ÉTUDE d’impact
Projet de loi
relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique
NOR : MICE1927829L/Bleue-1
4 décembre 2019
Table des matières
Tableau synoptique des consultations
Tableau synoptique des mesures d’application
Titre Ier – DEVELOPPEMENT ET DIVERSITE DE LA CREATION ET DE LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 6 : suppression des heures d’écoute significatives
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 8 : placement de produit
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 9 : publicité et téléachat sur écran partagé
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 10 : troisième coupure publicitaire et annonce des programmes
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations menées et modalités d’application
Article 18 : principe de réajustement de la rémunération prévue au contrat
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Titre II – ADAPTATION DE LA REGULATION DE LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
Article 22 : fusion du CSA et de la HADOPI
2. Necessite de legiferer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagees
5. Consultations et modalites d’application
Article 22 et 24 à 26 : évolution des missions de l’ARCOM
2. Nécessité de légiférer et objectif poursuivi
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 23 : lutte contre le piratage des contenus sportifs en direct
2. Nécessité de légiférer et objectif poursuivi
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts et des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Articles 29, 30, 34, 74 et 75 : composition de l’ARCOM
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 36 : Pôle d’expertise numérique
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 37 : mission générale de l’ARCOM et procédure de conciliation
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 38 : action internationale de l’ARCOM
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 39 : règlement des différends
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 40 : pouvoirs d’information et d’enquête de l’ARCOM
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 41 : protection de l’intégrité du signal
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
3. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 49 : relations ARCOM-Administration des impôts
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Articles 50 à 53 : régulation des plateformes en ligne
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 54 : charte alimentaire
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 55 et 56 – Accessibilité des services de télévision et de médias à la demande
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Articles 57 : Protection des publics et notamment des mineurs
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 58 : Transparence des médias
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options envisagées et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
TITRE III - TRANSFORMATION DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC A L’ERE NUMERIQUE
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
TITRE IV - DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES
2. Necessite de legiferer et objectifs poursuivis
5. Consultations et modalites d’application
6. Justification du delai d’habilitation pour l’article 61
Article 62 : Modifications du code du cinéma et de l’image animée
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Consultations et modalités d’application
Article 63 : clarification et codification par ordonnances de la loi du 30 septembre 1986
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
3. Options possibles et dispositif retenu
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Justificatif du délai d’habilitation
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Justification du délai d’habilitation
Article 65 : clarification et codification par ordonnances de la loi
2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis
4. Analyse des impacts des dispositions envisagées
5. Justification du délai d’habilitation
Article 66 : Nouvelle dénomination de l’ARCOM
2. Objectifs poursuivis et dispositif retenu
3. Analyse des impacts des dispositions envisagées
4. Consultations et modalités d’application
Article 82 : application outre-mer
La loi n°86-1067 relative à la liberté de communication du 30 septembre 1986 a permis de concilier la liberté de communication, la défense du pluralisme, l’indépendance et la qualité de l’information, la protection des publics, la promotion de la cohésion sociale et le développement d’une création audiovisuelle et cinématographique française diverse.
Mais elle n’est aujourd’hui plus adaptée aux enjeux d’un secteur dont les mutations, notamment numériques, ont été extrêmement fortes depuis trente ans.
Les acteurs, les écrans, les programmes et les œuvres se sont multipliés et les habitudes de consommation ont profondément changé. Ces mutations, aux nombreux effets positifs, ont également été porteuses de dangers pour notre modèle culturel et notre démocratie. Ainsi, la multiplication de contenus haineux ou illicites sur internet, d’autant plus dangereuse que leur diffusion est virale, et des usages de plus en plus individualisés, de plus en plus guidés par des algorithmes de recommandation, ont pu participer d’un affaiblissement de la cohésion sociale. Les médias historiques rencontrent des difficultés économiques menaçant aujourd’hui la production d’une information professionnelle pluraliste et de qualité, notamment de proximité. Enfin, la place de la création française, en particulier indépendante, et la protection du droit d’auteur, sont mises à mal par de nouveaux acteurs qui ne se voient pas appliquer les règles de notre modèle culturel, et qui prennent une part de marché croissante.
Le présent projet de loi modifie donc en profondeur la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 susmentionnée pour porter deux ambitions : d’une part, une ambition de dynamisme culturel, afin de favoriser le rayonnement, la diversité et la créativité de l’audiovisuel et du cinéma français ; d’autre part, une ambition démocratique, sociétale et citoyenne, afin de protéger les citoyens de certains excès du numérique et de leur offrir à tous, notamment aux plus fragiles, un service plus proche et plus efficace.
La création se trouve au cœur du projet de loi qui adapte et renforce la protection des auteurs, des artistes et, plus généralement, de tous ceux qui sont impliqués dans l’acte de création. Face à la multiplication des canaux de diffusion et à une redéfinition des rapports de forces entre les acteurs, il vise à garantir aux créateurs une juste rémunération ainsi que le respect de leur droit moral. Il soutient l’industrie française de programmes, en particulier de la production indépendante, et la vitalité économique des groupes de télévision et de radio, qui sont les premiers financeurs de la création audiovisuelle et numérique, ainsi que les piliers d’une information pluraliste et de qualité. Ce soutien passe en particulier par l’intégration de l’ensemble des diffuseurs qui visent la France à notre système de financement de la création, quel que soit leur lieu d’installation.
Ce projet de loi vise par ailleurs à assurer la protection des publics contre les contenus nocifs ou illicites (désinformation, contenus haineux, glorification du terrorisme, pédopornographie), en prolongeant les initiatives législatives récentes tendant à responsabiliser les plateformes numériques et à favoriser l’accès à des programmes audiovisuels de qualité, diversifiés et pluralistes, produits par les acteurs publics comme privés et diffusés sur tous les réseaux.
Pour s’assurer d’une application efficace du nouveau cadre ainsi posé, le projet de loi procède à une rénovation de grande ampleur de la régulation et du rôle des régulateurs qui en sont chargés, en particulier à travers la fusion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI) au sein d’un organe unique, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), dont la coopération avec l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) est par ailleurs encouragée.
Enfin, le service public de l’audiovisuel étant tout particulièrement concerné par les transformations qui affectent le paysage audiovisuel et les rapports que les Français et les Françaises entretiennent avec lui, le projet de loi vise à réaffirmer son rôle et sa singularité. Afin de mieux distinguer l’audiovisuel public d’une offre privée désormais abondante et de lui permettre de s’adresser à tous, notamment aux plus fragiles, il met en avant cinq missions communes à toutes les sociétés : l’offre de proximité, l’information, l’ambition culturelle, l’offre jeunesse et l’action audiovisuelle extérieure. Sa gouvernance est rénovée par la création d’un groupe avec à sa tête une société mère unique, « France Médias », à même de définir une stratégie globale adaptée à la convergence numérique et définir les meilleures réponses face à la concurrence des nouveaux acteurs, notamment internationaux. La composition des conseils d’administration et le mode de désignation des dirigeants seront également révisés, afin de les professionnaliser et de les normaliser, sans déstabiliser les entreprises ni les plans de transformation en cours : les dirigeants des sociétés en poste verront leur mandat de présidents-directeurs généraux transformés en mandat de directeurs généraux jusqu’au 1er janvier 2023.
Ce projet de loi, qui vise à la réaffirmation de notre souveraineté culturelle dans l’ère numérique, nous permettra de faire à nouveau prévaloir sur les logiques strictement marchandes une approche permettant de promouvoir notre regard sur le monde et l’essence de nos valeurs partagées : la diversité culturelle sous toutes ses formes, la défense du pluralisme des courants de pensée et d’opinion, la promotion d’une création accessible et riche de sa diversité, fondée sur une conception ambitieuse du droit d’auteur.
disposition |
enjeu |
indicateur |
mesure |
commentaire |
titre I - chapitre 1 |
Soutenir l'exception culturelle et la diversité de l'offre pour tous les Français |
% d'œuvres EU et FR disponibles sur les services à la demande disponibles en France |
Etude OEA ou ARCOM |
Minimum de la directive SMA : 30% |
Montant des investissements en France dans la production EOF de la part des services à la demande étrangers |
Bilan annuel de l'ARCOM |
Indicateur B2B |
||
titre I - chapitre 2 |
Permettre aux Français de pourvoir regarder plus de cinéma sur les offres des télévisions gratuites |
Nombre total de téléspectateurs de films de cinéma sur la TV en clair |
Chiffres ARCOM ou CNC |
Gräce à la suppression des Jours interdits : mercredi soir ; vendredi soir ; samedi ; dimanche dans la journée |
titre II - chapitre 5 |
Renforcer l'accessibilité aux personnes handicapées des services linéaires et non-linéaires |
Augmentation du volume horaire de programmes accessibles (LSF, sous-titrage et audiodescription) et accroissement de l'évaluation qualitative portée par les associations de personnes en situation de handicap visuel ou auditif |
Bilan annuel de l'ARCOM |
Pour mettre fin à deux faiblesses actuelles : Régionaux
Sur les chaînes linéaires : obligations déjà applicables mais constat de baisses de volumes |
titre III |
Rapprocher l'audiovisuel public des Français à travers une offre de proximité de qualité |
Pour la diffusion linéaire : part des programmes régionaux dans la grille de FTV et de RF Fréquentation de l'offre numérique de proximité |
Actuel indicateur n° 4 du COM 2016-2020. Part des programmes régionaux ou à caractère régional dans la grille de France 3. NB : il n'existe pas l'équivalent actuellement pour Radio France dans le COM ou le PAP (à construire). |
Taux de 30,4 % en 2018 pour FTV. NB : il s'agit d'un indicateur d'offre et non de consommation réelle. |
titre III |
Proposer à tous les Français un audiovisuel public qui s'adresse à eux, quel que soit le support utilisé pour le visionnage (poste de télé, ordinateur, tablette, téléphone) |
% des Français de 15 ans et + en contact chaque semaine avec une offre du service public, quel que soit le support |
Indicateur Médiamétrie fusionné TV+radio+numérique |
FTV dispose depuis juin 2016 (en hebdo depuis juillet 2019) d'un indicateur (Médiamétrie) mesurant le taux de couverture mensuelle 4 écrans (télévision, ordinateur, mobile et tablette) y compris pour les contenus nativement numériques. |
titre III |
Renforcer l'offre de l'audiovisuel public à destination du jeune public |
Nombre de personnes (élèves / parents / enseignants) utilisant la future offre éducative du service public (Lumni). Eventuellement la part des jeunes en âge d'être scolarisés qui l'utilisent (couverture) |
Indicateur à construire en lien avec FTV et l'INA qui pilotent ce projet |
|
Tableau synoptique des consultations
Tableau synoptique des mesures d’application
Article |
Objet de l’article |
Textes d’application |
Administration compétente |
1er |
Réforme du régime de contribution à la production d’œuvres applicable aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
2 |
Réforme du régime de contribution à la production d’œuvres applicable aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
3 |
