des salariés qui font l’objet d’une co-construction avec l’entreprise.

Compte tenu des difficultés pratiques de distinguer entre les actions d'adaptation au poste de travail et les actions de développement des compétences, il est apparu indispensable de simplifier la définition du plan de formation. Par ailleurs, les actions d’accompagnement des salariés constituent une des finalités du conseil en évolution professionnelle.

3.2.  Option retenue

3.2.1.      Des nouvelles modalités de financement du plan de développement des compétences afin d’assurer une solidarité financière accrue des grandes entreprises vers les PME et TPE

Le projet de loi met en place un système de solidarité financière entre les petites et moyennes entreprises (PME) et les plus grandes entreprises. Le plan de développement des compétences des très petites entreprises (TPE) et PME continue d’être pris en charge par un système de mutualisation financière.

Le plan est financé par une contribution assise sur la masse salariale brute de toutes les entreprises, quel que soit leur effectif. Toutefois, ces contributions sont destinées exclusivement aux entreprises de moins de 50 salariés. France compétences assurera la péréquation des fonds entre les différents organismes paritaires collecteurs agréés.

3.2.2.      Une construction du plan fortement simplifiée pour les entreprises

Le projet de loi modifie l’article L. 6312-1 du code du travail en supprimant les périodes de professionnalisation et le congé individuel de formation, dans l’objectif de faire du compte personnel de formation le seul outil de mobilisation à l’initiative du salarié. L’accès des salariés à des actions de formation professionnelle, à l’initiative de l’employeur, est désormais assuré dans le cadre d’un plan de développement des compétences.

L’article L. 6321-1 du code du travail simplifie les obligations de l’employeur, tenu d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. 

L’article L. 6321-2 du code du travail prévoit que toute action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et réglementaires constitue un temps de travail effectif, avec maintien de la rémunération par l’entreprise durant sa réalisation.

En application de l’article L. 6321-6 du code du travail, les actions de formation autres que celles mentionnées à l’article L. 6321-2 du code du travail constituent aussi un temps de travail effectif et donnent lieu également au maintien de la rémunération. L’article prévoit deux exceptions :

Dans ce deuxième cas, l’article L. 6321-7 du code du travail prévoit que le refus du salarié de participer à des actions de formation hors temps de travail ne constitue ni une faute, ni un motif de licenciement.

La catégorie de formation visant au développement des compétences du salarié est supprimée (articles L. 6321-8 à L. 6321-12 du code du travail). Les entreprises ne sont plus contraintes de construire leur plan en faisant la distinction entre les actions d’adaptation au poste de travail ou liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi dans l’entreprise, les actions de développement des compétences .

Enfin, il est laissé à la négociation collective, en accord avec l’esprit des dispositions de la loi du 5 mars de 2014, le soin de préciser les conditions dans lesquelles l’employeur propose au salarié de participer à une action de formation et notamment le délai entre la proposition de formation et l’entrée en formation effective du salarié.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les dispositions envisagées visent à simplifier la gestion du plan de développement des compétences pour les employeurs et les organisations syndicales, mais également d’en rendre plus intelligible le fonctionnement pour les salariés. L’objectif final étant de favoriser le développement d’actions de formation au sein des entreprises, particulièrement pour les petites et moyennes entreprises. La fusion des catégories de plan de formation commencée par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie est ainsi achevée.

Par ailleurs, l’ensemble des règles de consultation des représentants du personnel sur le sujet de la formation, de l’égalité femmes-hommes et de la lutte contre les discriminations, de la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences demeure, tout comme les modalités d’entretien professionnel à l’article L. 6315-1 du code du travail (périodicité de deux ans, état des lieux du parcours professionnel tous les six ans et modalité d’abondement du compte personnel de formation du salarié en cas de carence de l’employeur).

Plus concrètement, la présente disposition conduira à la modification de la rédaction du livre III de la sixième partie du code du travail.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

En application de l’article L. 1 du code du travail, les consultations préalables ont été menées suite à la diffusion par la Ministre du travail du document d’orientation relatif à la réforme de la formation professionnelle le 15 novembre 2017. Un accord national interprofessionnel pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance a été adopté par les organisations représentatives de salariés et d’employeurs le 23 février 2018. 

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions du projet de loi relatives au plan de développement des compétences seront applicables à compter du 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Pour les actions de formation pouvant se dérouler hors du temps de travail effectif, avec l’accord du salarié, un décret en Conseil d’État doit venir préciser les conditions dans lesquelles l’accord du salarié peut être dénoncé.

 

 

 

 

 

 

 


Chapitre 3 - Transformer l’alternance

Conformément à la feuille de route sociale du Gouvernement, une large concertation, débutée en novembre dernier, sur l’apprentissage a été organisée avec pour objectif un projet de loi présenté au Parlement. Cette concertation a été menée sous l’égide de la Ministre du travail et du Ministre de l’Éducation nationale.

Afin de faire émerger les consensus les plus partagés et de faire en sorte que l’apprentissage soit traité en profondeur dans l’ensemble de ses dimensions, la concertation n’a négligé aucun des nombreux acteurs. Ainsi, le choix des parties prenantes à la concertation s’est voulu délibérément très large afin que chacun puisse contribuer en fonction de son niveau d’implication dans l’apprentissage : les différents représentants des acteurs de la société civile, des acteurs institutionnels, des partenaires sociaux, des acteurs économiques et, enfin, des acteurs éducatifs sont invités à participer aujourd’hui à la concertation de l’apprentissage.

La concertation s’est construite autour d’une pluralité de modalités d’échanges (réunions plénières, groupes de travail, auditions, participation citoyenne) ayant pour objectif de permettre une participation optimale des acteurs, en abordant les sujets sous différentes approches. Les groupes de travail multipartites, animés par une personnalité qualifiée, Mme Sylvie Brunet, se sont articulés autour de quatre thèmes : parcours de l’apprenti, entreprise et apprentissage, gouvernement et financement, offre de formation et certification.

Un rapport pour le développement de l’apprentissage établi par Madame Brunet a été remis aux ministres du Travail, de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation le 30 janvier 2018.

Ce rapport a permis de dégager les mesures relatives à l’apprentissage portées par le présent chapitre du projet de loi.


Articles 7 à 9 - Conditions contractuelles de travail par apprentissage

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le régime juridique actuel place l’apprenti en situation de travail mais dans l’objectif unique d’obtenir un diplôme.

En effet, le but du contrat d’apprentissage est l’exécution d’une prestation de travail, dans le cadre du suivi d’une formation alternée qui sera sanctionnée par un diplôme ou un titre professionnel, dont l’obtention marquera la réalisation de son objet et la fin du contrat d’apprentissage lorsqu’il a été conclu pour une durée limitée[14].

Dans ce cadre, l’apprenti dispose des mêmes droits que les autres salariés dans l’entreprise « dans la mesure où ils ne sont pas contraires à ceux qui sont liés à sa situation de jeune travailleur en formation »[15].

Plusieurs éléments fondent cette distinction avec le salarié de droit commun, dont, notamment, l’absence de période d’essai (mais une période probatoire), une rémunération spécifique[16], et l’obligation première de l’apprenti de suivre les enseignements théoriques et techniques de l’établissement de formation dans lequel l’employeur l’a inscrit.

Accompagné par son maître d’apprentissage – condition de validité du contrat  –, l’apprenti exécute en entreprise le « travail » que lui confie l’employeur, travail qui doit être en lien direct avec la formation théorique dispensée et inscrite dans le référentiel de formation au titre duquel l’employeur s’est engagé contractuellement.

L’apprenti dispose également du régime d’ « étudiant des métiers » [17] qui lui ouvre bénéfice des mêmes droits que les étudiants des voies scolaire ou universitaire.

1.2.  Éléments de droit comparé

En Europe, l’apprentissage n’est pas une notion harmonisée mais voici ce que l’on peut retenir de nos voisins en matière de statut d’apprenti.

En Allemagne, le contrat d’apprentissage est établi par le bureau d’apprentissage de la chambre de commerce. La durée du contrat est comprise entre deux et trois ans, pouvant aller exceptionnellement jusqu’à trois ans et demi. Le temps de formation en centre est fixé à 30 % de la durée totale du contrat.

En Autriche, le contrat d’apprentissage est établi avec l’entreprise. La durée du contrat est comprise entre deux et quatre ans. Le temps de formation en établissement scolaire est de 20 % de la durée totale du contrat.

Au Danemark, le contrat de formation est établi entre le bénéficiaire et le centre de formation. La durée de ce contrat est très variable et est comprise entre an et demi et 5 ans étant donné la flexibilité du système. Le temps de formation en centre est de 30 % à 50 % de la durée totale du contrat.

En Finlande, le contrat de travail est à durée déterminée. Ce contrat est validé par le bureau de l’apprentissage ou le centre de formation en apprentissage. La durée du contrat est comprise entre un et trois ans. Le temps de formation est compris entre 20 % et 30 % de la durée totale du contrat.

En Pologne, le contrat de travail entre l’apprenti et l’employeur confère le double statut de salarié et d’étudiant au jeune. La durée du contrat est comprise entre 2 et 4 ans (en fonction du niveau du cycle de formation suivi). Cette durée peut être réduite à 3-6 mois lorsque le contrat se déroule dans les métiers de l’artisanat.

En Espagne, plusieurs types de contrats sont possibles (soit contrat de formation avec statut d’élève ou contrat d’apprentissage avec statut de salarié). La durée du contrat est comprise entre 1 à 3 ans avec une possibilité de réduction à 6 mois dans le cas d’accords collectifs. Entre 15 % et 25 % de la durée du contrat se déroule en centre de formation. 

Pays

Allemagne

Autriche

Danemark

Population totale

82 175 684

8 767 919

5 745 526

PIB par habitant (2016)

34 600

36 300

45 700

Smic (premier semestre 2017)

1 498 €

-

-

Principale caractéristique / différence avec le système français

L’alternance est une filière à part entière du système éducatif fortement segmenté, et la plupart du temps la seule voie d’accès à certains métiers qualifiés.  En 2012, la moitié des entreprises accréditées à proposer des formations dans le cadre du système dual ont accueilli un apprenti (38 % des petites entreprises concernées, 87 % des moyennes entreprises et la quasi-totalité des grandes entreprises).

Comme pour l'Allemagne l'alternance fortement institutionnalisée du point de vue de son insertion dans le système éducatif, et au niveau de l’implication des partenaires sociaux dans la régulation de la formation en entreprise.

Système d'apprentissage accessible dans le cadre de la Formation professionnelle continue, marqué par un haut degré de flexibilité.

Modalité
de l’alternance

Système dual
Accès à partir de 15 ans, pas de limite d'âge

Système dual
Entrée possible à partir de 15 ans, à l'issue du cursus scolaire obligatoire initial (de 9 années).
Pas de restriction d'âge en entrée
Le terme "apprentissage" est utilisé uniquement dans le cadre de la formation professionnelle initiale en alternance (80 % en entreprise, et 20 % en établissement d'enseignement professionnel)

Système combinant une formation de base en centre d'apprentissage (12 parcours de base existent), suivie d'un parcours principal en alternance (125 parcours principaux existent).
Accès aux jeunes à partir de 16 ans, sans limite d'âge.

Gouvernance

État / Landër / Partenaires sociaux

État / Landër / Partenaires sociaux

État / Partenaires sociaux

État

Loi de 1969 sur la formation professionnelle (BbiG)
Au niveau fédéral, l'État définit les standards et règles applicables en matière de formation.
Les référentiels de formation sont élaborés et actualisés au sein de l’institut fédéral de la formation professionnelle (BIBB)

Ministère de l'économie, Ministère de l'éducation
L'ensemble des cursus en apprentissage sont soumis à des régulations à l'échelle nationale, et préparent à des qualifications reconnues et identiques à l'échelle nationale.
Le ministère de l'éducation est le principal décisionnaire pour la partie de la formation en établissement d'enseignement professionnel

Le parlement définit la structure générale de l'EFP. Le ministère de l'éducation supervise le Conseil de la formation professionnelle ainsi que des Comités de développement (chargés d'une mission de prospective pour permettre une réactivité des programmes d'EFP en fonction des métiers émergents, et auxquels participe également le Ministère de l'emploi).

région/collectivité

L’éducation est une responsabilité propre des Länder, qui gèrent les établissements scolaires de la filière professionnelle.

Chambres économiques régionales gérant des bureaux de l'apprentissage par délégation du Ministère de l'économie.
Les 9 bureaux donnent l'agrément aux entreprises d'accueil, aux contrats, gèrent les aides et assurent un rôle de conseil.

 

Partenaires sociaux

Commissions nationales sectorielles réunissant les représentants du patronat, des travailleurs, de la fédération et des Länder dans le cadre de l’institut fédéral de la formation professionnelle (BIBB) afin d’établir une standardisation des qualifications au niveau fédéral
Au sein des chambres consulaires allemandes est constitué un comité pour la formation professionnelle, composé de six représentants des employeurs, six représentants des salariés et six enseignants en écoles professionnelles.
Le PS élaborent les recommandations liées à la coordination Établissements d'enseignement / Entreprises, concernant l'enseignement professionnel et la formation en alternance.
Au niveau régional les PS ont un rôle de supervision de la formation en entreprise ; ils organisent les examens finaux et délivrent les qualifications correspondantes.
Au niveau sectoriel : les PS négocient sur l'offre de places en apprentissage, et sur les accords collectifs concernant la rémunération des apprentis.
Au niveau des entreprises : les PS participent à planifier et organiser la formation en entreprise

Rôle important à travers des  Conseils de l'apprentissage au niveau régional (Landesberufsausbildungsbeiräte, LABB) et fédéral (Bundesberufsausbildungsbeirat, BABB). Les employeurs participent à la définition des programmes et au pilotage du système.
Le ministère de l'économie et les partenaires sociaux sont les principaux décisionnaires pour la partie de la formation en entreprise

Sous la tutelle du Ministère de l'éducation, un Conseil de la formation professionnelle auquel participe els partenaires sociaux émet des recommandations concernant les programmes et leurs évolutions.
Une cinquantaine de Comités paritaires sectoriels existent, qui statuent sur la structure et le contenu détaillé des programmes.
Des comités locaux de l'éducation sont nommés par les Comités paritaires, pour suivre la mise en œuvre de chaque programme, et renforcer la coopération entre centres d'enseignement et acteurs économiques.

Autres

Les chambres consulaires assument un grand nombre de prérogatives : autorisation d’accueil d’apprentis par les entreprises, accréditation des maîtres d’apprentissage, enregistrement des contrats, suivi
et contrôle de la qualité des formations, conseil aux entreprises et aux maîtres d’apprentissage, enregistrement des places disponibles, organisation des examens et délivrance des titres.

Les entreprises recevant des apprentis et les centres de formation participent à la gouvernance.

Les centres d'enseignement sont gérés de façon autonome ; leur gouvernance associe des représentants des étudiants, des enseignements, du personnel administratif et des PS.

Nombre d'apprentis concernés

1 337 004 contrats en stock en 2015, contre 1 430 000 environ en 2012 / nombre de nouveaux contrats établis en 2014 : 530 700

En stock : 107 000 apprentis en 2016

Nombre d'étudiants en EFP initial en 2012, participant au parcours de base : 48 019 / participant au parcours principal : 39 655

Pourcentage de jeunes concernés

Pourcentage des élèves en cycle d'enseignement secondaire supérieur suivant un cursus combinant école et formation en alternance : 43 %
taux de formation par apprentissage parmi l'ensemble des actifs: 3,2 %

40 % d'une classe d'âge suit une formation en apprentissage

30 % des élèves optent pour l'apprentissage

Contrat

 

 

 

nature

Contrat d'apprentissage établi par le bureau d’apprentissage de la chambre de commerce

Contrat d'apprentissage

Contrat de formation établi entre le bénéficiaire et le centre de formation

durée

entre 2 ans et 3 ans, pouvant aller exceptionnellement jusqu'à 3 ans 1/2

de 2 à 4 ans
Peu de diplômes sont préparés en 2 ans : la majorité des cursus se préparent en 3,5 et 4 années

Entre 1 an et demi et 5 ans, fortement variable étant donné la flexibilité du système.
La durée la plus courante est de 20 semaines pour le cursus basique, qui peut cependant varier de 10 à 60 semaines.
La partie principale du cursus dure ensuite entre 3 ans et 3 ans et demi.

Formation

 

 

 

Certifications
visées

329 métiers sont normalement accessibles par une formation en apprentissage (2014).
Les diplômes professionnels sont délivrés par les chambres consulaires responsables du métier préparé.

200 diplômes préparés, couvrant tous les secteurs
Le Ministère de l'économie et la Chambre fédérale de l'économie fournissent des supports et matériels didactiques pour la formation en entreprise

216 diplômes sont accessibles par la voie de l'apprentissage

 lieu et durée

30 % du temps de l'apprentissage en centre et 70 % en entreprise - en général la formation en centre est organisée sur un ou deux jours par semaine

80 % de l'apprentissage sur le lieu de travail / 20 % en établissement scolaire

de 50 à 70 % concernant le temps de formation en entreprise de 50 à 30 % concernant le temps de formation en centre

Accompagnement (tuteur)

Le tutorat est réalisé par des instructeurs ou maîtres d'apprentissage au sein de l'entreprise (certifiés pour l'enseignement professionnel), et un responsable de la formation professionnelle existe dans les grandes entreprises.

Le tuteur programme et assure la formation en entreprise, et accompagne l'apprenti. En complément de qualification professionnelles il doit prouver des compétences en pédagogie : évaluées par examen, ou à l'issue d'une formation spécifique de 40 heures au tutorat.

Le tuteur doit avoir une qualification en lien avec le métier visé. Il est supposé avoir plusieurs années d’expérience professionnelle.

Financement

 

 

 

Financeurs

Coût en estimé en 2007 pour les entreprises : 23,8 Md€
Financements publics d'après le rapport du BIBB 2017 : 1,478 Md€ au niveau national et 7,245 Md€ au niveau des Landër

Le coût de la formation en entreprises est à la charge de celles-ci.
Le coût de la formation en établissement scolaire est financé sur fonds publics.
Le coût des équipements des centres de formation professionnelle, ainsi que 50 % du coût des équipes enseignantes, est pris en charge par les provinces fédérales.

Total des financements publics affectés aux programmes rattachés à l'EFP initial : 1 000 000 € en 2011.
Un fond est alimenté par les employeurs à hauteur de 380 € pour un ETP annuel par apprenti.

Coût moyen par apprenti

Coût total moyen par apprenti (rapport BIBB 2015 pour l'année 2012/2013) : 17 933 €
Dépenses publiques hors rémunération : 3 100 € (dont environ 70 % pris en charge par les Landër).
Coût rémunération entreprise après exonération des charges salariales et patronales : 9 800 par apprenti et par an.

5 600 € pour l'État.
La dépense moyenne annuelle pour l’employeur s’élève à 15 500 € par apprenti.

Données non disponibles

Rémunération

Le salaire est négocié entre les branches et les syndicats. Le salaire moyen pour un apprenti est de 700 €.
Toutefois le salaire étant en fonction des accords collectifs, il peut être très différent selon les métiers préparés (de 400 à 1500 € par mois)

Rémunération des apprentis par l'entreprise définie par les accords de branche
Rémunération croissante au fur et à mesure des années pour atteindre la dernière année en moyenne 80 % du niveau de rémunération d'un salarié (de 225 à 790 € pour la première année, de 541 € à 1468 € pour la dernière année, suivant les postes et l'ancienneté).

Le niveau de rémunération est négocié par branche.
Le salaire d'un apprenti s'élève à environ 40 % du salaire d'un adulte qualifié et augmente au fur et à mesure du parcours, pour atteindre 50 % du salaire d'un adulte

Avantages financiers

 

 

 

pour l'entreprise

La grande majorité des coûts supportés par les employeurs ne sont pas compensés par un dispositif d'aides publiques.
Les principaux dispositifs de financement concernent des aides pour la reprise d'une seconde formation professionnelle

Aide perçue par l'entreprise modulée en fonction de l'année d'apprentissage, exonération de cotisations d'assurance maladie durant les 2 premières années et exonération de cotisations accident du travail durant toute la durée de l'apprentissage

Aides de l'État pour compenser partiellement le coût d'accueil d'un apprenti.
La rémunération versée par l'entreprise durant le temps de formation en centre est remboursée par un fond de contributions obligatoires payées par les employeurs.

pour le jeune

Parmi les financements qui peuvent concerner les apprentis : la promotion des jeunes talents dans l'EFP, l'accompagnement des jeunes, l'appui aux résidences d'hébergement

Aides versées par le Service public de l'emploi  (Arbeitsmarktservice Österreich, AMS) ciblant des catégories de publics cibles

Données non disponibles

 

 

 

 

Pays

Finlande

Pologne

Espagne

Population totale

5 510 976

38 437 239

46 468 102

PIB par habitant (2016)

34 600

11 200

23 800

Smic (premier semestre 2017)

-

453 €

826 €

Principale caractéristique / différence avec le système français

La majorité des apprentis sont des adultes déjà engagés dans la vie active.

L'apprentissage concerne principalement les TPE, PME et artisans.
Les employeurs sont le plus souvent affiliés à une association professionnelle ou une chambre de métiers qui a aussi pour rôle de superviser la formation.

Une réforme a été implantée depuis 2013, pour développer un modèle de formation en apprentissage avec en moyenne la moitié du temps passé en entreprise (contre 20 % en moyenne dans le modèle initial de formation en alternance sous forme de stage), avec un déploiement par les Communautés autonomes.

Modalité
de l’alternance

Accès aux jeunes à partir de 15 ans et aux adultes. La majorité des apprentis sont des adultes déjà en emploi.
L'apprentissage permet : de préparer une certification professionnelle qualifiante, d'acquérir un niveau de qualification supérieur, de préparer une spécialisation.
Réforme en cours du système avec entrée en vigueur prévue au 01/01/2018 - axes d'évolution prévoyant le développement de l'apprentissage dans le supérieur.

Concernant l'apprentissage dans le cadre de l'EFP initial, 2 modalités principales :
- Apprentissage dans le cadre de la l'EFP initial niveau secondaire supérieur : accès aux jeunes de 16 à 18 ans,
- Apprentissage comme spécialisation pour l'exercice de certains métiers, accès aux jeunes à partir de 15 ans n'ayant pas complété leur cursus dans le secondaire initial

Implantation d'un nouveau système appelé "dual" en espagnol, (décret de novembre 2012) pour rénover l'ancien système de "contrat pour la formation et l'apprentissage".
Accès aux jeunes de 16 à 30 ans sans qualification professionnelle.

Gouvernance

État / Autorités locales / Partenaires sociaux

État / Collectivités locales / Employeurs

État / Communautés autonomes  / Partenaires sociaux

État

Le ministère de l'éducation et de la culture donne son approbation au cadre de certifications
Le Comité national de l'éducation (Finnish National Agency for Education, FINEDU) définit le contenu des cursus et les diplômes, qui sont tous accessibles par la voie de l'apprentissage, en concertation avec des experts
Le Ministère de l'emploi et des industries prend en charge le paiement des aides aux entreprises

Régulation par une loi interministérielle concernant la formation et la rémunération des apprentis
Le Ministère de l'éducation est en charge des cursus de formation professionnelle, en coopération avec d'autres ministères

Régulation par la loi de réforme éducative de décembre 2013
Dans le cas de certifications professionnelles le cursus est défini au niveau national.

région/collectivité

Les autorités locales, le plus fréquemment organisées sous la forme de groupements de municipalités, gèrent les centres d'enseignement. Ces centres donnent leur approbation au contrat établi entre l'entreprise et l'apprenti. 

Les autorités locales ont en charge la gestion des écoles

Implantation du système dual par les 17 régions en 2014.
Développement de projets de cursus selon la modalité duale par les Autorités éducatives des Communautés Autonomes (CCAA, régions)
Coordination des politiques régionales d'éducation à travers une Conférence sectorielle.

Partenaires sociaux

Dans chaque branche professionnelle un Comité de l'éducation et de la formation réunit représentants des employeurs et des salariés, pour définir les besoins en qualifications, le contenu des diplômes nationaux et les compétences requises.

Les chambres de l'artisanat et corporations ont un rôle de supervision de la formation en entreprise organisée dans le cadre de l'apprentissage.
Dans le cadre de l'EFP initiale niveau secondaire supérieur : l'examen final est organisé par la chambre de l'artisanat, dans le cas de l'apprentissage.
Dans le cadre de la préparation de métiers spécifiques : la réussite à un test final permet à l'apprenti de recevoir un certificat attestant des compétences acquises.

Accords entre les entreprises d'accueil et les gouvernements régionaux stipulant les modalités d'organisation, de financement, le contenu de la formation en alternance

Autres

Données non disponibles

Données non disponibles

Une Alliance pour l’apprentissage dual rassemble différentes parties prenantes, et promeut le nouveau système.

Nombre d'apprentis concernés

En flux : 19 400 nouveaux apprentis en 2014 (parmi lesquels 5900 jeunes dans le cadre en formation professionnelle initiale), pour un stock total de 56 880 personnes en apprentissage

nb jeunes apprentis dans le cadre de l'EFP initial, inscrits en établissement d'enseignement professionnel secondaire supérieur ("basic vocational schools - Zasadnicza skola zawodowa"),
en stock 2012-2013 : 112 000

16 199 étudiants en mode dual en 2015-2016 (contre 4292 lors de la première année du lancement du nouveau modèle en 2013).

Pourcentage de jeunes concernés

20 % des apprenants en cursus de formation professionnelle

part des jeunes apprentis sur l'ensemble des jeunes en lycées professionnels
établissement d'enseignement professionnel secondaire supérieur ("basic vocational schools - Zasadnicza skola zawodowa") : 61 %

Pour l’année 2015-2016, les apprenants en
apprentissage représentent 3 % des effectifs
de l’ensemble des scolaires en formation
professionnelle initiale.

Contrat

 

 

 

nature

Contrat de travail à durée déterminée.
Le contrat de travail, doit être validé par le bureau de l'apprentissage ou le centre de formation en apprentissage

Contrat de travail entre l'apprenti et l'employeur et contrat d'apprentissage précisant les conditions de la formation en emploi
L'apprenti a un double statut : de salarié et d'étudiant

Plusieurs types de contrats possibles, dont parfois l'usage du modèle de contrat de formation et d'apprentissage commun avec le mode de formation en alternance sous forme de stage.
Dans ce cas, le contrat est signé entre l’entreprise, le centre de formation et le département éducation de la Communauté autonome.

durée

de 1 à 3 ans

Apprentissage dans le cadre de la formation professionnelle : cursus de 2 à 3 ans en alternance en dans la filière professionnelle et de 4 ans dans le secondaire supérieur
Apprentissage comme spécialisation pour l'exercice d'un métier spécifique : de 3 à 6 mois

de 1 à 3 ans (possibilité de durée réduite à 6 mois dans le cas d'accords collectifs)

Formation  

 

 

 

Certifications
visées

Cursus définis au niveau national, 374 qualifications accessibles par l'apprentissage

77 diplômes accessibles par la voie de l'apprentissage parmi les 200 auxquels prépare la filière professionnelle ; 47 de ces diplômes concernent des métiers de l'artisanat

Environ 45 à 65 % des cursus conduisant à des diplômes professionnels sont définis au niveau régional.
Données nationales non disponibles.

 lieu et durée

de 70 à 80 % du temps de la formation en entreprise ; les apports théoriques complémentaires ont lieu en centres de formation professionnelle

apprentissage dans le cadre de l'EFP initial niveau secondaire supérieur : 2 jours en établissement scolaire et 3 jours en entreprise
Liberté du choix par l'apprenti du lieu et des modalités de la formation scolaire ; 88 % des apprentis choisissent un établissement d'enseignement professionnel secondaire supérieur ("basic vocational schools - Zasadnicza skola zawodowa")

apprentissage en centre de formation : 25 % minimum de la durée de travail durant la première année de l'apprentissage, puis 15 % les deuxième et troisième année
Temps de formation réparti entre formation sur le lieu de travail et en centre de formation
Dans le cas du nouveau système d’apprentissage en mode dual, l’entreprise contribue au minimum à un tiers du temps de la formation prévue durant le parcours.

Accompagnement (tuteur)

Le temps passé sur le lieu de travail l'est sous la tutelle d’un ou de plusieurs instructeurs.
Les qualifications et capacités d'encadrement des instructeurs varient d'une entreprise à l'autre.

Données non disponibles

Le modèle type de contrat d'apprentissage précise le rôle du tuteur, et la procédure d'habilitation

Financement

 

 

 

Financeurs

131 millions dépensés par le gouvernement en 2011 qui couvrent 77 % des dépenses liées à la formation en apprentissage + 39 millions à la charge des régions

Données non disponibles

Les centres de formation sont financés au niveau national par le ministère de l’Éducation, et sélectionnés dans le cadre d’appel d’offres gérés par les Communautés autonomes.

Coût moyen par apprenti

Dépense moyenne liée au coût de la formation prise en charge par des financements publics : 4 120 € (2011).
Coût moyen par apprenti en formation professionnelle initiale de 6000 € et pour un apprenti en perfectionnement de 3300 €.

Données non disponibles

Données non disponibles

Rémunération

Rémunération telle que définie par les conventions collectives, pour le temps de travail en entreprise, incluant congés payés et heures supplémentaires.

Rémunération perçue pour un montant compris entre 4 et 6 % du salaire moyen mensuel.

Rémunération non systématique, dépend du
type de contrat établi. Dans le cas d’un contrat de formation et d’apprentissage, le salaire est proportionnel au temps de travail et ne peut pas être inférieur au salaire minimum (environ 4 € / heure).

Avantages financiers

 

 

 

pour l'entreprise

Aides à l'employeur pour compenser le coût de la formation sur le lieu de travail, lorsqu'il s'agit d'apprentis engagés dans le cas d'un cursus de formation initiale : montant de 800 € pour la première année d'apprentissage, 500 € la seconde année et 300 € la troisième année.
L'employeur peut également bénéficier d'aides pour les coûts salariaux dans le cas où il emploie un apprenti précédemment chômeur, pour un montant à partir de 32,66 € par jour.

Prise en charge partielle du coût salarial des tuteurs en entreprises
Prise en charge du coût de la formation et remboursement possible à l'employeur de la rémunération versée à l'apprenti

Dans le cas d’un contrat de formation et d’apprentissage, les entreprises de moins de 250 employés bénéficient d’une réduction de 100 % de leurs cotisations sociales, et celles de plus de 250 salariés d’une réduction de 75 %.
Depuis 2016, les entreprises bénéficient également d’un financement de 1,5 euro par heure de tutorat (2 € pour celles de moins de 5 salariés), pour un maximum de 40 heures mensuelles.

pour le jeune

Éligibilité à une allocation journalière de 15 € durant le temps en centre de formation, plus 17 € s'il a des enfants mineurs à charge, prise en charge des coûts éventuels de transport et frais de séjours de 8 € (forfait si nuitée sur place).

Prise en charge des frais d'habillements quand le poste requiert des vêtements et chaussures spécifiques

Les employés dans le cadre d’un contrat de formation et d’apprentissage bénéficient d’une exonération de 100 % de leurs cotisations sociales.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le contrat d’apprentissage présente la particularité d’être fortement encadré par des textes législatifs et réglementaires et de présenter de fortes spécificités au regard du droit du travail de droit commun. Le statut des apprentis, la conclusion, l’exécution du contrat et les aides associées font l’objet d’une réglementation relevant tout à la fois du code du travail, du code de l’éducation et de celui des impôts.

En matière de droit du travail de l’apprenti, l’apprenti dispose des mêmes droits que les autres salariés dans l’entreprise dans la mesure où ils ne sont pas contraires à ceux qui sont liés à sa situation de jeune travailleur en formation, d’où la mise en place d’adaptations.

Ainsi le contrat d’apprentissage comprend de très nombreuses particularités qui ne sont pas toujours comprises  par les jeunes et apparaissent complexes et sont donc souvent mal appliquées par les employeurs. Cette complexité peut avoir pour conséquence de freiner l’embauche d’apprentis Parmi les principales différences entre les contrats de travail de droit commun et le contrat d’apprentissage figurent : l’ouverture du contrat d’apprentissage pour les 16-25 ans ; la rémunération de l’apprenti assise sur un pourcentage du salaire minimum de croissance (SMIC) comprise entre 25 % et 78 % en fonction de l’âge et de l’année d’exécution du contrat ; une durée d’enseignement théorique obligatoire en centre de formation d’apprentis (CFA) d’au moins 400 heures par an en moyenne sur la durée du contrat ; un formalisme du contrat imposé et qui en cas de non-respect sera sanctionné par le juge ; un contrôle en amont du contrat par les chambres consulaires et les DIRECCTE (procédure d’enregistrement du contrat). En outre, le contrat d’apprentissage n’ouvre pas droit à licenciement mais à une possibilité de demande de résiliation devant le conseil de prud’hommes (pour manquements répétés des obligations de l’apprenti). Il n'existe pas  de période d’essai mais une période probatoire durant laquelle chaque partie peut mettre fin unilatéralement au contrat.

À ces règles spécifiques s’ajoutent un régime particulier pour les apprentis mineurs.

Cette densité normative spécifique est de nature à constituer un frein à l’embauche d’apprentis par les employeurs.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’objectif de la réforme proposée consiste à réexaminer en profondeur le régime juridique du contrat d’apprentissage, afin de rapprocher celui-ci du droit commun des contrats de travail tout en assurant le respect des règles d’ordre public particulières telles que celles relatives à la protection des jeunes travailleurs  (travail de nuit, travaux dits « dangereux »). En agissant de la sorte, associée à une simplification du régime des aides à l’apprentissage, la charge administrative imposée à l’employeur et la gestion administrée du contrat d’apprentissage pesant sur les entreprises se verraient considérablement allégées, afin de faciliter l’embauche des jeunes en apprentissage.

Cette ambition a été confirmée par la concertation relative au développement de l’apprentissage[18] qui s’est tenue, avec l’ensemble des acteurs du champ, du 10 novembre 2017 au 30 janvier 2018.

Il ressort ainsi du rapport de synthèse de cette concertation les propositions de rapprochement du droit commun suivantes :

3.         Options possibles et dispositif retenu

Les dispositions portées par le projet de loi concernant le contrat d’apprentissage visent à le rapprocher du droit commun des contrats de travail :

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Cette refonte implique la modification de plusieurs articles du code du travail, l’abrogation des articles relatifs à la procédure d’enregistrement (articles L. 6224-2 à L. 6224-8 du code du travail) et la création d’un nouvel article  relatif au maître d’apprentissage (article L. 6223-8-1 du code du travail). 

4.2.  Impacts économiques et financiers

Cette réforme simplifie très fortement les formalités administratives liées à l’embauche d’un jeune en apprentissage pour les entreprises et réduit le risque juridique de contestation du contrat devant le juge prud’homal.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Un régime propre aux employeurs publics d’apprentis est fixé à l’article L. 6227-12 du code du travail. Ce régime consiste à appliquer l’ensemble des dispositions relatives à l’apprentissage sauf exceptions spécifiques (incompétence de l’inspection du travail, par exemple).

Des effets positifs sont attendus sur les collectivités territoriales en matière d’allègement de charges administratives.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

La suppression de la procédure d’enregistrement permettra aux services de l’État et aux chambres consulaires de se libérer d’une contrainte procédurale portant sur 280 000 contrats par an.

4.5.  Impacts sociaux

Au 31 décembre 2017, 22,3 % des jeunes de 15 à 24 ans n’occupaient pas d’emploi. Ce taux est de 16,1 % dans l’union européenne. Le développement, tant quantitatif que qualitatif, de la formation en apprentissage vise à favoriser l’accès à la qualification des jeunes et leur insertion dans l’emploi.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions relatives à réforme de l’enregistrement au profit d’un dépôt auprès des opérateurs de compétences entrent en vigueur au 1er janvier 2020.

Le nouveau statut des apprentis entrera en vigueur au 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Les dispositions prévues dans le projet de loi nécessitent les textes d’application suivants :

Article 10 - Orientation

1.         État des lieux

En créant le service public régional d’orientation (SPRO), la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a instauré un pilotage dual État-région de l’orientation tout au long de la vie. A l’État revient la responsabilité de définir au niveau national la politique d’orientation des élèves et des étudiants, et de la mettre en œuvre avec l’appui des centres d'information et d'orientation (CIO), des services communs universitaires d'information et d'orientation (SCUIO) et de l’office national d'information sur les enseignements et les professions (ONISEP). La région est chargée de la coordination des autres organismes participant au SPRO, ainsi que de la mise en place du conseil en évolution professionnelle et d’un réseau de centres de conseil sur la validation des acquis de l’expérience.

À la suite de l’accord-cadre national relatif à la mise en œuvre du SPRO signé entre l’État et l’association des régions de France (ARF) le 28 novembre 2014, un processus de signature de conventions État/région a été enclenché à l’échelon régional. Cependant, plus de trois ans après cet accord, la mise en œuvre du SPRO n’est pas partout effective et le pilotage État-région qui caractérise le SPRO est aujourd’hui largement remis en cause. Le positionnement ambigu dévolu aux régions et le fait que l’orientation des publics scolaires et universitaires échappant à leur compétence ne facilitent pas la mise en place du SPRO et ne favorisent pas la diffusion auprès des élèves et de leur famille d’une information sur l’environnement économique, les métiers et les formations professionnelles ancrée dans les réalités du territoire régional.

La politique d’orientation des élèves définie par l’État se caractérise par une approche éducative de l’orientation, développée dans les apprentissages disciplinaires. Depuis la rentrée 2015, cette approche est inscrite dans le cadre du parcours Avenir proposé à tous les élèves de la classe de 6e à la classe terminale. La découverte du monde économique et professionnel est le premier objectif de ce parcours qui vise aussi le développement du sens de l’engagement et de l’initiative ainsi que l’élaboration du projet scolaire et professionnel.

Après deux années de mise en œuvre, il s’avère que le parcours Avenir peine à s’inscrire dans l’action pédagogique menée auprès des élèves. Sa dimension liée à la découverte du monde professionnel est en particulier insuffisamment développée, ce qui ne permet pas aux jeunes et aux familles de formuler des choix éclairés contribuant à un parcours de formation réussi et situé à la convergence des emplois de demain et des talents et aspirations personnels. Le positionnement des professeurs à l’égard des missions d’accompagnement des élèves pour leur orientation n’est pas encore suffisamment affirmé. On relève souvent que leurs représentations de l’enseignement supérieur et du monde professionnel pourraient être enrichies et mieux tenir compte des évolutions récentes.

Compte tenu de ces constats et de l’importance des enjeux pour chaque individu comme pour la Nation tout entière, il apparaît nécessaire d’envisager des changements importants. Ces changements sont souhaités par les régions qui demandent de pouvoir intervenir de manière plus efficace dans le champ de l’orientation, notamment à destination des élèves, dès le collège, et des étudiants, en intégrant la mission d’information sur les métiers et les évolutions de l’emploi dans les missions du SPRO. Cette requête s’accompagne par ailleurs d’une demande de pilotage de l’ensemble de l’enseignement professionnel.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

La modification des articles L. 6111-3 du code du travail, L. 313-6 et L. 331-7 du code de l’éducation, ainsi que de nouveaux articles, non codifiés, prévoyant d’une part le transfert de compétences actuellement exercées dans le cadre d’un établissement public (ONISEP), d’autre part le transfert des services et agents en charge des missions transférées, nécessite un vecteur législatif. Le législateur est seul compétent pour fixer les conditions de transfert des missions, des services et des agents à destination des collectivités territoriales.

2.2.  Objectifs poursuivis

Une mise en complémentarité cohérente des différents acteurs de l’orientation doit permettre de renouveler en profondeur un système de l’orientation qui, en dépit des réformes récentes (création du service public régional d’orientation, instauration du droit au retour en formation, actions de lutte contre le décrochage scolaire notamment) ne donne pas entière satisfaction, car trop fragmenté et éloigné des réalités régionales. Un nouveau partage des compétences État/région pour une meilleure éducation à l’orientation dès le collège peut créer les conditions d’une meilleure efficacité.

Afin de donner aux régions plus de responsabilité concernant l’information des élèves sur les métiers et les formations, et de mieux ancrer cette information dans le contexte local en prenant pleinement en compte les caractéristiques de l’offre de formation régionale et les besoins économiques locaux, il est prévu de transférer certaines missions de l’office national d’information sur les enseignements et les professions (ONISEP), notamment des missions exercées par ses implantations locales, les délégations régionales.

Le modèle actuel qui repose sur un établissement national pilotant des délégations régionales en lien avec les autorités académiques, mais sans liaison effective avec les régions est un modèle qui s’essouffle. Pour lui donner un nouvel élan, il convient donc de mettre en place une politique partenariale forte entre l’ONISEP et les régions, à la fois en renforçant le rôle de ces dernières dans l’action de l’office national et en leur confiant l’entière responsabilité des actuelles délégations de l’office au niveau régional.

Le projet de loi prévoit ainsi de renforcer l’implication des régions dans la production et la diffusion de l’information à l’attention des publics scolaires et universitaires portant sur les métiers et les formations, d’une part en instaurant expressément un lien entre l’office national et les régions en matière de diffusion de la documentation, d’autre part, en transférant aux régions les missions actuellement exercées par les délégations régionales de l’ONISEP en matière de diffusion régionale de la documentation et d’élaboration des publications à portée régionale.

L’État pourra mettre à la disposition des régions des agents exerçant dans les services et établissements relevant du ministre chargé de l’éducation nationale, avec l’accord des intéressés et renforcer ainsi l’exercice par les régions de la mission d’information des élèves et des étudiants sur les formations et les métiers.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Le transfert aux régions de la responsabilité première en matière d’information sur les métiers et les formations ne saurait priver les personnels de l’État (PsyEn, directeurs de CIO, professeurs, professeurs principaux) de concourir à ce travail d’information qui fait partie intégrante de leurs missions. Aussi l’option consistant à transférer aux régions les structures et les personnels (CIO, directeurs, PsyEn et personnels administratifs) en charge de ces missions n’a pas été retenue.

La dimension éducatrice du conseil en orientation dépasse en effet la seule information sur les métiers et les filières délivrée aux jeunes. Il s’agit aussi de faire connaître les conditions d’admission ou d’affectation dans les formations et de susciter une démarche réflexive des élèves favorisant la connaissance de leurs capacités, aptitudes, intérêts et aspirations. L’accompagnement des élèves dans l’élaboration de leur projet d’orientation nécessite également une connaissance précise de leur profil qui relève tout particulièrement du rôle des enseignants et des PsyEn.

3.2.  Dispositif retenu

Les dispositions législatives prévues sont les suivantes :

L’article L. 6111-3 du code du travail précise que la région organise des actions d’information sur les métiers et les formations en direction des élèves et des étudiants, notamment dans les établissements scolaires et qu’avec le concours de l'Office national d'information sur les enseignements et les professions, elle élabore la documentation de portée régionale sur les enseignements et les professions et, en lien avec les services de l’État, diffuse cette information et la met à disposition des établissements de l’enseignement scolaire et supérieur. En outre, le conseil en évolution professionnelle est supprimé.

L’article L. 313-6 du code de l’Éducation définit le rôle de de l’office national d’information sur les enseignements et les professions. Le lien avec les régions est ajouté dans le cadre de la mission de l’office relative à l’élaboration et la diffusion d’une documentation nécessaire à l’orientation scolaire et professionnelle.

Par ailleurs, il est inséré au projet de loi un article non codifié qui prévoit  le transfert aux régions des missions exercées par les délégations régionales de l’ONISEP en matière de diffusion de la documentation ainsi que d’élaboration des publications à portée régionale relatives à l’orientation scolaire et professionnelle des élèves et des étudiants, ainsi que la possibilité de bénéficier dans le cadre d’une expérimentation d’agents volontaires exerçant dans les services et établissements relevant du ministre chargé de l’éducation nationale.

Le projet de loi prévoit enfin, à l’article L. 331-7 du code de l’éducation,  de mettre en conformité la nouvelle appellation des conseillers d’orientation psychologues en psychologues de l’éducation nationale suite à la parution du décret n° 2017-120 du 1er février 2017 portant dispositions statutaires relatives aux psychologues de l'éducation nationale.

Ce projet de loi sera complété par des dispositions de niveau réglementaire. Celles-ci viseront notamment à renforcer la participation des établissements scolaires et d’enseignement supérieur à la mise en œuvre des actions d’information sur l’environnement économique, les métiers et les filières de formation, définies et organisées par les régions.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Sans remettre pas en cause les compétences de l’État en matière de décisions d’orientation dans les différentes voies de formation et d’affectation dans les établissements publics locaux d’enseignement, les dispositions prévues doivent permettre de renforcer les actions des régions en matière d’information sur les métiers et les filières tout en s’inscrivant en complémentarité des actions de l’État.

Elles se traduiront par une modification de la rédaction des articles L. 6111-3, L. 313-6 et L. 331-7 du code du travail.

4.2.  Impacts sur les collectivités territoriales

Par un lien plus étroit avec l’office national d’enseignement sur les enseignements et les professions (ONISEP) et une nouvelle responsabilité de pilotage des actuelles délégations régionales de l’office, qui seront détachées de l’Office et perdront leur dénomination, les régions pourront définir et mettre en œuvre les modalités d’information des élèves et des étudiants sur les métiers et les formations en tenant compte des spécificités de l’offre de formation et des besoins économiques régionaux.

Les dispositions prévues par le projet de loi viennent ainsi compléter les compétences déjà dévolues aux régions en matière de pilotage de la concertation entre tous les acteurs et opérateurs régionaux dans le domaine de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelle, notamment dans le cadre de l’élaboration du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles. Ce faisant, les actions d’information pourront être définies de façon progressive et continue, du collège à la vie active, au sein d’un service public régional de l’orientation plus cohérent qui ne cloisonne pas l’information des publics scolaires et étudiants de celle des publics de salariés ou de demandeurs d’emploi.

Les régions pourront bénéficier dans le cadre de l’expérimentation d’agents volontaires exerçant dans les services et établissements relevant du ministre chargé de l’éducation nationale qui pourront renforcer leur action. Il pourra s’agir, par exemple, de psychologues de l’éducation nationale ayant le grade de directeur de CIO.

Enfin, les nouvelles dispositions réglementaires qui feront suite à la loi fixeront un cadre permettant l’ouverture de tous les établissements, collèges, lycées et établissements d’enseignement supérieur, aux actions d’information définies et organisées par les régions.

4.3.  Impacts sur les entreprises

Mobilisés par les régions pour délivrer une information ancrée dans les réalités de la vie économique locale sur les métiers et leurs évolutions attendues ainsi que sur les formations professionnelles et leurs débouchés, les représentants du monde économique et professionnel auront l’opportunité de se rapprocher de façon plus coordonnée et efficace des établissements scolaires et d’enseignement supérieur et ainsi toucher un plus grand nombre d’élèves et d’étudiants. En leur permettant de faire découvrir plus largement leurs activités et leurs besoins en termes de ressources humaines, on soutiendra le dynamisme économique local en favorisant la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des entreprises et en contribuant ainsi à leur compétitivité.

4.4.  Impacts sur les établissements scolaires et les particuliers

Les liens plus étroits entre les établissements scolaires et d’enseignement supérieur et le monde économique et professionnel, créés par l’action des régions relative à l’information sur les métiers et les formations professionnelles, auront des effets à la fois sur les établissements, et sur les élèves, les étudiants et leur famille.

La région pourra faire des interventions dans ces établissements dans le cadre de l’horaire dédié inscrit à l’emploi du temps des élèves au collège et au lycée (54 heures annuelles), sous la supervision des professeurs principaux et des PsyEN.

Ce rapprochement permettra en effet de mieux inscrire les actions d’information sur les métiers et les formations professionnelles dans le cadre de l’action pédagogique des établissements. Il favorisera en outre la construction de représentations réalistes et exhaustives sur le monde professionnel chez les personnels en charge de l’accompagnement des élèves et des étudiants.

Au final, ce rapprochement bénéficiera aux élèves, aux étudiants et à leur famille puisqu’il contribuera à leur permettre de faire des choix éclairés en tenant compte des caractéristiques de l’offre de formation régionale et de ses perspectives d’insertion professionnelle.

4.5.  Impacts sur les services administratifs

Le transfert aux régions des missions actuellement exercées par les délégations régionales de l’ONISEP nécessitera à court terme le transfert des services et des personnels chargés de ces missions, tant en termes d’emploi que de personnes physiques. Les délégations régionales de l’ONISEP perdront leur dénomination actuelle et seront détachées de l’Office national. Il appartiendra aux régions de définir les structures d’accueil de ces services. Les conditions de ce transfert sont régies par des dispositions du projet de loi, qui renvoie aux modalités de « droit commun » prévues par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles en matière de mise à disposition et de transfert des agents, adaptées au cas d’espèce en tant que de besoin. Plusieurs textes d’application, de niveau réglementaire, devront être publiés.

4.6.  Impacts budgétaires

Les agents des délégations régionales de l’ONISEP, qui mettent en œuvre les compétences transférées aux régions seront mis à disposition ou transférés selon les modalités prévues aux articles 80 et 81, au I de l'article 82, au premier alinéa du I et aux II à VIII de l'article 83, et aux articles 84 à 87 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

Dans ce cadre, le volume d’emplois transférable aux régions depuis les délégations régionales de l’ONISEP serait d’environ 200. Un décret devra préciser le cadre dans lequel s’inscriront les échanges de données entre les services de l’État et les régions.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.2.      Textes d’application

La mise en œuvre de cet article nécessitera des décrets d’application définissant notamment les modalités de répartition entre les collectivités bénéficiaires du droit à compensation des charges d'investissement transférées et les modalités de l’expérimentation visant à conclure une convention fixant les modalités de participation des services et établissements de l’État au service public régional de l’orientation pour l’exercice de la mission d’information des élèves et des étudiants sur les formations et les métiers, ainsi que de son évaluation.


Article 11 - Nouveau régime juridique des centres de formation d’apprentis

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

La compétence de droit commun en matière de formation professionnelle continue et d’apprentissage a été transférée aux régions par la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État. La région définit donc et met en œuvre la politique de l’apprentissage. Pour ce faire, elle s’appuie sur les centres de formation d’apprentis. L’article L. 6211-2 du code du travail précise, en effet, que l'apprentissage est une forme d'éducation alternée dont les  enseignements sont dispensés pendant le temps de travail dans un centre de formation d'apprentis ou une section d'apprentissage. Le centre de formation d'apprentis (CFA) est donc le seul habilité à former des apprentis dans le cadre d’un contrat d’apprentissage. Son activité est par ailleurs entièrement et exclusivement dédiée à l’apprentissage. Ainsi, un titre III du livre II est dédié aux centres de formation d’apprentis et sections d’apprentis.

1.1.1.      Concernant la structure autorisée par la région à dispenser de l’apprentissage

Les conditions de création d’un centre de formation d'apprentis (CFA) sont, à ce jour, bien différentes de celle d’un organisme de formation professionnelle ordinaire. En effet, bien que le législateur n’ait imposé aucune forme juridique pour l’existence d’un CFA, son existence légale nécessite cependant un support juridique : l’organisme gestionnaire. C’est cet organisme gestionnaire qui signe une convention avec la région pour la création du CFA. Cette convention est donc l’acte constitutif qui fixe les modalités d’organisation administrative, pédagogique et financière du CFA.

La région autorise la création d’un CFA en fonction des orientations définies dans le contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles pour sa partie consacrée aux jeunes.

Le CFA est le lieu où est dispensé l’enseignement général et technologique à l’apprenti. Cet enseignement peut aussi être dispensé dans des établissements recourant à des modalités différentes de celles du CFA.

Ainsi, la section d’apprentissage répond à un besoin précis pour un cycle de formation. Plus simple à mettre en place qu’un CFA, elle est mise en œuvre par un établissement d’enseignement ou de formation.

Par ailleurs, l’unité de formation par apprentissage (UFA) permet à plusieurs établissements de s’appuyer, d’un point de vue administratif et financier, sur la structure d’un CFA pour mettre en œuvre la formation, tout en gardant la responsabilité pédagogique.

L’établissement de formation conventionné, permet à un établissement de formation de s’appuyer, d’un point de vue administratif, financier et pédagogique, sur la structure d’un CFA pour mettre en œuvre la formation. Cette modalité est idéale pour un besoin de formation avec petit effectif, ou pour plusieurs établissements proposant une même formation afin de déléguer à un seul CFA les obligations administratives et les relations avec la région.

Ces deux dernières modalités d’organisation (UFA et établissement de  formation conventionné) permettent de mettre en œuvre des formations dans un établissement autre que le CFA, et donc d’élargir l’offre de formation proposée aux apprentis, de faire suivre la formation aux apprentis avec d’autres publics, d’optimiser et de mutualiser les structures des différents établissements.

Enfin, une entreprise habilitée par l’inspection de l’apprentissage peut aussi participer  à mise en œuvre de l’enseignement général et technologique. Elle s’appuie, d’un point de vue administratif, financier et pédagogique, sur la structure d’un CFA pour mettre en œuvre la formation. Cette modalité d’organisation convient pour un besoin de formation précis exprimé par une entreprise.

Quelle que soit la modalité pratique choisie, la région est la seule, in fine, à autoriser la dispensation d’une formation en apprentissage.

1.1.2.      Concernant l’offre de formation régionale

En matière de planification de l’offre de formation, chaque année, après accord du Recteur, la région arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales, conformément aux choix retenus par convention et aux décisions d'ouverture et de fermeture de formations par l'apprentissage qu'elle aura prises. Cette carte est mise en œuvre par la région et par l'État dans l'exercice de leurs compétences respectives, notamment celles qui résultent de l'article L. 211-2 du code de l’éducation et de l'article L. 814-2 du code rural et de la pêche maritime. Elle est communiquée aux organismes et services participant au service public de l'orientation. Les autorités académiques mettent en œuvre les ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale sous statut scolaire en fonction des moyens disponibles et conformément au classement par ordre de priorité établi. Enfin, la carte régionale fait l’objet d’une concertation en comité régional de l’emploi, formation et orientations professionnelles (CREFOP). Celui-ci est l’instance quadripartite dont le rôle en région est d’organiser la concertation entre les acteurs des politiques d’emploi, de formation et d’orientation professionnelles pour coordonner leurs actions, assurer en particulier la cohérence des programmes de formation, des politiques d’emploi et de formation et des programmes d’intervention du Fonds social européen (FSE).

 

1.1.3.      Panorama des centres de formation d’apprentis en France

Le système français est constitué de 995 centres de formation d'apprentis (CFA) répartis sur 3 057 sites de formation. 60 % des CFA ont un seul site de formation.

L’ensemble des CFA dispensent 2 732 formations différentes, soit 14,5 formations en moyenne par CFA. 16 % des CFA proposent uniquement des formations du supérieur, 25 % uniquement des formations du secondaire et 59 % à la fois des formations du secondaire et du supérieur[19].

La répartition territoriale des  CFA est la suivante :

1.2.  Éléments de droit comparé[20]

Le rapport pour le développement de l'apprentissage[21] pointe le fait que les modèles étrangers qui affichent de bonnes performances en matière d’apprentissage concilient une implication forte des branches et des partenaires sociaux dans la gouvernance et le financement du système avec un rôle majeur des pouvoirs publics pour promouvoir l’apprentissage auprès des jeunes, les accompagner dans leur parcours et évaluer les résultats de cette politique publique. L’implication forte des branches professionnelles dans la nouvelle architecture de l’apprentissage français devrait également être source de dynamisme.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Lors de son discours d’ouverture de la concertation sur l’apprentissage, la ministre du travail a notamment illustré la lourdeur du système apprentissage par le manque de réactivité à proposer une formation répondant à un besoin exprimé par une entreprise.

Cette lourdeur est inhérente aux modalités juridiques actuellement en vigueur pour dispenser une formation en apprentissage.

En effet, l’absence de personnalité juridique du centre de formation d'apprentis (CFA) et son rattachement obligatoire à un organisme gestionnaire, alourdit le processus de prise de décision et notamment la création d’un CFA. Ainsi une même entité regroupe des acteurs divers avec des motivations et des objectifs qui peuvent parfois différer.

À cette spécificité de structure, s’ajoute un processus de création d’un CFA considéré de façon quasi unanime comme lourd, non réactif, qui s’avère être un frein au développement de l’apprentissage en empêchant de répondre rapidement à la demande des entreprises.

Par ailleurs, les autres différentes modalités juridiques permettant de proposer une formation par apprentissage (UFA, section d’apprentissage, etc.) ne s’avère pas plus réactive dans leur mise en œuvre tout en rajoutant une complexité juridique au dispositif.

Enfin, quand bien même un CFA existe, il n’est pas autorisé à ouvrir une nouvelle formation sans avoir obtenu l’accord de la région. Accord intervenant après avis du comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CREFOP) votant la carte initiale des formations.

La nature juridique même des CFA et le processus de régulation territoriale de l’offre sont un frein à un développement efficient de l’apprentissage. Permettre au CFA de répondre aux besoins en compétences des entreprises sans être dépendant d’une décision administrative préalable participe à dynamiser l’apprentissage. Cette ambition correspond à une volonté politique forte de développer massivement l’offre en apprentissage, que ce soit par l’action des CFA eux-mêmes, qui pourront se développer sans limite administrative, par celle des organismes de formation, qui pourront facilement « ouvrir » des CFA, par celle des entreprises, qui pourront aisément « ouvrir » des CFA d’entreprises, ou par celle des branches professionnelles.

Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2014 sur les freins non financiers au développement de l’apprentissage[22] pointait que la gouvernance de la politique de l’apprentissage implique un trop grand nombre d’acteurs : les entreprises qui embauchent les jeunes et financent leur formation via la taxe d’apprentissage, l’État pour ce qui concerne son cadre juridique et pédagogique, les conseils régionaux en charge de déterminer les objectifs de la politique régionale de l’apprentissage, de la régulation des flux et du financement des CFA, les partenaires sociaux pour ce qui concerne la promotion de l’apprentissage dans les outils de gestion de l’emploi et de la formation des branches professionnelles et des entreprises.

Cette imbrication des compétences impose de rechercher des cadres efficaces de concertation qui permettent d’une part, de faire émerger des objectifs partagés, et d’autre part, de conserver la cohérence nationale de cette politique décentralisée, qui participe de la politique éducative et de l’emploi.

Bien que dans le domaine de la « gouvernance de la politique en matière de formation professionnelle » des progrès notables ont été apportés depuis la loi du 5 mars 2014 par l’instauration des CREFOP et des comités paritaires interprofessionnels régionaux pour l'emploi et la formation professionnelle (COPAREF),  les entreprises et les branches restent trop peu mobilisées.

En transformant le système, le gouvernement souhaite passer d’un système administré à un système de libre développement des CFA, correspondant à la demande des entreprises et aux attentes des jeunes.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent projet de loi se donne pour objectif de simplifier la création de centres de formation d'apprentis (CFA) en ne soumettant plus leur existence et leurs formations à une autorisation administrative préalable. L’allègement des procédures permettra ainsi de rapprocher dans un délai nettement amélioré l’offre de formation à la demande des entreprises. 

L’objectif est de rendre le système beaucoup plus réactif aux attentes du monde économique. Ainsi, avec ce nouveau modèle, les CFA pourront désormais adapter leurs formations en fonction de la demande des entreprises, de façon réactive sans être soumis à une autorisation administrative. Ils pourront ainsi se développer en fonction des besoins en compétences des entreprises avec une garantie de financement pour chaque jeune formé.

Il s’agit également de simplifier les modalités de fonctionnement d’une CFA et de le rapprocher d’un organisme de formation pour favoriser les mutualisations entre les différents publics d’alternants.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

La loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a fait le choix de réformer la gouvernance de l’apprentissage dans les régions en créant les comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle issue de la fusion des comités de coordination régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) et des conseils régionaux de l’emploi.

En effet, une gouvernance emploi/orientation/formation professionnelle a été unifiée et fondée sur des instances et instruments contractuels rénovés. Ces instances de concertation ont cependant participé à rallonger les délais dans la prise de décision incompatible avec la réactivité aujourd’hui recherchée sans pour autant permettre une meilleure représentation des branches et entreprises.

3.2.  Option retenue

Le projet de loi propose un nouveau modèle juridique applicable aux centres de formation d'apprentis (CFA).

3.2.1.      Suppression de l’autorisation administrative d’ouverture et de développement des CFA

Il est proposé que les centres de formation d'apprentis (CFA) soient dorénavant affranchis d’une procédure longue et préalable à leur création se clôturant par la signature d’une convention avec la région posant le cadre de leur intervention en matière d’apprentissage. Ils seront, comme, tout organisme de formation professionnelle, présupposés être en capacité de former, et autoriser à s’ouvrir et à proposer toute formation en apprentissage qui leur semble correspondre aux besoins du territoire et du secteur. La région n’interviendra plus dans le champ de leur création ni dans celui des formations proposées. Leur création sera libre et sans contrôle a priori.

3.2.2.      Ouverture de centres de formation d’apprentis par tout organisme de formation déclaré, certifié qualité

Il est proposé que le nouveau statut des centres de formation d'apprentis (CFA) soit le même que celui d’un organisme de formation continue qui étendrait son champ d’action à l’apprentissage par un acte volontaire : la déclaration d’activité. Il deviendra un opérateur de formation professionnelle qui pourrait opter de dispenser, soit de la formation continue, soit de la formation en apprentissage, soit les deux.

Un nouvel organisme souhaitant former en apprentissage devra dorénavant simplement déposer une demande de déclaration d’activité dès la conclusion du premier contrat d’apprentissage.

Pour les CFA actuels, deux solutions sont envisagées:

Le pendant à cette liberté d’ouverture est la mise en place en parallèle d’une certification qualité. L’exigence de qualité des actions dispensées par les CFA reste un réel enjeu. Ainsi, la loi leur impose de veiller à respecter un référentiel national fixant des indicateurs qualités.

3.2.3.      Le centre de formation d’apprentis acquiert un statut juridique d’organisme de formation avec des obligations de droit commun auxquelles s’ajoutent des sujétions particulières pour répondre aux spécificités de l’apprentissage

Outre les obligations de droit commun des organismes de formation professionnelles qui s’appliqueront à eux, les centres de formation d'apprentis (CFA) seront soumis à des sujétions particulières d’ordre public, l’apprentissage relevant de la formation initiale qui appelle à ce titre des sujétions particulières.

Celles-ci dépassent le champ de la simple formation : mise en place d'un conseil de perfectionnement ; exigence d’un comptabilité séparée ; le maintien d’un certain nombre de missions particulières (assister les postulants à l'apprentissage dans leur recherche d'un employeur, et les apprentis en rupture de contrat dans la recherche d'un nouvel employeur, en lien avec le service public de l'emploi) ; accompagnement, en lien avec le service public de l'emploi, en particulier avec les missions locales, des apprentis pour prévenir ou résoudre les difficultés d'ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d'apprentissage.

Les organismes de formation professionnelle souhaitant former en apprentissage devront modifier l’objet de leur statut pour faire apparaître clairement leur volonté d’intégrer  la formation en apprentissage à leur activité. Cela permettra d’assurer une réelle transparence sur les types de formations dispensées par les organismes et garantira une reconnaissance à former en apprentissage entraînant ainsi des sujétions particulières. 

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La simplification se concrétise notamment par le rapprochement du statut juridique des centres de formation d'apprentis (CFA) et des organismes de formation et permet, à terme, une bien plus grande réactivité dans la réponse formation attendue par le monde économique.

Concrètement, la présente mesure se traduira par la modification de la rédaction des articles L. 6111-8, L. 6211-2, L. 6211-4, L. 6211-5 du code du travail. Le titre III du Livre II de la sixième partie du code du travail est renommé et son contenu modifié. La rédaction du titre V du Livre III du code du travail est également modifiée. Le titre V du Livre II de la sixième partie du code du travail sera abrogé.

La rédaction de l’article L. 241-9 du code de l’éducation sera modifiée.

4.2.  Impacts économiques et financiers

Les dispositions ont pour objectif premier de rendre l’offre de formation en apprentissage plus adaptée aux besoins des entreprises et de faciliter les  ouvertures de formation. Il est attendu un développement massif des formations en apprentissage proposé aux jeunes et aux entreprises.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

L’impact sur les collectivités territoriales s’intègre dans la mise en cohérence globale des acteurs de la gouvernance de l’apprentissage et, plus généralement, de la formation professionnelle[23], au regard de l’ensemble des compétences exercées par lesdites collectivités.

Ainsi, l’intervention des régions sur les centres de formation d'apprentis (CFA) est recentrée sur leurs compétences en matière d’aménagement du territoire et de promotion des innovations.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

L’impact sur les services régionaux de contrôle de la formation professionnelle (SRC) au sein directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi DIRECCTE (SRC) sera modéré, du fait du nombre de centres de formation d'apprentis (CFA) actuellement en activité. En effet, les SRC sont en charge de l’enregistrement des déclarations d’activité des organismes de formation. Ils devront procéder à l’analyse des demandes des nouveaux organismes, sachant qu’on évalue aujourd’hui à 300 sur environ 1 000, le nombre de CFA déjà enregistrés. L’enregistrement des CFA existants se fera progressivement et au plus tard le 31 décembre 2021, ce qui ne devrait pas constituer une surcharge de travail pour les services compte tenu du fait que chaque année, ils enregistrent quelques 12 000 nouvelles déclarations.

4.5.  Impacts sociaux

4.5.1.      Impact sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Les centres de formation d'apprentis (CFA) sont confortés dans leur obligation de favoriser la mixité en sensibilisant les formateurs, les maîtres d'apprentissage et les apprentis à la question de l'égalité entre les sexes et en menant une politique d'orientation et de promotion des formations qui met en avant les avantages de la mixité.

4.5.2.      Impact sur la jeunesse

Le développement, tant quantitatif que qualitatif, de la formation en apprentissage vise à favoriser l’accès à la qualification des jeunes et leur insertion dans l’emploi.

Aussi, le rapprochement de l’offre de formation avec les besoins exprimés des entreprises et les attentes des jeunes, permettra de leur proposer  un plus large éventail de formations répondant à leurs attentes ainsi qu'à celles de leur famille. En effectuant ce rapprochement, l’insertion des jeunes en emploi ne pourra qu’être amélioré car elle résultera  de besoins recensés au niveau sectoriel et territorial. Par ailleurs, l’amélioration des modalités d’évaluation  des formations en alternance garantie ainsi aux jeunes et aux familles une pleine connaissance des débouchés et des taux d’insertion dans l’emploi associés aux formations existantes. Le développement puissant de la formation en apprentissage devrait ainsi contribuer à réduire fortement le taux de chômage des jeunes.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées[24]

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les centres de formation d’apprentis existants à la promulgation de la loi, quel que soit leur statut seront autorisés à poursuivre leur activité. En effet, les modalités actuelles de création des centres de formation d'apprentis (CFA) répondent à l’exigence de qualité recherchée. Ils devront néanmoins se mettre en conformité avec l’ensemble des dispositions de la loi, notamment l’obligation de certification qualité au plus tard le 31 décembre 2021.

Les CFA qui seront créés après promulgation de la loi devront respecter le calendrier d’entrée en vigueur des différentes mesures.

S’agissant des aspects financiers, les excédents issus des fonds de la taxe d’apprentissage et de la contribution supplémentaire constatés dans les CFA au 31 décembre 2019, devront être utilisés pour garantir la continuité de l’activité pédagogique du CFA.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Les dispositions spécifiques à l’apprentissage feront l’objet de précisions par décret en Conseil d’État.

Par ailleurs, l’application du régime des organismes de formation aux centres de formation d’apprentis nécessite de revisiter l’ensemble des textes réglementaires applicables aux organismes de formation :

 

Article 12 - Aide unique aux employeurs d’apprentis

1.         État des lieux

Pour l’accueil d’un ou plusieurs apprentis dans leur effectif salarié, les employeurs peuvent aujourd’hui bénéficier d’aides directes ou indirectes, selon différents critères de taille de l’entreprise, d’âge de l’apprenti ou de niveaux du diplôme préparé.

Ainsi, existent un régime particulier d’exonérations de cotisations sociales patronales et salariales, un crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage ciblé sur la première année du cycle de formation, une prime directe d’au moins 1 000 € par année de formation pour les entreprises de moins de onze salariés, une aide directe d’au moins 1 000 € pour les entreprises de moins de  deux-cent cinquante salariés pour la première année d’exécution du contrat d’apprentissage - toutes deux mises en œuvre par les régions - ainsi qu’une aide de l’État de 4 400 € maximum versée aux entreprises de moins de onze salariés accueillant un apprenti mineur pour la première année d’exécution du contrat d’apprentissage. L’employeur peut également bénéficier d’une prime de l’État pour l’accueil d’un apprenti reconnu travailleur handicapé.

Selon les conditions d’éligibilité aux différents dispositifs, le cumul de ces aides est possible.

Les régions ont la possibilité, en fonction de leur politique de développement de l’apprentissage, de compléter ce panorama pour, par exemple,  favoriser la formation des maîtres d’apprentissage. L’association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) met également en place des aides incitatives pour la signature de contrat d’apprentissage des travailleurs handicapés et leur pérennisation dans l’emploi.

Ces aides sont donc mises en œuvre par des acteurs différents (État, régions, Agefiph, etc.). Elles sont soumises à des régimes déclaratifs et des justificatifs différents, font l’objet d’un financement par des voies différentes (taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques, crédits budgétaires sur le programme 103).

Pour les aides en faveur des employeurs d’apprentis relevant de l’État, la valorisation financière prévisionnelle pour 2018 est détaillée ici :


Dispositif

Valorisation financière 2018 en M€

Dernière donnée disponible sur les bénéficiaires

Compensation des exonérations de cotisations sociales patronales et salariales

1 275

306 036 entreprises en 2015 pour 447 897 contrats d’apprentissage

Prime à l’apprentissage

231

230 800 contrats d’apprentissage

Aide au recrutement d’un apprenti

96

81 000 entreprises bénéficiaires en 2017 pour 95 700 contrats d’apprentissage

Aide TPE Jeunes Apprentis

195

154 000 contrats concernés au 31/12/2017

Crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage

213

140 870 entreprises bénéficiaires en 2016

Prime apprenti « Travailleur handicapé »

1

ND

Sources : Loi de finances 2018, loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et données DGEFP

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales relatif aux aides financières à la formation à l’alternance de 2013[25] posait le constat d’un système peu lisible, manquant de cohérence et multipliant les intervenants. À la suite de ce rapport, les indemnités compensatrices forfaitaires existantes ont été supprimées pour mettre en place la prime à l’apprentissage et le crédit d’impôt a été recentré sur certains niveaux de formation. Pour autant, en raison d’une baisse du nombre de contrats sur les années 2013 et 2014, d’autres aides ont été créés ultérieurement. L’aide au recrutement d’un apprenti a été créé à compter du 1er juillet 2014 puis l’aide TPE-Jeunes apprentis est entrée en vigueur à compter du 1er juin 2015.

A l’occasion de la concertation sur la transformation de l’apprentissage organisée à l’hiver 2017, le constat d’un système d’aides peu lisible a été formulé : des aides trop nombreuses, peu incitatives au recours à l’apprentissage pour l’entreprise, compte tenu d’une concentration des aides sur la première année de formation et sur un seuil d’effectif de moins de onze salariés. Aussi la proposition n° 33 du rapport issu de la concertation préconise la mise en place d’une aide unique ciblée sur les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises (TPE/PME) et les premiers niveaux de diplômes.

Ce constat d’aides diverses et peu lisible était déjà formulé en 2016 par le conseil de la simplification pour les entreprises.

 

Dispositif

Critères de seuil d'effectif de l'entreprise

Critère d'âge de l'apprenti

Critère de niveau de diplôme préparé

Critère de durée du contrat d'apprentissage

Exonérations de cotisations sociales patronales et salariales

Non

Non

Non

Non

Prime à l’apprentissage

Oui
moins de 11 salariés

Non

Non

Durée du contrat

Aide au recrutement d’un apprenti

Oui
moins de 250 salariés

Non

Non

1ère année du contrat

Aide TPE Jeunes Apprentis

Oui
moins de 11 salariés

Oui
Apprenti de moins de 18 ans

 

1ère année du contrat

Crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage

Non

Non

Oui
Diplômes ou titres équivalents au plus à bac+2

1ère année du cycle de formation

Prime apprenti « Travailleur handicapé »

Non

Non

Non

Durée du contrat

 

Enfin, les entreprises ne disposent pas forcément d’une information adaptée pour leur permettre d’ouvrir leur droit aux aides. Ainsi, le taux de recours à l’aide « TPE Jeunes apprentis » est de l’ordre de 75 %. Par ailleurs, pour bénéficier de ces aides, les entreprises sont soumises à de nombreuses formalités à remplir. L’octroi de la prime à l’apprentissage est conditionné, de manière générale[26], au respect des formalités suivantes : l’enregistrement du contrat d’ apprentissage (fourniture du numéro d’enregistrement par la chambre consulaire), la confirmation de l’embauche par l’employeur à l’issue de la période d’essai (déclaration sur l’honneur dans le formulaire de demande de prime), le renvoi du formulaire de demande de prime par l’employeur à la région accompagné d’un relevé d’identité bancaire, la validation de l’assiduité de l’apprenti par le centres de formation d'apprentis (CFA) (justificatif apporté par le CFA pour chaque année de formation). Des proratisations au montant de la prime sont appliquées dans le cas de rupture du contrat (non imputable à l’employeur) sur la base de justificatifs supplémentaires.

2.2.  Objectifs poursuivis

Les objectifs poursuivis par la présente mesure sont les suivants :

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Les options envisagées ont porté sur la détermination du périmètre des entreprises bénéficiaires et des niveaux de qualification préparés. Pour prendre en compte l’évolution du recours à l’apprentissage dans les entreprises de moins de 250 salariés (- 4 points en cinq ans dans les nouveaux contrats conclus) et des niveaux de diplômes préparés (- 6,7 points en cinq ans sur les niveaux équivalent au plus au bac), le ciblage retenu est une aide mise en œuvre par l’État pour les nouveaux contrats d’apprentissage conclus dans les entreprises de moins de 250 salariés qui emploient des apprentis visant un diplôme au plus égal au bac.

3.2.  Option retenue

La prime à l’apprentissage, l’aide au recrutement d’un apprenti, la prime spécifique pour les employeurs d’apprentis travailleurs handicapés, actuellement inscrites dans le code du travail[27], le crédit d’impôt[28] et l’aide « TPE Jeunes apprentis »[29] sont abrogés à compter du 31 décembre 2018 et l’aide créée par la loi prendra effet à compter du 1er janvier 2019 pour les contrats conclus dans les entreprises de moins de 250 salariés pour l’accueil d’un apprenti préparant un diplôme équivalent au niveau IV.

La révision du régime des aides financées par l’État présentée visant à fusionner plusieurs dispositifs en une seule aide directe répond aux objectifs d’une plus grande lisibilité, d’une simplification pour l’entreprise et d’un renforcement de l’accès au droit.

L’option de gestion privilégiée permet d’envisager un paiement plus rapide que les aides à l’apprentissage actuelles grâce à une automatisation du déclenchement de l’aide basée sur une transmission du contrat d’apprentissage via un guichet unique et un contrôle de la présence de l’apprenti dans l’entreprise au cours de l’exécution du contrat par le biais de la déclaration sociale nominative (DSN). À travers cette complète rénovation du système d’aides, l’objectif poursuivi est de renforcer l’attractivité du recours à l’apprentissage pour les entreprises de moins de 250 salariés sur les premiers niveaux de qualification. En effet, en 2016, toutes catégories d’entreprises confondues, près de 65 % des contrats d’apprentissage conclus portaient sur la préparation d’un diplôme équivalent au niveau IV. Cette proportion, certes importante est en recul depuis plusieurs années. La conclusion de contrats d’apprentissage dans les entreprises de moins de 250 salariés est également en recul (81,6 % des contrats conclus dans les entreprises de moins de 250 salariés en 2016 contre 85,6 % en 2011)

Pour renforcer cette attractivité, l’aide accompagnera la durée du contrat d’apprentissage et ne se concentrera plus sur la première année contractuelle.

Cette refonte s’opère par redéploiement des moyens financiers consacrés aux aides supprimées par l’État.

Enfin, le versement mensuel de l’aide, en s’appuyant sur la déclaration sociale nominative adressée chaque mois par l’employeur après établissement des bulletins de salaire, permet d’atteindre les objectifs : lisibilité, incitation et simplification.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Cette refonte implique la modification de deux articles du code du travail, l’abrogation complète d’un article, la modification du code général des impôts et la suppression, via la loi de finances, des compensations faites aux régions pour la mise en œuvre de la prime à l’apprentissage et de l’aide au recrutement d’un apprenti.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact sur les entreprises

La mise en place d’une seule aide est plus lisible pour les entreprises. Par ailleurs, le périmètre des entreprises concernées par un accompagnement tout au long du contrat est élargi. Enfin, l’utilisation de la déclaration sociale nominative pour déclencher le versement mensuel de l’aide allègera la charge déclarative de l’entreprise.

L’aide, telle que dimensionnée, concernerait plus de 60 % des contrats d’apprentissage. Le recours à deux critères d’octroi écarterait de fait certaines catégories d’entreprise. L’automatisation des versements permettrait un taux prévisionnel de recours de 95 %.

4.2.2.      Impact budgétaire

Le dimensionnement budgétaire de l’aide est réalisé par redéploiement des moyens actuellement consacrés aux différentes aides. Il n’y aura donc pas d’impact budgétaire.

Cette projection est établie sur la base d’une progression moyenne des effectifs d’apprentis de 3 %.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

La mise en œuvre de la prime à l’apprentissage et de l’aide au recrutement d’un apprenti est actuellement réalisée par les régions. Une compensation financière leur est versée par l’affectation d’une fraction de taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques.

L’aide sera mise en œuvre par l’État, les régions seront donc déchargées des procédures de gestion liées à l’instruction, à la gestion et au versement des aides. La compensation financière sera supprimée. En effet, dans la mesure où le gouvernement souhaite un déploiement rapide et homogène de l’aide sur l’ensemble du territoire mais aussi une synchronisation de son octroi aux employeurs en lien avec les rémunérations versées aux apprentis, seul un mode de gestion unifié de l’aide répond à l’ensemble de ces contraintes.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

L’État confiera la gestion de cette aide à un opérateur national de gestion et de paiement.

4.5.  Impacts sociaux

4.5.1.      Impact sur les personnes en situation de handicap

Les employeurs d’apprentis reconnus travailleurs handicapés bénéficieront, comme précédemment, du régime de droit commun en matière d’aide à l’apprentissage. Le mécanisme d’aide unique ne devrait par ailleurs pas être incompatible avec une prise en compte spécifique des besoins liés au handicap.

4.5.2.      Impact sur la jeunesse

Au 31 décembre 2017, 22,3 % des jeunes de 15 à 24 ans n’occupaient pas d’emploi. Ce taux est de 16,1 % dans l’union européenne. Le développement, tant quantitatif que qualitatif, de la formation en apprentissage vise à favoriser l’accès à la qualification des jeunes et leur insertion dans l’emploi.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées[30]

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

L’aide nouvellement créée entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2019. Les dispositifs existants seront abrogés à compter du 31 décembre 2018. Une transition de sortie de la prime à l’apprentissage et du crédit d’impôt sera organisée par loi de finances pour les années 2019, 2020 et 2021.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret définira les modalités d’applications de l’aide unique aux employeurs d’apprentis ainsi que l’abrogation, à compter du 31 décembre 2018, du décret n° 2015-773 du 29 juin 2015 portant création d'une aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis.


Article 13 - Autres formes d’alternance et de professionnalisation

1.         État des lieux

1.1.  Contrat de professionnalisation

Créé par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, le contrat de professionnalisation est un contrat de travail en alternance associant des périodes de formation et des périodes d'activités en entreprise en relation avec la qualification visée.

Contrairement au contrat d’apprentissage, le contrat de professionnalisation n’est pas uniquement ouvert aux jeunes de moins de 26 ans, mais également aux demandeurs d’emploi et aux bénéficiaires de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), du Revenu de Solidarité Active (RSA), de l’Allocation de Solidarité Spécifique (ASS) ou d’un contrat aidé. L’objectif final du contrat de professionnalisation est ainsi de pouvoir accéder et également ré-accéder à l’emploi, par l’acquisition d’une qualification professionnelle. Il permet d’acquérir un diplôme, un titre professionnel, un certificat de qualification professionnelle ou une qualification reconnue dans une convention collective de branche. Pour 7 salariés sur 10, le contrat de professionnalisation prépare à un diplôme ou un titre reconnu par l’État.

Le nombre de contrats de professionnalisation est en constante augmentation depuis sa création. En 2016, ce sont plus de 195 000 nouveaux contrats qui ont été enregistrés en France, ce qui représente une hausse de 5 % du nombre de nouveaux contrats de professionnalisation par rapport à 2015. Les statistiques montrent par ailleurs que 73 % des bénéficiaires sortants de contrat de professionnalisation en 2015 sont en emploi six mois après la fin de leur contrat. Parmi eux, plus de la moitié occupent un emploi durable. 67 % des anciens bénéficiaires de contrats de professionnalisation estiment que leur situation professionnelle s’est améliorée après leur contrat[31].

Les embauches en contrat de professionnalisation se font pour 80 % dans le secteur tertiaire, 4 % dans la construction et 15 % dans l’industrie.

1.2.  Professionnalisation

Dans le cadre de l’accord national interprofessionnel (ANI) conclu en septembre 2003 afin de rénover notre système de formation professionnelle, les partenaires sociaux avaient réaffirmé l'existence et le renforcement des formations en alternance.

La loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social reprend les principales dispositions de l’ANI et substitue aux différents contrats de formation en alternance (contrat d'orientation, contrat d'adaptation, contrat de qualification jeune et adulte) un dispositif unifié, le contrat de professionnalisation. Par ailleurs, les partenaires sociaux créent un outil afin de mobiliser la formation en alternance au bénéfice de salariés menacés dans leur emploi : la période de professionnalisation.