Extension du régime de contribution à la production d’œuvres aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande étrangers visant la France |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
4 |
Réforme du régime de contribution à la production d’œuvres applicable aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande |
|
|
5 |
Réforme du régime de contribution à la production d’œuvres applicable aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande |
Décret |
Ministère de la culture (DGMIC) |
6 |
Réforme du régime de contribution à la production d’œuvres applicable aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande |
|
|
7 |
Respect des droits moraux et patrimoniaux des auteurs dans les contrats de production cinématographique et audiovisuelle |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (CNC) |
8 |
Placement de produit : transposition de la directive « Services de médias audiovisuels » |
|
|
9 |
Autorisation de la publicité télévisée sur écran partagé |
Décret |
Ministère de la culture |
10 |
Autorisation d’une troisième interruption publicitaire des œuvres |
|
|
11 |
Suppression de l’encadrement de la grille horaire de diffusion par les services de télévision des films de cinéma |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC)
|
12 |
Modernisation de la télévision numérique terrestre (ultra-haute définition) : autorisations expérimentales |
|
|
13 |
Modernisation de la télévision numérique terrestre (ultra-haute définition) : extension du droit de priorité |
|
|
14 |
Modernisation de la télévision numérique terrestre (ultra-haute définition) : extension des obligations de reprises |
|
|
15 |
Obligations progressives de compatibilité pesant des matériels de réception (téléviseurs et adaptateurs) aux normes de l’ultra-haute définition et des récepteurs de radio à la radio numérique terrestre (RNT) |
|
|
16 |
Transposition en droit interne de l’article 17 de la directive (UE) 2019/790 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (SG) |
17 |
Transposition en droit interne de l’article 17 de la directive (UE) 2019/790 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique |
|
|
18 |
Principe de réajustement de la rémunération prévue au contrat |
|
|
19 |
Obligation de reddition des comptes régulière à la charge des cocontractants des auteurs – Droit de révocation au profit des auteurs en cas de non exploitation de l’œuvre – Inopposabilité des clauses contraires à ces dispositions protectrices des auteurs. |
Arrêtés d’extension d’accord Ou décrets en Conseil d’Etat à défaut d’accord à l’issue d’un délai de 12 mois
|
Ministère de la culture (SG) |
20 |
Consécration du principe d’une rémunération proportionnelle au profit des artistes-interprètes |
|
|
21 |
Obligation de reddition des comptes régulière à la charge des cocontractants des artistes-interprètes – Principe de réajustement de la rémunération prévue au contrat – Droit de révocation au profit des artistes-interprètes en cas de non exploitation de l’interprétation |
Arrêtés d’extension d’accord Ou décrets en Conseil d’Etat à défaut d’accord à l’issue d’un délai de 12 mois
|
Ministère de la culture (SG) |
22 |
Fusion du CSA-HADOPI au sein de l’ARCOM et évolution des missions de l’ARCOM |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (SG) |
23 |
Lutte contre le piratage des contenus sportifs en direct |
|
|
24 |
Evolution des missions de l’ARCOM |
|
|
25 |
Evolution des missions de l’ARCOM |
|
|
26 |
Evolution des missions de l’ARCOM |
|
|
27 |
Renvoi au code de la propriété intellectuelle pour les missions aujourd’hui dévolues à la HADOPI qui seront exercées par l’ARCOM - Complément aux missions de l’ARCOM en matière de respect de la propriété littéraire et artistique |
|
|
28 |
Rapport annuel de l’ARCOM |
|
|
29 |
Modification de la composition du collège de l’ARCOM |
Décret du Président de la République |
Présidence de la République |
30 |
Modification de la composition du collège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) |
|
|
31 |
Instauration d’une instance commune de règlement des différends à l’ARCOM et l’ARCEP |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) Ministère de l’économie et des finances (DGE) |
32 |
Instauration d’une instance commune de règlement des différends à l’ARCOM et l’ARCEP |
|
|
33 |
Instauration d’une instance commune de règlement des différends à l’ARCOM et l’ARCEP |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) Ministère de l’économie et des finances (DGE) |
34 |
Statut des membres de l’ARCOM : coordination |
|
|
35 |
Relations entre l’ARCOM et l’Autorité de la concurrence : inopposabilité du secret des affaires dans le cadre de leurs échanges |
|
|
36 |
Pôle d’expertise numérique et communication de données des autorités administratives indépendantes intervenant dans la régulation numérique en faveur de ce pôle d’expertise |
Décrets en Conseil d’Etat |
Ministère de l’économie et des finances (DGE) |
37 |
Elargissement des missions de l’ARCOM et de son pouvoir de conciliation |
|
|
38 |
Actualisation de l’action internationale de l’ARCOM : transposition de la directive SMA |
|
|
39 |
Modernisation de la procédure de règlement des différends devant l’ARCOM |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC)
|
40 |
Renforcement des pouvoirs de contrôle et d’enquête de l’ARCOM |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC)
|
41 |
Nouvelle mission de l’ARCOM en matière de protection de l’intégrité du signal |
|
|
42 |
Modification des conventions des services diffusés par voie hertzienne terrestre : procédure encadrant la réalisation de l’étude d’impact |
|
|
43 |
Modernisation du dispositif de publication des sanctions prononcées par l’ARCOM |
|
|
44 |
Caducité quinquennale des mises en demeure prononcées par l’ARCOM et rapporteur indépendant |
|
|
45 |
Sanctions prononcées par l’ARCOM : coordination |
|
|
46 |
Détermination des critères d’établissement en France des services de télévision et de médias audiovisuels à la demande : transposition de la directive SMA |
|
|
47 |
Procédure d’entrave à la retransmission des services de télévision et des services de médias audiovisuels à la demande établis dans un autre Etat membre de l’UE : transposition de la directive SMA |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
48 |
Recensement des services relevant de la compétence de la France |
|
|
49 |
Relations entre l’ARCOM et l’administration fiscale |
|
|
50 |
Définition des plateformes de partage de vidéos : transposition de la directive SMA |
|
|
51 |
Extension du pouvoir de règlement des différends de l’ARCOM aux plateformes de partage de vidéos |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
52 |
Plateformes en ligne : reprise des dispositions de l’article 17-2 de la loi du 30 septembre 1986 Plateformes de partage de vidéos : critères d’assujettissement à la loi française et instauration d’un régime de co-régulation |
|
|
53 |
Article 17-2 de la loi du 30 septembre 1986 : coordination |
|
|
54 |
Code de bonne conduite en matière de publicité alimentaire : transposition de la directive SMA |
|
|
55 |
Accessibilité des personnes handicapées : transposition de la directive SMA |
|
|
56 |
Accessibilité des personnes en situation de handicap : transposition de la directive SMA |
Décret en Conseil d’Etat |
Ministère de la culture (DGMIC) |
57 |
Protection des publics et des mineurs : transposition de la directive SMA |
|
|
58 |
Renforcement des règles de transparence sur l’identité des éditeurs de services : transposition de la directive SMA |
|
|
59 |
Transformation de l’audiovisuel public à l’ère numérique |
Cahiers des charges des sociétés France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel approuvés par décret Statuts des sociétés France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel approuvés par décret Commissaires du Gouvernement désignés par décret auprès des sociétés France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel Décrets de nomination du représentant de l’Etat et des membres du conseil d’administration de France Médias nommés dans les conditions du II de l’article 6 de l’ordonnance du 20 août 2014 Décrets de nomination des personnalités indépendantes siégeant au conseil d’administration de France Médias nommées après avis conforme de l’ARCOM Décrets de nomination du représentant de l’Etat et du membre des conseils d’administration de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel nommés dans les conditions du II de l’article 6 de l’ordonnance du 20 août 2014 Décret du Président de la République de nomination du président-directeur général de France Médias |
Ministère de la culture (DGMIC)
Ministère de la culture (DGMIC) et Ministère de l’économie (APE)
Ministère de l’économie (APE)
Ministère de l’économie (APE)
Ministère de la culture (DGMIC)
Ministère de l’économie (APE)
Présidence de la République
|
60 |
Modifications du livre IV du code de commerce destinées à simplifier les procédures devant l’Autorité de la concurrence et à en accroître l’efficacité |
|
|
61 |
Habilitation donnée au Gouvernement de mettre le droit national en conformité avec les règles européennes de la concurrence |
Ordonnance |
Ministère de l’économie et des finances (DGCCRF) |
62 |
Modifications du code du cinéma et de l’image animée |
|
|
63 |
Clarification et codification par ordonnances de la loi du 30 septembre 1986 |
Ordonnance tendant à clarifier la loi du 30 septembre 1986 Ordonnance de codification de la loi du 30 septembre 1986 |
Ministère de la culture (DGMIC) |
64 |
Transposition par ordonnance de la directive établissant le code des communications électroniques européen |
Ordonnance |
Ministère de l’économie et des finances (DGE) |
65 |
Clarification et codification par ordonnances de la loi |
Ordonnance |
Ministère de la culture (SG) |
66 |
Modification de la dénomination du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) qui devient l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) - Conséquences sémantiques et légistiques de la réécriture du titre III de la loi du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle |
|
|
67 |
Conséquences sémantiques et légistiques de la réécriture du titre III de la loi du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle |
|
|
68 |
Abrogation de l’article 14 de la loi du 13 octobre 2014 |
|
|
69 |
Conséquences sémantiques et légistiques de la réécriture du titre III de la loi du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle |
|
|
70 |
Conséquences sémantiques et légistiques de la réécriture du titre III de la loi du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle |
|
|
71 |
Conséquences sémantiques et légistiques de la réécriture du titre III de la loi du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle |
|
|
72 |
Disposition diverse -application dans le temps des articles 16, 17, 19 et 21 |
|
|
73 |
Disposition transitoire pour la mise en œuvre de la fusion entre le CSA et la HADOPI |
|
|
74 |
Disposition transitoire pour la mise en œuvre de la modification de la composition du collège de l’ARCOM |
|
|
75 |
Disposition transitoire pour la mise en œuvre de la modification de la composition du collège de l’ARCEP |
|
|
76 |
Disposition transitoire pour la conclusion des conventions conclues entre l’ARCOM et les services de médias audiovisuels à la demande |
|
|
77 |
Dispositions transitoires nécessaires pour la transformation de l’Institut national de l’audiovisuel en société anonyme |
Décret |
Ministère de la culture (DGMIC) |
78 |
Dispositions transitoires nécessaires pour la mise en place de la nouvelle organisation de l’audiovisuel public |
Décret |
Ministère de la culture (DGMIC) Ministère de l’économie et des finances (DGE) |
79 |
Dispositions transitoires nécessaires pour la première désignation des membres du conseil d’administration de France Médias |
|
|
80 |
Dispositions transitoires nécessaires pour assurer la transition entre l’ancienne et la nouvelle composition des conseils d’administration des entreprises de l’audiovisuel public et pour régler le sort des présidents de ces entités |
|
|
81 |
Dispositions transitoires nécessaires pour la mise en place des nouvelles modalités de répartition de la contribution à l’audiovisuel public |
|
|
82 |
Dispositif d’application en outre-mer |
|
|
Titre Ier – DEVELOPPEMENT ET DIVERSITE DE LA CREATION ET DE LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
Par application du 3° de l'article 27, du 6° de l'article 33 et du 3° de l’article 33-2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande sont tenus de contribuer au développement de la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles.
L’article 27 de la loi renvoie à un décret le soin de fixer « la contribution des éditeurs de services au développement de la production, en tout ou partie indépendante à leur égard, d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles »
L’article 33 comporte des « dispositions miroir » de celles de l’article 27, s’agissant des services distribués sur les autres réseaux de communications électroniques.
Les articles 71 et 71-1 de la loi, respectivement pour les œuvres cinématographiques et audiovisuelles, posent les critères permettant aux éditeurs de prendre en compte une œuvre au titre de la production indépendante et renvoient aux décrets prévus aux articles 27 et 33 le soin de préciser ces critères.