La période de professionnalisation créée par la loi du 4 mai 2004 relative vise à favoriser l'évolution professionnelle et le maintien dans l'emploi des salariés au travers d'un parcours de formation individualisé, alternant enseignements théoriques et activité professionnelle. Elle associe des cours théoriques généraux, professionnels et technologiques dispensés par des organismes de formation ou par l'entreprise elle-même si elle dispose d'un service de formation, et des cours pratiques permettant l'acquisition d'un savoir-faire en lien avec les qualifications recherchées par l'entreprise.

La formation se construit sur l’alternance pour l’obtention d’une qualification, d’une action permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences ou d’une certification figurant à l’Inventaire de la Commission Nationale de la Certification Professionnelle (CNCP).

La période de professionnalisation est mise en œuvre soit par l'employeur, dans le cadre du plan de formation de l'entreprise, soit par le salarié. Le salarié qui souhaite bénéficier d'une période de professionnalisation doit en faire la demande à son employeur et peut, s’il le souhaite, utiliser les heures de formation inscrites sur son compte personnel de formation (CPF). Dans ce dernier cas, l’entreprise pourra abonder le CPF de son salarié en cas de besoin. La formation peut se dérouler pendant ou en dehors du temps de travail.

Chaque salarié bénéficiaire d'une période de professionnalisation doit suivre une formation d'une durée minimale de soixante-dix heures réparties sur une période maximale de douze mois calendaires. Cette durée minimale ne s'applique pas :

En 2016, 406 105 périodes de professionnalisation ont été mobilisées, pour un engagement financier total de de 687 M€, dont 501 M€ issus de la section financière « professionnalisation ». Le nombre de salariés bénéficiaires d’une période de professionnalisation est de 678 041. 31 % des bénéficiaires avaient entre 35 et 44 ans. Ce sont les entreprises de 50-199 salariés qui présentent le plus de bénéficiaires (82 622).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

2.1.1.      Contrat de professionnalisation

Le contrat de professionnalisation, est, avec le contrat d’apprentissage, un des deux contrats de travail permettant de bénéficier d’une formation en alternance. Le nombre de contrats conclus ne cesse de progresser d’année en année (2014 : 176 308 ; 2015 : 185 874 ; 2016 : 195 326).

Avant leur embauche en contrat de professionnalisation en 2016, 33 % des bénéficiaires étaient scolarisés, 27 % en recherche d’emploi, 14 % salariés (hors emplois aidés), 21 % en emploi aidé ou stagiaire de la formation professionnelle (dont 16 % en contrat d’alternance). Le niveau de diplôme des personnes recrutées est élevé puisque près de la moitié des bénéficiaires sont titulaires d’un diplôme de niveau Bac + 2 ou plus. Les chiffres indiqués montrent par conséquent que le contrat de professionnalisation bénéficie davantage aux personnes qualifiées et sortants de scolarité qu’aux demandeurs d’emploi ou aux personnes éloignées de l’emploi. Le contrat de professionnalisation représente pourtant une opportunité particulièrement intéressante pour ces publics. Pour corriger cet état de fait, il convient de créer les conditions favorables permettant l’accueil des personnes en voie d’insertion professionnelle au sein des entreprises.

2.1.2.      Période de professionnalisation

La période de professionnalisation s’est largement déployée depuis sa création en 2004. Toutefois, la mobilisation de la période de professionnalisation, financée sur les fonds de la professionnalisation longtemps excédentaires, a pu amener certaines branches professionnelles et certains organismes paritaires collecteurs agréés à détourner la finalité première de la période de professionnalisation en utilisant le dispositif comme un simple outil d’abondement du plan de formation. Les objectifs animant sa création ont pu, dans certains cas, être contournés. Cela a été rendu possible par la conjonction de certains facteurs : publics et thématiques éligibles à la période de professionnalisation très larges ; absence de minima de volumes de formation (corrigés ultérieurement par la loi) ; modalité alternante peu stricte (les formations pouvant être réalisées hors temps de travail, parfois même en période de week-end).

À contrario, il convient de noter que d’autres branches professionnelles ont su circonscrire précisément les conditions d’accès au dispositif : exclusion des actions de formation visant à la promotion d’un collaborateur (sauf cas de disparition potentielle du poste occupé) ; analyse du contexte précis du poste dans l’entreprise pour déterminer la nature des menaces sur l’emploi ; demandes de taux de financement par l’organisme paritaire collecteur agréé différenciés selon les priorités de branches ; respect strict de la modalité alternante.

Malgré les efforts réalisés par certains acteurs, la saturation progressive des fonds de la professionnalisation et les règles d’accès à la péréquation du Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnels ont progressivement limité le recours aux périodes de professionnalisation.

2.2.  Objectifs poursuivis

Les demandeurs d’emploi, et notamment ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi, nécessitent un accompagnement vers l’emploi renforcé et doivent pouvoir bénéficier d’une formation la plus adaptée possible à leurs besoins. L’objectif est de permettre aux publics les plus éloignés de l’emploi de pouvoir conclure un contrat de professionnalisation sur mesure, au plus près de leurs besoins.

Les statistiques montrent par ailleurs que les salariés en contrat de professionnalisation qui étaient demandeurs d’emploi avant d’entrer en contrat de professionnalisation sont moins nombreux à être en emploi six mois après la sortie du contrat que certains autres publics (statut « scolarité » : 75 % de taux d’insertion et statut « demandeur d’emploi : 65 % de taux d’insertion[32].). Le second objectif est, par conséquent, que le contrat de professionnalisation adapté aux personnes les plus éloignées de l’emploi puisse permettre à ces personnes de s’insérer plus rapidement et plus durablement dans l’emploi.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

3.1.1.      Contrat de professionnalisation

Les travaux conduits par le gouvernement ont permis en 2016 la mise en place d’une première expérimentation relative aux contrats de professionnalisation et issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. L’article 74 de la loi a permis d’ouvrir la possibilité de conclure des contrats de professionnalisation aboutissant à d’autres qualifications que celles prévues de droit, pour « les demandeurs d'emploi, y compris ceux écartés pour inaptitude et ceux qui disposent d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, notamment les moins qualifiés et les plus éloignés du marché du travail ». Cette expérimentation a permis la conclusion de contrats de professionnalisation débouchant sur des certifications inscrites au sein des catégories A et B de l’inventaire de la Commission Nationale de la Certification Professionnelle (CNCP), des blocs de compétences et des actions de pré-qualification.

Le bilan de cette expérimentation montre que 60 % des contrats de professionnalisation expérimentaux ont été conclus avec des demandeurs d’emploi. Par ailleurs, le degré de qualification à l’entrée en contrat de professionnalisation expérimental est largement supérieur à celui escompté, en cela que seulement 22 % avaient au maximum un diplôme ou titre de niveau CAP/BEP et 11 % avaient déjà un niveau bac + 5.

Il n’est, par conséquent, pas envisagé de reconduire cette expérimentation en l’état. La nouvelle expérimentation ouverte par le présent projet de loi, tout au conservant l’objectif de l’expérimentation de la loi du 8 août 2016, cible plus précisément les publics bénéficiaires et les qualifications visées par le contrat de professionnalisation expérimental.

3.1.2.      Professionnalisation

Le dispositif retenu vise à redynamiser les modalités de formations ouvertes aux salariés afin de favoriser leur évolution professionnelle et leur maintien dans l'emploi. Par ailleurs, les périodes de professionnalisation souffrent d’une faible mobilisation et d’un certain détournement de leurs objectifs initiaux, qui doivent être corrigés. Une simplification des dispositifs existants est nécessaire afin d’éviter toute mise en concurrence avec les nouveaux dispositifs ayant la même finalité. Le texte présenté entend ainsi opérer une clarification et une mise en cohérence avec le nouveau paysage de dispositifs de formations.

3.2.  Option retenue

3.2.1.      Contrat de professionnalisation

Le public ciblé par l’expérimentation de 2016 n’était pas défini de manière précise, ce qui a abouti à ce que les contrats expérimentaux soient conclus avec des personnes à la recherche d’emploi mais relativement peu éloignées du marché du travail. Le public visé par la présente expérimentation est ainsi précisé et concernera uniquement :

Ces publics disposent par ailleurs déjà dans la loi de dérogations concernant la rémunération, le type de qualifications visées et la durée du contrat ou de la période de formation.

Contrairement à l’expérimentation de la loi du 8 août 2016, la présente expérimentation prévoit que les compétences qui devront être développées au cours du contrat seront définies par l’entreprise et l’opérateur de compétences, en accord avec le salarié. Cette définition des besoins en qualification au plus proche des réalités de l’entreprise doit permettre une meilleure insertion professionnelle des bénéficiaires.

3.2.2.      Professionnalisation

Le texte prévoit la suppression du dispositif des périodes de professionnalisation, aujourd’hui largement détournées de leur objectif.

La période de professionnalisation étant une action principalement mise en œuvre par l’employeur dans le cadre du plan de formation, cette dernière est supprimée en raison de la disparition des financements dédiés au plan de formation. Il convient de réaffirmer la responsabilité de l’employeur pour veiller à l’employabilité de ses salariés.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts économiques et financiers

4.1.1.      Impact sur les entreprises

La période de professionnalisation est mise en œuvre sur la base des principes de personnalisation des parcours de formation, en fonction des connaissances et des expériences de chacun des bénéficiaires, avec une alternance alliant des séquences de formation professionnelle dans ou hors de l’entreprise et l’exercice d’une ou plusieurs activités professionnelles en lien avec la ou les qualifications recherchées.

L’ensemble de ces objectifs peuvent être réalisés dans le cadre du compte personnel de formation, du conseil en évolution professionnelle et même d’un contrat de professionnalisation. Ainsi la suppression de ce dispositif n’entraînera qu’un report du nombre de bénéficiaires de période de professionnalisation actuel sur les dispositifs modifiés dans le cadre de la réforme actuelle.

L’expérimentation sur le contrat de professionnalisation permettra aux entreprises de former leur salarié en contrat de professionnalisation sur des compétences spécifiques à leur activité. Ainsi, on peut escompter que cette expérimentation favorisera l’embauche de personnes en contrats de professionnalisation par les entreprises qui pourront disposer d’un salarié formé au plus près des besoins réels de l’entreprise.

4.1.2.      Impact budgétaire

Les besoins de financement des actions d’accompagnement et de formation liées à la période de professionnalisation se reporteront, par un mécanisme de transfert, vers des besoins de financement supplémentaires dans le cadre d’actions de bilan de compétences, de conseil en évolution professionnelle et d’actions de formation financées via le compte personnel de formation.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles  (au titre du a) du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail) est consulté au titre des dispositions du présent article du projet de loi.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La présente disposition entre en vigueur 1er janvier 2019.

Les engagements pris avant la promulgation de la loi seront soldés par les opérateurs de compétences.

L’expérimentation entre en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel et s’achève au 31 décembre 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les nouvelles dispositions s’appliquent en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer.

5.2.3.      Textes d’application

Les modalités réglementaires relatives aux périodes de professionnalisation sont prévues par le décret n° 2014-969 du 22 août 2014 relatif à la durée minimale des périodes de professionnalisation et à l'obligation de tutorat d'un salarié en contrat de professionnalisation.

Plusieurs dispositions règlementaires devront être abrogées : articles D. 6324-1 à D. 6324-6 du code du travail.

Chapitre 4 – Refonder le système de construction et de régulation des diplômes et titres professionnels

Article 14 - Rénovation de la certification professionnelle

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Selon France Stratégie, les entreprises n’intègrent pas pleinement leur rôle de lieu central d’acquisition des compétences[33]. Dans ce contexte l’État doit, au-delà de la formation scolaire et universitaire, être porteur d’une stratégie de développement des compétences. Cette stratégie doit venir appuyer celle des entreprises en utilisant la capacité de l’État à produire un « effet de signal» et en prenant appui sur un système de certification professionnelle efficient.

La détention d’un diplôme ou d’un titre à finalité professionnelle est un élément essentiel de positionnement sur le marché du travail. La population adulte peu ou pas qualifiée ou possédant une qualification inadaptée est à ce titre la plus menacée par l’exclusion du marché du travail. La cohérence et l’efficience de la politique de certification professionnelle est donc un enjeu majeur pour le ministère du travail et un levier significatif pour renforcer en amont la qualité de la formation professionnelle.

Un cadre des qualifications clair et simple aide les employeurs à comprendre la valeur et le niveau d’une qualification. L’existence de qualifications professionnelles dont les employeurs ne perçoivent pas le sens, faute de transparence, peut constituer un facteur important de sous-utilisation des compétences des actifs et du mauvais rapprochement de l’offre et de la demande en compétences.

Avec 10 864 certifications actives enregistrées, au 31 décembre 2017, au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) géré par la Commission nationale des certifications professionnelles (CNCP)[34], le système français ne répond pas pleinement à ces impératifs.

En sus des certifications publiques enregistrées de droit au Répertoire national de la certification professionnelle, le paysage de la certification professionnelle est aussi composé des certifications enregistrées sur demande au répertoire[35] : les certificats de qualification professionnelle (CQP) établis par les branches professionnelles pour la formation de leurs salariés, les certifications établies par les établissements d’enseignement et, enfin, les certifications privées, portées soit par des organismes de formation soit par des organismes consulaires.

Par ailleurs, le système de certification n’est pas suffisamment réactif. Pour être inscrit au Répertoire national de la certification professionnelle, les organismes privés doivent justifier des données relatives à l’insertion professionnelle de leurs certifiés pour trois promotions ce qui, en ajoutant le délai d’instruction, aboutit à un minimum de quatre à cinq ans pour faire enregistrer une certification. L’évolution continue des besoins en compétences, notamment en lien avec la numérisation des métiers, rend nécessaire de repenser le système actuel.

La Commission nationale de la certification professionnelle gère par ailleurs un inventaire qui recense les certifications et habilitations correspondant à des compétences transversales exercées en situation professionnelle (certifications liées à des activités réglementées ou celles utiles dans l’emploi, comme les certifications informatiques ou de langues), soit 1 608 certifications au 31 décembre 2017.

La politique de certification professionnelle a fait l’objet en 2016 d’une évaluation de politique publique menée par l’Inspection générale des affaires sociales et l’Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, qui ont identifié le besoin d’une lisibilité renforcée de l’offre de certifications et d’une meilleure adaptation aux besoins, au moyen d’une régulation améliorée.

Les certifications publiques enregistrées au Répertoire national de la certification professionnelle sont en effet peu concertées avec le monde économique et demeurent parfois obsolètes dans les compétences visées. Quant aux certifications enregistrées sur demande, en constante augmentation[36], elles apparaissent souvent mal évaluées dans leur efficacité socio-économique et parfois pléthoriques sur un même métier, donc indifférenciées pour les actifs et les entreprises[37].

Malgré ses insuffisances, le répertoire et l’inventaire portés par la Commission nationale de la certification professionnelle ont permis d’intégrer une logique de certification des compétences dans l’offre de formation et d’institutionnaliser un dialogue de qualité sur les besoins en compétences entre les principaux acteurs de la formation professionnelle. C’est sur ce socle que s’appuie le projet de loi pour renforcer le niveau de régulation de l’offre de certification professionnelle et mieux l’articuler avec les besoins du marché de l’emploi.

1.2.  Éléments de droit comparé

Les systèmes de certification européens s’articulent autour de trois axes :

À ce titre, il convient de signaler que les systèmes allemand et français, régulièrement opposés, présentent en réalité un certain nombre de point de convergences :

Cette proximité, malgré les oppositions théoriques entre ces deux systèmes, est une illustration, qu'au-delà des processus de conception et de gestion des certifications, l'efficience d'un système de certification dépend avant tout :

Il convient enfin d’observer que les systèmes pluriels comme le système français ont souvent comme origine une insatisfaction des entreprises ou des branches dans la prise en compte de leurs besoins en compétences. Les pays où la culture du dialogue social est la plus développée portent en général un système dual ou unitaire où les branches et les entreprises sont la clé de voute de l’identification des besoins en compétences sous le contrôle et la régulation des pouvoirs publics.

Les exemples les plus marquants, même si l’échelle des marchés de l’emploi concernés favorise un modèle cohérent, sont le modèle finlandais, avec le bureau de l’éducation qui s’appuie sur des commissions ou comités d’experts où les entreprises sont fortement représentées et actives et sur un registre national des qualifications qui n’implique pas à ce stade un contrôle qualité comme le Répertoire national de la certification professionnelle, et le modèle écossais, avec la Scottish qualification authority (SQA), qui élabore l’ensemble des certifications professionnelles hors enseignement supérieur mais en étroite relation avec les différentes branches.

Dans ce contexte, la coordination européenne des politiques de formation professionnelle s’affirme progressivement. Qu’il s’agisse des indicateurs d’objectifs partagés et comparés, des crédits européens en matière de formation professionnelle, de la mise en place d’un cadre européen des certifications[40] ayant notamment pour finalité l’harmonisation des référentiels de niveaux de qualification nationaux, ces outils de politique publique européenne interpellent les systèmes nationaux de certification.

Ces mouvements de réformes sont, pour l’instant, sauf pour les pays ayant un retard systémique à rattraper, relativement modestes mais s’inscrivent dans un questionnement sur la dimension stratégique du développement des compétences des entrants sur le marché de l’emploi et des actifs au service de la compétitivité des économies nationales.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le cadre juridique de la certification professionnelle apparaît aujourd’hui difficilement identifiable[41] et insuffisamment précis, les notions d’organisme certificateur ou de blocs de compétences n’étant, par exemple, pas définies au niveau de la loi.

Par ailleurs les leviers d’action juridique pour l’examen des demandes d’enregistrement au Répertoire national de la certification professionnelle méritent d’être renforcés afin de renforcer la régulation et la montée en gamme du système.

Enfin, la gouvernance doit être mieux articulée stratégiquement avec les problématiques plus globales de pilotage des publiques de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles en vue d’appuyer la stratégie nationale de développement des compétences.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le volet certification professionnelle du projet de loi a pour finalité première de mieux définir le niveau de régulation de l’offre de certification professionnelle en lien avec les besoins du marché de l’emploi. Il pose un cadre institutionnel rénové, associant plus étroitement les partenaires sociaux, intégrer dans la stratégie nationale de développement des compétences et développant les leviers juridiques permettant une meilleure régulation qualité du système.

La régulation de l’offre privée de certification

Le faible taux de sélectivité des enregistrements, tant au répertoire national de la certification professionnelle (10 % de refus d’enregistrement) qu’à l’inventaire, pose question. Si une partie de cette situation trouve son origine dans l’insuffisance des pouvoirs octroyés et moyens dédiés à la Commission nationale de la certification professionnelle, il est désormais nécessaire, après une phase de montée en charge et d’acculturation du secteur de la formation professionnelle à la logique de certification des compétences, de fixer une feuille de route plus orientée vers la régulation de l’offre, rendue d’autant plus nécessaire que le projet de loi met par ailleurs fin au système des listes de formations éligibles au compte personnel de formation (CPF).

Les certificats de qualification professionnelle présentent par ailleurs une forte hétérogénéité dans la qualité de la certification et des référentiels associés, comme l’a souligné le Conseil économique, social et environnemental dans son avis du 13 septembre 2016[42].

Le renforcement du niveau de régulation de l’offre privée doit s’appuyer sur des mesures de niveau législatif et règlementaire afin :

La régulation de l’offre publique de certification

La dimension quadripartite de la gouvernance de la politique de certification professionnelle ne saurait faire oublier la nécessité de mieux coordonner la politique de certification professionnelle au sein même de l’État, de mutualiser les analyses des besoins en compétences, de penser les complémentarités, d’harmoniser et de professionnaliser les méthodes ainsi que de développer les reconnaissances mutuelles entre certifications. À cet égard, à l’exception des titres professionnels du ministère de l’emploi, dont la durée de vie est réglementairement fixée à cinq ans au plus, le développement des passerelles entre certifications publiques est rendu difficile par un rythme de renouvellement souvent trop lent et dépendant des initiatives des professionnels (branches professionnelles ou entreprises concernées).

La consultation des organisations syndicales et des organisations professionnelles d’employeur est par ailleurs souvent considérée par eux comme trop formelle et intervient, en tout état de cause, en aval du projet de certification ministérielle, les partenaires sociaux n’ayant pas de pouvoir d’initiative[43].

Une bonne illustration de ces insuffisances concerne la notion de blocs de compétences qui est insuffisamment définie par la législation, ce qui freine l’harmonisation des pratiques des certificateurs et en premier lieu celles des certificateurs publics. Le risque d’illisibilité du système pour l’usager est fort à défaut de pouvoir lui garantir une valeur en termes d’employabilité du bloc de compétences ou de suite de parcours vers la qualification.

Dans ce contexte, le système d’accès à la qualification via les blocs de compétences doit repréciser les objectifs recherchés et les facteurs de réussite :

La vision stratégique portée par le Gouvernement est très largement partagée par les partenaires sociaux dans l’accord national interprofessionnel sur la formation professionnelle.

Inscrire la certification des compétences dans la gouvernance des politiques de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

L’action collective en matière de formation professionnelle souffre aujourd’hui d’un éclatement des responsabilités, d’instances de pilotage dont l’efficacité n’est pas encore satisfaisante. Pour autant, il est possible de construire les conditions d’une gouvernance dynamique où la politique de certification professionnelle aura un rôle structurant.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

L’option consistant à privilégier un système de contrôle a posteriori des certifications n’a pas été retenue, un tel système aurait en effet été insuffisamment protecteur des intérêts des particuliers et peu sécurisant pour les entreprises. Un renforcement du filtre a priori a donc été privilégié. Toutefois, le gouvernement partage le constat posé par les partenaires sociaux d'une insuffisante réactivité du système de certification aux évolutions des besoins en compétences.

C'est pourquoi le dispositif sera assorti d’un tempérament pour les métiers et compétences identifiés par les membres de la commission en charge de la certification professionnelle de France compétences, en premier lieu les partenaires sociaux, comme particulièrement en évolution, pour lesquels un décret en Conseil d’État viendra préciser les conditions simplifiées de leur enregistrement au répertoire national de la certification professionnel (RNCP)[44].

3.2.  Option retenue

Comme rappelé précédemment, le volet certification professionnelle du projet de loi a pour finalité première de renforcer la régulation de l’offre de certification professionnelle en lien avec les besoins de compétences du marché de l’emploi.

Celle-ci doit s’articuler autour d’un schéma de gouvernance fortement simplifié dont l’intégration des missions à France compétences des missions jusqu’à présent confiées à la Commission nationale de la certification professionnelle est un volet important.

Le projet de loi propose donc de confier la tenue du répertoire national de la certification professionnelle et du répertoire spécifique à France Compétences où une commission dédiée assurera dans un cadre indépendant le rôle confié jusqu’à présent à la Commission nationale de la certification professionnelle, afin de renforcer la cohérence entre les politiques de certification et celles relatives au développement des compétences.

Au-delà de ce volet gouvernance, le projet de loi prévoit pour l’ensemble des certifications, publiques et privées :

Pour les certifications publiques, trois évolutions majeures vont mettre en mouvement le système :

Pour les certifications privées, la montée en gamme du système est porteuse de plus d’exigences de qualité, d’évaluation et de transparence selon les critères suivants :

Pour conforter la commission en charge de la certification professionnelle de France compétences dans sa compétence régulatrice, les avis rendus sur les demandes d’enregistrement au Répertoire national de la certification professionnelle et au répertoire spécifique[48], dont la procédure est alignée sur celle du Répertoire national de la certification professionnelle, ont désormais le caractère d’avis conforme. La commission en charge de la certification professionnelle de France compétences s’articule avec la compétence de prospective, de veille et d’évaluation de France compétences : à ce titre, elle veillera, en application des futures dispositions règlementaires, à la cohérence, à la complémentarité et au renouvellement des certifications professionnelles ainsi qu'à leur adaptation à l'évolution des qualifications et de l'organisation du travail et participe à la promotion et la valorisation de la politique de certification professionnelle.

À cet égard, l’introduction, au niveau législatif, d’une définition de la notion de blocs de compétences, dans un souci de clarification pour les usagers et les entreprises et d’harmonisation des pratiques des organismes certificateurs, facilitera la construction de blocs homogènes susceptibles de favoriser les passerelles entre certifications, le découpage en blocs demeurant aujourd’hui encore limité quantitativement et très variable selon les certificateurs.

Pour conforter la commission en charge de la certification professionnelle de France compétences dans son dimension d’appui à la stratégie de développement des compétences  et renforcer le rôle des partenaires sociaux dans le système de certification, sa composition sera recentrée sur un  paritarisme entre l’État et les partenaires sociaux, l’actuel trop grand nombre de membres ayant pour effet de nuire à la lisibilité et à la dimension stratégique de l’instance.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

Le projet de loi harmonise les règles de composition des commissions professionnelles consultatives (CPC), aujourd’hui définies au niveau réglementaire, en exigeant la nomination, pour au moins moitié de leurs membres, de représentants d’organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel et d’organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national. Cette consécration de la place des partenaires sociaux dans le processus de conception des certifications publiques obligera certains ministères à réviser les textes régissant la composition et l’organisation de leurs commissions professionnelles consultatives pour se mettre en conformité avec la loi.

Ces règles d’organisation communes à l’ensemble des CPC devront également être précisées par décret, ce qui permettra d’harmoniser les règles de fonctionnement des commissions.

Concrètement, la présente disposition conduira à la modification de la rédaction du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code du travail.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La mise en place, par décret, d’un cadre national des certifications visant à établir la classification des certifications professionnelles par niveau de qualification et permettre des comparaisons avec les certifications des pays membres de l’Union européenne devra s’inscrire dans le respect de la nouvelle recommandation du Conseil du 22 mai 2017 concernant le cadre européen de certifications pour l'apprentissage tout au long de la vie.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

La réingénierie du système de certification portée par le projet de loi permettra d’en améliorer la régulation et la réactivité et de clarifier le rôle des acteurs. En assignant à France compétences un objectif stratégique plus orientée vers la régulation et la transparence de l’offre, elle renforcera l’acculturation des acteurs de la formation professionnelle à la logique de certification des compétences et permettra des progrès en matière d’adaptation des certifications aux besoins évolutifs de l’économie.

Dans ce système rénové, l’État sera porteur d’une stratégie de développement des compétences qui, au-delà de la formation scolaire et universitaire, viendra appuyer celle des entreprises en utilisant la capacité de l’État à produire un « effet de signal ».

4.2.2.      Impact sur les entreprises

L’amélioration de la régulation et de la réactivité du système de certification, en s’appuyant sur une approche davantage partenariale, permettra à la fois le développement des initiatives privées et la lisibilité pour les entreprises et les actifs.

4.3.  Impacts sur les particuliers

La renforcement de la logique de blocs de compétences et l’incitation à la mise en place, sous le contrôle la commission en charge de la certification professionnelle de France compétences, de correspondances totales ou partielles entre certifications professionnelles équivalentes et de même niveau de qualification et leurs blocs de compétences facilitera une acquisition des qualifications plus modulaire et plus progressive portant une vrai logique de formation tout au long de la vie.

Par ailleurs, l’amélioration de la régulation et de la transparence garantira, pour les particuliers, la prise en compte des contraintes d’ordre public en matière de préservation de la santé publique, de sécurité au travail et du consommateur (lutte contre les dérives sectaires, charlatanesques, etc…).

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Des dispositions transitoires sont prévues afin de permettre la transformation progressive des diplômes et titres enregistrés de droit sans limitation de durée, l’attribution d’un niveau de qualification pour les certificats de qualification professionnelle aujourd’hui enregistrés au Répertoire national de la certification professionnelle et pour réinterroger le régime juridique des certifications et habilitations précédemment recensées à l’inventaire.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Les conditions d’application du nouveau chapitre III introduit au titre premier du livre premier de la sixième partie du code du travail seront déterminées par décret en Conseil d’État. Celui-ci précisera notamment :

Un décret simple définira par ailleurs, en application de l’article L. 6113-1 du code du travail, le cadre national des certifications permettant d’établir la classification des certifications professionnelles par niveau de qualification et fixera les critères de gradation des compétences attendues au regard des emplois et permettant des comparaisons avec les certifications des pays membres de l’Union européenne.

Chapitre 5 – Simplifier la gouvernance et rénover le financement

Article 15 - Rôle des acteurs et organisation institutionnelle en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des demandeurs d’emploi

1.         État des lieux

1.1.  La décentralisation de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi

La décentralisation aux régions de la formation des demandeurs d’emploi a été amorcée par la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État qui a ainsi affirmé la compétence de droit commun des régions en matière de formation des demandeurs d’emploi, compétence étendue aux jeunes à l’occasion de la loi quinquennale pour l'emploi du 20 décembre 1993. L’ensemble des financements liés aux programmes de l'État pour la formation et l'insertion des jeunes en difficulté (actions qualifiantes 16 à 25 ans et actions de pré-qualification et d'insertion) ont été transférés en conséquence.

Amplifiant ce processus, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a renforcé les compétences des régions en matière de formation des adultes à la recherche d’un emploi en engageant la décentralisation progressive des formations financées par le programme d’activité de l’ Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), ainsi qu’en leur confiant le financement des formations sanitaires et sociales.

Enfin, la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a entériné les derniers transferts de financements pérennes de l’État relatifs à des publics spécifiques (formation des travailleurs handicapés, personnes sous-main de justice, Français établis hors de France, le programme « compétence clés ». Elle a créé un service public régional de la formation professionnelle. Celui-ci garantit un droit d’accès gratuit à une formation professionnelle pour toute personne cherchant à s'insérer sur le marché du travail afin d'acquérir un premier niveau de qualification, de faciliter son insertion professionnelle, sa mobilité ou sa reconversion. Par ailleurs, la loi a précisé le rôle de Pôle emploi en matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi en lui confiant l’attribution des aides individuelles et en lui donnant la possibilité de réaliser des achats de formations collectives dans le cadre d’une convention conclue avec la région, permettant ainsi à la région d’assurer la cohérence des actions de formation même pour celles à l’initiative de l’opérateur national.

Dans ce cadre, il incombe depuis lors aux régions d’assurer le rôle de coordinateur des interventions en matière de formation des demandeurs d’emploi. Cet historique explicite le positionnement croissant des régions depuis 1983 en matière de financement de la formation des demandeurs d’emploi. Ainsi, sur les 5,6 Md€ consacrés à la formation (et à la rémunération) des personnes en recherche d’emploi, les régions sont les principaux financeurs à hauteur de 2,2 Md€, Pôle emploi étant le deuxième contributeur.

Compte tenu de la responsabilité sociale des entreprises, l’intervention des fonds paritaires de manière « subsidiaire» dans le financement de la formation des demandeurs d’emploi a été régulièrement recherchée. Elle s’organise par l’intermédiaire du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels avec de l’ordre de 527 M€ programmés pour les demandeurs d’emploi en 2016 et en 2017 contre 274 M€ en 2013. Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels finance le compte personnel de formation, refinance des actions de préparations opérationnelles à l’emploi ou des appels à projets dédiés pour les régions, Pôle emploi ou les organismes paritaires collecteurs agréés.

Enfin, postérieurement à l’adoption de la loi du 5 mars 2014, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ouvre un espace d’action à l’État pour organiser et financer des formations rares ou émergentes définies au niveau national.

1.2.  La responsabilité en matière de développement de l’apprentissage

C’est par la même loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, qu’a été accordée aux régions une compétence de droit commun pour la mise en œuvre des actions d'apprentissage. Il leur revient d'élaborer, en toute autonomie, leur politique d'apprentissage. Cette compétence s’est vue renforcée par la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle qui instaure une compétence de coordination en matière de formation professionnelle initiale et continue des jeunes au profit des régions avec la création d'un plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes (PRDFP). En 2004, la loi n° 2004-809 du 13 août relative aux libertés et aux responsabilités locales d'une part, confie aux régions une responsabilité sur l'enregistrement des contrats d'apprentissage pour ceux qui ressortent de la région. D'autre part, elles obtiennent la liberté de déterminer la nature, le niveau et les conditions d'attribution de la prime d'apprentissage versée aux employeurs d'apprentis. La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale crée un fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage qui accueille directement le produit de la taxe d'apprentissage afin de mieux satisfaire les besoins des régions au regard des efforts réels qu'elles déploient en faveur de l'apprentissage et qui sont inscrits dans des contrats d’objectifs et de moyens État-région. En fin la loi du 5 mars 2014, a permis de mobiliser des financements supplémentaires en faveur de l’apprentissage, en dotant les régions de ressources dynamiques, de décentraliser des centres de formation d’apprentis (CFA) nationaux et de rendre les régions responsables des contrats d’objectifs et de moyens.

En conséquence, l’organisation de l’apprentissage relève de la compétence de droit commun des régions. Ce sont elles qui subventionnent les CFA (en disposant de 51 % du produit de la taxe d’apprentissage), qui portent les conventions de création des CFA et qui mettent en œuvre les cartes régionales des formations professionnelles initiales.

L’État est, quant à lui, responsable de la rédaction de la réglementation en matière d’apprentissage et assure les contrôles au titre de l’exécution des contrats de travail et de l’organisation de la pédagogie (ministère de l’éducation nationale notamment) au sein des CFA.

Il convient de souligner que le ministère de l’Éducation nationale propose des formations par apprentissage dans ses lycées technologiques et ses lycées professionnels. Ainsi, pour l'année 2015-2016, il est recensé 36 279 apprentis en établissement public local d’enseignement qui préparent des formations de niveaux V à I.

En matière de planification de l’offre de formation, chaque année, après accord du recteur, la région arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales, conformément aux choix retenus par convention et aux décisions d'ouverture et de fermeture de formations par l'apprentissage qu'elle aura prises. Cette carte est mise en œuvre par la région et par l'État dans l'exercice de leurs compétences respectives, notamment celles qui résultent de l'article L. 211-2 du code de l’éducation et de l'article L. 814-2 du code rural et de la pêche maritime. Elle est communiquée aux organismes et services participant au service public de l'orientation. Les autorités académiques mettent en œuvre les ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale sous statut scolaire en fonction des moyens disponibles et conformément au classement par ordre de priorité établi. Enfin, la carte régionale fait l’objet d’une concertation en comité régional de l’emploi, formation et orientations professionnelles (CREFOP).

Le financement de l’apprentissage représente un montant global de 8,2 Md€ en 2014, assumé principalement par les entreprises (3,782 Md€), l’État (1,9 Md€) et les régions (1,9 Md€ avant réforme de 2014). Ces dépenses cumulent le financement de l’offre de formation (subvention aux centres de formation d’apprentis et sections d’apprentissage - CFA/SA) et les aides et incitations aux employeurs et aux apprentis. Construite pour financer les formations initiales professionnelles et technologiques, la taxe d’apprentissage est une imposition de toute nature due essentiellement par les entreprises redevables de l’impôt sur les sociétés (0,68 % de la masse salariale), finançant désormais principalement l’apprentissage. La contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA) est due par les entreprises de 250 salariés et plus ne respectant pas un seuil de 5 % de contrats favorisant l’insertion professionnelle dans leur effectif. Son taux varie de 0,05 % à 0,6 % de la masse salariale selon le seuil atteint. Cette contribution est également considérée comme une imposition de toute nature.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

En matière de développement de l’apprentissage, le gouvernement a fait le choix fort de confier la responsabilité du système aux acteurs dans un souci d’efficacité.

Ce nouvel équilibre des responsabilités repose sur la nécessité pour les régions de construire et de conforter leur action dans une logique d’aménagement du territoire et afin d’optimiser leurs investissements en matière de formation initiale (lycées et apprentissage).

Concernant la formation professionnelle des demandeurs d’emploi, la nécessité de légiférer est motivée par l’objectif de mise en œuvre cohérente du plan d’investissement pour les compétences, initié par l’État, et du Service Public régional de Formation Professionnelle qui relève, quant à lui, de la responsabilité des régions.

2.1.1.      En matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi et des salariés fragilisés

Dans le contexte où la rapidité de l’évolution des métiers menace d’obsolescence les savoir-faire de nombreux actifs et où l’investissement dans les compétences constitue un levier de compétitivité, le Gouvernement a décidé de déployer un effort sans précédent dans le cadre d’un Plan d’investissement dans les compétences pour les années 2018 à 2022. 

Le plan d’investissement dans les compétences est une composante du grand plan d’investissement présenté fin septembre 2017 par le Premier ministre suite au rapport Pisani-Ferry[49]. Il porte une double ambition :

Protéger les plus fragilisés sur le marché du travail en accompagnant et formant en 5 ans un million de chômeurs peu qualifiés et un million de jeunes qui ne sont « ni en emploi, ni en études, ni en formation » ;

Accélérer par l’investissement les transformations du système de formation professionnelle, en le centrant sur l’individu et en le rendant plus lisible, plus accessible, plus agile et plus innovant. Cette seconde dimension sera articulée avec la loi relative à la formation professionnelle et à l’apprentissage en cours d’élaboration.

Le plan est budgété à hauteur de 13,8 Md€ sur une période de cinq ans. Cet effort, sans précédent, implique que le mécanisme de financement de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi soit revu. Ce contexte nécessite de donner un cadre et de définir la manière dont l’État va réinvestir le champ de la formation des demandeurs d’emploi, ainsi que le caractère durable de cet investissement. Une association plus forte entre l’État et son opérateur Pôle emploi, les régions, et le monde économique, doit, dans un cadre garant des responsabilités de chacun, assurer :

2.1.2.      En matière de développement de l’apprentissage

Lors du lancement de la concertation relative à la réforme de l’apprentissage, la ministre du Travail a affirmé, le 10 novembre 2017, que l’apprentissage devait connaitre une révolution copernicienne : aujourd’hui, les entreprises et les jeunes tournent autour du système ; Désormais, il faut enclencher le mouvement inverse afin que le système tourne autour des jeunes et des entreprises et que l’apprentissage soit organisé pour répondre à leurs besoins et à leurs attentes.

Le système doit être réactif, parce que l’offre d’apprentissage doit être en phase avec les besoins du marché du travail et des entreprises, qui évoluent à un rythme qui n’a jamais été aussi soutenu.

Le système doit être transparent, parce que les jeunes et leurs familles doivent être en mesure de faire un choix libre et éclairé sur les formations en apprentissage vers lesquelles ils pourraient s’orienter en connaissant davantage en amont les débouchés en matière d’emploi et d’accès à la qualification.

Le système doit être responsabilisant pour les entreprises, car elles ont un rôle à développer pour organiser la transmission des compétences et l’insertion des jeunes dans la vie active.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le projet de loi se donne pour objectif de confier davantage la gestion du système d’apprentissage aux entreprises et au monde professionnel, afin de mettre fin à la complexité du mécanisme de « cogestion » (régions/entreprises) mis en œuvre lors de la loi du 5 mars 2014.

Concernant la formation des demandeurs d’emploi, la loi vise à permettre à l’État de prendre toute sa place notamment s’agissant de la formation de ceux dont le niveau de qualification est le plus faible, dans le respect des compétences décentralisées aux régions. Plus précisément, la loi doit permettre à l’État d’agir dans le cadre de son programme national destiné à couvrir des besoins additionnels de formation même en l’absence de participation de la région. La mise en place de ce mécanisme garantira au plan national de se déployer dans le respect du principe d’égalité des droits des citoyens.

3.         Options possibles et dispositif retenus

3.1.  Options envisagées

Au titre de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi, une des options envisagées consistait à étendre le régime prévu par les lois du n° 2014-58 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles  et n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République de délégations de compétences de l’État vers les collectivités territoriales. Toutefois, il ressort qu’à l’usage ce mécanisme est peu mobilisé. Les parties lui préfèrent, en effet, le transfert de compétences direct et le cadre contraignant des délégations entre collectivités assimilé à une tutelle et la lourdeur et longueur de la procédure en font un outil peu opérant.

Concernant le développement de l’apprentissage, une option consistait à garder le régime actuel de cogestion région-entreprises en lui insufflant une part de négociation avec les branches professionnelles notamment lors de l’élaboration de la carte régionale des formations professionnelles initiales ou bien lors de l’agrément des centres de formation d'apprentis. Jugée trop partielle, cette solution a été rejetée.

3.2.  Option retenue

Le projet de loi propose un nouveau modèle juridique applicable à la formation professionnelle des demandeurs d’emploi et de l’apprentissage.

En matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi

Dans le cadre d’un programme national défini par l’État, pour répondre à un besoin additionnel de qualification au profit de jeunes sortis du système scolaire sans qualification et des personnes à la recherche d’emploi disposant d’un niveau de qualification inférieur ou égal au baccalauréat, à défaut de conventionnement avec la région, l’État peut organiser et financer ces actions de formation avec Pôle emploi ou l'une des institutions mentionnées à l’article L. 5311-4. Ce conventionnement peut être prévu dans le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles mentionné à l’article L. 214-13 du code de l’éducation.

Dans ce cadre, il est fixé que Pôle emploi peut procéder ou contribuer, pour le compte de l’État, à l'achat des formations mentionnées ci-dessus.

En matière de développement de l’apprentissage

Les régions se voient confier une compétence spécialisée. Désormais, les régions interviendront pour contribuer au financement des centres de formation d’apprentis, au titre :

Au titre de ces compétences, les régions, interviendront le cas échéant dans le cadre de conventions avec les opérateurs de compétences  agissant pour le compte des branches adhérentes.

Le branches professionnelles, quant à elles, se verront confier, à titre principal, le financement des formations en apprentissage. Ainsi, elles fixeront les coûts des contrats d’apprentissage (comme ceux des contrats de professionnalisation actuellement). Par l’intermédiaire des opérateurs de compétences auxquels elles adhèrent, les branches détermineront la prise en charge des actions d'évaluation, d'accompagnement, d’inscription aux examens et de formation des bénéficiaires des contrats d’apprentissage dans les cas de rupture du contrat et dans les cas de redressement ou de liquidation judiciaires de l'entreprise. Les branches fieront la prise en charge de dépenses d’investissement visant à financer les équipements pédagogiques nécessaires à la réalisation des formations.

Les opérateurs de compétences pourront, pour le compte des branches professionnelles, déterminer la prise en charge des dépenses exposées pour chaque salarié, ou pour tout employeur de moins de onze salariés, lorsqu'il bénéficie d'une action de formation en qualité de maître d’apprentissage. Ces organismes pourront également prendre en charge tout ou partie de la rémunération et de frais annexes générés par la mobilité hors du territoire national des apprentis.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La révision des responsabilités des régions en matière de financement de l’apprentissage nécessite la révision deux articles du code du travail au titre des compétences des régions, quatre articles du code de l’éducation relatifs au partage des compétences entre les régions et l’État en matière de formation et d’orientation professionnelles, du contrat de plan régional de développement des formations et d'orientation professionnelles (CPRDFOP) et de la carte des formations professionnelles initiales et deux articles du Code général des collectivités territoriales en matière de règles de transfert de crédits aux régions.

Concernant la formation professionnelle des demandeurs d’emploi, la réforme nécessite l’adaptation de deux articles du code du travail.

Concrètement, la présente disposition se traduira par la modification de la rédaction des articles L. 6121-1, L. 6121-4, L. 6121-5, L. 6121-6, L. 6122-1, L. 6211-3 du code du travail.

Les articles L. 6121-3 L. 6122-2 du code du travail seront abrogés.

La présente disposition conduira également à la modification de la rédaction de différentes dispositions du code de l’éducation et du code général des collectivités territoriales.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact sur les entreprises

La réforme de l’alternance et tout particulièrement de l’apprentissage doit permettre aux entreprises de faire plus souvent appel à ce système d’embauche. Il a été ainsi estimé que les mesures portées par la loi en matière d’alternance (simplification des conditions de gestion des contrats, simplification des circuits financiers, etc.) d’ici 2022 devait garantir une augmentation de 10 points par an des contrats de professionnalisation et de 3 points par an au titre des contrats d’apprentissage.

4.2.2.      Impact budgétaire

Le financement aux régions passera par les mécanismes suivants :

En conséquence, le compte d'affectation spéciale (CAS) pour le développement et la modernisation de l’apprentissage qui servait à verser les dotations aux régions sera supprimé.

Il convient de rappeler que, pour l’essentiel, le financement de l’apprentissage sera effectué par les opérateurs de compétences (ex OPCA) sur la base de la collecte réalisée sur la contribution unique formation et alternance versée par les entreprises.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les régions se voient confier la capacité de pouvoir contractualiser avec l’État pour la mise en œuvre des formations déployées au titre du plan d’investissement pour les compétences. En matière d’apprentissage, les régions ont désormais une compétence spécialisée.

Ce nouveau contexte de mise en œuvre de l’apprentissage et de la formation professionnelle de demandeurs d’emploi impliquera une réorganisation des services concernés au sein des conseils régionaux.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

La structure chargée de réguler le financement de l’apprentissage entre les différentes branches professionnelles et de verser la dotation aux régions au titre de la majoration du coût du contrat, sera France compétences, qui prendra la forme d’un établissement public administratif. Cet établissement recevra à ce titre la partie de la contribution formation professionnelle dédiée à l’alternance et aura la charge d’assumer l’ensemble des procédures administratives et de gestion découlant des missions qui lui seront assignées.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Concernant le financement de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi, les nouvelles responsabilités des acteurs entreront en vigueur à la date de promulgation de la loi. Quant à l’apprentissage, le nouveau partage de compétences entre branches professionnelles et régions interviendra au 1er janvier 2020.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

La mise en œuvre du présent article nécessite plusieurs décrets :

Article 16 : Gouvernance et France compétences

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

1.1.1.      Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Agréé par l’État le 12 mars 2010 en application de l’article 18 de la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à̀ l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) est une association à gestion paritaire dont les principales missions, modifiées par les dispositions de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale sont inscrites à l’article L. 6332-1 du code du travail.

Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels est chargé de recevoir, de mutualiser et de réaffecter des fonds afin de renforcer l’investissement au profit de la formation des publics prioritaires du point de vue de l’accès et du maintien en emploi : les salariés des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) jusqu’à 49 salariés, les salariés les moins qualifiés ou confrontés à des mutations économiques, et les demandeurs d’emploi.

Il marque l’investissement des entreprises aux côtés des puissances publiques (État et régions) pour sécuriser les parcours professionnels, dans un contexte de complexification des parcours individuels avec une alternance de période d’activité et d’inactivité nées de la crise économique de 2008 notamment. L’enjeu est alors d’équiper les partenaires sociaux d’un fonds suffisamment doté pour réduire les inégalités d’accès à la formation et constituer un instrument de flexisécurité en attribuant davantage de droits et de moyens aux publics les plus fragiles.

Ainsi, en 2017, le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels a engagé plus de 200 M€  pour financer la mise en œuvre du compte personnel de formation (CPF) des demandeurs d’emploi, 350 M€ pour assurer la péréquation des fonds de la professionnalisation des organismes paritaires collecteurs agréés au bénéfice des branches professionnelles les plus actives en matière d’insertion / réinsertion dans l’emploi, 110 M€ pour financer des projets de mutations économiques sur les territoires, 110 M€ de préparation opérationnelle à l’emploi individuelle ou collective, 45 M€ de contrats de sécurisation professionnelle (CSP), 102 M€ au titre de la rémunération de fin de formation (RFF) des demandeurs d’emploi et près de 70 M€ pour des appels à projets en matière numérique, de formation à destination des migrants et de formations rares ou émergentes.

1.1.2.      Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles et le Comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

Créé par la loi du 5 mars 2014, le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) est issu de la fusion des instances de gouvernance sur l’emploi et la formation professionnelles qui préexistaient et de la volonté d’élargir la coordination quadripartite au champ de l’orientation professionnelle.

Installé le 28 novembre 2014, le conseil a notamment pour missions (articles L. 6123-1 et suivants du code du travail) :

Il élabore des priorités triennales sur le champ de l’emploi, de l’orientation et de la formation, qu’il peut décliner au travers de son programme d’évaluation triennal ou du programme de travail de ses commissions.

Le conseil dispose d’un secrétariat général autonome qui est « chargé de préparer les travaux du Conseil national et de ses commissions, dans le cadre des orientations définies par le bureau. Il assiste aux réunions du bureau, du Conseil et des commissions. Il s'appuie sur les services du ministère en charge de l'Emploi et de la Formation professionnelle et, en tant que de besoin, sur la collaboration d'agents affectés au fonctionnement du Conseil national » (article R. 6123-2-6 du code du travail).

La consultation du CNEFOP sur tout projet de texte normatif relatif à l’emploi, à l’orientation et à la formation professionnelles est un préalable obligatoire. À l’exclusion des travaux thématiques portés par le CNEFOP, le conseil est centré sur un rôle de suivi et d’évaluation.

Au niveau régional, la loi du 5 mars 2014 a clarifié les compétences respectives des acteurs territoriaux intervenant dans le champ de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles et désigne des chefs de file.

Au niveau territorial, les politiques sont mises en œuvre :

Cette clarification des périmètres d’intervention  respectifs de l’ensemble des acteurs précités s’est accompagnée d’un  renouvellement des conditions de la gouvernance territoriale de ces politiques.

En créant le Comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP), et en définissant les compétences de son bureau, le législateur a entendu rationaliser le nombre des lieux de concertation (fusion du Conseil régional de l’emploi et du Comité de coordination régional de l’emploi et de la formation professionnelle), étendre leur champ de compétence aux problématiques connexes de l’orientation et ainsi mettre en place les conditions d’une véritable gouvernance quadripartite, qui conditionne l’efficacité des politiques conduites dans les territoires, en réponse des attentes de la société civile et des usagers des services publics de l’emploi, de la formation et de l’orientation.

Le CREFOP a ainsi pour mission :

1°- d’organiser, au plan régional, la concertation entre les acteurs des politiques d’emploi, de formation et d’orientation professionnelles pour coordonner leurs actions, notamment au moyen du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles et de la convention régionale de coordination de l’emploi, de l’orientation  et de la formation, et d’assurer en particulier la cohérence des programmes de formation dans la région ;

2°- d’évaluer les politiques régionales d’emploi, de formation et d’information et d’orientation professionnelles ainsi que leurs conditions de mise en œuvre ;

3°- d’émettre un avis notamment sur la carte régionale des formations professionnelle initiale et les normes qualités s’imposant aux organismes participant au service public de l’orientation.

Cette  instance associe les représentants de l’État en région, des organisations professionnelles et syndicales membres du comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation, multiprofessionnelles ou intéressées, de la région ainsi que les principaux opérateurs du champ de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

1.1.3.      Le Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation et le Comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation.

Le comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF) a été également créé par la loi du 5 mars 2014. Il remplace le Comité paritaire national de la formation professionnel.

Composé de 10 représentants des organisations professionnelles et syndicales d’employeurs et de 10 représentants des organisations syndicales des salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, il a pour mission de :

Le comité paritaire interprofessionnel pour l’emploi et la formation (COPAREF) a aussi été instauré par la loi du 5 mars 2014 avec pour mission de notamment, d’assurer le déploiement des politiques paritaires définies par les accords nationaux interprofessionnels en matière de formation  et d’emploi, en coordination avec les acteurs régionaux.

1.2.  Cadre constitutionnel

Aucune disposition constitutionnelle ne vise la gouvernance de la formation professionnelle sinon l’impératif pour la Nation de garantir l’accès à chacun à la formation professionnelle continue conformément à l’article 13 du Préambule de la constitution du 27 octobre 1946.

Pour rappel : « La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État. »

Dans ce cadre, la gouvernance de la formation professionnelle répond concrètement à cet impératif fixé à la Nation dans les conditions décrites plus haut.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

2.1.1.      Une gouvernance nationale éclatée peu favorable à la coordination des acteurs : CNEFOP, COPANEF, FPSPP

La gouvernance de la formation professionnelle est éclatée entre d’une part une instance quadripartite, le conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP), et d’autre part deux instances paritaires, le comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF) et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP).

Le CNEFOP réunit de 20 membres (en bureau) à 113 en formation plénière (dont 58 titulaires), ce qui en fait une institution d’échanges privilégiée, mais ne constitue pas une structure de pilotage et de construction des politiques publiques. Par ailleurs, l’institution peine à assumer la dimension qui lui a été confié par le législateur de construction de la stratégie des politiques de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

2.1.2.      Des instances paritaires nationales peu lisibles

La dichotomie entre le COPANEF, issu de l’accord national interprofessionnel de décembre 2013 et de la loi du 5 mars 2014 et le conseil d’administration du Fonds paritaire est régulièrement soulignée.

Le COPANEF, bien que ne bénéficiant pas de la personnalité morale, a été introduit dans la loi du 5 mars 2014  pour élaborer la liste nationale interprofessionnelle des formations éligibles au compte personnel de formation (CPF) et suivre l’évolution de la mise en œuvre du compte, aussi bien sur le plan qualitatif que quantitatif.

Il est également chargé de définir les orientations paritaires en matière de formation et d’emploi et d’en suivre la coordination. Cette instance décisionnelle, réunissant en un groupe resserré des représentants de l’ensemble des organisations syndicales de salariés et d’organisation patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel est d’une composition proche du conseil d’administration du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. D’ailleurs en 2017, une majorité de ses membres étaient également administrateurs du Fonds paritaire.

Cette proximité fonctionnelle est telle qu’aujourd’hui le COPANEF est directement chargé de négocier l’annexe financière annuelle du FPSPP avec l’État et qu’il siège et intervient au conseil d’administration.

Cette dualité entre instance d’orientation politique et instrument financier existait déjà au temps du Fonds unique de péréquation (FUP) avec les mêmes questions sur la responsabilité juridique des administrateurs – l’essentiel du pouvoir de pilotage étant alors détenu par le CPNFP (Comité paritaire national pour la formation professionnelle).

Au regard de l’interpénétration des deux organisations, cette dualité ne se justifie plus et apparait être une source de complexité inutile dans la gouvernance paritaire et le financement des politiques sous sa responsabilité.

2.1.3.      Un pilotage particulièrement difficile des actions et un effet-levier de certaines d’entre elles sujet à débat

Du point de vue de sa mécanique de gestion et dans la continuité des observations établies par la Cour des comptes en mars 2018, il convient de relever en dépit d’améliorations notables ces dernières années (conventionnement unique, réduction du nombre d’appels à projets, etc.) et de la mise en place d’un suivi qualitatif par cohortes, une très forte complexité de gestion notamment du fait de la multitude de dispositifs suivis et de leur pluriannualité.

Chaque annexe financière s’étale ainsi en moyenne sur quatre années et complexifient le suivi des réalisations et des paiements pour l’institution et pour l’État. Les projections financières présentées aux administrateurs varient de plusieurs centaines de millions d’euros à quelques mois d’écart et l’absence de système d’information intégré et de remontées de données au fil de l’eau ne permet pas un pilotage et un suivi des objectifs cohérent.

Par ailleurs, sur plusieurs dispositifs, les modalités d’affectation des ressources du fonds ne semblent pas pleinement efficientes.

Ainsi, la dotation TPE-PME est répartie de manière mécanique aux organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), selon le nombre de petites entreprises adhérentes, sans tenir compte des actions de formation réellement menées. En 2015, deux OPCA ont par exemple récupéré le quart de la dotation globale de près de 170 M€ dédiée aux TPE-PME, mais ils n’ont réalisé à partir de cette dotation que 5 % des entrées en formation sur la période. En conséquence, au 31 décembre 2016, le résultat net des vingt OPCA sur le plan de formation des entreprises de moins de 11 salariés est supérieur à leur collecte légale[50], à 393 M€ pour un résultat comptable sur l’exercice de 86 M€. Compte tenu de ces éléments, un processus de dialogue de gestion a été initié par l’État sur l’exercice 2018.

L’appel à projets mutations économiques, normalement destiné en priorité aux TPE-PME pour faire face aux mutations économiques et technologiques a abouti in fine sur l’année 2016 à financer en majorité des actions de formation dans les entreprises de plus de 250 salariés, dans une complémentarité discutable avec les plans de formation desdites entreprises.

De même, la mise en œuvre du compte personnel de formation des demandeurs d’emploi donne lieu à des processus de conventionnement avec Pôle emploi et l’ensemble des Conseils régionaux selon une ingénierie administrative complexe et difficilement lisible pour les pouvoirs publics. De nombreuses difficultés d’accrochage des systèmes d’information des régions à ceux de Pôle emploi et de la Caisse des dépôts et consignation ont ainsi été reportées sans que les montants conventionnés soient modulés en conséquence.

Enfin, des critiques sont parfois émises à l’encontre d’actions éloignées de l’objet social du fonds paritaire (séminaires, actions de communication, partenariats financiers établis avec la Nouvelle-Calédonie et désormais la Polynésie Française pourtant hors du champ d’application du code du travail, etc.).

2.1.4.      Des instances paritaires régionales qui doivent composer avec une complexité d’acteurs et documents programmatiques

Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2016 posait le constat, au titre de la gouvernance régionale, que les documents programmatiques et conventionnels prévus par les textes sur le champ emploi, formation et orientation professionnelles ou en lien avec les politiques emploi-formation, étaient très nombreux.  Cet empilement rend  prégnante la nécessité d’articuler les documents entre eux, et ces questions d’articulation finissent par induire des jeux d’acteurs dommageables ce qui nuit à l’efficacité du système.

L’inspection générale avait conclu à la préconisation consistant à engager une réflexion visant à rationaliser, réduire le nombre, regrouper et simplifier les outils régionaux de planification, programmation et conventionnement liés à l’emploi, la formation et l’orientation professionnelles.

2.1.5.      Une commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) ayant contribuée à la montée en gamme du système mais insuffisamment régulatrice et peu insérée dans la gouvernance des politiques de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles

La Commission nationale de la certification professionnelle est une instance créée en 2002 par la loi de modernisation sociale et dépourvue de la personnalité juridique. Aux termes de l’article L. 335-6 du code de l’éducation, elle est chargée d’établir et de mettre à jour le répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) et d’émettre des avis :

La Commission nationale de la certification professionnelle est placée auprès du ministre chargé de la formation professionnelle (article R. 335-24 du code de l’éducation).

Depuis 2010, la Commission nationale de la certification professionnelle est devenu le point national de coordination dans le cadre européen des certifications et est en charge de l’inventaire (mis en œuvre en pratique depuis le 1er février 2015).

Outre son président, la Commission nationale de la certification professionnelle est composée de représentants des principaux ministères concernés, de membres représentant les organisations d’employeurs les plus représentatives au plan national et représentant les organisations des salariés les plus représentatives au plan national, des représentants les élus de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture, de l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat et de CCI France et des régions.

Le taux de rejet des demandes d’enregistrement est relativement faible (près de 10 %) ce qui est à la fois révélateur du rôle d’accompagnement des organismes de formation par la Commission nationale de la certification professionnelle vers les standards requis et a contrario de la difficulté à réguler qualitativement le secteur de la formation professionnelle par la seule question de la certification professionnelle.

La création du système de listes de formation du compte personnel de formation (CPF) est d’ailleurs pour partie une tentative de réponse à cette difficulté à réguler le secteur. À noter qu’une part significative de cette surabondance de certification préjudiciable à la transparence du secteur et à la lisibilité du système par les usagers, provient des certifications de l’enseignement supérieur qui représentent la majorité des certifications enregistrées de droit du Répertoire national de la certification professionnelle

Enfin, la Commission nationale de la certification professionnelle a mis en œuvre depuis 2015 un inventaire devant recenser «les habilitations et certifications correspondant à des compétences transversales exercées en situation professionnelle».

2.2.  Objectifs poursuivis

Le 15 novembre 2017, le Gouvernement a, par un document d’orientation, invité les partenaires sociaux à négocier sur les différents points relatifs à la formation professionnelle relevant du champ de la négociation collective conformément à l’article 1 du code du travail.

Dans ce document d’orientation, le constat a été fait d’un « système trop centré et focalisé sur la gestion de nombreux dispositifs, pas adapté aux mutations rapides et profondes que connaissent nos sociétés. » Par ailleurs, ce système ne permet pas de répondre aux inégalités de droit et d’accès entre salariés qualifiés et non qualifiés, entre salariés des petites et moyennes entreprises et salariés des grandes entreprises.

Ce constat d’échec invite à repenser les instances de gouvernance et de gestion au niveau national dans un objectif de simplification, d’efficacité, de renforcement de la coordination des acteurs afin de renforcer tout à la fois la gouvernance nationale et l’évaluation par l’intermédiaire d’un établissement public unique, quadripartite, sous la tutelle du ministre en charge de la formation professionnelle et titulaire de l’ensemble des leviers à même de mener à bien ses différentes missions.

2.2.1.      Une rationalisation des missions par acteur

L’objectif est désormais de répartir plus efficacement les missions dévolues aux différents acteurs. Cette recomposition implique inévitablement l’évolution du rôle du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, aujourd’hui à la mi-chemin entre l’insertion de publics vulnérables, la professionnalisation de demandeurs d’emploi et l’aide aux salariés vulnérables (petites et moyennes entreprises, secteurs en mutation économique, etc.).

La protection des plus vulnérables contre le manque ou l’obsolescence rapide des compétences relève ainsi des pouvoirs publics, de l’État et surtout des régions, ces dernières ayant en charge la formation professionnelle des demandeurs d’emploi. En ce sens, la gestion d’une enveloppe budgétaire dédiée aux demandeurs d’emploi doit désormais être affectée directement aux pouvoirs publics responsables de cette politique. En conséquence, les expérimentations menées, la préparation opérationnelle à l’emploi (POE), le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) ou la rémunération de fin de formation (R2F) n’ont plus vocation à être financé par le Fonds paritaire. Le Plan d’investissement dans les compétences (PIC) initie dès 2018 cette logique de responsabilité.

La liberté de choisir et la capacité de construire son parcours professionnel relève d’une responsabilité conjointe de l’État et des partenaires sociaux, par l’intermédiaire d’un compte personnel de formation (CPF) simple et opérationnel, d’un marché de la formation plus transparent et l’accompagnement personnalisé des actifs en exprimant le besoin. Il s’agit ici d’irriguer directement le gestionnaire du compte personnel de formation à partir de la collecte auprès des entreprises, de manière simple, directe et transparente pour les actifs occupés du secteur privé, tandis que le financement du compte personnel de formation des demandeurs d’emploi sera directement assuré par Pôle emploi.

Enfin, l’investissement massif dans les compétences des salariés relève de la responsabilité de l’entreprise, dans le cadre refondé du dialogue économique et social impulsé par la réforme du code du travail de l’été 2017. La substitution du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels par France compétences vise à répondre pleinement au rôle premier de péréquation de l’institution, afin de permettre aux branches les plus actives de financer aussi efficacement que possible l’alternance dans leur champ de compétence, de participer à l’équilibre du territoire par la création d’un fonds d’innovation destiné aux régions sur ce même champs, d’opérer une péréquation entre organismes paritaires collecteurs agréés s’agissant du fonds mutualisé à destination des TPE-PME, de financer le conseil en évolution professionnelle (CEP) sur les territoires et de participer à une l’évaluation de l’ensemble des réalisations menées, à travers notamment la mise en réseau des systèmes d’information des différents opérateurs. Les autres appels à projets du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels ne sont pas repris, soit qu’ils visent des demandeurs d’emploi, soit qu’ils empiètent sur la responsabilité de l’entreprise dans le maintien et développement des compétences de ses salariés.

2.2.2.      Une gouvernance nationale et régionale simplifiée et quadripartite

La complexité de la gouvernance en matière de formation professionnelle continue a fait l’objet de nombreuses critiques, notamment du rapport d’information des députés Dubié et Morange selon lequel il convient de « cesser de systématiquement juxtaposer les instances du paritarisme et du quadripartisme […] le quadripartisme est le format qui s’est peu à peu imposé dans les organes de pilotage de consultation et d’évaluation en matière de formation professionnelle. Il devient dès lors difficile de justifier le maintien d’instances strictement paritaires qui assument les mêmes compétences. Cette redondance systématique devient contreproductive et illisible » [51].

En conséquence, il est proposé un schéma simplificateur de reprise de l’ensemble des missions opérationnelle du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, du CNEFOP et du COPANEF dans une seule structure quadripartite. Le COPANEF, instance paritaire définie par accord national interprofessionnel, n’a plus vocation à figurer dans le code du travail. Cela n’empêche évidemment pas les partenaires sociaux de continuer à faire vivre leur institution dans ses missions d’orientation et de suivi des politiques paritaires et de porter leurs réflexions, analyses et demandes au conseil d’administration du nouvel établissement public.

S’ajoute à la fusion du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels et du COPANEF :

L’objectif est de réunir dans un format relativement réduit l’ensemble des acteurs publics et des partenaires sociaux afin de donner une légitimité aux décisions prises et un poids au quadripartisme réaffirmé s’agissant  de la qualité, du contrôle des coûts, de la certification, des observatoires et de l’appui au réseau dans la mise en place d’un conseil en évolution professionnel financé sur l’ensemble du territoire dans le cadre d’un référentiel co-construit et partagé, à même de garantir une égalité de traitement et une qualité de service sur l’ensemble du territoire et pour tous les actifs concernés.

Au niveau régional, CREFOP et COPAREF seront fusionnés, les partenaires sociaux pouvant exercer leur compétence de déploiement des accords nationaux interprofessionnels au sein du CREFOP, au sein d’une commission dédiée.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

3.1.1.      La fusion du COPANEF et du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels

La première option envisagée impliquait la fusion du COPANEF et du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Cette solution, techniquement la plus simple, suppose un accord constitutif des partenaires sociaux et un simple changement des statuts de l’association loi de 1901 dénommée « FPSPP ». C’est celle que les partenaires sociaux ont choisi dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018.

Cette option ne résout toutefois pas la question de la place de l’État et des régions, s’agissant d’une mission d’intérêt général visant à garantir l’égal accès de tous à la formation professionnelle. Ce scénario conserverait par ailleurs une dualité d’instance au niveau national entre une structure purement paritaire et une structure quadripartite, chacune exerçant une fonction de gouvernance.

Cela ne permettrait donc pas de consolider les données des différents opérateurs s’agissant des systèmes d’information, du suivi des résultats par l’État et de la simplification des processus de gestion.

3.1.2.      La fusion du CNEFOP et du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels

La seconde option envisagée consistait en l’absorption du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels par le CNEFOP. Cette option, allant de pair avec une simplification du CNEFOP, impliquerait la création d’une section financière au sein de l’institution. Le nouvel organisme de péréquation dépendrait en dernier ressort des services du Premier Ministre.

Cette option, privilégiée dans le rapport de MM. Jean-Patrick GILLE et Gérard CHERPION sur la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2014[52] tire sa force de l’extension des missions du fonds paritaire à l’issue de la loi précitée, notamment s’agissant de la gestion de droits universels comme celui des heures acquises par les demandeurs d’emploi au titre de leur compte personnel de formation, du financement des préparations opérationnelles à l’emploi (POE individuelles et collectives), des contrats de sécurisation professionnelle (CSP) et autres dispositifs et expérimentations à destination des demandeurs d’emploi.

Si ces derniers dispositifs ont vocation à être pris en charge par l’État et les régions, il demeure que l’affectation des ressources, notamment du compte personnel de formation, mais également la tenue du registre national de certification professionnel, l’observatoire des coûts et de la qualité implique d’aller plus loin dans la gouvernance et l’opérationnalité en assurant une gouvernance quadripartite efficace et disposant de suffisamment d’autonomie pour se saisir de ses missions.

3.2.  Option retenue

En conséquence, l’option retenue vise à transformer corrélativement le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le COPANEF et le CNEFOP (dans ses missions d’évaluation et de suivi) et la Commission nationale de la certification professionnelle en :

S’agissant d’une compétence avant tout paritaire, il est proposé de créer quatre  collèges : un collège État, un collège organisations syndicales de salariés, un collège organisations représentatives d’employeurs et un collège régions.

Cette structure à la fois nationale et légère permettra d’affecter de manière partagée et ouverte trois types de péréquation auprès des opérateurs compétences :

Cette structure de gestion aurait vocation à associer l’État, les régions et les partenaires sociaux dans une démarche de transparence et d’ouverture, pour garantir au niveau technique la meilleure mise en œuvre et au niveau politique l’impartialité des processus de redistribution, de mise en œuvre du CEP sur les territoires et d’évaluation de l’offre de formation.

Par ailleurs, de par son conseil d’administration à la fois ouvert et resserré et son positionnement auprès du ministère en charge de la formation professionnelle, la structure sera la mieux à même de coordonner la mise en réseau des systèmes d’information ou le recensement et la consolidation d’études et travaux réalisés par l’ensemble des acteurs (partenaires sociaux, État et régions) à travers des commissions ad hoc placées auprès du conseil d’administration et composées de personnalités qualifiées.

Il convient de noter que la mission consultative du CNEFOP sera confiée à l’actuelle Commission nationale de la négociation collective (CNNC). Cette instance est en charge, en application du code du travail, d'émettre un avis sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs aux règles générales portant sur les relations individuelles et collectives du travail, notamment celles concernant la négociation collective. De par la présente loi, la  CNNC verra ses compétences en matière de consultation des textes législatifs et réglementaires relevant du domaine de la politique de l'emploi, de l'orientation et de la formation professionnelle initiale et continue ;

Au niveau territorial le CREFOP et COPAREF seront fusionnés. Les partenaires sociaux pourront exercer leur compétence de déploiement des accords nationaux interprofessionnels au sein du CREFOP par l’intermédiaire d’une commission spécifique du CREFOP. Cette commission aura un pouvoir d’instruction et approuvera la mise en œuvre du projet de transition professionnelle donnant lieu à un financement par un opérateur de compétences et elle attestera du caractère réel et sérieux du projet de reconversion professionnelle nécessitant le suivi d’une formation.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Cette modification du code du travail est relativement légère et en modifie pas l’ordre juridique interne.

Elle concerne six articles abrogés s’agissant du FPSPP, deux articles abrogés au titre du CNEFOP, deux articles modifiés s’agissant de la CNNC, deux articles modifiés pour le CREFOP, deux articles abrogés concernant le COPANEF et le COPAREF et deux articles créés au titre de France Compétences).

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels bénéficie de contributions au titre de la formation professionnelle continue (FPC) à hauteur de 0,15 % pour les entreprises de 11 à 49 salariés et de 0,20 % au-delà correspondant à une collecte moyenne d’environ 800 M€.

À cette ressource fixe s’ajoute les excédents dont disposent les OCPA au 31 décembre de l’année n en ce qu’ils excèdent, pour les sommes destinées à financer le compte personnel de formation, un quart de leurs charges comptabilisées au cours du dernier exercice clos selon les règles du plan comptable applicable aux organismes paritaires agréés et, pour les autres sommes, le tiers de ces charges. Ces ressources varient très fortement d’une année à l’autre, mais elles demeurent marginales pour le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

La transformation de la contribution due au Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels en aide directe aux demandeurs d’emploi permet de s’assurer d’une augmentation substantielle des moyens alloués. Cette part, appelée à être modulée suivant l’évolution du taux de chômage vise à répondre de manière proportionnée aux besoins des actifs privés d’emploi en permettant la mise en œuvre de formations qualifiantes et au besoin longues.

D’autre part, la péréquation sur l’alternance élargie (contrats de professionnalisation et contrats d’apprentissage) vise à garantir aux opérateurs compétences une latitude suffisante pour garantir aux opérateurs de compétences une couverture de leurs engagements en matière d’alternance.

Cette nouvelle présentation financière garantit davantage de transparence et permet de fixer des niveaux stables d’engagements financiers pour chacun des financeurs et chacune des politiques publiques ou économique ciblée : une contribution destinée aux demandeurs d’emploi garantie à l’État et aux régions, une péréquation au service des entreprises et des politiques d’alternance portées par les branches, un fonds d’incitation territorial destiné à permettre aux régions de conduire une politique d’alternance cohérente sur les territoires, un conseil en évolution professionnel gratuit et de qualité garanti sur l’ensemble du territoire.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

L’accompagnement des entreprises dans leurs besoins en alternance via leurs opérateurs de compétence sera accru, les circuits de financement seront considérablement simplifiés afin d’offrir aux opérateurs de compétences une réactivité plus importante et une véritable mission de proximité à destination des petites et moyennes entreprises. Enfin, France compétences assure par l’observatoire des coûts, la certification, la centralisation des études et travaux une mission de régulation et de contrôle, aux côtés des services de l’État.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les conseils régionaux se voient reconnaitre une place au sein du conseil d’administration de France compétences. Associé à l’ensemble des décisions, ils pourront enrichir la gouvernance dans sa dimension territoriale. Les régions gardent par ailleurs leur positionnement au sein des CREFOP.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Le Fonds paritaire est une association loi de 1901. Constitué aujourd’hui de 49 équivalents temps plein (ETP), il n’en comptait que 10 en 2009 à sa création (reprise des salariés du fonds unique de péréquation préexistant). Malgré cette hausse importante d’effectifs, le fonds paritaire externalise une part importante de ses activités, notamment les contrôles de service fait, les fonctions informatiques et des prestations juridiques.

La transformation de l’organisme impliquera sur plusieurs années, de dénouer les engagements contractés et de finaliser les contrôles de service fait, notamment sur les dossiers cofinancés par le Fonds social européen.

Il est envisagé, conformément à l’article 1224-1 du code du travail une reprise des salariés, sous contrat de droit public par France compétences.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

La création de France compétences fait suite à la négociation des partenaires sociaux et à l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018.

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Les mesures envisagées nécessiteront des décrets d’application :

Articles 17 et 18 - Obligations des employeurs relatives au financement de la formation professionnelle et à l’apprentissage et contributions spécifiques pour certaines catégories d’employeurs

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Actuellement, les entreprises françaises du secteur privé participent au financement de la formation professionnelle continue et initiale. Ce financement se décompose en deux principales contributions légales : une contribution pour la formation professionnelle continue et une taxe dédiée à l’apprentissage. Ces deux contributions sont assises sur le montant des rémunérations brutes versées par une entreprise - la masse salariale - mais sont régies par des textes législatifs et règlementaires différents, avec des systèmes de collecte et de gestion différents.

1.1.1.   Le financement de l’apprentissage

Instituée en 1925 pour financer la formation des apprentis, la taxe d'apprentissage est un impôt auquel sont soumises la plupart des entreprises françaises du secteur privé. Toutefois, de nombreux cas d’exonérations sont prévus par le code général des impôts, soit en raison des caractéristiques de l’entreprise (les petites entreprises occupant un ou plusieurs apprentis et dont la masse salariale est inférieure à six SMIC annuels), soit en raison de leur nature (personnes morales intégralement exonérées de l’impôt sur les sociétés, personnes imposées au titre des bénéfices non commerciaux).

Depuis le 6 juillet 2011, dans les entreprises de 250 salariés et plus qui ne respectent pas un quota « alternance » (4 % de salariés en contrat de professionnalisation ou contrat d'apprentissage, quel que soit leur âge, passé à 5 % en 2014), a été également instituée une contribution supplémentaire à l’apprentissage.

En 2015, les flux financiers liés à l’apprentissage représentaient 8,27 Md€[53]. Dans ce montant global, le financement de l’offre de formation est principalement assuré par la taxe d’apprentissage (de l’ordre de 3 Md€ prélevés à partir de 0,68 % masse salariale en droit commun, et 0,44 % pour la masse salariale des établissements situés dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle) et la contribution supplémentaire à l’apprentissage.

Le produit de la taxe d’apprentissage est actuellement réparti en trois fractions :

La contribution supplémentaire à l’apprentissage est intégralement affectée au financement des centres de formation d’apprentis. Elle poursuit un objectif d’incitation au recours à l’apprentissage en visant les entreprises assujetties à la taxe d’apprentissage, comptant plus de 250 salariés et ne respectant pas un seuil de 5 % d’effectifs sous contrats favorisant l’insertion professionnelle au sein de leurs effectifs. Son taux varie de 0,026 % à 0,6 % de la masse salariale.

Collecte masse salariale 2016 de taxe d'apprentissage et de CSA

Montant – M

Taxe d'apprentissage brute

                 3 032  

Déductions

                      59  

 frais de stage

                      54  

 créance alternant

                        3  

 dons en nature

                        2  

Fraction régionale pour l'apprentissage

             1 545,5  

Fraction "Quota"

                808,5  

 Concours financiers obligatoires

                   417  

 Versements aux CFA

                368,5  

 Versements aux autres écoles techniques

                     7,5  

 Frais de collecte et de gestion

                  15,5  

Fraction " Hors Quota"

                    619  

 Couverture des concours financiers

                   157  

 Etablissements Hors quota

                432,5  

 conventions cadre actions promotion

                  16,5  

 Frais de collecte et de gestion

                      13  

Contribution supplémentaire à l'apprentissage

                    267  

 Versements affectés

                   239  

 Versements non affectés

                  25,5  

 Frais de collecte et de gestion

                     2,5  

Nombre d'entreprises versantes CSA

                 4 468  

Total des frais de collecte et de gestion prélevés

                      31  

Sources : État de collecte et de répartition 2016

La collecte est réalisée par les organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (OCTA), au nombre de 37 depuis le 1er janvier 2017 (20 organismes avec une habilitation nationale et 17 organismes avec une habilitation régionale, exclusivement des chambres consulaires), avant le 28 février de l’année N au titre de la masse salariale de l’année N-1.

La part régionale est reversée au Trésor public par les collecteurs avant le 30 avril de l’année N et, pour les parts « quota » et « hors quota » aux établissements bénéficiaires avant le 15 juillet de l’année N après une procédure de répartition associant régions et organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage et faisant appel à la consultation du bureau du CREFOP, pour les fonds non affectés par les entreprises (attribution des fonds dits « libres »).

Enfin, la fraction régionale (51 % de la taxe) est complétée par une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour constituer la ressource régionale pour l’apprentissage, versée aux régions.

1.1.2.   Le financement de la formation professionnelle continue

Instituée par la loi du 16 juillet 1971, l’obligation légale de financement de la formation professionnelle des salariés par l’employeur a connu de nombreuses réformes. En effet, ce financement s’est inscrit dans un contexte économique caractérisé par un environnement économique longtemps dégradé et durablement concurrentiel, avec la persistance d’un taux de chômage élevé. Les règles relatives aux contributions obligatoires des employeurs ont donc dû évoluer pour conjuguer un double objectif de sécurisation des parcours professionnels des actifs et de maintien voire de développement de la compétitivité des entreprises.

La loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a instauré le cadre en vigueur de la contribution pour la formation professionnelle continue en modifiant profondément les volumes et les affectations de la contribution obligatoire.

Cette loi avait pour objectif d’inciter les entreprises à sortir d’une logique principale de dépense liée à l’obligation légale de participation au financement, au profit d’une logique d’investissement (suppression partielle ou totale de l’obligation de financer le plan de formation pour les grandes entreprises), et de recentrer les financements sur les formations certifiantes et qualifiantes (création du compte personnel de formation avec un financement dédié, augmentation des ressources du congé individuel de formation, maintien de la professionnalisation).

Par ailleurs, le cadre de collecte de la formation professionnelle continue a été simplifié par l’instauration d’une collecte unique assuré par les seuls organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), cette mission étant auparavant également assurée par les fonds de gestion des congés individuels de formation (FONGECIF) pour une contribution au titre du congé individuel de formation.

Ainsi, de nouvelles obligations légales de contribution à la formation professionnelle continue selon la taille de l'entreprise ont été établies : un taux unique de contribution de 0,55 % de la masse salariale pour les entreprises de moins de 11 salariés et de 1 % pour les entreprises de 11 salariés et plus, ventilées ensuite par dispositif. Toutes les contributions au titre de la collecte légale sont mutualisées au sein de sections financières spécifiques à chaque dispositif.

 

Effectif des entreprises

 

1 à moins de 11 salarié(s)

11 à moins de 50 salariés

de 50 à moins de 300 salariés

plus de 300 salariés

Plan de formation

0,40 %

0,20%

0,10 %

-

Professionnalisation

0,15 %

0,30%

0,30 %

0,40 %

Congé individuel de formation **

-

0,15%

0,20 %

0,20 %

FPSPP

-

0,15%

0,20 %

0,20 %

Compte personnel de formation

-

0,20%

0,20 %

0,20 %

TOTAL

0,55 %

1 %*

1 %*

1 %*

 

* 1 % ou 0.80 % si un accord d’entreprise triennal prévoit la gestion interne du 0.20% CPF.

** S’ajoute à cette contribution au titre du CIF-CDI, une contribution CIF-CDD de 1% de la masse salariale des CDD. Ces deux contributions sont reversées par l’OPCA au Fongecif, via le FPSPP.

L’intégralité de la participation doit être versée avant le 1er mars de l’année suivant le versement des salaires auprès d’un unique organisme paritaire collecteur agréé (OPCA), désigné par l’accord de la branche dont relève l’employeur ou, à défaut, à l’organisme collecteur paritaire agréé au niveau interprofessionnel.

Cette contribution, une fois collectée, est répartie entre la part directement gérée dans les organismes paritaires collecteurs agréés pour le compte personnel de formation, les actions de professionalisation et le plan de formation et celle qui est uniquement collectée par les organismes paritaires collecteurs agréés puis reversée à d’autres organismes à des fins de mutualisation (FPSPP) ou de reconversion (CIF).

Ainsi, pour les employeurs de 11 salariés et plus, une part (0,2 % ou 0,15 % selon la taille de l’entreprise) est affectée au fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels et une autre part (0,2 % ou 0,15 % selon la taille de l’entreprise) l’est vers les organismes agréés pour prendre en charge le congé individuel de formation. Le solde est géré directement par l’organisme collecteur paritaire pour financer des actions de professionnalisation, du plan de formation et du compte personnel de formation.

Parallèlement à cette contribution légale, l’organisme paritaire collecteur agréé peut également percevoir une contribution conventionnelle versée au-delà du 1% minimum légal. Elle s’applique aux entreprises appartenant à une branche ou secteur professionnel ayant conclu un accord relatif à la formation, prévoyant un effort supplémentaire pour tout ou partie de leurs salariés. Enfin, des contributions volontaires, non mutualisées, peuvent être versées librement par l’entreprise en dehors de toute obligation légale ou de branche. Elles permettent à l’entreprise de financer des actions de formation et de bénéficier des services proposés par l’organisme paritaire collecteur agréé, dans le respect des conditions fixées par ce dernier et pouvant donner lieu à une contractualisation spécifique.