Cette contribution est fixée en pourcentage du chiffre d’affaires de l’éditeur de service. Ces investissements de la part des diffuseurs reposent notamment sur un principe de liberté et de choix des œuvres qu’ils souhaitent financer en fonction de leur ligne éditoriale et des objectifs de diversification des investissements des chaînes publiques contenus dans leur contrat d'objectifs et de moyens. En 2017, l’investissement de l’ensemble des services à la production audiovisuelle et cinématographique est stable par rapport à 2016 et s’élève à 1 234,7 Md€. L’investissement du groupe France Télévisions représente 38,1 % du total, suivi des groupes Canal+ (22,8 %), TF1 (17,3 %) et M6 (11,1 %).
Trois décrets ont été ainsi adoptés en 2010 :
- le décret n° 2010-747 du 2 juillet 2010 pris sur le fondement de l’article 27 de la loi,pour les services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre[1],
- le décret n° 2010-416 du 27 avril 2010 pris sur le fondement de l’article 33 de la loi,pour les services utilisant d’autres modes de diffusion que la voie hertzienne terrestre : câble, satellite, ADSL, etc.[2],
- le décret n°2010-1379 du 12 novembre 2010 pris sur le fondement de l’article 33-2 de la loi, pour les services de médias audiovisuels à la demande.
Les critères selon lesquels une œuvre sera retenue au titre de la production indépendante recouvrent la limitation de détention capitalistique entre l’éditeur et le producteur, la durée de détention des droits de diffusion acquis par l’éditeur sur l’œuvre, la nature et l’étendue de la responsabilité de l’éditeur dans la production de l’œuvre[3], l’étendue des droits secondaires et des mandats de commercialisation de l’œuvre détenus par l’éditeur et, spécifiquement pour les œuvres audiovisuelles, l’absence de détention de parts de coproduction par l’éditeur sauf s’il a financé une part substantielle de l’œuvre (le décret n° 2015-483 du 27 avril 2015 portant modification du régime de contribution à la production d'œuvres audiovisuelles des services de télévision a fixé cette part à 70 % avec possibilité de descendre à 60 % dans certains cas).
L’article 28 de la loi prévoit que la convention conclue entre l’éditeur de service diffusé par voie hertzienne terrestre et le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) porte notamment sur les « modalités permettant d'assurer la contribution au développement de la production d'œuvres audiovisuelles en tenant compte des accords conclus entre l'éditeur de services et une ou plusieurs organisations professionnelles de l'industrie audiovisuelle, s'agissant notamment de la durée des droits. » La loi permet ainsi que la convention soit le réceptacle des stipulations des accords, sur la base des décrets précités. L’article 33-1 reprend ces dispositions « en miroir » s’agissant des services distribués sur les autres réseaux de communications électroniques. Ce même article prévoit que les SMAD[4] sont soumis, non pas à conventionnement avec le CSA, mais à une simple déclaration préalable auprès de cette instance. Il n’y a donc pas pour ces services de possibilité de reprise dans une convention conclue avec le CSA d’éventuelles stipulations d’accords conclus entre le service et les organisations de producteurs.
Les éditeurs de services de médias audiovisuels opèrent sur un marché en profonde mutation qui les soumet à des contraintes fortes à la fois sur le plan économique et concurrentiel.
Ainsi, ils sont particulièrement concurrencés par les acteurs du numérique sur le terrain des recettes publicitaires. En effet, dans une récente étude le cabinet Boston Consulting Group envisageait que la part des recettes publicitaires numériques (dont bénéficient majoritairement ces acteurs) puisse passer de 36% en 2017 (soit 4,1 Md€) à 49% en 2022 (soit 6,5 Md€) dans le total des recettes publicitaires en France. En parallèle, la part des recettes de la télévision pourrait passer de 29% en 2017 (soit 3,29 Md€) à 25% en 2022 (soit 3,39 Md€).
De la même manière, ils sont confrontés à la croissance des acteurs dont les services sont directement accessibles sur Internet. A ce sujet, le rapport de la mission d’information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique présenté par la députée Aurore Bergé en octobre 2018 citait une étude du cabinet Roland Berger estimant que la part de la consommation de contenus sur ces services (ou sur les services dits « over the top » ou OTT[5]) aura potentiellement été multipliée par cinq entre 2000 et 2020 et qu’elle pourrait de fait atteindre un tiers des heures consacrées à la consommation de vidéos dès l’an prochain. Par ailleurs, l’Autorité de la Concurrence rappelait dans son avis du 21 février 2019 la croissance fulgurante du marché des services de vidéos à la demande par abonnement, qui sont une sous-catégorie des services OTT, et dont le chiffre d’affaires est estimé à 453 M€ en 2018, soit +82% par rapport à 2017.
Le déploiement de ces offres a des conséquences sur la valeur des contenus des services existants. A ce titre, l’Autorité de la concurrence soulignait que les offres en OTT, comme celle de Netflix, ont considérablement réduit le pouvoir de « verrouillage des FAI sur les contenus » les obligeant ainsi à favoriser l’accès des consommateurs à des offres concurrentes des leurs. Par ailleurs, prenant en exemple le cas nord-américain, l’Autorité de la concurrence expliquait que les stratégies d’acquisition des programmes déployées par les plateformes réduisent le volume des droits les plus attractifs disponibles sur le marché des achats et incitent les studios intégrés à se déployer vers l’aval en proposant leur propre plateforme de vidéo à la demande par abonnement (VàDA). La généralisation de ces stratégies de croissance pourrait menacer « la sécurisation des approvisionnements des éditeurs de services linéaires et non linéaires étrangers qui s’approvisionnaient auprès d’eux » (ex : le catalogue de Disney/Fox représenterait 40 à 50 % de l’approvisionnement de Canal+).
Face à ce nouvel écosystème concurrentiel complexe, les éditeurs de services linéaires ont cherché à diversifier leurs activités afin de mieux maîtriser la chaîne des droits des contenus au travers d’opérations de concentration verticale. Ainsi ces groupes, construits initialement sur des modèles destinés à la diffusion, intègrent davantage les fonctions de production et de distribution des contenus. Parmi les opérations les plus marquantes de ces dernières années figure l’acquisition par TF1 du groupe de production Newen, autorisée par l’Autorité de la concurrence le 21 janvier 2016.
Afin de prendre en compte les évolutions du modèle économique de ces groupes, différentes réformes ont été mise en œuvre dès 2013 pour permettre aux diffuseurs de bénéficier de plus de droits sur les œuvres financées (i.e. dispositif découlant de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine et permettant aux diffuseurs de bénéficier de parts de coproduction sur les œuvres indépendantes dès lors qu’ils en financent une part substantielle). Par la suite, en 2015, les accords conclus en matière audiovisuelle entre les producteurs et certains éditeurs (France Télévisions, TF1 et M6) ont été modifiés afin de permettre à la fois une internalisation de la production des œuvres par les groupes de chaînes et une meilleure adaptation des droits acquis sur les différents supports numériques. Parallèlement à la rédaction des rapports et avis précités, TF1 et France Télévisions menaient des discussions avec l’ensemble des syndicats de producteurs audiovisuels, qui ont abouti à la signature de nouveaux accords respectivement en septembre et décembre 2018. Au titre de ces accords, plusieurs avancées ont été observées : les deux groupes ont vu leur taux de production dépendante augmenter de façon importante ; France Télévisions a bénéficié de durées de droits plus longues pour l’exploitation des œuvres sur les plateformes numériques et d’un meilleur partage des recettes.
Le recours aux accords interprofessionnels semble ainsi refléter la volonté des acteurs de passer par la voie contractuelle, plus adaptée aux configurations particulières, pour aligner rapidement les règles sur la pratique (les accords conclus ces dernières années l’ont été sur des périodes allant de 3 à 6 mois). Transposés en partie dans les décrets, ils viennent atténuer l’intérêt d’une modification substantielle de la loi.
Les services de télévision sont soumis depuis 1989[6] à des obligations en matière de promotion des œuvres européennes. L’article 5 de la directive de 1989 « Télévision sans frontières » dite « TVSF » précisent que les Etats membres sont tenus de veiller à ce que les organismes de radiodiffusion télévisuelle consacrent 10 % au moins de leur temps d’antenne ou 10 % au moins de leur budget de programmation à des œuvres européennes émanant de producteurs indépendants d’organismes de radiodiffusion télévisuelle.
Ni cet article ni les considérants correspondants n’ont été modifiés lors des révisions de 1997, 2007, lorsque la directive TVSF a été rebaptisée directive SMA et 2018. Seules les numérotations ont été modifiées.
L'article 17 (ancien article 5 de la directive TVSF) de la directive SMA impose aux services de télévision de réserver 10 % au moins de leur temps d’antenne, à l’exclusion du temps consacré aux actualités, à des événements sportifs, à des jeux, à la publicité, aux services de télétexte et au téléachat, ou, à la discrétion de l’Etat membre, 10 % au moins de leur budget de programmation, à des œuvres européennes créées par des producteurs indépendants de tout radiodiffuseur. Il convient que cette proportion soit progressivement obtenue sur la base de critères appropriés et elle devra être atteinte en réservant une proportion adéquate à des œuvres récentes, c'est-à-dire des œuvres diffusés pendant une période de cinq ans après leur production.
Après l'adoption de la directive SMA, le premier rapport relatif à la promotion des œuvres européennes sur les services télévisuels et à la demande de l'Union européenne pour la période 2009-2010[7] publié en 2012, indiquait que, même si la part des œuvres européennes indépendantes diffusées dans l'Union européenne était bien supérieure au quota de 10 % énoncé à l’article 17 de la Directive SMA (avec en moyenne 34,1 % en 2009 et 33,8 % en 2010), la part réservée aux œuvres indépendantes avait néanmoins connu une baisse modérée mais constante depuis 2006. Les œuvres récentes avaient également connu une légère baisse, avec respectivement 62,1 % en 2009 et 61,8 % en 2010 pour le nombre total des œuvres indépendantes européennes. C’est la raison pour laquelle la Commission avait invité les Etats membres à réfléchir aux moyens de renverser cette tendance afin de soutenir le secteur de la production indépendante européenne.
Dans le dernier rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel[8], un panel complet des régimes observés en Europe révèle que la législation de l’immense majorité des pays donne une définition des « œuvres européennes ». Cette définition est plus ou moins harmonisée dans la mesure où elle est énoncée par la directive SMA, bien que les Etats conservent la possibilité de l’adapter. La définition de la notion de « production indépendante » est en revanche bien moins fréquente : dans 23 pays sur 31 (UE28, Islande, Norvège et Suisse), à l'exception de l'Autriche,de la Suisse,de Chypre, de l'Allemagne, du Danemark, de la Grèce, de la Pologne et de la Suède. Des obligations d'investissement spécifiques en faveur de la production indépendante sont imposées dans près de la moitié des pays aux radiodiffuseurs de service public et sont généralement plus élevées que celles imposées aux radiodiffuseurs privés, lorsque ces derniers y sont soumis. Dans quelques cas, comme en Bulgarie, dans la Communauté flamande de Belgique, en Lettonie, aux Pays-Bas, en Pologne et en Slovénie seuls les radiodiffuseurs publics sont soumis à des obligations d'investissement financier. Seuls quatre pays imposent des obligations financières auxquelles les radiodiffuseurs aussi bien publics que privés sont tenus de se conformer ; il s’agit de l’Espagne, de la France, de la Grèce et de l’Italie. La cartographie des règles nationales pour la promotion des œuvres européennes, publiée également par l’Observatoire en 2019, montre que parmi ces pays, l’Italie et la France ont imposé les plus hauts niveaux de contribution à la fois en faveur de la production cinématographique et de la production audiovisuelle. S’agissant du financement de la création, dont l’investissement dans la production indépendante, l’Observatoire européen de l’audiovisuel a publié deux cartes permettant d’identifier rapidement les obligations auxquelles sont assujettis les services publics et privés dans les principaux pays européens :
Comme expliqué précédemment, il apparaît nécessaire, au regard des transformations que le secteur a connu ces dernières années, de réformer le cadre de la contribution des éditeurs à la création tout en préservant la production indépendante audiovisuelle et cinématographique.