Collecte relative à la masse salariale 2016

 

 

TOTAL 2016

Plan de Formation  des entreprises de moins de 11 salariés

                389 189 807  

Plan de Formation des entreprises de 11 à moins de 50 salariés

                183 660 357  

Plan de Formation des entreprises de 50 à moins de 300 salariés

                109 968 951  

TOTAL PLAN DE FORMATION

                682 819 114  

Professionnalisation

             1 706 563 760  

CIF CDI

                819 894 453  

CIF CDD

                260 215 286  

CPF

                879 201 238  

FPSPP

                848 507 061  

TOTAL COLLECTE LEGALE

             5 197 200 911  

 

 

Versements conventionnels

                494 835 449  

Versements volontaires

             1 306 578 056  

Total collecte supplémentaire

             1 801 413 504  

 

 

TOTAL COLLECTE FPC

             6 998 614 416  

Source : États statistiques et financiers 2016 des OPCA

Une augmentation globale de la collecte de la contribution pour la formation professionnelle continue perçue par les OPCA est constatée malgré une révision des taux en 2015 et une modification des règles relatives aux seuils des entreprises en 2016.

Cette augmentation s’explique par l’évolution mécanique de la masse salariale assujettie, la modernisation des procédures de collecte des OPCA et le dynamisme de la collecte conventionnelle et volontaire, permettant aux OPCA d’afficher une collecte totale en 2016 en hausse par rapport à 2015 (6,7 Md€) et même 2013 (6,8 Md€), année de la collecte la plus importante pour les OPCA avant réforme.

1.1.3.      Cadre spécifique

Enfin, il faut rappeler qu’il existe des règles relatives à la contribution pour certaines catégories d’employeurs. Ces dispositions prévoient des modalités différentes de calcul de la contribution et de collecte, adaptées aux spécificités de chaque public. Ainsi :

1.2.  Cadre constitutionnel

Depuis sa création avec la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 issue de l’accord national interprofessionnel du 9 juillet 1970 portant sur la formation et le perfectionnement professionnel, le système de formation professionnelle continue est basé sur trois piliers : une obligation de financement, une gestion paritaire de la collecte et enfin la recherche d’un équilibre entre les besoins des entreprises à travers le plan de formation et ceux des salariés avec la création du congé individuel de formation. Dès l’origine, l’enjeu était d’assurer un financement pérenne et suffisant du système de formation pour permettre à la France, comme le prévoit le préambule de la Constitution de 1946, de garantir l’égal accès des adultes à la formation professionnelle.

 

1.3.  Éléments de droit comparé

L’existence d’un système de formation professionnelle géré collectivement avec les partenaires sociaux et reposant sur des cotisations obligatoires légales ne constitue pas la norme en Europe. Les entreprises espagnoles ont une obligation de participation au financement des actions de formation, selon une série de pourcentages qui doivent être calculés en fonction du coût total de la formation réalisée. De plus, au regard des plans développés et de la concrétisation des actions engagées, les entreprises peuvent bénéficier de bonifications financières.

En Italie, une loi de 1993 prévoit un financement de la formation professionnelle à l’intérieur de l’entreprise, la formation des formateurs, les programmes territoriaux et des programmes par secteurs mis en place par les partenaires sociaux. Le ministère du Travail a mis à disposition 75 M€ pour soutenir cette initiative en 2012. Des fonds supplémentaires proviennent du fonds social européen qui finance une série d’actions de formation en Italie.

Au Royaume Uni, la formation professionnelle résulte essentiellement du champ interne de l’entreprise. Seuls les contrats d’apprentissages peuvent être soutenus financièrement par le gouvernement. Entre 2009 et 2014, le nombre d’apprentis est passé de 491 300 à 851 000, soit une augmentation de 73 % en 5 ans. Les aides gouvernementales peuvent couvrir l’intégralité de la formation pour les 16-18 ans et  jusqu’à 50 % pour les travailleurs plus âgés. Sur cette période, la part des plus de 25 ans a plus que doublé, passant de 19 % à 42 %. D’après les chiffres du gouvernement, 350 000 apprentis ont plus de 25 ans et 50 000 ont plus de 50 ans.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

La nécessité de légiférer relève largement du caractère d’« impositions de toutes natures » dont relèvent les actuelles taxes d’apprentissage, contribution à la formation professionnelle continue ou la contribution supplémentaire à l’apprentissage[54]. Ces contributions constituent des prélèvements recouvrés par voie d'autorité qui n'ont ni la nature de taxe parafiscale, ni celle de redevance pour services rendus et n’ont jamais été qualifiées de cotisations sociales donnant lieu à contrepartie. Or, il appartient à la loi de déterminer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures, ce qui constitue l’objet central des présents articles.

2.1.1.   Pour le financement de l’apprentissage

Le Gouvernement a engagé en novembre 2017 une concertation pour la transformation de l’apprentissage. Le rapport remis à l’issue de cette concertation souligne la grande complexité du système de financement actuel.

Pour s’acquitter de leurs obligations, les entreprises ont le choix entre une approche régionale ou professionnelle au sein du réseau des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage.

Concernant la répartition des fonds de la taxe d’apprentissage et de la contribution supplémentaire vers les centres de formation d’apprentis, plusieurs acteurs en partagent la responsabilité, parmi lesquels les entreprises assujetties pouvant affecter directement des fonds, les organismes collecteurs formulant des propositions d’affectation des fonds non affectés par les entreprises, les régions sur la base des priorités arrêtées dans leur stratégie régionale d’apprentissage, notamment par des subventions et des aides diverses issues des délibérations du conseil régional. La multiplicité des responsabilités dans le système de financement nuit à sa lisibilité et peut se révéler être un frein pour les entreprises dans leurs recrutements d’apprentis.

En janvier 2018, le rapport[55] issu de la concertation relative au développement de l’apprentissage a souligné la nécessité de simplifier le mécanisme de la future contribution alternance, tant il apparaît aujourd’hui difficile pour nombre de chefs d’entreprises d’identifier leur collecteur de taxe d’apprentissage.

Le souhait du Gouvernement à travers le projet de loi est la mise en place d’un système de financement de l’apprentissage simplifié, transparent et sécurisant pour les entreprises et les apprentis, dans le cadre plus large d’un investissement maintenu dans la formation et les compétences.

2.1.2.   Pour la contribution relative à la formation professionnelle

Le projet de loi réforme en profondeur l’ensemble des dispositifs de la formation professionnelle continue. En effet :

Dès lors, il convient de modifier l’objet même de la contribution et ses modalités d’affectation de la contribution pour la formation professionnelle continue.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’objectif principal est de favoriser une augmentation de l’effort de formation en France tant pour les demandeurs d’emploi que pour les salariés, et d’apporter une meilleure réponse aux besoins en compétences, de court et de long terme, de notre économie. Cet effort additionnel de formation recherché devra s’effectuer à « iso rendement » en maintenant le même niveau de prélèvements obligatoires.

En effet, en 2016, en France métropolitaine, un peu moins de la moitié des salariés du secteur privé ont suivi une formation à but professionnel (y compris les formations diplômantes). Sur ce champ très large et très hétérogène, les taux d’accès par catégorie sociale et par taille d’entreprise varient fortement. Ainsi, la France se situe à un niveau intermédiaire en Europe lorsqu’on mesure de façon similaire l’accès à la formation professionnelle (taux d’accès de 50 % contre 71 % concernant la Suède). Ce sont, de loin, les pays scandinaves qui ont réussi à faire de la formation tout au long de la vie une réalité. Même les non-diplômés s’y forment fréquemment : 50 % y accèdent chaque année en Suède ou en Norvège,

Le taux de chômage des français sans diplôme est de 18 %, contre 6 % pour ceux ayant un diplôme bac + 2 et équivalent. Par ailleurs, selon une enquête européenne[56] de 2012, l’effort de formation en France était plus de deux fois inférieur à celui de l’Allemagne. Suite aux différents plans d’investissement pour la formation des demandeurs d’emploi, le taux d’accès à la formation des demandeurs d’emploi (10 % en 2015, 15,4 % en 2016)[57] a augmenté et se situe dans la moyenne européenne, devant la Finlande, l’Espagne et les Pays-Bas mais derrière la Belgique et l’Allemagne.

Ainsi, pour parvenir à améliorer le niveau de compétences des actifs en France, le financement doit être plus efficient tant pour la taxe d’apprentissage que pour la contribution à la formation professionnelle.

2.2.1.      Pour le financement de l’apprentissage

Les principaux objectifs poursuivis sont :

2.2.2.      Pour la contribution relative à la formation professionnelle continue

Les principaux objectifs poursuivis sont de :

2.3.  Options possibles et dispositif retenu

2.3.1.   Options envisagées

L’option de conserver les deux contributions (formation professionnelle et taxe d’apprentissage) dans leurs modes de calculs particuliers n’a pas été retenue. En effet, la réforme de l’alternance rapprochant les systèmes de financement et la gestion des contrats de professionnalisation et d’apprentissage, il était plus logique d’unifier ces deux participations. Par ailleurs, le choix de l’option retenue était rendu d’autant plus nécessaire par la mise en œuvre de la collecte par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF), qui prend tout son sens avec l’instauration d’une contribution unique.

Une autre option écartée était la fin immédiate de l’ensemble des exonérations relatives à la taxe d’apprentissage. En effet, certains type d’entreprises sont actuellement exonérées du paiement de la taxe (0,68 % de la masse salariale) soit en raison des caractéristiques de l’entreprise (les petites entreprises occupant un ou plusieurs apprentis et dont la masse salariale est inférieure à six SMIC annuels), soit en raison de leur nature (personnes morales intégralement exonérées de l’impôt sur les sociétés, personnes imposées au titre des bénéfices non commerciaux). Près de 890 000 entreprises sont assujetties à la taxe d’apprentissage et près de 1,4 million d’entreprises contribuent en matière de formation professionnelle continue. L’écart le plus important en nombre d’entreprises se porte sur les entreprises de moins de 11 salariés du fait notamment des exonérations applicables. Une fin immédiate du régime de ces exonérations aurait conduit à une augmentation de l’ordre de 600 M€ de prélèvements obligatoires.

2.3.2.   Option retenue

L’option retenue doit conjuguer la fusion des deux anciennes contributions, avec l’objectif de maintenir la compétitivité des entreprises et donc en évitant une augmentation générale de leurs obligations de financement.

Elle acte la création d’une contribution unique pour le financement de la formation professionnelle et de l’alternance avec un alignement des différentes modalités de calcul de cette contribution par la fin de différentes mesures d’exemption de la taxe d’apprentissage. L’objectif de la réforme n’étant pas une augmentation générale des obligations des entreprises, les gains obtenus sur ces entreprises permettent de faire baisser les taux de contribution demandés  à l’ensemble des employeurs de moins de 250 salariés, avec un effet de baisse accru pour les employeurs de moins de 11 salariés. En effet, ces dernières  bénéficieront du redéploiement de la moitié du rendement supérieur obtenu (baisse des taux de contribution obligatoires de 1,23 % à 0,99 %). Ce processus d’unification sera mené à partir de 2020 sur cinq ans, après une année 2019 transitoire spécifique. Il comporte deux paliers intermédiaires (2020-2021 et 2022-2023) permettant aux entreprises auparavant exonérées de la taxe d’apprentissage de ne pas être confrontées à une augmentation subite de leurs obligations.

Pour une meilleure lisibilité du système de financement, l’ancienne fraction de taxe d’apprentissage dite « hors quota » est désormais identifiée à part, dans une contribution spécifique, à hauteur de 0,08 % de la masse salariale des entreprises de 11 salariés et plus. Elle a pour objectif de favoriser le rapprochement entre le monde éducatif et le monde du travail en permettant à l’entreprise d’affecter librement et directement des fonds à des organismes et des établissements qui - notamment par leurs formations initiales technologiques et professionnelles - peuvent contribuer à ses besoins de compétences ou ceux de son secteur d’activités.

In fine, en 2024, les entreprises de moins de 11 salariés devront ainsi s’acquitter d’un versement égal à 0,99 % de leur masse salariale, contre 1,23 % actuellement, et les entreprises de 11 à 250 salariés 1,56 % de leur masse salariale contre 1,68 % aujourd’hui. Les entreprises de plus de 250 salariées resteront soumises à une obligation de financement égale à 1,68 % de leur masse salariale.


 

Effectif des entreprises

Système actuellement en vigueur

1 à moins de 11 salarié(s)

11 à moins de 50 salariés

de 50 à moins de 300 salariés

plus de 300 salariés

Plan de formation

0,40 %

0,20 %

0,10 %

-

Professionnalisation

0,15 %

0,30 %

0,30 %

0,40 %

Congé individuel de formation **

-

0,15 %

0,20 %

0,20 %

FPSPP

-

0,15 %

0,20 %

0,20 %

Compte personnel de formation

-

0,20 %

0,20 %

0,20 %

TOTAL FPC

0,55 %

1 %

1 %

1 %

 

 

 

 

 

 

 

 

TAXE D'APPRENTISSAGE

0,68 %

0,68 %

0,68 %

0,68 %

 

 

 

 

 

TOTAL

1,23 %

1,68 %

1,68 %

1,68 %

 

 

 

 

Effectif des entreprises

Nouveau système après réforme 2024

Inférieure à 11 salariés

11 à moins de 250 salariés

250 salariés et plus

 

Taux (%)

Taux (%)

Taux (%)

Formation

0,35 %

0,75 %

0,75 %

Alternance

0,64 %

0,73 %

0,85 %

Développement des formations professionnalisantes

-

0,08 %

0,08 %

TOTAL

0,99 %

1,56 %

1,68 %

 

Trois minorations de cette contribution sont prévues pour certains employeurs :

 

 

Effectif des entreprises

Système après réforme 2024

Inférieure à 11 salariés

11 à moins de 250 salariés

250 salariés et plus

 

 

Taux (%)

Taux (%)

Taux (%)

Régime général

0,99 %

1,56 %

1,68 %

Employeurs de moins de 11 salariés et employant un apprenti
Employeurs soumis à l'imposition sur les bénéfices non commerciaux

0,55 %

1,08 %

1,08 %

Établissements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle

0,75 %

1,32 %

1,44 %

 

Il convient de noter que le financement du conseil en évolution professionnelle sera effectué en prenant une part de l’ensemble des contributions, nonobstant la contribution au développement des contributions professionnalisantes.

Le processus d’unification de la collecte sera mené sur cinq ans avec deux paliers intermédiaires, permettant ainsi aux entreprises auparavant exonérées de la taxe d’apprentissage de ne pas être confrontées à une augmentation subite de leurs obligations, tandis que les entreprises assujetties à la taxe verront leurs obligations se réduire afin de parvenir à des taux uniques.

L’année 2019 fera en outre l’objet d’un traitement particulier. En effet, les contributions au titre de la formation professionnelle continue (compte personnel de formation, plan de formation, contrat de professionnalisation) de l’année N et servant à couvrir les dépenses de l’année N sont versées avant le 28 février de l’année N+1. En revanche, la taxe d’apprentissage de l’année N est comptabilisée de façon identique dans les entreprises et organisme collecteur de taxe d’apprentissage, mais elle couvre les dépenses de l’année N+1. En 2019, le montant appelé au titre de la masse salariale 2019 sera donc minoré du montant de la taxe d’apprentissage perçue au titre de la masse salariale 2018 au premier trimestre 2019.

2019 : neutralisation d’une part équivalente à la taxe d’apprentissage

Effectif des entreprises

Inférieure à 11 salariés

11 à moins de 250 salariés

250 salariés et plus

 

 

Taux (%)

Taux (%)

Taux (%)

Toutes les entreprises

0,55 %

1,00 %

1,00 %

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2020-2021

Effectif des entreprises

Inférieure à 11 salariés

11 à moins de 250 salariés

250 salariés et plus

 

 

Taux (%)

Taux (%)

Taux (%)

Entreprises auparavant soumises à la taxe d'apprentissage

1,12 %

1,64 %

1,68 %

Entreprises auparavant exonérées de la taxe d'apprentissage

0,66 %

1,27 %

1,38 %

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2022-2023

Effectif des entreprises

Inférieure à 11 salariés

11 à moins de 250 salariés

250 salariés et plus

 

 

Taux (%)

Taux (%)

Taux (%)

Entreprises auparavant soumises à la taxe d'apprentissage

1,05 %

1,60 %

1,68 %

Entreprises auparavant exonérées de la taxe d'apprentissage

0,83 %

1,42 %

1,53 %

 

Pour les entreprises, la collecte est facilitée et systématisée par la nouvelle compétence des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, qui sera effective au plus tard le 1er janvier 2021 en remplacement d’un système reposant sur deux réseaux : les organismes paritaires collecteurs agrées et organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage. Cette collecte permettra de collecter des fonds au mois le mois et de mieux identifier les créations d’entreprises.

La collecte sera ensuite répartie par France compétences pour le financement du compte personnel de formation, de la formation des demandeurs d’emploi, de l’aide au développement des compétences dans les entreprises de moins de 50 salariés et de l’alternance. Hors ce qui est affecté pour la péréquation, les sommes collectées sont directement versées aux opérateurs de compétences qui, pour le compte des branches, assurent le paiement des contrats de professionnalisation et d’apprentissage. Par ailleurs, une partie des fonds est versée aux régions par France compétences pour la prise en charge de la majoration des coûts des contrats et l’investissement.

3.         Impacts des dispositions envisagées

3.1.  Impacts économiques et financiers

3.1.1.   Impact sur les entreprises

Du fait du mécanisme d’équilibre général de l’effort financier des entreprises au financement de la formation professionnelle et de l’alternance, la mise en œuvre de la réforme ne représentera pas une augmentation des prélèvements obligatoires pour les entreprises. Pour les entreprises de moins de 250 salariés auparavant assujetties à la taxe d’apprentissage, l’effet de réduction des taux de contribution permettra même un redéploiement des ressources ainsi obtenues (326 M€ estimés en 2024). 

La réforme du financement de l’alternance et tout particulièrement de l’apprentissage permettra aux entreprises de faire plus souvent appel à cette voie de formation et d’insertion dans l’emploi.

Par ailleurs, le mécanisme de financement accru des entreprises de moins de 50 salariés permettra un accès plus large de cette catégorie d’entreprise à la formation professionnelle.

La collecte effectuée par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales sera par ailleurs gage de simplification.

3.1.2.   Impact budgétaire

Le compte d’affectation spéciale pour le développement et la modernisation de l’apprentissage qui servait à verser les dotations aux régions sera supprimé.

Une ressource supplémentaire sera versée à l’État, via France Compétences, pour le financement de la formation des demandeurs d’emploi ; elle servira à financer en partie le plan d’investissements pour les compétences qui fait l’objet de conventions avec les régions, en cours de négociation.

3.2.  Impacts sur les collectivités territoriales

En matière d’apprentissage, les régions disposeront de capacités d’actions et de ressources pour financer les formations en centre de formation d’apprentis à hauteur de 250 M€ et d’un montant à déterminer par décret en matière de dépenses d’investissement. Ces ressources ne relèvent pas de l’exercice d’une compétence obligatoire. Elles s’inscrivent dans le cadre du premier alinéa de l’article 72-2 de la Constitution, selon lequel « les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi ».

Les régions se voient par ailleurs reconnaitre une place au sein du conseil d’administration de France compétences. Associé à l’ensemble des décisions (liées notamment à la gestion des fonds de péréquation relatifs à l’alternance), elles pourront enrichir la gouvernance dans sa dimension territoriale.

En matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi, les régions, à l’appui des conventions passées avec l’État au titre de la mise en œuvre du plan d’investissement pour les compétences, se verront conventionnellement confier des ressources supplémentaires (à celles déjà perçues au titre des décentralisations) issues de la nouvelle contribution unique pour le financement de la formation professionnelle et de l’alternance.

Le nouveau contexte de mise en œuvre de l’apprentissage et de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi impliquera une réorganisation des services concernés au sein des régions.

3.3.  Impacts sur les services administratifs

Les chambres consulaires n’exerceront plus l’activité de collecte et de répartition de la taxe d’apprentissage et de la contribution supplémentaire à l’apprentissage, activité qui se concentre actuellement sur une partie de l’année. Elles sont recentrées sur leur rôle d’offreur de formation et de conseil aux entreprises. Elles peuvent par ailleurs, se voir déléguées des missions par les centres de formation d’apprentis qui le souhaiteraient.

La structure chargée d’organiser une péréquation des fonds de l’alternance entre les différentes branches professionnelles au vu de leurs capacités contributives et de leurs réalisations et de verser la dotation aux régions au titre de la majoration du coût du contrat, qui prendra la forme d’un établissement public administratif. Dénommé France compétences, cet établissement recevra à ce titre une fraction de la contribution formation professionnelle dédiée à l’alternance et aura la charge d’assumer l’ensemble des procédures administratives et de gestion découlant des missions qui lui seront assignées.

3.4.  Impacts sociaux

Le développement de l’apprentissage et de l’alternance en général est essentiel pour lutter contre le chômage, notamment des jeunes, en leur offrant la possibilité d’une autre voie de réussite éducative et professionnelle, et d’accompagner parfois des réorientations. En France, seulement 7 % des jeunes suivent un apprentissage. Pourtant, dans les 7 mois qui suivent la fin du contrat d’apprentissage, sept apprentis sur dix trouvent un emploi, dont 60 % en CDI. C’est également une chance pour les employeurs qui déclarent (80 %) être satisfaits des apprentis qu’ils recrutent et qui réembauchent à la fin du contrat.

L’économie française présente un profil atypique au sein des pays de l’OCDE : les actifs en emploi se trouvent presque à 50 % dans une situation d’inadéquation de leur qualification, soit le second taux le plus élevé de l’OCDE[58]. Cette situation objective de déclassement des diplômés, facteur majeur d’affaiblissement du lien social, illustre les difficultés qu’ont les acteurs, et particulièrement les petites et moyennes entreprises, à construire une politique de gestion des compétences qui permette de tirer tous les résultats possibles des niveaux de qualification existants. C’est dans ce cadre que s’apprécie aussi la création d’une aide au développement de leurs compétences ciblée sur les entreprises de moins de 50 salariés.

4.         Consultations et modalités d’application

4.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

4.2.  Modalités d’application

4.2.1.   Application dans le temps

L’application dans le temps des dispositions est échelonnée sur les années 2019 à 2024, certaines dispositions étant applicables à compter du 1er janvier 2019 :

Collecte opérateurs de compétences

2019

Collecte diminuée de la part apprentissage

2020

Collecte avec taux progressifs, maintien de l'exonération de la CSA pour les entreprises auparavant exonérées de la taxe d’apprentissage

Collecte URSSAF

2021

Collecte avec taux progressifs, application de la CSA pour les entreprises auparavant exonérées de la taxe d’apprentissage

2022

Collecte totale avec taux progressifs

2023

Collecte totale avec taux progressifs

2024

Collecte totale avec taux cibles

4.2.2.   Application dans l’espace

En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à la Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les modalités particulières d’application des dispositions relatives à la formation professionnelle tout au long de la vie sont déterminées par décret.

En outre, il est prévu à l’article 67 du présent projet de loi, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, que le Gouvernement soit autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi afin d’harmoniser l’état du droit en adaptant les dispositions de la loi aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

4.2.3.   Textes d’application

Un décret en Conseil d’État doit déterminer les dispositions d’application du chapitre 1 relatif à la  contribution unique pour la formation professionnelle et l’apprentissage, notamment l’organisation, les modalités et les critères d’affectation de la participation des employeurs, ainsi que les modalités et conditions de recouvrement des différentes contributions.

Deux décrets doivent déterminer les modalités et critères d’affectation de la contribution à la formation professionnelle et à l’apprentissage des employeurs qui fait l’objet de taux dérogatoires.


Articles 19 et 20 - Opérateurs de compétences

1.         État des lieux

Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) sont des organismes chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle continue et de financer la formation des salariés.

L’instauration en 1971 d’une obligation légale faite aux entreprises de financer la formation de leurs salariés s’est accompagnée de la création d’un dispositif permettant le versement de leur contribution à un organisme agréé par l’État, dans une logique de mutualisation et d’assurance sociale, les fonds non utilisés dans certaines entreprises pouvant bénéficier à des salariés d’autres entreprises. Il a été confié aux partenaires sociaux le soin d’organiser la collecte et la redistribution par le biais des OPCA, créés par voie d’accords de branche conclus entre les organisations représentatives des employeurs et des salariés.

Plusieurs réformes ont modifié la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente dite loi Delors. La loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie a par exemple organisé une procédure de nouvel agrément de l’ensemble des OPCA afin de renforcer leur efficacité en relevant le seuil de collecte minimal (de 15 M€ à 100 M€) et de développer leurs missions, notamment en services aux petites et moyennes entreprises sur la base d’une convention d’objectifs et de moyens négociée avec l’État. Cette réforme a entraîné une réduction importante du nombre d’OPCA : passage de 93 à 20 organismes agréés.

Il existe deux types d’OPCA : les OPCA de branche (ou interbranches), au nombre de 18, et deux organismes interprofessionnels et interbranches.

Avec un effectif total de 5 447 salariés en 2016, les OPCA assurent la collecte et la mutualisation des fonds de la formation professionnelle continue des entreprises adhérentes.

En effet les employeurs sont soumis à une obligation annuelle de participation au développement de la formation professionnelle continue qui se traduit par :

1.1.  La collecte de la contribution unique des entreprises par les OPCA

Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) sont, depuis la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, collecteurs uniques des contributions des entreprises destinées au développement de la formation professionnelle. L’ensemble des versements au titre de la contribution unique est géré paritairement au sein de sections consacrées respectivement au financement du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels ; du congé individuel de formation ; du compte personnel de formation ; des actions de professionnalisation et du plan de formation.

Une fois collectés, les versements au titre de la contribution unique pour les entreprises sont répartis en fonction de l’effectif de l’entreprise dans les sections et sous-sections, où ils sont ensuite mutualisés.

Au-delà de la collecte des contributions obligatoires, il est reconnu aux OPCA la possibilité de recevoir des contributions supplémentaires conventionnelles ou versées volontairement par les entreprises. Ces contributions font l’objet d’un suivi comptable distinct. Au total, en 2016, le montant total des versements volontaires des entreprises aux OPCA s’est élevé à 1 306 M€. Les versements conventionnels se sont élevés à 495 M€.

Les OPCA peuvent également recevoir des ressources complémentaires du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), soit au titre de la péréquation, soit au titre des appels à projets pour lesquels ils ont été sélectionnés. Ils peuvent également percevoir des subventions d’autres financeurs (Europe, État, collectivités territoriales, autres acteurs publics ou parapublics).

Par ailleurs, les OPCA peuvent demander à être habilités en qualité d’organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage. À ce jour, 19 OPCA ont été habilités à collecter la taxe d’apprentissage (seul UNIFAF n’est pas collecteur de la taxe).

Depuis 2005, la part des dépenses de formation transitant chaque année par les OPCA est en augmentation. En 2016, plus de 7 Md€ ont été collectés par les OPCA (+ 3,5 % par rapport à 2015).

OPCA

TOTAL COLLECTE FPC 2016

OPCA

TOTAL COLLECTE FPC 2016

AGEFOS-PME

 969 570 216 €

FAFSEA

 286 668 581 €

OPCAIM

 766 073 834 €

OPCALIM

 264 845 009 €

OPCALIA

 643 869 514 €

FAF TT

 263 900 919 €

UNIFAF

 414 646 309 €

ACTALIANS

 257 814 008 €

CONSTRUCTYS

 377 183 823 €

INTERGROS

 238 782 254 €

FAFIEC

 376 875 464 €

OPCABAIA

212 524 080 €

UNIFORMATION

 376 324 489 €

AFDAS

  193 692 097 € 

OPCA TRANSPORTS

 340 433 856 €

ANFA

 162 003 157 €

OPCA DEFI

 319 025 070 €

FAFIH

 157 505 201 €

FORCO

 296 916 708 €

OPCA 3+

 107 115 499 €

 

 

TOTAL

7 025 770 088 €

1.2.  Les autres missions des OPCA

Outre leur rôle de collecteur de la contribution unique et des contributions supplémentaires, les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) ont pour mission de :

Pour l’accomplissement de ses missions, l’OPCA assure un service de proximité au bénéfice des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises (TPE/PME) (TPE-PME) et des entreprises du milieu agricole et rural permettant d’améliorer l’information et l’accès des entreprises à la formation professionnelle.

Il peut prendre en charge les coûts de diagnostics de ces entreprises selon les modalités fixées par accord de branche ou par accord collectif d’un OPCA interprofessionnel.

Dans les limites posées par la loi, le règlement et le ou les accords collectifs qui le régissent, le conseil d’administration paritaire de l’OPCA détermine librement les règles de financement des formations : montant de prise en charge des coûts pédagogiques et/ou des frais annexes, type et durée des actions de formation jugées prioritaires, paiement direct à l’organisme de formation ou remboursement à l’entreprise, etc.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) structurent le paysage de la formation professionnelle, disposent de compétences étendues et constituent de réels partenaires branches et des entreprises et pour certains dispositifs dont ils ont la charge des salariés.

Toutefois, le réseau des OPCA révèle certaines faiblesses. Le fonctionnement et les missions des organismes paritaires collecteurs agréés doivent évoluer, dans une logique de simplification, afin de rendre les circuits de financement plus efficients, notamment grâce à un collecteur unique, et permettre une plus grande cohérence et lisibilité du fonctionnement et des missions des organismes paritaires, recentrés autour de filières économiques. Le développement des filières permet d’appréhender les secteurs économiques dans une approche globale qui favorise l’émergence des projets innovants qui répondent à la fois à des enjeux environnementaux, de compétitivité et de dynamique territoriale.

Cette approche permet de renforcer la synergie entre évolutions des métiers et  besoins en formation. Elle renforce le développement des passerelles entre les certifications et favorise la mobilité des salariés dans des logiques de parcours professionnels. Cette sécurisation des compétences est l’une des clés de la croissance économique et constitue un enjeu fondamental pour l’attractivité des entreprises.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le texte présenté a pour but d’adapter les dispositions législatives afférentes aux organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) à la réforme de la collecte et aux nouvelles possibilités de financement des organismes paritaires (alternance, aide aux TPE et compte personnel de formation -  transition professionnelle).

Il vise par ailleurs à rénover le réseau des OPCA, avec la création d’un réseau d’opérateurs de compétences. Il procède à des évolutions majeures des missions des organismes paritaires en réexaminant notamment leur fonction de collecteur.

Les mesures proposées visent à permettre des économies d'échelle, une meilleure gestion des fonds collectés et une meilleure prise en compte des mobilités professionnelles et plus de transparence.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Option envisagée

L’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 avait pour ambition de reconnaître aux branches professionnelles  la responsabilité de définir les axes prioritaires en matière d’alternance et de formations et certifications professionnelles de la branche, correspondant aux besoins en emplois et compétences des entreprises, et d’orienter les moyens mis en œuvre pour leur développement.

Dans ce cadre, les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) devaient contribuer à garantir l’optimisation et la maîtrise des coûts de formation en cohérence avec la politique de développement de la qualité de la formation,

Ils avaient aussi vocation à mettre à disposition des entreprises une information à destination des salariés sur l’existence du conseil en évolution professionnelle notamment à l’occasion de l’entretien professionnel.

Il était également envisagé de mettre en place un dispositif ouvert à l’ensemble des entreprises adhérentes non couvertes par un accord de branche et destiné à développer, dans un cadre mutualisé, le compte personnel de formation auprès des entreprises et de leurs salariés.

S’agissant de l’alternance, aucune évolution majeure prévue avec une collecte assurée au niveau de l’OPCA dont relève l’entreprise, pour assurer la prise en charge des coûts de formation soit par remboursement à l’entreprise soit par paiement direct à  l’organisme de formation par  l’OPCA agissant pour le compte de l’entreprise ; le système de péréquation pour financer les contrats d’alternance étant maintenu en l’état.

La logique de filière n’était abordée que sous un angle de travail d’observation prospective

Une rénovation profonde de refonte des OPCA est évoquée au travers d’un chantier devant être mené entre l’État et les partenaires sociaux afin d’adapter les missions et le plan comptable des OPCA, notamment en matière de frais de gestion, et de définition d’indicateurs de pilotage stratégique de leur mission dans une recherche d’efficience et d’amélioration du service rendu.

Il est rappelé que les OPCA constituent aujourd’hui un des outils techniques au service de la politique définie et conduite par les partenaires sociaux au sein des branches professionnelles et au niveau interprofessionnel.

Ils contribuent activement au développement de l’emploi et des compétences par leur service de proximité aux entreprises et à la simplification en matière de financement de la politique d’alternance. Ils ont notamment un rôle :

Dans une perspective d’efficacité et de visibilité auprès des entreprises, ils assurent la collecte des contributions formation professionnelle et concourent à la prise en charge des coûts afférents.

Une contribution unique et obligatoire de toutes les entreprises est versée chaque année à l'OPCA désigné par un accord de branche dont elles relèvent ou, à défaut, à un OPCA à compétence interprofessionnelle comme dans le système actuel. Les OPCA gèrent ces différentes contributions au sein de sections financières identifiées. Des règles relatives à la mutualisation,  aux disponibilités excédentaires et aux modalités de financement sont adaptées sur la base de dispositions déjà existantes.

3.2.  Option retenue

3.2.1.        Le nouveau schéma financier des opérateurs de compétences

a)      La collecte de la contribution unique par les URSSAF en 2021

Une réflexion a été engagée sur le système de collecte de la contribution unique des entreprises, actuellement gérée par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA). Guidée par un objectif de simplification de la relation de recouvrement de la contribution et de réduction des coûts de gestion, elle définit de nouvelles modalités de collecte.

La loi prévoit que la collecte de la contribution unique reste de la compétence des opérateurs de compétences jusqu’en 2020. À compter de 2021, la collecte de la cotisation unique (apprentissage et formation) sera confiée au réseau des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) et de la mutualité sociale agricole (MSA) pour le secteur agricole. Au vu de l’importance des travaux à mener et des impacts législatifs qui dépassent le domaine de la formation professionnelle, la réforme du réseau de collecte sera réalisée par voie d’ordonnance. La demande d’habilitation est incluse dans le projet de loi et établit la date de basculement à la collecte URSSAF à compter du 1er janvier 2021.

b)     Les possibilités de financement transitant par les comptes des opérateurs de compétences

Les possibilités de financement transitant par les organismes paritaires évoluent, afin de s’adapter au nouveau schéma financier prévu par le texte.

Les opérateurs de compétences assurent désormais la gestion des fonds pour les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), le compte personnel de formation de transition professionnelle ainsi que la gestion des fonds de l’alternance. Ils financeront les centres de formation des apprentis, en application des coûts contrats définis par les branches et appuieront les branches qui le souhaitent dans la co-construction des diplômes. Le projet de loi définit de façon plus claire leurs possibilités de recevoir des ressources supplémentaires dans le cadre de partenariats publics/privés.

3.2.2.      La révision du rôle et des missions des organismes paritaires, outils au service des branches et des filières économiques

Le texte procède à une révision du rôle des organismes paritaires, désormais dénommés opérateurs de compétences, afin de les conforter comme des outils au service des branches et des filières économiques, au profit des entreprises et des actifs.

a)      L’évolution des missions des opérateurs de compétences

Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) se transforment de droit en opérateurs de compétences au 1er janvier 2019 et voient leurs missions évoluer en réaffirmant leur rôle vis-à-vis des branches professionnelles, des salariés dont l’emploi est menacé et envers les très petites, petites et moyennes entreprises.

Ainsi, ils ont désormais pour mission d’assurer le financement des contrats d’apprentissage et de professionnalisation, selon les niveaux de prise en charge fixés par les branches et d’apporter l’appui technique nécessaire aux branches adhérentes pour établir la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences et pour leur mission de certification.

Pour les salariés, et notamment ceux dont l’emploi est menacé au regard des mutations technologiques, organisationnelles et professionnelles, les opérateurs de compétences devront assurer la mise en œuvre du projet de transition professionnelle, une modalité spécifique d’utilisation du compte personnel de formation sur des certifications longues liées à une reconversion notamment.

Pour les très petites, petites et moyennes entreprises, le rôle des opérateurs de compétences est réaffirmé, avec un service de proximité au bénéfice des très petites, petites et moyennes entreprises permettant d'améliorer l'information et l'accès des salariés de ces entreprises à la formation professionnelle et d'accompagner ces entreprises dans l'analyse et la définition de leurs besoins en matière de formation professionnelle, notamment au regard des mutations économiques et techniques de leur secteur d’activité. Les opérateurs de compétences permettront auront pour objectif de permettre une articulation et une intégration accrue entre le travail et le processus de formation lui-même, dans une logique d’ingénierie des compétences.

Enfin et surtout, les opérateurs de compétences appuieront les branches professionnelles à la construction des référentiels de certification qui décrivent précisément les capacités, compétences et savoirs exigés pour l’obtention de la certification visée.

b)     La rénovation du réseau des opérateurs de compétences vers une logique de filière

La branche est un échelon de référence pour l’analyse et le dialogue social qui regroupe des entreprises selon une activité dominante dans le but de structurer le paysage conventionnel, d’organiser, de rationaliser le tissu économique et d’encadrer la formation professionnelle. Les branches peuvent être des lieux de régulation pertinents si elles sont structurées autour de filières économiques cohérentes. Le mouvement de rationalisation des branches est engagé. La rénovation du réseau des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) est une opportunité à saisir en parallèle.

c)      Un regroupement cohérent des opérateurs de compétences

La branche constitue un échelon de référence pour développer des stratégies de développement de compétences. Les branches peuvent être des lieux de régulation pertinents, si elles sont structurées autour de filières économiques cohérentes.

La loi prévoit de recentrer les organismes paritaires autour d’une logique de filière. Ce recentrage amènera à un regroupement d’opérateurs de compétences, à la recherche d’une cohérence professionnelle accrue.

d)     Procédure

Une démarche volontariste de négociation sera engagée entre les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives dans le champ d'application de l'accord.

Si les branches peuvent choisir librement l’organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) auquel elles appartiennent, le rôle de l’État en tant que garant de « la cohérence du champ d’intervention professionnel » (article R. 6332-8) est réaffirmé, et employé dans le cadre d’une procédure de ré-agrément telle que menée suite à la réforme du 24 novembre 2009 qui avait retiré l’ensemble des agréments aux OPCA. Pour rappel, la réforme du 24 novembre 2009 a modifié en profondeur le réseau de collecte de la formation professionnelle continue en faisant passer de 90 à 20 le nombre d’OPCA. En l’absence d’accord, l’autorité administrative désignera l’organisme paritaire agréé en fonction de la cohérence du champ professionnel.

3.2.3.      La rénovation des outils de régulation entre l’État et les opérateurs de compétences : les conventions d’objectifs et de performances comme outil de pilotage stratégique des opérateurs de compétences

L’article 6332-1-1du code du travail dispose qu’« une convention triennale d'objectifs et de moyens est conclue entre chaque organisme collecteur paritaire agréé et l'État ».

Cette convention définit « les modalités de financement et de mise en œuvre des missions des organismes collecteurs paritaires agréés ». Ces conventions contractualisent les relations entre l’État et les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) depuis 2012. Elles sont centrées sur les frais de gestion et d’information, les frais relatifs aux missions des OPCA et plus récemment sur des objectifs de moyens.

Les missions des OPCA et leurs enjeux stratégiques ne font que l’objet d’un rappel introductif, malgré la présence d’indicateurs de moyens correspondant à des objectifs partagés de politique de formation et d’indicateurs spécifiques sur des objectifs propre à chaque OPCA (numérisation de l’offre de service, formation des demandeurs d’emploi…).

Cette approche très ciblée sur les frais de gestion a plusieurs explications dont notamment celle pour les services de l’État de reproduire un processus classique de contractualisation sur les taux de gestion, de même nature que le contrôle administratif et budgétaire appliqué aux opérateurs de l’État.

Il s’agit aujourd’hui dans le cadre de la réforme de renforcer le dialogue entre l’État sur la conformité des projets portés par les opérateurs de compétences et de leur réalisation aux politiques impulsées par les pouvoirs publics et sur les résultats de leur activité.

Ainsi, l’article L. 6332-1-4 prévoit la contractualisation entre l’État et les opérateurs de compétences autour d’objectifs et de performances (COP). Cette convention s’établira sur la base « d’un cadre d’action, d’objectifs quantifiés et de résultats attendus des opérateurs dans la conduite de leurs missions ».

Ainsi les COP deviennent un levier de transformation des relations entre l’État et les opérateurs de compétences vers une stratégie identifiée et partagée.

Ces COP déclineront le projet stratégique que l’exécutif et la gouvernance de chaque opérateur de compétences mettra en œuvre pour accompagner la mise en œuvre de la réforme. Ces conventions seront dans la durée une garantie de bonne transition, de bonne compréhension réciproque, et d’équilibre vertueux entre pilotage stratégique des pouvoirs publics et autonomie du paritarisme.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impact sur le système de gouvernance de la formation professionnelle

La rénovation du réseau des opérateurs de compétences vers une logique de filière permettra d’introduire une plus grande cohérence et efficience dans la gestion des dispositifs de formation professionnelle.

La diminution du nombre d’opérateurs de compétences sur la base de secteurs d’activité cohérents pourrait entraîner une baisse des frais de fonctionnement des organismes paritaires : réalisation d’économies d’échelle et coûts plus transparents (pour rappel frais de gestion et de mission des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) en 2016 : 498 M€). Ces structures de grande taille seront capables d’assurer une présence décentralisée sur le territoire afin d’apporter un service de proximité aux TPE-PME.

Le regroupement par filière rendra la gouvernance de la formation professionnelle plus cohérente et lisible pour les bénéficiaires. Il pourrait toutefois entrainer temporairement des difficultés pour les entreprises à identifier le nouvel opérateur dont elles relèvent. Un temps d’adaptation des acteurs économiques sera nécessaire.

Cette restructuration profonde pourrait se heurter à des difficultés dans les choix de rapprochement. Si l’existence de secteurs s’impose d’elle-même (industrie, BTP, agriculture), certains domaines ont des contours ou des logiques moins évidents.

4.2.  Impact sur le réseau des URSSAF

La collecte sera réalisée par le réseau des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) dès le 1er janvier 2021. Cette modification est susceptible d’entrainer une augmentation de la collecte globale de la formation professionnelle car l’URSSAF dispose de la visibilité de l’ensemble des entreprises assujetties et des moyens de contrôles organisés. Ce changement permettra également aux Opérateurs de compétences de se concentrer uniquement sur leur offre de service auprès des entreprises et de pouvoir développer de nouveaux services pour être plus opérationnels en tant que financeurs de formation.

Par ailleurs, les coûts de collecte devraient diminuer : représentant actuellement environ 0,7 % de la collecte, les coûts moyens URSSAF sont de 0,26 % de coût de gestion des sommes encaissées.

Par ailleurs, les URSSAF, dans le cadre des reversements de la contribution aux opérateurs de compétences, pourront également leur transmettre des informations précises sur le périmètre des entreprises collectées et leurs effectifs. Ce qui permettra aux opérateurs de compétence d’adapter leur offre de service, notamment pour accompagner les entreprises dans leurs mutations économiques.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Le système de collecte de la contribution unique des entreprises, actuellement gérée par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) sera à partir de 2021 gérée par l’URSSAF et de la mutualité sociale agricole (MSA) pour le secteur agricole. Durant l’année de transition, la loi prévoit que la collecte de la contribution unique reste de la compétence des opérateurs de compétences jusqu’en 2020. À compter de 2021, la collecte de la cotisation unique (apprentissage et formation) sera confiée au réseau des URSSAF et de la MSA pour le secteur agricole. Au vu de l’importance des travaux à mener et des impacts législatifs qui dépassent le domaine de la formation professionnelle, la réforme du réseau de collecte sera réalisée par voie d’ordonnance. La demande d’habilitation est incluse dans le projet de loi et établit la date de basculement à la collecte URSSAF à compter du 1er janvier 2021.

5.2.2.      Application dans l’espace

Ces nouvelles dispositions s’appliquent en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer.

5.2.3.      Textes d’application

Les modalités réglementaires relatives aux organismes paritaires collecteurs agréés sont prévues par le décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014. Plusieurs dispositions réglementaires devront faire l’objet de modifications :

Les dispositions relatives au transfert du recouvrement de la contribution à la formation professionnelle seront déterminées par ordonnance.

6.         Justification du délai d’habilitation

Les dispositions relatives au transfert du recouvrement de la contribution à la formation professionnelle nécessitent un délai d’habilitation de dix-huit mois afin de mener à terme et de sécuriser juridiquement les opérations nécessaires au sein des différents réseaux concernés (opérateurs de compétences, URSSAF et caisses de mutualité sociale agricole).


Article 21 - Contrôle

1.         État des lieux

L’État exerce un contrôle administratif et financier sur les contributions versées par les employeurs aux organismes gestionnaire des fonds de la formation au titre de leur participation obligatoire au développement de la formation professionnelle ainsi que sur l’exécution des actions de formation financées par ces contributions. Le contrôle porte également sur les activités conduites en matière de formation professionnelle par les organismes paritaires agréés (OPCA et OPACIF), les Fonds d’assurance formation de non-salariés, les organismes de formation et leurs sous-traitants, les organismes chargés de réaliser des bilans de compétences, les organismes qui interviennent dans le déroulement des actions destinées à la validation des acquis de l’expérience (VAE) ainsi que sur les activités d’accueil, d’information, d’orientation et d’évaluation en matière de formation professionnelle continue (articles L. 6361-1 et L. 6361-2 du code du travail).

Par ailleurs, l’État exerce des contrôles administratifs et financiers en matière d’apprentissage (articles L. 6252-4 et suivants du code du travail) auprès des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage, des centre de formation d’apprentis et des établissements bénéficiaires de fonds de l’apprentissage.

Le champ du contrôle de la formation professionnelle porte principalement sur l’utilisation des contributions légales des employeurs pour la formation des salariés et des indépendants pour leur propre formations (5,14 Md€), sur l’usage des fonds reçus par les prestataires de formation quelle que soit l’origine des financements (13,47 Md€) ainsi que sur l’usage des fonds versés au titre de l’apprentissage hors fraction régionale (1,4 Md€).

Pour assurer les contrôles, 160 inspecteurs du travail, contrôleurs du travail et agents de la fonction publique de l’État de catégorie A assermentés et commissionnés à cette fin sont répartis sur l’ensemble du territoire au sein des Directions (régionales) des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE et DIECCTE). Ils sont appuyés par la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP). Les contrôles s’exercent dans le cadre d’une procédure contradictoire prévue par le code du travail :

Lors des contrôles les agents s’assurent que les fonds dédiés à la formation professionnelle continue ou à l’apprentissage ont été utilisées conformément aux dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles.

Dans ce cadre, les inspecteurs et contrôleurs engagent chaque année entre 1600 et 2000 contrôles.

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Effectifs catégories A et B

157,3

164,7

160,0

157,0

151,4

153,1

159,4

156,3

147,2

160,6

Nombre de contrôles

1 643

2 149

2 132

1 970

1 672

2 129

2 017

1 684

1 854

1 910

dont entreprises

783

1 060

1 243

1 098

884

826

651

502

575

722

dont organismes de formation

315

330

474

719

572

772

712

630

719

801

dont FSE

503

629

367

115

203

204

149

170

157

118

dont CSA

0

0

0

0

0

318

501

373

376

269

Les contrôles ne donnent pas tous lieu à des décisions administratives de redressements puisque de nombreuses opérations de vérifications conduisent à des recommandations.

Ainsi de 2010 à 2015, 4 124 contrôles de prestataires de formation ont été engagés et les rapports concluaient à des sanctions financières pour 562 d’entre eux pour un montant de 66,39 M€. Ce qui correspond à 13,6 % des organismes contrôlés et représentait 3,1 % des sommes contrôlées.

La cour des comptes dans son rapport sur la lutte contre la fraude en matière de formation professionnelle concluait à la nécessité de renforcer l’action de l’État sur le contrôle des dispensateurs de formation. Ce renforcement de la régulation du système de formation professionnelle a été engagé avec la mise en place concrète au 1er janvier 2017 des mesures pour s’assurer de la capacité des organismes à mettre en œuvre des actions de qualité. Il sera amplifié par les mesures du projet de loi relatives à la qualité de l’offre de formation et par la certification des organismes de formation.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

La réforme conduit à mettre en place une contribution à la formation professionnelle à la place de la contribution unique au développement de la formation professionnelle continue d’une part et à la taxe d’apprentissage d’autre part. Par ailleurs, le champ de la formation professionnelle est étendu aux formations d’apprentis et ces formations pourront être dispensées par les organismes de formation. Enfin, d’importantes évolutions sont introduites concernant les organismes financeurs et leurs missions.

Pour ces raisons, il est nécessaire d’adapter les dispositions relatives au contrôle de la formation professionnelle continue et au contrôle de l’apprentissage.

La loi fixe les organismes qui sont soumis aux contrôles administratifs et financiers, elle précise la nature de ces contrôles et désigne les agents qui en ont la charge. De plus, elle précise les obligations des organismes et les justifications qu’ils doivent apporter, enfin elle fixe les sanctions en cas de non-respect des dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles.

2.2.  Objectifs poursuivis

Il convient de maintenir la cohérence des dispositions législatives relatives aux contrôles administratif et financier, aux obligations de justification et aux sanctions avec les dispositions qui déterminent les modalités de financement de la formation professionnelle, les acteurs ou les financeurs qui interviennent dans le système de formation en France.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Deux options ont été envisagées pour adapter les dispositions relatives aux contrôles administratif et financier, aux procédures de contrôles et aux sanctions.

La première consistait à modifier deux séries de dispositions, l’une relative à l’apprentissage et l’autre relative à la formation professionnelle continue.

La seconde consistait à regrouper les dispositions dans un souci de simplification.

Dans les deux options, la nature même des modifications à opérer relèvent de la loi s’agissant d’obligations s’imposant à des acteurs essentiellement privés et pouvant conduire à des sanctions financières ayant le caractère de sanctions administratives.

Afin de ne pas multiplier les textes de compétences, les obligations de justifications et les sanctions, il a été fait le choix d’identifier les acteurs de la formation professionnelle continue et les acteurs de la formation professionnelle initiale en apprentissage dans le champ commun de la formation professionnelle au sens de la sixième partie du code du travail.

3.2.  Option retenue

Le projet d’article poursuit ainsi plusieurs objectifs :

1)     Harmoniser et regrouper le champ du contrôle de la formation professionnelle continue et celui de l’apprentissage et tirer les conséquences du fait que les actions de formation par l’apprentissage peuvent être désormais dispensées par tout organisme de formation ;

2)     Prendre en compte les nouvelles modalités de financement de la formation professionnelle par les employeurs qui se substituent à la contribution au développement professionnelle, à la taxe d’apprentissage et à la contribution supplémentaire à l’apprentissage ;

3)     Prendre en compte l’intervention de nouveaux organismes financeurs dans le champ de la formation professionnelle et supprimer la mention des organismes qui n’interviendront plus en matière de financement des actions ;

4)     Définir les obligations auxquelles sont soumis les nouveaux acteurs et les sanctions en l’absence de respect des obligations ;

5)     Procéder aux ajustements rédactionnels et aux précisions utiles pour clarifier le droit applicable en matière de contrôle de la formation professionnelle.

3.2.1.      Harmoniser et regrouper « formation professionnelle continue et apprentissage »

Le choix de cette seconde option est d’autant plus cohérent que le financement de la formation professionnelle continue et l’apprentissage doit dorénavant être effectué par une nouvelle contribution regroupant la contribution à la formation professionnelle continue et la taxe d’apprentissage.

De plus, les formations en apprentissage pourront être désormais dispensées par les organismes de formation sous réserve qu’ils respectent les dispositions spécifiques à l’apprentissage.

Ce choix a conduit à diverses modifications :

a)      La suppression des textes dédiés au contrôle des acteurs de l’apprentissage (articles L. 6252-4 à L. 6252-13) qu’il convient de réintroduire dans les dispositions du titre VI du livre III de la sixième partie du code du travail. Tel est l’objet du 3° du I du projet d’article. Ainsi, le contrôle de la mission de collecteur de la taxe d’apprentissage sera réalisé lors du contrôle de l’opérateur de compétence ;

b)     Le contrôle des centres de formation d’apprentis et des organismes liés à eux par une convention de partenariat sera exercé lors du contrôle des organismes qui réalisent tout ou partie des actions mentionnées à l’article L. 6313-1 y compris les actions d’apprentissage.

c)      La suppression du mot « continue » dans les dispositions législatives du titre VI. Tel est notamment l’objet des 1°, b) du 3°, 4°, a) du 10° et 15° du I.

d)     Le regroupement des principaux dispensateurs d’actions entrant dans le champ de la formation professionnelle sous la désignation des « organismes qui réalisent tout ou partie des actions mentionnés à l’article L. 6313-1 ». Il s’agit des organismes de formation professionnelle continue et de leurs sous-traitants, des centres de bilans de compétences, des organismes qui interviennent à la validation des acquis de l’expérience qui sont parfois regroupés sous le vocable de « prestataire de formation » et des centres de formation d’apprentis et de leurs organismes partenaires. L’article L. 6313-1 décline en effet les actions qui entrent dans le champ de la formation professionnelle. Elles sont de quatre types : les actions de formation, les bilans de compétences, les actions de validation des acquis de l’expérience et les actions d’apprentissage. La désignation nouvelle permet de regrouper ces acteurs et elle permet de contrôler les sous-traitants et les partenaires qui interviennent à la réalisation de ces actions. Par ailleurs, il est proposé de préciser les justifications attendues en cas de contrôle de la réalisation d’une action. Tel est l’objet des modifications introduites au I. aux a) du 3°, 6°, 8°, a) et b) du 11°, 13°, a) du 14°.

3.2.2.      Prendre en compte les nouvelles modalités de financement de la formation professionnelle par les employeurs

Une nouvelle contribution des employeurs vient remplacer la contribution au développement de la formation professionnelle continue et la taxe d’apprentissage, l’architecture retenue intègre par ailleurs la contribution supplémentaire à l’apprentissage dont le contrôle est actuellement prévu à l’article L. 6252-4-1 du code du travail. Le contrôle des contributions des employeurs et la recherche des assujettis seront assurés par les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) et non plus par les services de la direction générale des finances publiques. Le contrôle des versements complémentaires dus par les employeurs de 250 salariés et plus en l’absence de respect des obligations mentionnées à l’article L. 6323-13 sera effectué par les services des DIRECCTE.

Ces modifications sont prises en compte au 2° du I du projet d’article qui modifie pour partie l’article L. 6361-1 du code du travail.

De plus, s’agissant du contrôle des employeurs, ils sont amenés à mettre en œuvre des actions de formation dont ils peuvent demander la prise en charge à des opérateurs de compétences ou avec l’aide financière des pouvoirs publics. Il convient donc d’adapter les dispositions de l’article L. 6361-1 qui prévoient le contrôle de la réalisation de ces actions en précisant les cas dans lesquels des organismes publics ou privées chargés d’une mission d’intérêt général sont susceptibles d’intervenir.

Ces évolutions conduisent à modifier l’obligation des employeurs de présenter les documents et pièces établissant le respect des obligations mentionné à l’article L. 6323-13. Les sanctions applicables en cas de non-respect des obligations sont précisées. Cette conséquence est inscrite à l’article L. 6362-2 modifié dans un souci de clarification. Tel est l’objet du 7° du I du projet d’article.

De même, il convient d’adapter les obligations de justification qui pèsent sur les employeurs lorsqu’ils conduisent des actions financées par l’État, les collectivités territoriales, Pole emploi ou les opérateurs de compétences qui prendront en charge les formations en lieu et place des organismes paritaires collecteurs agréés. Tel est l’objet du 9° du I du présent article.

Enfin, ces modifications rendent obsolètes car redondantes les dispositions de l’article L. 6361-4 du code du travail que le 5° du I du présent article propose d’abroger.

3.2.3.      Prendre en compte les financeurs de la formation professionnelle

L’État exerce le contrôle de la réalisation des actions de formation lorsqu’elles sont financées par les pouvoirs publics et les organismes chargés de gérer les fonds de la formation :

Le projet de loi redéfinit les missions des organismes paritaires agréés (OPCA et OPACIF) et renomme à cette fin les OPCA qui deviennent des « opérateurs de compétences ». Par ailleurs, le fonds de sécurisation des parcours professionnels n’intervient plus dans le financement d’action.

Ces modifications doivent être prises en compte pour remplacer dans les dispositions actuelles la référence au contrôle des OPCA et au financement par les OPCA des actions conduites par les employeurs et les organismes qui réalisent tout ou partie des actions mentionnées à l’article L. 6313-1 par une référence aux opérateurs de compétences. De plus la référence au Fonds paritaire de sécurisation des parcours doit être supprimée.

En parallèle, la Caisse des dépôts et consignations va financer des actions dans le cadre du compte personnel de formation. Enfin, France compétences va financer des organismes chargés de réaliser le conseil en évolution professionnelle.

Il convient donc d’introduire ces financeurs dans les dispositions relatives au droit de communication dont bénéficie les agents de contrôle auprès des financeurs, au contrôle des actions ou des activités financées par les pouvoirs publics ou par les organismes qui gèrent tout ou partie des fonds provenant des obligations légales.

Ainsi sont modifiées dans le présent article les dispositions faisant référence aux organismes paritaires agréés pour collecter ou gérer les fonds de la formation professionnelle et au fonds paritaire de sécurisation des parcours tandis que sont introduites les références aux « opérateurs de compétences », à « la Caisse des dépôts et consignation » et à « France compétences (2°, a) du 3°, 6°, 9° et 17° du I).

3.2.4.      Définir les obligations auxquelles sont soumis les nouveaux acteurs et les sanctions en l’absence de respect des obligations

La réforme modifie l’architecture des financements, elle introduit de nouveaux acteurs ou modifie le rôle des financeurs. Dans ce cadre il convient de compléter les actuelles dispositions du titre VI du livre III de la sixième partie pour maintenir le contrôle de certaines structures qui bénéficiaient des fonds de l’apprentissage ou pour contrôler de nouveaux acteurs de la formation professionnelle qui bénéficieront de fonds pour exercer leur activité.

Sont concernés par ces modifications : les organismes chargés de réaliser du conseil en évolution professionnelle qui seront financés par France Compétences.

À cette fin, le a) du 3° du I du projet d’article modifie l’article L. 6361-2 du code du travail pour inscrire  le contrôle par l’État de ces structures.

Ces organismes seront tenus comme les autres acteurs de présenter les documents et pièces justifiant de leur activité et de l’emploi des fonds versés qui viennent la subventionner.

À défaut de justification ou en cas d’usage non conforme des fonds aux dispositions législatives ou réglementaires, les emplois de fonds concernés seront versés au Trésor public. Cette sanction est prévue à l’article L. 6362-6-1 créé par le 12° du I du projet d’article. Elle s’appliquera également aux opérateurs de compétences et aux Fonds d’assurance formation des non-salariés qui devront justifier de l’emploi des fonds reçus. Concernant ces organismes la sanction se substituera aux dispositions dispersées aux actuels articles L. 6252-10, L. 6332-4, au 1° du L. 6332-6, R. 6332-37-3, R. 6332-38, R. 6332-45, R. 6332-84, R. 6332-95 et R. 6333-15 du code du travail.

Tel est l’objet des modifications prévues au I et plus précisément au a) du 3° du I, au b) et c) du 10° et au 12°.

3.2.5.      Procéder aux ajustements rédactionnels et aux précisions utiles pour clarifier le droit applicable en matière de contrôle de la formation professionnelle

Au c) du 11° du I, il est proposé d’ajuster la rédaction du second alinéa de l’article L. 6362-6 avec les dispositions de l’article L. 6354-1 en insérant le mot « indûment » tout en supprimant la référence inutile à cet article.

Le troisième alinéa du 12° du I prévoit la création d’un article L. 6362-6-2 du code du travail qui reprend les dispositions de l’article L. 6354-3. Ces dispositions constituent la sanction au contrôle mentionné au 2° de l’article L. 6361-2 du code du travail. Ce contrôle porte sur les activités d'accueil, d'information, d'orientation et d'évaluation, en matière de formation professionnelle, au financement desquelles l'État concourt par voie de convention. Il est proposé que la sanction soit codifiée dans le titre VI qui traite du contrôle et des sanctions plutôt que dans le titre V.

Le b) du 14° du I vise à supprimer à l’article L. 6362-7-2 toute référence à l’utilisation dans le cadre de la participation des employeurs de documents en vue d’éluder une obligation de financement ou pour imputer à tort des dépenses. En effet, avec la suppression de toute gestion par les employeurs, en interne, des fonds dédiés à la formation professionnelle, les employeurs sont dorénavant tenu d’effectuer le versement intégral des contributions.

Enfin, le 16° du I propose de simplifier la rédaction de l’article L. 6362-10 pour viser simplement les décisions des autorités administratives (Préfet de région ou Ministre) plutôt que de viser les décisions de rejet de dépenses et de versement auxquels il conviendrait sinon d’ajouter les décisions de rejet des emplois de fonds.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Des dispositions transitoires doivent être prises pour maintenir le contrôle des organismes qui cesseront leur activité dans le champ de l’apprentissage ou dans celui de la formation professionnelle continue et notamment, les organismes gestionnaires de centre de formation d’apprentis lorsque ces derniers se constitueront à partir d’une personne morale propre et les organismes paritaires agréés pour gérer la contribution au congé individuel de formation.

4.2.  Impacts sur les services administratifs

Les modifications apportées par le projet d’article ont peu d’impact pour les services déconcentrés (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) puisqu’ils appliqueront des procédures et des sanctions identiques par nature à celles en vigueur. Elles devraient simplifier leur activité en regroupant les textes dans un seul chapitre du titre VI du livre III de la sixième partie du code du travail.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, au titre du a) du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail est consulté au titre de cet article du projet de loi.

Le conseil d’administration de Pôle emploi est saisi pour information.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions proposées de cet article rentrent en vigueur au 1er janvier 2019 à l’exception des 2° et 7° du I qui entreront en vigueur à la même date que l’ordonnance mentionnée à l’article 20 du projet de loi, et au plus tard le 31 décembre 2020.

Du 1er janvier 2019 jusqu’à l’entrée en vigueur des dispositions des 2° et 7° du I du présent article, des dispositions transitoires seront appliquées pour permettre le contrôle des versements des employeurs aux opérateurs de compétences.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions proposées s’appliquent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application de ces dispositions dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Enfin, ces dispositions ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à  Wallis-et-Futuna, ainsi qu’aux Terres australes et antarctiques françaises qui sont régies par le principe de la spécialité législative et où le code du travail n’est pas applicable. Les relations du travail y sont organisées par d’autres textes.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’État pris en application de l’article L. 6362-13 procèdera aux adaptations et suppressions nécessaires (R. 6362-5 et R. 6362-9 du code du travail).


Article 22 - Dispositions outre-mer

Plusieurs dispositions du présent projet de loi nécessitent des adaptations pour prendre en compte les spécificités de l’outre-mer, le présent article précise donc les modalités d’application en outre-mer des dispositions du présent projet de loi.

En premier lieu, il est intégré différentes dispositions visant à modifier les dispositions d’adaptation à l’outre-mer applicables aux organismes collecteurs paritaires agréés notamment pour permettre la création des opérateurs de compétences et l’adaptation de leur régime aux spécificités de l’outre-mer.

Dans ce cadre, les modalités particulières des dispositifs et des financements de la formation professionnelle, d’organisation et de fonctionnement des opérateurs de compétences seront fixées par décret.

Par ailleurs, la commission créée au sein des comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CREFOP), regroupant les représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en charge d’assurer le déploiement des politiques paritaires et d’approuver la mise en œuvre du projet de transition professionnelle, intègrera les organisations syndicales et les organisations professionnelles d’employeurs les plus représentatives au niveau régional et interprofessionnel.

Enfin, il est prévu un décret qui fixera à compter du 1er janvier 2019, les modalités selon lesquelles est supprimé progressivement à Mayotte le plafond de la sécurité sociale applicable au montant des rémunérations versées par l’employeur d’au moins onze salariés pour le calcul de sa participation au développement de la formation professionnelle.

Les dispositions du présent article ont fait l’objet d’une consultation des collectivités territoriales concernées.


Article 24 - Dispositions diverses

1) L’article 4 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 réécrit l’article L. 6331-1 du code du travail a révisé les modalités de financement de la formation professionnelle. Il rappelle que les employeurs ont l’obligation de contribuer au développement de la formation professionnelle continue en finançant directement des actions de formation, notamment au titre du plan de formation, et en s’acquittant de contributions spécifiques. 

Ces contributions ont également été réformées : l’obligation fiscale de financement au titre du plan de formation est supprimée, ainsi que le système de dépenses libératoires qui l’accompagnait et permettait à une entreprise de réduire ou de se libérer totalement de son obligation si elle finançait directement des actions de formation.

Le dispositif mis en place par la loi du 5 mars 2014 a supprimé, depuis le 1er janvier 2015, l’obligation fiscale dite de « 0.9 % plan de formation » ainsi que le système de dépenses libératoires afférentes à cette obligation.

Compte tenu de ce qui précède, le maintien de la possibilité d’imputation mentionnée aux articles L. 1442-2, L. 1453-7, L. 3142-44, L. 3341-3 et L. 4141-4 du code du travail résulte d’un oubli du législateur qui peut s’expliquer par la présence de ces dispositions, non pas au sein des divisions consacrées à la formation professionnelle, mais au sein des dispositions relatives aux congés.

Il n’y a ainsi plus lieu de les conserver dans le corpus juridique, leur survivance pouvant être source de difficultés à la fois pour les services de l’État et pour les employeurs, ces derniers pouvant se voir opposer l’incompatibilité d’une dépense qu’ils croient légitimement imputable avec les nouvelles règles de financement de la formation professionnelle.

2) En cohérence avec la codification, au sein code du travail, des dispositions relatives à la certification professionnelle, actuellement portées par l’article L. 335-6 du code de l’éducation, le projet de loi procède à l’actualisation des références et renvois dans le code du travail, le code du sport et le code de la santé publique.

3) Par ailleurs en cohérence avec les dispositions afférentes du titre 1er du projet de loi

- dans le code du travail les « organismes collecteurs paritaires agréés » sont remplacés par les « opérateurs de compétences »

- dans le code du travail et dans le code général des impôts, la « contribution supplémentaire à l’apprentissage »  est remplacée par la « contribution supplémentaire à l’alternance ».


Titre 2 - Une indemnisation du chômage plus universelle et plus juste

Chapitre 1er – Créer de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles

Articles 26 et 27 - Création de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles et ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Les mobilités professionnelles sur le marché du travail s’avèrent de plus en plus fréquentes, en particulier sous l’effet de l’accélération des mutations économiques et du développement des contrats courts. Alors que le nombre de travailleurs concernés par au moins un changement d’emploi dans l’année était de 2,7 millions en 1975 (correspondant à 12 % des actifs), il s’élève à 5,2 millions en 2009 (20 % des actifs)[59].

Cette mobilité professionnelle est perçue par un certain nombre de salariés comme une opportunité d’engager une reconversion ou une évolution professionnelle, de se lancer de nouveaux défis, voire de s’adapter au marché du travail. Pour autant, une majorité d’actifs considère qu’il est plus difficile qu’auparavant de changer d’entreprise (59 %), de métier (58 %) et de secteur d’activité (57 %)[60].

Dans leur volonté de mobilité, les salariés se trouvent confrontés à un certain nombre d’obstacles de nature à freiner certaines initiatives et prises de risque. C’est en particulier le cas du risque de perte de revenus en cas de démission.

Le régime d’assurance chômage repose actuellement, en application des articles L. 5421-1 et L. 5422-1 du code du travail sur le principe d’indemnisation des travailleurs involontairement privés d’emploi : initialement, le droit à un revenu de remplacement était réservé aux travailleurs dont le contrat de travail était rompu involontairement (rupture de contrat à durée indéterminée, fin de contrat à durée déterminée, ruptures de contrat dans le cadre d’un licenciement quel qu’en soit le motif). Ce droit a été ouvert aux ruptures conventionnelles individuelles[61], puis récemment aux ruptures conventionnelles collectives[62].

Pour autant, certaines situations de démissions sont aujourd’hui assimilées à des privations involontaires d’emploi et permettent ainsi l’ouverture de droits à l’assurance chômage.

En premier lieu, le règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage (articles 2 et 4, e) assimile certains cas de démissions dites « légitimes », dont la liste est fixée par un accord d’application[63], à des situations de privation involontaire d’emploi ouvrant droit, dans les conditions de droit commun, à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).

En deuxième lieu, une ouverture de droit aux allocations peut, sous certaines conditions, être accordée au salarié ayant volontairement quitté son emploi lorsque l’état de chômage de celui-ci se prolonge contre sa volonté. Ainsi Pôle emploi, par délégation de l’Unédic ou, à défaut de décision favorable de sa part, l’instance paritaire régionale (IPR), peut accorder un droit à l’allocation chômage au demandeur d’emploi démissionnaire, en fonction de ses efforts de reclassement (recherche d’emploi et de formation), lorsque celui-ci est toujours sans emploi à l’issue d’un délai de carence de quatre mois (121 jours) après sa démission[64].

Enfin, si le salarié justifie d’une ou plusieurs fins de contrat de travail involontaires postérieures à sa démission pour des contrats totalisant plus de trois mois (ou 91 jours), il bénéficie de l’indemnisation chômage.

Aussi, seule une faible part des démissions donne aujourd’hui lieu à attribution d’un revenu de remplacement. Ainsi, selon les données de Pôle emploi, parmi les 210 000 démissions ayant donné lieu en 2016 à inscription à Pôle emploi, environ 65 000 démissions ont donné lieu à une ouverture de droits (soit 31 %), dont :

1.2.  Cadre conventionnel

Le droit issu des conventions de l’Organisation Internationale du travail (OIT) tend à lier indemnisation du chômage à la notion de privation involontaire d’emploi. La Convention n° 44 de l’OIT de 1934 (Convention assurant aux chômeurs involontaires des indemnités ou des allocations), ratifiée par la France, impose ainsi à chaque État signataire d’« entretenir un système qui assure aux chômeurs involontaires» une indemnisation, sous forme d’indemnités ou d’allocations (article 1er de la convention).

Pour autant, l’indemnisation des chômeurs involontaires constitue une exigence minimale pour les États concernés, rien n’interdisant à une législation nationale de prévoir un système d’indemnisation pour des travailleurs dont la privation d’emploi est volontaire et résulte d’une démission.

En outre, en application de l’article 69 de la convention n° 102 de l’OIT de 1952 (Convention concernant la norme minimum de la sécurité sociale), la législation nationale peut prévoir de ne pas accorder le bénéfice des prestations de chômage au travailleur qui a « quitté volontairement son emploi sans motifs légitimes ». A contrario, rien n’interdit à un État d’ouvrir le bénéfice de ces prestations à l’ensemble des salariés démissionnaires.

1.3.  Éléments de droit comparé

Le système d’indemnisation du chômage repose, dans une majorité de pays européens, sur la condition de privation involontaire d’emploi. Dans certaines règlementations (Grande-Bretagne, Suède), l’indemnisation est néanmoins ouverte à toutes les situations de chômage, que la privation d’emploi revête ou non un caractère volontaire.

Dans les pays européens qui font de la privation involontaire d’emploi une condition d’ouverture des droits, une indemnisation est généralement possible dans des situations de démissions considérées comme « légitimes », qui peuvent être listées de manière exhaustive par la règlementation (Espagne, où une démission pourra notamment ouvrir droit à indemnisation en cas de refus de déménager suite à un changement du lieu de travail ou pour « modifications substantielles du contrat de travail ») ou être appréciées au cas par cas par le service public de l’emploi (Allemagne, Belgique, Suisse, Luxembourg où il est exigé un motif « exceptionnel, valable et convaincant »).

Dans la plupart des règlementations (à l’exception de l’Espagne), une démission, même non considérée comme légitime, n’exclut pas toute indemnisation. L’ouverture du droit est alors généralement assortie de sanctions pécuniaires qui peuvent prendre la forme d’un délai de carence (report du versement de l’allocation) variable selon les pays (trois semaines maximum au Danemark, quatre semaines maximum en Autriche, neuf semaines en Suède, quatre-vingt-dix jours en Finlande…). Dans certains cas, le délai de carence appliqué au salarié démissionnaire prend la forme d’un délai de franchise qui s’impute sur la durée de l’indemnisation (franchise d’un à soixante jours en Suisse, de une à vingt-six semaines en Grande-Bretagne, de douze semaines maximum en Allemagne).

Certains pays appliquent par ailleurs des sanctions renforcées en cas de démissions successives : augmentation du délai de carence ou de franchise en cas de nouvelle démission dans un certain délai, voire inéligibilité en cas de deuxième démission (République Tchèque).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Les dispositions actuellement applicables aux démissionnaires apparaissent complexes et difficilement lisibles pour le salarié. Elles n’offrent pas un cadre suffisant pour encourager, sécuriser et accompagner les salariés démissionnaires dans la conduite de leurs projets d’évolution professionnelle. S’agissant en premier lieu des démissions dites « légitimes », la liste des quinze cas assimilés à une privation involontaire d’emploi ne couvre pas le cas spécifique des salariés qui souhaiteraient s’engager dans un projet d’évolution ou de reconversion professionnelle. À titre d’illustration, la démission pour création ou reprise d’activité n’ouvre droit au versement d’une allocation chômage que dès lors que la création ou la reprise de l’entreprise se solde par un échec, ce qui n’offre ainsi au salarié démissionnaire aucun filet de sécurité durant la montée en charge de cette activité.

S’agissant de la possibilité de réexamen de la situation du démissionnaire dont l’état de chômage se prolonge contre sa volonté, elle est adaptée à certaines situations mais pas à celle d’une démission pour poursuite d’un projet : en effet, il résulte du réexamen à quatre mois une incertitude du point de vue du salarié quant à la possibilité de bénéficier d’une indemnisation chômage, de nature à l’inciter à repousser voire à renoncer à son projet d’évolution professionnelle.

Ces différentes limites de la règlementation actuelle rendent nécessaire la mise en place d’un accompagnement spécifique des projets d’évolution professionnelle, à travers l’ouverture de l’indemnisation chômage à l’ensemble des salariés démissionnaires poursuivant un projet professionnel.

Une mesure législative est, dans ce cadre, nécessaire, afin d’introduire dans le code du travail (article L. 5422-1) la possibilité, pour les salariés dont la privation d’emploi résulte d’une démission, de bénéficier de l’allocation d’assurance chômage, par dérogation au principe selon lequel l’indemnisation est aujourd’hui réservée aux cas de privation involontaire d’emploi ou assimilés (démissions légitimes).

Le recours à la loi s’impose par ailleurs afin d’apporter, pour ces nouveaux bénéficiaires, les aménagements nécessaires au régime d’assurance chômage de droit commun, notamment la définition de conditions d’accès spécifiques à l’allocation d’assurance.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires s’inscrit dans la stratégie présidentielle de sécurisation des parcours professionnels qui vise à confier une plus grande autonomie aux salariés dans la construction de leurs projets professionnels.

Cette évolution a ainsi pour objectif de fluidifier le fonctionnement du marché du travail et de favoriser la mobilité professionnelle des salariés. En garantissant un revenu de remplacement à certains salariés démissionnaires, la mesure entend lever les freins financiers aux reconversions professionnelles. Elle vise à faciliter la prise de risque à travers un meilleur accompagnement des salariés qui souhaiteraient acquérir de nouvelles qualifications et compétences afin de changer de métier ou de secteur d’activité, ou qui désireraient créer ou reprendre une entreprise.

L’ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires doit aussi permettre un meilleur appariement entre l’offre et la demande de travail en donnant aux salariés démissionnaires la possibilité de consacrer plus de temps à la recherche d’un emploi adapté à leurs qualifications.

Enfin, la mesure doit veiller au juste équilibre entre l’ouverture de ces nouveaux droits pour les salariés et la nécessité d’en définir précisément les contours, de manière à prévenir d’éventuels effets comportementaux susceptibles d’augmenter le nombre de demandeurs d’emploi, avec un impact négatif sur le marché du travail et afin de préserver la situation budgétaire du régime d’assurance chômage.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Une première option aurait consisté, en l’absence d’intervention législative, à laisser le soin aux partenaires sociaux de prévoir, dans le cadre des accords relatifs à l’assurance chômage,  un seizième cas de démission légitime consacré aux démissionnaires poursuivant un projet d’évolution professionnelle. Cette option a été écartée. Il apparait en effet juridiquement exclu que ce type de démission puisse être assimilé à une privation involontaire d’emploi, comme le sont les quinze cas actuels de démissions légitimes.

Une seconde option aurait consisté à ouvrir l’assurance chômage aux démissionnaires dans les mêmes conditions que celles applicables aux autres salariés. Outre son coût important, une telle mesure n’aurait pas permis de s’assurer de la volonté du salarié démissionnaire d’engager une nouvelle étape de son parcours professionnel. Elle était par ailleurs susceptible et créer des effets d’aubaine chez certains demandeurs d’emploi et apparaissait peu adaptée à l’esprit du dispositif, qui vise spécifiquement à sécuriser les démarches d’évolution professionnelle des salariés. Cette option n’a donc pas été retenue.

Une troisième option consistant à mettre en place un régime ad hoc dérogeant très largement aux dispositions de droit commun (notamment plafonnement de l’indemnité, durée de carence spécifique, durée d’indemnisation limitée…) a également été écartée. De telles mesures étaient en effet de nature à restreindre les effets de la mesure en termes de sécurisation des périodes de transition professionnelles et d’incitation des salariés à la prise de risque.

3.2.  Option retenue

Le projet de loi instaure, au profit des salariés démissionnaires, une dérogation au principe selon lequel l’allocation d’assurance chômage est réservée aux travailleurs involontairement privés d’emploi. À cette fin,  l’article L. 5422-1 du code du travail, relatif aux travailleurs éligibles à l’allocation d’assurance chômage, est complété pour y inclure les salariés dont la privation d’emploi est volontaire et résulte d’une démission.

3.2.1.      Des conditions d’accès spécifiques à l’assurance chômage : durée d’activité antérieure spécifique et poursuite d’un projet réel et sérieux d’évolution professionnelle

Conformément à l’esprit de l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à la réforme de l’assurance chômage, la mesure intègre les démissionnaires au régime d’assurance chômage de droit commun, tout en apportant un certain nombre d’adaptations. Le projet de loi prévoit ainsi d’accorder aux salariés démissionnaires le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), à condition qu’ils remplissent certaines conditions spécifiques.

Dans ce cadre, est définie, pour les salariés démissionnaires, une condition d’activité antérieure spécifique, dont les modalités (durée et caractère continu ou discontinu de cette activité antérieure) seront fixées par les textes d’application. Cette condition pourrait renvoyer à une durée d’affiliation de cinq années continues, permettant ainsi un recours au nouveau dispositif une fois tous les cinq ans.

Par ailleurs, conformément à l’objectif de cette mesure qui vise à accompagner les mobilités professionnelles choisies, le droit à indemnisation sera conditionné à la poursuite par l’intéressé d’un projet d’évolution professionnelle présentant un caractère réel et sérieux, et renvoyant, soit à une reconversion nécessitant le suivi d’une formation (formation qualifiante, formation identifiée à la suite d’une validation des acquis de l’expérience…), soit à un projet de création ou de reprise d’une entreprise.

Afin de prévenir les démissions insuffisamment préparées qui pourraient conduire à l’échec du projet de mobilité professionnelle du salarié et risqueraient de réduire ses chances de retrouver rapidement un emploi, le salarié devra passer, en amont de son éventuelle démission, par une double phase de formalisation de son projet et de reconnaissance du caractère réel et sérieux de celui-ci.

Le salarié qui souhaiterait mettre en œuvre un tel projet de reconversion professionnelle devra ainsi avoir sollicité, préalablement à sa démission, un accompagnement au titre du conseil en évolution professionnelle (CEP) mentionné à l’article L. 6111-6 du code du travail. Cette étape préalable à la démission offre au salarié la possibilité de bénéficier d’un appui personnalisé pour préparer son projet, cerner les compétences ou les qualifications à faire reconnaître, à acquérir ou à développer et construire un plan d’actions pour la mise en œuvre du projet. La phase de conseil en évolution professionnelle doit également permettre au salarié d’étudier les dispositifs alternatifs à la démission. À cette fin, l’opérateur en charge du CEP informe le salarié des droits qu’il pourrait faire valoir pour mettre en œuvre son projet dans le cadre de son contrat de travail actuel.

Dans ce cadre, le salarié, avec le concours de l’opérateur en charge du CEP, établit son projet professionnel (description du projet, ainsi que du plan d’actions envisagé pour sa mise en œuvre). Ce projet, qui devra être  présenté à Pôle emploi lors de l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi, constituera ainsi la base sur laquelle sera élaboré le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) définissant les engagements réciproques du demandeur d’emploi et de Pôle emploi.

Le projet de loi prévoit d’exclure certains opérateurs du CEP du champ de la mesure :

À l’issue de cette première phase, le caractère réel et sérieux du projet d’évolution professionnelle devra être reconnu pour le compte de Pôle emploi, par la commission paritaire du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP) afin de permettre l’ouverture du droit à indemnisation. Un décret en Conseil d’État viendra, dans ce cadre définir les modalités de cette reconnaissance, en particulier les critères permettant d’apprécier  la réalité et le sérieux du projet.

3.2.2.      Un renvoi au droit commun s’agissant des paramètres de l’indemnisation

Une fois le droit ouvert, l’allocation versée au bénéficiaire sera calculée dans les conditions prévues s’agissant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).