Aujourd’hui, le paysage audiovisuel français s’est reconfiguré de façon substantielle, sous l’effet conjugué de la modification de l’environnement concurrentiel et de l’accélération de la transformation du modèle économique des chaînes.
En effet, sur le plan de la concurrence, le rapport de la mission d’information d’Aurore Bergé, estimait que les chaînes de télévision « subissent aujourd’hui un triple handicap », lié premièrement à l’installation d’acteurs étrangers sur le marché local, en particulier les acteurs du numérique comme Google, Facebook ou Amazon, qui captent une part majoritaire des revenus publicitaires.
En outre, les éditeurs de services linéaires sont concurrencés sur le terrain de la production et de l’acquisition de contenus par des services non linéaires, accessibles directement sur Internet, et dont les capacités de financement sont « sans commune mesure avec celles des éditeurs français » : alors que Netflix aurait investi 12 Md$ dans le monde en 2018, l’ensemble des contributions des éditeurs français s’élevait à environ 1,2 Md€ en 2017 : l’investissement du groupe France Télévisions représente 38,1 % de ce total, suivi des groupes Canal+ (22,8 %), TF1 (17,3 %) et M6 (11,1 %).
Enfin, sur le plan juridique, tous les rapports insistent sur les conséquences négatives de l’asymétrie de réglementation entre les acteurs linéaires nationaux et ces services numériques étrangers, et la nécessité de réformer le cadre normatif perçu comme inadapté dans un environnement numérique et globalisé car conçu « à l’ère pré-numérique, pour un marché fermé, de dimension nationale »[9].
L’Autorité de la concurrence soulignait également que ces éditeurs étaient confrontés à des plateformes étrangères dont les pratiques les rendent plus compétitives : intensification de leur volume d’investissements financé par l’endettement, achat de droits plus étendus, exclusifs et multi-territoriaux ; pratiques de prix agressives ; accès privilégié aux talents internationaux et au marché des contenus « premium » ou stratégie inflationniste sur le marché de l’acquisition des droits sportifs, etc. Ces services détiennent de fait des parts de marché considérables et attirent toujours plus de consommateurs. Alors que ce marché pourrait constituer un levier de croissance, l’Autorité de la concurrence estimait que le développement des offres non linéaires faisait perdre « l’exclusivité de la diffusion de contenus vidéos » aux éditeurs de chaîne. Une exclusivité des droits pour les éditeurs de vidéo à la demande par abonnement (VàDA) dévalue en effet l’abonnement à une chaîne payante et affaiblit l’attractivité des offres de télévision proposées par les fournisseurs d’accès à Internet (FAI).
Prenant comme postulat que les éléments de différentiation qualitatifs entre offres de télévision payante et offres de VàDA en matière de contenus « tendent à s’estomper », l’Autorité de la concurrence rappelait enfin la nécessité que l’ensemble des opérateurs se trouvent « sur un pied d’égalité ».
Les mesures proposées visent à permettre aux éditeurs de services français de bénéficier d’une certaine souplesse dans la mise en œuvre de leurs obligations, tout en assurant un équilibre des obligations de l’ensemble des acteurs de la chaine des contenus.
Cette réforme doit permettre d’adapter les outils de notre politique publique pour répondre à trois grands enjeux culturels et industriels à l’ère numérique.
(i) Fixer un cadre permettant d’imposer le respect de notre modèle de financement de la création cinématographique et audiovisuelle aux acteurs étrangers qui ciblent la France et de les y faire contribuer.
Ce cadre doit être autant que possible harmonisé entre services linéaires et non linéaires, établis en France ou à l’étranger, gratuits ou payants, pour l’investissement dans la production cinématographique comme audiovisuelle. C’est une question d’équité concurrentielle autant que de développement du secteur français de la production.
(ii) Préserver le modèle de la production indépendante, reconnu par tous comme un élément essentiel pour assurer le dynamisme et la diversité de la création ; il s’agit également de préserver le « droit d’auteur à la française » qui protège les créateurs ; de conforter notre modèle de production déléguée, par opposition au modèle américain de production exécutive ainsi que le principe du préfinancement, qui permet une meilleure répartition de la prise de risque en amont de la réalisation des œuvres. A ce titre, il a été décidé de préciser la notion de production déléguée au sein des critères définissant l’indépendance de la production afin de renforcer les obligations qui s’appliqueront demain notamment aux plateformes étrangères.
(iii) Permettre aux chaînes de télévision de mieux valoriser leurs investissements dans la création, chacune selon son propre modèle éditorial et stratégique ; c’est une condition du dynamisme de ces investissements.
Les critères de la production indépendante sont déterminés, respectivement pour les œuvres cinématographiques et les œuvres audiovisuelles par les article 71 et 71-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui renvoie à des décrets le soin de les préciser.
En matière cinématographique, ces critères se fondent sur l’étendue des droits détenus par l’éditeur (durée, droits secondaires et mandats de commercialisation, responsabilité dans la production) et les relations entre l’éditeur et le producteur (limitation de détention du capital et du volume d’affaires).
En matière audiovisuelle, les critères ont régulièrement évolué. En 2009, les conditions d’indépendance ont été assouplies : ne figurait plus qu’un critère de contrôle capitalistique du producteur par l’éditeur et la prohibition des parts de coproduction ; en 2013, la faculté de détenir des parts de coproduction a été réintroduite pour les œuvres pour lesquelles l’éditeur apporte un financement substantiel et sous réserve d’un encadrement de la détention par l’éditeur des droits secondaires et des mandats de commercialisation. Le niveau de l’apport substantiel de financement de l’éditeur (60 ou 70 % du devis) et l’encadrement des mandats et droits secondaires ont été fixés par décret en 2015.
L’option consistant à définir la production indépendante par le seul critère de détention capitalistique n’a pas été retenue.
En effet, ce critère ne peut permettre à lui seul de déterminer la dépendance d’un producteur à l’égard d’un éditeur. Selon le CSA[10], en 2017 le premier critère de dépendance était celui de l’acquisition de droits ne remplissant les conditions d’indépendance fixées dans les accords interprofessionnels : sur 188 M€ déclarés par les chaînes en production inédite dépendante en 2017, les œuvres dépendantes du fait de ce critère ont représenté au total 114 M€ en 2017 (soit environ 60 % du total), cumulées le cas échéant aux deux autres critères de dépendance (détention capitalistique et investissements en parts de producteur).
De fait, opter pour une définition sur un critère unique pourrait affaiblir la production indépendante, qui joue un rôle considérable dans la promotion de la diversité culturelle. Les politiques culturelles françaises, dont l’objectif est de garantir au public un accès à la diversité de la création, ont toujours considéré que l’indépendance de l’auteur vis-à-vis du producteur (l’auteur n’a juridiquement pas de lien de subordination avec le producteur) et du producteur vis-à-vis du diffuseur ou de l’exploitant, protégeait la diversité de la création. Cette importance accordée à l’indépendance est également reconnue, au-delà du socle de la directive SMA, par la Convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles[11], qui établit qu’en vertu des droits des Parties au niveau national, chaque Partie peut « adopter des mesures destinées à protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles sur son territoire », parmi lesquelles figurent notamment « les mesures qui visent à fournir aux industries culturelles nationales indépendantes et aux activités du secteur informel un accès véritable aux moyens de production, de diffusion et de distribution d’activités, biens et services culturels » (article 6, alinéa 2(c)).
Permettre aux producteurs de conserver la majeure partie des droits d’exploitation et les mandats de commercialisation sur les œuvres indépendantes leur permet de générer des recettes d’exploitation par la revente des œuvres à des tiers, assurant ainsi leur circulation en France et à l’étranger. Ces recettes sont ensuite réinvesties dans le développement de nouvelles œuvres et de fait, dans la rémunération des créateurs.
De la même manière, assurer aux producteurs que le statut de producteur délégué, garant de la bonne fin des œuvres, sera préservé voire renforcé ou encouragé dans leurs relations avec les éditeurs est un gage de respect du droit de propriété intellectuelle, que les pratiques contractuelles peuvent parfois affaiblir. Enfin, laisser l’initiative du choix artistique aux seuls éditeurs, qui sont par nature plutôt averses à la prise de risque, en privant le producteur de son rôle en la matière, pourrait freiner le renouvellement et l’innovation en matière de création.
Pour toutes ces raisons, il est proposé de maintenir l’ensemble des critères essentiels définissant la production indépendante dans la loi.
La majorité des parties prenantes à la concertation menée à l’été 2019 a fait valoir l’intérêt de concevoir un cadre plus souple s’agissant des relations entre éditeurs et producteurs, au regard des modifications substantielles que le secteur connaît depuis quelques années et des facteurs d’affaiblissement de la position des acteurs historiques sur le marché (particulièrement concurrencés par des acteurs étrangers).
La conclusion d’accords interprofessionnels a permis depuis 2015 de dégager de meilleures marges de manœuvre pour les éditeurs, qui peuvent désormais internaliser une partie importante de leur production et mieux valoriser leurs investissements dans la fiction, tout en préservant les droits des producteurs et distributeurs indépendants. Ces accords prennent ainsi en considération les opérations de concentration observées (TF1/Newen ; Mediawan/Groupe AB ; Vivendi/Banijay, etc.) et qui ont reconfiguré le marché. D’après le CSA, le montant de la production dépendante a été multiplié par 2,5 entre 2013 et 2017 en passant de 79,8 M€ à 197 M€. Entre 2015 et 2017, la part de la production dépendante inédite des chaînes a augmenté de 274 %. A titre d’exemple, les filiales de production de TF1 concentrent en 2018 18,9 % des investissements du groupe (soit environ 28 M€ sur 145 M€ d’investissements en fiction).
L’option consistant à encadrer plus strictement la contribution des éditeurs à la création, dans la loi puis dans les décrets, n’a donc pas été retenue. Une simplification des dispositions de la loi de 1986 créant un mécanisme plus souple, permettant notamment à l’instance de régulation de déterminer les niveaux et modalités adéquats pour chacune des catégories de service et tenant compte des accords interprofessionnels conclus s’est avérée plus adaptée à l’évolution du marché et de ses acteurs.
Le CSA indiquait, à l’occasion de son dernier rapport annuel, qu’en 2017, l’investissement de l’ensemble des services à la production audiovisuelle et cinématographique était stable par rapport à 2016 et s’élevait à 1 234,7 Md€. L’investissement du groupe France Télévisions représentait 38,1% de ce total, suivi des groupes Canal+ (22,8 %), TF1 (17,3 %) et M6 (11,1 %).
Le montant total de la contribution des principaux éditeurs de services au développement de la production audiovisuelle avait ainsi augmenté de 3,5 % entre 2016 et 2017 ; France Télévisions étant toujours le premier financeur de la production audiovisuelle en France avec un investissement en hausse de 4 % par rapport à 2016.
S’agissant de la production cinématographique, Canal+ restait le plus important contributeur avec un investissement à hauteur de 52,5 % (soit 195,1 M€) du montant total de la contribution des éditeurs de services de télévision au développement de la production cinématographique. Sa contribution était toutefois en baisse de 17 % entre 2016 et 2017. De fait, la contribution globale des éditeurs à la production cinématographique était en baisse de 9,4 % entre 2016 et 2017.