Il sera également renvoyé au droit commun s’agissant de la durée d’indemnisation du démissionnaire[65]. En fonction de la durée d’affiliation spécifique qui sera retenue pour les démissionnaires, cette durée d’indemnisation pourrait correspondre à la durée maximale d’indemnisation prévue dans le cadre de l’ARE, soit vingt-quatre mois (730 jours calendaires) pour un salarié de moins de 53 ans.

3.2.3.      La mise en place d’un dispositif adapté de contrôle des démissionnaires poursuivant un projet d’évolution professionnelle

Conformément à l’esprit de l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à la réforme de l’assurance chômage, la mesure prévoit d’adapter les mesures concernant le suivi et le contrôle des demandeurs d’emplois, aux spécificités des démissionnaires poursuivant un projet d’évolution professionnelle.

A la différence des autres demandeurs d’emploi bénéficiant d’un revenu de remplacement, la réalisation d’actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi ne serait pas exigée de la part du salarié démissionnaire pendant la durée de mise en œuvre de son projet professionnel : le démissionnaire doit en effet pouvoir se consacrer à plein temps à la construction et la mise en œuvre de son projet. L’accomplissement des démarches nécessaires à la mise en œuvre de son projet (telles qu’identifiées dans le plan d’actions élaboré au cours de la phase de conseil en évolution professionnelle) sera donc attendue durant cette période.

Le projet de loi introduit dans ce cadre un nouveau motif de radiation de la liste des demandeurs d’emploi, propre aux démissionnaires n’ayant pu justifier de l’accomplissement des démarches nécessaires à la mise en œuvre de leur projet de reconversion professionnelle. Cette radiation s’accompagnera alors de l’interruption du versement des allocations, l’intéressé ne pouvant bénéficier de la reprise du versement de son reliquat de droit que dans des conditions définies par les accords d’assurance chômage[66].

La mesure offre par ailleurs la possibilité à Pôle emploi d’assortir la mesure de radiation d’une suppression partielle de l’allocation (réduction de la durée totale du droit).

Enfin, afin de s’assurer de l’effectivité de la mise en œuvre du projet pour lequel le droit à indemnisation aura été ouvert, il est prévu un examen systématique de la réalité des démarches accomplies par Pôle emploi, au plus tard à l’issue d’une période de six mois suivant l’ouverture du droit.

3.2.4.      Un droit complémentaire aux dispositifs existants en matière d’indemnisation des démissionnaires

Dans la mesure où cette évolution est conçue comme un dispositif d’accompagnement spécifique et complémentaire s’appliquant à un type particulier de salariés démissionnaires (ceux poursuivant un projet de reconversion professionnelle), le projet de loi permet de préserver le régime juridique applicable aux démissions que la convention d’assurance chômage assimile aujourd’hui à des privations involontaires d’emploi.

Le maintien du régime des démissions dites « légitimes » permet en particulier de ne pas fragiliser la situation de ces salariés dont la démission est subie. Ces démissionnaires légitimes continueront ainsi à bénéficier de l’allocation de retour à l’emploi (ARE) dans les conditions et selon les modalités de droit commun.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Cette mesure implique de modifier l’article L. 5422-1 du code du travail qui détermine la liste des travailleurs susceptibles de bénéficier de l’allocation d’assurance chômage afin d’y intégrer les nouveaux bénéficiaires que seraient les salariés démissionnaires.

L’article L. 5422-1 du code du travail est notamment complété pour y intégrer les conditions particulières applicables pour l’ouverture des droits des demandeurs d’emploi démissionnaires : condition d’activité antérieure spécifique et condition tenant à la poursuite d’un projet réel et sérieux de reconversion professionnelle. Il sera également introduit à la suite un article L. 5422-1-1 prévoyant le recours par le salarié au conseil en évolution professionnelle. Il sera enfin introduit dans l’article L. 5426-1-2 le principe d’un nouveau motif de radiation, spécifique aux salariés démissionnaires, et basé sur l’insuffisance de démarches nécessaires à la mise en œuvre du projet professionnel.

La mesure procède par ailleurs à un toilettage de divers articles du code du travail (suppression de la notion de travailleur « involontairement » privé d’emploi, par cohérence avec l’ouverture de l’assurance chômage aux travailleurs dont la privation d’emploi est volontaire et résulte d’une démission).

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

En ce qu’elle augmente le salaire de réserve des salariés démissionnaires, la mesure permet d’inciter ces derniers de consacrer davantage de temps à la recherche d’emploi et à la formation entre deux périodes d’emploi. À terme, une telle mesure doit permettre aux salariés démissionnaires d’augmenter leur probabilité de trouver un emploi en adéquation avec leurs qualifications et ainsi améliorer l’appariement entre l’offre et la demande de travail. Il devrait dès lors en résulter un impact positif sur la productivité du travail, la durée passée en emploi et le montant des salaires.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Dans la mesure où elle permet de lever une partie des freins à la mobilité des salariés, la mesure devrait avoir pour conséquences d’inciter les employeurs à investir en vue de développer la qualité de vie au travail, la formation et l’évolution professionnelle de leurs salariés, afin de les conserver au sein de l’entreprise et de limiter les départs subis, liés à l’insatisfaction au travail ou à l’absence de mobilité au sein de l’entreprise.

4.2.3.      Impact budgétaire

L’ouverture de l’assurance chômage aux démissionnaires poursuivant un projet de reconversion professionnelle devrait entrainer une augmentation du nombre de demandeurs d’emploi indemnisés et se traduire ainsi par un coût supplémentaire pour l’assurance chômage.

Dans ce cadre, trois surcoûts budgétaires peuvent être identifiés pour le régime d’assurance chômage :

Afin d’estimer le nombre de salariés susceptibles de bénéficier de la mesure et le surcoût afférent, une enquête en ligne de l’Unédic, a été réalisée en janvier 2018 auprès d’un échantillon de 5 000 personnes représentatives des salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) d’entreprises privées ou publiques, et a permis d’évaluer les souhaits de mobilité, la nature des projets professionnels et les démarches engagées en vue d’une reconversion.

Les chiffrages réalisés par la DARES s’appuient sur les résultats de l’enquête de l’Unédic et correspondent à un scénario avec :

Les modifications suivantes ont été apportées à la méthodologie de l’Unédic :

Pour le premier surcoût identifié, on fait l'hypothèse que l'ajout par rapport au scénario Unédic de l'examen du projet à six mois et d’un contrôle renforcé conduit à une balance nulle par rapport à la situation actuelle.

Sur cette base et en partant de l’hypothèse que la mesure serait réservée aux salariés justifiant d’au moins cinq années d’affiliation continue, il est possible d’estimer entre 17 000 et 30 000 le nombre de bénéficiaires du dispositif (23 500 dans le scénario médian).

Le surcoût total pour l’assurance chômage serait ainsi compris entre 230 M€ et 345 M€ (en fonction des effets du contrôle opéré à six mois)[67].

4.2.4.      Impacts sur les services administratifs

La mise en place, en amont de la démission, d’un processus d’évaluation du caractère réel et sérieux des projets d’évolution professionnelle, devrait se traduire par une charge administrative nouvelle pour les commissions paritaires des CREFOP qui seront chargées de reconnaître ce caractère réel et sérieux pour le compte de Pôle emploi.

Toutefois, l’obligation faite aux salariés d’avoir eu recours au CEP avant le dépôt de leur dossier devant les CREFOP jouera un rôle de filtre préalable en amenant les candidats aux projets professionnels les moins aboutis ou les plus incertains à reconsidérer leur démarche. Dans le cadre de la démarche de CEP, il appartient en effet au référent CEP en lien avec le salarié, d’analyser la faisabilité et les conditions de réalisation du projet, d’explorer les besoins de formation et les prérequis exigés, d’étudier le cas échéant les aspects d’ingénierie financière.

En outre, l’opérateur en charge du CEP pourra, le cas échéant, réorienter le salarié envisageant de démissionner vers des alternatives à la démission, plus adaptées au projet professionnel envisagé et compatibles avec un maintien dans l’emploi actuel (CPF - transition notamment). Dans ce cadre, il reviendra au secrétariat permanent de chaque CREFOP d’examiner les dossiers des candidats à la démission, sur la base d’un projet qui aura été co-construit avec un conseiller en évolution professionnelle et d’organiser la tenue des réunions de la commission paritaire, selon des modalités qui seront définies par décret en Conseil d’État. Les CARIF OREF seront chargés du secrétariat permanent des CREFOP qui pourra également être assuré par les DIRECCTE. 

S’agissant de la volumétrie des dossiers de démissionnaires, sur la base des critères envisagés par le Gouvernement, les simulations font état d’un nombre de bénéficiaires médian de 23 500 chaque année (fourchette comprise entre 17 000 et 30 000). Cependant, ce chiffrage ne permet pas une estimation exhaustive de l’impact sur les CREFOP car des personnes se présenteront devant les commissions avec un projet qui pourrait, finalement, ne pas être retenu. Pour cette raison, l’estimation de la volumétrie de dossiers à traiter s’est fondée sur l’enquête réalisée en janvier 2018 par l’Unédic sur les démissions liées à la validation d’un projet. Cette enquête estime entre 21 000 et 38 000 le nombre de projets professionnels finalisés susceptibles d’être déposés chaque année, indépendamment des conditions d’affiliation pour bénéficier de l’allocation. Sur cette base, il est possible d’estimer que chaque commission aura en moyenne à traiter entre 25 et 45 dossiers par semaine[68]. Toutefois, le chiffre de 21 000 à 38 000 salariés est calculé avant application de la condition d’activité antérieure spécifique (affiliation de 5 ans continus). Or, de fait, il est probable qu’une grande majorité des salariés qui ne répondraient pas à ce critère s’abstiendront de déposer un dossier devant les CREFOP. Dès lors, le nombre de dossier traités par les CREFOP devrait être plus proche de l’estimation basse.

Cette instruction ne sera chronophage ni pour le secrétariat des CREFOP ni pour la commission paritaire au regard du travail fait en amont par le CEP (formalisation du projet et du plan d’action envisagé pour sa mise en œuvre) qui constituera un élément de présomption sur le caractère à la fois réel et sérieux du projet.

S’agissant de la phase de conseil en évolution professionnelle, la mesure ne créé aucune mission nouvelle aux opérateurs concernés, dont le rôle est d’ores et déjà d’accompagner l’ensemble des actifs, quels que soient leur statut, leur situation et leur âge. La mesure aura néanmoins un impact sur le flux de demandes d’accompagnement déposées auprès des opérateurs CEP. Cet impact, qui est à relativiser au regard du nombre important de bénéficiaires actuels du CEP (1,5 million en 2016, pour les CEP de niveau 2 et 3) pourra toutefois être traité dans le cadre des moyens existants. À titre d’illustration, la professionnalisation croissante des opérateurs en charge du CEP, soulignée par un récent rapport du CNEFOP[69], leur a ainsi permis d’absorber le doublement du nombre de bénéficiaires du dispositif entre 2015 et 2016.

La mesure aura également un impact sur les frais de fonctionnement et la charge de travail des services de Pôle emploi, dans la mesure où elle implique une augmentation du nombre de dossiers de demande d’allocation à traiter, et du nombre de demandeurs d’emploi à suivre.

Un impact est par ailleurs attendu sur les charges de gestion de l’Unédic, en tant qu’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage. L’ouverture de l’assurance chômage aux salariés démissionnaires poursuivant un projet professionnel implique en effet de modifier le règlement général annexé à la convention d’assurance chômage afin de prévoir les différentes dispositions qui leur seront applicables. Par ailleurs, un suivi statistique et financier devra être mis en place. La charge supplémentaire devrait néanmoins être limitée, compte tenu du nombre de bénéficiaires de la mesure (entre 17 000 et 30 000) au regard du nombre total de demandeurs d’emploi indemnisés (2,5 millions environ). Elle sera, en outre, différée puisque les mesures d’application des dispositions relatives aux démissionnaires seront déterminées, à titre transitoire, par décret en Conseil d’État du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020.

4.3.  Impacts sociaux

4.3.1.      Impact sur l’égalité entre les femmes et les hommes

En 2016, les femmes représentaient 51 % des bénéficiaires de l’allocation de retour à l’emploi[70]. L’analyse du profil des démissionnaires inscrits à Pôle emploi en 2016 tend à montrer que le public des démissionnaires est légèrement plus féminisé (53 % de femmes contre 47 % d’hommes69).

L’impact de la mesure sur l’égalité entre les femmes et les hommes au regard de l’accès à l’assurance chômage devrait donc être relativement restreint.

En outre le projet de loi maintient le régime juridique associé aux démissions qualifiées de  « légitimes », afin de ne pas fragiliser ces salariés dont la démission présente un caractère généralement contraint (par exemple, démission pour cause de changement de résidence suite à violences conjugales). Or, la part des femmes parmi les demandeurs d’emploi ouvrant des droits suite à démission légitime est largement majoritaire (72 % en 201669).

4.3.2.      Impacts sur la jeunesse

L’étude du profil des démissionnaires tend à montrer que ces derniers correspondent en général à des demandeurs d’emploi jeunes (un tiers ayant moins de 25 ans et plus de la moitié moins de 35 ans)[71]. De ce point de vue, la mesure devrait contribuer à faciliter les reconversions professionnelles en début de carrière, même si l’application d’une condition d’activité continue de cinq ans contribuera à limiter l’accès à la mesure des salariés les plus jeunes. A l’inverse, la rupture conventionnelle, qui ouvre aujourd’hui droit à l’allocation d’assurance chômage, est davantage mobilisée par des salariés plus âgés et plus qualifiés que la moyenne des salariés ayant perdu ou quitté leur emploi[72], dans la mesure où ces salariés plus expérimentés disposent de meilleures capacités de négociation dans le cadre de leur rupture de contrat.

L’ouverture de l’assurance chômage aux démissionnaires tend ainsi à résorber cette iniquité entre les jeunes salariés et les salariés plus âgés.

4.3.3.      Impacts sur les particuliers

La mesure est susceptible d’ouvrir aux actifs de nouvelles perspectives en matière de mobilité professionnelle, en sécurisant, notamment financièrement, les périodes de transition ou de reconversion professionnelle. Elle permet ainsi de renforcer l’autonomie des salariés dans la conduite de leur parcours professionnel. Elle offre aux individus une opportunité de s’adapter voire d’anticiper les mutations du marché du travail, en faisant évoluer leurs compétences et leurs qualifications, et ainsi de favoriser leur installation durable dans l’emploi.

En permettant aux salariés en poste de s’orienter vers des métiers davantage en phase avec leurs attentes, la mesure peut en outre constituer une réponse à la problématique de l’insatisfaction au travail.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

La mesure donne lieu à consultation du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) au titre du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail.

 Le conseil d’administration de Pôle emploi est saisi pour information.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mesure entre en vigueur au 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte ne fait pas l’objet de dispositions spécifiques.

5.2.3.      Textes d’application

Le projet de loi laisse aux accords relatifs à l’assurance chômage mentionnés à l’article  L. 5422-20 du code de travail le soin de préciser la durée d’ancienneté requise pour ouvrir droit à l’allocation d’assurance. Toutefois, ces mesures d’application seront déterminées par décret en Conseil d’État du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020.

Un décret en Conseil d’État devra par ailleurs définir les conditions de la reconnaissance du caractère réel et sérieux du projet de reconversion professionnelle présenté par le salarié (critères d’appréciation notamment).

 


Article 28 - Indemnisation des travailleurs indépendants en cessation d’activité

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Les travailleurs indépendants constituent une population hétérogène. Ils sont identifiés par la jurisprudence par opposition aux salariés, c’est-à-dire par l’absence de tout lien de subordination juridique par rapport à un employeur. Une définition positive du travail indépendant a été introduite par la loi du 4 août 2008 à l’article L. 8221-6-1 du code du travail : « est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d’ordre ».

Fin 2014, le nombre de travailleurs indépendants s’établissait 3,3 millions d’individus, dont 2,8 millions indépendants mono-actifs, soit 10,4 % de la population active. Ce niveau est comparable à celui de l’Allemagne, mais reste relativement faible par rapport à la moyenne des pays européens qui s’élève à 14 % en 2016. Après des décennies de diminution tendancielle, le travail indépendant s’est stabilisé en France depuis le début des années 2000 et progresse depuis 2008, avec un taux de croissance moyen annuel de 2,2 % sur 2008-2015 pour l’ensemble des travailleurs indépendants alors qu’il est nul sur la même période pour les salariés[73].

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette augmentation du travail indépendant au cours de la dernière décennie. D’une part, la création du statut d’auto-entrepreneur à partir de 2009, par la loi n°2008-776 de modernisation de l’économie du 28 avril 2008 (chapitre 1er), a permis d’alléger les formalités des créations d’entreprises et de simplifier l’exercice du travail indépendant. D’autre part, cette croissance du travail indépendant peut être corrélée avec la conjoncture économique défavorable au cours de laquelle le travail indépendant a pu constituer une solution d’accès à l’emploi pour certains actifs, faute de perspective d’emploi salarié. Enfin, ce regain pour le travail indépendant trouve également sa source dans l’aspiration croissante d’une partie de la population, et notamment des jeunes générations, à davantage de liberté professionnelle que celle que le statut de salarié permet d’offrir.

Au-delà de l’évolution des effectifs, les métiers et formes d’exercice des indépendants ont profondément été transformés au cours des dernières décennies. Un indépendant sur trois était agriculteur il y a trente ans, seul un sur huit l’est aujourd’hui. Le recul de l’indépendance est également marqué au sein des professions libérales du fait de la montée en puissance d’entreprises de grande taille dans les activités juridiques et financières, et dans le petit commerce sous l’effet du développement des grandes surfaces et de l’industrie agro-alimentaire[74].

Corollaire de la tertiarisation de l’économie, le travail indépendant a connu un renouveau essentiellement dans le secteur des services, avec l’essor des stratégies de sous-traitance des entreprises. Ces nouvelles formes de travail indépendant sont davantage à la lisière du lien de subordination propre au contrat de travail, quand il y a un donneur d’ordre majoritaire voire unique. Plus récemment, l’apparition de plateformes numériques mettant directement en relation des prestataires de services et les consommateurs a pu accélérer cette évolution. Enfin, les travailleurs indépendants comme les salariés sont concernés par la discontinuité accrue des parcours professionnels, qui sont davantage heurtés, assortis de changement de statut, d’épisodes de chômages et de pluriactivité récurrents. Ceci est particulièrement vrai en période de crise : le passage par le non-salariat se présente alors comme un moyen de sortir du chômage. Ainsi le nombre de chômeurs devenus indépendants a augmenté de près de 45 % entre la période 2003-2008 et la période 2008-2014[75]. Deux formes de non-salariat semblent en effet s’opposer selon la position dans le cycle économique : il y aurait ainsi un « non-salariat entrepreneurial » en période de croissance et un « non-salariat par défaut » en période de conjoncture défavorable.

Dans ce contexte de forte transformation, les travailleurs indépendants ne disposent pas, à la différence des salariés, d’une protection obligatoire contre le risque de perte d’emploi. En effet, l’article L. 5421-1 du code du travail, qui définit le périmètre des bénéficiaires d’un revenu de remplacement, quel que soit le régime d’indemnisation auquel les bénéficiaires sont soumis et indépendamment de la forme du revenu de remplacement (allocation de retour à l’emploi, allocation de solidarité, etc.) couvre aujourd’hui uniquement le champ des salariés. Le système obligatoire de protection contre le risque de chômage exclut depuis l’origine les travailleurs indépendants car la détention d’un capital, notamment professionnel, et sa transmission étaient supposées leur permettre de faire face à l’incertitude et aux fluctuations de leur activité au cours de leur vie professionnelle. Les travailleurs indépendants sont donc, sauf exception très ponctuelle[76], exclus du champ d’application de l’assurance chômage, l’affiliation au régime d’assurance chômage étant conditionnée à l’existence d’un contrat de travail liant un employeur et un salarié.

En l’absence de protection obligatoire, les travailleurs indépendants peuvent se prémunir du risque de chômage en adhérant volontairement à des contrats « perte d’activité » proposés par des assureurs privés. Toutefois ces offres ne s’adressent qu’aux travailleurs indépendants les mieux établis et ne couvrent en conséquence qu’une proportion très limitée de l’ensemble des indépendants (moins d’un pour cent)[77]. Aussi, les travailleurs indépendants qui cessent leur activité ont dans leur grande majorité uniquement accès aux minima sociaux.

Il est donc prévu de modifier l’article L. 5421-1 du code du travail, afin qu’il puisse couvrir à la fois les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants. En outre, l’article L. 5421-2, qui précise les différentes formes des revenus de remplacement, est modifié afin d’y introduire l’allocation des travailleurs indépendants.

1.2.  Cadre conventionnel

Le champ de la  convention n°44 de l’OIT de 1934 assurant aux chômeurs involontaires des indemnités ou des allocations, à laquelle la France est partie, est circonscrit aux travailleurs salariés, les États signataires s’engageant à entretenir un système qui assure aux chômeurs involontaires une indemnisation à « toutes personnes habituellement employées en échange d'un salaire ou d'un traitement » (article 2).

La convention n° 102 de l’OIT de 1952 concernant la norme minimum de la sécurité sociale établit des normes minimales pour l’ensemble des branches de la sécurité sociale. La France a accepté les parties II et IV à IX de cette convention en 1974, la partie IV se référant aux prestations de chômage[78]. En application des articles 19 à 21 de cette partie, les États doivent garantir aux personnes protégées l'attribution de prestations de chômage. Les personnes protégées doivent comprendre a minima des catégories de salariés formant au moins 50 % des salariés ou tous les résidents dont les ressources n’excèdent pas un certain seuil. À ce jour, la France s’est conformée à la Convention en mettant en œuvre un régime d’assurance chômage défini en référence à des catégories de salariés. Toutefois, la Convention n’interdit pas de concevoir une couverture plus large, intégrant d’autres catégories d’individus, et notamment les travailleurs indépendants.

1.3.  Éléments de droit comparé

La couverture du risque de perte d’emploi des travailleurs indépendants existe déjà dans un certain nombre de pays étrangers, de longue date (Allemagne, Danemark, Suède) ou à la suite de réformes récentes (Espagne, Portugal, Autriche)[79].

En Allemagne, Autriche, Suède, Danemark et Espagne, la couverture demeure facultative, qu’elle prenne la forme d’une adhésion au régime des salariés ou d’un dispositif distinct. A l’inverse, la Belgique, le Luxembourg, le Portugal et l’Italie ont fait le choix d’une couverture obligatoire, parfois ciblées sur la catégorie des travailleurs économiquement dépendants (Italie).

Parmi les cinq pays où la couverture est facultative, plusieurs cas de figure peuvent être distingués :

Lorsqu’elle est obligatoire, l’adhésion se fait toujours dans le cadre d’un régime distinct de celui des salariés et relève d’une création souvent récente (1990 en Belgique et 2010 en Italie et au Portugal) ce qui n’autorise que peu de recul quant à l’appréciation de leurs effets.  Le système d’assurance chômage peut également ne couvrir en réalité qu’une partie seulement des travailleurs indépendants, comme en Italie où ce régime obligatoire concernent uniquement les travailleurs dits para-subordonnées ou travailleurs économiquement dépendants.

Au regard des données disponibles, les différents régimes couvrent à ce stade un champ de bénéficiaires limité. Dans la plupart des cas, moins d’un millier d’indépendants sont indemnisés.

Les systèmes sont majoritairement financés par des cotisations sociales comme en Allemagne, Autriche, Espagne, Italie et le Portugal. Dans ces systèmes – qui se rapprochent le plus souvent de systèmes dits « contributifs », en lien avec les modalités d’indemnisation- les assiettes et taux de cotisation sont soit identiques à ceux du régime général, soit inférieures. Le Danemark, la Suède et le Luxembourg font reposer tout ou partie du financement sur l’État.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Face aux mutations récentes du travail indépendant, le modèle de l’entrepreneur assumant seul le risque de perte d’emploi n’est plus pertinent. L’exercice sous forme indépendante est de moins en moins le résultat d’un héritage familial, et les travailleurs indépendants sont moins nombreux que par le passé à disposer d’un capital financier ou d’un patrimoine. Si certains travailleurs indépendants, comme les professions libérales, restent peu concernés par le risque de chômage, d’autres catégories y sont fortement exposées, notamment ceux en situation de dépendance économique, pour lesquels le retrait d’un donneur d’ordre majoritaire peut avoir des conséquences proches d’un licenciement. Dans ces conditions et compte tenu du caractère lacunaire des couvertures proposées par les assureurs privés, il n’apparait plus justifié de limiter la protection obligatoire contre le risque de perte d’emploi aux seuls travailleurs salariés.

De manière plus générale, la mise en place d’un droit à l’indemnisation du chômage des travailleurs indépendants répond à la nécessité d’adapter le système français de couverture du risque de chômage à la diversification accrue des formes de travail et d’emploi, qui remet en cause les frontières du travail salarié et non-salarié, et entre lesquelles les actifs pourraient à l’avenir de plus en plus recourir, successivement ou concomitamment, au cours de leur parcours professionnel.

2.2.  Objectifs poursuivis

La création d’un dispositif public de compensation de la perte d’activité des travailleurs indépendants répond en premier lieu à l’objectif de les protéger contre le risque de défaillance de leur entreprise. Il s’agit ainsi de sécuriser les transitions professionnelles des indépendants en leur offrant un « filet de sécurité », leur permettant d’être indemnisés le temps de rechercher une nouvelle activité lorsque leur entreprise cesse de manière définitive. La mesure vise également à encourager l’entrepreneuriat, en atténuant les freins liés aux disparités de la protection contre le chômage entre salariés et travailleurs indépendants.

Plus largement, la mesure s’inscrit dans la dynamique d’harmonisation de la protection sociale des salariés et des indépendants à l’œuvre au cours des dernières années, qui tend à rapprocher les droits sociaux des travailleurs indépendants de ceux des salariés, tout en tenant compte de leurs spécificités professionnelles.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

La seule option possible en dehors de l’intervention de la loi pour améliorer la couverture du risque de perte d’emploi des travailleurs indépendants aurait consisté à améliorer la communication à destination des travailleurs indépendants autour de l’offre existante des assureurs privés, en proposant par exemple l’inscription à ces offres dans le formulaire d’inscription au registre de commerce et des sociétés. En tout état de cause, une telle mesure aurait été insuffisante pour atteindre les objectifs poursuivis. 

Au sein de la loi, de multiples options étaient envisageables pour créer un droit à l’indemnisation du chômage des travailleurs indépendants en combinant les différentes sous options possibles concernant les faits générateurs ouvrant droit au nouveau dispositif, les caractéristiques des prestations versées, leur financement et l’articulation du nouveau dispositif ouvert aux travailleurs indépendants avec le régime d’assurance chômage des salariés. La volonté d’assurer un traitement équitable entre les travailleurs indépendants tout en maîtrisant l’aléa moral,[80] s’agissant d’une population qui organise elle-même son activité, et de privilégier la simplicité de gestion du nouveau dispositif, a conduit à écarter les options suivantes :

3.1.1.      Concernant la population

La diversité des situations des travailleurs indépendants au regard du risque de chômage aurait pu conduire à envisager de différencier la couverture contre le risque de perte d’emploi en fonction des catégories professionnelles, par exemple en la limitant aux micro-entrepreneurs ou au travailleurs économiquement dépendants comme en Italie. Toutefois, dans un souci d’égalité de traitement entre tous les travailleurs indépendants, cette option n’a pas été retenue.

3.1.2.      Concernant les faits générateurs ouvrant droit à indemnisation

Afin de limiter les effets d’aubaine et d’aléa moral, il convient de ne pas retenir des faits générateurs d’indemnisation qui dépendraient directement d’un choix des travailleurs indépendants, et d’écarter ainsi ceux qui ne permettent pas de caractériser avec certitude le caractère volontaire de la perte d’activité. C’est pourquoi l’option d’un dispositif ouvert à tous les travailleurs indépendants ayant fait une déclaration de situation d’activité n’est pas retenue, celle-ci pouvant résulter d’une décision volontaire du chef d’entreprise.

3.1.3.      Concernant les caractéristiques de la prestation

La mise en place d’une indemnisation calculée en fonction d’un revenu de référence auquel serait appliqué un taux de remplacement aurait présenté l’avantage d’une analogie avec les règles applicables aux salariés. Toutefois cette option est écartée au regard de la grande diversité des situations des travailleurs indépendants et des nombreuses possibilités d’optimisation qu’elle aurait pu entrainer par manipulation des agrégats comptables.

3.1.4.      Concernant le mode de financement

L’option d’une participation des travailleurs indépendants au financement du nouveau dispositif via une cotisation appelée sur les revenus d’activité des travailleurs indépendants n’est pas apparue justifiée, le projet de loi prévoyant par ailleurs de supprimer les cotisations salariales d’assurance chômage, et de les remplacer de manière pérenne par une fraction d’une imposition de toute nature qui serait affectée dans le cadre des lois financières pour 2019 à l’assurance chômage..

3.1.5.      Concernant l’articulation du nouveau droit avec l’allocation d’assurance versée aux salariés

L’option du versement de l’allocation d’assurance, sous une forme adaptée, aux travailleurs indépendants éligibles est écartée. Elle aurait en effet nécessité des aménagements importants des règles d’indemnisation du régime pour tenir compte des spécificités du travail indépendant, qui auraient introduit des différences de traitement trop importantes au regard du principe d’égalité.

3.2.  Option retenue

Une nouvelle forme de revenu de remplacement est créée pour les travailleurs indépendants, dénommée « allocation des travailleurs indépendants » (ATI) obéissant à des règles d’éligibilité et d’indemnisation propres afin de tenir compte des spécificités du travail indépendant.

D’une part, afin de qualifier la privation d’emploi des travailleurs indépendants, des critères spécifiques sont retenus caractérisant une cessation involontaire et définitive d’activité afin de prévenir des comportements opportunistes de recours à l’indemnisation du chômage. Seuls auront droit à l’allocation  les travailleurs indépendants dont l’activité a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire ou d’une procédure de redressement judiciaire, lorsque l’arrêté du plan de redressement est subordonné par le tribunal au départ du dirigeant,  ou ceux qui bénéficiaient du statut de conjoint associé en cas de divorce ou de rupture d’un pacte civil de solidarité. En outre, afin d’attester de l’existence d’une activité établie et économiquement active et ainsi dissuader les faillites organisées voire frauduleuses, il est proposé que les mesures d’application puissent introduire des conditions de durée et de revenus d’activité minimaux. Enfin, pourra également être prévue une condition de ressources pour pouvoir bénéficier de la prestation. Il s’agit de pouvoir exclure du bénéfice de l’allocation les travailleurs indépendants qui disposeraient d’autres ressources, par exemple, dans le cas de salariés qui n’exerçaient leur activité indépendante qu’à titre accessoire.

D’autre part, le projet de loi prévoit que l’allocation des travailleurs indépendants  revête un caractère forfaitaire et soit versée pendant une période fixe, dans l’objectif d’éviter les comportements d’optimisation et de privilégier la solution la plus simple à mettre à œuvre.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

L’article L. 5421-1 du code du travail relatif aux travailleurs susceptibles de bénéficier d’un revenu de remplacement est modifié afin de couvrir des travailleurs aptes au travail et recherchant un emploi quelle que soit leur forme d’activité, salariée ou indépendante.

L’article L. 5421-2 du code du travail, qui définit les différentes formes de revenus de remplacement, est complété pour y inclure l’allocation des travailleurs indépendants.

L’ensemble des dispositions relatives à l’allocation des travailleurs indépendants sont introduites dans une nouvelle section IV du chapitre IV relatif aux régimes particulier du livre quatrième de la cinquième partie du code du travail.  Au sein de cette section :

En outre : 

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

En permettant à certains indépendants de prendre le risque de changer d’activité ou d’accéder à une formation,  l’ouverture d’un droit à un revenu de remplacement  pour les travailleurs indépendants favorisera de nouvelles transitions en les sécurisant. Du fait de la meilleure protection associée au statut d’indépendant, elle pourrait aussi encourager la création d’entreprise. Cette mesure contribuera ainsi à la construction d’un marché du travail plus fluide, à un meilleur appariement de l’offre et de la demande de travail et à la dynamisation de notre économie.

4.2.2.      Impact budgétaire

La mission de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales ayant menée l’étude sur l’ouverture de l’indemnisation du chômage aux travailleurs indépendants en octobre 2017 a évalué le coût de cette mesure à 140 M€ pour 29 300 bénéficiaires.

Encadré – Méthodologie de chiffrage

Population cible :

Les catégories de travailleurs indépendants retenues sont les suivantes :

  • les travailleurs indépendants affiliés au régime des exploitants agricoles (MSA), des commerçants et artisans (RSI), et des professions libérales (CNAVPL et CNFB). Elle exclut en revanche les travailleurs affiliés au RSI selon des modalités spécifiques mais dont l’activité repose sur l’exploitation d’un patrimoine ;
  • les travailleurs assujettis au régime général de la sécurité sociale, mais qui ne sont pas affiliés au régime général d’assurance chômage, soit principalement des dirigeants d’entreprises.

Ce ciblage conduit à un effectif de la population cible d’environ 3,3 millions de travailleurs indépendants répartis comme suit :

Travailleurs indépendants "classiques"

1 700 000

Micro-entrepreneurs actifs (chiffre d’affaires > 0 €)

700 000

Exploitants agricoles

460 000

Dirigeants assimilés salariés

180 000

Autres

250 000

Total

3 290 000

Paramétrage de l’indemnisation :

Le chiffrage s’appuie sur les paramètres suivants :

  • Une durée d’indemnisation de six mois ;
  • Un montant mensuel de l’allocation de 800 €.

Paramétrage des conditions d’éligibilité :

Le chiffrage retient une durée d’activité minimale pour bénéficier de la prestation de 2 ans et un revenu d’activité minimal de 10 000 €.

Pour appliquer le critère de durée d’activité minimale, la population cible est réduite en fonction des taux de cessation des travailleurs indépendants dans les deux ans (données INSEE) :

  • 19 % des entrepreneurs classiques ont cessé leur activité au bout de deux ans ;
  • 41 % des micro-entrepreneurs ont cessé leur activité au bout de deux ans (parmi les micro-entrepreneurs économiquement actifs) ;

Pour croiser ce critère avec le critère de revenu d’activité minimal, en l’absence de données complètes sur la distribution jointe entre la variable revenu et la variable durée d’activité, le chiffrage s’appuie sur des données du RSI (distribution des revenus des « radiés hors retraite » sur 2011-2015) :

  • 49 % des entrepreneurs classiques radiés ont des revenus supérieurs à 10 000 € (taux moyen sur 2011-2015) ;
  • 5 % des micro-entrepreneurs radiés ont des revenus supérieurs à 10 000 € (taux moyen sur 2011-2015) ;

Le croisement de ces données aboutit aux estimations suivantes :

  • 10 % des entrepreneurs classiques ayant cessé leur activité au bout de deux ans avaient des revenus supérieurs à 10 000 € ;
  • 2 % des micro-entrepreneurs ayant cessé leur activité au bout de deux ans avaient des revenus supérieurs à 10 000 €.

Sont donc retenus in fine dans la population cible 90 % des entrepreneurs classiques et 98 % des micro-entrepreneurs ayant des revenus supérieurs à 10 000 €. Ces taux sont appliqués sur des données INSEE et MSA relatives à la distribution des effectifs par tranche de 5 000 € de revenus des travailleurs indépendants, selon la distinction : micro-entrepreneurs économiquement actifs, entrepreneurs individuels (hors micro-entrepreneurs), gérants de sociétés et exploitants agricoles. Pour deux populations, la distribution des revenus n’est pas disponible :

  • pour les dirigeants salariés, l’hypothèse est faite qu’ils sont tous au-dessus du seuil de 10 000 € ;
  • pour les taxés d’office, le taux moyen observé pour les travailleurs indépendants non agricoles est appliqué (57 %).

Paramétrage des faits générateurs :

Pour évaluer l’impact de l’application de « faits générateurs stricts » sur la population cible, le chiffrage utilise les données relatives aux défaillances d’entreprises. Il est retenu les taux suivants :

  • 3 % pour les gérants de sociétés ;
  • 1 % pour les entreprises individuelles et les auto-entrepreneurs ;
  • 0,3 % dans l’agriculture.

4.3.  Impacts sur les services administratifs

La mesure aura un impact sur les charges de gestion de Pôle emploi, dans la mesure où elle implique une augmentation du nombre de dossiers de demande d’allocation à traiter, selon des modalités spécifiques, et du nombre de demandeurs d’emploi à suivre.

Une adaptation du système d’information de Pôle emploi est également à prévoir pour y intégrer les modalités particulières d’indemnisation des travailleurs indépendants.

Enfin, les conseillers de Pôle emploi devront être formés afin d’assurer la prise en charge et le suivi de ce nouveau public.

La mesure aura un impact sur les charges de gestion de l’Unédic, en tant qu’organisme gestionnaire de l’allocation des travailleurs indépendants. Par ailleurs, un suivi statistique et financier devra être mis en place. La charge supplémentaire devrait néanmoins être limitée, compte tenu du faible nombre de bénéficiaires de la mesure (estimé à 29 300) au regard du nombre total de demandeurs d’emploi indemnisés (2,5 millions environ).

4.4.  Impacts sociaux

Chez les jeunes, il existe une aspiration forte à l’exercice d’un travail indépendant.  Si les Français dans leur ensemble affichent une préférence très nette pour le sala­riat (70 %), les plus jeunes se singularisent par une plus forte attraction pour l’indépen­dance : parmi les 15-24 ans, près d’une personne sur deux valorise ce statut. Le travail indépendant est à leurs yeux associé à une plus grande liberté et à davantage de facilités pour concilier la vie professionnelle avec la vie familiale et personnelle. Dans les faits, 20 % des jeunes déclarent avoir de manière occasion­nelle « exercé au cours des 12 der­niers mois, une activité rémunérée de manière indépendante (auto-auto-entrepreneuriat, chauffeur ou hôte via un site internet, garde d’enfant ou aide aux personnes âgées, etc.) », soit un taux bien plus élevé que dans l’ensemble de la population (8 %)[81]. Aussi, la création d’une protection contre le risque de chômage des travailleurs indépendants peut être considérée comme une mesure plus particulièrement favorable à la jeunesse au regard de leur aspiration propre pour le travail indépendant.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles est saisi au titre des dispositions du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail.

Le Conseil d’administration de Pôle emploi est saisi pour information.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mesure entre en vigueur au 1er janvier 2019, comme la plupart des dispositions du projet de loi. Cela répond à la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre ces nouveaux droits dès que les conditions opérationnelles seront réunies. Les travailleurs indépendants bénéficieront ainsi rapidement de cette nouvelle couverture sociale.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte ne fait pas l’objet de dispositions spécifiques.

5.2.3.      Textes d’application

Les mesures d’application seront prises par décret en Conseil d’État, à l’exception du montant et de la durée de versement qui seront fixés par décret simple, et des mesures de coordination avec l’allocation d’assurance qui seront déterminées par la convention d’assurance chômage. Toutefois, en application de l’article 33 du projet de loi, ces mesures de coordination seront déterminées à titre transitoire par décret en Conseil d’État du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020.

 


Article 29 - Lutte contre la précarité et la permittence

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

L’assurance chômage a pour objectif d’assurer les travailleurs contre les pertes d’emploi temporaires. Elle fonctionne en mutualisant les risques à la fois entre travailleurs et entre entreprises. L’assurance chômage est financée par des cotisations versées par les salariés et les employeurs. Tous les emplois affiliés à l’Assurance chômage font l’objet de contributions proportionnelles aux salaires. La part du salaire soumise à contribution est limitée à quatre fois le plafond de la sécurité sociale. Ce plafond correspond au montant maximum des rémunérations ou gains pris en compte pour le calcul de certaines rémunérations. Il est révisé chaque année en fonction de l’évolution des salaires (articles D. 242-17 à D. 242-19 du code de la sécurité sociale). En 2016, 16,7 millions de salariés sont affiliés à l’Assurance chômage et 1,8 millions d’employeurs versent des contributions.

Le taux de contribution est de 6,45 % du salaire brut répartie entre 2,4 % versé par le salarié et 4,05 % par l’employeur. Pour les salariés intermittents du spectacle, les taux de cotisation sont plus élevés que pour les autres salariés car ils bénéficient de règles d’indemnisation spécifiques. Ces taux sont fixés par les partenaires sociaux dans le cadre des accords d’Assurance chômage.

Le rapport entre les allocations versées et les contributions collectées varie selon la nature du contrat de travail du salarié. En 2015, pour les contrats à durée indéterminée (CDI), les contributions collectées afférentes ont été de 29 287 M€ alors que les ruptures de CDI ont conduit à des dépenses d’allocations chômage de 18 892 M€[82]. Ce rapport est inversé pour les contrats à durée déterminée (CDD) et les missions d’intérim. Ainsi, pour les premiers, les dépenses ont été de 8 886 M€ alors que les contributions ont rapporté 2 664 M€, et pour les seconds, les dépenses ont représenté 2 806 M€ et les contributions 1 022 M€.

En effet, les allocataires indemnisés par l’assurance chômage sont pour 45 % d’entre eux, au chômage après CDD ou une mission d’intérim. Les embauches en contrats courts ont en effet progressé ces dernières années. Les déclarations préalables à l’embauche (DPAE) remplies par les employeurs avant le recrutement d’un salarié ont concerné pour 85 % d’entre elles des CDD[83] en 2012 contre 76 % en 2000. Cette progression traduit l’augmentation du recours à des contrats de moins d’un mois et plus spécifiquement de moins d’une semaine. Cette augmentation du recours aux contrats courts reflète également une pratique de réembauche de la part des employeurs. En effet, en 2012, l’embauche d’un ancien salarié a représenté 69 % des embauches hors intérim, la durée médiane entre deux contrats étant de 7 jours.

Pour favoriser la progression de l’emploi stable, les partenaires sociaux ont prévu une modulation des contributions des contributions patronales d’assurance chômage dans le cadre de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 sur la sécurisation des parcours professionnels. La faculté de modulation des taux de contribution est aujourd’hui prévue à l’article L. 5422-12 du code du travail. Cette modulation des taux a pour objectif principal d’inciter les employeurs à allonger la durée des contrats à durée déterminée. En effet, la part patronale des contributions d’assurance chômage qui était de 4 %, a été augmentée :

Parallèlement, une exonération de la part patronale des contributions a été mise en place pour l’embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) d’un jeune de moins de 26 ans pour les trois premiers mois d’emploi.

La mise en œuvre de ces modulations avait pour objectif d’entraîner une baisse des contrats les plus courts au profit des contrats les plus longs.

En 2015, ces sur-contributions ont généré 73,8 M€ de recettes supplémentaires tandis que le coût de l’exonération s’est élevé à 79,9 M€ pour l’Assurance chômage.

Ces sur-contributions ne semblent pas avoir eu un impact sur le recours à des contrats de moins de trois mois par les employeurs. Les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) retraitées par l’Unédic[84] mettent en évidence une progression quasi-continue du nombre d’embauches en contrats courts ces dernières années (graphique ci-dessous).


 

Graphique Évolution des demandes préalables à l’embauche (DPAE) pour les secteurs  contribuant à au moins 5 % de la hausse des CDD de moins d’un mois.

Source : Déclaration préalable à l’embauche – ACOSS ; calculs Unédic

 

L’augmentation du recours aux CDD courts s’observe dans quelques secteurs en particulier[85] : « hébergement médico-social, social et action sociale sans hébergement », «  l’hébergement restauration », « arts, spectacles et activités récréatives » et « activités de services administratifs et de soutien ».

La nouvelle convention d’assurance chômage 2017 a modifié les cotisations des employeurs à l’assurance chômage avec la création d’une contribution exceptionnelle temporaire des employeurs pour tous leurs salariés (0,05 %) et la suppression de la modulation des contributions s’appliquant aux CDD et aux embauches en CDI (moins de 26 ans). Seule la majoration pour les CDD d’usage a été maintenue pour dix-huit mois, à compter du 1er octobre 2017, soit jusqu'au 31 mars 2019 : la cotisation patronale sur ces contrats est ainsi portée à 4,55 %.  

Dans l’accord national interprofessionnel et la convention de 2017, les partenaires sociaux ont en revanche choisi de renvoyer aux branches la responsabilité de traiter le sujet du recours aux contrats de courte durée dans le cadre de négociations. Il était prévu que l’application de la convention soit suivie par un comité de pilotage réuni chaque année, ayant notamment pour objet de dresser un bilan des négociations de branches, en particulier celles portant sur les incitations sectorielles qui visent à limiter le recours aux contrats de travail courts.

L’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à la réforme de l’assurance chômage confirme l’ouverture de négociations par branche dont l’objectif est de déterminer les moyens de développer l’installation durable dans l’emploi et d’éviter les risques d’enfermement dans des situations de précarité. Cet accord impose une évaluation de ces négociations au plus tard le 31 décembre 2018.

1.2.  Éléments de droit comparé[86]

Le financement de l’indemnisation chômage est assuré, selon les pays, par les cotisations sociales et par des contributions publiques. Les cotisations sociales peuvent être constituées d’une contribution globale à la sécurité sociale ou d’une contribution spécifique.

Dans les pays recourant aux cotisations sociales, certains d’eux modulent les contributions en fonction de la nature du contrat de travail. Ainsi l’Italie et l’Espagne majorent les contributions pour certains types de contrats courts. L’Espagne module la part patronale (+1,2 point par rapport au CDI) mais aussi salariale des contributions pour les CDD à temps complet et à temps partiel. En Italie, cette modulation ne porte que sur la part patronale (+1,4 point  par rapport au CDI) pour l’ensemble des contrats qui ne sont pas à durée indéterminée.

D’autres pays ont mis en place une modulation en fonction du niveau de salaire. C’est le cas de la Suisse qui majore de 0,5 point la part patronale et la part salariale si le salaire dépasse un certain seuil. La modulation peut être aussi fonction du secteur d’activité. Les Pays-Bas ont mis en place une cotisation supplémentaire qui est fonction du secteur d’activité. L’Italie module les taux en fonction du type de contrat mais aussi du secteur d’activité.

Enfin, un autre critère de modulation utilisé est le niveau de la masse salariale de l’entreprise. Ainsi, les entreprises en Finlande se voient appliquer des taux différents par tranche de leur masse salariale.

Les États-Unis ont mis en place une modulation des cotisations au niveau de chaque entreprise en fonction des coûts que les entreprises font supporter à l’Assurance chômage en licenciant des salariés. Pour chaque entreprise, un ratio annuel est calculé en fonction du nombre de licenciements réalisés sur plusieurs années puis ce ratio est comparé au barème mis en place dans l’État où est localisée l’entreprise. Ce barème permet de situer l’entreprise par rapport aux autres entreprises de l’État. Le taux de contribution appliqué à l’entreprise est fonction de la comparaison entre le ratio calculé et le barème en vigueur dans l’État. Le critère du secteur d’activité de l’entreprise n’entre pas en ligne de compte.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Les critères de modulation des taux de contribution relèvent du niveau législatif. Actuellement, l’article L. 5422-12 du code du travail prévoit que les accords d’Assurance chômage peuvent majorer ou minorer les taux de contributions en fonction de la nature du contrat de travail, de sa durée, du motif de recours à un contrat d’une telle nature, de l’âge du salarié ou de la taille de l’entreprise.

Le cadre législatif actuel permet ainsi plusieurs types de modulation, dont certains ont été utilisés sans effet identifiable sur un ralentissement du développement des contrats de très courte durée.

L’introduction de nouveaux critères implique de modifier l’article L. 5422-12 du code du travail pour introduire le critère relatif aux fins de contrats. Ainsi, le taux de contribution pourra être majoré ou minoré en fonction du nombre de salariés dont une entreprise s’est séparée au cours d’une période donnée. Les partenaires sociaux pourront se saisir de cette possibilité dans le cadre des accords d’assurance chômage.

2.2.  Objectifs poursuivis

En l’état actuel du droit, les contributions patronales peuvent être modulées en fonction de l’âge du salarié, de la nature de son contrat de travail, de sa durée ou du motif de recours et de la taille de l’entreprise. Les modulations instaurées par les partenaires sociaux dans le cadre de la convention d’assurance chômage se fondent sur la nature du contrat de travail, sa durée et l’âge du salarié. Ces modulations n’ont pas permis une progression de l’emploi stable. 

Aussi, le présent article vise à permettre l’introduction de règles plus responsabilisantes pour les employeurs. La possibilité de moduler les contributions en fonction du taux de fins de contrats a en effet pour objectif d’inciter les employeurs à intégrer dans leurs décisions de recruter, de former et de se séparer de salariés, les conséquences que celles-ci induisent sur le coût financier et social du chômage.

3.         Options et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Les options envisagées concernent la possibilité d’introduire une modulation de la contribution patronale fonction du comportement des employeurs par rapport aux licenciements.

3.1.1.      Première option (écartée) : une modulation de la contribution patronale en fonction du coût des fins de contrat pour l’Assurance chômage

Dans cette première option, la contribution patronale est modulée par employeur en fonction de ce qu’il coûte à l’assurance-chômage (soit les indemnités versées aux salariés dont il se sépare) et ce qu’il rapporte (soit les contributions qu’il verse à l’assurance chômage).

Le ratio de chaque entreprise est ensuite comparé à un ratio de référence. Si l’entreprise se situe à la moyenne, son taux de contribution reste le taux de contribution de référence. Si elle se situe au-dessus, son taux augmentation et à l’inverse, si elle se situe au-dessous, son taux diminue.

Cette première option a l’avantage d’inciter les entreprises à tenir compte des conséquences pour l’assurance chômage de leurs décisions de gestion de la main d’œuvre. Elle se rapproche des caractéristiques de l’experience rating en vigueur aux États Unis. Toutefois, la complexité de sa mise en œuvre opérationnelle, dans un contexte plus global de simplification des démarches pour les entreprises, a conduit le Gouvernement à écarter cette option.

3.1.2.      Seconde option (écartée) : une modulation de la contribution patronale en fonction du recours aux contrats courts

Dans cette seconde option, la contribution patronale est modulée par employeur en fonction de leur taux de recours aux contrats à durée déterminée (CDD).

Le ratio de chaque entreprise est ensuite comparé au taux moyen de recours aux CDD. Comme pour la première option, si l’entreprise se situe à la moyenne, son taux de contribution reste le taux de contribution de référence. Si elle se situe au-dessus, son taux augmente et à l’inverse, si elle se situe au-dessous, son taux diminue

Cette seconde option a l’avantage d’inciter à la progression de l’emploi stable en accroissant le recours au CDI, d’une part, et en rallongeant la durée des CDD, d’autre part. Toutefois, cette option ne permet pas de responsabiliser les employeurs par rapport aux conséquences de leur gestion de la main d’œuvre sur l’assurance chômage et elle pénalise indûment les entreprises qui utiliseraient les contrats courts pour des raisons structurelles tenant à la nature de leur activité. Par ailleurs, elle pourrait induire des contournements possibles en incitant les employeurs à proposer des CDI et à y mettre fin pendant la période d’essai. Cette option a été écartée pour ces raisons.

3.2.  Option retenue : une faculté de modulation de la contribution patronale fonction du nombre de fins de contrat de travail

Dans cette dernière option, la loi est modifiée afin que la contribution patronale puisse être modulée par employeur en fonction de leur taux de séparation (soit le rapport entre le nombre annuel de fins de contrat – hors les démissions – et l’effectif de l’entreprise). Il convient de préciser que seules les fins de contrat de travail ayant donné lieu à inscription à Pôle emploi et celles se produisant alors que le salarié est inscrit sur les listes de demandeurs d’emploi pourront être prises en compte pour minorer ou majorer le taux de contribution. Les démissions ne seraient pas retenues dans la mesure où elles ne peuvent être imputables à l’employeur. De même, les fins de contrat des travailleurs, artistes ou techniciens relevant des professions  de la production cinématographique, de l’audiovisuel ou du spectacle ne seraient  pas retenues pour le calcul du taux de séparation. En effet les employeurs de ces derniers acquittent déjà une surcontribution[87].

Ce système présente l’avantage par rapport à la première option de ne pas être fondé sur un comportement de recherche d’emploi qui ne peut être imputable à l’employeur. Seules les fins de contrats donnant lieu à une inscription au chômage sont en effet comptabilisées, et l’employeur peut donc dans ce système arbitrer entre l’utilisation des contrats courts et le taux de cotisation qu’il paye. Il ne pénalise pas les entreprises qui recourent à des contrats courts dès lors que leurs salariés  ne s’inscrivent pas à Pôle emploi.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagees

4.1.  Impacts juridiques

L’introduction d’un nouveau critère de modulation suppose de modifier l’article L. 5422-12 du code du travail relatif aux modalités de fixation des taux de contribution. La loi le permettant, les partenaires sociaux pourront donc moduler le taux de contribution patronale  en fonction du nombre de fins de contrat de travail. La présente loi prévoit , en outre, la transmission d’un rapport au Gouvernement par les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au plan national et interprofessionnel faisant le bilan des mesures issues des négociations de branches prévues par l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à la réforme de l’assurance chômage. Ces négociations ont pour objectif de prendre les mesures nécessaires permettant de développer l’installation dans l’emploi et d’éviter les risques d’enfermement dans des situations de précarité. En fonction du bilan de ces négociations, le Gouvernement aura la possibilité, durant une période provisoire courant du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020, de moduler les contributions patronales par décret en Conseil d’État, après concertation avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au plan national et interprofessionnel.

4.2.  Impacts économiques et financiers

L’introduction de la possibilité de moduler le taux de contribution patronale en fonction du nombre de fins de contrat de travail par entreprise peut n’avoir aucun impact financier sur les ressources collectées en termes de contributions patronales. En effet, la modulation pourra être fixée de façon à ce que les contributions patronales collectées auprès d’entreprises qui auront un taux de contribution minoré (bonus) du fait d’un faible taux de fins de contrat soient équivalentes à celles des entreprises ayant des taux de contribution majorés (malus).

4.3.  Impacts sur les services administratifs

La mise en place d’un système de bonus-malus de la contribution patronale reposant sur le nombre de fins de contrat aura un impact sur l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), Pôle emploi, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) et la Caisse sociale de prévoyance de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui sont en charge du recouvrement des contributions d’assurance chômage pour le compte de l’Unédic. A ce stade, il n’est pas possible d’évaluer les coûts de gestion induits par  l’instauration d’un tel système dans la mesure, il s’agit d’une faculté pour les partenaires sociaux qui définiront, le cas échéant, les paramètres du dispositif.           

4.4.  Impacts sur les entreprises

Selon la modulation qui sera choisie, la prise en compte du taux de fins de contrat de travail, les employeurs verront le montant des contributions patronales qu’ils versent, augmenter ou diminuer selon leurs comportements.

En cas de mise en œuvre d’un bonus-malus, un enjeu opérationnel résidera également dans la bonne articulation entre ce mécanisme de modulation des contributions patronales d’une part, et les allègements généraux de cotisations d’autre part, qui intégreront, à partir de 2019, le champ des contributions patronales d’assurance chômage.

Enfin, la mise en en place de ce bonus-malus n’impliquera aucune démarche de la part de l’employeur. De plus, l’employeur sera parfaitement informé sur les modalités de calcul du taux qui lui ont été appliqués. Les données et les sources ayant été utilisées pour ce calcul pourront lui être transmis à sa demande.

4.5.  Impacts sur les particuliers

La loi prévoit que la modulation éventuelle des taux de contribution sera sans impact sur les droits à allocation des assurés : quel que soit le taux de contribution employeur payé par l’entreprise, les droits à allocation de ses anciens salariés restent inchangés.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Cette disposition législative entrera en vigueur dès l’adoption de la loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte ne fait pas l’objet de dispositions spécifiques.

Chapitre 2 – Un nouveau cadre d’organisation de l’indemnisation chômage

Articles 30 et 31 - Financement du régime d’assurance chômage et modalités de calcul de la contribution globale

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

1.1.1.      Les règles actuellement applicables en matière de financement de l’assurance chômage

a)      Les dispositions de droit commun

L’assurance chômage est aujourd’hui financée par des cotisations sociales versées par les salariés et les employeurs et non par l’impôt. Tous les emplois affiliés à l’Assurance chômage font l’objet de contributions proportionnelles aux salaires.

Le taux de contribution est de 6,4 % du salaire brut dont 4 % pour l’employeur (auxquels s’ajoute une contribution exceptionnelle temporaire de 0,05 % pour un maximum de trois ans, telle que prévue par la convention d’assurance chômage du 14 avril 2017) et 2,4 % pour les salariés. Ces contributions sont assises sur les rémunérations brutes et leur assiette est limitée par un plafond équivalent à quatre fois le plafond annuel de la sécurité sociale. Le taux et l’assiette des contributions sont fixés librement par les partenaires sociaux dans les accords d’assurance chômage.

En raison des modalités particulières d’exercice de certaines professions, le taux et l’assiette de la contribution chômage peuvent être adaptés (notamment par une approche forfaitaire).

Il convient par ailleurs de souligner que, dans une logique d’activation des dépenses dites « passives » d’indemnisation du chômage, l’Unédic verse à Pôle emploi l’équivalent de 10 % des cotisations collectées, ce qui finance deux tiers de son budget de fonctionnement.

b)     Les salariés détachés et expatriés

Les salariés détachés ainsi que les salariés expatriés, quelle que soit leur nationalité, occupés par des entreprises entrant dans le champ d’application territorial de l’assurance chômage (en France, dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre et Miquelon, à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin) sont affiliés obligatoirement à l’assurance chômage. Les autres salariés expatriés peuvent être affiliés et contribuer à l’Assurance chômage, mais à titre facultatif (selon le choix de leur employeur).

Dans les deux cas, les règles de droit commun s’appliquent en matière de contribution chômage avec toutefois des spécificités en matière d’assiette.

A défaut d’affiliation à l’assurance chômage par l’employeur, le salarié peut s’affilier lui-même à titre individuel : dans ce cas, il supporte la totalité des contributions (parts patronale et salariale) dans le cadre du versement d’une seule contribution, de nature salariale. Pour adhérer à titre individuel, le salarié dispose d’un délai de douze mois suivant son expatriation. Ces salariés ne sont pas assujettis à la contribution sociale généralisée.

c)      Mayotte

Dans le département de Mayotte, le taux et l’assiette des contributions sont spécifiques et sont fixés par la convention du 24 mars 2016 relative à l’indemnisation chômage à Mayotte. Les contributions y sont assises sur les rémunérations entrant dans l’assiette des cotisations du régime d’assurance maladie maternité mahorais, dans la limite de 3 152 € mensuels au 1er mai 2017 et de 4 728 € mensuels au 1er mai 2018.

Le taux de contribution est de 3,80 %, réparti à raison de 2,45 % à la charge des employeurs et de 1,35 % à la charge des salariés. À partir du 1er juillet 2018, le taux de contribution sera de 4,30 %, réparti à raison de 2,80 % à la charge des employeurs et de 1,50 % à la charge des salariés.

Toutefois, indépendamment de ces modalités dérogatoires de financement pour le département de Mayotte, les recettes et les dépenses relatives au régime d’assurance chômage qui s’y applique ne sont pas retracées dans une comptabilité spécifique.

d)     Les salariés des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle (annexes VIII et X)

Du fait des règles spécifiques d’indemnisation plus favorables applicables aux artistes et techniciens du spectacle, le taux de contribution dû au titre de l’emploi de salariés des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle est constitué de deux taux de contribution qui se cumulent à hauteur de 13,85 % :

1.1.2.      La situation financière de l’assurance chômage

Le montant des contributions chômage collectées en 2016 s’élève à 34,8 Md€, dont 21,6 Md€ au titre des contributions chômage employeurs (soit 62 %) et 13,2 Md€ au titre des contributions chômage salariés (soit 38 %).

CHIFFRES CLES – 2016

Nombre de salariés affiliés à l’Assurance chômage

16,7 millions

Nombre d’employeurs qui cotisent à l’Assurance chômage

1,8 million

Montant des contributions collectées

34,8 milliards d’euros

Montant des allocations versées

33,9 milliards d’euros

Montant des aides versées par l’Assurance chômage

0,7 milliard d’euros

Montant versé aux caisses de retraite complémentaire en 2016 (dont 1,4 milliard d’euros prélevé sur les allocations versées)

3,4 milliards d’euros

Dotation de l’Unédic au budget de Pôle emploi

3,3 milliards d’euros

L’indemnisation par l’assurance chômage est fondée sur un double principe : une logique assurantielle et une approche redistributive :

La situation financière du régime s’est fortement dégradée sur la période récente, notamment sous l’effet de la crise économique qui a entraîné une forte hausse du chômage à partir de 2009. Le solde financier a ainsi atteint - 4,357 M€ en 2016. Le montant de la dette s’est élevé à  29,985 Md€. Les prévisions les plus récentes de l’Unédic font apparaître une réduction du déficit prévue jusqu’en 2019. Toutefois, le régime restera déficitaire à cette échéance, de sorte que la dette continuera d’augmenter sur la période.

 

 

 

Source : Unédic

En termes de recettes, les contributions augmenteraient en 2018 (+ 3,8 %) du fait de la contribution exceptionnelle mise en place par la convention de 2017. En 2019 la progression des contributions serait ralentie (+ 3,1 %) du fait de la fin de la sur-contribution de la convention 2017.

En termes de dépenses, les allocations versées  diminueraient de - 1,3 % en 2018 et de -1,4 % en 2019.

L’élasticité des dépenses et recettes d’assurance chômage à la conjoncture économiques est relativement importante. La réglementation impacte également le solde financier de l’Assurance chômage.

1.1.3.      Les évolutions  relatives au financement de l’assurance chômage introduites en 2018

Les mesures en faveur du pouvoir d’achat prévues dans le programme présidentiel, notamment la suppression des contributions salariales chômage (2,4 %), ont des conséquences directes sur le financement de l’assurance chômage. En contrepartie de la suppression des cotisations salariales, le taux de la contribution sociale généralisée (CSG) est augmenté de 1,7 point. Ce mécanisme induit un gain de pouvoir d’achat pour les salariés.

Un schéma transitoire de financement du régime d’assurance chômage a été mis en place pour l’année 2018, afin de ne pas préempter la réforme plus globale de l’assurance chômage par le choix, dès la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, d’un système pérenne de financement. Ce schéma transitoire se traduit par un mécanisme d’exonération en deux temps des contributions salariales chômage. Il est prévu à l’article 8 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Le Conseil constitutionnel, tout en rappelant que « les dispositions relatives aux contributions salariales d’assurance chômage sont étrangères au domaine de la loi de financement de la sécurité sociale », a validé ce dispositif, à titre exceptionnel,  en tenant compte de ce que « le législateur a entendu procéder à une réforme d’ensemble consistant à diminuer les cotisations sociales des actifs et, à cette fin, à faire prendre en charge par l’agence centrale des organismes de sécurité sociale le financement, en 2018, de la réduction des contributions salariales d’assurance chômage ». Il en a déduit que, « dans les circonstances particulières de l’espèce », les paragraphes VI et VII de l’article 8 trouvent leur place dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Le Conseil d’État, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de sécurité sociale, a particulièrement souligné la nécessité de porter une réflexion globale sur le financement du régime d’assurance chômage afin de veiller à sa cohérence.

Le Gouvernement entend désormais pérenniser les mesures de pouvoir d’achat prises pour l’année 2018 ainsi que le schéma de financement du régime d’assurance chômage. Les allégements de charges patronales prévus pour le 1er janvier 2019 ainsi que la suppression des cotisations salariales chômage conduiront à une évolution substantielle du financement de l’assurance chômage.

1.2.  Cadre constitutionnel

Toute réforme du financement de l’assurance chômage doit respecter en particulier le principe constitutionnel d’égalité. Ainsi, le Conseil constitutionnel a censuré une disposition de réduction de cotisations de sécurité sociale liée à un objectif de pouvoir d’achat, dans une décision du 6 août 2014[88]. Après avoir rappelé la définition de la cotisation sociale (« versements à caractère obligatoire ouvrant des droits aux prestations et avantages servis »), le juge constitutionnel a reconnu que le législateur avait « institué une différence de traitement, qui ne repose pas sur une différence de situation entre les assurés d'un même régime de sécurité sociale, sans rapport avec l'objet des cotisations salariales de sécurité sociale ». Ainsi, dans la mesure où l’objet des cotisations sociales est d’ouvrir des droits à prestations, un dispositif partiel d’exonération conduisant certains bénéficiaires à ne plus payer de cotisation salariale ne pouvait être justifié en l’espèce au regard du principe d’égalité.

La suppression complète des cotisations salariales n’encourt pas les mêmes difficultés au regard du principe d’égalité.

Outre le principe d’égalité, la modification du financement de l’assurance chômage doit également être analysée au regard du principe contributif. L’affectation, pour environ 40 % des ressources du régime, de ressources d’État tend à modifier la nature du régime, qui était intégralement contributive jusqu’à présent. Cependant, aucun principe constitutionnel n’oblige à maintenir la nature contributive du régime d’assurance chômage. En outre, le juge constitutionnel s’est prononcé sur le principe contributif, fondé sur l’idée de la nécessité d’un lien entre financement et prestations délivrées. Il a indiqué que ce principe ne constitue pas une norme de valeur constitutionnelle. Cette décision concernait le bénéfice de prestations sans qu’il y ait eu préalable de cotisations (dans le cadre de la couverture maladie universelle).

1.3.  Cadre conventionnel

La convention de l’Organisation internationale du travail n° 102 stipule dans son article 71 que : « Le coût des prestations attribuées en application de la présente convention et les frais d'administration de ces prestations doivent être financés collectivement par voie de cotisations ou d'impôts, ou par les deux voies conjointement, selon des modalités qui évitent que les personnes de faibles ressources n'aient à supporter une trop lourde charge et qui tiennent compte de la situation économique du Membre et de celle des catégories de personnes protégées. ». Dès lors, les évolutions du financement de l’assurance chômage envisagées (fiscalisation partielle du financement) sont compatibles avec la convention de l’Organisation internationale du travail.

1.4.  Éléments de droit comparé[89]

Le financement du régime d’assurance chômage prend selon les pays des modalités très diverses, qui ne recoupent que partiellement les schémas de gouvernance adoptés. Les taux nominaux de cotisations sociales sont peu informatifs sur les conditions réelles de financement des régimes d’assurance chômage, en raison de la progressivité (ou dégressivité, ou les deux) des barèmes selon le niveau de salaire, de la pratique de taux différenciés selon les situations d’emploi (contrat permanent ou temporaire) ou selon les comportements passés des employeurs (« experience rating » aux États-Unis), et des interventions de l’État dans l’équilibre des régimes.

 

Concernant le schéma de financement du régime d’assurance chômage, le système de contributions appliqué en France, avec des cotisations sociales à la charge des employeurs et des salariés, est également observé en Allemagne, en Autriche, en Espagne et en Suède.

Certains pays présentent en revanche d’autres schémas de financement.

Ainsi, en Irlande et au Royaume-Uni, l’assurance-chômage est totalement intégrée à la sécurité sociale. Elle est financée par une contribution globale de laquelle le financement de l’assurance chômage ne peut être isolé. C’est également le cas en Belgique, mais la proportion de cette contribution affectée à l’assurance-chômage est prédéterminée, ce qui peut se traduire en taux de cotisations sociales dédiées au financement de l’assurance chômage.

Au Danemark, les cotisations sociales sont uniquement à la charge des salariés mais elles ne couvrent qu’une partie des dépenses d’indemnisation ; d’autres prélèvements sont mobilisés par l’État pour couvrir ces dépenses.

En Italie, aux États-Unis et aux Pays-Bas, à l’inverse, les cotisations sociales sont uniquement à la charge des employeurs.

Lorsque les contributions sont acquittées par les salariés et les employeurs, la part prise en charge par les employeurs est en général supérieure à celle des salariés. En effet, une exception est recensée au Danemark, où seuls les salariés contribuent ; en Allemagne et en Autriche, les parts employeurs et salariés sont identiques.

Concernant l’assiette des cotisations (constituée du salaire brut), la moitié des pays considérés n’applique aucun plafond et calcule ainsi les cotisations sur l’intégralité de l’assiette. L’assiette est en revanche plafonnée dans certains pays, comme aux États-Unis, qui se distinguent par un plafond très faible (un peu moins de 1 000 € par mois, soit un niveau inférieur au salaire minimum à temps complet), tandis que le plafond en France est élevé. Par ailleurs, dans certains pays, des systèmes d’exonération sur les bas salaires rendent les taux de cotisations progressifs sur le bas de la distribution des salaires. C’est le cas en Autriche, Irlande, Royaume-Uni, Belgique. 

Au-delà des systèmes de plancher, plafond et exonération, d’autres facteurs peuvent conduire aussi à des taux différenciés même pour des niveaux de salaire identiques :

L’État participe directement au financement de l’assurance chômage dans tous les pays, à l’exception de la France. Cette intervention peut prendre la forme d’impôts et taxes affectées, de contributions budgétaires ex ante ou ex post (pour couvrir les déficits), ou encore de prêts (Allemagne).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Le mode de financement de l’assurance chômage est aujourd’hui fixé aux articles L. 5422-9 et suivants. Le système transitoire mis en place pour 2018 n’a pas nécessité de modification de ces articles. En effet, le système d’exonération des cotisations salariales et la prise en charge de ces cotisations par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale instaurés par la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2018 ont conduit à maintenir les cotisations salariales.

La suppression des cotisations salariales à partir de 2019 nécessite une modification des articles concernés. 

Il est nécessaire en premier lieu de modifier l’article L. 5422-9 relatif aux ressources de l’assurance chômage. Il s’agit de supprimer la mention des contributions des salariés, en dehors des cas particuliers de la sur-contribution des annexes VIII et X et de certains salariés expatriés adhérant au régime d’assurance chômage à titre individuel, et d’ajouter une nouvelle ressource d’origine fiscale. Les modalités de financement de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI) sont également précisées dans cet article afin de prévoir que la fraction de ressource fiscale (CSG) financera notamment l’ATI.

En second lieu, il est nécessaire de tenir compte de la suppression des cotisations salariales en prévoyant des mesures de toilettage sur les articles L. 5422-10, L. 5422-14, L. 5424-20[90], L. 5429-2, L. 5721-1 et L. 6332.17 du code du travail ainsi que l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale. L’article L. 5721-1 est également modifié pour tenir compte du transfert du recouvrement des contributions des voyageurs représentants et placiers (VRP), initialement confié à la Caisse nationale de compensation des cotisations de sécurité sociale des voyageurs représentants et placiers, aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF).

Enfin, l’article L. 5422-24 du code du travail relatif au financement de Pôle emploi est également modifié afin de modifier l’assiette de calcul de la contribution générale versée par l’Unédic à cet opérateur. Il s’agit de prendre en compte dans ce calcul le montant de la recette fiscale affectée au régime d’assurance chômage en lieu et place des contributions chômage salariales. Une mesure transitoire est également introduite dans le projet de loi afin de permettre de maintenir les modalités opérationnelles de calcul actuellement utilisées (année N-2) pour les années 2019 et 2020.

2.2.  Objectifs poursuivis

La réforme du financement de l’assurance chômage doit être conforme aux objectifs suivants :

En outre, la réforme du financement doit s’inscrire dans le cadre plus large de la réforme de l’assurance chômage, qui passe notamment par l’ouverture de nouveaux droits et par le renforcement du rôle de l’État dans la gouvernance du régime.

3.         Options et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Les options envisagées concernent, en premier lieu, le sort des contributions salariales et, en second lieu la ressource à affecter au régime en lieu et place de ces contributions salariales.

3.1.1.      Une exonération pérenne et intégrale des contributions salariales chômage

Dans cette première option, les contributions salariales chômage seraient maintenues artificiellement mais totalement exonérées. L’État prendrait totalement en charge le montant de ces contributions. Pour rappel, le système, retenu dans les lois financières pour 2018, repose sur une garantie de reversement par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) à l’Unédic des contributions salariales dues à l’euro près. Le financement de la compensation se fait par l’affectation à l’ACOSS d’une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à hauteur de 9,4 Md€ hors effet année pleine.

En cas d’exonération intégrale et pérenne, la contribution chômage salariale continue à exister en droit. Cela signifie qu’elle relève toujours du régime juridique attaché à la cotisation sociale et défini par la jurisprudence du Conseil constitutionnel (« versements à caractère obligatoire ouvrant des droits aux prestations et avantages servis »[91]). Au sein des cotisations salariales (les exigences n’étant pas les mêmes pour les cotisations patronales), le Conseil constitutionnel veille au respect de leur nature particulière qui est d’ouvrir droit à des prestations et avantages servis par le régime de sécurité sociale.

Cette première option reviendrait à pérenniser le système mis en place pour 2018.

Elle présenterait des inconvénients majeurs :

Pour ces différentes raisons, cette option a été écartée.

3.1.2.      Le versement d’une dotation budgétaire ou d’une subvention au régime d’assurance chômage (Unédic)

Cette option consiste à verser une dotation en compensation des cotisations salariales exonérées ou supprimées. Dans cette option, le montant de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) est affecté à la sécurité sociale. En contrepartie, l’État récupère des recettes précédemment affectées à cette dernière (ex : fraction du produit de la TVA ou de la taxe sur les salaires) et, sur cette base, affecterait à l’assurance chômage une dotation budgétaire (programme 102 de la mission travail-emploi).

Cette dotation, prévue en loi de finances, deviendrait ainsi la seconde source de recettes de l’assurance chômage aux côtés des cotisations patronales.

Dans ce schéma, il reviendrait au législateur de fixer chaque année en loi de finances le niveau de la contribution de l’État, la question étant alors posée d’une part des sous-jacents à retenir pour ce calibrage et d’autre part de la dynamique attachée à cette ressource.

Un tel système ferait rentrer l’assurance chômage dans le régime de régulation appliqué au budget de l’État dans un contexte de pression forte à la baisse de la dépense publique, ce qui paraît peu adapté s’agissant de dépenses de prestations, représentant par ailleurs un montant extrêmement substantiel. Pour cette raison, il a été décidé de privilégier l’affectation d’une recette fiscale à l’assurance chômage.

3.2.  Option retenue

3.2.1.      La suppression pérenne et intégrale des contributions salariales chômage 

Les contributions chômage salariales sont supprimées et remplacées, de manière pérenne, par une autre source de financement, d’origine fiscale. Il s’agirait de la contribution sociale généralisée (CSG). La contribution chômage salariale devrait être uniquement maintenue, pour partie, pour des professions obéissant à des conditions d’exercice particulières justifiant un mode de contribution spécifique (annexes VIII et X et expatriés affiliés au régime d’assurance chômage à titre individuel).

La suppression des contributions salariales chômage a des précédents dans le champ de la sécurité sociale. Le Conseil constitutionnel a validé la suppression des cotisations maladie des fonctionnaires prévue par la loi n° 97-1164 du 19 décembre 1997 de financement de la sécurité sociale pour 1998[92], tout comme celle des cotisations maladie des salariés prévue par la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, alors même que, notamment dans ce dernier cas, il s’agissait de cotisations liées à des prestations proportionnelles au revenu (les indemnités journalières). Par ailleurs, les branches famille et accidents du travail ont toujours été financées par les seules cotisations patronales.

Selon le Conseil constitutionnel, « doivent être compris au nombre des principes fondamentaux de la sécurité sociale la détermination des catégories de personnes assujetties à l'obligation de cotiser ainsi que le partage de cette obligation entre employeurs et salariés » ; en particulier « la mise à la charge intégrale de l'employeur de la cotisation des allocations familiales constitue un des principes fondamentaux de la sécurité sociale et relève, comme telle, de la compétence législative »[93]. L’existence d’une cotisation salariale chômage relève des principes fondamentaux de la sécurité sociale et donc de la compétence du législateur. Il est donc également de sa compétence d’y mettre fin.

En outre, le principe constitutionnel d’égalité sera respecté, tous les salariés bénéficiant de la suppression de la contribution salariale.

Concernant les intermittents du spectacle, il est nécessaire de maintenir leur sur-contribution salariale. Le maintien d’une contribution ad hoc est justifié par le caractère plus favorable du régime d’indemnisation appliqué à ce public. En outre, le maintien d’une contribution salariale pour les salariés expatriés affiliés à titre individuel apparait justifié dans la mesure où ces derniers prennent en charge l’intégralité de la contribution chômage. La suppression des contributions salariales chômage pour ce public les empêcherait de s’affilier au régime et de bénéficier d’une indemnisation.

3.2.2.      L’affectation directe d’une fraction du produit d’une imposition de toute nature au régime d’assurance chômage 

Dans un tel schéma, il s’agirait d’affecter pour solde de tout compte tout ou partie d’une ou plusieurs impositions de toute nature. Le code du travail précisera que le régime d’assurance chômage est financé par une recette de nature fiscale ; la nature de la recette fiscale, son niveau et les modalités de son affectation seront déterminés par les lois financières.

Il apparait dans ce cadre essentiel de prendre en compte la dynamique de la ressource dans l’intérêt du régime d’assurance chômage. L’affectation d’une fraction de contribution sociale généralisée (CSG) présente ainsi l’intérêt d’attribuer une ressource dynamique à l’assurance chômage tout en correspondant aux annonces du Président de la République.

Le Conseil constitutionnel a précisé qu’« aucun principe fondamental reconnu par les lois de la République n'interdit que le produit d'une imposition soit attribué à un établissement public ou à une personne privée chargée d'une mission de service public. ».[94] Il est donc possible d’affecter une imposition de toute nature, comme la CSG, à l’Unédic au titre de la gestion du régime d’assurance chômage.

Cette affectation devra être prévue par une révision de la répartition de la CSG inscrite dans le code de la sécurité sociale, via la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. 

Compte tenu de l’évolution des modalités de financement du régime d’assurance chômage (compensation de la suppression des cotisations salariales et compensation de l’exonération de cotisations patronales sur les bas salaires), 40 % des ressources du régime d’assurance chômage seront désormais fiscalisées. Cela nécessite et légitime un renforcement du rôle de l’État dans la gouvernance du régime.

Ce renforcement passerait par la construction d’un document de cadrage en amont des négociations, qui fixerait la trajectoire financière pluriannuelle à respecter et, le cas échéant, des objectifs à la négociation et le calendrier. L’agrément de la convention serait délivré sur la base du respect par les partenaires sociaux du document de cadrage.

Ce scénario nécessite aussi d’intégrer la ressource issue de la CSG dans l’assiette des 10 % de financement à Pôle emploi.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

Cette réforme du financement de l’assurance chômage implique à la fois des dispositions dans ce projet de loi pour élargir les ressources de l’assurance chômage, et des dispositions dans une loi financière (loi de financement de la sécurité sociale pour affecter la contribution sociale généralisée - CSG).

La mesure envisagée modifie profondément le mode de financement de l’assurance chômage en supprimant totalement les contributions salariales. Aux termes du projet de loi, une fraction des recettes fiscales, en pratique de contribution sociale généralisée, constituera une ressource propre de l’assurance chômage.

Le montant affecté à l’assurance chômage sera déterminé chaque année en loi de financement de la sécurité sociale. Cette affectation de CSG devra être réalisée à la fois en cohérence avec le cadrage financier du régime d’une part et avec la stratégie globale de finances publiques d’autre part.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La qualification de la contribution sociale généralisée (CSG) au regard du droit de l’Union européenne[95] n’est pas la même qu’en droit interne[96].

La décision du Conseil d’État du 27 juillet 2015 relative à l'affaire de Ruyter, intervenant après l'arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 26 février 2015, a remis en cause l’assujettissement à la CSG des revenus du capital de personnes affiliées à un régime de sécurité sociale d'un autre État membre de l'Union européenne ou de l' Espace économique européen, ainsi que la Suisse. Ayant jugé que le paiement de la CSG dans ce cadre venait financer les régimes contributifs de sécurité sociale français et que l’on se trouvait en présence d’une cotisation de sécurité sociale au sens du droit communautaire, la Cour de justice de l’Union européenne a estimé contraire au droit de l’Union européenne le double assujettissement qui en résultait pour les intéressés.

Afin de tirer les conséquences de l’arrêt De Ruyter, le législateur a décidé, par certaines des dispositions de l’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, de maintenir dans la sphère sociale le produit des prélèvements sur les revenus du capital, mais de l’affecter hors des régimes de sécurité sociale au sens du droit de l’UE, c'est-à-dire aux organismes servant des prestations non contributives non conditionnées à l’affiliation à un régime français.

Dès lors, pour sécuriser l’affectation de CSG en substitution totale des contributions chômage salariales, l’affectation au régime d’assurance chômage d’une fraction de CSG portant sur les revenus d’activité et de remplacement apparait préférable.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique 

La suppression des contributions chômage salariales et leur remplacement par une fraction de contribution sociale généralisée (CSG) a pour effet de substituer une contribution sociale, dont l’assiette est large, à des cotisations portant sur les seuls revenus du travail.

Cette évolution prolonge et renforce les impacts de la substitution de la CSG aux cotisations salariales chômage et maladie initiées par la loi de financement de la sécurité sociale en 2018. Ainsi, le transfert de pouvoir d’achat des retraités et des ménages percevant des revenus du capital vers les salariés permet de rendre le travail plus rémunérateur et donc d’encourager l’offre de travail.

À plus long terme, les cotisations sociales dues par les salariés et la CSG entrent dans le coin fiscalo-social[97]. Or, pour un salarié, les cotisations sociales baissent au-delà de la hausse de la CSG. On a donc au global une baisse du coin fiscalo-social.

Par ailleurs, cette mesure aura pour effet d’augmenter durablement le pouvoir d’achat des actifs grâce à la suppression des cotisations salariales chômage.

Pour rappel, en année pleine, ce gain de pouvoir d’achat est estimé à 263 € par an pour une personne rémunérée au SMIC ou de 526 € pour un couple dont chacun des membres est rémunéré au SMIC. En revanche, dans la mesure où l’assiette des cotisations d’assurance chômage est plafonnée à quatre PASS (environ 155 000 €), les personnes percevant de très hauts revenus (plus de 400 000 € par an environ) contribueront davantage sur la fraction des revenus dépassant ce plafond et ne seront pas bénéficiaires de la mesure[98].