Afin de ne pas amplifier ce mouvement de transfert, et parce que la production cinématographique et la production audiovisuelle se trouvent dans des logiques créatives et économiques très différentes (économie de l’offre en cinéma contre économie de la commande en audiovisuel ; rôle majeur de l’exposition en salle pour cinéma), la piste consistant à permettre une fusion de la contribution pesant respectivement sur les œuvres cinématographiques et audiovisuelles n’a pas été retenue.
Les ministres de la culture et de l’économie ont confié à deux personnalités qualifiées le soin de mener une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, dont l’Association des producteurs indépendants (API), la Fédération Nationale des Editeurs de Films (anciennement FNDF), la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD), la Société civile des Auteurs-Réalisateurs-Producteurs (ARP), le Syndicat des Agences de Presse Audiovisuelles (SATEV), le Syndicat des Entreprises de Distribution de Programmes Audiovisuels (SEDPA), le Syndicat des distributeurs indépendants (SDI), le Syndicat des Distributeurs Indépendants Réunis Européens (DIRE), le Syndicat des producteurs créateurs de programmes audiovisuels (SPECT), le Syndicat des Producteurs de Films d'Animation (SPFA), le Syndicat des producteurs indépendants (SPI), l’Union des producteurs de cinéma (UPC), l’Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA), l’Association des chaînes conventionnées éditrices de services (ACCES), ainsi que l’ensemble des éditeurs de services linéaires et non linéaires. Ces discussions ont inspiré pour une part les propositions de modifications de la loi présentées ici.
Il est ainsi proposé de simplifier le socle législatif et d’accorder des marges de manœuvre plus grandes aux différents acteurs, afin que le cadre de leurs relations puisse être aménagé plus rapidement et en lien avec les évolutions auxquelles ils doivent faire face. Cette plus grande flexibilité se traduira également par le fait que le décret définira les conditions et limites dans lesquelles des accords peuvent préciser ses modalités d’application et peuvent également, après homologation du ministre chargé de la culture, adapter, dans des conditions équilibrées, les règles qu’il comporte ; la convention entre l’ARCOM et chaque chaîne devra également tenir compte des accords interprofessionnels et devra reprendre les accords homologués par le ministre chargé de la culture.
Les dispositions envisagées vont fixer un cadre permettant d’imposer le respect de notre modèle de financement de la création cinématographique et audiovisuelle aux acteurs étrangers qui ciblent la France et de les y faire contribuer. Ce cadre doit être autant que possible harmonisé entre services linéaires et non linéaires, établis en France ou à l’étranger, gratuits ou payants, pour l’investissement dans la production cinématographique comme audiovisuelle. C’est une question d’équité concurrentielle autant que de développement du secteur français de la production.
Elles visent à préserver le modèle de la production indépendante, reconnu par tous comme un élément essentiel pour assurer le dynamisme et la diversité de la création ; il s’agit également de préserver le « droit d’auteur à la française » qui protège les créateurs ; de conforter notre modèle de production déléguée, par opposition au modèle américain de production exécutive ainsi que le principe du préfinancement, qui permet une meilleure répartition de la prise de risque en amont de la réalisation des œuvres.
Elles vont permettre aux chaînes de télévision de mieux valoriser leurs investissements dans la création, chacune selon son propre modèle éditorial et stratégique ; c’est une condition du dynamisme de ces investissements.
Dès lors, le dispositif retenu consiste en une simplification du dispositif législatif et réglementaire selon les principes suivants :
- une simplification du renvoi par la loi au décret pour la définition de la production indépendante (typologie dans la loi des critères qui seront précisés par décret ; un maintien pour la contribution audiovisuelle de l’interdiction de la détention de parts de coproduction, mais une suppression des dérogations à cette interdiction introduites par la loi n° 2013-1028 du 15 novembre 2013) ;
- un renforcement de la négociation conventionnelle, étendue aux SMAD les plus importants, et des pouvoirs de contrôle du régulateur ;
- une association des représentants des auteurs aux accords conclus entre producteurs et diffuseurs, pour la partie des accords qui affectent directement leurs intérêts ; le décret définira les sujets en cause ;
- une faculté de mutualisation de la contribution à la production cinématographique pour les groupes éditant plusieurs services.
A cette fin, les éditeurs de services de télévision ou de services de médias audiovisuels à la demande contribuent au développement de la production, notamment de la production indépendante à leur égard, d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles, européennes et d’expression originale française.
Un décret en Conseil d’Etat définit : la base et le mode de détermination des obligations de contribution au développement de la production ; les dépenses éligibles ; la contribution minimale consacrée au développement de la production ; la part minimale consacrée au développement de la production indépendante ; la part minimale d’œuvres patrimoniales au sein des œuvres audiovisuelles, la contribution des chaînes terrestres devant, comme aujourd’hui, être entièrement ou de manière significative réalisée avec de telles œuvres ; les conditions dans lesquelles une œuvre peut être prise en compte au titre de la contribution d’un éditeur de services à la production indépendante. L’indépendance de l’œuvre et de la société qui la produit sera définie en tenant compte :
- Des liens capitalistiques directs ou indirects entre l’éditeur et le producteur ;
- De la nature et de l’étendue de la responsabilité du service dans la production de l’œuvre. A ce titre, l’éditeur de services ne pourra pas prendre personnellement ou ne pourra pas partager solidairement l’initiative et la responsabilité financière, artistique et technique de la réalisation de l’œuvre audiovisuelle ou cinématographique, et n’en garantira pas la bonne fin ;
- De la nature et de l’étendue des droits détenus par l’éditeur sur l’œuvre ;
- Pour les œuvres audiovisuelles, de la détention, directe ou indirecte, par l’éditeur de service de parts de producteur.
L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) devra s’assurer du respect des droits moraux et patrimoniaux reconnus aux auteurs pour la mise en œuvre de cette contribution. Il est en effet apparu que les pratiques de certains services de vidéo à la demande non établis en France ne respecteraient pas le droit d’auteur français. Dans un tel cas de figure, et lorsqu’elle en sera informée, l’ARCOM ne tiendra pas compte des investissements concernés au titre de la production indépendante.
Cette réforme se traduit par :
- la suppression des 3° et 4° de l’article 27 relatifs à la contribution à la production des services diffusés par voie hertzienne terrestres, des 6° et 7° de l’article 33 pour les services diffusés par d’autres réseaux et du 3° de l’article 33-2 pour les SMAD (transférés à l’article 71) ;
- la modification de la prise en compte par la convention conclue entre l’éditeur et l’ARCOM aux articles 28 et 33-1 des négociations interprofessionnelles entre l’éditeur et les organisations de l’industrie cinématographique et audiovisuelle y compris les auteurs ;
- l’insertion d’un nouvel article 33-3 organisant le régime de conventionnement des services de médias audiovisuels à la demande ;
- la fusion des articles 71 et 71-1 au sein d’un article 71 qui fixe les critères de la contribution à la production notamment indépendante des éditeurs et renvoie à un décret le soin de les préciser.
Les modifications législatives proposées ici ne devraient pas entraîner des impacts directs/quantifiables sur l’économie du secteur de la production audiovisuelle et cinématographique. Les conséquences potentielles seront davantage liées au contenu du décret qui doit préciser les modalités de mise en œuvre de ces dispositions.
Du côté des producteurs de cinéma, les modifications opérées à l’article 71 fusionné ne devraient pas avoir d’impact financier. En effet, si un effort de simplification de la définition de l’indépendance a été consenti, elle n’en est pas pour autant modifiée sur le fond. De la même manière, si les groupes de chaînes de télévision pourront désormais mutualiser les obligations en matière de cinéma de chacun des services qu’ils éditent, le CSA tenant compte dans les conventions des accords avec les organisations du cinéma, cette faculté ne devrait pas entraîner une baisse de l’investissement de ces services. Cette mesure devrait, tout en maintenant le niveau de l’investissement, accorder aux éditeurs des facilités en matière de diffusion des œuvres et d’optimisation des droits dont ils disposent pour chacune de leurs chaînes.
S’agissant des producteurs audiovisuels, la modification opérée aux articles 71 et 71-1, devrait clarifier les principes de détention par les éditeurs des droits sur les œuvres indépendantes. Elle se traduit par la suppression du dispositif introduit en 2013 qui permettait aux éditeurs de détenir des parts de coproduction sur les œuvres indépendantes dès lors qu’ils avaient financé une part substantielle de l’œuvre. La loi renvoyait ensuite au décret le soin de déterminer cette part et l’étendue des droits secondaires et des mandats de commercialisation détenus par les éditeurs dans ce cas de figure. Cette disposition avait permis aux principaux diffuseurs historiques (TF1, M6 et France Télévisions) de qualifier en coproduction indépendante une part importante des contrats de préachat liés à des œuvres indépendantes sur lesquelles ils ne disposaient pas des mandats de commercialisation (i.e. souvent les fictions récurrentes de première partie de soirée). Les diffuseurs avaient de fait accès à des « couloirs de recettes »[12] destinés aux ayants droit et pouvaient davantage maîtriser la seconde vie de l’œuvre dont ils étaient copropriétaires. Ce dispositif a eu une incidence sur la valorisation des investissements des chaînes : en 2017, la détention de parts de coproduction n’était plus un critère déterminant en matière de dépendance des œuvres, alors qu’elle l’était en 2015. Par conséquent, si la proposition de modification de l’article 71-1 n’entraîne pas d’impact direct sur les politiques de commandes ou les recettes des éditeurs, le décret qui en précisera les modalités pourrait modifier la répartition des droits et des recettes rattachées aux œuvres indépendantes.
De la même manière, la loi prévoit que certains éditeurs peuvent être exonérés de toute contribution, en raison de la faiblesse de leur chiffre d’affaires ou de leur audience, dont les seuils seront fixés par décret. Cette disposition suppose que l’ensemble des éditeurs, et non plus seulement les éditeurs de services de médias audiovisuels à la demande (SMAD), pourront bénéficier de ces seuils exonératoires. En effet, à ce jour, les SMAD n’atteignant pas 10 millions d’euros de chiffres d’affaires, ne sont pas assujettis à des obligations en matière de contribution à la création. La loi renvoyant au décret le soin de fixer le niveau de chiffre d’affaires opportun, l’impact macroéconomique de cette disposition législative n’est de fait pas quantifiable.
Néanmoins, ces modifications, en ce qu’elles viennent proposer une nouvelle architecture normative, devraient cependant avoir quelques effets indirects sur l’évolution des relations entre les éditeurs de services (linéaires et non linéaires) et leurs fournisseurs, les producteurs.
Les dispositions prévues à l’article 71 devraient particulièrement contraindre les plateformes étrangères. A ce titre, la loi n’exclut pas la possibilité que d’autres critères que celui du chiffre d’affaires soient pris en compte pour la déterminantion des obligations de contribution. Elle permet ainsi d’appréhender l’ensemble de l’activité économique du service concerné. Cette faculté est particulièrement importante dans un secteur où les modèles économiques déployés par les plateformes, ou leurs actionnaires, peuvent ne pas reposer exclusivement sur les revenus tirés de la diffusion de contenus audiovisuels.