    Source : Direction de la sécurité sociale

Au global et à long terme, la mesure devrait donc avoir des effets favorables sur  l’activité,  l’emploi et la croissance.

4.2.2.      Impact budgétaire

Le montant de cotisations salariales chômage supprimées est d’environ 13,6 Md€ en année pleine. Le montant de contribution sociale généralisée (CSG) supplémentaire issu de l’augmentation de 1,7 point prévue en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018 est d’environ 22,7 Md€ en année pleine.

La suppression des cotisations salariales pour 13,6 Md€, à laquelle s’ajoute une exonération de cotisations patronales (en application de la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en exonérations de cotisations patronales en 2019) estimée à environ 3 Md€, aboutit à un total d’environ 16 Md€ pris en charge par l’État, soit environ 45 % du total des ressources de l’assurance chômage.

La suppression des cotisations salariales chômage représente une perte de recettes de l’ordre de -13,6 Md€ pour l’Unédic (38 % de ses recettes). Cette perte serait compensée en 2019 par l’affectation d’une fraction du produit de la CSG. A législation inchangée, le produit de la CSG provient des revenus d’activité à hauteur de 70 %.

La CSG dite activité est assise pour une part importante sur les salaires du secteur et doit donc connaître une évolution proche de l’assiette des contributions à l’assurance chômage. Cependant, les rendements issus des autres assiettes de revenus pris en compte par la CSG peuvent avoir des variations sensiblement différentes.

Le produit de la CSG et la masse salariale du secteur privé semblent réagir différemment au cycle économique même si leur tendance de long terme est proche. Ainsi, la dynamique de la CSG sur moyen terme n’est pas très différente de celle observée sur la seule masse salariale sur la base de laquelle les recettes d’assurance chômage sont calculées. Néanmoins, elle comporte des effets de cycle plus importants.

Cette modification des sources de financement de l’assurance chômage est sans incidence pour l’Unédic en matière de gestion.

4.3.  Impacts sur les employeurs publics dont les collectivités territoriales

La suppression des contributions salariales n’a aucun impact pour les employeurs publics en auto-assurance tout comme pour leurs agents publics, ces derniers ne s’acquittant pas de contributions chômage.

Les impacts de cette suppression pour les agents publics dont l’employeur public a adhéré au régime d’assurance chômage à titre irrévocable sont identiques à ceux des salariés de droit privé.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Les nouvelles dispositions du projet de loi en matière de financement seront gérées par l’ACOSS, sans coût supplémentaire, dans le cadre de gestion habituelle des modifications des paramètres en matière de cotisations et contributions sociales. L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) centralisera, dans le cadre de ses missions de recouvreur des recettes de la sphère sociale, les reversements correspondant. Les frais de gestion versés par Pôle emploi à l’ACOSS, de même que les frais de gestion  versés par l’État à Pôle emploi au titre de son rôle dans le recouvrement des contributions salariales de certaines catégories de salariés, devront être ajustés en conséquence.

Par ailleurs, les modalités de calcul de la contribution globale versée par l’Unédic à Pôle emploi sont adaptées pour tenir compte de la substitution d’une fraction du produit de la contribution sociale généralisée (CSG) aux contributions chômage salariales. Sur le fond, la règle selon laquelle 10 % des ressources de l’Unédic sont affectées à Pôle emploi n’est pas modifiée. Une mesure transitoire s’assure que les évolutions en matière de financement du régime d’assurance chômage n’aient pas d’impact opérationnel sur le calcul de la contribution de l’Unédic à Pôle emploi.

4.5.  Impacts sociaux

L’affectation d’une recette de cette nature aura un impact sur la nature du régime d’assurance chômage. Celui-ci ne sera plus strictement contributif du fait de la suppression des contributions salariales, même si un lien sera conservé entre niveau de ressources et de prestations, via les contributions patronales. Toutefois, une dimension de solidarité est déjà présente dans le régime, par exemple via le mécanisme de l’allocation journalière minimale ou le financement des dépenses d’accompagnement des demandeurs d’emploi.

Il n’y a pas d’impact spécifique pour les femmes, les jeunes et les travailleurs handicapés s’agissant de la suppression des contributions salariales, celle-ci s’appliquant à tous les salariés.

4.6.  Impacts sur les particuliers

Le financement de l’assurance chômage par environ 45 % de ressources fiscales à partir de 2019 n’a pas d’impact immédiat sur les prestations auxquelles ont droit les demandeurs d’emploi dans les conventions fixées par la convention d’assurance chômage, les paramètres d’indemnisation n’étant pas modifiés par les dispositions du projet de loi.

Certains salariés s’acquitteront encore de contributions salariales en raison des spécificités liées à leur indemnisation ou à leur affiliation au régime d’assurance chômage :

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés au titre des dispositions du présent article du projet de loi :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions législatives relatives au financement de l’assurance chômage entreront en vigueur au 1er janvier 2019. Toutefois en 2019 et en 2020, la contribution globale de l’Unédic au budget de Pôle emploi continuera à titre transitoire à être calculée en fonction des règles d’assiette applicables antérieurement aux modifications apportées par la présente loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte ne fait pas l’objet de dispositions spécifiques concernant les dispositions législatives relatives au financement de l’assurance chômage.

Articles 32 et 33 - Gouvernance du régime d’assurance chômage et période transitoire

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

1.1.1.      Historiquement, les partenaires sociaux ont en charge le régime d’assurance chômage dans un cadre fixé par l’État

La loi[101] confie la détermination des règles d’indemnisation, la gestion et le financement du régime d’assurance chômage aux partenaires sociaux au niveau national et interprofessionnel dans le cadre de conventions d’assurance chômage conclues pour une durée déterminée (deux ou trois ans en général). Les organisations représentatives des employeurs et des salariés ont ainsi créé, en août 1958[102], un système de protection contre la privation involontaire d’emploi, et signé, à l’issue de la négociation, la première convention d’assurance chômage.

Depuis lors, la négociation par les partenaires sociaux d’accord politique (accord national interprofessionnel) fixant les objectifs et les principes d’assurance chômage pour deux ou trois ans sert de base à une convention et au règlement d’assurance chômage.

La convention et le règlement d’assurance chômage détaillent les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi, le taux des contributions des salariés et des employeurs, les conditions d’ouverture des droits des allocataires, le montant et la durée des allocations, la nature des aides à la reprise d’emploi.

Si l’élaboration du cadre juridique du régime d’assurance chômage relève des partenaires sociaux par délégation de la loi, cette compétence des partenaires sociaux fait l’objet aujourd’hui d’un double encadrement.

En premier lieu, certaines règles et principes fondamentaux sont inscrits dans le code du travail, au niveau législatif[103] et réglementaire[104] :

En second lieu, la convention d’assurance chômage doit être agréée par l’État pour que les règles qu’elle contient soient obligatoires et applicables. La loi prévoit un régime de carence déterminé par l’État en cas d’échec des négociations ou de refus d’agrément des conventions au titre de l’article L. 5422-20 du code du travail.

Dans ce cadre fixé par l’État, le paritarisme implique aujourd’hui une autonomie vis-à-vis de l’État qui s’exprime tant au niveau de la négociation collective des règles d’assurance chômage qu’au niveau de la gestion paritaire de l’Unédic.

Par ailleurs, certaines professions se voient appliquer des règles spécifiques déterminées par les partenaires sociaux interprofessionnels. C’est le cas en particulier des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle. Les difficultés récurrentes liées à la gestion de ce régime ont conduit à la mise en place, par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, d’une nouvelle procédure de négociation des annexes VIII et X de la convention d’assurance chômage.

Les partenaires sociaux représentatifs de l’ensemble des professions précitées sont désormais invités à négocier les règles spécifiques d’indemnisation applicables aux artistes et techniciens intermittents du spectacle dans le cadre des négociations nationales et interprofessionnelles et d’une procédure définie par la loi. Cette procédure spécifique aux annexes VIII et X à la convention d’assurance chômage a été mise en œuvre pour la première fois dans le cadre des négociations de 2016-2017.

1.1.2.      L'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), organisme paritaire de droit privé, est chargée, par les partenaires sociaux, de la gestion du régime d’assurance chômage

Pour gérer le régime d’assurance chômage, les partenaires sociaux, conformément à la loi, ont fondé, en 1958 une association loi 1901, organisme paritaire de droit privé, l’Unédic. Les partenaires sociaux y gèrent collectivement l’Assurance chômage.

Huit organisations syndicales et patronales gèrent l’Assurance chômage au sein de l’Unédic :

L’Unédic conseille les partenaires sociaux pendant la négociation pour éclairer leurs décisions puis pour les mettre en œuvre.

Le Conseil d’administration décide des grandes orientations de l’Unédic, valide sa stratégie financière, vote les évolutions du montant des allocations, élit le Bureau et le président pour deux ans. Le Conseil d’administration se réunit deux fois par an et approuve les comptes de l’Assurance chômage. Le Bureau, qui se réunit une fois par mois, suit la bonne application de la réglementation de l’Assurance chômage. Il prend toute décision de gestion la concernant, veille au bon fonctionnement de l’Unédic et nomme son directeur général. Il adopte également les prévisions de recettes et de dépenses de l’Unédic pour anticiper ses besoins de financement.

En région, les partenaires sociaux interviennent au sein des Instances paritaires régionales (IPR), qui se réunissent à Pôle emploi. L’Unédic et Pôle emploi assurent conjointement l’animation et l’appui de ces IPR au sein de chaque direction régionale de Pôle emploi. Ces instances veillent à la bonne application de la convention d’assurance chômage ; elles en suivent la mise en œuvre et alimentent les rapports sur la réglementation réalisés par l’Unédic à l’attention des partenaires sociaux. En cas de difficulté d’interprétation de la réglementation de l’Assurance chômage, les IPR jouent un rôle de veille et alertent l’Unédic. Les IPR statuent également sur les situations individuelles nécessitant un examen particulier (départ volontaire d’un emploi, appréciation des rémunérations majorées, de certaines conditions d’ouverture de droit, par exemple).

Il existe 17 instances paritaires régionales et 2 instances paritaires spécifiques (à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon), installées au sein de chaque direction régionale de Pôle emploi. Elles sont composées à parité par des représentants des employeurs et des salariés. Leur mandat est de trois ans, renouvelable. Chaque année, la présidence et la vice-présidence des IPR alternent entre les deux collèges.

La loi[105] délègue les activités opérationnelles de recouvrement des cotisations, d’inscription des demandeurs d’emploi et d’indemnisation à deux principaux opérateurs : l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale et Pôle emploi.

1.1.3.      Les négociations récentes témoignent des limites du schéma actuel de gouvernance du régime d’assurance chômage

Les interrogations récurrentes – et croissantes – sur l’efficacité du paritarisme de gestion pour faire face aux enjeux actuels ont été renforcées par l’échec des négociations paritaires de 2016 sur l’assurance-chômage, faute de parvenir à un accord sur la modulation des contributions, qui a contraint l’État à se substituer aux partenaires sociaux pour assurer la continuité du régime. Trois décrets dits « de carence » sont successivement entrés en vigueur pour assurer la continuité des droits des demandeurs d’emploi puis pour intégrer les règles particulières relatives aux annexes VIII et X issues de la négociation dans le secteur du spectacle.

Les partenaires sociaux ont ouvert de nouvelles négociations en février 2017. Un protocole d’accord a été conclu le 28 mars 2017 par l’ensemble des organisations patronales et syndicales, à l’exception de la CGT. Toutefois, les doutes n’ont pas été levés par la convention du14 avril 2017, qui, d’une part, ne permet pas le retour à l’équilibre structurel du régime et, d’autre part, repose sur deux mesures paramétriques (calcul de l’allocation de retour à l’emploi (ARE), filière seniors), qui se traduiront en partie par un report sur l’allocation de solidarité spécifique (ASS). Le phénomène de la permittence, qui peut dans une certaine mesure être alimenté par certaines règles de l’assurance chômage, a fait l’objet d’un diagnostic partagé, lequel n’a toutefois pas conduit les partenaires sociaux à prendre de mesures susceptibles d’avoir un impact significatif sur le comportement des acteurs. La convention de 2017 a renvoyé ce sujet aux négociations de branche, dont aucune n’a été engagée à ce jour. 

En outre, les négociations récentes ainsi que les réformes conduites par l’État témoignent de l’existence de plusieurs points de friction que les modalités actuelles de gouvernance du régime ne permettent pas de résoudre :

 

La modification du mode de financement de l’assurance chômage rend nécessaire un renforcement du rôle de l’État dans sa gouvernance.

1.2.  Cadre constitutionnel

L’alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, intégré au bloc de constitutionnalité[107], prévoit que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ». Il s’agit d’une reconnaissance très indirecte d’un droit à indemnisation chômage, sans exigence particulière en matière de gouvernance du régime d’indemnisation.

Aucune autre disposition constitutionnelle et aucune décision du Conseil constitutionnel ne fixent de contraintes particulières quant aux modalités de gouvernance du régime d’assurance chômage. La prise en main complète de l’État sur le régime, un système tripartite ou le maintien du paritarisme avec un encadrement des négociations par l’État sont des choix relevant de l’appréciation du législateur.

1.3.  Cadre conventionnel

L’article 72 de la convention de l’Organisation internationale du travail n° 102 de 1952 concernant la norme minimum de la sécurité sociale, entrée en vigueur le 27 avril 1955, stipule, concernant la gouvernance des différentes prestations de sécurité sociale (incluant la prestation chômage) que « lorsque l'administration n'est pas assurée par une institution réglementée par les autorités publiques ou par un département gouvernemental responsable devant un parlement, des représentants des personnes protégées doivent participer à l'administration ou y être associées avec pouvoir consultatif dans des conditions prescrites. La législation nationale peut aussi prévoir la participation de représentants des employeurs et des autorités publiques ».

Elle précise également que chaque État « doit assumer une responsabilité générale pour la bonne administration des institutions et services qui concourent à l'application de la présente convention ».

1.4.  Éléments de droit comparé[108]

L’organisation institutionnelle du régime d’assurance chômage en France (conception des règles et gestion financière par les partenaires sociaux) ne se retrouve dans aucun autre pays.

Les partenaires sociaux sont cantonnés en général à un rôle consultatif dans la conception du régime d’assurance chômage, plus ou moins important et formalisé selon les pays et les périodes, à l’exception des États-Unis où ils ne jouent aucun rôle, le paritarisme étant de manière générale peu développé.

En ce qui concerne la gestion des régimes d’assurance chômage, les situations sont plus contrastées : dans les pays comme le Danemark ou la Suède, les partenaires sociaux sont responsables de la gestion des caisses privées d’assurance chômage ; à l’inverse, aux Pays-Bas où le régime d’assurance chômage est aussi privé, les partenaires sociaux ne jouent aucun rôle dans leur gestion. Dans une moindre mesure, les partenaires sociaux en Belgique ont des prérogatives élargies par rapport à ce qui se pratique dans d’autres pays, par leurs sièges au conseil d’administration de l’Office National de l’Emploi, instance bipartite.

Dans certains pays, les partenaires sociaux n’ont qu’un rôle consultatif dans la gestion du régime, en général par leur présence au conseil d’administration tripartite de l’organisme parapublic en charge de la gestion du régime (Allemagne, Autriche, Espagne, Italie).

Enfin, dans des pays où il n’y a pas de réelle concertation sociale institutionnalisée, comme aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Irlande, le régime d’assurance-chômage relève uniquement des compétences de l’État. Le rôle consultatif des partenaires sociaux dans la conception du régime n’est par ailleurs pas spécifique, la concertation sociale y est plus large et s’étend à l’ensemble de la société civile (ou bien elle est inexistante, dans le cas extrême des États-Unis).

L’affiliation au régime d’assurance-chômage est obligatoire pour les salariés du secteur privé dans tous les pays, à l’exception des pays scandinaves (Suède, Danemark). Pour ces pays toutefois, les personnes n’ayant pas adhéré à une caisse d’assurance chômage privée (ou pas suffisamment longtemps) peuvent bénéficier d’une allocation de base forfaitaire. Elle est aussi ouverte sur une base volontaire aux non-salariés dans ces pays, ainsi qu’en Autriche et en Espagne.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Pour renforcer son rôle au sein du régime d’assurance chômage et ainsi veiller à l’équilibre financier du régime et à la cohérence des règles d’indemnisation avec les politiques publiques conduites par le Gouvernement, il apparait nécessaire que l’État puisse intervenir sur les négociations des accords d’assurance chômage. 

Ainsi, l’article L. 5422-20 du code du travail – qui définit le périmètre et la portée des accords relatifs à l’assurance chômage négociés par les organisations représentatives d’employeurs et de salariés – est modifié afin de mieux circonscrire le champ des accords et d’intégrer le cadrage en amont par l’État des négociations.

Un nouvel article L. 5422-20-1 du code du travail est également créé pour préciser les modalités et le contenu du cadrage des négociations par l’État. Un nouvel article L. 5422-20-2 vient quant à lui renforcer le rôle de l’État au cours des négociations, notamment en matière de suivi et d’évaluation. Il renforce les obligations de l’Unédic et de Pôle emploi vis-à-vis de l’État en la matière : ils devront fournir à l’État toutes les informations nécessaires au suivi des négociations.

L’article L. 5422-22 du code du travail, qui prévoit les conditions que l’accord doit respecter pour être agréé, est en outre modifié pour ajouter une nouvelle condition : la compatibilité des accords avec les objectifs et la trajectoire financière fixés par l’État dans son document de cadrage.

Les articles L. 5424-22 et L. 5424-23 du code de travail relatifs aux règles spécifiques en matière de négociation des accords relatifs à l’assurance chômage pour les professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle sont légèrement modifiés pour assurer la coordination entre les évolutions apportées à la négociation nationale et interprofessionnelle et la négociation des partenaires sociaux des professions du spectacle.

En outre, l’article L. 5422-25 du code du travail, concernant le suivi financier du régime d’assurance chômage, est modifié afin de renforcer les capacités d’alerte et d’actions de l’État en cas de dérives financières. Ainsi, si la trajectoire financière du régime d’assurance chômage s’écarte significativement de celle arrêtée par les accords d’assurance chômage ou si la trajectoire financière décidée par le législateur dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques évolue significativement, l’État peut demander aux partenaires sociaux de prendre les mesures correctrices nécessaires et leur transmettre un nouveau document de cadrage. Si aucun accord n’est conclu ou agréé, l’État peut mettre fin à l’agrément de l’accord qu’il avait demandé aux partenaires sociaux de modifier et reprendre la main sur la détermination des règles d’indemnisation chômage, en application de l’article L. 5422-20 du code du travail.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’objectif principal des évolutions apportées à la gouvernance du régime d’assurance chômage, par le présent projet de loi, consiste à introduire un cadrage de l’État afin de faciliter l’adaptation du régime d’assurance chômage aux évolutions du marché du travail.

Ainsi, les nouvelles modalités de financement du régime d’assurance chômage, initiées par la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, dans le cadre du déploiement des mesures en faveur du pouvoir d’achat et de la réduction du coût du travail, et confortées par la présente loi, nécessitent un renforcement du rôle de l’État, ce dernier devenant un financeur majeur du régime.

Le lien très étroit entre l’assurance chômage et le fonctionnement du marché du travail, comme la connaissance des enjeux de l’assurance chômage par les partenaires sociaux qui en sont les gestionnaires historique, rend nécessaire de leur conserver une place centrale et déterminante dans la gouvernance et la gestion du régime d’assurance chômage.

3.         Options et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

3.1.1.      Les options possibles en dehors de l’intervention de la loi

L’article L. 5422-20 du code du travail délègue aux partenaires sociaux la compétence de définir les mesures d’application relatives à l’allocation d’assurance chômage dans le cadre d’accords. Ces derniers sont agréés par l’État. Dès lors, un renforcement du rôle de l’État nécessite impérativement de modifier les dispositions législatives en vigueur – sans quoi les demandes de l’État ne serait pas contraignantes pour les partenaires sociaux, d’autant moins que ces derniers sont historiquement attachés à leur autonomie sur le champ de l’assurance chômage. Aucun dispositif incitatif ou librement consenti par les acteurs n’apparait comme une option envisageable au regard des objectifs poursuivis.

3.1.2.      Les options envisagées dans le cadre de la loi

a)      Première option : un transfert à l’État de la définition des paramètres de l’indemnisation et de la gestion du régime d’assurance chômage sur le modèle d’autres risques de protection sociale

Dans cette hypothèse, les paramètres de l’indemnisation seraient définis par l’État, par voie réglementaire, avec une éventuelle prise en compte des positions paritaires au sein d’une instance ad hoc. S’agissant de la gestion, les partenaires sociaux seraient amenés à jouer un rôle plus résiduel. Une telle option poserait la question du devenir de l’Unédic, au moins en tant qu’association paritaire.

Dans ce cadre, plusieurs sous options seraient envisageables :

Il est proposé d’écarter ces différentes sous options pour plusieurs raisons :

b)     Deuxième option : la mise en place d’une gouvernance tripartite du régime d’assurance chômage

Les paramètres et les règles d’indemnisation seraient déterminés dans le cadre d’une négociation entre l’État, les représentants des salariés et des employeurs, à partir d’une trajectoire – financière et/ou paramétrique – fixée par le Parlement. En cas d’échec des négociations, l’État devrait reprendre la main pour définir unilatéralement les règles qu’il souhaite voir appliquer. Cela constituerait pour l’État l’équivalent d’un droit de veto dans le cadre des négociations.

L’Unédic serait maintenue moyennant une présence de l’État aux instances de gouvernance. Le conseil d’administration deviendrait de fait tripartite à la fois par la tutelle technique et financière. L’État aurait voix délibérative.

Il convient de souligner en premier lieu qu’un tel système tripartite n’a pas d’équivalent pour la gestion des différentes branches existantes de la sécurité sociale, dont les paramètres de contributions et des prestations sont fixées par l’État (loi de financement de la sécurité sociale ou niveau réglementaire). Un tel système inédit de négociation tripartite paraît emporter un risque de désengagement des partenaires sociaux dans les négociations, le dernier mot en cas de désaccord revenant de manière systématique à l’État. Ainsi, les différents acteurs de la négociation ne seraient pas dans un rapport d’égalité ;

3.2.  Option retenue : le renforcement du rôle d’encadrement de l’État et le maintien d’une compétence centrale des partenaires sociaux

L’État (Premier Ministre) fixe aux négociateurs une trajectoire financière à respecter qui est objectivée par des éléments sur la situation du régime, notamment dans le cadre du rapport annuel sur la situation financière de l’assurance chômage prévu par la loi. L’État fixe également un délai pour aboutir à un accord.

Le document de cadrage peut également fixer des objectifs à atteindre en termes de règles d’indemnisation du chômage, par exemple en matière de réduction de la permittence, d’incitation à la reprise d’une activité, de sécurisation des trajectoires professionnelles.

Si ce cadrage initial est respecté, l’État agrée la convention dans les mêmes conditions qu’aujourd’hui, l’agrément constituant un impératif juridique pour donner force exécutoire aux dispositions de l’accord paritaire.

En complément, un mécanisme spécifique est prévu pour assurer, si l’État le demande, la correction d’éventuels écarts entre la trajectoire financière du régime et celle arrêtée par les partenaires sociaux dans leur accord, ou encore dans l’hypothèse où la trajectoire financière décidée par le législateur dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques évolue significativement. Ce mécanisme spécifique implique alors pour le Premier Ministre de transmettre aux partenaires sociaux un nouveau document de cadrage.

Un meilleur suivi des négociations par l’État est également prévu – notamment par la création d’une obligation d’information pour l’Unédic et Pôle emploi.

Pour assurer la rapidité et la cohérence de la mise en œuvre des dispositions nouvelles introduites par le présent projet de loi (ouverture aux démissionnaires et aux travailleurs indépendants), les mesures d’application seront prises – sur une période, limitée, déterminée par la durée de la convention en cours – par décret en Conseil d’État. En complément, le projet de loi ouvre la faculté de prendre des mesures par décret en Conseil d’État pour instaurer un bonus-malus sur les contributions chômage patronales afin de lutter contre la précarité et la permittence.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit la transmission à l’État par les partenaires sociaux, au plus tard le 1er janvier 2019, d’un bilan relatif :

Au regard des éléments qui seront transmis par les partenaires sociaux, la loi prévoit, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 30 septembre 2020, la possibilité pour l’État de modifier les mesures d’application relatives à la modulation des contributions patronales (instauration d’un bonus-malus) et à l’activité réduite par décret en Conseil d’État, après concertation avec les partenaires sociaux. Ces dispositions réglementaires se substituent, durant cette période, aux stipulations concernées de la convention d’assurance chômage en vigueur.

Les partenaires sociaux conserveront leurs prérogatives sur les autres mesures d’application relatives à l’allocation chômage. En outre, ils retrouveront l’ensemble de leurs prérogatives à l’issue de cette période (2019-2020). En effet, à compter du 30 septembre 2020, les mesures d’application fixées par décret en Conseil d’État, sur le fondement de l’article 33 du projet de loi, cessent cesseront de produire leurs effets et seront déterminées par les accords relatifs à l’assurance-chômage. Cela n’aura aucun impact sur les droits acquis par les demandeurs d’emploi dont les fins de contrat de travail seront intervenues avant cette date.

Cette option permet ainsi d’améliorer fortement l’efficacité des négociations. Elle concilie également deux objectifs principaux de la réforme : renforcer le rôle de l’État dans le pilotage du régime d’assurance chômage et préserver un rôle central aux partenaires sociaux dans la détermination des règles du régime.

Pour ces différentes raisons, cette option a été privilégiée.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagees

4.1.  Impacts juridiques

Un élément nouveau est intégré à l’environnement législatif que les partenaires sociaux doivent respecter : un document de cadrage des négociations des accords d’assurance chômage par l’État. Dès lors, sur le plan juridique, la réforme encadre davantage l’exercice de la compétence des partenaires sociaux et met à disposition de l’État un outil supplémentaire pour participer à la détermination des règles de l’assurance chômage.

À compter du 1er janvier 2019, toute négociation des partenaires sociaux relative aux accords d’assurance chômage – pour instituer une nouvelle convention ou modifier par avenant la convention existante – sera préalablement encadrée par l’État.

Par ailleurs, une période transitoire est prévue durant laquelle certaines mesures d’application des dispositions modifiées par le présent projet de loi seront déterminées par décret en Conseil d’État, notamment pour mettre en œuvre les mesures décidées par les partenaires sociaux dans leur accord national interprofessionnel du mois de février dernier.

Cette mesure transitoire ne présente pas de difficultés juridiques, le législateur ayant compétence pour modifier le mode de détermination des règles d’assurance chômage prévu au L. 5422-20 du code du travail. Du point de vue du droit des contrats, il est admis qu’une loi nouvelle peut venir modifier les dispositions d’une convention de droit privé dès lors que leurs dispositions comportent un caractère d’ordre public, ce qui est le cas pour l’assurance chômage.

4.2.  Impacts sur les services administratifs

Les coûts administratifs liés à l’élaboration du document de cadrage et à l’information qui en découlent apparaissent négligeables, de l’ordre de quelques milliers d’euros. 

De surcroît, ces légers coûts administratifs seront compensés par les impacts qualitatifs des différentes mesures proposées dans ces articles. En effet, celles-ci auront des impacts importants sur le pilotage du régime, dont elles amélioreront l’efficacité et la rapidité en assurant une meilleure coordination dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques relatives à l’indemnisation du chômage. La nouvelle gouvernance permet de faciliter le  portage national, transversal et stratégique de cette politique.

Les mesures proposées n’ont pas d’incidences en matière de dépenses d’investissement et de coûts d’équipement.

4.3.  Impacts sociaux

4.3.1.      Impact sur les personnes en situation de handicap

Le document de cadrage des négociations pourra, autant que nécessaire, fixer des objectifs en la matière.

4.3.2.      Impact sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Le document de cadrage des négociations pourra, autant que nécessaire, fixer des objectifs en la matière.

4.3.3.      Impact sur la jeunesse

Le document de cadrage des négociations pourra, autant que nécessaire, fixer des objectifs en la matière, le cas échéant.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions relatives à la gouvernance du régime d’assurance chômage entrent en vigueur au 1er janvier 2019. Toute nouvelle négociation d’une convention d’assurance chômage ou d’un avenant à la convention actuellement en vigueur fera l’objet d’un document de cadrage de l’État qui sera opposable aux partenaires sociaux.

La détermination par l’État des mesures d’application de certaines dispositions de la présente loi entre en vigueur à compter du 1er janvier 2019 et s’applique jusqu’au 30 septembre 2020.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte bénéficie d’un régime d’assurance chômage spécifique. En l’absence de dispositions contraires, les dispositions de droit commun s’appliquent.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret d’application devra être publié pour préciser les modalités de mise en œuvre du cadrage des négociations des accords d’assurance chômage par l’État.


Chapitre 3 – Un accompagnement plus personnalisé des demandeurs d’emploi et une meilleure effectivité des obligations liées à la recherche d’emploi

Article 34 - Expérimentation territoriale visant à l’amélioration de l’accompagnement des demandeurs d’emploi

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

L’article L. 5411-1 du code du travail prévoit les deux conditions à remplir pour être qualifié de demandeur d’emploi : rechercher un emploi et demander son inscription sur la liste des demandeurs d’emploi auprès de Pôle emploi. En application de l’article L. 5411-2 du code du travail, les demandeurs d’emploi renouvellent mensuellement leur inscription et confirment à cette occasion être toujours à la recherche d’un emploi. A défaut, ils cessent d’être inscrits sur la liste des demandeurs d’emploi.

La qualité de demandeur d’emploi confère au demandeur d’emploi des droits (droit au suivi et à un accompagnement, droit à l’accès aux prestations de Pôle emploi, aux formations et aux aides, droit à l’accès aux offres d’emploi, à une indemnisation lorsqu’ils en remplissent les conditions) et des obligations (définir et actualiser son Projet personnalisé d’accès à l’emploi, accomplir des actes positifs et répétés de recherche d’emploi, accepter les offres raisonnables d'emploi, se rendre à une convocation, accepter les actions de formation). Ces obligations sont susceptibles de donner lieu à une sanction en cas de manquement. Ces engagements réciproques entre Pôle emploi et le demandeur d’emploi sont contractualisés dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi.

Le cadre législatif actuel de l’accompagnement des demandeurs d’emploi en vue du retour à l’emploi est issu des lois n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme du service public de l’emploi et n° 2008-758 du 1er août 2008 relative aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi. Il doit être adapté pour améliorer le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’emploi et ainsi augmenter les perspectives de retour à l’emploi.

Dans cette perspective, la mise en place d’une obligation de déclaration des démarches de recherche d’emploi sous la forme d’un journal de bord viendrait compléter les modalités d’accompagnement et de suivi existantes des demandeurs d’emploi. Ce journal de bord serait renseigné chaque mois lors de l’actualisation de l’inscription du demandeur d’emploi. Il permettrait ainsi à Pôle emploi d’accroître la personnalisation de l’accompagnement du demandeur d’emploi et de détecter et prévenir le risque de décrochage dans la recherche d’emploi, en adaptant l’accompagnement du demandeur d’emploi de façon plus réactive et plus personnalisée, en réponse à ses besoins.

1.2.  Cadre constitutionnel

Cet article permet au Parlement d'autoriser, dans la perspective de son éventuelle généralisation, une expérimentation dérogeant, pour un objet et une durée limités, au principe d'égalité devant la loi. 

L’objet de l’expérimentation prévue dans le projet de loi porte sur la mise en place d’un journal de bord que les demandeurs d’emploi devraient renseigner chaque mois lors de leur actualisation, entraînant, à défaut, une cessation d’inscription de la liste. Il est précisé que la cessation d’inscription n’est pas une sanction administrative, le demandeur d’emploi pouvant se réinscrire dès le jour suivant.

La mise en place du journal de bord du demandeur d’emploi constitue une nouvelle formalisation des informations à communiquer à Pôle emploi dans le cadre de sa recherche d’emploi.

La traduction opérationnelle pour Pôle emploi consiste à :

L’ensemble de ces éléments nouveaux pour les demandeurs d’emploi et pour Pôle emploi conduisent ainsi à privilégier, avant une éventuelle généralisation, l’expérimentation législative. Cette dernière permettrait de sécuriser l’ensemble de ce processus appliqué dans quelques directions régionales et d’estimer les impacts statistiques sur le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi au regard du risque de cessation d’inscription en cas de non renseignement du journal de bord. L’expérimentation permettra également de tester et d’affiner les évolutions en termes d’approche métier (captation, traitement et restitution de l’information nouvelle, transformation de cette information en processus d’accompagnement au bénéfice du demandeur d’emploi) ainsi que les dispositifs mis en œuvre pour accompagner les demandeurs d’emploi les moins à l’aise avec les outils numériques. 

L’expérimentation permettra en tant que de besoin de pouvoir ajuster le dispositif pour qu’il soit, le cas échéant, utilement généralisé. 

L’évaluation de l’expérimentation permettra de s’assurer de la bonne appropriation du dispositif par les demandeurs d’emploi, de prévenir toute augmentation de la volatilité des cessations d’inscriptions pour défaut d’actualisation et d’identifier tous les éventuels freins de mise en œuvre, les voies d’amélioration et de progrès, notamment en matière de traitement du flux d’informations reçu par Pôle emploi.

Au vu des enjeux sur la gestion de la liste et de mise en œuvre opérationnelle, l’option de tester ce dispositif à travers une expérimentation législative au sens  de l’article 37-1 de la Constitution paraît ainsi opportune.

L’expérimentation porterait sur des régions définies par arrêté, pour une durée de 12 mois à compter du 1er juin 2019.

Cette expérimentation conduit, dans les territoires concernés, à modifier le traitement automatisé de données à caractère personnel pour tenir compte de l’enregistrement des données issues des démarches de recherche d’emploi qui seront intégrées de façon systématique par voie dématérialisée, téléphonique ou papier dans le système d’information de Pôle emploi.

Cette expérimentation n’est pas soumise à un avis ou une autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). En effet, par un avis de l’assemblée générale du Conseil d’État du 15 décembre 2016, le Conseil d’État a considéré que, s’agissant de la portée de l’article 11 4 a) de la loi 78-17 modifiée, que si « le projet de loi ou de décret prévoit ou implique la création d’un traitement de données personnelles, en renvoyant explicitement ou implicitement (en n’instituant aucune règle dérogatoire à la loi 78-17 ou à ses décrets d’application) aux formalités prévues par cette loi pour la création du traitement, il n’est pas nécessaire de consulter la CNIL à ce premier stade ». En l’espèce, dès lors que l’expérimentation aura pour effet de modifier le décret  n° 2016-729 du 1er juin 2016 relatif au système d’information concernant les demandeurs d’emploi et salariés mis en œuvre par Pôle emploi, c’est lors de cette dernière modification que la CNIL devra être consultée. La consultation de la CNIL n’est donc pas nécessaire au stade du projet de loi.

1.3.  Éléments de droit comparé

Les éléments de droit comparé existants permettent de montrer que ce dispositif existe sous des formes variées dans d’autres pays européens.

Ainsi, aux Pays-Bas, les services en ligne sont au cœur du service public de l’emploi néerlandais (UWV). En 2016, près de 80 % des demandeurs d’emploi étaient suivis uniquement de façon dématérialisée au cours des trois premiers mois d’inscription. Après ces trois premiers mois, s’ils sont toujours inscrits, ils sont convoqués pour un entretien.

Cette évolution stratégique a conduit à intégrer de nombreux outils digitaux, notamment la mise en place d’un « Personal Work Folder » ou plan d’action digital et personnalisé qui se concentre sur la recherche d’emploi mais tient aussi lieu de rapport d’activité. Toutes ces informations et activités sont visibles par le conseiller à l’aide d’un tableau de bord.

Au Danemark, le Joblog est la combinaison d’un journal et d’un calendrier d’actions à entreprendre. Il se concrétise à travers un espace sur lequel le demandeur d’emploi doit enregistrer toutes ses activités de recherche d'emploi, passées et à venir.

Le Joblog intègre le plan d’action individuel, le curriculum vitae, les bilans de recherche d’emploi, les demandes d’entretiens et permet l’accès à toutes les informations nécessaires à la recherche d’emploi. Il offre au conseiller la possibilité de préparer au mieux ses entretiens et constitue un renfort pour le diagnostic, le conseil et la prévention d’éventuels obstacles que peut rencontrer le demandeur d’emploi. Il permet également d’effectuer une action de monitoring sur les activités de recherche d’emploi et ainsi de pouvoir intervenir au plus vite.

Enfin, un rapport d’activité a été mis en place en Suède en 2013. Son objectif est de permettre au conseiller d’avoir un meilleur état de suivi des actions entreprises par le demandeur d’emploi et ainsi déclencher les actions nécessaires afin d’améliorer ses chances d’un retour à l’emploi.

Le rapport d’activité doit être rempli par chaque demandeur d’emploi entre le 1er et le 14 de chaque mois. Depuis 2015, le rapport d’activité est également disponible sous la forme d’une application mobile.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

L’instauration de ce dispositif à titre expérimental permettra de demander au demandeur d’emploi de produire mensuellement des éléments informant son conseiller de ses démarches de recherche d’emploi et attestant de sa recherche d’emploi, sous la forme d’un journal de bord. Le renseignement du journal de bord sera obligatoire. A défaut d’être renseigné, le demandeur d’emploi cessera d’être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi. Une disposition législative est par conséquent nécessaire pour prévoir l’expérimentation du journal de bord.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le projet de mise en place d’un journal de bord du demandeur d’emploi a pour objet d’améliorer l’accompagnement personnalisé des demandeurs d’emploi, de détecter les demandeurs d’emploi en situation de fragilité dans leur processus de recherche d’emploi, d’assurer un suivi en continu de l’intensité de la recherche d’emploi et d’enclencher, le cas échéant, une dynamique de remobilisation. Ainsi, cet outil permettra au conseiller référent d’adapter, avec une meilleure réactivité, l’accompagnement aux besoins du demandeur d’emploi, en particulier en cas de décrochage.

Cette démarche renouvellerait le mode de relations entre demandeurs d’emploi et conseillers :

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

L’instauration du journal de bord va se traduire par l’obligation, pour le demandeur d’emploi, de renseigner mensuellement ses démarches de recherche d’emploi.

Trois possibilités ont été envisagées :

3.2.  Option retenue

Afin d’être le plus efficace possible en termes d’accompagnement et de prévention du décrochage de certains demandeurs d’emploi, l’instauration d’un journal de bord suppose qu’il soit obligatoirement et régulièrement renseigné ce qui plaide pour l’option d’une extension de l’actualisation mensuelle actuellement demandée aux demandeurs d’emploi en vertu de l’article L. 5411-2 du code du travail.

Par conséquent, il est proposé de retenir la première option qui permet la mise en œuvre opérationnelle du journal de bord. Elle se traduira dans un premier temps par une expérimentation législative dans certains territoires sur une période de dix-huit mois. A l’issue de cette expérimentation, un bilan sera effectué afin de prévoir ou non la généralisation, par la voie législative, du journal de bord à l’ensemble du territoire, le cas échéant avec des adaptations.

La deuxième option ne permet pas de suivre l’intensité de recherche du demandeur d’emploi car l’actualisation du projet personnalisé d’accès à l’emploi n’est pas réalisée à un rythme régulier, contrairement à l’actualisation de l’inscription qui s’effectue de façon périodique, à une fréquence mensuelle. Enfin, la troisième option, par son caractère non contraignant, apparaît peu incitative et rendrait potentiellement la tenue du journal du bord inopérante en pratique.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

L’expérimentation législative sera prévue dans le présent projet de loi ordinaire et ne sera pas codifiée. En cas de généralisation du journal de bord, après évaluation de l'expérimentation, les articles L. 5411-2 et L. 5411-10 du code du travail devront être modifiés.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

L’accent mis sur l’accompagnement plus réactif et personnalisé doit à la fois inciter et accompagner les demandeurs d’emploi vers un retour plus rapide à l’emploi.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

L’impact sur les entreprises est considéré comme négligeable. La mesure devrait toutefois permettre d’accélérer le retour à l’emploi de certains demandeurs et donc d’accroître les possibilités de recrutement par les entreprises.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

La mise en place du journal du bord est susceptible d’avoir des conséquences sur certaines communes dans le cadre de leur mission au titre de l’article L. 5322-1 du code du travail : en effet, dans les localités où il n’existe pas d’agence Pôle emploi ou d’un autre organisme ayant conclu une convention avec Pôle emploi, les maires seront chargés de recevoir les déclarations des demandeurs d’emploi et de les transmettre à Pôle emploi ou aux organismes conventionnés avec Pôle emploi. Concrètement, cela pourrait se traduire par une augmentation de la charge administrative et de l’organisation des services de ces communes pendant les périodes d’actualisation de l’inscription, soit entre le 28 d’un mois donné et le 15 du mois suivant.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Le renseignement mensuel du journal de bord va s’accompagner, durant la phase de mise en place et pour les demandeurs d’emploi les moins autonomes (notamment en matière d’utilisation des outils numériques), d’un accompagnement au sein des agences de Pôle emploi à l’instar de ce qui existe pour l’inscription comme demandeur d’emploi. Le fait de renseigner tous les mois ses actions de recherche d’emploi peut s’avérer difficile dans un premier temps pour les demandeurs d’emploi, d’où la nécessité de les accompagner notamment en agence. Il faut toutefois noter que, au moment de l’actualisation mensuelle de l’inscription, le journal de bord sera pré-rempli des actions déjà connues de Pôle emploi (à la suite d’une candidature en ligne par exemple) ; il pourra alors être simplement validé si les informations sont complètes, ou complété (par exemple pour indiquer l’envoi d’une candidature spontanée).

Par ailleurs, le journal de bord nécessitera en amont des développements du système d’information importants, en particulier sur le traitement des données qui apparaîtront dans le journal de bord. Ce traitement permettra ensuite un accompagnement plus personnalisé du demandeur d’emploi. Enfin, les missions des conseillers Pôle emploi des territoires concernés par l’expérimentation devront s’adapter à cette évolution afin que les informations renseignées par les demandeurs d’emploi permettent une amélioration effective de l’accompagnement en vue d’un retour à l’emploi plus rapide. Le renseignement du journal de bord par le demandeur d’emploi, en amont de son entretien avec son conseiller référent, constituera un gain de temps et permettra de centrer l’entretien davantage sur les actes métiers à plus forte valeur ajoutée pour l’aide à la recherche d’emploi.

4.5.  Impacts sur les particuliers

Cette mesure fait évoluer les modalités d’actualisation mensuelle des demandeurs d’emploi. Le renseignement mensuel du journal de bord aura un impact certain sur les demandeurs d’emploi qui devront s’adapter à l’outil. Une phase d’information sera effectuée en amont afin d’expliquer les évolutions à venir. En outre, il est prévu que le journal de bord puisse être renseigné en flux, via l’espace personnel du demandeur d’emploi, afin qu’il soit pré-rempli au moment de l’actualisation. Cette adaptation sera réalisée avec l’appui des conseillers Pôle emploi notamment pour ceux qui rencontrent des difficultés.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

La mesure donne lieu à consultation du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles au titre de l’article L. 6123-1 du code du travail et du Conseil national d’évaluation des normes, au titre de l’article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Cette expérimentation entrera en vigueur à compter du 1er juin 2019 et concernera les actualisations relatives au mois de juillet 2019. L’arrêté du 22 décembre 2015 portant application de l'article L. 5411-2 du code du travail relatif au renouvellement de la demande d'emploi précise que l’actualisation relative à un mois donné est ouverte du 28 du même mois au 15 du mois suivant à minuit. L’expérimentation sera applicable pendant une durée de dix-huit mois.

5.2.2.      Application dans l’espace

L’expérimentation sera applicable aux demandeurs d’emploi domiciliés dans les régions désignées par arrêté.

5.2.3.      Textes d’application

Les modalités de l’expérimentation, en particulier les conditions de la cessation d’inscription des demandeurs d’emploi n’ayant pas renseigné le journal de bord lors de l’évaluation, et de son évaluation seront définies par décret en Conseil d’État.


Article 35  -  Dispositions relatives aux obligations de recherche d’emploi

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

L’ordonnance n° 86-1286 du 20 décembre 1986 modifiant les titres I et III du livre III de la première partie (législative) du code du travail et relative au placement des demandeurs d'emploi prévoit la possibilité d’exclure « les personnes qui, sans motif légitime, refusent d’accepter un emploi offert » de la liste des demandeurs d’emploi.

Au niveau législatif, la loi n° 93-1313 quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle a introduit la notion d’ « emploi compatible » : sont radiées de la liste « les personnes qui, sans motif légitime, refusent d'accepter un emploi, quelle que soit la durée du contrat de travail offert, compatible avec leur spécialité ou leur formation antérieure, leurs possibilités de mobilité géographique compte tenu de leur situation personnelle et familiale, et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région ».

Puis, en 2005, la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a supprimé la notion de formation « antérieure » et ajouté la référence aux « aides à la mobilité qui leur sont proposées ».

Le dispositif de l’offre raisonnable d’emploi, tel qu’il existe aujourd’hui, découle de la loi n° 2008-758 du 1er août 2008 relative aux droits et devoirs des demandeurs d’emploi. Cette dernière évolution vers l’ « offre raisonnable d’emploi » partait du constat que la définition de l’offre raisonnable d’emploi qui avait cours jusqu’alors pouvait être floue : les critères n’étaient ni définis objectivement, ni adaptables à la situation de la personne. Cela laissait la place à des interprétations variables par les acteurs concernés, ce qui pouvait parfois conduire à l’inéquité et à l’inefficacité. Ce texte avait dès lors pour objectif d’introduire des critères de détermination de l’offre d’emploi raisonnable qui évoluent dans le temps (principe d’élargissement du champ de la recherche au-delà d’une certaine durée de chômage). L’existence de critères objectifs devait garantir l’égalité de traitement des demandeurs d’emploi. Cette réforme reposait enfin sur une logique d’engagements réciproques : le service public de l’emploi s’engage à mettre en œuvre toutes les actions jugées nécessaires pour faciliter le retour à l’emploi et propose au demandeur d’emploi des offres d’emplois considérées comme raisonnables. En contrepartie, ce dernier s’engage à accepter ces offres et pourra être sanctionné en cas de refus répété.

L’offre raisonnable d’emploi est ainsi définie aux articles L. 5411-6-2 et L. 5411-6-3 du code du travail et s’articule complètement avec le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) élaboré conjointement entre Pôle emploi et le demandeur d’emploi. Le PPAE retrace le champ de la recherche du demandeur d’emploi. Il précise ainsi la nature et les caractéristiques de l'emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu. Ces trois critères précis sont constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi.

Par nature et caractéristiques de l’emploi, il faut entendre : le métier, le type de mission confiée, le niveau de responsabilité, le type de contrat de travail (CDI, CDD, contrat de mission…), la durée du contrat, le temps de travail (temps complet, temps partiel). La nature et les caractéristiques du ou des emplois recherchés inscrits dans les PPAE peuvent être modifiés lors de chaque actualisation du projet. Concernant la zone de recherche d’emploi privilégiée par le demandeur d’emploi, elle est librement déterminée par le demandeur d’emploi au cours des six premiers mois d’inscription. Après six mois d’inscription, la zone de recherche doit répondre aux critères fixés à l’article L. 5411-6-3 du code du travail. Enfin, sur le niveau de salaire attendu, il s’agit du niveau de salaire recherché par le demandeur d’emploi. Il permet de déterminer l’offre raisonnable d’emploi des demandeurs d’emploi au moins pendant les trois premiers mois d’inscription. Après trois mois d’inscription, le niveau de salaire attendu doit répondre aux critères fixés à l’article L. 5411-6-3 du code du travail.

Cette définition de l’offre raisonnable d’emploi conduit cependant à une appréciation ainsi qu’à une mise en œuvre difficiles.

1.2.  Cadre constitutionnel

L’offre raisonnable d’emploi peut s’inscrire dans le cadre de la Constitution du 4 octobre 1958 et de son préambule du 27 octobre 1946 où il est mentionné à l’article 5 : « chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances ».

1.3.  Cadre conventionnel

La notion d’emploi convenable est définie dans différentes conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Dans la convention de l’Organisation internationale du travail n° 44 du chômage de 1934 (ratifiée par la France en 1949), l’article 10 prévoit que le demandeur d’emploi « peut être disqualifié du droit aux indemnités ou aux allocations pendant une période appropriée s'il refuse d'accepter un emploi convenable » et fixe les critères des emplois qui ne « doivent pas être considérés comme convenables » : conditions de logement approprié, de salaire, d’une situation d’arrêt de travail lié à un conflit professionnel, tenant compte de motif « raisonnable » de refus lié à toutes circonstances y compris la situation personnelle du demandeur d’emploi. Il peut également être disqualifié « si, délibérément ou par négligence, il n’a pas profité d’une occasion raisonnable d’emploi ».

Dans la convention de l’Organisation internationale du travail n° 88 sur le service de l'emploi de 1948 (ratifiée par la France en 1952) et en application de l’article 6, le service de l'emploi doit notamment « aider les travailleurs à trouver un emploi convenable et les employeurs à recruter des travailleurs qui conviennent aux besoins des entreprises » et « prendre des mesures appropriées pour faciliter la mobilité géographique en vue d'aider au déplacement de travailleurs vers les régions offrant des possibilités d'emploi convenables ».

Dans la convention de l’Organisation internationale du travail n° 122 sur la politique de l’emploi de 1964 (ratifiée par la France en 1971), l’article 1 dispose notamment « qu'il y aura libre choix de l'emploi et que chaque travailleur aura toutes possibilités d'acquérir les qualifications nécessaires pour occuper un emploi qui lui convienne et d'utiliser, dans cet emploi, ses qualifications ainsi que ses dons, quels que soient sa race, sa couleur, son sexe, sa religion, son opinion politique, son ascendance nationale ou son origine sociale ».

Dans la convention de l’Organisation internationale du travail n° 168 sur la promotion de l’emploi et la protection contre le chômage de 1988 (non ratifiée par la France), les articles 10, 20 et 21 définissent le chômage complet comme « comme la perte de gain due à l'impossibilité d'obtenir un emploi convenable » et prévoient que les indemnités chômage peuvent être « refusées, supprimées, suspendues ou réduites » notamment lorsque l'intéressé « refuse d'accepter un emploi convenable ». « Dans l'appréciation du caractère convenable ou non d'un emploi, il doit être tenu compte notamment, dans des conditions prescrites et dans la mesure appropriée, de l'âge du chômeur, de son ancienneté dans sa profession antérieure, de l'expérience acquise, de la durée du chômage, de l'état du marché du travail, des répercussions de cet emploi sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé et du fait que l'emploi est disponible en raison directe d'un arrêt du travail dû à un conflit professionnel en cours ». Cette convention n’étant pas ratifiée par la France, elle ne s’impose pas au législateur mais peut en revanche inspirer les critères retenus au niveau national.

Il ressort de ces dispositions qu’en vertu de la convention de l’Organisation internationale du travail de 1948, le service public de l’emploi est tenu d’aider les travailleurs à trouver un emploi convenable ; la notion d’emploi convenable s’apprécie au regard des critères de la convention de l’Organisation internationale du travail de 1934. Par ailleurs, le principe de sanctionner les demandeurs d’emploi qui refusent d’accepter un emploi convenable n’est pas obligatoire et relève d’une décision en opportunité des États ; en revanche, si ce principe s’applique dans le droit interne, alors les États sont tenus par les critères permettant d’appréciation le caractère convenable d’un emploi, définis par la convention OIT de l’Organisation internationale du travail de 1934.

1.4.  Éléments de droit comparé

En Allemagne, deux définitions de l’emploi convenable sont prévues par les textes, l’une s’applique dans le cadre du dispositif d’assurance chômage, l’autre dans le cadre du dispositif d’assistance.

Pour les bénéficiaires de l’allocation d’assurance, parmi les emplois considérés comme convenables figure un contrat à durée déterminée, un contrat impliquant temporairement une séparation du ménage, ou n’entrant pas dans la catégorie des emplois pour lesquels l’intéressé a été formé.

En revanche, un emploi n’est pas considéré comme convenable et peut être légitimement être refusé :

Pour les bénéficiaires de l’allocation de solidarité, la notion d’emploi convenable est beaucoup plus large que celle retenue pour les bénéficiaires de l’allocation d’assurance et inclut pratiquement tous les emplois proposés. Ainsi, un emploi est convenable dès lors que :

Au Danemark, la notion législative de l’emploi convenable a été abandonnée en 2003. Néanmoins, certains critères sont prévus par voie d’instructions pour aider les agents du service public de l’emploi à déterminer quelles offres d’emploi proposer aux demandeurs d’emploi. Ces instructions demandent aux agents de tenir compte de la nature de l’emploi (le demandeur d’emploi doit accepter tout emploi qu’il est en mesure d’occuper ou tout emploi qu’il serait en mesure d’occuper après une formation de courte durée, si la formation requise lui est proposée) et du temps de trajet (qui doit être inférieur ou égal à 3 heures par jour en transports publics avant trois mois de chômage).

Le demandeur d’emploi ne peut être contraint d’accepter un emploi dont la rémunération serait inférieure au montant de ses allocations chômage.

Aux Pays-Bas, un emploi est considéré comme convenable lorsqu’il est compatible avec les capacités physiques et les compétences du demandeur d’emploi. Les critères de définition de l’emploi convenable s’assouplissent au fur et à mesure de l’augmentation de la durée du chômage : après 52 semaines d’indemnisation chômage, le demandeur d’emploi ne peut plus refuser aucun emploi.

L’emploi convenable est défini à partir de 3 critères : la nature de l’emploi (définie en fonction de l’emploi précédemment occupé, de la formation et de l’expérience professionnelle avec une appréciation qui varie selon l’ancienneté dans le chômage) et le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail (inférieur à 2 heures par jour pendant les 6 premiers mois de chômage et 3 heures par jour entre le 6ème et le 12ème mois de chômage). Sur le niveau de rémunération, un système d’allocation a été mis en place pour compenser la perte de revenu liée à la prise d’un emploi dont la rémunération serait inférieure aux allocations perçues par le demandeur d’emploi (le salaire n’est donc pas un critère qui permet de restreindre la recherche d’emploi).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

L’offre raisonnable d’emploi (ORE) est définie dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE), créé en 2008 dans le cadre de la loi précitée ; le PPAE contractualisant la logique d’engagements réciproques entre le demandeur d’emploi et Pôle emploi. Mais sa définition obéit également, après trois mois, à des critères législatifs mécaniques, qui ne sont pas personnalisés.

La définition de l’ORE rend sa mise en œuvre délicate en raison d’une appréciation difficile à objectiver au regard de l’ensemble des critères définis dans le code du travail à l’article
L. 5411-6-1. Par ailleurs, des contournements du dispositif ont été identifiés tels que le refus d’emplois appropriés mais ne correspondant pas à une appréciation stricte des critères initialement définis dans le PPAE, ou encore une mise en échec volontaire du demandeur d’emploi dans son processus de recrutement.

De fait, le dispositif apparaît inopérant dans les faits avec des sanctions par Pôle emploi pour refus d’offre raisonnable d’emploi quasi inexistantes : 111 décisions de radiation sur les 626 237 radiations prononcées en 2016, soit 0,02 %.

La modification de ce dispositif se traduit par une modification législative du code du travail, dans ses articles L. 5411-6 et suivants.

2.2.  Objectifs poursuivis

La loi du 1er août 2008 précitée a objectivé les critères retenus pour caractériser un refus d’emploi en définissant le principe d’offre raisonnable d’emploi (ORE) adossée au projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE).

Les trois éléments constitutifs de l’ORE (nature et caractéristique de l’emploi, zone géographique privilégie et niveau de salaire attendu) sont définis en fonction de la formation du demandeur d’emploi, de ses qualifications, de ses connaissances, de ses compétences acquises au cours de ses expériences professionnelles, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local.

Ces éléments ont été rendus évolutifs au cours de la période d’inscription du demandeur d’emploi afin d’élargir le champ de la recherche d’emploi et de prendre en compte tout élément nouveau et a minima au 4ème mois, 7ème mois puis 13ème mois d’inscription. Le PPAE et l’offre raisonnable d’emploi sont ainsi ajustés après 3 mois, 6 mois et 12 mois de recherche infructueuse d’emploi.

Ces critères de l’ORE apparaissent toutefois en décalage avec le fonctionnement actuel du marché du travail :

Les délais d’évolution des critères de l’offre raisonnable d’emploi (au quatrième mois, septième mois puis treizième mois d’inscription) courent uniquement pendant la durée du maintien des demandeurs en catégorie administratives 1, 2 et 3 (demandeurs d’emploi immédiatement disponibles, soit les catégories statistiques A et B). En cas d’interruption de l’inscription dans l’une de ces trois catégories, deux situations se présentent : soit les délais sont interrompus et donc réinitialisés lorsque le demandeur d’emploi est considéré comme non immédiatement disponible ou lorsqu’il fait l’objet d’une cessation d’inscription (par exemple pour défaut d’actualisation) ou d’une radiation, soit les délais sont suspendus lorsqu’il entre en formation. De fait, le mécanisme actuel de décompte de ces délais est peu objectivé et atténue très fortement le caractère mécanique de l’évolution des critères de recherche d’emploi.

Par ailleurs, entre le quatrième et le treizième mois d’indemnisation, la rémunération de l’offre raisonnable d’emploi fait référence au salaire brut précédemment perçu (95 % après trois mois puis 85 % entre sept et douze mois). Or, l’allocation nette peut dans certains cas être supérieure au salaire net que procurerait un emploi rémunéré 85 % de l’ancien salaire brut. La référence au salaire brut n’incite donc pas les demandeurs d’emploi à accepter une offre jugée raisonnable ;

Enfin, la réalité du marché du travail n’est pas la même sur l’ensemble du territoire, et appliquer des critères d’ORE uniformes apparaît inéquitable. De même, l’ensemble des demandeurs d’emploi ne sont pas dans la même situation personnelle (mobilité, enfants à charges..). L’uniformité des critères apparait à cet égard également injuste.

Pour l’ensemble de ces raisons, il est envisagé de supprimer les délais d’évolution des critères de l’ORE. Le contenu de l’ORE, tel que prévu à l’article L. 5411-6-2 du code du travail, reste inchangé : l’ORE est constituée par « la nature et les caractéristiques de l’emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu, tels que mentionnés dans le PPAE ». L’ORE continuera d’être révisée à l’occasion de  l’actualisation du PPAE (article L. 5411-6-3 du code du travail) mais l’ensemble des dispositions relatives aux délais et aux critères automatiques et généraux d’évolution de l’ORE sont supprimées car peu opérationnelles. Ceci permettra également d’améliorer la relation de confiance entre le demandeur d’emploi et le conseiller pour faire évoluer, de façon personnalisée, les critères entrant dans le cadre de l’offre raisonnable d’emploi à travers une actualisation du PPAE.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Concernant la modification de l’offre raisonnable d’emploi (ORE), trois principales pistes ont été explorées :

3.2.  Option retenue

La première option a été retenue. Elle correspond à la suppression des paliers d’évolution s’appliquant aux paramètres de l’offre raisonnable d’emploi (ORE).

L’ORE reposera alors davantage sur les échanges éclairés et la relation de confiance entre le demandeur d’emploi et son conseiller référent avec pour principe que les critères retenus conjointement dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) constitueront les critères de l’ORE. Les garanties relatives au niveau de salaire minimum et à la quotité de travail souhaitée sont conservées. La loi prévoit également une garantie sur la base du ainsi que le critère de compatibilité de l’offre raisonnable d’emploi avec les qualifications et les compétences professionnelles du demandeur d’emploi. La garantie liée aux qualifications et aux compétences professionnelles découle du PPAE et vise à encadrer davantage la définition de l’ORE et à protéger les droits de la personne dans le cadre de la relation de confiance entre le demandeur d’emploi et le conseiller référent.

Il convient de souligner qu’en cas de difficulté, la loi continue de prévoir (dispositions inchangées) :

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Cette évolution implique de modifier l’article L. 5411-6-3 du code du travail afin de supprimer la garantie des paliers d’évolution temporelle. Ces paliers étaient en effet fixés dans la loi dans la mesure où ils pouvaient être opposés dans le cadre de la sanction pour refus d’offres raisonnables d’emploi (ORE). L’article L. 5411-6-4 du code du travail relatif aux garanties minimales de l’offre raisonnable d’emploi est également modifié pour renforcer la cohérence de l’ORE avec les qualifications et les compétences professionnelles du demandeur d’emploi.

4.2.   Impacts économiques et financiers

La codétermination, entre le demandeur d’emploi et son conseiller référent, des critères constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi (ORE)  dans le cadre du projet personnalisé d’accès à l’emploi, sur le fondement d’éléments partagés concernant la situation individuelle du demandeur d’emploi et de son évolution au regard de celle du marché du travail, devrait se traduire par une plus grande effectivité de la mesure. Cette évolution devrait ainsi contribuer à accélérer le retour à l’emploi de certains demandeurs d’emploi.

4.3.  Impacts sur les services administratifs

La suppression des conditions d’évolution mécaniques de l’offre raisonnable d’emploi (ORE)  ainsi que le renforcement de la relation de confiance entre le demandeur d’emploi et son conseiller-référent impliquent un rôle plus soutenu des conseillers de Pôle emploi dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Il leur appartiendra en effet de faire évoluer le projet professionnel des demandeurs d’emploi en fonction de la réalité du marché du travail et de leur situation individuelle. Leur capacité à faire « accepter » une modification du projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) intégrant une éventuelle baisse des prétentions salariales ou une distance plus lointaine sera importante dans la dynamique de recherche du demandeur d’emploi. Cela va se traduire par une confiance mutuelle beaucoup plus forte et un accompagnement plus personnalisé. 

4.4.  Impacts sur les particuliers

Les critères retenus dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) des demandeurs d’emploi devraient évoluer en fonction de la relation de confiance établie avec les conseillers de Pôle emploi. La définition même de l’offre raisonnable d’emploi (ORE)  n’évoluant plus de manière mécanique, c’est la relation de confiance entre le demandeur d’emploi et son conseiller qui devraient permettre l’ajustement de l’ORE.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

La mesure donne lieu à consultation du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

En application de l’article R. 5312-6 du code du travail fixant les compétences du conseil d’administration de Pôle emploi, le projet doit être soumis à délibération sur les mesures concernant Pôle emploi.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les évolutions relatives à l’offre raisonnable d’emploi entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2019. Elles seront applicables au fait générateur donnant lieu à un refus d’offre raisonnable d’emploi (ORE)  à compter du 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article est applicable sur l’ensemble du territoire de la République française, y compris dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.

5.2.3.      Textes d’application

Les éventuelles adaptations nécessaires du code du seront définies par décret en Conseil d’État.

 


Article 36 - Dispositions relatives au transfert du contrôle de la recherche d’emploi et aux sanctions

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le contrôle de la recherche d’emploi s’inscrit dans la logique d’engagements réciproques définie par la réforme de 2008 relative à l’organisation du service public de l’emploi d’une part, et aux droits et devoirs des demandeurs d’emploi, d’autre part[109] : en contrepartie des actions mises en œuvre par le service public de l’emploi en vue de leur retour à l’emploi, les demandeurs d’emploi sont soumis à des obligations concernant leur inscription sur la liste des demandeurs d’emploi et leur recherche effective d’emploi. Le contrôle de la recherche d’emploi matérialise également le principe de la conditionnalité des allocations chômage.

Depuis 2008, Pôle emploi est compétent en matière de contrôle de la recherche d’emploi[110] ainsi que de gestion de la liste des demandeurs d’emploi (maintien sur la liste, décisions de cessation d’inscription, sanctions de radiation). En revanche, le préfet de département a conservé la compétence en matière de sanctions financières portant sur le revenu de remplacement ainsi que les pénalités administratives[111], après instruction des DIRECCTE ; Pôle emploi est en charge de la mise en œuvre des décisions des préfets.

Conformément à l’objectif fixé par la convention tripartite État – Unédic - Pôle emploi 2015-2018 d’« améliorer sa capacité de contrôle de la recherche d’emploi, visant à s’assurer que le demandeur d’emploi accomplit des actes positifs de recherche d’emploi, en s’appuyant notamment sur les engagements formalisés avec Pôle emploi, et à éviter les situations de décrochage », Pôle emploi a validé en 2015, après une expérimentation, le principe de séparation en son sein de l’activité de contrôle de celle de l’accompagnement.

Actuellement, 215 conseillers répartis dans 32 équipes sont dédiés au contrôle de la recherche d’emploi au sein de Pôle emploi. Depuis novembre 2015, date du déploiement de ces équipes dédiées au contrôle de la recherche d’emploi sur l’ensemble du territoire français, 269 000 contrôles ont été menés soit en moyenne 12 000 contrôles par mois. Les contrôles confirment l’effectivité de la recherche d’emploi ou permettent une redynamisation du parcours du demandeur d’emploi dans 86 % des cas et génèrent une sanction pour les 14 % restants. Les échanges avec les conseillers intervenus dans le cadre du contrôle permettent notamment d’intensifier les démarches de recherche d’emploi. Près d’un demandeur d’emploi sur cinq retrouve un emploi dans les six mois qui suivent la fin de son contrôle[112].

Au sein des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), les moyens résiduels dévolus au contrôle de la recherche d’emploi s’élèvent uniquement à vingt-sept équivalents temps plein (ETP) répartis sur l’ensemble des départements. Les équipes affectées au contrôle de la recherche d’emploi et à la lutte contre la fraude aux allocations traitent en réalité quasi-exclusivement des sanctions liées aux signalements de fraude transmis par Pôle emploi[113]. Leur mission consiste principalement, après instruction des dossiers transmis par Pôle emploi, à mettre en œuvre la procédure contradictoire préalable à la sanction et à traiter les recours, le cas échéant.

La Cour des comptes a recommandé à plusieurs reprises de confier à Pôle emploi les prérogatives actuellement exercées par les préfets en matière de sanctions et de pénalités administratives en cas de fraude aux allocations chômage et de manquement du demandeur d’emploi à ses obligations en modifiant les articles L. 5426-2 et suivants du code du travail[114]. L’unification du contrôle et de la sanction permettrait de renforcer l’effectivité des sanctions.

Par ailleurs, la liste des motifs de radiation au titre de la recherche d’emploi est définie dans le code du travail à l’article L. 5412-1 du code du travail. Les demandeurs d’emploi qui ne respectent pas un des motifs mentionnés sont radiés de la liste par Pôle emploi. Les motifs de radiation sont actuellement classés en deux groupes de sanctions qui correspondent à deux groupes d’obligations en fonction du barème de sanction défini : radiation de quinze jours pour le premier groupe d’obligation et radiation de deux mois pour le second groupe d’obligation.

1.2.  Cadre constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a admis « qu'aucun principe ou valeur constitutionnelle ne fait obstacle à ce qu'une autorité administrative, agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, puisse exercer un pouvoir de sanction » à la condition, « d'une part, que la sanction susceptible d'être infligée (soit) exclusive de toute privation de liberté et, d'autre part, que l'exercice du pouvoir de sanction (soit) assorti par la loi de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis »[115]. Les sanctions financières portant sur le revenu de remplacement et les pénalités administratives ne sont pas privatives de liberté.

En revanche, les principes constitutionnels applicables aux sanctions pénales s’appliquent également aux sanctions administratives et devront être respectés dans le cadre du transfert du pouvoir de sanction à Pôle emploi : il s’agit, pour les règles de fond, du principe de légalité des délits et des peines, du principe de non rétroactivité des lois répressives plus sévères et d’application immédiate des lois répressives plus douces, du principe de nécessité et de proportionnalité des sanctions, du principe de présomption d’innocence, du principe d’individualisation des peines, du principe de personnalité des peines et du principe d’égalité devant la loi.

Pour les règles de procédure, le principe du respect des droits de la défense doit également être respecté : procédure contradictoire préalable au prononcé de la sanction et motivation de la décision de sanction.

Enfin, s’agissant de l’application du principe non bis in idem, le Conseil constitutionnel juge en premier lieu que « le principe de nécessité des délits et des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l'objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature différente en application de corps de règles distincts »[116]. Le Conseil constitutionnel juge en second lieu que le principe d’un cumul de sanctions pour un même fait n’est pas contraire au principe de proportionnalité des peines, à condition que le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues[117].

La vérification du respect de ces jurisprudences vaut pour le cumul des sanctions de radiation, d’une part, et de suppression ou de réduction du versement du revenu de remplacement, d’autre part. Ces deux sanctions prononcées à l’encontre de la même personne et pour les mêmes faits n’ont pas la même finalité (la radiation concernant l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi et la suppression concernant l’indemnisation), ni la même portée (la radiation emportant suspension du versement de l’indemnisation avec le report des droits et la suppression venant s’imputer sur le droit restant dû). Cependant, compte-tenu de l’effet concret de ces deux sanctions qui aboutissent, dans les faits, au non-versement du revenu de remplacement pendant une certaine durée, il est nécessaire de prévoir une articulation cohérente entre les deux sanctions afin de sécuriser juridiquement le transfert à Pôle emploi.

En matière de cumul des sanctions, la pénalité administrative prévue par l’article L. 5426-5 du code du travail n’est en revanche pas en cause car elle recouvre une qualification juridique différente des deux autres sanctions.

1.3.  Cadre conventionnel

Pour garantir le respect de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l’obligation de prévoir, au sein de l’organe qui prononce une sanction administrative, la séparation entre l’entité en charge des poursuites et celle en charge de la sanction ne s’applique que si la sanction est prononcée par un organe apparenté à une juridiction en raison de sa composition et de ses attributions, comme les autorités administratives indépendantes[118]. Pôle emploi n’est donc pas soumis à cette exigence, dès lors qu’il s’agit d’un établissement public administratif agissant comme opérateur de l’État. Rien n’interdit donc aux agents de Pôle emploi chargés du contrôle de prononcer eux-mêmes une sanction à l’issue du contrôle, par délégation du directeur général de l’organisme. Il s’agit du dispositif de droit commun appliqué au sein des organismes de sécurité sociale.

Par ailleurs, le Conseil d’État a déjà jugé que le régime du recours préalable propre au contentieux de l'exclusion du bénéfice de l'indemnisation du revenu de remplacement n'est pas incompatible avec les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentale relatives au droit au recours[119].

S’agissant du régime de la sanction administrative, la Cour européenne des droits de l'homme a également admis la validité du procédé de la sanction administrative au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en rappelant le nécessaire respect du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de celle-ci[120].

Enfin, le principe non bis in idem est aussi consacré par l’article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Selon la Cour européenne des droits de l’homme, ce principe « a pour objet d’empêcher l’injustice que représenterait pour une personne le fait d’être poursuivie ou punie deux fois pour le même comportement délictueux ». Elle admet cependant un cumul de poursuites et de sanctions lorsqu’il est « le fruit d’un système intégré permettant de réprimer un méfait sous ses différents aspects de manière prévisible et proportionnée et formant un tout cohérent. (…) Cela signifie non seulement que les buts poursuivis et les moyens utilisés pour y parvenir doivent être en substance complémentaires et présenter un lien temporel, mais aussi que les éventuelles conséquences découlant d’une telle organisation du traitement juridique du comportement en question doivent être proportionnées et prévisibles pour le justiciable »[121].

La règle européenne non bis in idem ne trouve à s'appliquer, selon les réserves faites par la France en marge de ce protocole, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale (au sens du droit interne). La Cour européenne des droits de l’homme n’a pas déclaré invalide cette réserve, jusqu’à ce jour, mais a toutefois écarté la réserve émise par l’Italie et rédigée en termes identiques[122].

1.4.  Éléments de droit comparé

L'analyse de Langenbucher[123] relative au degré de sévérité des conditions d'indemnisation des demandeurs d’emploi suggère que le contrôle des efforts de recherche d'emploi est relativement sévère en France (notamment au regard de la fréquence des contrôles) mais les sanctions appliquées en cas de refus d'une offre d'emploi ou de refus de participation à un programme actif du marché du travail sont relativement souples.

En Allemagne, depuis la mise en place des lois Hartz IV, les demandeurs d’emploi voient leur allocation réduite s'ils refusent un emploi même si celui-ci nécessite une qualification inférieure à la leur ou s’il est rémunéré à un niveau de salaire inférieur à celui prévu par les conventions collectives.

Au Royaume-Uni, les demandeurs d’emploi sont tenus de rencontrer un conseiller au moins toutes les deux semaines et doivent justifier d'au moins dix démarches de recherche d'emploi par mois. Ils perdent leur allocation s'ils refusent un emploi ou s’ils ne soumettent pas de candidature à une offre qui leur est proposée.

Au Danemark, les demandeurs d’emploi indemnisés sont tenus d'accepter tout travail dont ils sont capables, indépendamment de leur profession antérieure ; au bout de deux refus successifs d'une offre d'emploi ou d'un programme actif, les allocations sont supprimées[124].

En Allemagne, l’obligation de recherche d’emploi pour le demandeur d’emploi est contrôlée par le conseiller du demandeur d’emploi. Il existe deux types d’abattement, en fonction du régime d’indemnisation du demandeur d’emploi : un abattement en durée pour les bénéficiaires de l’assurance chômage, c’est-à-dire des périodes d’interruption des droits (« Sperrzeit ») d’une semaine à douze semaines en fonction des manquements commis, et un  abattement en pourcentage du montant de leur allocation pour les bénéficiaires de l’assistance chômage dite Hartz-IV (équivalente du revenu de solidarité active).

Chaque demandeur d’emploi bénéficiaire de l’assistance chômage Hartz IV est suivi par un conseiller d’un Jobcenter auquel il doit rendre des comptes au travers d’un « accord » en vertu duquel il doit justifier de ses démarches de recherche d’emploi. Une sanction lourde est appliquée en cas de manquement à l’accord conclu avec le conseiller (de 30 % du montant de l’allocation à une suppression totale pendant trois mois) et une sanction légère en cas d’absence à un rendez-vous.  Toutefois, en cas de sanction d’un membre de la famille percevant Hartz IV, des compensations sont prévues sous forme de bons d’alimentation ou de prestations complémentaires pour les enfants par exemple. Les sanctions sont plus strictes pour les jeunes de moins de 25 ans entraînant cependant un effet d’éviction du marché du travail renforcé.

En 2016, près d’un million de sanctions (939 133 précisément) ont été émises à l’encontre de demandeurs d’emploi bénéficiaires de l’allocation d’assistance Hartz IV, la grande majorité pour non-présentation à un rendez-vous.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Lorsque la définition des obligations auxquelles est soumis l'exercice d'une activité relève du législateur en application de l'article 34 de la Constitution, il appartient à la loi de fixer la règle. La loi fixant les conditions de recherche d’emploi à respecter pour pouvoir être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi, seule la loi peut prévoir le pouvoir de sanction correspondant, et donc l’autorité compétente, soit Pôle emploi dans le cadre du transfert.

Afin de transférer la compétence en matière de sanctions financières portant sur le revenu de remplacement et de pénalité administrative à Pôle emploi, il est nécessaire de modifier l’article L. 5312-1 du code du travail relatif aux missions de Pôle emploi et les articles L. 5426-2 et L. 5426-5 à 7 et L. 5426-9 du code du travail relatifs à ces sanctions. L’article L. 5412-1 du code du travail doit également être modifié pour réviser la nature des motifs de sanctions. Le pouvoir de décision sera désormais confié à l’opérateur et non plus au représentant de l’État.

L’article L. 5426-2 du code du travail sera également modifié : il ne sera plus possible d’appliquer des sanctions de réduction du revenu du remplacement. La possibilité d’appliquer des sanctions de suppression du revenu de remplacement sera conservée.

2.2.  Objectifs poursuivis

La loi du 13 février 2008 a confié à Pôle emploi la compétence en matière de contrôle de la recherche d’emploi, compétence relevant auparavant des services déconcentrés de l’État (DIRECCTE). Cette modification législative a entraîné une réduction substantielle des effectifs dédiés à cette activité au sein des services de l’État (DIRECCTE). Or, les DIRECCTE ont conservé une capacité d’instruction permettant aux préfets de départements de prendre les décisions de sanctions de réduction ou de suppression du revenu de remplacement. Dans les faits, seuls 27 équivalents temps plein (ETP) sont en charge de cette activité au sein des 102 unités départementales des DIRECCTE. Faute de moyens, ils concentrent leur mission quasi exclusivement sur les sanctions liées aux fausses déclarations en vue de percevoir indûment des allocations.

Il apparaît aujourd’hui opportun de transférer en intégralité cette activité de contrôle de la recherche d’emploi à Pôle emploi afin de rendre les sanctions plus effectives, et ce dans un contexte de simplification administrative et d’efficacité. En effet, Pôle emploi instruit déjà les dossiers au titre de la radiation et opère les signalements aux DIRECCTE. Il s’inscrit en cohérence avec la réduction progressive du personnel affecté au suivi de la recherche d’emploi dans les DIRECCTE et avec les projets de simplification et de rationalisation administrative portés dans le cadre de la démarche du Gouvernement « Action publique 2022 ». Il permettra également de rendre plus effectif l’actuel dispositif de sanctions en réduisant notamment les délais d’instruction des dossiers.

Par ailleurs, la suppression de la capacité de réduire le revenu du remplacement rendra plus lisible le mécanisme de sanction et supprimera les situations de sanctions qui ont des effets cumulatifs et successifs immédiats dans le temps. En effet, aujourd’hui, le demandeur d’emploi peut être soumis à un phénomène de sanction cumulée avec une radiation sur une période donnée (1ère sanction) puis, au moment de la réinscription, une réduction de l’allocation durant une  période qui succède immédiatement à la précédente (2ème sanction).

Enfin, dans le cadre de la révision des motifs de sanction, la liste des motifs des sanctions doit être actualisée. Sur la base de cette liste actualisée, un décret en Conseil d’État viendra fixer le niveau des sanctions appliquées, l’objectif étant de déterminer une peine proportionnée au manquement du demandeur d’emploi. Cela devrait se traduire par la création d’un groupe de sanctions, en isolant le motif lié à l’absence à une convocation de Pôle emploi ou à un rendez-vous sollicité par le demandeur d’emploi auprès de Pôle emploi. Parmi les autres modifications qui seraient apportées, la création d’un niveau supplémentaire de manquement est envisagée (actuellement, il en existe deux : premier manquement et manquements répétés). Afin d’introduire plus de progressivité dans le nouveau dispositif, il est envisagé d’afficher trois niveaux : premier manquement, deuxième manquement et manquements répétés au-delà. Ces différents niveaux se traduisent par une graduation de la sanction et permettront au demandeur d’emploi d’adapter son comportement avant de subir des peines beaucoup plus lourdes. 

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Trois options ont été envisagées concernant le transfert du pouvoir de décision à Pôle emploi en matière de suppression du revenu de remplacement, actuellement dédié aux DIRECCTE :

Concernant la révision des motifs de sanction, deux options ont été envisagées :

3.2.  Option retenue

Concernant le transfert du pouvoir de sanction, les résultats obtenus depuis 2008 en matière de contrôle ont montré la nécessité de faire évoluer le mécanisme actuel, ce qui a conduit à écarter la première option. La deuxième option consistant à transférer l’ensemble de l’activité de contrôle et de sanction à l’autorité administrative aurait généré des coûts de fonctionnement significatifs. La troisième option proposant le transfert à Pôle emploi permettra de simplifier le contrôle en unifiant au seul d’un même organisme l’ensemble du processus.

Pour la révision des motifs de sanction le choix s’est porté sur l’option 2 avec une évolution de certains motifs de sanction afin de les mettre en conformité avec la réglementation ou les pratiques actuelles. Le choix de cette option permet également d’introduire un niveau supplémentaire de manquement permettant l’application d’un barème de sanctions plus progressif. Enfin, l’ensemble des motifs est regroupé avec une échelle de sanction (qui sera définie par voie réglementaire) identique pour une meilleure cohérence du dispositif. Seul le motif relatif à la convocation ou au rendez-vous est isolé pour alléger la sanction actuelle dans le cadre d’une réforme équilibrée.

 La révision des motifs de sanction se traduit par :

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

Les articles suivants du code du travail seront modifiés : l’article L. 5312-1 relatif aux missions de Pôle emploi, l’article L. 5412-1 relatif aux motifs de radiation, l’article L. 5426-2 relatif aux sanctions financières portant sur le revenu de remplacement, les articles L. 5426-5 à 7 relatifs la pénalité administrative et l’article L. 5426-9 renvoyant à un décret en Conseil d’État pour déterminer les modalités d’application des articles relatifs aux sanctions.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

La clarification des motifs de sanction et une application plus proportionnée de ces sanctions aux manquements constatés devrait se traduire par une meilleure acceptabilité du principe de sanction par les demandeurs d’emploi, par un plus grand respect de leurs devoirs (contrepartie de leurs droits) et donc par une accélération de leur retour à l’emploi.

En outre, l’organisation simplifiée et plus efficace de l’application des sanctions devrait contribuer, en les rendant plus effectives, à inciter davantage encore les demandeurs d’emploi à suivre les recommandations qui leur sont faites dans le cadre de leur accompagnement.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

La mesure devrait permettre d’accélérer le retour à l’emploi de certains demandeurs d’emploi et donc d’accroître les possibilités de recrutement par les entreprises.

4.2.3.      Impact budgétaire

L’accompagnement des demandeurs d’emploi est assorti d’un mécanisme de contrôle et de sanctions. D’un point de vue schématique, le contrôle et les sanctions ont pour objectif d’influer sur la durée du chômage selon deux canaux. Tout d’abord, les opérations de contrôle réduisent les manquements à la règle et invitent les demandeurs d’emploi à intensifier leurs efforts de recherche pour éviter d’être sanctionnés. Ensuite, lorsqu’une sanction est appliquée, cela tend à intensifier l’effort de recherche du demandeur d’emploi. Cela contribue, toutes choses égales par ailleurs, à accélérer le retour à l’emploi et à réduire la durée de l’épisode de chômage. Ces effets peuvent intervenir avant même la mise en application de ces mesures. L’intensification des contrôles et des sanctions peut avoir un effet positif via le renforcement de l’efficacité de l’accompagnement afin de retrouver un emploi avant un contrôle et une sanction. L’accélération du retour à l’emploi ainsi recherché génère des moindres dépenses tant d’indemnisation que d’accompagnement.