Par ailleurs, les modifications envisagées devraient permettre d’imposer un plus grand respect du modèle français de préservation du droit d’auteur (i.e. l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique devra s’assurer du respect des droits moraux et patrimoniaux reconnus aux auteurs pour la mise en œuvre de la contribution à la création) et du droit des producteurs (i.e. le statut du producteur délégué est reconnu comme un critère essentiel de l’indépendance). Ces mesures doivent aider le secteur à se prémunir contre un risque de perte de valeur sur le marché hexagonal. En effet, à ce jour, les plateformes étrangères ont recours aux producteurs indépendants français pour la production d’œuvres inédites françaises sur le mode exclusif du producteur exécutif. Contrairement aux chaînes qui travaillent avec des producteurs qui conservent le statut de producteur délégué, les éditeurs de SMAD étrangers ont bâti en quelques mois un modèle dans lequel les producteurs se retrouvent en situation de simples prestataires de service.
Cette situation pourrait perdurer, les producteurs en retirant à court terme des bénéfices immédiats, et n’étant en tout état de cause pas en capacité de s’y opposer dans la négociation. Néanmoins, cette stratégie les prive de la valeur patrimoniale rattachée aux œuvres sur le long terme. L’espoir d’une rentabilité de court terme qui accompagne les œuvres produites avec ces éditeurs occulte le risque de ces pratiques peu favorables au développement des sociétés de production en France. Le marché des nouveaux éditeurs non-linéaires étrangers est en effet particulièrement attractif pour les producteurs habitués à n’avoir que quelques prescripteurs historiques sur le marché français. Or la détention des droits d’exploitation et des mandats a permis à certaines sociétés de production d’être cotées en bourse, au secteur de l’animation française d’être compétitif sur le plan mondial, et plus globalement à l’industrie de la production audiovisuelle et cinématographique de se constituer un patrimoine, qu’elle peut exploiter en toute liberté et en fonction de la fluctuation de la demande, et d’investir en retour dans la création.
Les dispositions de l’article 71 permettront ainsi que les nouveaux leviers de croissance que constituent de manière objective ces éditeurs non-linéaires étrangers ne viennent brider la localisation et le développement de la valeur des œuvres en France. Par ailleurs, la loi prévoyant les différentes situations dans lequelles ces acteurs pourraient se trouver, et notamment l’absence de conventionnement, elle permet d’assurer une application optimale du régime de contribution et elle limite ainsi les risques de contournement qui pourraient représenter des pertes d’investissements pour le secteur.
Au-delà de ce qui a été explicité plus haut s’agissant des enjeux macroéconomiques, les dispositions envisagées auront un impact sur les entreprises en ce qu’elles visent à adapter le cadre aux évolutions du marché et à accompagner les producteurs et les diffuseurs face aux grands défis auxquels ils sont et seront confrontés dans les cinq prochaines années, à savoir :
- La nécessité de concevoir une offre suffisamment créative pour séduire des publics toujours plus volatiles et indubitablement tournés vers les médias numériques ;
- Le besoin pour les chaînes de recourir à des fournisseurs (et pour les producteurs de trouver des clients toujours plus solides pour répondre aux exigences du marché en termes de délais de production, d’attractivité pour les talents et de recherche de partenaires notamment internationaux pour construire des plans de financement complexes ;
- L’obligation de maîtriser la chaîne des droits afin de tirer tous les bénéfices de la valeur patrimoniale des œuvres et d’être en mesure de rémunérer les ayants droit, de renouveler l’offre et d’assurer la promotion et l’exportation des œuvres à l’étranger.
Le contrôle des obligations de contribution à la production des éditeurs de services est une mission déjà importante de l’instance de régulation. Cette tâche ne devrait pas être substantiellement alourdie par les dispositions du projet de loi.
Dans la mesure où de nouveaux éditeurs de services de médias audiovisuels établis à l’étranger et ciblant la France doivent entrer dans ce dispositif de contrôle, cette tâche devrait cependant être accrue.
A cette fin, le projet de loi a prévu que le recensement du nombre d’éditeurs en cause, qui doit permettre de mieux apprécier cette charge nouvelle, soit rapidement mené par l’Autorité. Il renforce par ailleurs les moyens d’enquête et de contrôle de l’ARCOM afin de lui permettre de remplir son rôle auprès d’entreprises établies à l’étranger.
Ces dispositions sont soumises, à titre obligatoire, à l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel et à titre facultatif, à l’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.
Toutefois, la réforme introduit un conventionnement des SMAD par l’ARCOM, notamment pour définir la contribution de ces services au développement de la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles prévue par décret, qui nécessite l’adoption à l’article 81 d’une disposition transitoire permettant de donner aux éditeurs de ces services un temps suffisant pour se mettre en conformité avec ces prescriptions.
Un délai de six mois apparait suffisant pour leur permettre de conclure avec l’ARCOM la convention requise, s’agissant d’une mesure inscrite dans la directive et discutée depuis longtemps avec le secteur.
Les mesures envisagées s’appliquent en France métropolitaine et en outre-mer.
La mise en œuvre de ces dispositions nécessite l’adoption de décrets en Conseil d’Etat et d’un décret simple.
Les services de médias audiovisuels recouvrent les services de télévision traditionnels (services proposant des programmes en mode linéaire) et les services de médias audiovisuels à la demande ou SMAD (services proposant des programmes en mode non-linéaire). Cette dernière catégorie a été introduite en 2007 dans la directive 89/552/CE du Conseil du 3 octobre 1989 (directive Télévision sans frontière ou TVSF) par la directive 2007/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 (directive Services de médias audiovisuels ou SMA). La directive TVSF devenue SMA a ensuite été codifiée par la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels. Il est en effet apparu en 2007 nécessaire au législateur européen de soumettre les SMAD[13] aux règles minimales applicables aux services de télévision pour éviter toute distorsion de concurrence dans la mesure où ces nouveaux services non-linéaires sont en concurrence avec les services linéaires traditionnels.
Le régime de contribution à la production d’œuvres prévu par la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive « Services de médias audiovisuels » ou « SMA ») est obligatoire pour les services de télévision[14] et facultatif pour les SMAD[15]. Il n’a pas été modifié par la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du conseil du 14 novembre 2018.
En revanche, et sur initiative française, « compte tenu du lien direct entre les obligations financières et les différentes politiques culturelles des États membres » précise le considérant 36 de la directive de 2018, la possibilité est donnée aux Etats membres d’imposer de telles obligations financières aux fournisseurs de services de médias (télévision et SMAD) établis dans un autre État membre qui ciblent leurs territoires :
« Art. 13.2. Lorsque les États membres exigent que les fournisseurs de services de médias relevant de leur compétence contribuent financièrement à la production d'œuvres européennes, notamment par l'investissement direct dans des contenus et par la contribution à des fonds nationaux, ils peuvent également exiger que les fournisseurs de services de médias qui ciblent des publics sur leur territoire mais sont établis dans d'autres États membres soient également soumis à ces contributions financières, qui doivent être proportionnées et non discriminatoires. ».
Il s’agit d’une dérogation au principe d’application de la réglementation de l’Etat dans lequel est établi l’éditeur de services, à savoir le principe du pays d’origine sur lequel se fonde le droit européen en général et la directive SMA en particulier.
Ces obligations peuvent prendre la forme de contributions directes à la production et à l'acquisition de droits sur des œuvres européennes (décrets d’application de la loi du 30 septembre 1986) mais également se traduire par des « redevances à un fonds » telles que les taxes du code du cinéma et de l’image animée, qui ne seront pas traitées ici.
Ces obligations doivent respecter plusieurs conditions :
- elles doivent être proportionnées et non discriminatoires et ne devront être perçues que sur les recettes perçues dans l'État membre ciblé (2e et 3e paragraphes de l’article 13) ;
- les services ayant un faible chiffre d’affaires ou un faible auditoire doivent en être exonérés ; les Etats membres peuvent en outre en exonérer ceux pour lesquels elles seraient impraticables ou injustifiées « en raison de la nature ou du thème des services de médias audiovisuels » (article 13.6) ;
- la contribution financière que l'État membre impose à ses propres fournisseurs de services de médias (télévision et SMAD) doit « tenir compte » des éventuelles contributions financières imposées par les États membres ciblés afin d’éviter les risques de double imposition (article 13.3).
En droit interne, par application du 3° de l'article 27, du 6° de l'article 33 et du 3° de l’article 33-2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande sont tenus de contribuer au développement de la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles.
Ces articles renvoient ensuite à des décrets le soin d’en fixer les modalités de mise en œuvre.
Trois décrets ont été ainsi adoptés en 2010 :
- le décret n° 2010-747 du 2 juillet 2010 relatif à la contribution à la production d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles des services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre pris sur le fondement de l’article 27 de la loi,
- le décret n° 2010-416 du 27 avril 2010 relatif à la contribution cinématographique et audiovisuelle des éditeurs de services de télévision et aux éditeurs de services de radio distribués par les réseaux n'utilisant pas des fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pris sur le fondement de l’article 33 de la loi pour les services utilisant d’autres modes de diffusion que la voie hertzienne terrestre : câble, satellite, ADSL, etc.),
- et le décret n°2010-1379 du 12 novembre 2010 relatif aux services de médias audiovisuels à la demande pris sur le fondement de l’article 33-2 de la loi pour les services de médias audiovisuels à la demande.
L’observatoire européen a publié en 2019 une étude[16] permettant d’avoir une vision large des dispositifs de contribution des SMAD mis en œuvre dans d’autres pays européens sur la base de la précédente directive SMA. Ainsi, il est possible de constater que des règles en matière de contribution à la création ont été imposées dans 10 des 31 pays observés. Dans seulement 7 pays, ces règles constituent des obligations pour les opérateurs concernés (Danemark à partir de 2020, Espagne, France, Allemagne, Grèce, Italie et Portugal). Dans trois autres pays, ces règles sont optionnelles en ce qu’elles proposent aux services de choisir entre des investissements financiers (contribution directe) ou un abondement à un fonds d’aide à la création (Belgique) ou bien un quota d’œuvres européennes dans le catalogue (République Tchèque et Slovénie).
Conformément à l’article 2 de la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive «Services de médias audiovisuels», ou directive SMA), les États membres doivent prendre les dispositions législatives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 19 septembre 2020.
La transposition de la directive nécessite de modifier l’article 43-2 de la loi qui fixe les critères d’application de la réglementation audiovisuelle française (critère d’établissement en France pour l’essentiel) pour étendre le champ d’application des dispositions relatives à la contribution à la production aux éditeurs (télévision et SMAD) relevant de la compétence d’un autre Etat membre et qui ciblent le territoire français.
La mesure proposée vise donc à transposer la nouvelle directive SMA afin d’imposer aux services de télévision et de médias audiovisuels à la demande établis sur le territoire d'un autre État membre mais destinant leur offre au public français, de contribuer financièrement à la production d'œuvres européennes et d’expression originale française.
Comme le prévoit la directive, la contribution financière de ces services sera assise sur l’activité économique dudit service en France (i.e. Etat membre ciblé par l’offre).
Cette disposition a deux objectifs majeurs, à savoir, assurer une équité dans l’application des règles entre les services étrangers et les services établis en France, déjà assujettis au régime de contribution à la création, et consolider le financement de la création audiovisuelle et cinématographique, alors que les évolutions des usages et du marché fragilisent le système actuel de soutien (le chiffre d’affaires réalisé en France par les acteurs installés dans un autre Etat membre venant en tout ou partie affecter celui des acteurs français, et par conséquent leur contribution au système.)
Le régime de l’article 13.2 nouveau de la directive tendant à soumettre au financement de la production les services établis dans un autre Etat membre et ciblant le public français n’est qu’une faculté proposée aux Etats membres.
Le gouvernement a choisi d’utiliser cette faculté et de transposer l’article 13.2 de la directive SMA par le dispositif retenu. Ainsi, les dispositions de l’article 71 relatives à la contribution au développement de la production sont applicables aux éditeurs de service de télévision et de médias audiovisuels à la demande relevant de la compétence d’un autre Etat membre de l’Union européenne ou d’un Etat membre partie à l’accord sur l’Espace économique européen.
Plus généralement, ce dispositif est étendu à l’ensemble des services de télévision et de médias audiovisuels à la demande étrangers qui visent le public français.
La conclusion d’une convention avec l’ARCOM est ainsi étendue aux éditeurs de services de médias audiovisuels à la demande étrangers les plus importants. Dans chaque convention, l’ARCOM déterminera la contribution consacrée au développement de la production respectivement pour les œuvres cinématographiques et pour les œuvres audiovisuelles, en tenant compte des accords conclus entre l'éditeur de services et une ou plusieurs organisations professionnelles de l'industrie cinématographique et audiovisuelle, y compris pour la partie de ces accords qui affectent directement leurs intérêts, des organisations professionnelles et organismes de gestion collective représentant les auteurs. En l’absence d’une convention liant l’ARCOM à l’éditeur de service étranger, cette dernière sera en mesure de lui notifier l’étendue de ses obligations au titre de la contribution au financement de la production. Par ailleurs, un dispositif de sanction est envisagé dans la loi.L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique sera chargée d’assurer le contrôle du respect de ce nouveau régime de contribution au titre de ses compétences (pouvoirs d’enquête et de sanction).
A l’occasion de cette transposition, il est également apparu opportun d’étendre le dispositif de contribution à la production ainsi que celui relatif à la protection des mineurs aux éditeurs de services de télévisions et de médias audiovisuels à la demande établis sur le territoire d’un Etat qui n’est ni membre de l’Union européenne, ni partie à l’accord sur l’Espace économique européen et qui visent le territoire français.
Ces mécanismes se traduisent par une modification de l’article 43-7 de la loi du 30 septembre 1986 tendant à :
- prévoir l’application de l’article 71 de la loi de 1986 relatif à la contribution au développement de la production aux éditeurs de services de télévision ou de SMAD visant le territoire français qui ne sont pas établis en France et qui ne relèvent pas de la compétence de la France en ne prenant en compte que leur activité économique en France ;
- prévoir réciproquement que, lorsqu’un éditeur de service de télévision ou de SMAD établi en France édite un service qui vise spécifiquement le territoire d’un autre Etat membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen et que cet Etat exige une contribution à la production, il est tenu compte de cette contribution pour la détermination de la contribution due en France ;
- prévoir une extension du régime de protection des mineurs et de contribution à la production aux éditeurs de services de télévision et de SMAD qui ne relèvent pas de la compétence de l’Union européenne et qui visent le territoire français.
La mesure envisagée est conforme au droit de l’Union européenne. Elle s’inscrit dans le prolongement de la directive SMA précitée, qui prend en compte l'évolution des réalités du marché et étend les obligations de contribution à la production aux éditeurs étrangers qui ciblent le territoire d’un Etat membre.
La disposition visant à transposer la directive SMA et à étendre le régime de contribution aux éditeurs de services étrangers pourrait avoir des impacts importants et positifs sur le financement de la création audiovisuelle et cinématographique.
Les plateformes de vidéo à la demande (VàD) concernées par la mesure opèrent sur un marché à forte croissance. Il convient en effet de rappeler que les services en ligne proposant le visionnage de contenus payants sont particulièrement plébiscités par le public français. Selon Harris Interactive et NPA Conseil, en moyenne sur l’année 2018, 2,3 millions de Français avaient regardé chaque jour au moins un programme en vidéo à la demande par abonnement.
En 2018[17], le chiffre d’affaires total de la vidéo (physique et VàD) s’élevait à 1 120,5 M€, en hausse de 9,7 % (1 021,7 M€ en 2017). Le marché de la vidéo physique représentait 40 % du marché total de la vidéo, en baisse de 12,5 points par rapport à 2017 au profit de la vidéo à la demande, dont la part passait de 47,5 % en 2017 à 60 % en 2018. Le marché de la vidéo dématérialisée occupait de fait plus de la moitié du marché total de la vidéo en part de marché en 2018.
Selon le baromètre NPA-GfK, les ventes sur le marché de la VàD payante en France étaient estimées à 671,9 M€ en 2018, en progression de 38,5 % par rapport à 2017. Pour la deuxième année consécutive, le marché de la VàDA (formules par abonnement) dépassait le marché du paiement à l’acte et se trouvait majoritaire (67,7 %) dans l’ensemble des ventes. En 2018, le marché de la VàDA était estimé à 455 M€, en hausse de 82,7 % par rapport à 2017.
Par ailleurs, si la liste exhaustive des services actifs en France est difficile à constituer (en particulier en raison du régime facultatif de déclaration auprès du CSA), il semblerait que le nombre de services accessibles soit en croissance, permettant ainsi un renouvellement permanent de l’offre. En 2017, 65 services de VàDA actifs étaient recensés en 2017 en France par le CSA (hors offres payantes « mixtes», mêlant à la fois des contenus de télévision de rattrapage et d’autres contenus de vidéo à la demande, et services de catégorie V spécialisés dans les films et programmes pour adultes)[18]. En septembre 2019, 106 services actifs de VàD payante et de VàDA[19] établis en France étaient déclarés en tant que SMAD au CSA.
Malgré le potentiel de ce marché, il est important de noter que peu de services de vidéo en ligne contribuent de manière effective au financement de la création. En effet, en 2017, seuls cinq services de médias audiovisuels à la demande étaient soumis à des obligations de production (du fait de leur chiffre d’affaires supérieur à 10 M€ en 2016, et de leur établissement en France) :
L’assiette globale sur laquelle sont assises les obligations de contribution à la production représentait 123,9 M€[20] en 2017. Elle avait baissé par rapport à l’exercice précédent (-5,7%, à 131,4 M€). S’agissant des montants de contribution, ils étaient répartis de la manière suivante :
- 6 M€ de dépenses déclarées en faveur de la production d’œuvres audiovisuelles européennes (en montant stable par rapport à l’année précédente) ;
- 24,8 M€ de dépenses déclarées en faveur de la production d’œuvres cinématographiques européennes (contre 24,2 M€ en 2016, soit une augmentation de 2,5%).
Cette contribution est à mettre en regard des 1,2 Md€ investis en 2017 par l’ensemble des chaînes de télévision dans la production cinématographique et audiovisuelle. Compte-tenu du seuil d’assujettissement au régime de contribution fixé dans le décret précisant les modalités de la contribution des services (i.e. chiffre d’affaires supérieur à 10 M€), ainsi que du niveau encore faible des recettes, la contribution des services de médias audiovisuels à la demande au financement de la création reste limitée.
Au sein de la liste des services identifiés par le CSA en 2017, 12 n’étaient pas déclarés en France et donc non soumis à la réglementation française :
Parmi ces services figurent notamment ceux qui rassemblent le plus grand nombre de consommateurs en France à savoir Netflix (Pays-Bas), Amazon Prime Video (Luxembourg), ou encore Google Play (Irlande). A ces services pourraient s’ajouter d’autres dont l’offre sera ou pourrait être proposée au public français à court ou moyen terme (Disney +, HBO Max, Peacock).
Généralement, le contrôle des obligations n’entraîne pas de coûts particuliers, les informations permettant d’en vérifier le respect étant fournies aux autorités publiques gratuitement par les services concernés.
Les éventuels impacts budgétaires associés à l’assujettissement de nouveaux services étrangers au régime de contribution français pourraient cependant être liés aux coûts de la charge de travail supplémentaire imposée à la nouvelle autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique en raison de la signature de conventions avec les services concernés et du contrôle effectués par ses soins.
L’étude d’impact de la directive SMA avait permis d’estimer que les coûts « administratifs » liés au suivi des obligations des services linéaires effectué par les autorités de régulation européennes se situait entre 500 € et 91 k€ par an et par administration[21]. Ce coût pourrait bien sûr être supérieur s’agissant d’opérateurs non établis en France et dont le contrôle pourrait nécessiter un suivi particulier, générant des moyens humains supplémentaires et, éventuellement, des logiciels spécifiques.
Cette mesure devrait permettre de proposer aux consommateurs de ces services d’avoir accès à davantage de contenus européens et français. Elle devrait avoir également un effet positif sur la qualité et la diversité des contenus proposés aux particuliers en contribuant à accroître les investissements dans les œuvres produites sur le territoire national.
Ces dispositions sont soumises, à titre obligatoire, à l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel et à titre facultatif, à l’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.
La mesure envisagée s’applique en France métropolitaine et en outre-mer.
La mise en œuvre de cette disposition nécessite l’adoption d’un décret en Conseil d’Etat.
Article 6 : suppression des heures d’écoute significatives
L’article 27 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose que : « compte tenu des missions d'intérêt général des organismes du secteur public et des différentes catégories de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre, des décrets en Conseil d'Etat fixent les principes généraux définissant les obligations concernant : […] 2° La diffusion, en particulier aux heures de grande écoute, de proportions au moins égales à 60 % d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et de proportions au moins égales à 40 % d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles d'expression originale française ».
La notion « d’heures de grande écoute » a été introduite dans la loi du 30 septembre 1986 susmentionnée par la loi n°89-25 du 17 janvier 1989[22] afin de faire obstacle à la pratique de certains services de télévision leur permettant de respecter les quotas en diffusant nuitamment les œuvres européennes et d’expression originale française.
En application de l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986, l’article 14 du décret n°90-66 du 17 janvier 1990 relatif à la diffusion des œuvres audiovisuelles prévoit que : « (…) Pour les éditeurs de services de cinéma, sont considérées comme heures de grande écoute les heures comprises entre 20 h 30 et 22 h 30.
Pour les autres éditeurs de services de télévision, sont considérées comme heures de grande écoute les heures comprises entre 18 heures et 23 heures ainsi que, le mercredi, les heures comprises entre 14 heures et 18 heures.
Toutefois, pour les éditeurs de services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique, distribués par un réseau n'utilisant pas de fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ainsi que pour les programmes rediffusés des services de cinéma à programmation multiple, les conventions et cahiers des charges déterminent les heures de grande écoute en fonction de la nature de la programmation du service. ».
La loi n° 92-61 du 18 janvier 1992 modifiant les articles 27, 28, 31 et 70 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a introduit la possibilité pour le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’autorité publique indépendante de régulation de l’audiovisuel, de substituer aux heures de grande écoute fixées par décret des « heures d’écoute significatives ». Le cinquième alinéa de l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986 dispose en effet : « (…) le Conseil supérieur de l'audiovisuel pourra substituer aux heures de grande écoute des heures d'écoute significatives qu'il fixera annuellement, pour chaque service, en fonction notamment des caractéristiques de son audience et de sa programmation ainsi que de l'importance et de la nature de sa contribution à la production ; ».
S’agissant de la notion d’heures d’écoute significatives, le Conseil constitutionnel[23] a estimé d’une part que : « cette faculté n'est accordée par le législateur que dans la mesure limitée où un tel aménagement serait de nature à rendre plus aisée la réalisation par chaque service autorisé des objectifs déterminés par la loi et qui tendent à assurer la diffusion de seuils minimaux d'œuvres (…) européennes et (…) d'expression originale française » et d’autre part que ces dispositions « doivent être interprétées comme permettant à l'instance de régulation de l'audiovisuel d'assurer le respect des règles essentielles posées par la loi et des principes généraux fixés par décret en Conseil d'État en tenant compte de la diversité des situations des différents services ».