4.3.  Impacts sur les services administratifs

Le transfert complet à Pôle emploi permettra de libérer vingt-sept équivalents temps plein répartis dans les unités départementales des DIRECCTE, sans nécessité d’augmentation des moyens dans les services de Pôle emploi qui assurent déjà une instruction des dossiers au titre des radiations et des signalements aux DIRECCTE.

4.4.  Impacts sur les particuliers

Ces mesures auront un impact sur les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi dans la mesure où les sanctions seront rendus plus effectives à la suite du transfert à Pôle emploi. Une information renforcée des droits et devoirs des demandeurs d’emploi à chaque étape de la vie de leur dossier de demandeur d’emploi sera nécessaire.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

La mesure donne lieu à consultation du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Le transfert à Pôle emploi, la suppression de la sanction de réduction du revenu de remplacement et la révision des motifs seront applicables à compter du 1er janvier 2019. Concrètement, en vertu du principe de non rétroactivité des lois répressives plus sévères et d’application immédiate des lois répressives plus douces dit in mitius et dont la portée constitutionnelle a été confirmée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel : les sanctions prises pour des motifs révisés en substance par la voie législative et selon la nouvelle échelle des sanctions découlant de la suppression de la sanction de réduction par la voie législative et de la modification de la gradation des sanctions par la voie réglementaire ne devraient s’appliquer qu’aux manquements postérieurs au 1er janvier 2019.

Il n’est pas possible d’appliquer à un demandeur d’emploi une sanction pour un manquement ou une fausse déclaration antérieurs à l’entrée en vigueur de la sanction alors même que cette sanction, dans ses nouvelles modalités, n’existait pas au moment où le demandeur a manqué à ses obligations.

En effet, sauf dispositions législatives le prévoyant expressément, la loi nouvelle ne rétroagit pas sur les situations juridiques qui se sont constituées antérieurement à son entrée en vigueur. Une situation est qualifiée comme constituée dans la mesure où elle est juridiquement parfaite, c'est-à-dire définitivement fixée avant l'intervention de la règle nouvelle. Tel est le cas lorsque sont intervenus avant cette date le ou les faits dont la réalisation conditionne l'application d'une règle de droit, qu'il est possible de qualifier de faits générateurs.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article est applicable sur l’ensemble du territoire de la République française, y compris dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’État déterminera la procédure contradictoire préalable applicable préalablement au prononcé des sanctions financières et de pénalité administrative ainsi que les voies de recours applicables et devra l’harmoniser avec le dispositif applicable pour les sanctions de radiation.

Ce décret précisera également la gradation des sanctions révisée dans une logique de souplesse, de proportionnalité par rapport à la gravité des manquements constatés et d’effectivité avec un effet d’incitation au retour à l’emploi : des sanctions pouvant être moins lourdes mais plus effectives et plus efficaces. Notamment, ce décret prévoira des sanctions plus légères pour le motif d’absence à convocation que pour celui d’insuffisance de recherche d’emploi, contrairement à la situation actuelle.

 


Chapitre 4 – Dispositions outre-mer

Article 37 - Dispositions outre-mer

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

La loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 et la loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010 relatives au département de Mayotte ont encadré le processus de départementalisation de Mayotte, devenu département d’outre-mer en mars 2011.

Par la suite, l’article 120 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour étendre et adapter la partie législative du code du travail de droit commun, en vue de son application à Mayotte au 1er janvier 2018. Le code du travail applicable à Mayotte a été abrogé à cette même date.

En matière d’assurance chômage, il existe un régime dérogatoire à Mayotte en raison du contexte socio-économique du territoire : le produit intérieur brut par habitant était de 8 350 € contre 32 084 € en France métropolitaine hors départements d’outre-mer en 2013 ; le taux de chômage s’élevait à 27,1 % en 2016. La situation économique ne permet donc pas d’appliquer à l’identique le régime d’assurance chômage de droit commun. Ainsi, plusieurs accords nationaux interprofessionnels ont fixé les règles spécifiques d’indemnisation du chômage applicables à Mayotte. Aujourd’hui, le régime d’indemnisation  mahorais est défini dans la convention du 24 mars 2016 relative à l’indemnisation du chômage à Mayotte. Cette convention instaure une convergence progressive vers les règles de droit commun.

Suite à l’extension et à l’adaptation du code du travail de droit commun à Mayotte, l’article L. 5524-3 du code du travail a maintenu le régime dérogatoire d’indemnisation applicable au territoire. Cet article prévoit également la possibilité de définir des règles spécifiques pour les artistes et techniciens intermittents du spectacle, dans une logique de convergence avec les règles applicables en France métropolitaine.

Le présent article loi modifie l’article L. 5524-3 du code du travail afin de prévoir les mêmes modalités de cadrage des négociations de la convention assurance chômage mahoraise par l’État que celles qui seront instaurées pour les négociations assurance chômage de droit commun.

1.2.   Cadre constitutionnel

En vertu de l’article 73 de la Constitution, les lois et les règlements applicables en France métropolitaine s’appliquent de plein droit à Mayotte. Ce même article reconnaît aux départements et régions d'outre-mer le droit d'adapter les lois en vigueur à leurs spécificités.

Le contexte socio-économique mahorais justifie l’existence d’un régime d’assurance chômage spécifique à Mayotte. Ainsi, il est nécessaire d’adapter le nouveau cadre de gouvernance des négociations assurance chômage à ce département d’outre-mer.  

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.   Nécessité de légiférer

L’article L. 5524-3 du code du travail a été inséré dans le code du travail par l’ordonnance n° 2017-1491 du 25 octobre 2017, en vue de maintenir un régime assurance chômage spécifique à Mayotte. Cet article doit être modifié dans le cadre du projet de loi, en vue d’adapter la nouvelle procédure de cadrage par l’État des négociations assurance chômage à la situation mahoraise.

Il est procédé en outre à divers ajustements rédactionnels des articles du code du travail relatifs au régime d’assurance chômage en outre-mer.    

2.2.   Objectifs poursuivis

La prise en compte du document de cadrage défini par l’État dans le cadre de la négociation des accords spécifiques applicables à Mayotte répond à la logique de convergence progressive du régime mahorais vers le régime de droit commun. En effet, la convention du 24 mars 2016 relative à l’indemnisation du chômage à Mayotte reflète le souhait d’un alignement progressif du régime mahorais sur le régime de droit commun.

Plusieurs évolutions du régime d’indemnisation chômage applicable à Mayotte peuvent ainsi être citées. La durée maximale d’indemnisation a été portée à 12 mois pour les demandeurs d’emploi âgés de moins de 50 ans, contre 7 mois dans l’accord national interprofessionnel (ANI) précédemment en vigueur (ANI du 26 octobre 2012 relatif à l’indemnisation du chômage à Mayotte). En France métropolitaine, la durée maximale d’indemnisation s’élève à 24 mois pour cette population. Parallèlement à l’augmentation de la durée maximale d’indemnisation, le taux de contribution employeur a été augmenté de 0,35 point chaque année depuis 2016 pour atteindre 2,80 % au 1er juillet 2018 (contre 1,75 % dans l’ANI du 26 octobre 2012). En France métropolitaine, le taux de la contribution employeur s’élève à 4,05 %.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.   Options envisagées

La non-application du nouveau cadre de gouvernance des négociations assurance chômage aurait pu être envisagée. Toutefois, cela a été écarté en raison, notamment, des évolutions identiques du financement de l’assurance chômage sur le territoire mahorais et le territoire métropolitain : suppression des cotisations salariales.

3.2.   Option retenue

L’application du document de cadrage de l’État à Mayotte a été retenue. Ce choix se justifie d’une part, par l’objectif de convergence progressive du régime mahorais vers le régime de droit commun et d’autre part, en raison de la suppression des cotisations salariales chômage. En effet, si le contexte socio-économique mahorais ne permet pas encore la mise en œuvre de la convention d’assurance chômage de droit commun à Mayotte, rien ne justifie de ne pas adapter la nouvelle procédure de cadrage des négociations par l’État.

4.         Analyse des impacts de la disposition envisagée

4.1.   Impacts juridiques

L’application du document de cadrage à Mayotte ne comporte pas d’impact supplémentaire sur l’ordre juridique interne à ceux identifiés pour le régime de droit commun.

4.2.   Impacts sur les services administratifs

L’application du document de cadrage à Mayotte ne comporte pas d’impact supplémentaire sur les services administratifs à ceux identifiés pour le régime de droit commun.

4.3.   Impacts sociaux

L’application du document de cadrage à Mayotte ne comporte pas d’impact social supplémentaire à ceux identifiés pour le régime de droit commun.

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.   Consultation menée

Le Conseil National de l’Emploi, de la Formation et de l’Orientation Professionnelles est consulté ainsi que le Conseil départemental de Mayotte.

5.2.   Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions relatives à la gouvernance du régime d’assurance chômage entrent en vigueur au 1er janvier 2019. La négociation de la prochaine convention d’assurance chômage mahoraise ou d’un avenant à la convention actuellement en vigueur à Mayotte devra respecter un document de cadrage élaboré par l’État. 

5.2.2.      Application dans l’espace

Cette disposition nouvelle s’applique au département d’outre-mer de Mayotte.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret d’application devra être publié pour préciser les modalités de mise en œuvre du cadrage des négociations des accords d’assurance chômage par l’État.

 

 


Chapitre 5 – Dispositions diverses

Article 38 - Dispositions diverses

1.         État des lieux

Plusieurs dispositions législatives du code de travail en matière d’indemnisation ou d’accompagnement des demandeurs d’emploi n’ont pas été adaptées suite à des évolutions juridiques qui les ont directement impactées.

Le décret n° 2014-524 du 22 mai 2014 portant modification des règles relatives à l’organisation et au fonctionnement de Pôle emploi prévoit, dans un souci de simplification et de lisibilité, que « Pôle emploi » est désormais désigné, dans de nombreux codes en vigueur, sous cette forme et non plus sous l’appellation « institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail ». Or, dans de nombreux articles, Pôle emploi n’est pas clairement mentionné sous cette appellation.  Les projets de dispositions proposées visent par conséquent à substituer « Pôle emploi » à « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » lorsque cela est nécessaire.

Plusieurs dispositions du code de travail et du code de la sécurité sociale relatives aux allocations de solidarité ne sont plus à jour et doivent être actualisées. À titre d’exemple, l’allocation temporaire d’activité a été supprimée par le décret n° 2017-826 du 5 mai 2017 mais est toujours mentionnée dans certains articles ; il en est de même de l’allocation de fin de formation supprimée par l’article 188-I de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009. De même, les mesures d’application de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) ne relèvent  plus de la compétence des partenaires sociaux mais de l’État (article L. 5423-4 du code du travail).

La convention d’assurance chômage du 14 avril 2017 a adapté les règles d’indemnisation applicables aux seniors pour leur permettre d’acquérir les compétences requises par l’évolution du marché du travail et tenir compte du recul de l’âge de départ à la retraite. Ainsi, l’âge d’entrée dans la filière, aujourd’hui fixé à 50 ans, est relevé à 53 ans. Les demandeurs d’emploi âgés entre 50 et 52 ans bénéficient désormais d’une durée maximale d’indemnisation alignée sur la durée de droit commun, soit 24 mois. Pour les demandeurs d’emploi séniors âgés de 53 et 54 ans, la durée maximale d’indemnisation s’élève à 30 mois. Toutefois, la convention prévoit la possibilité d’allonger la durée d’indemnisation jusqu’à 36 mois lorsqu’ils ont suivi une formation. Ce critère n’étant pas expressément prévu par la loi, le projet de loi prévoit une disposition permettant d’adopter des durées d’indemnisation différentes entre demandeurs d’emploi en fonction de ce critère (le suivi d’une formation).

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.   Nécessité de légiférer

Les différents ajustements rédactionnels opérés par souci de clarification et de simplification du droit nécessitent de prendre des dispositions législatives.

Ainsi, les articles L. 5312-13-1, L. 5411-1, L. 5411-2, L. 5411-4, L. 5411-6, L. 5411-10, L. 5426-1, L. 5426-8-3, L. 5427-2, L. 5427-3 et L. 5427-4 du code du travail sont modifiés à des fins d’harmonisation rédactionnelle concernant la dénomination de Pôle emploi.

Par ailleurs, les articles L. 5413-1 et L. 5428-1 du code du travail ainsi que l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale sont modifiés afin d’adapter la rédaction des dispositions au regard des évolutions législatives intervenues (notamment sur les allocations de solidarité d’indemnisation chômage).

De même, l’article L. 5423-4 est supprimé afin de tenir compte d’une évolution dans   l’attribution des compétences entre l’État et les partenaires sociaux sur la détermination des mesures d’application de certaines dispositions législatives du code du travail (l’ASS relève de la compétence de l’État).

Enfin, l’article L. 5422-2 du code du travail est modifié afin d’introduire un nouveau critère permettant d’adopter des durées d’indemnisation différentes entre demandeurs d’emploi : le suivi d’une formation. Cette disposition permet de sécuriser les règles applicables à la filière senior. En conséquence, l’alinéa 2 de cet article est supprimé, pour éviter toute redondance.

2.2.   Objectifs poursuivis

Les dispositions diverses du projet de loi visent à :

3.         Dispositif retenu

L’option initialement adoptée lors des travaux relatifs à l’agrément de la convention d’assurance chômage de 2017 consistait à adapter la rédaction figurant dans le texte final du règlement général afin de prévoir que la durée d’indemnisation à laquelle le demandeur d’emploi pourrait prétendre dépendrait de sa durée totale d’activité pendant la période de référence, sachant qu’au sein de cette durée, la période allant au-delà de trente mois d’indemnisation ne serait activée en cas de formation suivie par le demandeur au cours de sa période d’indemnisation. En atténuant le lien entre la durée d’indemnisation et la condition de suivi d’une formation, la fragilité juridique du dispositif était réduite.

Une intervention législative est privilégiée pour sécuriser définitivement la légalité les règles conventionnelles applicables à la filière senior de l’assurance chômage.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagees

L’introduction d’un nouveau critère pour déterminer la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi (suivi d’une formation) permet de sécuriser les évolutions introduites par la dernière convention d’assurance chômage et de pérenniser, de ce fait, les économies induites par la réforme de la filière senior par les partenaires sociaux (400 M€[125]).

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.   Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles est consulté (au titre du a) du 1° de l’article L. 6123-1 du code du travail).

5.2.   Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions diverses du projet de loi entreront en vigueur au 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Les dispositions nouvelles s’appliquent en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer et dans les collectivités d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Saint Barthélemy et Saint Martin.

Le département d’outre-mer de Mayotte bénéficie d’un régime d’assurance chômage spécifique. En l’absence de dispositions contraires, les dispositions de droit commun s’appliquent.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’État sera nécessaire.


Titre 3 - Dispositions relatives à l’emploi

Chapitre 1er – Favoriser l’entreprise inclusive

Articles 40 à 42 - Dispositions relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les employeurs publics et privés

1.         État des lieux

1.1.       Cadre général

L’insertion professionnelle des personnes handicapées a fait l’objet de plusieurs lois en quarante ans qui ont organisé un cadre d’intervention spécifique permettant de disposer d’une diversité d’outils normatifs et financiers.

Dès 1975, la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées a cherché à favoriser l’emploi, la formation et l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Elle pose les fondements du cadre juridique de l’intégration des personnes handicapées dans la société. Mais cette loi, non assortie d’une obligation de résultat, porte en elle ses propres limites.

La loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés, qui s’attache essentiellement au volet de l’emploi, marque une étape importante.

Elle fixe une obligation de résultat, pour le secteur privé et public, à tout établissement d’au moins 20 salariés en équivalent temps plein d’employer des personnes handicapées à hauteur de 6 % de son effectif.

Dans le secteur privé, si cet objectif n’est pas respecté, l’entreprise doit verser une contribution libératoire à un organisme créé à cet effet, l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées qui a pour fonction de collecter les contributions des entreprises qui ne remplissent pas leur obligation d’emploi. Le fonds est destiné à financer des actions visant à favoriser l’emploi des personnes handicapées : aides au recrutement, aides au maintien dans l’emploi, aides visant à compenser un handicap. Ces aides s’adressent aux personnes en situation de handicap comme aux employeurs. Elles peuvent être versées directement ou via des organismes spécialisés, financés par l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Ce fonds intervient en complémentarité avec les dispositifs de droit commun et/ou pour favoriser l’accessibilité à ces dispositifs : Pôle emploi dans le champ de l’insertion professionnelle et les services de santé-sécurité au travail dans le champ du maintien en emploi.

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées fait de l’insertion professionnelle des personnes handicapées une question sociétale. Elle introduit des changements qui ont amené les entreprises et les collectivités publiques à se réinterroger sur leur politique en matière d’emploi des personnes handicapées. Cette loi a permis de grandes avancées, notamment dans le domaine de l’obligation d’emploi d’au moins 6 % de travailleurs handicapés qui a été réaffirmée pour les entreprises d’au moins 20 salariées et renforcée par des sanctions financières de non-respect de cette obligation. Elle a transposé aux trois versants de la fonction publique ces principes en instituant notamment une contribution financière pour les employeurs publics n’atteignant pas la cible de 6 % de personnes en situation de handicap dans leur effectif. C’est dans ce contexte qu’a été créé le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, sous forme d’établissement public à caractère administratif, afin d’assurer en particulier la gestion et l’utilisation des contributions collectées auprès des employeurs publics.

En 2011, la loi n° 2011-901 du 28 juillet 2011 tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap a créé une nouvelle modalité d’acquittement partiel de l’obligation d'emploi des travailleurs handicapés pour l’accueil en stage de jeunes de plus de seize ans bénéficiaires de l’allocation compensatrice pour tierce personne ou de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé ou de la prestation de compensation du handicap.

Les modalités d’acquittement partiel de l’obligation d'emploi des travailleurs handicapés ont encore été élargies par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 à la possibilité donnée aux établissements assujettis de conclure des contrats de fourniture de sous-traitance ou prestations de services avec des travailleurs indépendants handicapés, d’accueillir des jeunes élèves handicapés en période d’observation mentionnées au 2°de l’article L. 4153-1 du code du travail ainsi que des personnes handicapées en période de mise en situation en milieu professionnel.

Le décret 2017-1819 du 29 décembre 2017 a créé une nouvelle dépense déductible de la contribution en ajoutant à la liste des dépenses déductibles du D. 5212-29 du code du travail un 13° concernant «  les démarches précédant l'ouverture de la négociation collective en vue de la conclusion d'un accord mentionné à l'article L. 5212-8 ».

1.1.1.      Dispositions générales

En application de l’article L. 5212-2 du code du travail, tout employeur (public ou privé) emploie, dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés, mentionnés à l'article L. 5212-13 du code du travail.

À défaut, l’employeur public ou privé qui ne satisfait pas à ses obligations s’acquitte, en application de l’article L. 5212-2 du code du travail, d’une contribution. Cette contribution est versée, s’il relève du secteur privé, à l’association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées et, s’il relève du secteur public, au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

L’employeur transmet sa déclaration à l’association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées au plus tard le 1er mars de l’année n+1  ou au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique au plus tard le 30 avril et doit verser sa contribution au plus tard à ces mêmes dates.

Il est prévu quatre  modalités d’acquittement de l’obligation d'emploi des travailleurs handicapés:

1.1.2.      Règles spécifiques au secteur privé

Les entreprises concernées sont celles du secteur privé, ainsi que les établissements publics industriels et commerciaux dont les effectifs sont égaux ou supérieurs à vingt salariés. Les entreprises de travail temporaire et les groupements d’employeurs ne sont assujettis à l'obligation d'emploi que pour leurs salariés permanents.

Dans les entreprises à établissements multiples, l'obligation d'emploi s'applique établissement par établissement, sous réserve que le chef d’établissement dispose du pouvoir de recrutement et de licenciement.

Selon les règles fixées à l’article L. 1111-2 du code du travail, le nombre de contrats à durée indéterminée est comptabilisé au 31 décembre. Ils ne sont pas comptabilisés s’ils ne sont plus dans l’entreprise au 31 décembre.

Les contrats à durée déterminée, les travailleurs mis à disposition, les intérimaires et les saisonniers sont pour leur part pris en compte au prorata de leur temps de présence au cours des douze derniers mois.

Le montant de cette contribution est fonction des unités bénéficiaires manquantes et de la taille de l’entreprise :

L’absence d’action positive sur une durée de plus de 3 ans entraîne, en application de l’article L. 5212-10 du code du travail, une sur contribution forfaitaire fixée à 1 500 fois le montant du smic horaire. Celle-ci est due pour chaque bénéficiaire manquant et doit être versée à l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées.

En cas d’absence de déclaration ou de non satisfaction à l’obligation d’emploi (L. 5212-12 du code du travail), une pénalité est versée au Trésor public. Elle est égale à 1500 fois le smic  horaire et  majorée de 25 % par unité bénéficiaire manquante.

Les critères de calcul de la contribution au titre de l’année n sont les suivants :

Ces différents calculent permettent de déterminer un nombre d’unités bénéficiaires employées directement ou indirectement par l’entreprise.

Si ce nombre est inférieur à l’effectif cible, l’employeur peut faire valoir :

Si, malgré ces minorations, l’employeur demeure redevable, il peut réduire le montant de sa contribution de déductions (L. 5212-11 du code du travail) liées à des actions spécifiques en faveur de l’emploi de bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans la limite de 10 % du montant total de la contribution.

Il lui reste alors à verser sa contribution à l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées.

Encadré - les modalités de mise en œuvre de l’obligation d’emploi

 

1ère étape : savoir si l’établissement est assujetti

Calcul de l’effectif d’assujettissement (assujettissement si  effectif est égal ou supérieur à 20) :

L’établissement déclare s’il est autonome (si les établissements ne sont pas autonomes, seul le siège social détermine l’effectif d’assujettissement en y intégrant les effectifs de tous les établissements sans autonomie) et si oui dans ce cas,

-le nombre de salariés en CDI au 31 décembre

-et le nombre des autres salariés  au prorata de leur temps de présence dans l’année même s’ils ne font plus partie de l’effectif au 31décembre

Assujettissement en fonction de la date de création de l’établissement ou du passage du seuil de 20 salariés :

L’établissement a un  délai de 3 ans pour se mettre en conformité avec l’OETH (obligation d'emploi des travailleurs handicapés) :

-en fonction de sa date de création

-ou en fonction de la date du  passage du seuil à 20 salariés

Il déclare donc cette date pour déterminer s’il est assujetti ou non

2ème étape : calcul de l’obligation d’emploi

En fonction des règles de détermination de l’effectif d’assujettissement, l’employeur calcule le nombre de TH qu’il aurait dû employer pour satisfaire à son obligation, à savoir 6 % de son effectif d’assujettissement

3ème étape : mise en œuvre de l’obligation d’emploi

L’employeur déclare les modalités d’acquittement de son obligation et calcule s’il y satisfait. A défaut, il paiera une contribution à l’Agefiph.

Il peut employer des bénéficiaires de l’obligation d’emploi (BOETH) :

L’employeur doit :

- déclarer la qualité de bénéficiaire employé (remplir la liste des travailleurs handicapés salariés), et la durée de la décision pour déterminer la valeur des BOETH dont la reconnaissance de la qualité a une durée limitée ;

- et calculer ensuite l’effectif des bénéficiaires qui est proratisé en fonction de leur présence effective.

L’employeur peut mettre en œuvre d’autres modalités d’acquittement de l’OETH :

-  en indiquant les contrats de sous-traitance conclus avec des entreprises adaptées (EA) ou des établissements spécialisés d’aide par le travail (ESAT) ou des travailleurs indépendants handicapés (TIH) et en calculant l’équivalent des unités bénéficiaires qui en découle ;

en indiquant avoir conclu un accord agréé par l’État : cette modalité permet de satisfaire totalement à l’obligation d’emploi ;

-en déclarant avoir employé des stagiaires ou  accueillir des personnes en PMSMP (remplir la liste des stagiaires) et en calculant l’équivalent des unités bénéficiaires qui en découle.

Ensuite, l’employeur calcule le nombre de bénéficiaires manquants, ce qui lui permet de calculer la contribution due.

4ème étape : minoration de la contribution

A défaut d’avoir ainsi rempli son obligation, l’employeur doit payer une contribution qui est réduite par :

- Les minorations qu’il déclare et dont il bénéficie :

Le coefficient de minoration, au titre des efforts consentis par l'employeur en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct de bénéficiaires de l'obligation d'emploi, est égal :

1° A 0, 5 à titre permanent pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi et âgé de moins de vingt-six ans ou de cinquante ans révolus et plus ;

2° A 1 pour l'embauche ou le maintien dans l'emploi d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi pour lequel le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a reconnu la lourdeur du handicap, en application de l'article R. 5213-45, pour la durée de la validité de la décision ;

3° A 0, 5 la première année pour l'embauche du premier travailleur handicapé appartenant à l'une des catégories de bénéficiaires de l'obligation d'emploi ;

4° A 1 la première année pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi en chômage de longue durée ;

5° A 1 à titre permanent pour l'embauche d'un bénéficiaire de l'obligation d'emploi à sa sortie d'une entreprise adaptée, d'un centre de distribution de travail à domicile ou d'un établissement ou service d'aide par le travail.

- Le pourcentage d’emploi exigeant des conditions d’aptitude particulière (ECAP) employés dont il indique le nombre et le code PCS (professions et catégories socioprofessionnelles) correspondant.

5ème étape : calcul de la contribution

La contribution est calculée en fonction de la taille de l’entreprise déclarée par l’établissement : 400, 500 ou 600 fois le SMIC. Elle peut être majorée par une sur-contribution égale à 1500 fois le SMIC si l’employeur indique qu’il  n’a pas  pendant plus de 3 ans ni employé de BOETH ni appliqué d’accord ni passé de contrats avec un ESAT, une EA ou un TIH.

L’entrepreneur déduit du montant de sa contribution des dépenses déductibles dans la limite de 10 % du montant de la contribution liées :

1° À la réalisation de travaux, dans les locaux de l'entreprise, afin de faciliter l'accessibilité sous toutes ses formes des travailleurs handicapés ;

2° À la réalisation d'études et d'aménagements des postes de travail en liaison avec le médecin du travail et le comité social et économique, afin d'améliorer l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés dans l'entreprise ;

3° À la mise en place de moyens de transport adaptés en fonction de la mobilité et du problème particulier de chaque travailleur handicapé ;

4° À la mise en œuvre de moyens pour le maintien dans l'emploi et la reconversion professionnelle de travailleurs handicapés ;

5° À la mise en place d'actions pour aider au logement des travailleurs handicapés afin qu'ils puissent se rapprocher de leur lieu de travail ;

6° À la mise en place d'actions pour aider à la formation des travailleurs handicapés des entreprises adaptées et des établissements ou services d'aide par le travail dans le cas d'adaptation de la qualification liée à l'achat d'une prestation ;

7° Au partenariat avec des associations ou organismes œuvrant pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées, à l'exclusion des actions financées dans le cadre du mécénat ;

8° À la mise en place d'actions d'aide à la création d'entreprises par des personnes handicapées ;

9° À la formation et à la sensibilisation de l'ensemble des salariés de l'entreprise dans le cadre de l'embauche ou du maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés ;

10° À la conception et à la réalisation de matériel ou d'aides techniques pour les travailleurs handicapés ;

11° À l'aide à l'équipement et à l'apport de compétences et de matériel aux organismes de formation pour accroître leur accueil de personnes handicapées ;

12° À la formation initiale et professionnelle en faveur des personnes handicapées au-delà de l'obligation légale ;

13° Aux démarches précédant l'ouverture de la négociation collective en vue de la conclusion d'un accord mentionné à l'article L. 5212-8. Dès lors que ces démarches aboutissent à l'agrément d'un premier accord, ces dépenses sont imputées au titre de la déclaration obligatoire de l'emploi des travailleurs handicapés de l'année précédant la première année de l'agrément de l'accord.

 

 

1.1.3.      Règles spécifiques au secteur public

Il existe des règles  spécifiques pour le secteur public, qui sont les suivantes :

1ère étape : Détermination de l’effectif total  rémunéré au 1er janvier de l’année N -1

L’employeur public déclare l’effectif rémunéré au 1er janvier N-1. Cet effectif exprimé en équivalent temps plein (ETP) permet d’apprécier le seuil de 20 agents à partir duquel un employeur est assujetti à l’obligation d’emploi.

Le principe retenu est celui de l’employeur rémunérant. L’employeur prend en compte l’ensemble des agents qu’il rémunère quel que soit l’établissement où ils exercent leurs fonctions.

L’effectif total est constitué de l’ensemble des agents, tous statuts confondus, rémunérés au 1er janvier de l’année écoulée. Les agents non titulaires recrutés sur un emploi non permanent par contrat à durée déterminée  doivent avoir été rémunérés sur une période d’au moins six mois durant l’année précédant l’année écoulée.

2ème étape : Calcul du niveau de l’obligation d’emploi

Le nombre légal de bénéficiaires de l’obligation d’emploi correspond au calcul ci-dessous :

Nombre légal = 6 % de l’effectif total rémunéré au 1er janvier de l’année écoulée arrondi à l’entier inférieur.

3ème étape : Détermination du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi présents au 1er janvier N-1

Il s’agit du nombre bénéficiaires de l’obligation d’emploi, dont la liste est fixée aux articles L. 5212-13 et L. 323-5 (article de l’ancien code du travail maintenu en vigueur) effectivement rémunérés au 1er janvier de l’année écoulée.

4éme étape : Détermination du montant des dépenses déductibles (année N-1)  et traduction en unités déductibles

Lorsque le taux d’emploi de travailleurs handicapés (taux d’emploi direct) constaté est inférieur à 6 %, il est calculé un nombre initial d’unités manquantes. Ce nombre correspond au nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi manquant au sein de l’effectif total par rapport au nombre légal de bénéficiaires qui devraient être effectivement rémunérés.

Ce nombre initial d’unités manquantes peut être diminué d’un nombre d’unités déductibles, dont le nombre est déterminé par le montant des dépenses éligibles à ce titre au vu des dispositions du code du travail et de l’article 6 du décret n° 2006-501 du 3 mai 2006 relatif au fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Le nombre d’unités déductibles est plafonné à la moitié du nombre légal de bénéficiaires qui devraient être rémunéré par l’employeur.

5ème étape : Calcul de la contribution avant réduction et détermination du nombre d’unités manquantes après déduction

Le montant de la contribution est calculé en fonction du nombre d’unités manquantes et de la taille de l’employeur.

6ème étape : Calcul de la contribution finale

L’article 98 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit une réduction particulière strictement applicable aux employeurs ayant des dépenses consacrées à la rémunération des personnels affectés à des missions d’aide à l’accueil, à l’intégration et à l’accompagnement des élèves ou étudiants handicapés au sein des écoles, des établissements scolaires et des établissements d’enseignement supérieur.

1.2.  Résultats de la politique en faveur de l’emploi des travailleurs en situation de handicap

Les résultats de la politique en faveur de l’emploi des travailleurs en situation de handicap sont les suivants :

1.2.1.      Dans le secteur privé 

En 2015[126], parmi les 9 494 600 salariés des établissements assujettis à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés, 431 000 travailleurs handicapés sont employés dans les 100 300 établissements assujettis. Cela représente 325 400 équivalents temps plein sur l’année, pour un taux d’emploi direct de 3,4 %. Ces 325 400 équivalents temps plein représentent 357 100 unités bénéficiaires.

L’augmentation du taux d’emploi dans le secteur privé est relativement importante : il a augmenté de 0,8 point entre 2006 et 2014 dans le secteur privé pour atteindre 4,1 % en 2014 et 4,4 % en 2015 dans le secteur privé.

Encadré - chiffres clé de l’obligation d’emploi dans le secteur prive

 

Évolution des données 2015 par rapport aux données 2014 :

100 300 établissements assujettis (+1,2 %) représentent 9 494 600 salariés (+2,3 %), dont 89 % hors accord agréé.

11 500 établissements, soit 11 % du total des établissements assujettis, sont couverts par un accord agrée (pas d’évolution).

431 000 travailleurs handicapés (+ 42 000, soit + 7,4 %) sont employés, ce qui représente 4,5 % du total des effectifs en personnes physiques.

Le nombre de travailleurs handicapés correspond à 325 400 équivalents temps plein, soit 3,4 % (+ 0,1) en taux d’emploi direct (ou 357 100 unités bénéficiaires, soit 3,8 % en unité bénéficiaires) : progression de + 0,1 à + 0,2 points par an depuis 2012 mais plus forte pour les établissements sous accord agréés (+0,3).

69 % des établissements assujettis hors accord agréé (près de 8 établissements sur 10) recourent à l’emploi direct et 20 % n’emploient pas directement un travailleur handicapé.

16 % des établissements hors accord agréé ont atteint au moins un taux d’emploi global (emploi direct et emploi indirect) de 6 % (contre 27 % des établissements sous accord agréé).

Parmi les travailleurs handicapés, 2 % ont moins de 25 ans, 18 % ont de 25 à 39 ans, 29 % ont de 40 à 49 ans, 51 % ont 50 ans et plus.

Zoom sur l’effet taille :

Plus l’effectif salarié est important et plus le recours à l’emploi direct augmente.

L’emploi direct est égal à 3 % dans les établissements de moins de 50 salariés et 3,6 % dans les établissements entre 200 et 499 salariés.

71 % des établissements de 20 à 49 salariés recourent à l’emploi direct contre près de 100 % des établissements de plus de 500 salariés.

La part des établissements sous accord agréé augmente avec la taille de l’établissement.

Zoom sur l’effet secteur d’activité :

Le taux d’emploi progresse dans tous les secteurs en 2015.

Le taux d’emploi le plus faible concerne le secteur de l’information et la communication : 2,1 %

Le taux d’emploi le plus élevé concerne le secteur de l’administration publique, enseignement, santé et action sociale : 4,4 %

La modalité de réponse varie selon les secteurs : le secteur de l’administration publique, enseignement, santé et action sociale (ex : Caisses d’Allocations Familiales) et le secteur de l’industrie sont les secteurs qui recourent le plus en moyenne à l’emploi direct (respectivement 88% et 86%), alors que le secteur de l’information et de la communication est le secteur qui y recourt le moins (61%).

Le recours aux accords agréés varie également selon les secteurs : les établissements du secteur de l’administration publique, enseignement, santé et action sociale  sont proportionnellement plus couverts par un accord agréé, avec un taux de couverture de 32 %, alors que le taux de couverture n’est que de 6 % dans l’industrie et de 2 % dans la construction.

 

Différents facteurs participent du choix de réponse des établissements à l’obligation d'emploi des travailleurs handicapés : taille de l’établissement, secteur d’activité, présence ou non d’un accord, stratégies propres à l’établissement,  plus ou moins grande maîtrise de la loi, politique des ressources humaines proche de l’entreprise.

Une étude de la DARES[127] en date de septembre 2016, fondée sur 23 monographies d’établissements, permet d’éclairer les logiques d’action des entreprises par rapport à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

L’analyse de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques fait ressortir que « les stratégies mises en place sont fonction de différents facteurs, humains, organisationnels (organisation du travail, articulation des niveaux décisionnels, taille de l’établissement), économiques. L’étude identifie quatre stratégies :

Ainsi l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés apparait largement incitative pour accroître le taux d’emploi. Elle s’avère toutefois, à elle seule, peu pertinente pour les entreprises qui atteignent ce niveau sans stratégie globale, notamment si leurs salariés développent un handicap d’origine professionnelle en cours de carrière. Elle ne s’accompagne pas nécessairement d’une politique de prévention des handicaps, de recrutement ou d’insertion des travailleurs handicapés. »

Les modalités de la mise en œuvre de l’obligation sont donc variées parmi les établissements assujettis :

Il reste que, malgré de nets progrès (le nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés a connu une hausse de 7,4 % entre 2014 et 2015), l’objectif des 6% de travailleurs en situation de handicap est loin d’être atteint dans le secteur privé.

1.2.2.      Dans la fonction publique

En 2015, parmi les 4 536 200 agents publics des employeurs assujettis à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés, 230 000 travailleurs handicapés sont employés dans les 15 000 entités assujetties. Cela représente un taux d’emploi direct de 5,07 % et un taux d’emploi légal de 5,32 %. Ces 230 000 équivalents temps plein représentent 242 400 unités bénéficiaires.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

En dépit d’évolutions positives, trente ans après la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 susmentionnée, les personnes handicapées continuent de rencontrer de fortes difficultés d’accès et de maintien dans l’emploi, caractérisées par un taux d’emploi et un niveau de qualification plus faibles que la population générale et un taux de chômage plus élevé.

En 2016, 36 % des personnes reconnues handicapées sont en emploi contre 64 % dans l’ensemble de la population et 18 % des personnes reconnues handicapées sont au chômage, contre 10 % de l’ensemble de la population. Les personnes handicapées ont trois fois moins de chances d’être en emploi et deux fois plus de chances d’être au chômage que les personnes non handicapées ayant les mêmes caractéristiques. Leurs périodes de chômage sont plus longues. La part des personnes handicapées en recherche d’emploi depuis au moins un an atteint 63 % (contre 45 % pour l’ensemble des chômeurs). Le taux de retour à l’emploi des travailleurs handicapés ne représente que 44 % de celui des autres demandeurs d’emploi. En comparant les taux de chômage par âge et niveau de qualification, ce sont les travailleurs reconnus handicapés les plus âgés qui sont le plus pénalisés.

Il s’agit donc de changer d’échelle et de revisiter l’ensemble des outils de la politique d’emploi des personnes en situation de handicap.

À ce titre, il apparaît nécessaire de redéfinir et simplifier l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés afin de renforcer l’engagement des employeurs et la mobilisation des partenaires sociaux, pour augmenter le taux d’emploi direct des personnes handicapées.

Pour ce faire, la transmission de la déclaration sociale nominative doit permettre aux employeurs d’accomplir les formalités relatives à la déclaration au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés à compter du 1er janvier 2020, comme s’y est engagé le Gouvernement lors du comité interministériel du handicap du 20 septembre 2017.

En effet, le processus de gestion actuelle de la déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés par l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées est lourd et mal maîtrisé. Le système d’information gérant la déclaration d’obligation  d’emploi des travailleurs handicapés est à bout de souffle, inadapté à un processus de gestion industrialisé et centralisé, mal documenté, mal contrôlé, peu évolutif et générateur :

Les recettes cumulées du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et de l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées ont atteint leur point haut en 2007. Elles diminuent depuis 2010, année du début de la baisse des recettes pour le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique : elles ont ainsi diminué de 233 M€ entre 2010 et 2016. En moyenne, les contributions ont baissé de 39 M€ par an depuis 2010, 25 M€ pour l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées et 13 M€ pour le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Collecte des deux fonds depuis 2004* (en M€) :

Source : Comptes annuels de l’Agefiph et du FIPHFP.

* Les montants de collecte sont ceux inscrits en produits dans le compte de résultat. Pour l’Agefiph, ils ne tiennent pas compte des montants dus non encaissés ni des montants remboursés. Pour le FIPHFP, il s’agit des montants dus.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’ambition du Gouvernement est donc de redonner à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés tout son sens pour qu’elle soit le vrai levier pour l’emploi direct des personnes handicapées, en se fixant trois objectifs :

Les principes retenus pour la redéfinition du dispositif d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés sont relatifs au maintien d’une obligation d’emploi, à l’évolution des règles de calcul et des modalités de déclaration de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés.

2.2.1.      Le maintien d’une obligation d’emploi, assortie d’une contribution libératoire

Le rapport de l’inspection générale des affaires sociales et de l’inspection générale des finances [128] relatif au financement de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, rendu public en décembre 2017,  conforte la pertinence de cette obligation générale d’emploi des personnes en situation de handicap en relevant notamment qu’une majorité de pays de l’Union européenne applique un principe de quota similaire.

Il conforte le niveau d’emploi fixé à 6 % en le rapprochant de la part des personnes en situation de handicap dans l’ensemble de la population d’âge actif. Il propose par ailleurs d’ajuster de manière dynamique la cible à la part de bénéficiaires de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la population en âge de travailler, afin de permettre d’assurer une pérennité à cette source de financement même si ce dispositif devrait être conçu en veillant à donner une visibilité suffisante aux entreprises.

Il est également proposé de maintenir la contribution libératoire qui sanctionne aujourd’hui la non-atteinte de cet objectif d’emploi, et d’en conforter l’affectation au financement d’actions spécifiques en faveur de l’emploi des personnes handicapées.

2.2.2.      Une évolution des règles de calcul de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés qui doit permettre de conforter l’emploi direct des personnes handicapées et de simplifier la déclaration pour les entreprises

Aujourd’hui, si l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés apparaît largement incitative pour augmenter le taux d’emploi des personnes handicapées, plusieurs règles de calcul viennent affaiblir sa portée. La lourdeur de la déclaration, synonyme de lourdeur en gestion, fait peser des risques sur la qualité des déclarations, le niveau des contributions et les taux d’emploi déclarés. Cette déclaration complexe crée des charges de gestion pour les employeurs et pour les fonds et ne garantit pas leur fiabilité car les éléments entrant dans le calcul de la contribution sont trop nombreux et pourraient être simplifiés.

Il convient donc de rechercher un mode de calcul de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés plus directement favorable à l’emploi direct en questionnant les modalités de valorisation de l’emploi indirect et les déductions qui ont progressivement complexifié cette déclaration.

Ainsi, dans le secteur privé, il existe aujourd’hui 13 motifs de déduction. En 2013, 5 % des établissements ayant des unités bénéficiaires manquantes déclarent des dépenses déductibles. Les dépenses les plus déclarées concernant le partenariat avec des organismes œuvrant pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (36 %), la formation et la sensibilisation des salariés de l’entreprise au handicap (21 %) et la mise en œuvre de moyens pour le maintien dans l’emploi (13 %). En 2016, les déductions concernaient seulement 3 300 entreprises environ pour un montant cumulé de plus de 14 M€.

En matière de sous-traitance, le dispositif doit également être simplifié. La possibilité de s’acquitter partiellement de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés en recourant à la sous-traitance au secteur du travail protégé et adapté constitue un levier important de son développement. Les employeurs sont nombreux à y recourir : dans le secteur privé, près d’un établissement sur deux avait recours à la sous-traitance en 2013 (44 %)[129]. Dans le secteur public, c’est le cas de plus d’un établissement sur deux (57 %). Mais l’impact de la sous-traitance sur le taux d’emploi reste modeste : elle est évaluée à 0,36 % pour un taux d’emploi total de 3,97 % en 2013.

2.2.3.      Une évolution des modalités de déclaration de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés et des modalités de versement de la contribution qui doivent permettre d’alléger les tâches administratives des employeurs

La redéfinition de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés doit favoriser une simplification d’ampleur de la déclaration et de son calcul pour les employeurs. C’est dans cet objectif qu’une des mesures du Comité interministériel du handicap du 20 septembre 2017 indique que la déclaration relative à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés doit pouvoir être réalisée au moyen de la déclaration sociale nominative.

Cette mesure permet d’offrir à l’entreprise un « guichet unique de déclaration ». Elle permet également de fiabiliser les données  et d’améliorer la qualité des contrôles.

D’un point de vue technique, les options proposées doivent être le plus systématiquement conformes au droit commun des déclarations sociales afin de réduire le plus possible le nombre de données nouvelles à intégrer dans la déclaration sociale nominative.

Concernant le secteur privé, il est prévu que les nouvelles règles de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés soient implémentées dans le cahier des charges de la déclaration sociale nominative en 2018, testées en 2019 et effectives au 1er janvier 2020. Elles s’appliqueront aux employeurs du secteur privé pour leur déclaration et contribution versées au titre des années 2020 et suivantes, et pour les employeurs publics pour leur déclaration et contribution versée au titre des années 2022 et suivantes, dès lors que la déclaration sociale nominative sera mise en place pour le secteur public uniquement au 1er janvier 2022.

Les entreprises et les employeurs publics disposeront ainsi d’un délai utile pour développer une stratégie de ressources humaines permettant de se rapprocher de l’objectif fixé à travers le recrutement et le maintien en emploi de travailleurs handicapés.

3.         Options possibles et dispositif retenu

Les mesures proposées ont pour objectif de répondre à chacun des trois principes retenus pour la redéfinition du dispositif d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés :

3.1.  Le maintien d’une obligation d’emploi, assortie d’une contribution libératoire

L’obligation d’employer 6 % de travailleurs handicapés est maintenue. Ce taux de 6 % est conforme à la part des bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés dans la population active puisqu’aujourd’hui, les personnes disposant d’une reconnaissance administrative de leur handicap représentent 6,6 % de la population âgée de 15 à 64 ans.

La disposition envisagée inclut une clause de revoyure tous les cinq ans afin que ce taux puisse être révisé le cas échéant, en référence notamment à la part des bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans la population active. Cette clause permet d’ajuster souplement le dispositif d’obligation d’emploi et de prendre en compte dans le temps l’évolution de la population active et du nombre de travailleurs handicapés (modification de l’article L. 5212-2 du code du travail).

3.2.  Une évolution des règles de calcul de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés qui doit permettre de conforter l’emploi direct des personnes handicapées et de simplifier la déclaration pour les entreprises et les employeurs publics

Afin de conforter l’emploi direct des travailleurs handicapés dans le secteur privé et le secteur public, il est proposé deux types de mesures :

1)     Une valorisation différente du recours aux établissements ou services d’aide par le travail, entreprises adaptées et travailleurs indépendants handicapés : ce recours n’est plus valorisé en tant que modalité d’acquittement partiel de l’obligation d’emploi mais en tant que déduction venant minorer le montant de la contribution due par l’employeur.

Pour autant la volonté de ne pas déséquilibrer le secteur des établissements ou services d’aide par le travail, des entreprises adaptées et des travailleurs handicapés indépendants, fortement encouragé par le décompte actuel des achats qui leur sont faits au titre de l’emploi indirect des travailleurs handicapés conduira à recherche un mode de valorisation rénové, strictement neutre pour ce secteur. Ces modalités seront précisées dans un décret en Conseil d’État (abrogation de l’article L. 5212-6 du code du travail pour le secteur privé et de l’article L. 323-8 du code du travail pour le secteur public - insertion d’un article L. 5212-10-1 dans le code du travail et modification de l’article L. 323-2 du code du travail).

2)     Une redéfinition des dépenses réalisées par l’employeur pouvant être déduites du montant de sa contribution : afin d’éviter tout effet d’aubaine, il paraît nécessaire de limiter ces dépenses déductibles aux dépenses destinées à favoriser l’accueil, l’insertion ou le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés qui n’ i incombent pas déjà à l’employeur en application d’une disposition législative ou réglementaire. Ces dépenses, et les conditions dans lesquelles elles peuvent être déduites du montant de la contribution, seront déterminées par décret (modification de l’article L. 5212-11 du code du travail pour le secteur privé et de l’article L. 323-8-6-1 du code du travail pour le secteur public).

3.3.  Une évolution des modalités de déclaration de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés et de versement de la contribution, qui doit permettre d’alléger les tâches administratives des entreprises

Pour plus de simplicité et d’efficacité, il est proposé de faire évoluer les modalités de déclaration de la contribution et de versement de la contribution, selon des modalités fixées par décret.

Le décret précisera que la déclaration relative à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés sera réalisée au moyen de la déclaration sociale nominative tant pour le secteur privé, à compter du 1er janvier 2020, que pour le secteur public, à compter du 1er janvier 2022.

Outre un gain de temps pour l’employeur, ce nouveau processus permettra de fiabiliser les données contenues dans la déclaration d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés et de faciliter les contrôles (modification des articles L. 5212-5 et L. 5212-9 du code du travail et de l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale – création de l’article L. 5212-11-1 dans le code du travail).

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La présente disposition conduira à une simplification des normes attachées à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, sans impact sur le droit du travail. Elle se traduira par :

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

La redéfinition de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés a pour objectif de développer l’emploi direct des travailleurs handicapés dans le secteur privé, en simplifiant les démarches administratives pour les employeurs et en valorisant davantage l’emploi direct dans les modalités d’acquittement de cette obligation.

Le développement de l’emploi des travailleurs handicapés permettrait de diminuer sensiblement les dépenses « passives » dont bénéficient aujourd’hui les demandeurs d’emploi handicapés, telles que l’allocation adulte handicapé.

4.2.2.      Impact sur les entreprises et les employeurs publics

La rénovation de la déclaration a pour objectif de modifier le comportement des entreprises et des employeurs publics en les incitant à recruter davantage de travailleurs handicapés.

Elle doit également favoriser une simplification d’ampleur de la déclaration et de son calcul de façon à réduire le « coût d’entrée » administratif de l’embauche d’un travailleur en situation de handicap, additionnant tout à la fois le coût, en équivalent temps plein (ETP), de la charge de travail, ainsi que le coût symbolique pour l’employeur de se trouver confronté à un processus administratif complexe. Le passage à la déclaration sociale nominative simplifiera sa tâche, en lui évitant de fournir des données déjà disponibles.

Concernant les établissements et services d’aide par le travail, entreprises adaptées  et travailleurs indépendants handicapés, il est proposé de valoriser différemment le recours des entreprises à ces structures dans le cadre de l’obligation d’emploi. Pour autant, la volonté de ne pas les déséquilibrer conduira à rechercher un mode de valorisation dans l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés qui soit neutre et qui n’ait pas d’impact sur les commandes des entreprises auprès de ces structures.

4.2.3.      Impact budgétaire

a)      Pour le secteur privé

Les mesures proposées pourraient avoir un impact sur le montant de la contribution versée par les employeurs et donc sur le budget de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, et ce pour plusieurs raisons :

Mais elles n’auront pas d’impact sur le budget de l’État.

b)     Pour le secteur public

Les mesures proposées pourraient avoir un impact sur le montant de la contribution versée par les employeurs et donc sur le budget du Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, et ce pour plusieurs raisons :

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les mesures proposées pourraient avoir un impact sur le montant de la contribution versée par les collectivités territoriales, en tant qu’employeurs, et ce pour plusieurs raisons :

La hausse ou la baisse des contributions des différentes collectivités publiques est toutefois complexe à établir.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Aujourd’hui, en application de l’article 208 de la loi de finances pour 2011,  la gestion de la déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés (a été transférée de l’État à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées   à compter du 1er janvier 2013.

Deux modalités de déclaration sont proposées aux établissements :

L’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées a fait le choix de mettre en place un processus de gestion centralisée des déclarations organisé comme suit :

-          réception et ouverture des plis,

-          vérification de la complétude des déclarations avant numérisation,

-          numérisation des documents,

-          traitement et encaissement des contributions,

-          relance des non répondant ;

Ces activités sont réalisées par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées avec une équipe dédiée de 13,5 équivalents temps plein, basée à Bagneux. Cette équipe est renforcée chaque année en période de collecte (entre février et juin) par 6 à 10 équivalents temps plein supplémentaires (contrats à durée déterminée ou missions d’intérim).

Le coût direct de traitement de la déclaration relative à l’obligation d’emploi pour les travailleurs handicapés s’élèvent pour l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées à 3,2 M€ environ, soit 6,7 % de son budget de fonctionnement.

Du point de vue des pouvoirs publics, les avantages attendus de l’accomplissement de la déclaration relative à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés au moyen de la déclaration sociale nominative sont les suivants :

4.5.  Impacts sociaux

4.5.1.      Impact sur les personnes en situation de handicap

Les mesures proposées ont pour vocation de mobiliser davantage les employeurs afin de favoriser l’emploi des personnes en situation de handicap.

4.5.2.      Impact sur la jeunesse

Les mesures proposées ont pour objectif de favoriser l’emploi des travailleurs handicapés, notamment des jeunes travailleurs handicapés dont le taux de chômage est aujourd’hui plus important que celui de l’ensemble des jeunes.

Ainsi, 33 % des jeunes de 15 à 24 ans bénéficiant d’une reconnaissance administrative du handicap sont aujourd’hui demandeurs d’emploi, contre 24 % de l’ensemble des jeunes de 15 à 24 ans. Et seuls 2 % des travailleurs handicapés travaillant dans le secteur privé ont moins de 25 ans.

4.6.  Impacts sur les particuliers

Ces mesures ont pour objectif de faire diminuer le taux de chômage des travailleurs handicapés, en valorisant davantage l’emploi direct et en incitant les employeurs à recruter des travailleurs handicapés.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Une concertation sur la réforme des politiques d’emploi des travailleurs handicapés a été lancée le 18 février dernier par le ministre de l’économie et des finances Bruno LE MAIRE, le ministre du travail Muriel PENICAUD, la secrétaire d’État aux personnes handicapées Sophie CLUZEL et le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics Olivier DUSSOPT. L’objectif est d’engager une refondation globale de la politique de l’emploi des personnes en situation de handicap et de ses outils, en partant de leurs besoins et de ceux de leurs employeurs, pour sortir d’une politique aujourd’hui cloisonnée, complexe et non harmonisée entre secteur public et secteur privé.

Cette concertation associe les partenaires sociaux et les associations représentant les personnes en situation de handicap et porte sur deux chantiers :

La première phase de concertation sur la redéfinition de l’OETH  a été ouverte le 18 février avec plusieurs cycle de travail tant avec les partenaires sociaux que les représentants du secteur associatifs. Le Gouvernement a fait part de son souhait de transformer et simplifier l’obligation d’emploi afin que l’entreprise soit plus inclusive et afin de replacer la liberté et l’autonomie des personnes au cœur de la stratégie nationale. Il souhaite  également renforcer la mobilisation des employeurs, des acteurs de l’emploi, de la formation et du médico-social sur ces enjeux, et sécuriser les moyens de l’effort d’insertion des personnes handicapées en milieu ordinaire.

Pour ce faire, le gouvernement a  demandé aux partenaires sociaux et aux associations de travailler sur les questions suivantes :

          Soutenir le secteur protégé et adapté en ce qu’il contribue à l’accès des personnes handicapées à l’emploi ordinaire ?

          Formaliser une politique de recrutement, d’intégration des travailleurs handicapés, de prévention des handicaps et de maintien en emploi ?

Dans le secteur public, une concertation sur l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap, qui vise à revoir l’ensemble de la politique de handicap dans la fonction publique, a été  lancée en mars 2018 afin de renforcer l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap, d’assurer aux un parcours professionnel exempt de discrimination et leur permettant d’accéder à des postes à responsabilité mais également de prévenir la survenue du handicap, d’assurer le maintien dans l’emploi et d’améliorer leur qualité de vie au travail.

Sont consultés :

Le Conseil national consultatif des personnes handicapées et le Conseil commun de la fonction publique sont saisis pour information.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Il est prévu que ce mesures entrent en vigueur au 1er janvier 2020, et s’appliquent aux déclarations qui seront effectuées par les employeurs au titre des années 2020 et suivantes.

S’agissant du secteur public, la transformation en déduction de la modalité d’'acquittement  partiel de l’obligation d'emploi que représente la conclusion de contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services avec des entreprises du secteur adapté, des établissements et services d’aide par le travail entrera en vigueur le 1er janvier 2020.

5.2.2.      Application dans l’espace

Ces mesures s’appliqueront à l’ensemble du territoire français.

5.2.3.      Textes d’application

Il est prévu cinq textes d’application :

Article 43 - Renforcement du cadre d’intervention des entreprises adaptées

1.         État des lieux

Jusqu’à la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les « ateliers protégés », les centres de distribution de travail à domicile (CDTD) assimilés à ces ateliers créés par la loi n° 57-1223 du 23 novembre 1957 sur le reclassement professionnel des travailleurs handicapés et les centres d’aide par le travail (CAT) relevaient du milieu protégé. Les structures du milieu protégé étaient destinées à accueillir les travailleurs handicapés dont la diminution physique ou mentale était telle que leur placement dans le milieu classique de travail s’avérait impossible ; l’atelier protégé leur permettant d’exercer une activité correspondant à leur possibilité suivant un rythme de travail approprié[130].

La loi du 11 février 2005 transforme les « ateliers protégés » en « entreprises adaptées » pour les inscrire dans le milieu ordinaire de travail. Elle supprime la disposition d’assimilation des centres de distribution de travail à domicile aux entreprises adaptées (mention héritée des lois n° 57-1223 du 23 novembre 1957 et n° 75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des handicapés). Cette suppression a pour principal effet de réaffirmer que ces centres de distribution de travail à domicile sont des entreprises adaptées qui se distinguent seulement par leur modalité de mise au travail des travailleurs handicapés. La spécificité des centres de distribution de travail à domicile est de procurer, aux travailleurs handicapés orientés vers le marché du travail, des travaux manuels ou intellectuels à effectuer à domicile. Il s’agit d’entreprises à part entière, soumises à la même obligation d’accompagnement spécifique afin de valoriser les compétences de leurs salariés et de permettre leur mobilité. À ce jour, les centres de distribution de travail à domicile  regroupent six structures qui emploient au total trente-huit salariés[131].

Le législateur, en 2005, a rapproché les entreprises adaptées du droit commun, notamment en soumettant le statut de leurs salariés handicapés au code du travail avec une rémunération au moins égale au salaire minimum de croissance (SMIC) dans le cadre d’un contrat de travail, mais a maintenu une spécificité-fonction particulière.

Les entreprises adaptées constituent une voie médiane[132] au service de l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap confrontées à une réelle exclusion du marché du travail qui se traduit par un taux de chômage deux fois supérieur à celui du reste de la population (18 % contre 9 %).

Les entreprises adaptées ont une obligation d’employer au sein de leurs effectifs de production au moins 80 % de travailleurs reconnus handicapés par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), ayant une orientation « marché du travail », et doivent leur proposer un accompagnement social et professionnel spécifique[133], contrairement aux travailleurs handicapés employés en entreprise « classique » au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH).

Elles proposent à l’État d’agréer le projet économique, social et professionnel qu’elles ont  conçu en faveur de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés puis le mettent en œuvre sous leur propre responsabilité.

Ces entreprises concluent alors un contrat d’objectifs triennal avec l’État et perçoivent des aides financières prévues par l’article L. 5213-19 du code du travail sous deux formes pour accomplir cette fonction spécifique :

          une partie forfaitaire pour financer l’accompagnement social et professionnel ;

          une partie sur critères comportant trois critères reposant sur des modalités de calcul propre : développement économique, maintien des salariés vieillissants, valorisation de la mobilité externe ;

          une partie variable pour des projets visant notamment à développer les compétences de salariés handicapés et favoriser la réalisation de leur projet professionnel.

En l’état de la législation applicable et des crédits inscrits en loi de finances pour l’année 2018, l’aide au poste s’élève à 14 385 € par équivalent temps plein (au taux du SMIC au 1er janvier 2018) et le niveau moyen de subvention spécifique à 1 380 € par équivalent temps plein (ETP) soit un montant unitaire agrégé de 15 765 € par équivalent temps plein (temps de travail annuel de 1 607 heures).

Pour ouvrir droit à l’aide au poste, les entreprises adaptées doivent recruter leur salarié soit sur proposition du service public de l’emploi (SPE), soit directement lorsque les travailleurs handicapés remplissent les critères de  l’arrêté du 24 mars 2015 relatif aux critères ouvrant droit à l'aide au poste et à la subvention spécifique dans le cadre des recrutements opérés directement par les entreprises adaptées et les centres de distribution de travail à domicile. Les observations de terrain démontrent que 90 % des recrutements interviennent sur proposition du service public de l’emploi et 10 % sur recrutement direct. Ces proportions semblent relativement stables dans le temps.

Les aides financières de l’État attribuées à des entreprises exerçant des activités économiques relèvent du régime juridique de la subvention dont la définition figure à l’article 9-1[135] de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.  

Marquées par une diversité de tailles, de statuts juridiques et de secteurs d’activité, 780 entreprises adaptées se répartissent sur tout le territoire (dont 55 % ont un statut associatif et 45 % un statut commercial) et représentent environ 3 % de l’emploi de travailleurs handicapés (environ 35 000 salariés) recrutés majoritairement en CDI (86 % de CDI). Elles comptent en moyenne 40 salariés (18 % ont moins de 10 salariés, 1 % plus de 250) et 91 % des salariés accueillis en leur sein ont un niveau de qualification inférieur au bac ou sont, souvent en fin de parcours professionnel ou demandeurs d’emploi de longue durée.

1.1.  Les entreprises adaptées bénéficient d’un soutien public direct significatif

1.1.1.      Une activité de sous-traitance qui permet aux employeurs de s’acquitter partiellement de leur obligation d’emploi

Les entreprises privées et le secteur public peuvent remplir partiellement leur obligation d’emploi des travailleurs handicapés, définie à l’article L. 5212-2 du code du travail, en recourant à des contrats de fournitures, de sous-traitance ou de prestations de services avec les entreprises adaptées, en application de l’article L. 5212-6 du code du travail. La possibilité pour les employeurs privés et publics de s’acquitter partiellement de cette obligation a des effets directs sur les entreprises adaptées, selon les données du rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales sur les entreprises adaptées[136] :

1.1.2.      Un accès privilégié à la commande publique

Les entreprises adaptées bénéficient, dans le cadre rénové de la commande publique, de marchés réservés prévus à l’article 36 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.

De plus, les acheteurs publics peuvent faire de l’insertion professionnelle une obligation contractuelle (article 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015) en imposant aux entreprises soumissionnaires une clause sociale, généralement définie en nombre d’heures de travail confiées à des publics éloignés de l’emploi. Selon l’observatoire économique de l’achat public, 6,1 % des marchés publics supérieurs à 90 000 € hors taxes (HT) comportaient une clause sociale en 2013[138]. Les clauses sociales étaient présentes dans 10,2 % des appels d’offres des collectivités territoriales et dans 3,2 % des marchés de l’État.

1.1.3.      Le financement direct en progression entre 2011 et 2018

Dans le cadre du pacte pour l’emploi (2012-2014[139]) et du contrat de développement (2017-2021), les entreprises adaptées ont bénéficié d’une progression de leurs moyens qui s’est traduite par des crédits supplémentaires en loi de finances chaque année depuis 2011.

Le soutien de l’État aux entreprises adaptées s’est traduit par une dynamique forte de l’aide au poste permettant une  augmentation significative des effectifs de référence, passant de 19 536 équivalents temps plein (ETP) en 2011 à 24 036 ETP en 2018 en loi de finances et une relative stabilité de la subvention spécifique sur la même période.

1.2.  Un outil au service de l’insertion professionnelle des personnes handicapées dont les performances économiques et sociales sont contrastées

Le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales[140] relève que ces entreprises emploient plus couramment en contrat à durée indéterminée (CDI) que les entreprises dites classiques : les embauches en CDI représentant 21 % des flux de recrutement contre 8 % en moyenne dans le secteur privé. L’effort de formation moyen est plus de deux fois supérieur à l’obligation légale. En moyenne, elles y consacrent 2, 2 % de leur masse salariale.

Des dysfonctionnements et disparités ont par ailleurs été soulignés. Ainsi, a été mise en évidence une trop faible spécialisation du recrutement par rapport aux entreprises classiques  et 79 % des travailleurs handicapés placés en entreprise adaptée ont un niveau inférieur au niveau IV (contre 65 % pour l’ensemble des placements Cap Emploi en milieu ordinaire).

En outre, avec 38 % des salariés présents depuis plus de dix ans dans l’entreprise et de faibles sorties vers les autres entreprises, la performance sociale des entreprises adaptées, notamment en matière de mobilité externe s’avère insuffisante.

Leurs performances économiques sont par ailleurs hétérogènes (positionnements sectoriels plus ou moins pertinents, difficultés plus notables pour les entreprises adaptées sous forme associative).

Enfin, la mission souligne un mouvement de diversification essentiellement porté par les nouvelles entreprises adaptées conventionnées dans le secteur tertiaire et les services aux entreprises :

Les entreprises adaptées, créées le plus souvent sous forme commerciale, tendent à se positionner sur des secteurs innovants, en particulier dans le tertiaire et les services aux entreprises (hôtellerie/ restauration et tourisme, technologies de l’information, prestations de communication, services d’accueil et gestion de plateformes téléphoniques, saisie informatique ;

Une partie des nouvelles activités créées peuvent apparaitre en décalage avec le faible niveau de qualification et le fort taux d’illettrisme qui caractérisent majoritairement la population des travailleurs handicapés. Ce « décalage » suppose que ces entreprises déploient une politique de valorisation des compétences et de certification professionnelle en situation de travail ;

L’examen des comptabilités de 360 entreprises adaptées[141], et en particulier des soldes intermédiaires de gestion (valeur ajoutée, excédent brut d’exploitation et résultat d’exploitation), met en lumière l’incapacité de plus de 25 % d’entre elles à générer de l’excédent brut d’exploitation[142]. Cela signifie qu’au moins un quart des entreprises adaptées sous statut associatif majoritairement est incapable de générer des ressources de trésorerie du seul fait de leur exploitation. Leurs activités opérationnelles ne sont pas rentables.

Concernant les financements, l’aide au poste surcompenserait en moyenne le différentiel de productivité entre un travailleur handicapé et un salarié valide, la subvention spécifique est jugée trop complexe et peu lisible.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

L’État entend regarder le dispositif des entreprises adaptées à la fois comme un outil de la politique de l’emploi en faveur des personnes handicapées et comme un ensemble d’acteurs économiques contribuant au développement des territoires, pour une réponse territorialisée au défi de l’exclusion du marché du travail des personnes en situation de handicap.

Or, la performance sociale des entreprises adaptées est contrastée faute d’un encadrement clair des missions d’accompagnement socioprofessionnel et d’indicateurs associés. Le secteur adapté pris globalement présente des fragilités économiques.

Le soutien financier de l’État est complexe sans être suffisamment incitatif pour recentrer les recrutements vers les publics les plus éloignés de l’emploi et faciliter les passerelles vers les autres entreprises.

Enfin, le cadre de financement actuel des entreprises adaptées méconnait la règlementation européenne relative aux aides d’État. Il est donc nécessaire de sécuriser les aides accordées aux entreprises adaptées au regard de ce cadre communautaire.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent article a pour objectif d’ ancrer définitivement les entreprises adaptées dans la logique d’entreprise dont les activités de production ou de services s’inscrivent pleinement dans le secteur marchand, en renforçant leur responsabilité économique favorable au développement de l’emploi des personnes en situation de handicap.

3.         Dispositif retenu

Les dispositions de cet article s’organisent autour de trois principes :

1)     Simplifier :

-          les démarches administratives,

-          les dialogues de gestion entre l’État et les entreprises adaptées.

2)     Sécuriser :

-          garantir la transparence des procédures et sécuriser le processus d’agrément des entreprises adaptées,

-          donner une visibilité pluriannuelle aux entreprises adaptées.

3)     Valoriser :

-          encourager le développement d’un modèle entrepreneurial socialement et économiquement performant mesuré par des indicateurs adaptés,

-          positionner l’entreprise adaptée comme acteur économique concourant au développement des territoires.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

L’article proposé modifie l’architecture des articles suivants du code du travail afin de poser les bases de la rénovation du cadre financier et conventionnel des entreprises adaptées :

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Les dispositions envisagées doivent permettre une réelle simplification des mécanismes de conventionnement actuels des entreprises adaptées et renforcer leur responsabilité économique.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Les bénéfices suivants sont attendus au profit des entreprises adaptées :

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Bien que les entreprises adaptées soient des acteurs économiques ancrés dans les territoires et contribuent à leur développement par la création d’activités économiques, les dispositions du présent article du projet de loi ne créent aucune obligation à la charge des collectivités territoriales.

 Si les dispositions de l’article n’interdisent pas aux collectivités territoriales dans le périmètre de leurs compétences de déployer des interventions en faveur des entreprises adaptées, celles-ci seraient décidées dans l’exercice de leur libre administration. Ces interventions volontaires des collectivités n’appellent pas de mesure d’impact.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

On dénombre 780 entreprises adaptées. La répartition des entreprises adaptées n’est pas homogène sur le territoire comme le démontre le tableau ci-dessous :

La gestion des contrats d’objectif triennaux (première demande, suivi d’exécution ou renouvellement) représente  une charge de travail plus ou moins forte selon les régions. L’allongement de la durée de ce conventionnement devrait permettre de mieux répartir dans le temps les cycles entre renouvellement et suivi d’exécution d’un contrat d’objectif en cours.

4.5.  Impacts sociaux

4.5.1.      Impact sur les personnes en situation de handicap

En premier lieu, les dispositions du présent article sont exclusivement conçues pour favoriser l’accès ou la conservation d’un emploi aux travailleurs handicapés « sans emploi ou en risque de perte d’emploi ». La nouvelle rédaction notamment de l’article L. 5213-13-1 du code du travail doit permettre un recentrage des recrutements des entreprises adaptées sur les travailleurs handicapés présentant les caractéristiques d’éloignement voire d’exclusion du marché du travail en raison des conséquences de leur handicap.

En second lieu, les dispositions visant à reconnaitre aux entreprises adaptées une contribution au développement des territoires notamment par la création d’activités économiques, ouvrent la perspective d’une nouvelle perception des travailleurs handicapés comme une ressource et source de transformation des organisations de travail et de production pour devenir des environnements apprenants et d’acquisition de compétences en situation de travail.

4.5.2.      Impacts sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales relatif aux entreprises adaptées souligne la nécessite de promouvoir la mixité dans les activités développées par les entreprises adaptées.

Si le pourcentage des femmes dans les effectifs des travailleurs handicapés employés par les entreprises adaptées a connu des améliorations notables, il demeure insuffisant. La part de femmes dans les flux de recrutement s’établit à 35 %[143]. Ce déséquilibre contraste avec la parfaite parité des publics placés par Cap Emploi. La surreprésentation des hommes peut s’expliquer par les secteurs d’activité sur lesquels sont positionnées les entreprises adaptées (sous-traitance industrielle, logistique, espaces verts) traditionnellement perçus comme des secteurs « masculins ». Ce déséquilibre traduit également la persistance de stéréotypes, tant en ce qui concerne le projet des travailleuses elles-mêmes, que les procédures d’orientation et de recrutement.

Conformément aux engagements du contrat de développement signé en mars 2017, une attention particulière est déjà portée par les conseillers lors des recrutements opérés sur proposition du service public de l’emploi (SPE).

4.5.3.      Impacts sur la jeunesse

Les représentants du secteur ont pris l’engagement de favoriser le recrutement de jeunes en situation de handicap, en ayant recours notamment au contrat d’alternance (contrat d’apprentissage et contrat de professionnalisation).

Le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales sur les entreprises adaptées précise, en effet, que le recours aux contrats en alternance demeure rare en entreprise adaptée. Les motifs de non-recours seraient dus à la nature propre des dispositifs (temps de présence en entreprise insuffisant) et à des difficultés opérationnelles (identifier des candidats, complexité des procédures).

De manière générale, la part des travailleurs handicapés dans l’ensemble des entrées en contrats d’alternance reste marginale : moins de 1 % en 2014 (0,98 % pour l’apprentissage et 1,53 % pour les contrats de professionnalisation)[144].

4.6.  Impacts sur les particuliers

L’objectif est d’améliorer l’emploi des travailleurs reconnus handicapés, notamment par la mise en œuvre d’un cadre conventionnel rénové pour favoriser la réalisation du projet professionnel des salariés des entreprises adaptées.

 Les passerelles vers les autres entreprises sont par ailleurs sécurisées par l’existence de la clause de priorité de réembauche en cas de départ volontaire pour occuper un emploi dans une autre entreprise (hors entreprises adaptées).

Si le taux de sortie de l’entreprise adaptée est particulièrement faible (1 % en moyenne, seuls 6 % des entreprises dépassent le taux de 3 %)[145], le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales sur les entreprises adaptées démontre qu’il existe un gain financier à la reprise d’emploi, en comparant les dépenses réalisées par l’État au profit des travailleurs handicapés en entreprises adaptées[146] et celles pour les personnes handicapées sans emploi[147].

Selon les hypothèses retenues par la mission des inspections[148] :

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Le ministère du travail a engagé une concertation avec les représentants des entreprises adaptées dont l’Union nationale des entreprises adaptées, qui représente environ 70 % des entreprises adaptées, ainsi que l’ensemble des signataires du contrat de développement responsable et performant du secteur adapté signé le 9 mars 2017. Les propositions inscrites dans cet article sont le résultat des échanges menés durant le second semestre 2017 et le premier trimestre 2018.

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles à titre obligatoire et le Conseil national consultatif des personnes handicapées, en particulier sa commission emploi, sont consultés.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les dispositions de cet article entreront en vigueur au 1er janvier 2019.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article de loi s’applique sur l’ensemble du territoire, dans les départements d’outre-mer (y compris Mayotte pour lequel le code du travail est désormais applicable depuis le 1er janvier 2018), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités soumises au principe de l’identité législative posé par l’article 73 de la Constitution. Ces collectivités bénéficieront dès lors de l’application du présent projet de loi dans les mêmes conditions qu’en métropole.

Le présent article ne s’applique pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, ainsi que aux terres australes et antarctiques françaises.

Article 44 - Accessibilité des services de communication au public en ligne des organismes du secteur public

1.                  État des lieux

1.1.       Cadre général

L’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, modifiée par l’article 106 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, a introduit dans le corpus juridique français une obligation d’accessibilité des « services de communication au public en ligne des services de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent », ainsi que « [ceux] des organismes délégataires d'une mission de service public et des entreprises dont le chiffre d'affaires excède un seuil défini par le décret en Conseil d'État ».

En terme de contenus, l'accessibilité concerne l'accès à tout type d'information sous forme numérique, quels que soient le moyen d'accès, les contenus et le mode de consultation et, précision issue de la loi de 2016, concerne notamment les sites internet, intranet, extranet, les applications mobiles, les progiciels et le mobilier urbain numérique.

Depuis 2005, il est précisé que « les recommandations internationales pour l'accessibilité de l'internet doivent être appliquées pour les services de communication au public en ligne » mais qu’un décret en Conseil d’État fixe les règles relatives à l’accessibilité et les modalités de leur mise en œuvre. Celles-ci sont précisées par le décret n° 2009-546 du 14 mai 2009 et le Référentiel général d’accessibilité pour les administrations (RGAA), dont la première version est publiée par un arrêté du 21 octobre 2009 (la dernière mise à jour a été faite par l’arrêté du 29 avril 2015). Ces textes, notamment le référentiel, se réfèrent en conséquence aux recommandations internationales (WCAG) qui définissent notamment la nature des adaptations à mettre en œuvre. Les recommandations internationales étant cependant peu opérationnelles, il est difficile de les utiliser directement. C'est pour cette raison que l'État a mis à disposition le RGAA doté d'un référentiel technique permettant de vérifier la bonne application des règles internationales, à travers une série de critères et de tests. Dans sa version actuelle il constitue une méthodologie de vérification du respect des standards internationaux WCAG 2.0.

L’entrée en vigueur de l’obligation d’accessibilité a été fixée, respectivement, à deux et trois ans après la publication du décret de 2009, pour l’État et les établissements publics qui en dépendent et pour les collectivités territoriales et leurs établissements. Un délai de dix-huit mois est accordé pour faire la mise à jour vers toute nouvelle version du RGAA à compter de sa publication officielle.

Conformément à ce dispositif, le contrôle de conformité des sites internet au référentiel d’accessibilité se fait sur la base d’une déclaration en ligne des services publics. Depuis 2016, outre la déclaration, est prévue la publication d’un schéma pluriannuel de mise en accessibilité (trois ans) et d’une mention sur l’accessibilité à afficher sur la page d’accueil. Des sanctions sont prévues pour les sites non-conformes. Le décret d’application de l’article 106 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 n’a pas encore été publié : il doit permettre également d’opérer le reste de la transposition.

Au regard du champ d’application prévu au niveau législatif, le RGAA prévoit déjà des dérogations, en lien avec les recommandations internationales WCAG et la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH). Le RGAA intègre la notion d’obligation de conduire les seuls « aménagements raisonnables »[149] et liste des contenus exemptés de mise en accessibilité (contenus de tiers, contenus archivés ou obsolètes, contenus en plusieurs langues, etc.).

1.2.       Cadre conventionnel

1.2.1.      Cadre international

La France a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) et son Protocole facultatif en 2010 qui consacre l'accessibilité comme un droit humain et crée une obligation d'action pour inclure les personnes handicapées. L'article 9 de la CDPH cible précisément le numérique en indiquant que les États Parties doivent prendre des « mesures, parmi lesquelles figurent l'identification et l'élimination des obstacles et barrières à l'accessibilité » et que ces mesures « s'appliquent, entre autres […] aux services d'information, de communication et autres services, y compris les services électroniques et les services d'urgence. »

Elle précise que cette action doit consister en des « aménagements raisonnables », ainsi définie à l'article 2 : « On entend par « aménagement raisonnable » les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n'imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l'exercice, sur la base de l'égalité avec les autres, de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales ». Le lien avec la notion de « charge disproportionnée » est donc explicitement fait dans la CDPH. Réciproquement, quoique de manière moins directe, le considérant 39 de la directive nous semble pointer dans cette même direction : « les organismes du secteur public devraient appliquer les exigences en matière d'accessibilité énoncées dans la présente directive pour autant qu'elles ne leur imposent pas une charge disproportionnée. Cela signifie que, dans des cas justifiés, il pourrait s'avérer raisonnablement impossible à un organisme du secteur public de rendre un contenu totalement accessible. ».

1.2.2.      Cadre européen

Le cadre européen est fixé par la directive (UE) 2016/2102 du Parlement Européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relative à l'accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public dont le présent article vise à opérer la transposition. On note que la directive est d’harmonisation minimale, ce qui laisse donc une marge de manœuvre au Gouvernement pour maintenir le droit en vigueur quand bien même il accorderait plus de droits que la directive.

La directive s’attache principalement à :

2.        Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.       Nécessité de légiférer

Le présent article du projet de loi étend le champ de l’obligation d’accessibilité à tous les « organismes du secteur public » visés par la directive, dont la définition ne coïncide pas avec le champ actuel de l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005. La notion d’organisme du secteur public figurant dans la directive est très proche de celle qui ressort de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics (article 2), compte tenu de l’article de définition de la directive (UE) 2016/2102 du 26 octobre 2016 relative à l'accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public (article 3). Aussi, le choix a été fait de demeurer au plus proche de la notion de « pouvoir adjudicateur » telle qu’elle figure dans l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 (article 10) relative aux marchés publics portant transposition.

Pour reprendre strictement le champ prévu par la directive, il convient cependant de faire des modifications au regard de l’ordonnance n° 2015-899.

En effet, la définition d’organisme du secteur public, telle qu’elle ressort de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 et qui figure dans l’ordonnance n° 2015-899, ne couvre pas les associations « qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial » mais tous les organismes constitués « en vue de réaliser certaines activités en commun ».

Il convient d’en exclure les fournisseurs de services de médias audiovisuels et les organisations à but non lucratif n’accomplissant pas des services essentiels pour les usagers ou dédiés aux personnes handicapées. En effet, selon le 3. de l’article 1er de la directive, celle-ci « ne s'applique pas aux sites internet et applications mobiles (…) de diffuseurs de service public et de leurs filiales et d'autres organismes ou de leurs filiales accomplissant une mission de diffusion de service public et [à ceux] (…) des sites internet et applications mobiles des ONG qui ne fournissent pas de services essentiels pour le public, ni de services répondant spécifiquement aux besoins des personnes handicapées ou destinés à celles-ci ». Le considérant 23 de la directive précise le raisonnement du législateur européen s’agissant des diffuseurs publics, dont l’objectif est de maintenir sur un pied d’égalité diffuseurs publics et privés, placés dans une situation concurrentielle ; il convient, par ailleurs, de noter que les services audiovisuels ont leurs propres politiques en matière d’accessibilité. Le considérant 25 de la directive explicite l’exemption pour les organisations non gouvernementales (ONG) qui « fournissent des services qui ne sont pas essentiels au public, tels que des services qui ne sont pas directement mandatés par un État ou par des autorités régionales ou locales, ou des services qui ne répondent pas spécifiquement aux besoins des personnes handicapées en particulier » en indiquant que « pour éviter d'imposer une charge disproportionnée à de telles ONG, il convient que la présente directive ne s'applique pas à celles-ci »

Pour mémoire, la définition d’organismes du secteur public issue de la directive (UE) 2016/2102 couvre un champ très large :

En introduisant en 2016 dans le champ de l’obligation d’accessibilité, tous les organismes délégataires d’une mission de service public, la loi n° 2016-1321 avait déjà élargi fortement le champ des tributaires de cette obligation.

Parmi les « nouveaux entrants » dans le champ d’application de l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, non couverts jusqu’à maintenant, on dénombre :

Le présent article vient également apporter deux autres précisions en lien avec la directive.

En premier lieu, il introduit la notion de « charge disproportionnée » figurant dans la directive (article 5). Cette notion est proche de celle d’« aménagements raisonnables » et figure explicitement dans le « guide d’accompagnement » du référentiel d’accessibilité (RGAA), fixé par arrêté, dans le rappel de l’applicabilité des stipulations de la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations Unies (voir section 4.2.3. du guide).

Le fait de clarifier les critères pour déterminer une telle charge, comme l’impose la directive, est un progrès dans la mesure où il encadre l’exercice et ses dérogations et crédibilise l’obligation d’accessibilité. Ainsi,  la « charge disproportionnée » ne fait pas sortir l’organisme ou le site du champ de l’obligation d’accessibilité : si le site peut ne pas être accessible, il doit cependant en expliciter les raisons, de manière publique et les réévaluer régulièrement et doit, à ce titre, publier une déclaration d’accessibilité. Les critères fixés par la directive seront repris dans le décret d’application.

En second lieu, il supprime la référence aux recommandations internationales, puisque les normes de référence doivent désormais être les normes européennes visées par la directive : cette précision est renvoyée au décret en Conseil d’État. En 2005, la référence centrale est celle des normes dites Web Content Accessibility Guidelines (WCAG) dont le référentiel d’accessibilité reprend le cadre.

Or, la directive dans son article 6 inscrit une présomption de conformité pour le contenu des sites internet et des applications mobiles conformes à des normes harmonisées dont les références seront publiées au Journal officiel de l’Union européenne. À ce stade, cette publication n’a pas eu lieu, si bien que, comme le prescrit la directive, le niveau d'accessibilité doit être équivalent à celui garanti par la norme européenne EN 301 549 V1.1.2 (2015-04). Dans ce cadre, les normes de référence pour le secteur public français doivent évoluer : ce sont désormais ces normes européennes (quand bien même concrètement ces normes seront, d’après les annonces de la Commission européenne, compatibles avec les WCAG 2.0). La présomption liée aux normes européennes a vocation à apparaître dans le décret prévu au IV de l’article et les références précises figureront dans le référentiel fixé par arrêté (qui sera prévu dans le décret, comme c’est le cas dans le cadre du décret de 2009).

Enfin, le présent article modifie à la marge les matières dévolues au décret d’application.

D’une part, il renvoie au décret le soin de fixer les contenus numériques exemptés de l’obligation d’accessibilité, parmi les contenus exemptés par la directive au 4 de son article 1er.

D’autre part, il supprime la distinction qui y était faite entre les règles d’accessibilité et les « recommandations établies par l'autorité administrative compétente » qui devaient servir de référence pour ces règles. En effet, le dispositif actuel que le Gouvernement souhaite maintenir ne correspond pas à cet ordonnancement, puisque le décret n° 2009-546 du 14 mai 2009 pris en application de l'article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 prévoit directement un référentiel d'accessibilité, fixé par arrêté, qui détermine les règles techniques, sémantiques, organisationnelles et d'ergonomie que doivent respecter les services de communication publique en ligne. Les recommandations de l’autorité compétente sont devenues un référentiel (le RGAA) qui contient lui-même un ensemble de règles d’accessibilité permettant de mettre en œuvre hier les recommandations internationales WCAG et, demain, les normes européennes.

2.2.       Objectifs poursuivis

L’objectif du présent article du projet de loi est de transposer les dispositions de la directive nécessitant une intervention législative, sans revenir sur les choix faits par la représentation nationale en 2016.

Pour mémoire, l’objet de la directive est de constituer un marché unique de la prestation de services en matière d’accessibilité numérique au sein de l’Union, afin de faciliter le recours à de tels opérateurs par les organismes publics, et à terme, améliorer l’accessibilité globale des services publics en ligne en Europe.

3.        Dispositif retenu

Il s’agit d’une obligation de transposition d’une directive européenne. On peut cependant souligner que le Gouvernement fait le choix d’opérer une transposition a minima et de maintenir donc les équilibres trouvés par ailleurs en 2016.

4.        Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.       Impacts juridiques

Le principal impact juridique de la mesure est d’assurer la transposition de la directive (UE) 2016/2102 du Parlement Européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relative à l'accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public.

Le présent article s’inscrit dans un équilibre entre transposition stricte de la directive et maintien des évolutions législatives issues de la loi de 2016. Ainsi, le présent article reprend l’intégralité des exceptions organiques au champ de l’obligation d’accessibilité, ainsi que la notion de charge disproportionnée, mais conserve dans le même temps l’extension organique du champ de l’obligation réalisée en 2016 (délégations de service public et entreprises au-delà d’un certain seuil de chiffre d’affaires).

4.2.       Impacts sur les personnes en situation de handicap

Cette mesure a un impact positif pour les personnes en situation de handicap, dans la mesure où l’article a pour effet d’étendre le champ de l’obligation d’accessibilité à certains « organismes du secteur public » au sens de la directive qui n’étaient jusqu’alors pas soumis à l’obligation d’accessibilité. Il en est ainsi d’associations ou fondations dédiées aux personnes handicapées non délégataires de service public.

La rédaction issue de l’article clarifie l’inclusion de tous les groupements d’intérêt public dans le champ, que sont par exemple, net-entreprises, Info Retraite ou l’Agence du service civique.

Le texte opère également des limitations à l’obligation d’accessibilité, notamment en intégrant au niveau législatif la notion de charge disproportionnée, dérogation n’exemptant cependant pas de la déclaration d’accessibilité, ni d’une réévaluation régulière, la question des contenus exemptés étant renvoyée au décret d’application.

4.3.       Impacts économiques et financiers

Cette mesure a un impact marginal sur les organismes entrant d’ores et déjà dans le champ d’application de l’article 47 de la loi de 2005 susmentionné, à la suite de la loi de 2016. Quelques contenus supplémentaires, au regard des contenus actuellement dérogés au titre du RGAA (en application des WCAG), sont susceptibles d’être exemptés de l’obligation d’accessibilité, la constitution de la liste précise étant renvoyée au décret d’application.

S’agissant des charges de mise en conformité des « nouveaux entrants » dans le champ d’application de l’article 47, l’obligation d’accessibilité s’applique sous réserve d’une charge disproportionnée pour l’organisme en question, celle-ci devant être régulièrement réexaminée, ce qui devrait permettre de limiter les situations de transition brutale problématiques. En outre, pour ces mêmes organismes, une entrée en vigueur progressive est prévue par la voie du décret d’application.

4.4.  Impacts sur les collectivités territoriales

Cette mesure produit des simplifications pour les collectivités territoriales. Ainsi, il est créé une dérogation pour « charge disproportionnée » qui permettra, notamment, de tenir compte de la taille, des ressources et de la nature de l'organisme du secteur public concerné, les critères étant renvoyés à la voie réglementaire. Comme précisé, ci-avant, la section 4.2.3 du Référentiel général d’accessibilité pour les administrations (RGAA) comprenait déjà une référence aux « aménagements raisonnables » mais cette dérogation n’était pas appliquée par les organismes concernés, faute de méthodologie opposable

S’agissant d’une éventuelle extension de l’obligation à certains organismes rattachés aux collectivités territoriales, jusqu’alors non soumis à l’obligation d’accessibilité, depuis 2005 étaient concernés les collectivités, leurs établissements publics et, depuis 2016, leurs délégataires de service public. Or, la directive ne vise dans son champ que les organismes « créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial », qu’il s’agisse de personnes privées financées ou contrôlées par une collectivité ou d’associations entre organismes publics. Dans ce cadre, les sociétés d’économie mixte et sociétés publiques locales relevant du champ de la directive sont délégataires de service public et d’ores et déjà couvertes par l’obligation en tant que délégataires, au titre de la loi actuelle.

La seule extension concerne des associations entre collectivités ou organismes leur étant rattachés, créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général non délégataires de service public, comme les associations nationales de collectivités.

5.        Consultations et modalités d’application

5.1.       Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) a été consulté au titre de l’article de l’article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales.

5.2.       Modalités d’application

Le Gouvernement prévoit de prendre, afin d’assurer l’application de l’article, un décret en Conseil d’État permettant de modifier le décret n° 2009-546 du 14 mai 2009 pris en application de l'article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 (décret en Conseil d’État qui doit également être modifié dans le cadre de l’application de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique).

Article 45 - Amélioration de la disponibilité de documents adaptés

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

La directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 a autorisé les États membres à créer un certain nombre de limitations et exceptions aux droits exclusifs des auteurs d’autoriser ou d’interdire la reproduction et la communication au public de leurs œuvres, notamment « lorsqu'il s'agit d'utilisations au bénéfice de personnes affectées d'un handicap qui sont directement liées au handicap en question et sont de nature non commerciale, dans la mesure requise par ledit handicap ».

La loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information a transposé « l’exception handicap » au droit d’auteur au 7° de l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle.

Pour toutes les œuvres de l’esprit mentionnées à l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle, l’exception handicap permet aux organismes titulaires d’un agrément ministériel de produire des versions adaptées des œuvres protégées, sans autorisation préalable ni rémunération des titulaires des droits, afin de les mettre à disposition des personnes handicapées.

Dans le domaine de l’édition (livres, partitions musicales, presse), l’exception handicap permet en outre à certains de ces organismes agréés de produire des versions adaptées des œuvres imprimées à partir des fichiers numériques ayant servi à leur édition. Il s’agit de la dimension potentiellement la plus efficace du dispositif de l’exception, dans la mesure où l’adaptation à partir des fichiers numériques, en principe beaucoup plus aisée et rapide qu’à partir des œuvres imprimées, devrait permettre d’accroître de manière significative le volume des œuvres adaptées.

Le dispositif de l’exception handicap n’a toutefois été mis en œuvre que quelques années plus tard, les dispositions réglementaires d’application ayant été prises, s’agissant du dispositif général, par le décret n° 2008-1391 du 19 décembre 2008, et, s’agissant du dispositif particulier relatif au dépôt des fichiers numériques, par le décret n° 2009-131 du 6 février 2009 qui désigne la Bibliothèque nationale de France comme organisme dépositaire de ces fichiers. En pratique, le dispositif n’est pleinement opérationnel que depuis juin 2010, date de l’ouverture de la plate-forme « PLATON » de la Bibliothèque nationale de France, sur laquelle les fichiers numériques des œuvres déposés par les éditeurs peuvent être téléchargés par les organismes agréés afin d'être adaptés dans différents formats accessibles (la lecture en braille ou en très gros caractères écoute en synthèse vocale).

La ministre de la culture et de la communication a souhaité disposer d’un bilan de la mise en œuvre de ce dispositif et d’une analyse des besoins non couverts dans le cadre juridique actuel, ainsi que de propositions permettant d’améliorer le dispositif.

Ce bilan a été dressé par l'Inspection générale des affaires culturelles dans un rapport de mai 2013 : « Exception "handicap" au droit d'auteur et développement de l'offre de publications accessibles à l'ère numérique ».

Les préconisations de ce rapport constituent la base de l’amélioration du dispositif français d’accès des personnes aveugles, déficientes visuelles, ou atteintes d’autres handicaps entraînant des difficultés de lecture des œuvres publiées qui a été introduite par l’article 33 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.

Cette loi a modifié le cadre législatif en poursuivant trois objectifs :

1.2.       Cadre conventionnel

Le traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle du 27 juin 2013, dit « traité de Marrakech » visant à faciliter l'accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées. Il a été conclu lors de la Conférence diplomatique qui s'est tenue à Marrakech du 17 au 28 juin 2013 et a été signé par la France le 30 avril 2014.

Le traité établit un ensemble de règles internationales qui garantissent l’existence, au niveau national, de limitations ou d’exceptions au droit d’auteur en faveur des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés, et qui permettent l’échange transfrontière des exemplaires en format accessible d’œuvres publiées qui ont été réalisés en application d’une limitation ou d’une exception au droit d’auteur sur le territoire d'un État partie au traité.

Le traité exige ainsi des Parties contractantes qu’elles autorisent, dans certaines conditions, l’importation et l’exportation d'exemplaires en format accessible. En ce qui concerne l’importation, lorsqu’un exemplaire en format accessible peut être réalisé conformément à la législation nationale, un exemplaire peut aussi être importé sans l'autorisation du titulaire du droit. Pour ce qui est de l'exportation, les exemplaires en format accessible réalisés en vertu d'une limitation, d'une exception ou d'une autre disposition législative peuvent être distribués ou mis à la disposition d'une personne bénéficiaire ou d'une entité autorisée dans une autre partie contractante par une entité autorisée. Cette limitation ou exception impose que les œuvres soient utilisées exclusivement par les personnes bénéficiaires.

Le 14 septembre 2016, la Commission européenne a présenté deux instruments visant à mettre en œuvre le traité de Marrakech.

Le règlement (UE) 2017/1563 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2017 relatif à l'échange transfrontalier, entre l'Union et des pays tiers, d'exemplaires en format accessible de certaines œuvres et d'autres objets protégés par le droit d'auteur et les droits voisins en faveur des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés : le règlement vise à faire en sorte que les exemplaires en format accessible produits dans les États membres conformément aux dispositions nationales arrêtées en application de la directive 2017/1564 puissent être exportés vers des pays tiers parties au traité de Marrakech. En outre, elle autorise l’importation d’exemplaires en format accessible produits dans des pays tiers parties au traité de Marrakech, et conformément à celui-ci, au profit des bénéficiaires dans l’Union. Les bénéficiaires et les entités autorisées établis dans l’Union doivent avoir la possibilité d’obtenir de tels exemplaires, qui doivent pouvoir circuler dans le marché intérieur aux mêmes conditions que les exemplaires en format accessible produits dans l’Union conformément aux dispositions nationales adoptées en application de la directive 2017/1564.

La directive (UE) 2017/1564 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2017 sur certaines utilisations autorisées de certaines œuvres et d'autres objets protégés par le droit d'auteur et les droits voisins en faveur des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés et modifiant la directive 2001/29/CE sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information : la directive met en œuvre, de manière harmonisée, les obligations qui incombent à l'Union au titre du traité de Marrakech afin que les mesures correspondantes soient appliquées de façon cohérente dans l'ensemble du marché intérieur. La directive consacre donc une exception obligatoire aux droits qui sont harmonisés par le droit de l'Union et qui sont pertinents pour les utilisations et les œuvres régies par le traité de Marrakech. Elle vise, par ailleurs, à garantir que les exemplaires en format accessible réalisés dans un État membre puissent être disponibles dans tous les États membres, afin d'en assurer une plus grande disponibilité dans l'ensemble du marché intérieur.

2.        Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.       Nécessité de légiférer

La directive 2017/1564 doit être transposée au plus tard le 11 octobre 2018. En cas de non-respect de cette échéance, la France pourra faire l’objet d’un recours en manquement par la Commission européenne, devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Le manquement prononcé par la Cour aboutit le plus souvent à une condamnation de l’État membre, lui demandant de se conformer à ses obligations et, le cas échéant, à des sanctions pécuniaires. Le Traité de Lisbonne a accéléré le mécanisme de sanctions pécuniaires (somme forfaitaire et/ou astreinte) en permettant à la Cour de justice d’infliger, dès le stade du premier arrêt en manquement, des sanctions pécuniaires en cas de non communication à la Commission européenne des mesures nationales de transposition d’une directive.

2.2.       Objectifs poursuivis

Bien que le code de la propriété intellectuelle réponde déjà, depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, de manière satisfaisante aux nouvelles exigences du droit de l’Union, certaines adaptations s’avèrent toutefois nécessaires. Ces adaptations s’inscrivent dans le cadre d’une transposition stricte de la directive 2017/1564.

Le présent article projet de loi vise à modifier le code de la propriété intellectuelle, en créant notamment de nouvelles dispositions au niveau législatif.

Il autorise les personnes atteintes d’une déficience, d’une part à réaliser, par elles-mêmes ou par l’intermédiaire d’une personne physique agissant en leur nom, des documents adaptés à leurs besoins, et d’autre part à recevoir directement des documents adaptés dans un autre État membre sans passer par l’intermédiaire d’organismes tiers. 

Le présent article précise, par ailleurs, l’encadrement des échanges transfrontières des documents adaptés au sein de l’Union européenne.

3.        Options possibles et dispositif retenu

3.1.       Options envisagées

Les options sont précisément arrêtées par le traité de Marrakech et la directive 2017/1564.

Le traité de Marrakech maintient néanmoins la possibilité de définir, en partie, les conditions dans lesquelles une entité peut être qualifiée d’« entité autorisée » au sens du traité et procéder à des adaptations d’œuvres et à des échanges transfrontières de formats adaptés.

Le guide de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle « Principales dispositions et avantages du traité de Marrakech » de 2016 précise en effet que « le Traité de Marrakech n’exige pas d’une organisation qu’elle accomplisse des formalités ou qu’elle suive une procédure particulière pour être reconnue en tant qu’« entité autorisée ». Cependant, le traité n’interdit pas de telles mesures et donne par conséquent aux États membres une certaine marge de manœuvre quant aux procédures pouvant être prévues à l’échelle national ».

3.2.       Option retenue

Le code de la propriété intellectuelle précise actuellement que la possibilité de réaliser des formats adaptés en application de l’exception est réservée aux structures inscrites sur une liste arrêtée conjointement par les ministres chargés de la culture et des personnes handicapées. La liste de ces structures est établie au vu de leur activité professionnelle effective de conception, de réalisation ou de communication de documents adaptés au bénéfice des personnes empêchées de lire et par référence à leur objet social, à l'importance des effectifs de leurs membres ou de leurs usagers, aux moyens matériels et humains dont ils disposent et aux services qu'ils rendent.

Le présent article du projet de loi maintient et adapte cette procédure afin de s’assurer du respect des obligations imposées par l’article 5 de la directive 2017/1564 aux entités autorisées[150].

Cette procédure concernant les « entités autorisées » est sans préjudice de la possibilité pour les personnes empêchées de lire de revendiquer le bénéfice de l’exception pour adapter une œuvre elles-mêmes, ou via une personne physique agissant en leur nom.

4.        Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.       Impacts juridiques

4.1.1.       Impacts sur l’ordre juridique interne

Le présent article du projet de loi modifie le 7° de l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle pour prévoir la réalisation du format accessible par à une personne atteinte d’une déficience l’empêchant de lire ou par l’intermédiaire d’une personne physique agissant en son nom.

Il modifie également l’article L. 122-5-1 du code de la propriété intellectuelle pour encadrer les échanges transfrontières des documents adaptés au sein de l’Union européenne

Enfin, la mesure envisagée a pour effet de modifier l’article L. 122-5-2 du code de la propriété intellectuelle afin de prévoir la communication de documents adaptés à une personne atteinte d’une déficience l’empêchant de lire par une entité autorisée établie dans un autre État membre de l’Union européenne ou un État partie au traité de Marrakech. Elle supprime, en outre, la condition de l’existence de l’exception.

4.1.2.       Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Le présent article du projet de loi transpose les dispositions de la directive (UE) 2017/1564 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2017 sur certaines utilisations autorisées de certaines œuvres et d'autres objets protégés par le droit d'auteur et les droits voisins en faveur des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés.

4.2.       Impacts économiques et financiers

4.2.1.       Impacts macroéconomiques

En ce qui concerne les échanges de formats adaptés, qu'ils se fassent entre entités autorisées nationales ou à l'exportation, ils ne doivent pas porter atteinte à l'exploitation normale de l’œuvre ni causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur ou de ses ayants-droit, notamment les éditeurs. En effet, la mise en œuvre de l’exception reste soumise au test en trois étapes en raison des obligations internationales et communautaires de la France et, pour ce qui est des exportations de formats adaptés, elles sont soumises aux conditions de l'article 5 du traité de Marrakech.

Dans ce cadre, les échanges ne devraient pas avoir d'impact économique, ou sinon un préjudice économique minime imposé aux titulaires de droits.

4.2.2.       Impacts sur les entreprises

Le présent article ne créé pas pour les éditeurs de contraintes supplémentaires par rapport à celles qui pèsent sur eux depuis la réforme de 2006.

Le paysage des structures adaptatrices est largement dominé par la présence d'associations (70 %) puis de collectivités ou d'établissements publics (24 %) et enfin par les fondations ou coopératives.

La possibilité d’échanger des fichiers adaptés au sein de l’Union européenne va alléger la charge de travail de ces structures, permettre d’accroître le nombre d’œuvres adaptées et contribuer à rationaliser le travail d'adaptation des structures.

4.3.       Impacts sur les personnes en situation de handicap

Dans sa proposition initiale de directive de septembre 2016, la Commission européenne relève que : « les bénéficiaires du traité de Marrakech, à savoir les aveugles, les déficients visuels et les personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés (les «personnes bénéficiaires») se heurtent à de nombreux obstacles pour accéder aux livres et autres documents imprimés protégés par le droit d’auteur et les droits voisins. La disponibilité de livres dans des formats accessibles aux personnes ayant un handicap de lecture est estimée entre 7 % 2 et 20 %, en dépit du fait que la technologie numérique améliore grandement l’accessibilité des publications ».

Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, de l'Inspection générale des affaires culturelles et de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche[151] a mis en évidence la persistance de l’enjeu de l’augmentation de l’offre d’édition adaptée. Les chiffres évoqués vont de 5 % à 10 % d’œuvres accessibles sur une production annuelle de 80 000 titres pour une population d’utilisateurs déclarés, estimée à 25 000 personnes.

La possibilité offerte, d’une part, aux personnes physiques affectées d’une déficience qui les empêche de lire d’adapter elles-mêmes les œuvres à leur seul profit ou de se faire communiquer une œuvre adaptée dans un autre État membre et, d’autre part, aux entités autorisées de procéder à des échanges transfrontières de formats adaptés permettra de mieux répondre au besoin d’adaptation susmentionné.

5.         Modalités d’application

5.1.1.       Application dans le temps

Il est prévu une entrée en vigueur immédiate du présent article du projet de loi.

5.1.2.       Application dans l’espace

Le présent article est applicable de plein droit dans les collectivités suivantes : Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et les Terres australes et antarctiques françaises.

Il ne s’appliquera ni en Polynésie française, ni en Nouvelle-Calédonie.

En application du principe de spécialité législative, le texte comprend une mention expresse d’applicabilité aux îles Wallis et Futuna, à l’image des dispositions déjà existantes concernant l’exception au droit d’auteur en faveur des personnes handicapées, qui ont fait l’objet d’une extension à cette collectivité et y sont donc applicables.

5.1.3.       Textes d’application

La mise en œuvre du dispositif légal envisagé appelle l’intervention d’une mesure réglementaire d’application.

Il conviendra notamment de modifier le 3° de l’article R. 122-13, le III de l’article R. 122-16, le III de l’article R. 122-17 du code de la propriété intellectuelle qui tiraient la conséquence de la possibilité offerte depuis 2017 aux structures agrées de procéder à des échanges transfrontières de formats adaptés mais uniquement sur une base conventionnelle.


Article 46 - Inclure dans la représentation des salariés les bénéficiaires de contrats uniques d’insertion

1.         État des lieux et necessite de legiferer

Aux termes des 2° et 4° de l’article L. 1111-3 du code du travail, dans leur rédaction actuelle, les salariés en contrat unique d’insertion, sous la forme d’un contrat initiative-emploi dans le secteur marchand ou d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi dans le secteur non marchand, ne sont pas pris en compte dans le calcul des effectifs de l’entreprise qui les a recrutés pendant la durée de l’aide financière attribuée à cette entreprise pour ces recrutements.

Ces dispositions permettent aux entreprises de recruter des salariés en contrat aidé sans pour autant franchir des seuils d’effectifs qui majoreraient leurs charges sociales et fiscales. Elles ont aussi pour effet de priver l’ensemble des salariés des institutions représentatives du personnel qui pourraient être mises en place en raison de l’effectif physique réel de ces entreprises.

Or, la privation des bénéficiaires de contrats aidés du droit à la représentation au sein d’une entreprise a été jugée contraire au droit européen par la Cour de justice de l’Union européenne dans son avis rendu le 15 janvier 2014 dans le cadre d’une question préjudicielle (arrêt Association de médiation sociale c/ Union locale des syndicats CGT et autres n°C-176/12). En effet, l’article 3§1 de la directive 2002/14/CE relative à l’information et la consultation des travailleurs dans les entreprises écarte l’exclusion d’une catégorie déterminée de travailleurs pour calculer les seuils de mise en place des institutions représentatives du personnel.

Ainsi, à la suite d’une mise en demeure adressée à la France par la Commission le 18juin 2015 (2015/2036, C(2015) 3986 final), les autorités françaises se sont engagées à mettre en conformité la législation française.

L’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, seul ou en combinaison avec les dispositions de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002, établit un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne.

Ainsi, l’exclusion en droit français, des titulaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et de contrats initiative emploi (CIE) du calcul des effectifs pour ce qui est de la mise en place des institutions représentatives du personnel prévu par l’article L. 1111-3 du code du travail, a été jugé contraire à ce cadre conventionnel.

2.         Objectifs poursuivis

La présente mesure vise à mettre en conformité l’article L. 1111-3 du code du travail avec l’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, par là même, assurer le droit à la représentation au sein des entreprises des titulaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et de contrats initiative emploi (CIE).

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Le Gouvernement a envisagé de modifier directement  l’article L. 1111-3 du code du travail pour le mettre en conformité avec l’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Cette solution aurait eu le mérite de rendre  l’article L. 1111-3 compatible avec l’article 27 susmentionné mais la prise en compte des salariés en contrat unique d’insertion ferait franchir à certaines entreprises des seuils d’effectifs qui entraîneraient une majoration de leurs charges sociales ou fiscales, dont il ne résulterait aucune harmonisation avec le droit de l’Union européenne et qui sortirait de l’objet de la mise en demeure de la Cour de justice de l’Union européenne.

Le Gouvernement a également envisagé de prendre en compte des titulaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et de contrats initiative emploi (CIE) t s’agissant des seules dispositions relatives aux instances représentatives du personnel  au-delà du seuil de cinquante salariés – Si cette option est conforme au cadre européen qui n’impose de seuil (11, 20, 50) de prise en compte des salariés, elle aurait été source de complexité pour les entreprise.

3.2.  Option retenue

Le Gouvernement a privilégié l’insertion un titre préliminaire dans le livre III du code du travail intitulé « Les institutions représentatives du personnel » en ajoutant une disposition privant l’article L. 1111-3 de tout impact sur la représentation du personnel.

Cette solution rend applicable en droit français l’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Ainsi, les titulaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et de contrats initiative emploi (CIE) seront pris en compte dans le calcul des effectifs mais pour les seules dispositifs du livre III de la 2ème partie du code du travail, c’est-à-dire celles relatives aux instances représentatives du personnel sans incidence sur les charges sociales et fiscales de ces entreprises.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La présente disposition conduira à insérer un titre préliminaire dans le livre III du code du travail et de donner la possibilité d’invoquer l’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans les litiges entre particuliers.

Cette modification permettra de mettre  en conformité le code du travail en conformité avec le droit de l’Union européenne.

4.2.  Impacts économiques et financiers

La prise en compte des titulaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) et de contrats initiative emploi (CIE) dans le décompte des effectifs des entreprises pour les seules dispositions relatives aux instances représentatives du personnel laisse les charges sociales et fiscales auxquelles les entreprises sont soumises inchangées tout en permettant la mise en place d’institutions représentatives du personnel.

Toutefois, il pourrait y avoir pour effet indirect une baisse de l’attractivité du dispositif auprès des structures de droit privé (secteur marchand et associatif) liée à l’obligation nouvelle pour les entreprises de mettre en place ces institutions dès lors que la prise en compte des contrats uniques d’insertion  engendrerait un passage de seuil.

5.         Consultations menées

Sont consultés :

 

 

Chapitre 2 – Moderniser la gouvernance et les informations relatives à l’emploi

Article 47 - Création du comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi

1.         État des lieux

Le Conseil national de l’insertion par l’activité économique, créé par l’article 9 de la loi n° 91-1 du 3 janvier 1991, est placé sous l’autorité du Premier ministre. Le décret n° 91- 422 du 7 mai 1991 modifié, relatif au Conseil national de l’insertion par l’activité économique, en détermine les règles d’organisation et de composition.

Cette instance constitue un lieu d’échanges et de concertation pour l’ensemble des acteurs de l’insertion par l’activité économique. Il peut être consulté par le Gouvernement sur toute question relative à l’insertion par l’activité économique et aux politiques de l’emploi.

Ses missions sont précisément les suivantes :

Le conseil est composé de quarante-deux membres répartis en quatre collèges :

 

Les personnalités qualifiées, les représentants des partenaires sociaux et les élus, ainsi que le président du Conseil national de l’insertion par l’activité économique, sont nommés pour trois ans par arrêté du Premier ministre.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

L’existence d’une instance nationale en matière d’insertion par l’activité économique étant prévue par l’article 9 de la loi n° 91-1 du 3 janvier 1991, une disposition législative est nécessaire pour la supprimer.

Cette instance sera remplacée par un Comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi dont la création relève du décret.

2.2.  Objectifs poursuivis

Dans le cadre des réformes de la politique d’inclusion professionnelle, le gouvernement souhaite promouvoir une approche décloisonnée des dispositifs d’insertion. Dès lors, il apparait nécessaire de supprimer le Conseil national de l’insertion par l’activité économique et de le remplacer par une nouvelle instance à la composition, au fonctionnement et au champ d’activité modifié. Cette substitution fait suite également à la publication le 16 janvier 2018 du rapport « donnons-nous les moyens de l’inclusion »[152] dont la nouvelle instance pourra suivre de la mise en œuvre des recommandations.

Ainsi, l’objet de ce comité qui pourrait se nommer le Comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi sera de couvrir, de manière large, la notion d’inclusion dans l’emploi par-delà l’insertion par l’activité économique, en englobant dans la réflexion les entreprises adaptées, les entreprises agréées « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS), les parcours emploi compétences ou encore les clauses sociales. De manière extensive, le comité pourra s’emparer de toute question relevant des méthodes inclusives des entreprises.

En complément, un  lieu d’échange avec les acteurs de l’insertion par l’activité économique, parmi lesquelles les têtes de réseau, sera maintenu. Celui-ci prendra la forme d’un comité technique ou d’un groupe de travail régulier  qui ne nécessite pas de fondement juridique. Ce serait un lieu qui permettra de traiter des sujets spécifiques à l’insertion par l’activité économique en lien avec le comité d’orientation.

La suppression du Conseil national de l’insertion par l’activité économique conduira à une modification des règles de composition de certaines instances telles que le Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire au sein duquel le Conseil national de l’insertion par l’activité économique dispose en droit positif de deux sièges.

3.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1.  Impacts économiques et financiers

Les moyens financiers jusqu’alors dévolus au Conseil national de l’insertion par l’activité économique (3 738 € de dotation en 2017) pourront être réalloués.

3.2.  Impacts sur les services administratifs

La Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle assurant le secrétariat général du Conseil national de l’insertion par l’activité économique, une activité similaire pourrait être maintenue auprès du Comité d’orientation de l’inclusion dans l’emploi.

4.         Consultations menées

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CNEFOP) est consulté en application de l’article L. 6123-1 du code du travail.

 

 


Article 48 - Suppression de la mention relative à la participation des missions locales aux maisons de l’emploi

1.         État des lieux

Créé par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, le dispositif des maisons de l’emploi devait initialement fédérer l’action locale des partenaires publics et privés en faveur de l’emploi, de la formation, de l’insertion et du développement économique et contribuer à mieux ancrer le service public de l’emploi dans les territoires. Depuis la création de Pôle emploi en 2008, les maisons de l’emploi ne constituent plus le guichet unique de l’emploi. Plusieurs opérateurs du service public de l’emploi sont chargés de l’accompagnement des demandeurs d’emploi : Pôle emploi, les missions locales, Cap emploi et l’Association pour l'emploi des cadres (APEC).

La labellisation des maisons de l’emploi a en conséquence été arrêtée en 2009 et les missions ouvrant droit à un financement de l’État ont été progressivement concentrées sur deux axes, excluant l’accompagnement des demandeurs d’emploi :

En 2018, au vu des missions très variables et territorialisées des maisons de l’emploi et des besoins prioritaires incombant par ailleurs à la mission « emploi-travail », le choix a été fait, dans un contexte de contraction des finances publiques, de poursuivre le retrait du financement de ces structures par l’État, dans la continuité des exercices budgétaires précédents.

Le retrait par l’État du financement des maisons de l’emploi n’entraîne pas la disparition des maisons de l’emploi actuelles qui conservent leur label « maison de l’emploi » et peuvent poursuivre leurs activités, financées par d’autres contributeurs que l’État.

Aujourd’hui, les relations qu’entretiennent les maisons de l’emploi avec les autres acteurs locaux de l’emploi, notamment les missions locales, sont variées. Les acteurs doivent ainsi pouvoir s’adapter au plus près des spécificités du marché du travail local et des besoins du territoire. L’article L. 5314-3 du code du travail qui définit les relations entre les maisons de l’emploi et les missions locales limite leur capacité et leur dynamique de transformation. Il n’apparaît ainsi plus de mise au regard de l’évolution des missions des maisons de l’emploi.  

La suppression de cet article augmenterait les possibilités d’évolution des relations entre les maisons de l’emploi et les missions locales.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

La relation entre les missions locales et les maisons de l’emploi étant définie à l’article L. 5314-3, une disposition législative supprimant cette définition est requise.

2.2.  Objectifs poursuivis

La suppression de cet article L. 5314-3 permettrait de réaliser une évolution adaptée à la situation actuelle des relations entre les maisons de l’emploi et les missions locales.

3.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

La disposition législative donnera de la flexibilité aux collectivités territoriales en termes d’organisation et de missions réalisées par les acteurs de l’emploi présents sur leur territoire. Elle leur permettant notamment d’adapter les relations entre les maisons de l’emploi et les missions locales au plus près de leurs besoins et de leurs spécificités.

4.         Consultations et modalités d’application

4.1.  Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) est consulté en application de l’article L. 6123-1 du code du travail.

4.2.  Modalités d’application

4.2.1.      Application dans le temps

La disposition législative entrera en vigueur au lendemain de la publication de la loi.

4.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article est applicable sur l’ensemble du territoire de la République française, y compris dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.


Article 49 - Gouvernance de Pôle emploi

Mesure 1 : Fonctionnement du conseil d’administration de Pôle emploi

1.         État des lieux

La possibilité d’un vote par procuration au sein du conseil d’administration de Pôle emploi a été introduite par le décret n° 2014-524 du 22 mai 2014 portant modification des règles relatives à l’organisation et au fonctionnement de Pôle emploi. Le deuxième alinéa de l’article R. 532-16 du code du travail dispose désormais « Le vote par procuration est admis. Un membre du conseil ne peut être porteur que d'une procuration ». Il a également été précisé que « les décisions sont prises à la majorité des membres présents ou représentés ».

S’agissant toutefois du vote du budget, ainsi que des décisions relatives aux emprunts et encours maximaux des crédits de trésorerie, le deuxième alinéa de l’article L. 5312-5 du code du travail continue de prévoir que ces décisions sont prises selon une majorité qualifiée de membres présents.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Les conditions de majorité qualifiée requises pour les décisions relatives au budget, aux emprunts et encours maximaux des crédits de trésorerie étant fixées à l’article L. 5312-5 du code du travail, une disposition législative prévoyant la possibilité d’un vote par procuration pour ces décisions est nécessaire.

2.2.  Objectifs poursuivis

La modification de cet article L. 5312-5 du code du travail permettrait un fonctionnement sécurisé du conseil d’administration de Pôle emploi et lèverait une contradiction entre des dispositions législatives et réglementaires.

3.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure envisagée a un impact administratif sur le fonctionnement du conseil d’administration de Pôle emploi : elle permet de réunir plus aisément la majorité qualifiée de deux tiers des membres pour le vote du budget et les décisions relatives aux emprunts et encours maximaux des crédits de trésorerie. Elle permet également d’étendre à ces décisions les possibilités de vote par procuration déjà existantes dans les autres matières. La mesure nécessitera de modifier le règlement intérieur du conseil d’administration de Pôle emploi.

4.         Consultations et modalités d’application

4.1.  Consultations menées

Sont consultés :

4.2.  Modalités d’application

4.2.1.      Application dans le temps

La disposition législative entrera en vigueur dès sa publication.

4.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article est applicable sur l’ensemble du territoire de la République française, y compris dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.


Mesure 2 : Organisation de Pôle emploi

1.         État des lieux

Pôle emploi comprend des établissements n’ayant pas la nature d’une direction régionale. Outre la direction générale (siège), il s’agit de Pôle emploi services et de la direction des systèmes d’information. Le conseil d’administration de Pôle emploi a compétence pour créer ces établissements. Le 7° de l’article R. 5312-6 du code du travail a été modifié en ce sens par le décret n° 2014-524 du 22 mai 2014 portant modification des règles relatives à l’organisation et au fonctionnement de Pôle emploi. Il dispose désormais : « Le conseil d'administration (…) délibère sur : 7° Les conditions générales d'organisation et de fonctionnement de Pôle emploi, en particulier la création ou la suppression d'établissements à compétence nationale ou spécifique ».

Ces établissements à compétence nationale ou spécifique sont ignorés de la partie législative du code du travail. L’article L. 5312-10 du code du travail prévoit en effet que « L’institution est organisée en une direction générale et des directions régionales ».

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

L’organisation de Pôle emploi étant déterminée à l’article L. 5312-10 du code du travail, une disposition législative prévoyant l’existence d’établissements à compétence nationale ou spécifique est requise.

2.2.  Objectifs poursuivis

La modification de cet article L. 5312-10 permettrait un fonctionnement sécurisé de Pôle emploi, en consolidant en particulier les pouvoirs propres et possibilités de délégation des directeurs de ces établissements tels que prévus aux articles R. 5312-25 et R. 5312-26 du code du travail. Une contradiction entre des dispositions législatives et réglementaires serait également levée.

3.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure envisagée a un impact juridique et organisationnel sur le fonctionnement de Pôle emploi : elle sécurise les pouvoirs propres (autorité hiérarchique sur le personnel, représentation de Pôle emploi dans ses relations avec les usagers et dans les actions en justice) et les possibilités de délégation aux directeurs de Pôle emploi services et de la direction des systèmes d’information, au même titre qu’un directeur régional de Pôle emploi.

4.         Modalités d’application

4.1.  Application dans le temps

La disposition législative entrera en vigueur dès sa publication.

4.2.  Application dans l’espace

Le présent article est applicable sur l’ensemble du territoire de la République française, y compris dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.

Chapitre 3 - Mesures relatives au détachement des travailleurs et à la lutte contre le travail illégal

Articles 50 et 51 - Adaptation des exigences administratives pour certaines situations de détachement

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

La législation nationale applicable en matière de détachement et les exigences administratives associées, justifiées par les impératifs de la lutte contre les fraudes et contre la concurrence sociale déloyale, ont été considérablement renforcées depuis 2014. Les dispositions législatives nationales prises dans le cadre des lois n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale, n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques et du n° 2016-1088 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels ont permis de renforcer le cadre juridique et opérationnel du suivi et du contrôle des situations de détachement sur le territoire national et de renforcer les dispositions existantes permettant de lutter contre les fraudes au détachement.

D’une part, les exigences administratives liées au détachement ont été renforcées. La nécessité d’établir une déclaration préalable de détachement, la désignation d’un représentant en France, la conservation et présentation sans délai aux agents de contrôle d’un ensemble de documents devant être traduits en langue française permettent désormais le contrôle. D’autre part, des sanctions administratives ont été instaurées en cas de non-respect de ces formalités préalables.  

L’activité économique dans les zones frontalières est particulièrement intégrée, avec des marchés transnationaux et une circulation, des biens, des services et des travailleurs plus fluide et plus importante que dans le reste de l’espace économique européen. Ce constat est réalisé tant par les acteurs économiques eux-mêmes et leurs représentants consulaires que par les institutions et autorités locales et régionales dans ces zones.

1.2.  Cadre conventionnel

Il apparait nécessaire d’évoquer le programme de révision de la directive 96/71/CE sur le détachement de travailleurs. Lancé en 2016, le « paquet mobilité » annoncé par la commissaire Thyssen comprenait une révision « ciblée » de la  directive 96/71/CE ainsi qu’une révision du règlement de coordination des systèmes de sécurité sociale (Règlements 883/2004 et 987/2009), finalement scindée pour suivre des négociations indépendantes.

La France s’est très fortement mobilisée tout au long du processus de négociation au sein des instances du Conseil de l’Union pour que des améliorations nettes soient apportées à la réglementation applicable au détachement de travailleurs, afin de garantir un ensemble de droits étendus et effectifs pour protéger les salariés détachés et de lutter plus efficacement contre les pratiques frauduleuses de détachement.

C’est à l’occasion du Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » (EPSCO) du 23 octobre 2017 qu’un accord à la majorité qualifiée au sein du Conseil a vu le jour, engageant la dernière phase de négociation dite des « trilogues », entre le Parlement Européen, le Conseil de l’Union avec l’avis de Commission Européenne, cette dernière étant close depuis le mois d’avril 2018. Le Parlement européen et le Conseil de l’Union se sont accordés sur un socle commun de droits fondamentaux largement revu et complété.

Cet accord politique portera, dès le vote définitif  dans le cadre de la procédure normative entre les deux institutions, de réelles avancées sur les droits et garanties apportés aux salariés détachés, et ce à plusieurs égards :

L’adoption définitive du texte, actuellement en cours, devrait ouvrir une période de transposition de ces nouvelles notions par les États membres, dans un délai encadré de deux ans. Les autorités se sont engagées pour une transposition rapide de ce nouveau socle de droits fondamentaux du salarié détaché.

1.3.  Éléments de droit comparé

Les réglementations nationales en Allemagne, Autriche et Belgique prévoient notamment des exceptions à l’obligation de déclaration préalable de détachement et de désignation d’un représentant chargé d’assurer la liaison avec les services de contrôle.

On pourra se référer, pour exemple, à l’arrêté royal belge du 20 mars 2007 dont les mesures de simplification ici prévues s’en inspirent pour partie. 

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Ces dispositions traitent de situations particulières de détachement dans le cadre d’activités de courte durée ou d’évènements ponctuels, de détachement pour compte propre et de détachement en zone frontalière. Ces activités concernent des secteurs peu « fraudogènes » tels que les activités sportives, les activités culturelles, le journalisme, les exposants et visiteurs de foires et salons, les cadres dirigeants en voyage ou réunion d’affaires.

Or, si le renforcement des exigences et formalités administratives nécessaires au contrôle du détachement de travailleurs en France a produit ses effets en termes de lutte contre la fraude, le caractère général et indifférencié de ces obligations administratives de droit commun pèse négativement sur l’activité habituelle et normale des entreprises.

En effet, par son champ d’application territorial et matériel général, cette législation a pu faire l’objet de difficultés d’application et d’incompréhension par les partenaires institutionnels et économiques européens, qui interviennent de façon récurrente en France en cherchant de bonne foi à se conformer aux normes sociales et formalités administratives nationales.

De même, ces formalités administratives n’apparaissent pas systématiquement pertinentes et utiles à l’action de contrôle dans des secteurs et pour des activités peu soumises au dumping social ou à des atteintes aux droits des salariés détachés.

Il est donc apparu nécessaire dadapter les exigences administratives aux réalités des situations rencontrées par les employeurs, tout en garantissant une effectivité des droits et des sanctions en cas de manquements constatés par les services d’inspection. Les articles prévoyant ces obligations administratives se trouvant dans la partie législative du code du travail, il est prévu de légiférer afin de les adapter.

2.2.  Objectifs poursuivis

La participation de salariées d’entreprises étrangères ne doit pas être dissuadée par l’imposition d’exigences administratives présentant peu d’enjeu pour l’action de contrôle et la lutte contre la fraude.  Il en est de même pour les situations de détachement pour compte propre, dans lesquelles un employeur établi à l’étranger envoie un salarié effectuer une prestation à destination de sa propre entreprise. Cette catégorie, très large, comprend notamment les participations à des foires et salons ou à des réunions. La réforme envisagée vise à proposer un cadre adapté en matière de formalités préalables à l’égard des entreprises étrangères, respectueuses des normes sociales françaises et désireuses de tisser un partenariat économique durable avec nos entreprises nationales.

Tout dabord, les mesures de simplification prévues pour les zones frontalières permettront d’aménager, par des dispenses, des allègements ou le cas échéant des renforcements ciblés, certaines obligations administratives telles que la déclaration préalable de détachement, la désignation d’un représentant en France, la présentation sur le lieu de la prestation des documents obligatoires ou la demande de carte BTP pour chaque intervention en France (une demande de carte étant générée à chaque déclaration de détachement sur le portail SIPSI[153]) pour ces catégories d’entreprises.

Ensuite, les mesures visent à introduire des allègements de modalités de déclaration pour certains employeurs en vue de faciliter l’attrait de la France vis-à-vis des entreprises étrangères dans des secteurs d’activité et pour des évènements internationaux de courte durée moins soumis à la fraude.

Enfin, il s’agit de supprimer l’obligation de déclaration préalable de détachement et de désignation d’un représentant pour les entreprises qui recourent au détachement pour leur propre compte (troisième cas de détachement instauré au 3° de l’article L. 1262-1).

Aucune modification n’est apportée au statut des travailleurs détachés concernés, qui bénéficient toujours de l’ensemble des droits prévus par le code du travail dans les matières listées à l’article L. 1262-4 du code du travail (dit « noyau dur »), de la même manière que les employeurs établis à l’étrangers qui détachent des salariés en France demeure soumis à l’obligation de respecter l’ensemble de ces dispositions.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Il est apparu délicat de définir un aménagement commun, dans la loi, des exigences administratives dans le cadre de détachements effectués dans des zones frontalières. En effet, ces zones frontalières ont des spécificités propres et des activités économiques différentes selon que l’on se place, par exemple, à la frontière avec l’Espagne ou avec le Luxembourg. Il a donc été décidé de recourir à une coopération entre les États, comme cela est le cas en matière fiscale, afin qu’ils établissent un accord bilatéral, selon leurs activités, le périmètre géographique concerné et les fraudes contrôlées.

Il en va de même pour les activités de courte durée et les évènements ponctuels. Afin d’adapter de la manière la plus précise possible les formalités déclaratives, tout en limitant les abus, l’option visant à fixer la liste des secteurs concernés dans la loi a été écartée.

Enfin, la dernière disposition concernant le détachement pour compte propre nécessite uniquement une adaptation des articles préexistants dans le code du travail pour exclure les entreprises visées des articles concernant les formalités administratives à réaliser.

3.2.  Option retenue

Pour que les employeurs accomplissant leurs activités dans une zone frontalière et détachant leurs salariés dans cette même zone puissent bénéficier d’une adaptation des formalités administratives, un accord international devra être négocié dans ce sens. 

Un arrêté du ministre chargé du travail fixe la liste des prestations ou opérations de courte durée ou les évènements ponctuels permettant un allégement des obligations administratives en supprimant la déclaration préalable au détachement.

Les articles du code du travail sont modifiés afin de supprimer les formalités déclaratives (déclaration de détachement et désignation du représentant de l’entreprise sur le territoire national) en cas de détachement pour compte propre. L’obligation de déclarer un accident du travail pour le représentant en France de l’entreprise détachant pour son compte propre des salariés est également supprimée (conséquence directe de la suppression de la désignation du représentant pour ce cas de détachement).

Il est également donné, au pouvoir réglementaire, la possibilité d’aménager l’obligation de présentation des documents obligatoires en cas de contrôle pour les mêmes prestataires. 

Il est enfin précisé que les dispositions prévues ne sont pas applicables aux entreprises de travail temporaire et aux agences de mannequins.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.   Impact sur l’ordre juridique interne

En premier lieu, le présent projet de loi crée au chapitre II du titre VI du livre II de la première partie du code du travail une section 3.

Dans cette nouvelle section est inséré un article L. 1262-6 concernant les aménagements des exigences administratives pour les entreprises ayant une activité en zone frontalière.

Il est également ajouté dans cette section un article L. 1262-7 qui indique que les entreprises effectuant des activités de courte durée et les évènements ponctuels fixés par arrêtés du ministre chargé du travail sont dispensés de l’obligation de déclaration de détachement et de désignation d’un représentant en France. Il permet aussi au pouvoir réglementaire d'aménager la nature des documents obligatoires devant être présenter en cas de contrôle et les modalités de leur transmission à l’inspection du travail.

Il est enfin précisé, dans un article L. 1262-8, que les dispositions prévues dans cette section 3 ne sont pas applicables aux entreprises de travail temporaire et aux agences de mannequins.

En second lieu, le projet de loi vise à supprimer l’obligation de réaliser la déclaration préalable au détachement prévue à l’article L. 1262-2-1 du code du travail pour les employeurs entrant dans le champ du 3° de l’article L. 1262-1 relatif au détachement pour compte propre.

En troisième lieu, le projet de loi tire les conséquences du I sous b) en supprimant la mention du représentant en France de l’entreprise détachant pour son compte propre des salariés qui auraient été victimes d’un accident du travail qu’elle a l’obligation de déclarer.

4.1.2.   Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Les mesures envisagées ne contreviennent pas au droit international et au droit de l’Union européenne puisqu’elles visent à faciliter pour certains cas de détachement la libre prestation de services des travailleurs et à faciliter les activités économiques consacrées par les traités. Elles permettent de s’assurer que les mesures administratives mises en place sont proportionnées à la situation de détachement concernée.

Les dispositions du présent projet de loi visent les mesures de contrôle des travailleurs détachés qui ont été introduites depuis 2014 dans le respect des dispositions de la directive d’exécution 2014/67/UE. Ces dispositions n’affectent pas et ne sont pas non plus affectées par les évolutions envisagées au niveau européen par la révision de la directive 96/71/CE, qui portent davantage sur les conditions de travail et d’emploi applicables aux travailleurs détachés que sur leur contrôle (« noyau dur », application des conventions collectives, création d’un régime plus favorable pour les détachés de longue durée, situation des travailleurs intérimaires détachés…).

Par ailleurs, les dispositions relatives aux conditions de détachement des salariés, à la présentation sur le lieu de la prestation de documents obligatoires ou à la déclaration des salariés du bâtiment et des travaux publics peuvent être aménagés par voie d’accord international pour les employeurs qui sont établis et accomplissent leur activité dans une zone frontalière et détachent un ou plusieurs salariés.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.   Impact macroéconomique

Ces mesures vont permettre de développer la compétitivité de la France dans un contexte économique international extrêmement concurrentiel et de favoriser les échanges, la production et l’innovation entre les États.

Il s’agit en outre d’envoyer un signal fort aux entreprises étrangères de secteurs d’activité peu « fraudogènes », en leur assurant que le nouveau cadre adapté ne sera plus un frein au développement de leur activité économique sur le territoire, notamment lorsque ces activités sont intégrées à l’essor des entreprises installées sur le territoire national.

4.2.2.   Impact sur les entreprises

Ces articles prévoient d’alléger ou de supprimer, notamment, la déclaration préalable au détachement et la désignation d’un représentant en France. Elles étaient jusqu’à présent applicables à toutes les entreprises.

Les entreprises bénéficieront directement de ces mesures puisquelles vont permettre de faciliter le développement de certaines prestations favorisant ainsi l’attractivité économique du pays.

De plus, les mesures de simplification des formalités administratives devraient réduire le coût des prestations dans les secteurs concernés, de même que la responsabilité des donneurs d’ordre à l’égard du respect par leurs sous-traitants de ces obligations.

Cependant, dans le cadre dune prestation pour le seul compte de lemployeur, cest à ce dernier quil incombera de procéder à une déclaration daccident du travail dun salarié détaché à adresser à lInspection du travail, et non plus à son représentant.

Des informations seront mises en place sur le site internet du ministère et sur le portail de télé-déclaration SIPSI (système d'information sur les prestations de service internationales) à destination des entreprises concernées par ces allégements et par la suppression de l’obligation d’effectuer une déclaration préalable de détachement.

Ces mesures de simplification s’accompagnent d’une économie pour certaines entreprises puisqu’elles se verront exempter des formalités liées au détachement de travailleurs qui représentent des coûts financier et humain non négligeables. 

Cependant, aucune évaluation chiffrée n’est possible en raison de l’absence de recensement précis des prestations en « compte propre » déclarées sur le système SIPSI, non plus que les prestations dans les activités de courte durée dans les secteurs qui seront listés par arrêté. En effet, les prestations en « compte propre » étaient déclarées jusqu’à une date très récente au moyen du formulaire standard du détachement pour « prestation de services », ce qui ne permettait pas d’en distinguer la part du « compte propre ». Ensuite, aucune estimation fine par activité n’est possible dans la mesure où la déclaration SIPSI ne prévoit que des catégories très vastes (bâtiment et travaux publics, travail temporaire, spectacle vivant, agriculture, industrie…).

Pour ce qui est du détachement pour compte propre, un recensement par recoupement de critères (nationalité de l’entreprise combinée au département du lieu de la prestation en France) a permis d’estimer la part des prestations en zone frontalière à une fourchette haute de 17 % du total des prestations.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

En leur qualité de donneur d’ordre ou maître d’ouvrage, les collectivités territoriales devraient bénéficier des mesures de simplification.

5.         Modalités d’application

5.1  Application dans le temps

Ces dispositions s’appliquent dès le lendemain de la publication de la loi.

5.2  Application dans l’espace

Ces dispositions s’appliquent pour l’ensemble des entreprises dont les situations sont mentionnées et régies par ces dernières sur l’espace du territoire national concerné.

5.3  Textes d’application

Ces mesures d’adaptation des exigences administratives pour certaines situations de détachement nécessitent des textes d’application.

Un arrêté du ministre chargé du travail doit fixer la liste des entreprises entrant dans le champ de l’article L. 1262-7 du code du travail. 

Un décret en Conseil d’État doit prévoir, le cas échéant, les aménagements de l’obligation prévue à l’article L. 1263-7 (présentation des documents obligatoires en cas de contrôle) pour les prestataires détachant des salariés dans des « conditions particulières ».

Ces textes d’application seront pris par le ministère du travail. 

Articles 52 à 55 - Renforcement des outils de contrôle et de l’effectivité des sanctions administratives

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le dispositif de la contribution forfaitaire, instauré par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels et codifié à l’article L. 1262-4-6 du code du travail, est destiné à compenser les coûts de mise en place, de fonctionnement et de traitement des données du système dématérialisé de déclaration et de contrôle du système dématérialisé. Toutefois, en raison des contraintes techniques fortes tenant au recouvrement de ces sommes et aux modalités éventuelles des sommes trop versées, ainsi que de son caractère général et indifférencié, ce dispositif est resté inappliqué.

1.2.  Cadre conventionnel

Le cadre juridique du droit de l’Union européenne applicable relève des articles 56 et suivants du TFUE relatifs à la libre prestation de services et aux directives 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services et sa directive d’exécution 2014/67/UE.

En matière d’exigences administratives en cas de détachement de travailleurs, la directive 2014/67/UE permet aux États membres d’assurer un contrôle du respect des règles prévues initialement par la directive 96/71/CE et le droit national applicable à la relation de travail. En France, la transposition de cette directive a été réalisée de façon complète, initialement sans distinction suivant les secteurs ou les zones d’activité, donc de façon générale et indifférenciée dans le cadre de droit commun, à la seule exception du secteur du transport.

La directive 2014/67 d’exécution a donné la possibilité aux États membres d’imposer des exigences administratives (1. de l’article 9) permettant de contrôler la situation des salariés détachés sur leur territoire national :

1.3.  Éléments de droit comparé

Les États membres de l’UE ont transposé les mesures de la directive d’exécution 2014/67/UE sur le détachement de travailleurs. Certaines d’entre elles offraient de nouvelles possibilités de contrôle de la situation de travailleurs détachés sur le territoire d’un État Membre, et le cas échéant en cas de manquements à la directive 96/71/CE constatés, de déployer des mesures de sanctions par les services d’inspection compétents.

Un exemple parmi d’autres, le Luxembourg a tiré parti des dispositions de la directive d’exécution, pour compléter l’arsenal juridique de contrôle et de sanctions des entreprises effectuant des prestations de service internationales sur leur territoire et méconnaissant les dispositions de la directive 96/71. Une loi récente du 14 mars 2017 portant modification du code du travail luxembourgeois vise à instaurer une nouvelle sanction de suspension de la prestation de service instaurée en tant que « cessation d’activité du prestataire de service » dans un nouvel article L. 134-2 5° dudit code, en sus des dispositions existantes en matières de sanctions administratives pour manquement aux dispositions en matière de détachement (équivalentes au modèle de sanctions administratives existant en droit français) : « Les cas dinfractions graves aux articles L.142-2, L.142-3 et L.281-1 sont passibles d’être sanctionnés par une cessation des travaux prononcée par le Directeur de lInspection du travail et des mines. Afin de prononcer la cessation des travaux, le Directeur de lInspection du travail et des mines prend en compte les circonstances et la gravité du manquement ainsi que le comportement de son auteur. »

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

En premier lieu, la nécessité de légiférer provient de la volonté de supprimer la disposition légale relative à la contribution forfaitaire, créée par la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, laquelle a généré une grande inquiétude chez les employeurs établis à l’étranger pour la réalisation de prestations de services en France et demeure inappliquée.

Ensuite, le fondement des amendes administratives en matière de fraude au détachement et ses modalités d’application (plafond et période de prise en compte de la réitération) sont fixées aux articles L. 1264-3 et L. 8115-3 du code du travail. Dans la mesure où l’autorité nationale désirait revoir le plafond et la durée de prise en compte de la réitération, il est donc nécessaire de recourir à une modification par un véhicule législatif. 

Enfin, l’optimisation du recouvrement des amendes administratives et la création d’un nouveau mécanisme de suspension des prestations internationales nécessitent un ajout dans la partie législative du code du travail, les autres cas de suspension étant déjà prévus dans cette partie.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le présent article prévoit la suppression d’un dispositif dont l’application indifférenciée à tout employeur établi à l’étranger et les difficultés techniques de recouvrement, ne permettait pas de remplir les objectifs de renforcement des pouvoirs de l’inspection du travail tout en préservant l’attractivité économique du territoire national ainsi que le respect sans équivoque du principe européen de la libre prestation de service.

Cette suppression s’accompagne du renforcement des sanctions applicables en cas de non-respect des dispositions en matière de détachement impactant directement la situation et les droits garantis des salariés détachés sur le territoire nationale, tout en renforçant le rôle de vigilance des donneurs d’ordre lorsque ces derniers dont appel à une prestation de service internationale.

Aussi, ces mesures vont permettre de réprimer plus fortement et de dissuader plus efficacement les manquements au « noyau dur » des droits garantis aux salariés détachés (salaire minimum, repos, durée maximale de travail, conditions d’hébergement) d’une part, et d’assurer le recouvrement plus systématique des amendes administratives infligées aux entreprises étrangères d’autre part. En effet, la suspension de la prestation de services internationale est la sanction la plus dissuasive à la main de l’autorité administrative en cas de manquement du prestataire. Cette dernière mesure vise en effet à créer un nouveau cas de suspension de prestation de services à l’égard d’un prestataire étranger dans le cas où il ne se serait pas acquitté du paiement des amendes administratives déjà notifiées, par décision motivée du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE).

Ces nouvelles dispositions s’insèrent donc dans la logique de complétion de l’arsenal juridique amorcée depuis 2014[154] et permettant de durcir les modalités de sanctions pour les employeurs qui méconnaissent ou contournent les droits garantis aux salariés.  

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Les réflexions engagées au ministère du travail, en amont, envisageaient dans un premier temps la réduction du périmètre d’application de la contribution forfaitaire dite « droit de timbre » pour les seuls prestataires de services établis dans un autre État et détachant des salariés sur le territoire national, sanctionnés auparavant d’une ou plusieurs sanctions administratives (amendes, suspension de prestation de service international) lors d’une précédente opération effectuée sur le territoire national. Elle poursuivait le principe du « fraudeur-payeur » en permettant de revoir le périmètre général et systématique (pour chaque détachement de salariés) de la contribution forfaitaire, fortement critiquée par les partenaires institutionnels européens, notamment frontaliers, ayant tissé des partenariats économiques forts avec les régions frontalières françaises.

La seconde option visait à un abandon définitif du principe de la contribution forfaitaire, quel que soit son périmètre, et d’instaurer un nouveau régime d’application des sanctions administratives (amendes) préexistantes. Cette suppression s’accompagnait de nouvelles dispositions visant à assurer un meilleur recouvrement des sanctions administratives notifiées.

3.2.  Option retenue

La seconde option consistant en la suppression de la contribution prévue à l’article 106 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 a été retenue.

Il a ensuite été choisi d’augmenter le plafond des amendes administratives sanctionnant un manquement au « noyau dur » des droits des salariés (salaire minimum, durée du travail, conditions d’hébergement) avec une prise en compte de la réitération pour ces manquements sur une durée de deux ans au lieu d’un an aujourd’hui.

Il a également été créé un nouveau motif de suspension de la prestation de services  internationale en cas de non-paiement par les entreprises des amendes précédemment mentionnées.

Enfin, le caractère suspensif du recours contre les amendes administratives en matière de détachement a été supprimé.

Ce nouveau dispositif devrait créer une incitation forte au paiement des amendes administratives par les prestataires envisageant à l’avenir de nouvelles prestations de services en France. Il donne aussi la possibilité aux DIRECCTE d’intervenir plus en amont, dès qu’ils ont connaissance grâce au système dématérialisé de déclaration et de contrôle de situations irrégulières. Il assure également une capacité plus immédiate de recouvrement en écartant le caractère suspensif du recours contre les amendes administratives.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

En premier lieu, les mesures envisagées abrogent l’article L. 1262-4-6 du code du travail relatif à la contribution forfaitaire.

En second lieu, elles rehaussent les plafonds des amendes administratives prévues aux articles L. 1264-3 et L. 8115-3 du code du travail. Le montant de 2 000 € est remplacé par un montant de 3 000 € et celui de 4 000 € par 6 000 €. Dans le second article précité, le montant passe de 2000 € à 3 000 €. La période de prise en compte en cas de réitération passe d’un délai de un an à deux ans dans ces deux articles.

En troisième lieu, elles consacrent la création d’un nouveau cas de suspension de services internationale lorsque les amendes administratives restent impayées par les entreprises condamnées. Dans ce cadre, il est ajouté à l’article  L. 1262-4-1 du code du travail une obligation de vigilance du donneur d’ordre ou du maître d’ouvrage, le cas échéant, sur l’effectivité du paiement des amendes prévues aux articles L. 1263-6, L. 1264-1, L. 1264-2 et L. 8115-1 du code du travail.

Il est inséré dans l’article L. 1263-3 du code du travail le contrôle du paiement des amendes administratives par les services d’inspection du travail et la nouvelle capacité offerte de sanctionner le non-paiement d’amendes non préalablement établies.

Il est créé l’article L. 1263-4-2 du code du travail qui détaille la procédure à suivre en cas de non-paiement des amendes administratives pour suspendre la prestation de service internationale, en cours, où avant même que cette dernière n’ait débutée.

L’ajout de la référence à l’article L. 1263-4-2 du code du travail  vise à protéger la relation de travail des salariés détachés dont l’employeur est concerné par les manquements mentionnés audit article. Cette disposition vise à protéger la nouvelle sanction présentée, des ruptures contractuelles ou préjudices pécuniaires que pourraient rencontrer les salariés détachés de l’employeur sanctionné.

Il est également intégré le nouveau cas de suspension de prestation de service en tant que motif de notification d’une nouvelle sanction administrative si l’employeur ne respecte pas l’arrêt de son activité.

Enfin, les dispositions envisagées visent à ajouter dans les articles portant sur la procédure de mise en recouvrement des diverses amendes administratives en matière de détachement et de droits des salariés la suppression du caractère suspensif du recours formé contre les titres de perception d’amendes administratives.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Les mesures prévoyant la possibilité d’adapter certaines exigences administratives en matière de détachement pour les employeurs établis et accomplissant leur activité dans une zone frontalière, et détachant un ou plusieurs salariés dans cette même zone  est applicable à la seule condition qu’un accord bilatéral négocié avec l’autorité de l’État membre frontalier ait été conclu et prévoit un encadrement de ces nouvelles formalités adaptées.

Les mêmes articles  prévoient que les entreprises intervenant pour des prestations et opérations de courte durée ou dans le cadre d’évènements ponctuels, dont les salariés exercent une activité figurant dans un arrêté qui sera pris par la ministre chargée du travail, pourront bénéficier de certains aménagements. Concrètement, la déclaration préalable de détachement ne leur sera plus imposée, tout comme la désignation du représentant de l’employeur sur le territoire national.

Il est prévu également la suppression de la contribution destinée à compenser les coûts de mise en place et de fonctionnement du système dématérialisé de déclaration et de contrôle.

Les exigences administratives prévues par la directive 2014/67/UE peuvent différer dans leurs modalités ou leur périmètre selon les mesures prises par les États membres pour autant que ces mesures soient justifiées et proportionnées, conformément aux principes de libre prestation de services garantis par les traités (1. de l’article 9).  

De plus, en sus de ces exigences administratives pouvant expressément être imposées par les États membres, de nouvelles dispositions ou modalités d’exécution peuvent être prises par les États membres conformément au 2. de l’article 9 :

« Les États membres peuvent imposer d'autres exigences administratives et mesures de contrôle au cas où surviendraient des circonstances ou des éléments nouveaux dont il ressortirait que les exigences administratives et mesures de contrôle qui existent ne sont pas suffisantes ou efficaces pour permettre le contrôle effectif du respect des obligations énoncées dans la directive 96/71/CE et la présente directive, pour autant qu'elles soient justifiées et proportionnées. »

La création de dispositions adaptées poursuit donc un objectif de proportionnalité des exigences administratives tel que défini à l’article 9 de la directive d’exécution. De plus, ces mesures de simplification s’adressent à des situations de détachement existant dans des conditions peu susceptibles de fraude ou présentant un intérêt plus limité en termes de contrôle (zones frontalières, activités de courte durée, évènements ponctuels, activités sans client en France). Dans ces situations, les exigences administratives pouvaient apparaître trop générales et indifférenciées, appelant des adaptations ou dispenses pour rétablir une certaine proportionnalité.

Ainsi, le chapitre présenté assure donc globalement une meilleure conformité du droit interne en matière de détachement  avec le cadre juridique européen, tant pour ce qui concerne les directives de 1996 et 2014 que les principes garantis par les traités.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Il s’agit d’envoyer un signal fort aux entreprises étrangères qui ne respectent pas leur devoir d’information à l’égard de l’inspection du travail ou méconnaissent les droits garantis aux salariés détachés sur le territoire national, visant ici à poursuivre des pratiques fréquemment rencontrées par les services d’inspection dans des secteurs d’activités identifiés, où la logique d’offre de service attrayante se fait au détriment du respect des droits des salariés employés par des prestataires de services peu scrupuleux.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Dans le cadre des contrôles effectués, le rehaussement du plafond des amendes administratives s’appliquera aux entreprises ne respectant pas les droits des salariés. De manière indirecte, les entreprises établies sur le territoire national qui accueillent des prestations de services internationales en tant que donneur d’ordre seront concernés, dès lors qu’elles les enjoignent de vérifier la situation des cocontractants au regard de sanctions administratives préalablement notifiées et non recouvrées. De même, ces donneurs d’ordre seront concernés dans le cas où un prestataire de service se voit suspendre son activité en raison du non-paiement d’amende, ce dernier ne pouvant dans certains cas engager la réalisation de la prestation.

En cas de non-paiement de ces amendes administratives, les entreprises concernées prendront le risque de la suspension de la prestation de services internationale. S’ajoute à cela qu’en cas de recours formé contre les titres de perception de ces amendes administratives, le caractère suspensif de ces recours est supprimé.

Ces mesures impactent les seules entreprises qui contreviennent délibérément à leurs obligations en matière de détachement et de travail illégal.

4.2.3.      Impact budgétaire

Tout d’abord, la suppression de l’article L. 1262-4-6 du code du travail, et donc de la contribution forfaitaire qu’il prévoyait, permettra des économies pour les entreprises étrangères détachant des salariés en France ou, à défaut, à leurs donneurs d’ordre équivalentes à 40 € par salarié détaché déclaré. Toutefois, cette contribution n’ayant pas été mise en œuvre au 1er janvier 2018, ces économies ne correspondent qu’à des coûts prévisionnels qui auraient pu être anticipés en trésorerie par les entreprises concernées.

Cependant, le rehaussement du plafond des sanctions de 2 000 € à 3 000 € et de 4 000 € à 6 000 € générera un coût supplémentaire uniquement pour les entreprises se voyant notifier ces amendes administratives. Toutefois, il n’est pas possible d’estimer la progression du montant moyen des amendes prononcées par les DIRECCTE, qui s’établit en 2017 à 1 241 € par salarié détaché concerné, essentiellement pour les amendes relatives aux manquements aux obligations déclaratives.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

En leur qualité de donneur d’ordre ou maître d’ouvrage, les collectivités territoriales devraient bénéficier des mesures de simplification et de la suppression de la contribution de 40€ par salarié détaché qui était due par elles, en cas de défaut de l’employeur étranger.

De manière indirecte, les collectivités territoriales en tant que donneur d’ordre ou maître d’ouvrage, seront concernées par la nouvelle vérification des amendes préalablement notifiées, si celles-ci accueillent des prestations de services internationales, en leur enjoignant de vérifier la situation des cocontractants au regard de sanctions administratives le cas échéant non recouvrées. De même, ces collectivités seront concernées dans le cas où un prestataire de service se voit suspendre son activité en raison du non-paiement d’amende, ce dernier ne pouvant dans certains cas engager la réalisation de la prestation.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Ces mesures, visant à améliorer le taux de recouvrement des amendes administratives, vont générer une augmentation de recettes non-fiscales pour les services de l’État.

Ensuite, la nouvelle modalité de suspension des prestations de services internationales dans les cas où les entreprises sanctionnées n’ont pas payé la nouvelle contribution forfaitaire élargit les compétences des DIRECCTE. Des documents guidant l’action de contrôle et de sanction leurs seront adressés pour tenir compte des dernières évolutions législatives et réglementaires (rehaussement du plafond des amendes, nouveaux cas de suspension PSI, suppression du caractère suspensif du recours).

5.         Consultation et modalités d’application

5.1.  Consultation menée

Ces dispositions sont soumises au Conseil national d’évaluation des normes sur le fondement de l’article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales.

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Ces articles sont applicables dès le lendemain de la publication de la loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Ces dispositions s’appliquent pour l’ensemble des entreprises réalisant des prestations de service dont les situations sont mentionnées et régies par ces dernières sur l’espace du territoire national.


Article 56 - Extension des cas de décision préfectorale de cessation d’activité pour des faits de travail illégal

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

L'article L. 8272-2 du code du travail prévoit que le Préfet peut, sur la base d'un rapport établi par un agent de contrôle, ordonner la fermeture d'un établissement ayant servi à commettre l'infraction de travail illégal. Lorsque l'activité de l'entreprise est exercée sur des chantiers de bâtiment ou de travaux publics, la fermeture temporaire prend la forme d'un arrêt d'activité de l'entreprise sur le site dans lequel a été commis l'infraction ou le manquement en matière de travail illégal.

Différentes typologies de prestations existent et, en l'état actuel de la réglementation ne peuvent faire l'objet d'une fermeture administrative notifiée par le préfet, dans la mesure où ces prestations sont accomplies soit sans l’existence d’un établissement en France, soit en-dehors des locaux de l’entreprise prestataire. 

C'est le cas à titre d'exemple des prestations suivantes constatées par les services d’inspection :

1.2.  Cadre conventionnel

L’article 7 de la directive 2009/52/CE du Parlement et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier prévoit qu’en matière de sanctions « Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les employeurs soient également, le cas échéant, passibles des mesures suivantes :

d) fermeture temporaire ou définitive d’établissements ayant servi à commettre l’infraction, ou retrait temporaire ou définitif de la licence permettant de mener l’activité en question, si cela est justifié par la gravité de l’infraction.

Or, le travail illégal concernant également des travailleurs étrangers en situation irrégulière, la mesure proposée est conforme aux dispositions du droit communautaire.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

La mesure envisagée doit permettre de couvrir ces situations qui ne pouvaient jusqu'alors faire l'objet d'une sanction de fermeture préfectorale et ce, quel que soit l'origine et la nature de l'activité de l'entreprise.

Elle permet de rendre applicables les sanctions administratives de fermeture temporaire d’une entreprise dans toutes les situations de fraude constatées par un agent de contrôle en matière de travail illégal, et de réaffirmer le pouvoir du préfet en élargissant ses moyens d'intervention dans la lutte contre les fraudes dans son département.

Ces objectifs nécessitent pour leur mise en œuvre effective une disposition législative.

3.         Dispositif retenu

La mesure s’appliquera pour toutes les infractions de travail illégal : travail dissimulé, emploi d’étranger sans titre de travail, marchandage et prêt illicite de main-d’œuvre.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impact juridique

L’article L. 8272-2 du code du travail est modifié afin d’élargir le champ d’application des sanctions administratives en matière de travail illégal.

4.2.  Impact économiques et financiers

La mesure envisagée pourrait avoir un effet positif sur les entreprises respectant la législation du travail puisqu’elle s’applique à toutes les infractions de travail illégal, lesquelles  compromettent l'exercice loyal de la concurrence.


Article 57 - Création d’un nouveau cas d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’activité en cas d’activité habituelle, stable et continue en France

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Le cadre juridique de la lutte contre le travail illégal, défini à l’article L. 8211-1 du code du travail, permet aux services d’inspection du travail d’engager des procédures à travers la rédaction de procès-verbaux explicitant des cas de travail dissimulé sur la base des manquements listés aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail lorsqu’un employeur, alors qu’il exerce une activité habituelle, stable et continue sur le territoire national sans s’y être établi, se prévaut de manière continue et générale du régime du détachement pour l’ensemble des salariés présents sur le territoire national.

Ces procédures peuvent au-delà de la constitution d’une obligation d’établissement au sens des dispositions relevant du code du travail (création d’un établissement stable et inscription au registre du commerce et des sociétés) viser l’absence de déclaration auprès des organismes de sécurité sociale ou certaines obligations spécifiques en matière fiscale. 

Récemment, il a pu être admis par la Cour de justice de l’Union européenne[155] qu’une procédure engagée par les services d’inspection et les services du recouvrement ne pouvait aboutir ni à une condamnation pénale ni à une action civile en redressement de cotisations sociales et/ou en dommages et intérêts, dès lors que le travailleur concerné ou son employeur était en mesure de produire un certificat attestant de l’affiliation de ce travailleur au régime de sécurité sociale dans un autre État.

Très récemment, les éléments constitutifs de la fraude dépassant le simple abus de droit ou erreur manifeste de l’employeur visé par une procédure, conjugué à une absence de coopération loyale entre État membre concerné, ont pu modifier sensiblement la portée de cette présomption de régularité de l’établissement dans un autre état, éléments précisés notamment dans l’arrêt Altun[156].

1.2.  Cadre conventionnel

Pour rappel, la directive 2014/67/UE dispose en son article 4 :

« 1.   Aux fins de la mise en œuvre, de l'application et de l'exécution de la directive 96/71/CE, les autorités compétentes procèdent à une évaluation globale de tous les éléments de fait qui sont jugés nécessaires, y compris, en particulier, ceux qui figurent aux paragraphes 2 et 3 du présent article. Ces éléments sont destinés à assister les autorités compétentes lors des vérifications et des contrôles et lorsqu'elles ont des raisons de penser qu'un travailleur ne peut être considéré comme étant détaché au sens de la directive 96/71/CE. Ces éléments fournissent des indications dans l'évaluation globale qu'il convient d'effectuer et ne sont donc pas appréciés isolément.

2.   Afin de déterminer si une entreprise exerce réellement des activités substantielles, autres que celles relevant uniquement de la gestion interne ou administrative, les autorités compétentes procèdent à une évaluation globale, portant sur une période prolongée, de tous les éléments de fait caractérisant les activités exercées par une entreprise dans l'État membre dans lequel elle est établie et, au besoin, dans l'État membre d'accueil. Ces éléments peuvent comporter notamment:

a) le lieu où sont implantés le siège statutaire et l'administration centrale de l'entreprise, où elle a des bureaux, paye des impôts et des cotisations sociales et, le cas échéant, en conformité avec le droit national, est autorisée à exercer son activité ou est affiliée à la chambre de commerce ou à des organismes professionnels;

b) le lieu de recrutement des travailleurs détachés et le lieu d'où ils sont détachés;

c) le droit applicable aux contrats conclus par l'entreprise avec ses salariés, d'une part, et avec ses clients, d'autre part;

d) le lieu où l'entreprise exerce l'essentiel de son activité commerciale et où elle emploie du personnel administratif;

e) le nombre de contrats exécutés et/ou le montant du chiffre d'affaires réalisé dans l'État membre d'établissement, en tenant compte de la situation particulière que connaissent, entre autres, les entreprises nouvellement constituées et les PME.

3.   Afin d'apprécier si un travailleur détaché accomplit temporairement son travail dans un État membre autre que celui dans lequel il travaille habituellement, il convient d'examiner tous les éléments de fait qui caractérisent ses tâches et sa situation. Ces éléments peuvent comprendre notamment:

a) les tâches qui sont accomplies dans un autre État membre pour une durée limitée;

b) la date à laquelle le détachement commence;

c) le travailleur qui est détaché dans un État membre autre que celui dans lequel ou depuis lequel il accomplit habituellement son travail, conformément au règlement (CE) no 593/2008 (Rome I) et/ou à la convention de Rome;

d) le travailleur détaché qui retourne ou est censé reprendre son activité dans l'État membre à partir duquel il a été détaché après l'achèvement des travaux ou au terme de la prestation de services pour lesquels il a été détaché;

e) la nature des activités;

f) le voyage, la nourriture et l'hébergement qui sont assurés ou pris en charge par l'employeur détachant le travailleur et, le cas échéant, la manière dont ils sont assurés ou les modalités de leur prise en charge;

g) toute période antérieure au cours de laquelle le poste a été occupé par le même ou un autre travailleur (détaché). ».

1.3.  Éléments de droit comparé

À titre d’exemple, certains États membres tels que l’Allemagne et la Belgique ont été concernés dans des contentieux européens concernant le recours abusif aux dispositions relevant du détachement de salariés opposé à la présomption de régularité via la présentation de formulaire E 101 (remplacé par le formulaire A1), qui atteste de la législation applicable, attaqués auprès des juges nationaux.

On pourra se référer, pour exemple, au cas d’espèce de l’affaire Altun et les constats formulés par les services d’inspection belge, les arrêts de la cour d’appel et de la cour de cassation belge motivant la caractérisation du recours frauduleux aux dispositions en matière de détachement contournant les notions d’établissement sur le territoire.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

La commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI) du 12 février 2018 a formulé une proposition de simplification du constat de fraude avérée dans le recours au détachement de salariés permettant de tirer directement les conséquences de l’article L. 1262-3  du code du travail, et d’en créer un nouveau cas de travail dissimulé par dissimulation d’activité (création d’un 3°).

Cette jonction juridique explicite la situation du recours frauduleux aux dispositions en matière de détachement et ses conséquences directe en matière de constatation d’une situation de travail illégal.

Ainsi, le fait que le recours frauduleux au détachement  relève du travail illégal et caractérise une situation de travail dissimulé indépendamment de l’apparence licite du recours au détachement (par le respect des dispositions en matière de déclarations préalables notamment) sécurisera d’une part les procédures engagées en cas d’activité habituelle, stable et continue sur le territoire national, et d’autre part visera à introduire un nouveau cas distinct de travail dissimulé par dissimulation d’activité (nouveau 3° à l’article L. 8221-5 du code du travail) lorsque ces constats sont opérés, au regard par exemple du chiffre d’affaires, des contrats commerciaux, du recrutement des salariés concernés, c’est-à-dire de l’ensemble des indices de licéité du recours au détachement listés à l’article 4 de la directive d’exécution 2014/67/UE.

Cette proposition n’est pas une innovation juridique en tant que telle, mais poursuit la volonté de simplifier l’appréhension des règles du détachement de salariés, et les éléments constitutifs d’un recours frauduleux, nécessaires aux employeurs désireux de prester sur le territoire national, ou, si les circonstances le justifient, d’opter pour le choix de l’établissement sur le territoire national.

2.2.  Objectifs poursuivis

La mesure proposée par la création d’un nouveau cas d’infraction de travail dissimulé (3° de l’article L. 8221-3 du code du travail) poursuit l’objectif d’une appréhension simplifiée des règles du détachement et plus généralement du recours à la prestation de service internationale, et à contrario des éléments caractérisant un véritable recours abusif à la prestation de service internationale visé à L. 1262-3 du code du travail :

« Un employeur ne peut se prévaloir des dispositions applicables au détachement de salariés lorsqu'il exerce, dans l'État dans lequel il est établi, des activités relevant uniquement de la gestion interne ou administrative, ou lorsque son activité est réalisée sur le territoire national de façon habituelle, stable et continue. Il ne peut notamment se prévaloir de ces dispositions lorsque son activité comporte la recherche et la prospection d'une clientèle ou le recrutement de salariés sur ce territoire.

Dans ces situations, l'employeur est assujetti aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire national. »

3.         Options envisagées et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

La commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI) du 12 février 2018 a formulé une proposition claire de simplification du constat de fraude avérée dans le recours au détachement de salariés permettant de tirer directement les conséquences de l’article L. 1262-3  du code du travail, et d’en créer un nouveau cas de travail dissimulé par dissimulation d’activité (création d’un 3°). 

3.2.  Option retenue

La proposition juridique formulée dans le présent chapitre n’est pas une véritable création juridique mais une simple liaison entre les articles relevant des fraudes au détachement et les dispositions existantes en matière de lutte contre le travail illégal. L’option retenue vise à simplifier l’appréhension des règles du détachement de salariés, et les éléments constitutifs d’un recours frauduleux.

Ainsi les règles de la licéité du recours à la prestation de service internationale seront réaffirmées : si les conditions matérielles de la prestation de service internationale et du recours au détachement de salariés relèvent de l’article L. 1262-3 du code du travail, un employeur ne pourra se prévaloir d’un recours régulier aux articles L. 1262-1 et suivant du code du travail et pourra être directement visé par un procès-verbal retraçant les éléments constitués du travail dissimulé par dissimulation d’activité relevant de l’article L. 8221-3 du code du travail. 

L’intervention sur le territoire national conservera son caractère dual: soit l’employeur établi en dehors du territoire national est régi par les dispositions en matière de détachement, caractérisé par le recours temporaire à la prestation de service international, soit ce dernier relèvera de l’activité permanente sur le territoire national (activité habituelle stable et continue) accompagné de l’ensemble des obligations déclaratives pour un employeur régulièrement établi.

Enfin, dès lors qu’un employeur établi en dehors du territoire national se soustrait intentionnellement au schéma présenté ci-dessus, ce motif caractérisera juridiquement  le travail dissimulé par dissimulation d’activité, et le cas échéant dissimulation d’emploi salarié sur le territoire national.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

Le présent article vise à créer un nouveau cas d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’activité en cas d’activité habituelle, stable et continue en France, et un lien direct et simplifié avec le recours manifestement frauduleux des dispositions relevant du détachement de salariés, visé à l’article L. 1262-3 du code du travail.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La mesure énoncée ne contrevient pas au droit international et au droit de l’Union européenne puisqu’elle vise à faciliter et rendre de manière plus explicite et intelligible par les prestataires de service les dispositions présentées par la directive 2014/67 sur la licéité du recours du détachement, et à contrario les cas où ces dispositions sont dévoyées.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Ces nouvelles dispositions en matière de lutte contre le travail illégal ne permettent pas d’établir avec exactitude les conséquences en matière de lutte contre les fraudes et le contournement des obligations en matière d’établissement sur le territoire national.

Toutefois, des effets positifs sont attendus en matière concurrentielle et du respect des droits des travailleurs.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Cet article vise à sensibiliser les employeurs étrangers et les donneurs d’ordre sur la licéité du recours au détachement et la reconnaissance simplifié d’un recours abusif de ces dispositions.

Ces dispositions visent ainsi à accompagner juridiquement les prestataires de service étrangers lorsque ceux-ci optent pour le recours à la prestation de service internationale et aider les donneurs d’ordre établis sur le territoire national dans leur recherche de liens contractuels fiables et sécurisés avec des entreprises et prestataires de services établis à l’étranger.

Des informations seront mises en place sur le site Internet du ministère à destination des entreprises concernées.

4.2.3.      Impact budgétaire

Ces nouvelles dispositions en matière de lutte contre le travail illégal ne permettent pas d’établir avec exactitude les conséquences budgétaires en matière de lutte contre les fraudes et le contournement des obligations en matière d’établissement sur le territoire national.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

En leur qualité de donneur d’ordre ou maître d’ouvrage, les collectivités territoriales peuvent être concernées par cette simplification de la reconnaissance du recours illicite à la prestation de services internationale par leurs cocontractants.

5.         Application dans le temps

Ces dispositions s’appliquent dès le lendemain de la publication de la loi.

Article 58 - Création d’une amende administrative pour absence de déclaration d’un chantier forestier ou sylvicole

1.         État des lieux

Les chantiers forestiers connaissent encore trop souvent des situations de travail illégal sous ses différentes formes, générant des désordres sociaux et économiques et pouvant mettre gravement en danger la santé et la sécurité des personnes.

Face à ces enjeux, les services de l’inspection du travail doivent renforcer leur vigilance et leur présence sur le terrain.

Afin d’améliorer leur contrôle par l’inspection du travail grâce à une meilleure connaissance de leur localisation, le décret n° 2016-1512 du 8 novembre 2016 relatif à la déclaration de chantiers forestiers et sylvicoles  a abaissé le seuil de déclaration des chantiers forestiers, en distinguant les chantiers mécanisés et ceux qui ne le sont pas. Les chantiers d’abattage ou de façonnage réalisés à l’aide d’outils ou de machines à main doivent être déclarés si leur volume excède 100 m3. Les chantiers d’abattage et de débardage réalisés à l’aide d’autres machines continuent à être déclarés si leur volume excède 500 m3.

Suite à cet abaissement du seuil de déclaration des chantiers, le nombre de déclarations serait en hausse avec un facteur multiplicateur de 4 dans certaines régions.

Le fait d'omettre de procéder à la déclaration préalable des chantiers forestiers et sylvicoles prévue à l'article L. 718-9 du code rural et de la pêche maritime expose les personnes morales ou physiques accomplissant des travaux forestiers ou sylvicoles à une amende contraventionnelle de 1 500 € (contravention de 5ème classe) dont le montant est doublé en cas de récidive.

Il s’agit d’une peine accessoire à d’autres sanctions pénales encourues pour des faits plus graves de travail illégal en forêt. Il semble donc que la peine contraventionnelle ne soit pas fréquemment utilisée puisque les services de l’inspection du travail relèvent trois procès-verbaux en la matière en 2016 et un en 2017.

Parallèlement, les modes de sanction en matière de droit du travail ont évolué. Les entreprises qui se montrent récalcitrantes pour appliquer la loi et créent ainsi une distorsion de concurrence se voient appliquer des sanctions administratives permettant à l’administration de prononcer elle-même des amendes en cas de manquements à certaines dispositions du code du travail nécessitant une action plus rapide que la réponse judiciaire.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

Pour connaître la localisation des chantiers et améliorer leur contrôle, il convient de lutter davantage contre les entreprises ne respectant pas l’obligation de déclaration d’un chantier forestier ou sylvicole.

3.         Dispositif retenu

Il est proposé de supprimer la sanction pénale existante et de la remplacer par une amende administrative d’un montant maximum de 5 000 € par chantier qui pourra être prononcée par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) compétent sur le rapport d'un agent de contrôle de l'inspection du travail.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

L’article L. 719-11 du code rural et de la pêche maritime créant la sanction administrative est rétabli et l’article R. 719-10 du même code relatif aux sanctions pénales en matière de déclaration de chantiers forestiers et sylvicoles est abrogé.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

La mesure envisagée permettra d’améliorer le jeu concurrentiel en sanctionnant davantage les entreprises ne respectant pas les obligations de déclaration.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

La mesure proposée ne crée pas d’obligation incombant directement aux entreprises du secteur des travaux forestiers mais renforce les prérogatives des agents de l’inspection du travail en matière de sanction en cas de manquement à la réglementation sur la déclaration des chantiers forestiers et sylvicoles.

Un impact financier n’intervient qu’à la suite d’un manquement à l’obligation de déclaration constaté par un agent de contrôle si une amende administrative est prononcée par le DIRECCTE.

De plus, il convient de noter qu’à la suite d’un contrôle, les agents de l’inspection du travail émettent principalement des lettres d’observations invitant les employeurs à se conformer à la réglementation et n’émettent des procès-verbaux d’infractions que pour les entreprises récalcitrantes.

Au vu de cette pratique professionnelle privilégiant les actions de conseil envers les entreprises, et des statistiques concernant les infractions pénales, le nombre d’amendes administratives susceptibles d’être prononcées devrait être faible.

4.3.  Impacts sur les services déconcentrés de l’État

En ce qui concerne les agents de contrôle de l’inspection du travail, la création de cette amende administrative est de nature à renforcer l’effectivité des déclarations de chantiers et à faciliter l’exercice de leur mission de contrôle de la réglementation du travail.


Article 59 - Diffusion automatique de certaines condamnations de travail dissimulé

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

La publicité sur le site internet du ministère du travail d’une décision de justice rendue en matière de travail illégal existe à titre de peine complémentaire, dont le prononcé est à l'appréciation du juge. Cette mesure a été introduite dans le code du travail par l’article 8 de la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale. Cette diffusion des condamnations, dont les modalités sont précisées par le décret n° 2015-1327 du 21 octobre 2015 relatif à la diffusion sur un site internet de condamnations prononcées pour travail illégal, est opérée sur le site internet du ministère du travail.

 Au-delà du prononcé de la sanction, les modalités d’application des peines d’affichage et de diffusion conditionnent en grande partie leur efficacité. En effet, l'aspect formel des publications et diffusions et le choix du support (journal local, national, professionnel, site internet) présentent un intérêt certain et conditionnent largement le retentissement de la condamnation prononcée.

 Or, force est de constater que le prononcé de cette peine complémentaire par les juridictions répressives pour diffusion sur le site internet du ministère du travail reste limité : quatre décisions de diffusion ont été prononcées par les juges correctionnels depuis 2014.

 

2014

2015

2016

 Nombre de personnes condamnées pour travail dissimulé

4 620

4 444

4 143

 dont nombre de peines d’emprisonnement

638

566

631

 dont nombre de condamnations à une peine de diffusion

 

 

4

La notion de bande organisée pour les délits de travail illégal a été également introduite dans le code du travail par l’article 13 de la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale. Elle constitue une circonstance aggravante dans la commission de l’infraction, entraînant pour cela l'aggravation des peines. Comme l’emploi d’étranger sans titre en bande organisée, le travail dissimulé, le marchandage et le prêt de main-d’œuvre commis en bande organisée sont désormais punis de dix ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende (art L. 8224-2, L. 8234-1 et L. 8243-1 du code du travail). L’amende est portée à 500 000 € pour les personnes morales. La bande organisée a vocation à s’appliquer à l’ensemble des coauteurs ou complices du délit de travail dissimulé.

Actuellement, sur des dossiers d’envergure nationale en cours d’investigations suivis par le Groupe national de veille, d’appui et de contrôle (GNVAC), une dizaine sont susceptibles de caractériser un délit de travail dissimulé en bande organisée. 

La peine complémentaire de publication et de diffusion des décisions de condamnation pour le travail dissimulé commis en bande organisée est aujourd'hui prononcée, de manière facultative, par le juge correctionnel.

1.2.  Cadre constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a censuré une disposition du Code général des impôts rendant automatique la publication de la peine. En effet, le Conseil constitutionnel rappelle que «  aux termes de l’article 8 de la Déclaration de 1789, la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que le principe d’individualisation des peines qui découle de cet article implique que la peine de publication et d’affichage du jugement ne puisse être appliquée que si le juge l’a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce. » [157].

1.3.  Cadre conventionnel

L’article 10 de la directive 2009/52/CE du Parlement et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier prévoit qu’en matière de sanctions pénales que : « À moins que les principes généraux du droit l’interdisent, les sanctions pénales prévues au présent article peuvent, en application de la législation nationale, être appliquées sans préjudice d’autres sanctions ou mesures de nature non pénale, et peuvent s’accompagner de la publication de la décision judiciaire relative à l’affaire en question ».

Or, le travail dissimulé concernant également des travailleurs étrangers en situation irrégulière, la mesure proposée est conforme aux dispositions du droit communautaire.

1.4.  Éléments de droit comparé

La Suisse a mis en place une liste des employeurs qui ont fait l’objet d’une sanction entrée en force, prononcée en vertu de la loi fédérale du 17 juin 2005 concernant des mesures en matière de lutte contre le travail au noir, pour non-respect important ou répété de leurs obligations en matière d’annonce et d’autorisation prévues par le droit des assurances ou des étrangers.   

Cette liste est mise en ligne sur le site internet du secrétariat d’État à l’économie (SECO). Dans son rapport d’application des mesures de la loi du 17 juin 2005 pour l’année 2016, le SECO qu’en cas de sanction exécutoire d’employeurs pour cause de violation grave ou répétée de leurs obligations en matière d’annonce et d’autorisation prévues dans la législation sur les assurances sociales ou les étrangers, l’autorité cantonale compétente peut exclure pour cinq ans ces employeurs des futurs marchés publics ou peut réduire les aides financières qui leur sont accordées. La liste des entreprises sanctionnées est publiée sur internet. Le nombre de sanctions de ce type était de 68 en 2012, 52 en 2013, 13 en 2014 et 27 en 2015. En 2016, le nombre des sanctions est monté à 50. Les cantons de Vaud (14) et du Valais (9) ont prononcé le plus de sanctions, suivis par les cantons de Genève (7) et de Zurich (4).

2.         Nécessité de légiférer

La mesure actuelle de diffusion d’une condamnation pénale pour des délits de travail dissimulé est très peu utilisée par le juge pénal. Seules quatre décisions de diffusion ont été prononcées depuis 2014. La réforme envisagée vise à rendre obligatoire la peine complémentaire de publication et de diffusion des décisions de condamnation pour le travail dissimulé commis en bande organisée, pendant une durée maximale d’un an sur le site internet du ministère du travail. Toutefois, le juge pourra décider soit de ne pas prononcer cette peine complémentaire, en considération des circonstances dans lesquelles l’infraction a été commise et de la personnalité de son auteur, soit de réduire la durée de la diffusion.

L'objectif poursuivi est d'accroître le caractère dissuasif de la sanction du travail dissimulé dans les cas les plus graves, c’est-à-dire lorsqu’il est commis en bande organisée.

Cet objectif nécessite pour sa mise en œuvre effective une disposition législative.

3.         Options possibles et dispositif retenu

La mesure retenue s’avère la plus satisfaisante au regard des critères du délit de travail dissimulé, de l’impact de dissuasion recherchée et de la volonté de la limiter à certains employeurs au regard de la masse des décisions pénales prononcées par les juges correctionnels.

Elle ne s’appliquera donc que pour des infractions de travail dissimulé commis en bande organisée et le juge pourra soit ne pas la prononcer soit réduire la durée de la diffusion sur le site internet du ministère du travail.  

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

La mesure envisagée est conforme aux principes constitutionnels et est conforme aux dispositions du droit communautaire.

4.2.  Impact économiques et financiers

L’effet dissuasif de la mesure pourrait avoir un effet bénéfique sur l'exercice loyal de la concurrence.

5.         Modalités d’application

5.1.  Application dans le temps

La mesure s’applique le lendemain de la parution du décret en Conseil d’État.

5.2.  Application dans l’espace

La mesure s’applique sur l’ensemble du territoire national.

5.3.  Textes d’application

Un décret en Conseil d’État sera pris après avis de la Commission nationale Informatique et libertés.


Article 60 - Renforcement des pouvoirs d’enquête  et droit de communication de l’inspection du travail en matière de travail illégal

1.         État des lieux

Les estimations du travail illégal ou non déclaré différent et demeurent par nature très fragiles. Cependant, une étude de l’Union européenne estime la part du travail non déclaré à 11,6 % en moyenne de la main d’œuvre dans le secteur privé. Selon cette même étude, cette part s’établirait en France à 8,8 % soit un taux inférieur à la moyenne européenne mais nettement supérieur à plusieurs pays comme l’Allemagne (4,4 %), les Pays-Bas (5,2 %) ou le Portugal (6,6 %). Des progrès restent donc nécessaires alors que le travail illégal mine le pacte social en affaiblissant les droits des salariés, en faussant la concurrence entre les entreprises  et en diminuant les recettes de l’État et de la sécurité sociale.

En 2014[158], la Cour des comptes avait recommandé notamment de renforcer les moyens d’action des organismes compétents, constatant que les moyens d’investigation et de sanction demeurent très largement en retard sur ceux dont disposent les services fiscaux. Si cette recommandation a été suivie d’effet en 2015, avec l’extension et l’alignement du droit de communication des organismes de sécurité sociale sur ceux des services fiscaux, il n’en a pas été de même de l’inspection du travail dont les pouvoirs sont demeurés très en retrait des services de contrôle similaires.

Le droit de communication est la possibilité légale pour un service de contrôle de demander communication et éventuellement d’obtenir copie d’un document ou d’un élément d’information utile à son enquête, auprès de la personne contrôlée  mais aussi auprès de tiers (par exemple, un fournisseur de matériaux de construction, un opérateur de téléphonie ou d’internet, un loueur de véhicule, etc.).

À ce titre, chaque service de contrôle possède un droit de communication adapté à sa mission, avec une base légale propre codifiée articles L. 8113-4 et L. 8113-5 du code du travail. En matière de lutte contre le travail illégal, il existe également des dispositions spécifiques prévues aux articles L. 8271-6-2 et L. 8271-9 du code du travail.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Si d’autres services de contrôle, des organismes sociaux (union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, mutualité sociale agricole) ou des services fiscaux ont bénéficié d’une modernisation et d’un renforcement conséquent de leurs pouvoirs d’enquête, il n’en pas été de même de l’inspection du travail, qui est pourtant le deuxième service verbalisateur en matière de travail illégal, juste après la gendarmerie, avec 25 % des procédures relevées[159]. Cette situation handicape fortement l’inspection du travail dans sa lutte contre le travail illégal (y compris certaines fraudes au détachement transnational de travailleurs), alors même que son organisation a été revue pour agir plus fortement et efficacement en la matière, avec la création en 2015 d’unités régionales dédiées  (unité de contrôle à compétence régionale chargée de la lutte contre le travail illégal - URACTI) et d’un groupe national de veille, d’appui et de contrôle (GNVAC).

Le fait pour un service de contrôle de disposer de pouvoirs d’enquête et en particulier d’un droit de communication est un élément crucial dans la conduite d’enquêtes de travail illégal,  avec le développement des fraudes complexes faisant intervenir de multiples acteurs (fausse sous-traitance, fraude au détachement, dérives de certaines plateformes internet encourageant le travail dissimulé de particuliers).

Le paradoxe est qu’aujourd’hui ces indices ne peuvent être obtenus par le droit de communication existant en matière de travail illégal. Certes, l’article L. 8271-9  prévoit la possibilité de recevoir communication des « devis, bons de commande ou de travaux, les factures et les contrats ou documents commerciaux relatifs aux prestations exécutées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 8221-1 [travail dissimulé]».

Ce droit de communication est obsolète dans sa rédaction en se limitant à une liste très limitative de documents. En dépit de la référence à « tout support »,  la référence au « document »  et l’absence de dispositions précises sur les supports informatiques rendent pratiquement inopérante la communication de données informatisées, qui sont pourtant indispensables à l’exploitation de données en grand nombre (registres d’entrée / sortie sur une longue période) qu’en raison du poids croissant du numérique dans les activités économiques et les relations de travail.

Le droit de communication dans sa forme actuelle est surtout extrêmement limité au regard des personnes pouvant en faire l’objet, excluant a priori le recueil d’informations ou de documents auprès de tiers, pourtant nécessaires sur les enquêtes plus complexes. Il est en effet indispensable de pouvoir recueillir un maximum d’indices permettant de restituer la réalité du montage et des relations de travail (identifier les dirigeants ou employeurs réels par exemple), d’évaluer aussi l’ampleur du phénomène et donc du préjudice (estimer un chiffre d’affaires par exemple). Faute de coopération du mis en cause (et parfois des salariés dont les déclarations sont souvent formatés à l’avance), ces indices doivent en outre être recueillis auprès de tiers, qu’ils soient mise en cause ou simplement titulaires d’une information nécessaire à l’enquête.

À titre d’illustration, le droit de communication faciliterait considérablement l’action de l’inspection du travail contre la fraude à l’établissement qui consiste pour une entreprise à se prévaloir abusivement du régime du travail détaché pour ne pas payer de cotisations sociales ni la majeure partie des impôts en France alors qu’elle exerce sur notre territoire une activité stable, habituelle et continue. En recueillant un faisceau d’indices auprès de fournisseurs, clients ou partenaires, l’inspection du travail pourrait ainsi faire échec aux montages artificiels déployés par ces entités pour dissimuler leur activité en France. Aujourd’hui, l’inspection du travail est dépendante des informations qui leur sont fournies par l’entreprise ou par d’autres services lorsqu’ils en disposent.

S’agissant de pouvoirs exorbitants, le pouvoir d’exiger d’un tiers des informations utiles à une enquête ne le concernant pas directement et la possibilité pour celui-ci d’y répondre sans méconnaitre ses obligations de secret ou de discrétion professionnelle doit être prévu et encadré par la loi.

2.2.  Objectifs poursuivis

Le dispositif poursuit deux objectifs :

3.         Options possibles et dispositif retenu

Pour le premier objectif (pouvoir d’enquête lors des contrôles), le dispositif proposé s’inspire très largement des pouvoirs dont disposent actuellement les agents compétents en matière de concurrence, consommation et répression des fraudes[160].

Pour le deuxième objectif, le choix a été fait de s’aligner sur les pouvoirs dont disposent déjà de longue date, les services fiscaux et sur lesquels se sont alignés les organismes sociaux en 2007, puis en 2015 pour l’élargissement aux personnes non identifiées[161]. Ces dispositions en effet ont fait leurs preuves tant du point de vue de leur sécurité juridique que de la réponse aux besoins des agents de contrôle. Cet alignement offre l’avantage de couvrir un périmètre large, et de pouvoir évoluer sans avoir besoin de  modifier les textes spécifiques de chaque corps de contrôle. 

En revanche, tous les destinataires potentiels d’un droit de communication de l’administration fiscal ou des organismes sociaux n’ont pas été repris dans la mesure où cela ne paraissait pas justifié ou proportionné aux besoins spécifiques de l’inspection du travail.

En tout état de cause, ces pouvoirs renforcés et ce droit de communication vis-à-vis de tiers ne s’applique que dans l’exercice de la mission de lutte contre le travail illégal et non pour d’autres domaines dans lesquels les dispositions actuelles paraissaient globalement satisfaisantes.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

La mesure nécessite la création de deux nouveaux articles dans le chapitre dédié à la compétence des agents de contrôle de l’inspection du travail (section 1 du chapitre II du titre I de la huitième partie du code du travail).

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La mesure n’est ni strictement prescrite ni incompatible avec aucune source de droit international ou européen.

Bien qu’elle dépasse dans son périmètre et dans son degré de précision les mesures strictement imposée à la France en application de la Convention n°81 sur l’inspection du travail (1947), elle poursuit les mêmes objectifs que certains de ses articles en les actualisant aux enjeux actuels (dématérialisation des supports d’information, fraudes complexes dépassant le cadre de l’établissement classique)[162].

Le droit de l’Union européenne ne prévoit aucune mesure imposant aux États  membres une harmonisation des pouvoirs d’enquête des agents de contrôle de l’inspection du travail.

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Au même titre que l’estimation de la fraude est hasardeuse, l’impact macroéconomique de cette seule mesure est difficile à quantifier. Cependant, il est généralement admis que la lutte contre le travail illégal produit un cercle vertueux : le rétablissement des conditions d’une concurrence loyale encourage les employeurs respectueux de leurs obligations à investir et augmenter les salaires, en éliminant le dumping social produit par les fraudeurs ; le meilleur recouvrement des recettes fiscales et cotisations sociales assure un financement soutenable des services publics et de la protection sociale en évitant d’en faire reposer la charge sur les seules entreprises vertueuses.

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Pour les entreprises destinataires, le droit de communication représente une certaine charge consistant à extraire les informations demandées et à les transmettre au service de contrôle. Toutefois, des mesures appropriées seront prises tant par la voie réglementaire que par des instructions et formations aux agents de contrôle, pour que l’exercice du droit de communication demeure ciblé, et strictement proportionné au besoin, quand l’information ne peut être directement obtenue de la personne contrôlée. En 2017, 27 892 interventions de l’inspection du travail ont eu lieu contre le travail illégal (y compris les fraudes au détachement). En prenant l’hypothèse que le nombre d’interventions pourrait augmenter jusqu’à 50 000 interventions par an grâce à une mobilisation accrue et au renforcement des pouvoirs d’enquête, que 25 % de ces interventions (fraudes complexes) pourrait justifier l’exercice d’un droit de communication, dont la moitié concernerait des entreprises de droit privé (l’autre moitié concernant d’autres administrations et services de contrôle), le nombre potentiel de droit de communication adressé à des entreprises du secteur privé est évalué à 6 250 par an soit une estimation de l’impact global pour l’ensemble des entreprises de 843 750 € par an[163].

4.2.3.      Impact budgétaire

D’après une étude de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) en 2016[164], les montants de cotisations éludées se situant dans une fourchette allant de 6,1 à 7,4 Md€. Comme rappelé par la Cour des comptes[165], cette évaluation est à considérer comme une fourchette basse, avec la nécessité pour l’avenir d’évaluer le préjudice dans des champs aujourd’hui exclus, comme la fraude liée aux travailleurs indépendants, aux particuliers employeurs, à l’économie collaborative, au travail détaché, au travail partiellement dissimulé.

Cette évaluation ne tient surtout pas compte du préjudice pour l’État du fait des recettes fiscales éludées par le travail non déclaré. Il s’agira selon le cas d’une perte de recettes au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (revenus non déclarés ou minorés), au titre de l’impôt sur les sociétés (dissimulation ou minoration du bénéfice perçu par l’entreprise) ou au titre de la TVA (prestations non facturées). Il n’existe pas d’évaluation précise et récente du montant lié à au travail non déclaré parmi l’ensemble de la fraude fiscale.

Globalement, d’après des estimations anciennes, la fraude sociale, c'est-à-dire la fraude aux cotisations sociales et la fraude aux prélèvements obligatoires serait en France de l’ordre de 80 Md€ par an[166].

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

L’impact sur les collectivités territoriales est jugé marginal dans la mesure où celles-ci seront loin de figurer parmi les principaux destinataires du droit de communication, d’autant que d’autres dispositions permettent en tant que de besoin l’échange d’information dans les deux sens et cet échange est profitable aux collectivités (pour leur permettre par exemple d’apprécier l’opportunité et le cas échéant de justifier le refus d’une aide à une entreprise ayant fait l’objet d’une sanction administrative pour travail illégal). Plus indirectement, les effets positifs sur le climat économique local d’une meilleure efficacité de la lutte contre le travail illégal (réduction des nuisances associées aux activités souterraines, par exemple) profiteront aussi aux collectivités territoriales.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

L’impact concerne exclusivement les agents de contrôle de l’inspection du travail, soit 2188 agents de contrôle, dont 135 agents affectés en unité de contrôle à compétence régionale chargée de la lutte contre le travail Illégal (URACTI). L’impact de la mesure leur est favorable dans la mesure où ces pouvoirs leur permettront d’avancer plus rapidement et plus efficacement dans leurs enquêtes, sans être pénalisés par des obstacles ou mesures dilatoires des personnes contrôlées.

4.5.  Impacts sociaux

En contribuant par une meilleure efficacité des contrôles au rétablissant d’une participation équitable de l’ensemble des entreprises et salariés à son financement, la mesure contribue à la soutenabilité et à l’adhésion de tous à notre système de protection sociale.

5.         Modalités d’application

5.1.  Application dans le temps

Une entrée en vigueur différée est prévue :

5.2.  Application dans l’espace

Application du texte en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le champ d'application géographique du code du travail couvre la métropole, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article L. 1511-1 du code du travail). Les autres collectivités de la République sont régies par d'autres codes du travail.             

Les dispositions du code du travail sont donc applicables en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon sauf si elles en disposent autrement.

Les dispositions légales visées par le projet de texte ne prévoient aucune disposition particulière pour son application outre-mer, ses dispositions modifiant le code du travail vont dès lors s'appliquer de plein droit à toutes les collectivités susmentionnées.

Application du texte en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna

Ces collectivités disposent de codes du travail et d’inspection du travail spécifiques. Elles appliquent le principe de spécialité législative : les textes métropolitains ne s’appliquent que sur mention expresse. En l’occurrence, il n’a pas été jugé opportun de rendre cette mesure applicable à ces territoires, compte tenu de la spécificité de la mission et de l’organisation de l’inspection du travail.

5.3.  Textes d’application

Un décret en Conseil d’État sera pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, concernant les informations relatives à des personnes non identifiées.


Chapitre 4 – Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes et lutte contre les violences sexuelles et sexistes au travail

Article 61 - Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes

1.         État des lieux

1.1.  Cadre général

Affirmé à l’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, le principe « à travail égal, salaire égal » a été introduit, en droit français, par la loi n°72-1143 du 22 décembre 1972 relative à l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes. L’article L. 3221-2 du code du travail précise ainsi : « tout employeur assure pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes ».

Ainsi, conformément à l’article L. 3221-4 du code du travail, sont considérés comme ayant une valeur égale, « les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ».

Le cadre légal et réglementaire actuel impose déjà aux entreprises certaines obligations de moyens. Ainsi, depuis le 1er janvier 2012, toutes les entreprises d’au moins cinquante salariés doivent être couvertes par un accord ou un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes fixant des objectifs de progression et les mesure permettant de les atteindre dans un certain nombre des domaines d’action, parmi lesquels figure obligatoirement la rémunération effective. Les entreprises ne respectant pas cette obligation peuvent se voir appliquer une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1 % de leur masse salariale[167].

Au niveau des branches, la loi impose également de prendre en compte « l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois » au moment de l’examen de la nécessité de réviser les classifications. Une négociation sur les « mesures tendant à assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées » doit en outre être ouverte au moins tous les quatre ans[168].

1.2.  Cadre constitutionnel

L’article 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 précise que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux des hommes ».

1.3.  Cadre conventionnel

La convention n° 100 de l’Organisation internationale du travail du 29 juin 1951 sur l'égalité de rémunération entre la main-d’œuvre masculine et la main-d’œuvre féminine pour un travail de valeur égale a été ratifiée par la France par la loi n° 52-1309 du 10 décembre 1952.

L’article 157 du Traité de fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) prévoit que « chaque État membre assure le principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins pour un même travail ou un travail de même valeur ».

L’article 23 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000 rappelle également que « l’égalité entre les hommes et les femmes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération » et l’égalité de traitement et l’égalité des chances entre les femmes et les hommes constitue désormais le deuxième principe clé du socle européen des droits sociaux, approuvé conjointement par le Parlement européen, le Conseil et la Commission le 17 novembre 2017, lors du sommet social de Göteborg qui réaffirme que « les femmes et les hommes ont droit à la même rémunération pour un travail de valeur égale. »

La directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail a, enfin, été transposée en droit français par la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

1.4.  Éléments de droit comparé

Plusieurs pays européens ont introduits récemment dans leurs législations de nouvelles obligations en matière de transparence salariale et de mesure des écarts éventuels de rémunération entre les femmes et les hommes.

Le Royaume-Uni a ainsi décidé d’obliger les entreprises de plus de 250 salariés à rendre public les écarts de salaires moyens entre les femmes et les hommes constatés, en taux horaire, à leur niveau en publiant cette information sur leur site et sur un site officiel national. Les entreprises pourront compléter ce chiffre par des éléments de contexte susceptibles d’expliquer les différences de rémunérations observées et décrire les mesures qu’elles ont déjà mises en œuvre afin de corriger les écarts. Les pouvoirs publics contrôleront certaines de ces déclarations et publieront des comparaisons par secteur. Ces dispositions sont applicables à partir d’avril 2017 pour de premières publications en 2018.

En Allemagne, une loi portant sur la transparence des structures salariales (Entgelttransparenzgesetz) a été adoptée le 12 mai 2017 et est entrée en vigueur le 6 janvier 2018. Elle crée notamment un droit d’information pour les salariés d’entreprises de plus de 200 salariés sur les critères et procédure de rémunération. Ainsi, un salarié peut demander à connaître le salaire moyen d’au moins six collègues du sexe opposé occupant le même poste que lui ou des fonctions comparables. La demande doit être adressée au comité d’entreprise, ou à défaut, directement à l’employeur. Une réponse écrite doit être apportée dans un délai de trois mois. Seules les personnes chargées de répondre à la demande peuvent avoir connaissance des données salariales individuelles. Dans les entreprises de plus 500 salariés, est en outre instaurée une obligation de publier un rapport dressant un état des lieux des écarts salariaux entre hommes et femmes dans lequel les résultats des mesures mises en place seront présentés. Ce rapport devra être établi tous les trois ou cinq ans et être annexé au rapport de gestion annuel et publié dans la Gazette fédérale publiée par le Ministère fédéral de la Justice.

En Islande, les nouvelles dispositions de la loi de 2008 sur l’égalité de statut et de droits des hommes et des femmes entrées en vigueur au 1er janvier 2018. Elles obligent les entreprises de plus de 25 salariés à obtenir une certification, renouvelable tous les trois ans, prouvant qu’elles accordent les mêmes rémunérations pour des tâches similaires, sous peine de se voir appliquer une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 couronnes, soit 400 € environ, par jour. La certification est établie à la suite d’un audit externe réalisé sur la base de critères définis en 2012 par l’office islandais de normalisation et inspirés par les standards internationaux, en particulier, ISO 9001 relative à la qualité du système de management. A l’origine incitative, cette norme (IST 85) a été élaborée suite à une large consultation, à laquelle ont notamment participé les syndicats et les fédérations d’employeurs. Son développement, initié en 2008, a pris quatre ans. Un organisme public, le Centre pour l’égalité des genres tient un registre des entreprises assujetties précisant si elles sont certifiées ou non. Ce registre est accessible aux partenaires sociaux. Les entreprises ou institutions de plus de 250 salariés ont jusqu’à la fin de l’année 2018 pour obtenir leur certification tandis que celles employant entre 25 et 89 salariés ont jusqu’à la fin de l’année 2021 pour remplir cette obligation.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Malgré le caractère contraignant du cadre légal et réglementaire déjà en place, force est de constater que les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes persistent.

Aussi, malgré l’ancienneté de l’affirmation de ce principe et un taux d’activité féminin en constante progression, la rémunération annuelle nette moyenne des femmes est toujours de plus de 25 % inférieure à celle des hommes. Trois séries de facteurs[169] expliquent cet écart :

1) Le travail à temps partiel d’abord, puisque plus de 80 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes. Ce moindre nombre d’heures travaillées explique pour plus d’un tiers l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes (9,4 %).

2) La ségrégation des métiers explique également une autre part, moins importante, de cet écart (5,8 %). Cette ségrégation est à la fois :

3) Il reste enfin une part d’écart résiduel non expliquée (10,5 %). Elle reflète pour partie la discrimination salariale dont sont victimes les femmes dans certains métiers, mais son ampleur traduit aussi les limites de l’analyse statistique, certains des déterminants de l’écart salarial femmes-hommes ne pouvant pas être mesurés.

Devant ce constat d’inertie, il paraît donc nécessaire de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultats afin que la mise en œuvre du principe « à travail de valeur égale, salaire égal » devienne enfin effective.

2.2.  Objectifs poursuivis

L’objectif poursuivi ici est de mettre fin aux écarts de salaires injustifiés entre les femmes et les hommes, c’est-à-dire qui ne peuvent être expliqués par des variables non discriminatoires, relatives par exemple à la quotité de travail, au niveau de diplôme ou à l’expérience professionnelle.

3.         Options possibles et dispositif retenu

3.1.  Options envisagées

Le choix aurait pu être fait de s’en tenir à des mesures incitatives afin d’encourager les employeurs et les différents acteurs à appliquer un principe inscrit depuis 1972 dans le loi, ou de laisser les partenaires sociaux libre de définir conventionnellement la méthode la plus appropriée pour atteindre cet objectif.

Cette approche, déjà mis en œuvre par le passé, a toutefois prouvé ses limites. La loi de n° 2006-340 du 23 mars 2006 relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes instaurant une obligation de négociation, au niveau de la branche comme de l’entreprise, pour « supprimer les écarts de d’ici entre les femmes et les hommes avant le 31 décembre 2010 », n’a ainsi pas eu les effets escomptés, puisque plus de dix après son adoption, les écarts n’ont toujours pas disparu.

3.2.  Option retenue

Les dispositions retenues dans le projet de loi en matière d’égalité salariale créent le fondement légal d’une obligation de résultat, dont les modalités de mise en œuvre seront précisées ultérieurement par décret. Cette mise en place en deux temps permettra à la consultation avec les partenaires sociaux de se poursuivre afin qu’ils puissent se prononcer sur les différentes options techniques qui pourraient résulter de cette nouvelle obligation.

Le cadre réglementaire paraît en outre le plus adapté à la définition d’une méthodologie commune de mesure des écarts puisqu’il pourra être adapté, le cas échéant, plus facilement en fonction des premiers retours d’expérience.

Enfin, un renforcement du contrôle par les services de l’inspection du travail est également prévu pour s’assurer de la mise en œuvre effective de ce cadre légal et réglementaire rénové.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1.      Impact sur l’ordre juridique interne

Un nouveau chapitre consacré à la « mesure des écarts éventuels » et aux « actions de correction » sera inséré au titre II « Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes » du code du travail après le chapitre qui définit déjà les principes à respecter en matière d’égalité salariale, chapitre au sein duquel figure notamment l’article L. 3221-2, qui dispose que « tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes ». Les nouvelles dispositions viendront préciser comment les entreprises devront s’assurer de la bonne mise en œuvre de ce principe.

Pour inciter les branches à accompagner les efforts des entreprises de leur secteur d’activité, l’article L. 2232-9, qui précise le rôle et les missions des Commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation (CPPNI), est également modifié : le rapport qui doit être établi annuellement par chaque commission devra désormais comporter un bilan de l’action de la branche en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Les dispositions portées par le projet de loi s’inscrivent pleinement dans les priorités définies par le plan d'action de l'Union européenne pour 2017-2019 destiné à éliminer l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes, présenté par la Commission le 30 novembre 2017 et qui prévoit notamment des mesures destinées à améliorer l’application du principe d’égalité salariale.[172]

4.2.  Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impact macroéconomique

Dans un rapport de septembre 2016 consacré au « coût économique des discriminations », France Stratégie a procédé à une estimation des gains macroéconomiques liés à la réduction de l’ensemble des écarts inexpliqués sur le marché du travail, écarts liés au sexe mais également à l’éventuelle ascendance migratoire de la population considérée. Dans le scénario ne s’attachant qu’aux effets liés à une réduction des écarts de salaires, le gain estimé en termes de PIB était estimé à 3,6 %, les femmes expliquant près de 90 % de cette hausse.

La mise en œuvre effective de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes pourrait donc avoir un effet positif quant à la quantité de richesses produites à l’échelle nationale.

La correction des écarts de salaires aura des effets plus important dans les secteurs et pour les catégories sociaux professionnelles où ils sont le plus marqués. Ainsi en 2015, le salaire net moyen des femmes était inférieur d’au moins 31 % à celui des hommes dans la branche des cabinets médicaux et celles de la banque, de la mutualité, de l’immobilier ou des cabinets d’experts comptables, cet écart atteignant seulement 19 % toutes branches confondues. Le salaire des femmes cadre était en outre de 20 % en moyenne inférieur à celui de leurs homologues masculins, l’écart observé n’étant que de 7 % pour les employés.[173]

4.2.2.      Impact sur les entreprises

Seules les entreprises de plus de 50 salariés entreront dans le champ de la nouvelle obligation de mesure des écarts de rémunération afin de garantir la fiabilité des résultats ainsi obtenus. Les entreprises concernées devront se doter d’un outil de mesure des écarts correspondant aux critères qui seront définis par décrets.

Elles pourront, le cas échéant, exploiter les informations qui doivent déjà être renseignées pour l’utilisation des logiciels de paye, afin de limiter la charge administrative nouvelle que représenter cette opération. Elles bénéficieront d’un accompagnement méthodologique des pouvoirs publics et pourront s’appuyer sur les préconisations ou exemples de bonnes pratiques proposées par leurs branches.

4.3.  Impacts sur les collectivités territoriales

Les nouvelles dispositions envisagées ne s’appliqueront qu’aux employeurs de droit privé et à leurs salariés. Elles n’auront donc pas de conséquences sur l’emploi public.

4.4.  Impacts sur les services administratifs

Le principal impact administratif a trait à l’information des services déconcentrés afin de garantir la qualité de leurs missions d’information et de contrôle.

La mise en œuvre du nouveau cadre normatif posé par le projet de loi pourra nécessiter une instruction de la direction générale du travail afin de présenter et d’expliquer le nouveau dispositif et de définir la stratégie de contrôle en découlant.

4.5.  Impact sur l’égalité entre les femmes et les hommes

L’impact sera positif puisque les dispositions portées par le projet de loi ont précisément pour objet de mettre fin aux écarts de rémunérations, à travail de valeur égale, entre les femmes et les hommes.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

L’obligation de mesurer les écarts éventuels de rémunération sur la base d’un indicateur chiffré entrera en vigueur au 1er janvier 2019 pour les entreprises de plus de 250 salariés et au 1er janvier 2020 pour les entreprises entre 50 à 250 salariés.

5.2.2.      Application dans l’espace

L’application des articles sera identique sur le territoire.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret devra préciser les modalités de mesure des écarts éventuels de rémunération.


Article 62 - Obligation pour l’employeur d’afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel  et des coordonnées des services compétents.

1.         État des lieux

La prévention du harcèlement sexuel incombe à l’employeur au titre de son obligation de santé et de sécurité. De la même manière, il lui incombe la responsabilité de mettre un terme aux situations de harcèlement sexuel et de sanctionner les auteurs. 

En effet, l’article L. 1153-5 du code du travail dispose que : «  L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner ». 

Dans ce cadre, l’employeur dispose d’une obligation d’affichage, dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche, des dispositions  du code pénal relatives au harcèlement sexuel (article 222-33). Sont ainsi portées à la connaissance de l’ensemble des personnels de l’entreprise, ainsi que des candidats à l’embauche la définition du harcèlement sexuel et les sanctions pénales qui en découlent.

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Cette obligation d’affichage se contente aujourd’hui de rappeler les dispositions légales relatives au harcèlement sexuel. Toutefois, elle ne comporte pas d’éléments d’information opérationnels visant à permettre à toute personne victime de tels agissements de connaitre les voies de recours qui lui sont ouvertes, ni l’ensemble des interlocuteurs adéquats (par exemple, les coordonnées du défenseur des droits). 

2.2.  Objectifs poursuivis

 L’objectif de la mesure est de renforcer l’obligation d’affichage, en prévoyant que celle-ci doit mentionner :

3.         Dispositif retenu

L’option retenue précise que l’affichage doit comporter les voies de recours civiles et pénales ouvertes, ainsi que les coordonnées des services compétents.

4.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

La disposition complète l’article 1153-5 du code du travail. Ces dispositions viennent s’ajouter à celles de l’article 222-33 du code pénal.

Aucun autre impact significatif n’est à signaler. La disposition vient compléter une obligation déjà existante pour les employeurs.

5.         Consultations et modalités d’application

5.1.  Consultations menées

Sont consultés :

5.2.  Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La disposition envisagée rentrera en vigueur à la publication du décret d’application.

5.2.2.      Application dans l’espace

L’application des articles sera identique sur le territoire.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret simple sera nécessaire pour préciser les services compétents visés par la disposition.


Chapitre 5 - Mesures relatives au parcours professionnel dans la fonction publique

Articles 63 à 65 - Prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle lors d’une période de disponibilité dans le déroulement de carrière des fonctionnaires de la fonction publique

1.         État des lieux

Le statut général de la fonction publique comporte différentes positions : l’activité (qui comprend la mise à disposition), le détachement, la position hors cadres, la disponibilité et le congé parental. Chacune de ces positions permet aux fonctionnaires d’effectuer, par exemple, une mobilité vers d’autres corps de la fonction publique ou vers le secteur privé tout en restant titulaires dans le corps dans lequel ils ont été recrutés.

Au 31 décembre 2015, parmi les fonctionnaires civils de l’État, 8,4 % n’exercent pas leur activité dans leur administration ou corps d’origine et sont placés dans l’une des quatre autres positions statutaires.

Lorsqu’un fonctionnaire souhaite partir exercer une activité professionnelle dans le secteur privé pour une durée limitée, il peut demander à bénéficier d’une disponibilité, qui correspond, selon les termes de l’article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État à « la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. » 

Ces dispositions sont reprises par l’article 72 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et l’article 62 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

La disponibilité est prononcée soit d’office (pour raisons de santé), soit à la demande du fonctionnaire. Il est possible de distinguer deux hypothèses de mise en disponibilité sur demande du fonctionnaire.

En premier lieu, les dispositions règlementaires actuellement applicables dans les trois fonctions publiques prévoient que la mise en disponibilité est accordée de droit au fonctionnaire, à sa demande, dans les cas suivants :

En second lieu, la mise en disponibilité peut également être prononcée, à la demande du fonctionnaire et sous réserve des nécessités du service, dans les cas suivants :

S’il est ainsi loisible à un fonctionnaire d’exercer, pour une durée limitée, en situation de disponibilité, une activité professionnelle hors de la fonction publique, cette période d’activité suspend l’évolution de sa carrière en termes d’avancement d’échelon et de promotion de grade jusqu’à sa réintégration dans la fonction publique.

Cette période n’est, par conséquent, pas non plus prise en compte en vue de l’avancement d’un fonctionnaire à un grade à accès fonctionnel (GRAF). Ce type de grade, prévu par l’article 58 de la loi du 11 janvier 1984 précitée et correspondant à la fin de la carrière de certains corps de fonctionnaires de catégorie A, n’est accessible qu’au fonctionnaire ayant occupé pendant une durée minimum des emplois ou des fonctions d’un niveau de responsabilité élevé au sein de l’administration.

La position de disponibilité est la deuxième position de mobilité dans laquelle se trouvent les fonctionnaires civils de l’État (33,3 %) après le détachement (41,6 %). Au 31 décembre 2015[174], 36 653 fonctionnaires civils de l’État étaient placés en position de disponibilité soit 2,8 % du nombre total de fonctionnaires de ce versant de la fonction publique. Plus de la moitié des fonctionnaires civils de l’État placés en position de disponibilité en 2014 et 2015 l’étaient pour convenances personnelles.

Répartition des disponibilités par catégorie[175]

 

2014

2015

Disponibilité pour convenances personnelles

53,1 %

52,8 %

Disponibilité pour créer ou reprendre une entreprise

1,3 %

1,2 %

Disponibilité pour études ou recherches présentant un caractère d’intérêt général

3,1 %

2,9 %

Disponibilité de droit

40,3 %

40,9 %

Disponibilité d’office pour raison de santé

2,2 %

2,2 %

S’il n’existe pas de données aussi récentes et précises concernant la fonction publique territoriale, il est possible d’indiquer qu’au 31 décembre 2013, 2,3 % des fonctionnaires territoriaux étaient en position de disponibilité (d’office ou sur demande). 66,7 % d’entre eux, étaient placés dans cette position pour convenances personnelles en vue de créer ou reprendre une entreprise ou entreprendre des études ou des recherches[176].

Les données globales de la fonction publique hospitalière sont également limitées. Les seuls chiffres disponibles sont ceux relatifs aux fonctionnaires dont la gestion est assurée par le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière ; ils ne concernent donc qu’une faible partie des fonctionnaires relevant de cette fonction publique. Au 1er janvier 2017, 6,7 % des praticiens hospitaliers, 1,5 % des personnels enseignants et hospitaliers, 2,7 % des directeurs d’hôpitaux, 3 % des directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux et 0,4 % des directeurs des soins étaient en position de disponibilité[177].

L’exercice d’une activité professionnelle en position de disponibilité n’est pour l’instant soumis à déclaration que dans le cadre du contrôle exercé par la commission de déontologie au titre de l’exercice d’une activité dans le secteur concurrentiel.

Concernant la fonction publique de l’État, entre 2010 et 2017, la commission de déontologie de la fonction publique a été saisie de 2 275 dossiers relatifs à des agents de ce versant de la fonction publique. Les saisines relatives à une disponibilité pour convenances personnelles représentent 85 % des dossiers transmis à cette commission.

Saisines de la commission de déontologie de la fonction publique
relatives à la fonction publique de l’État entre 2010 et 2017[178]

 

Saisines adressées à la commission de déontologie

Nombre

Pourcentage de l’ensemble des saisines

Disponibilité pour convenances personnelles

1 936

85 %

Disponibilité pour création d'entreprise

204

9 %

Disponibilité pour suivre son conjoint

135

6 %

Total

2 275

100 %

Le secrétariat de la commission de déontologie de la fonction publique ne dispose pas de séries statistiques aussi étendues concernant la fonction publique territoriale. Il dispose, toutefois, de données sur les trois dernières années. Ainsi, entre 2015 et 2017, 1 902 dossiers examinés par cette commission ont concerné la fonction publique territoriale.

La série statistique relative à la fonction publique territoriale porte sur une période plus courte ce qui rend les comparaisons avec la fonction publique territoriale difficiles. Toutefois, la répartition par type de disponibilité montre que, comme dans la fonction publique de l’État, plus des trois quarts des dossiers dont est saisie la commission de déontologie concernent des demandes de disponibilité pour convenances personnelles.


Saisines la commission de déontologie de la fonction publique
relatives à la fonction publique territoriale entre 2015 et 2017[179]

 

Saisines transmises à la commission de déontologie

Nombre

Pourcentage de l’ensemble des saisines

Disponibilité pour convenances personnelles

1 454

76 %

Disponibilité pour création d'entreprise

378

20 %

Disponibilité pour suivre son conjoint

70

4 %

Total

1 902

100 %

2.         Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Afin de permettre la prise en compte des activités professionnelles exercées par des fonctionnaires dans le secteur privé au cours de leur carrière, il est nécessaire de modifier les dispositions statutaires relatives à la disponibilité, pour les trois versants de la fonction publique.

2.2.  Objectifs poursuivis

Ces mesures visent à favoriser et valoriser les mobilités des fonctionnaires, en particulier des fonctionnaires appartenant aux corps de l’encadrement supérieur (les agents de catégorie hiérarchique A+ représentent dans la fonction publique d’État 42,9 % des agents en mobilité), c’est-à-dire ceux qui sont appelés à accéder aux emplois de direction des trois versants de la fonction publique. 

Il s’agit de permettre aux fonctionnaires de choisir leur parcours professionnel en les incitant à le diversifier, aux fins de faire bénéficier le service public d’une plus grande diversité d’expériences professionnelles.

Ces mesures améliorent ainsi les conditions de réintégration des agents qui ont choisi de quitter temporairement la fonction publique, en garantissant la poursuite du déroulement de leur carrière ainsi que la prise en compte des activités exercées au cours de cette période passée hors de leur administration d’origine, lors de leur retour au sein de celle-ci.

Elles représentent également une incitation au retour des fonctionnaires par le maintien des droits à l’avancement d’échelon et de grade dans la limite de cinq ans.

Ces dispositions permettront ainsi à la fonction publique de bénéficier de l’expérience et des compétences acquises par des fonctionnaires, lors de leur passage dans un autre environnement professionnel. Cet élargissement des horizons professionnels est devenu un enjeu des parcours professionnels des fonctionnaires, tout particulièrement de ceux exerçant des fonctions de conception et de direction, afin que les cadres supérieurs et dirigeants du secteur public puissent proposer les meilleures innovations pour rendre le service public toujours plus efficace.

Elles permettent par ailleurs de renforcer les liens entre le fonctionnaire en disponibilité et son administration d’origine. En effet, actuellement, le départ en disponibilité du fonctionnaire se traduit par un éloignement de son service d’origine. Les seuls liens aux services maintenus sont l’obligation qui est faite au fonctionnaire, à l’issue d’une période de disponibilité, d’informer son administration de son intention de réintégrer ou de renouveler sa disponibilité ainsi que les contrôles que l’administration peut effectuer pour vérifier si l’activité de l’agent correspond aux motifs pour lesquels il a été placé en disponibilité.

Désormais, la possibilité de prendre en compte l’exercice d’une activité professionnelle en position de disponibilité, au titre de l’avancement et de l’accès à certains grades, nécessitera un contact annuel du fonctionnaire concerné avec son administration gestionnaire. En effet, le fonctionnaire en disponibilité devra transmettre chaque année à son administration gestionnaire l’ensemble des éléments nécessaires à l’examen de sa demande de prise en compte de son activité professionnelle, relatifs notamment à la nature de ces activités, à leur niveau de responsabilité (dans le cadre de l’accès à certains grades) et à la quotité de temps de travail effectué.

Cette prise de contact sera également une opportunité pour le fonctionnaire concerné de faire le point sur le déroulement de sa carrière et d’informer son administration de ses intentions quant à la poursuite de celle-ci.

3.         Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1.  Impacts économiques et financiers

Depuis 2013, la part des fonctionnaires civils de l’État en disponibilité est inférieure à 3 %.

 

Part des agents en disponibilité entre 2013 et 2015[180]

 

2013

2014

2015

Pourcentage de fonctionnaires civils de l’État placés en position de disponibilité

2,5 %

2,6 %

2,8 %

Au 31 décembre 2013, 2,3 % des fonctionnaires territoriaux étaient en position de disponibilité (derniers chiffres disponibles). Au vu de ces effectifs, le maintien des droits à l’avancement d’un fonctionnaire bénéficiant d’une disponibilité au cours de laquelle il exerce une activité professionnelle ne devrait pas avoir d’impact budgétaire significatif. Cela d’autant plus que ce maintien des droits à l’avancement n’est prévu que pour une durée maximale de cinq ans, ce qui permet de réduire le coût budgétaire de la mesure.

En effet, s’agissant de l’avancement d’échelon, la durée moyenne dans chaque échelon étant comprise entre deux et trois ans, les fonctionnaires concernés par la prise en compte de l’exercice d’une activité professionnelle au cours d’une période de disponibilité ne sont susceptibles de progresser en moyenne que d’un ou deux échelons au cours de cette période.

S’agissant de l’avancement de grade, le gain d’indice lors d’une telle promotion est en moyenne inférieur ou égal à 40 points d’indice majoré.

Enfin, en ce qui concerne la prise en compte des activités effectuées dans le secteur privé en vue d’un avancement au grade à accès fonctionnel n’a pas non plus d’impact budgétaire dans la mesure où les effectifs de ce type de grade sont contingentés.

Pour rappel, le grade à accès fonctionnel culmine au sommet de la carrière de 44 corps et cadres d’emplois de catégorie A relevant des trois versants de la fonction publique.

3.2.  Impacts sociaux

Ces mesures permettent, notamment, à un fonctionnaire, qui demande à bénéficier d’une disponibilité pour suivre son conjoint ou pour convenances personnelles, de valoriser l’expérience professionnelle acquise hors de la fonction publique durant cette période.

En cela, elles constituent une mesure forte en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, puisque les femmes représentent plus de la moitié des fonctionnaires civils de l’État et des agents publics territoriaux en disponibilité.

Ainsi, au 31 décembre 2015, 67 % des fonctionnaires civils de l’État en disponibilité étaient des femmes[181]. Concernant la fonction publique territoriale, en 2013, 68,1 % des fonctionnaires et contractuels de la fonction publique territoriale en position de disponibilité étaient des femmes et 83,2 % des agents publics territoriaux bénéficiant d’une disponibilité de droit étaient des femmes[182].

Les données issues du secrétariat de la commission de déontologie de la fonction publique relatives, notamment, aux saisines de la commission effectuées par des fonctionnaires bénéficiant de disponibilités de droit pour suivre son conjoint illustrent les effets bénéfiques de cette réforme sur la carrière des femmes.

Dans la fonction publique de l’État, les saisines de la commission effectuées par des fonctionnaires bénéficiant d’une disponibilité de droit pour suivre son conjoint émanent majoritairement de femmes (67 % de ces saisines).

Les femmes ne représentent, en revanche, qu’un tiers des saisines de la commission effectuées par des fonctionnaires bénéficiant d’une disponibilité pour convenances personnelles et 40 % des saisines relatives à la reprise ou à la création d’une entreprise.

Statistiques relatives à la répartition femmes-hommes
des saisines de la commission de déontologie de la fonction publique
relative à la fonction publique de l’État entre 2010 et 2017[183]

 

Hommes

Femmes

Total

% de femmes

Disponibilité pour convenances personnelles

1 278

658

1 936

34 %

Disponibilité pour création d'entreprise

123

81

204

40 %

Disponibilité pour suivre son conjoint

45

90

135

67 %

Total

1 446

829

2 275

36 %

 

Dans la fonction publique territoriale, les saisines de la commission effectuées par des fonctionnaires bénéficiant d’une disponibilité de droit pour suivre son conjoint émanent encore plus majoritairement de femmes (81 % de ces saisines).

Il faut également souligner que les femmes sont à l’origine de plus de la moitié des saisines de la commission effectuées par des fonctionnaires territoriaux alors qu’elles ne représentent que le tiers des saisines émanant des fonctionnaires civils de l’État. Ainsi, s’agissant de la fonction publique territoriale, les femmes sont à l’origine de 53 % des saisines relatives à des disponibilités pour convenances personnelles et de 43 % de celles relatives à la création ou à la reprise d’une entreprise.

Statistiques relatives à la répartition femmes-hommes
des saisines de la commission de déontologie de la fonction publique
relative à la fonction publique territoriale entre 2015 et 2017[184]

 

Hommes

Femmes

Total

% de femmes

Disponibilité pour convenances personnelles

680

774

1 454

53 %

Disponibilité pour création d'entreprise

197

181

378

48 %

Disponibilité pour suivre son conjoint

13

57

70

81 %

Total

890

1 012

1 902

53 %

4.         Consultation et modalités d’application

4.1.  Consultation menée

Le Conseil commun de la fonction publique (CCFP) a été consulté le 27 mars dernier sur ces dispositions communes aux trois versants de la fonction publique.

Le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) est consulté sur les dispositions relatives aux fonctions publiques territoriale et hospitalière.

 

4.2.  Modalités d’application

4.2.1.      Application dans le temps

Il est précisé que ces dispositions s’appliquent aux mises en disponibilité et aux renouvellements de disponibilité prenant effet à compter de la date de publication de la présente loi.

4.2.2.      Textes d’application

Les dispositions des textes règlementaires précisant les conditions dans lesquelles sont accordées et renouvelées les mises en disponibilité sur demande des fonctionnaires, relatives notamment à la durée maximale de la disponibilité, doivent être modifiées.

Des décrets en Conseil d’État sont nécessaires afin de modifier :


Chapitre 6 – Dispositions d’application

Article 66 – Habilitation : mise en cohérence, correction et adaptation outre-mer

1.         Éléments de contexte et diagnostic

Les dispositions du présent article visent à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure nécessaire afin d'harmoniser les dispositions législatives, d'assurer la cohérence des textes, d'abroger les dispositions devenues sans objet et de remédier aux éventuelles erreurs résultant du présent projet de loi. Cette habilitation couvrira également les adaptations des dispositions issues du présent projet de loi aux collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, à Saint Barthélémy, à Saint-Martin et à Saint Pierre et Miquelon.

Ainsi, l’ordonnance prise au titre du présent article vise à consolider l'articulation juridique des mesures portées par la présente loi et, plus particulièrement, son titre premier, porteur d’une réforme systémique de la formation professionnelle. Elle viendra en sus des dispositions du projet de loi ayant pour objet harmoniser l'état du droit, d’assurer la cohérence des textes, d’abroger les dispositions devenues sans objet, de remédier aux éventuelles erreurs, de réécrire certaines dispositions afin d'en clarifier ou d'en préciser la portée, dans un souci de sécurité juridique et d'intelligibilité, et d’actualiser les références au code du travail dans les codes, lois et ordonnances en vigueur.

Elle procèdera également à la correction des erreurs matérielles ou des incohérences contenues dans le code du travail ou d'autres codes à la suite des évolutions législatives consécutives au présent projet de loi, mais également à la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie, à la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi et à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

Au titre des dispositions relatives aux collectivités d’outre-mer, il convient de signaler que le droit de la formation professionnelle, s’il développe les mêmes objectifs de politique publique au sein des territoires d’outre-mer,  comporte des adaptations visant à traiter les spécificités de ces territoires en termes de marché de l’emploi et de développement économique liées aux problématiques d’éloignement et/ou d’insularité et des taux de chômage qui restent significativement plus élevés que sur le territoire métropolitain.

Dans ce contexte, au-delà des dispositions portées par l’article 22 du projet de loi, il convient de permettre, le cas échéant, postérieurement au vote de la loi, d’intégrer un temps d’expertise et de concertation avec les territoires ultramarins afin de mesurer l’étendue des possibles mesures d’adaptation. Ces mesures permettront, le cas échéant, à la réforme de la formation professionnelle de produire un effet optimum sur ces territoires.

2.         Justification du délai d’habilitation

Ces dispositions nécessitent un délai d’habilitation de douze mois afin de mener à terme le calendrier de consultations envisagé par le Gouvernement, tout en restant compatible avec l’objectif de publication de l’ordonnance fixé.

 

1

 


[1] Sabine Fourcade, Eve Robert et Véronique Wallon, Bilan d’étape du déploiement du compte personnel de formation (CPF), Rapport de l’inspection générale des affaires sociales, n°2016-140R, juillet 2017, http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2016-140R.pdf.

[2] Noté ci-après M€.

[3] Données définitives issues des états statistiques et financiers de 2016 des OPCA.

[4] Noté ci-après Md€.

[5] CNEFOP, Rapport 2017 sur le suivi et la mise en œuvre du Conseil en Évolution Professionnelle (CEP) et du Compte Personnel de Formation (CPF), juin 2017

[6] Terra nova, Rapport sur la formation professionnelle : entrer et rester dans l’emploi : un levier de compétitivité, un enjeu citoyen, juin 2014.

[7]  Donnée issue du bilan pédagogique et financier (BPF).

[8]  Cf. Annexe Formation professionnelle au projet de loi de finances pour 2018.

[9] http://www.cedefop.europa.eu/fr/publications-and-resources/publications/4106.

[10] Donnée issue du bilan pédagogique et financier (BPF).

[11] http://www.centre-inffo.fr/IMG/pdf/focus_decret_qualite_4e_e_dition_20102017.pdf.

[12] CNEFOP, Rapport faisant synthèse des démarches Qualité menées dans le champ de  la formation professionnelle, en  liaison avec les financeurs 2017, mars 2018.

[13] http://www.cnefop.gouv.fr/qualite/

[14] La quasi-totalité des cas depuis que la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a créé la possibilité d’un apprentissage dans le cadre d’un CDI.

[15] Article L. 6222-23 du code du travail.

[16] Article D. 6222-26 du code du travail.

[17] Article L. 6222-36-1 du code du travail.

[18] Brunet, Sylvie, Rapport pour le développement de l'apprentissage – synthèse de la concertation, janvier 2018.

[19] Données au 31 décembre 2015 issues du MENESR-DEPP (ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche - direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance), SIFA (système d'information de la formation des apprentis).

[20] Cf. 1.2 des articles 7 à 9.

[21] Brunet, Sylvie, Rapport pour le développement de l'apprentissage – synthèse de la concertation, janvier 2018.

[22] IGAS, Les freins non financiers au développement de l'apprentissage, n° 2013-145R, février 2014.

[23] Cf. chapitre du présent projet de loi dédié à la gouvernance.

[24] Cf. introduction du chapitre.

[25] IGF/IGAS, Les aides financières à la formation en alternance, juin 2013.

[26] À partir de l’analyse des règlements d’intervention relatifs à la gestion de la prime adoptés par les Conseil régionaux.

[27] Respectivement aux articles L. 6243-1, L. 6243-1-1 et L. 6222-38 du code du travail.

[28] Décrit à l’article 244 quater G du code général des impôts

[29] Créée par décret n° 2015-773 du 29 juin 2015 portant création d'une aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis

[30] Cf. introduction du chapitre.

[31] DARES, Le contrat de professionnalisation en 2016, mars 2018.

[32] DARES, Le contrat de professionnalisation en 2016, n°009, mars 2018.

[33] France Stratégie, Élaborer une stratégie nationale de compétences, février 2017.

[34] La Commission nationale de la certification professionnelle ne possède pas de personnalité juridique, elle est placée auprès du ministre chargé de la formation professionnelle qui accomplit tous les actes juridiques la concernant. À ce titre, l’enregistrement dans le répertoire national des certifications professionnelles est prononcé par arrêté. Pour instruire les dossiers du Répertoire national de la certification professionnelle et de l’inventaire, la Commission nationale de la certification professionnelle dispose de 17 ETP et s’appuie sur 28 correspondants régionaux placés auprès des DIRECCTE ou des recteurs.

[35] 75 % des certifications actives sont enregistrées de droit, contre 25 % sur demande.

[36] En quatre ans, 1 400 certifications supplémentaires ont été enregistrées au Répertoire national de la certification professionnelle dans le cadre de la procédure d’enregistrement sur demande.

[37] À titre d’exemple, il existe actuellement 26 certifications de coach, classées aux niveaux I et II, enregistrées au Répertoire national de la certification professionnelle.

[38] Trois systèmes peuvent être distingués : les systèmes de certification centrés sur un acteur unique, le plus souvent le ministère en charge de l'éducation ; les systèmes de certification duaux, comme ceux en vigueur en Allemagne, en Autriche, aux Pays-Bas ou au  Luxembourg ; les systèmes de certification pluriels avec coexistence de certifications d’État, de certifications émanant d’organismes de formation et de certifications de branches, à l’image du système français.

[39] Les partenaires sociaux interviennent dans la création des certifications d’État via les commissions professionnelles consultatives (CPC) chargées d’émettre un avis sur les créations et révisions de diplômes ou de titres professionnels. Le poids des partenaires sociaux y est significatif (près de 40 % des membres des CPC du ministère chargé de l’agriculture et du ministère chargé de la jeunesse et des sports, 50 % des membres des CPC du ministère chargé de l’éducation nationale et du ministère chargé des affaires sociales et 56 % des membres de la CPC du ministère chargé de l’emploi).

[40] La classification française des niveaux de qualification repose sur une circulaire interministérielle de 1967.

[41] Les dispositions relatives à la certification professionnelle sont actuellement codifiées, de manière peu intuitive, dans le chapitre « Dispositions communes aux formations technologiques et aux formations professionnelles » du code de l’éducation.

[42] CESE, Les certificats de qualification professionnelle, Avis, septembre 2016.

[43] En l’absence de commission professionnelle consultative, les partenaires sociaux ne sont par ailleurs pas associés à la construction des diplômes de l’enseignement supérieur.

[44] La Commission nationale de la certification professionnelle est rebaptisée Conseil national de la certification professionnelle en adéquation avec le renforcement de sa dimension stratégique.

[45] Sauf lorsque le projet de certification porte sur un diplôme ou titre à finalité professionnelle requis pour l’exercice d’une profession en application d’une règle internationale ou d’une loi. Dans ce cas, la commission professionnelle consultative ou le conseil sectoriel national compétents émettent un avis simple.

[46] Cet avis est rendu dans le cadre des CPC ou des conseils sectoriels nationaux (structures équivalentes aux CPC que le ministère chargé de l’enseignement supérieur prévoit de mettre en place) pour lesquels le projet de loi prévoit par ailleurs qu’ils sont composés, au moins pour moitié de leurs membres, de représentants d’organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel et d’organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national. Ces instances peuvent être saisies par une commission paritaire nationale de l'emploi d'une branche professionnelle de toute question portant sur leur domaine de compétences.

[47] CESE, Les certificats de qualification professionnelle, Avis, septembre 2016.

[48] L’inventaire est rebaptisé répertoire spécifique.

[49] Pisani-Ferry, Jean, Le Grand Plan d'Investissement 2018-2022, Rapport au Premier ministre, septembre 2017.

[50] La collecte annuelle légale des OPCA sur le plan des – de 11 salariés était de 389 M€.

[51] Assemblée nationale - Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, Rapport d’information sur l’évaluation de l’adéquation entre l’offre et les besoins de formation professionnelle, janvier 2014.

[52] Assemblée nationale - commission des affaires sociales, Rapport d’information sur la mise en application de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, mars 2016.

[53] Rapport du CNEFOP, Le financement et les effectifs de l’apprentissage – données 2015, octobre 2017.

[54] Conseil constitutionnel n° 2014-708 DC du 29 décembre 2014 ;

Conseil constitutionnel n° 2013-684 DC du 29 décembre 2013.

[55] Sylvie Brunet, Rapport pour le développement de l’apprentissage - Synthèse de la concertation, janvier  2018,  « Gouvernance et financement », p. 31.

[56] DARES, Enquête statistique harmonisée,  « Adult Education Survey », 2012.

[57] Données issues d’Eurostat - DARES.

[58] Évaluation des compétences des adultes (étude PIAAC), données 2012, traitement OCDE 2015.

[59] France Stratégie, le compte personnel d’activité, de l’utopie au concret, octobre 2015.

[60] Enquête IFOP sur la mobilité professionnelle, février 2017.

[61] Loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail.

[62] Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail.

[63] L’accord d’application n°14 du 14 avril 2017 prévoit ainsi quinze cas de démissions légitimes. À titre d’illustration, sont notamment concernées la démission du mineur suite au changement du lieu de résidence de ses parents, la démission suite à un mariage ou un pacte civil de solidarité (Pacs) ayant entrainé un changement de lieu de résidence, ou encore la démission intervenue pour cause de changement de résidence justifié par une situation de violences conjugales ayant donné lieu à dépôt d’une plainte.

[64] §1er de l’accord d'application n° 12 du 14 avril 2017 pris pour l’application de l'article 46 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage.

[65] Pour un salarié d’au moins 53 ans et de moins de 55 ans, cette durée est portée à trente mois (913 jours calendaires) et trente-six mois (1 095 jours calendaires) au-delà de 55 ans.

[66] Cette reprise du versement des reliquats de droit pourrait être autorisée à l’issue d’une période de 122 jours suivant la décision de radiation, à un examen par l’instance paritaire régionale des efforts accomplis par l’intéressé durant cette période en vue de retrouver un emploi.

[67] Chiffrage DARES.

[68] 21 000 à 38 000 dossiers présentés / 18 régions / 47 semaines travaillées.

[69] CNEFOP, Rapport 2017 sur le suivi et la mise en œuvre du Conseil en Évolution Professionnelle (CEP) et du Compte Personnel de Formation (CPF).

[70] Fichier national des allocataires, Unédic-Pôle emploi.

[71] Pôle emploi, État des lieux sur l’indemnisation des démissionnaires.

[72] Note d’analyse du Conseil d’analyse stratégique, La rupture conventionnelle du contrat de travail, octobre 2010.

[73] Rapport de la mission IGF/IGAS, L’ouverture de l’assurance chômage aux travailleurs indépendants,  octobre 2017.

[74] France Stratégie, Salarié ou indépendant : une question de métiers ?, septembre 2017.

[75] France Stratégie, Dix ans de transitions professionnelles, mars 2016.

[76] Certaines catégories de travailleurs indépendants « assimilés salariés » au sens de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et certaines catégories de dirigeants d’entreprises bénéficient de la couverture prévue par le régime d’assurance chômage, mais ils représentent une part très réduite de la population indépendante.

[77] Rapport de la mission IGF/IGAS, L’ouverture de l’assurance chômage aux travailleurs indépendants,  octobre 2017.

[78] En outre, les dispositions de la Convention n°102 ont été reprises dans le Code européen de sécurité sociale établi par le Conseil de l’Europe en 1964, dont la version révisée a été ratifiée par la France en 1990.

[79] IGF/IGAS, L’ouverture de l’assurance chômage aux travailleurs indépendants,  octobre 2017.

[80] L’aléa moral est une notion économique désignant la situation dans laquelle un assuré ne fournit pas l’effort nécessaire pour prévenir un risque se sachant couvert (V. à cet effet, Landais, Camille (2013), 11. L’avenir de l’assurance chômage en question…, Regards croisés sur l’économie, vol. 13).

[81] CREDOC, Enquête « Conditions de vie et aspiration », avril 2017.

[82] Unédic, Comprendre l’Assurance chômage en 9 fiches, septembre 2017.

[83] Unédic, La majorité des embauches en contrats courts se font chez un ancien employeur, Éclairages, Études et analyses, n°14, janvier 2016.

[84] Unédic, évolution des CDD de moins d’un mois et de l’intérim par secteur d’activité, février 2018.

[85] Unédic, évolution des CDD de moins d’un mois et de l’intérim par secteur d’activité, février 2018.

[86] Unédic, le financement de l’indemnisation du chômage en Europe, février 2016.

[87] Cette exclusion implique une évolution de l’article L. 5424-20 du code du travail. Cette modification apparaît à l’article 30 du projet de loi.

[88] Conseil constitutionnel, Décision n° 2014-698 DC du 6 août 2014.

[89] DARES, Documents d’études, Comparaisons internationales des régimes d’assurance chômage : quels enseignements ? Un exercice de comparaison au 1er janvier 2015, mai 2017.

[90] L’article L. 5424-20 est modifié afin d’exclure les fins de contrat de travail des travailleurs, artistes ou techniciens, relevant des professions de la production cinématographique, de l'audiovisuel ou du spectacle donnant lieu au paiement de la contribution spécifique prévue au présent article ne sont pas prises en compte au titre du 1° de l’article L. 5422-12 (modifié par l’article 29 du projet de loi).

[91] Conseil constitutionnel, Décision n° 2014-698 DC du 6 août 2014.

[92] Conseil constitutionnel, Décision n° 97-393 DC du 18 décembre 1997.

[93] Conseil constitutionnel, Décision n° 60-10 L du 20 décembre 1960.

[94] Conseil constitutionnel, Décision n°98-405 DC du29 décembre 1998, cons. 63, 64 et 67.

[95] CJUE,  aff.C-623/13, Ministre de l’Économie et des Finances / Gérard de Ruyter, 26 février 2015.

[96] À noter que la Cour de cassation a récemment reconnu la double nature de la CSG : imposition de toutes natures et cotisation : Soc. 31 mai 2012, FS-P+B, n° 11-10.762.

[97] Écart entre le salaire super brut (ce qui est versé par l’entreprise) et le salaire super net (ce qui est perçu par le salarié).

[98] Annexe 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

[99] Données issues de Pôle emploi, Estimation à partir de la masse salariale 2017 des salariés relevant des annexes VIII et X.

[100] Données issues de Pôle emploi, Estimation à partir de la masse salariale 2017 des salariés expatriés affiliés à titre individuel.

[101] Articles L. 5422-20 et L. 5427-1 du code du travail.

[102] Convention nationale du 31 décembre 1958 créant un régime national interprofessionnel d’allocations spéciales aux travailleurs sans-emplois de l’industrie et du commerce et des textes qui lui sont annexés agréée par l’arrêté du ministre du travail du 12 mai 1959 (JORF du 15 mai 1959 p. 5021).

[103] Articles L. 5422-1 à L. 5422-25 et l’article L. 5425-1 du code du travail.

[104] Articles R. 5422-1 à R. 5422-17 du code du travail.

[105] Articles L. 5422-16 et L. 5427-1 du code du travail.

[106] Unédic, perspectives financières de l’assurance-chômage 2016-2019 et 2017-2020.

[107]  Conseil constitutionnel, Décision n°71-44 DC du 16 juillet 1971 portant sur la loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ;

Conseil constitutionnel,  Décision n°74-54 DC du 15 janvier 1975 portant sur la loi relative à l’interruption volontaire de la grossesse.

[108] DARES, Document d’études, Comparaisons internationales des régimes d’assurance chômage : quels enseignements ? Un exercice de comparaison au 1er janvier 2015, mai 2017.

[109] Lois n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi et n° 2008-758 du 1er août 2008 relative aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi.

[110] Article L. 5426-1 du code du travail.

[111] Articles L. 5426-2 et L. 5426-5 à 8 et L. 5426-9.

[112] Données issues de Pôle emploi.

[113] Données issues de la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle.

[114] Cour des comptes, Rapports publics annuels 2010 et 2014.

[115] Conseil constitutionnel, Décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989.

[116] Conseil constitutionnel, Décision n° 2016-550 QPC du 1er juillet 2016.

[117] Conseil constitutionnel, Décision n° 2016-572 QPC du 30 septembre 2016.

[118] Conseil d’État, 3 décembre 1999, Didier, n° 207434 ;

Conseil constitutionnel, Décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012.

[119] Conseil d’État, 26 février 2003, Daveze, n° 237297.

[120] Cour européenne des droits de l'homme, 21 février 1984, Oztürk c/ R.F.A., n° 8544/79.

[121] Cour européenne des droits de l'homme, 15 novembre 2016, A et B c/ Norvège, n° 24130/11.

[122] Cour européenne des droits de l'homme, 4 mars 2014, Grande Stevens c/ Italie, n° 18640/10, 18647/10, 18663/10, 18668/10 et 18698/10.

[123] Langenbucher, Kristine (2015), How demanding are eligibility criteria for unemployment benefits, quantitative indicators for OECD and EU countries, OECD Social, Employment and Migration Working Papers, n° 166.

[124] DG Trésor, note, Trésor–Eco.

[125] Unédic, Impact de la convention d’assurance chômage 2017.

[126] Note DARES n°071 de septembre 2017.

[127] Étude DARES « Entreprises et Handicap : les modalités de mise en œuvre de l’OEHT », septembre 2016.

[128] Rapport IGAS-IGF n° 2017-M-044 et n° 2017-083 de décembre 2017.

[129] DARES, l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, comment les établissements s’en acquittent-ils ?, novembre 2016.

[130] Article 21 de la loi n° 57-1223 du 23 novembre 1957 sur le reclassement professionnel des travailleurs handicapés.

[131] Données issues de l’agence de services de paiement (ASP-extranet) au 6 mars 2018 et enquêtes ciblées auprès de trois DIRECCTE par la délégation générale à l’emploi et à la formation (DGEFP).

[132] Expression issue du rapport Sénat, n° 210, tome 1, Blanc, Paul février 2004, p. 137.

[133] Sans se confondre avec un accompagnement médico-social permanent caractéristique des établissements et services d’aide au travail (ESAT).

[134] Code du travail, articles L. 5213-19 et D. 5213-77.

[135] Créé par l’article 59 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet relative à l’économie sociale et solidaire.

[136]  IGF/IGAS, Les entreprises adaptées, septembre 2016 ;

Voir également IGF/IGAS, Le mode de financement de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, décembre 2017.

[137] La mise à disposition est encadrée par les articles D. 5213-81 à D. 5213-86 du code du travail.

[138] Observatoire économique de l’achat public, données issue du recensement 2013 des marchés publics assemblée plénière, novembre 2014.

[139] Les 3000 aides au poste supplémentaires prévues au Pacte pour l’emploi ont été créées entre 2012 et 2016.

[140] IGF/IGAS, Les entreprises adaptées, septembre 2016.

[141] L’échantillon comprend 194 entreprises adaptées associatives et 166 entreprises adaptées sous forme commerciale, soit 54 % d’entreprises adaptées associatives et 46 % d’entreprises adaptées commerciales.

[142] L’excédent brut d’exploitation (EBE) exprime la capacité d’une entreprise à générer des ressources de trésorerie du seul fait de son exploitation, c’est-à-dire sans tenir compte de sa politique de financement, ni de sa politique d’amortissement, ni des événements exceptionnels. L’EBE permet de porter un jugement sur l’activité d’une entreprise en analysant la performance de ses activités opérationnelles.

[143] IGF/IGAS, Les entreprises adaptées, septembre 2016.

[144] Données issues de la DARES (V. à cet effet, DARES, Synthèse.stat’, Emploi et chômage des personnes handicapées, n° 17, novembre 2015).

[145] IGF/IGAS, Les entreprises adaptées, septembre 2016.

Ce taux de sortie est calculé en analysant les montants alloués par les DIRECCTE au titre du critère « valorisation de la mobilité externe » de la subvention spécifique (4 600 € par ETP).

[146] Aide au poste et subvention spécifique.

[147] Aide au logement, prime d’activité, allocation aux adultes handicapés et complément de ressources.

[148] Personne handicapée qui vit seule, sans enfant, résidant en zone 2 (agglomération de plus 100 000 habitants) et qui loue un appartement non meublé dont le loyer mensuel est de 500 €.  

[149] Voir infra Cadre conventionnel.

[150] Voir, notamment, la mise en place de mesures appropriées pour prévenir la reproduction, la distribution, la communication au public ou la mise à disposition du public non autorisées d'exemplaires en format accessible et garantir le respect plein et entier des règles applicables au traitement des données à caractère personnel.

[151] IGAS / IGAC / IGAENR, Les structures ayant une activité d'adaptation des œuvres au bénéfice des personnes en situation de handicap - réalités observées et perspectives, décembre 2016.

[152] Borello Jean-Marc, Rapport, Donnons-nous les moyens de l’inclusion, janvier 2018.

[153] Système d'Information sur les Prestations de Service Internationales : https://www.sipsi.travail.gouv.fr/SipsiCasFo/login?service=https%3A%2F%2Fwww.sipsi.travail.gouv.fr%2FSipsiFO.

[154] Loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale ;

Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ;

Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

[155] CJUE, C-620/15, A-Rosa Flussschiff GmbH contre Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’Alsace et Sozialversicherungsanstalt des Kantons Graubünden, 27 avril 2017.

[156] CJUE, C-359/16, Altun e.a, 6 février 2018.

[157] Conseil constitutionnel, décision n°  2010-72/75/82 QPC du 10 décembre 2010.

[158] Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014, chapitre IV, « La lutte contre la fraude aux cotisations sociales : des enjeux sous-estimés, une action à intensifier », p. 123-150.

[159]  Direction générale du travail, Analyse de la verbalisation du travail illégal  en 2016 », février 2018.

[160]  Article L. 215-3 du code de la consommation et  article L. 450-3 du code de commerce.

[161] Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.

[162] Lorsque le destinataire est un autre service de contrôle, le droit de communication peut être considéré une des mesures appropriées favorisant une « coopération effective entre les services d'inspection, […] et d'autres services gouvernementaux et les institutions publiques et privées exerçant des activités analogues » prévue à l’article 5 de la Convention n°81.  Quant aux pouvoirs d’obtenir communication de document pendant le contrôle, les stipulations de l’article 12 qui inspirent les dispositions françaises existantes,  vont moins loin que la mesure proposée mais se trouvent de fait obsolètes ou inadaptées à la mission de lutte contre le travail illégal.

[163] Estimation du temps moyen passé pour répondre au droit de communication : 2 heures ; coût salarial horaire moyen d’un cadre majoré d’une estimation de frais généraux : 67,5 €.

[164] ACOSS, Note d’étude et de prévision, Évaluation de l’évasion sociale, note d’étude et de prévision, avril 2016.

[165]  Cour des comptes, rapport  public  annuel 2018, p. 249, février 2018.

[166]  Ministères de l’Économie, des Finances, de l’Action et des Comptes publics, L'évasion fiscale en chiffres.

[167] Articles L. 2242-8 et R. 2242-2 du code du travail.

[168] Article L. 2241-1 du code du travail.

[169] DARES, « Ségrégation professionnelle et écarts de salaires femmes-hommes », DARES Analyses, n° 82, novembre 2015.

[170] DARES, « La répartition des femmes et des hommes par métiers : une baisse de la ségrégation depuis 30 ans », DARES Analyses, n° 79, décembre 2013

[171] DARES, « Femmes et hommes sur le marché du travail », DARES Analyses, n° 17, mars 2015

[172] Commission européenne, COM(2017) 678 final, 20 novembre 2017.

[173] DARES, Portrait statistique des principales conventions collectives de branche en 2015, DARES Résultats, n° 10, mars 2018.

[174] DGAFP, Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, 2017, p. 366.

[175] Ibid.,  p. 369.

[176] Ibid., p. 374.

[177] Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, Rapport d’activité 2016. 

[178] Chiffres transmis par le secrétariat de la commission de déontologie de la fonction publique.

[179] Ibid.

[180] DGAFP, op.cit., p. 366.

[181] Ibid., p. 371.

[182] Ibid., p. 374.

[183] Chiffres transmis par le secrétariat de la commission de déontologie de la fonction publique.

[184] Ibid.