Le régime des heures d’écoute significatives permet ainsi au CSA de fixer pour un service des créneaux horaires plus larges que ceux fixés par le décret du 17 janvier 1990 pour le respect des quotas aux heures de grande écoute.
Seuls les services M6 et Canal+ ont eu recours à ce régime dérogatoire, pour le premier de 1997 à 2007, et pour le second de 2009 à 2018.
A titre d’exemple, pour l’année 2007, le CSA avait décidé de retenir la tranche 17 h / 23 h des programmes de M6 (18 h / 23 h dans le décret) au titre des heures d'écoute significatives.
Le recours à une telle mesure dérogatoire est encadré par l’article 15 du décret du 17 janvier 1990 qui prévoit que « les décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel prises sur le fondement du 2° de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée porteront effet pour la durée de l'année civile et devront intervenir au plus tard le 30 novembre de l'année précédente ».
Sur ce fondement, le CSA exige que les demandes des éditeurs de services de télévision en la matière respectent les règles suivantes :
- respecter un formalisme (faire chaque année l’objet d’un courrier motivé) ;
- intervenir dans un délai raisonnable avant le 30 novembre de l’année précédant l’exercice concerné ;
- être justifiées, notamment au vu des caractéristiques de l’audience, de la programmation du service, ainsi que de l’importance et de la nature de sa contribution à la production.
Lorsque le dispositif des heures d’écoute significatives a été introduit en 1992, le décret du 17 janvier 1990 fixait des heures de grande écoute uniformes pour tous les services, ne permettant pas de modulation par service.
Le décret n° 2001-1333 du 28 décembre 2001[24] a introduit à l’article 14 du décret du 17 janvier 1990 une faculté pour le CSA de moduler dans la convention conclue avec un éditeur les heures de grande écoute. Cette faculté ne valait toutefois que pour les futurs services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique, c’est-à-dire pour les chaines de la TNT qui ont été lancées en 2005 (C8, W9, TMC, etc.) et les services du câble et du satellite : « Toutefois, pour les éditeurs de services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique, distribués par un réseau n'utilisant pas de fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ainsi que pour les programmes rediffusés des services de cinéma à programmation multiple, les conventions et cahiers des charges déterminent les heures de grande écoute en fonction de la nature de la programmation du service ».
La faculté de modulation des heures de grande écoute issue du régime des heures d’écoute significatives conservait donc un intérêt pour les services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique (i.e. les chaînes historiques : TF1, M6 et Canal+).
Mais depuis l’extinction de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique et leur diffusion en mode numérique, l’ensemble des services terrestres peut bénéficier du régime de modulation prévu dans le décret.
Par ailleurs, peu d’éditeurs sollicitent la dérogation des heures d’écoute significatives.
En outre, le dispositif actuel comporte deux inconvénients majeurs : tout d’abord, les critères permettant d’accéder à l’une ou l’autre des dérogations ne sont pas identiques (en fonction notamment des caractéristiques de l’audience et de la programmation ainsi que de l'importance et de la nature de la contribution à la production du service pour le régime des heures d’écoute significatives et en fonction de la nature de la programmation pour le régime des heures de grande écoute), ensuite, l’une des dérogations est annuelle et unilatérale (les heures d’écoute significatives) tandis que l’autre se négocie lors de la conclusion de la convention pour toute la durée de celle-ci.
Il s’agit de simplifier et clarifier les dispositifs en ne conservant qu’un seul régime dérogatoire aux heures de grande écoute.
Le statu quo n’a pas été retenu compte tenu de l’obsolescence de ce régime.
Le dispositif retenu consiste en une suppression du régime des heures d’écoute significatives prévu à l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986. Ainsi, désormais, la seule dérogation concernerait la possibilité pour l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique de fixer dans la convention qu’il conclut avec l’éditeur d’autres heures de grande écoute que celles prévues par le décret.
Cette réforme se traduit par la suppression du 5ème au 8ème alinéa de l’article 27, des 8ème et 9 ème alinéa de l’article 33 et du 5 ème alinéa de l’article 33-2 de la loi du 30 septembre 1986. De plus, l’article 71-1 de la même loi est abrogé.
Il conviendra de tirer les conséquences de la suppression du cinquième alinéa de l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986 en supprimant l’article 15 du décret du 17 janvier 1990 pris pour son application.
Cette suppression n’aura pas d’impact puisque le régime des heures d’écoute significatives n’est plus mis en œuvre aujourd’hui.
Ces dispositions sont soumises, à titre obligatoire, à l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel et à titre facultatif, à l’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.
La mesure envisagée s’applique en France métropolitaine et en outre-mer.
Article 7 : respect des droits moraux et patrimoniaux des auteurs dans les contrats de production cinématographique et audiovisuelle
1.1 Les auteurs d’une œuvre cinématographique ou audiovisuelle, énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, sont principalement le réalisateur, le scénariste, l’adaptateur, le dialoguiste et le compositeur de la musique. Ces auteurs jouissent de deux types de droits, connus sous la dénomination de « droits d’auteur ». Il s’agit d’une part, des droits moraux, prévus aux articles L. 121-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. Ces droits sont notamment le droit au nom, au respect de la qualité d’auteur, au respect de l’intégrité de l’œuvre. Il s’agit, d’autre part, des droits patrimoniaux, prévus aux articles L 122-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, qui comprennent les deux branches du droit d’exploitation que sont le droit de représentation et le droit de reproduction.
En matière audiovisuelle, l’exploitation des droits des auteurs est régie, aux termes des articles L.132-23 et suivants du code de la propriété intellectuelle, par la conclusion d’un contrat dénommé « contrat de production audiovisuelle ». Pour chaque œuvre, un contrat est ainsi conclu avec chacun des auteurs. Ce contrat, qui lie le producteur aux auteurs, emporte, sans préjudice des droits moraux, cession des droits d’exploitation au producteur et, en regard, en application de l’article L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle, rémunération proportionnelle de l’auteur. Cette rémunération est due pour chaque mode d’exploitation.
Les droits des auteurs sont également protégés par le droit de l’Union européenne, dans le même cadre que les droits voisins. Ceux-ci désignent les droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes ou des entreprises de communication audiovisuelle. La directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information confie notamment aux auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction, la communication au public ou la distribution de leur œuvre. Plus récemment, la directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE affirme, à son article 18, le principe du droit pour les auteurs de percevoir une rémunération appropriée et proportionnelle.
1.2 Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture. Le 2° de l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée lui confie, en vue de la contribution au financement et au développement du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée, l’attribution d’aides financières. Les conditions d’attribution de ces aides sont fixées par un « règlement général des aides », texte à valeur réglementaire établi par le conseil d’administration du CNC et publié au Journal officiel de la République française.
Ce règlement général comprend sept livres, le premier comportant des dispositions générales et les six autres correspondant aux différents secteurs et branches d’activités du cinéma et de l’image animée soutenus conformément au 2° de l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée :
- aides à la création cinématographique et à la diffusion en salles (aides à la production, à la préparation, à l’élaboration d’œuvres cinématographiques ; aides à la distribution d’œuvres cinématographiques ; aides à l’exploitation cinématographique) ;
- aides à la création audiovisuelle et multimédia (aides à la production, à la préparation, à l’élaboration d’œuvres audiovisuelles ; aides en faveur des œuvres interactives et expérimentales ; aides à la création et à la production de jeux vidéo) ;
- aides à la diversité de la création et à la diffusion auprès des publics (aides à la production et à la diffusion d’œuvres cinématographiques de courte durée ; aides en faveur de la diversité de la population et de l’égalité de chances ; aides à la création et à la diffusion sur les plateformes numériques) ;
- aides au patrimoine cinématographique ;
- aides à la diffusion en vidéo physique et en ligne des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ;
- aides à l’utilisation des technologies numériques de l’image et du son ;
- aides aux industries techniques du cinéma et de l’audiovisuel et à l’innovation technologique ;
- aides à la coopération et à la diffusion internationale des œuvres cinématographiques et audiovisuels (fonds d’aides bilatéraux institués par accords intergouvernementaux ou administratifs ; aides à la promotion et à la distribution à l’étranger).
En ce qui concerne plus particulièrement les aides à la production, elles s’élèvent, annuellement, à plus de 135 millions d’euros en ce qui concerne la production cinématographique et à plus de 250 millions d’euros en ce qui concerne la production audiovisuelle.
La protection accordée aux droits moraux et patrimoniaux des auteurs en France et dans l’Union européenne n’est pas la même que dans d’autres pays, notamment les Etats-Unis. Le système dit de copyright américain constitue un droit de l’exploitant, lié à l’œuvre davantage qu’à son auteur. Le producteur est regardé comme l’auteur d’une œuvre. Il en conserve les droits d’exploitation, jusqu’à leur transfert éventuel à la suite d’une vente de l’œuvre ou d’un catalogue entier.
Or le paysage de la création cinématographique et audiovisuelle en France voit, depuis plusieurs années, croître des acteurs américains, dont la culture juridique repose sur le copyright américain plutôt que sur le droit d’auteur dans sa version européenne. Ces acteurs disposent d’une masse financière considérable, incomparable avec celle des producteurs et des éditeurs français. Dès lors, la préférence de ces plateformes pour le copyright, issu d’une logique juridique américaine, met en danger l’application conforme du droit de la propriété intellectuelle. Comme le signalent notamment les organismes de gestion collective des droits d’auteur, il arrive que les contrats de production des œuvres françaises dans lesquelles investissent ces plateformes comprennent des clauses contraires au modèle français. Ces clauses, apparentées au modèle juridique des Etats-Unis, dépossèdent les auteurs du montage final (le « final cut »), qui relève en France du droit moral. Elles prévoient aussi l’achat par la plateforme des droits de l’œuvre « dans le monde entier et pour l’éternité », en rémunérant les auteurs sur une base forfaitaire (clauses de buy-out), qui heurte le principe, prévu par le code de la propriété intellectuelle, de la rémunération proportionnelle.
Si la loi énonce déjà de façon complète l’ensemble des droits réservés aux auteurs, elle ne prévoit à ce jour, face à ces évolutions du marché, aucun dispositif de contrôle ni d’encadrement des pratiques contractuelles. De façon notable, alors même qu’il soutient la création cinématographique et audiovisuelle par un dispositif d’aides, le CNC ne dispose d’aucun outil de nature à lui permettre de vérifier le respect des principes essentiels du droit d’auteur contenus dans le code de la propriété intellectuelle.
Son règlement général des aides prévoit que, dans le cadre d’une demande d’aide à la production d’une œuvre cinématographique et audiovisuelle, les entreprises doivent fournir au Centre national du cinéma et de l’image animée les contrats conclus avec les auteurs afin que le Centre s’assure de la titularité des droits d’exploitation par le demandeur.
Il est donc nécessaire, dans ce cadre, que, lorsque lui sont fournis de tels contrats, le Centre national du cinéma et de l’image animée soit en mesure de contrôler le respect des principes et de l’application du droit d’auteur.
Le principe du droit moral et celui de la rémunération proportionnelle devant être garantis dans tous les contrats et leur respect devant être facile à contrôler, il est nécessaire que la loi crée un dispositif simple mais obligatoire. Un tel dispositif doit pouvoir fonctionner lorsque des aides sont sollicitées, à travers le Centre national du cinéma et de l’image animée, auprès des pouvoirs publics. D’une part, l’existence d’un dispositif de contrôle permettrait de mieux garantir le respect général des principes du droit d’auteur. D’autre part, elle permet de ne pas soutenir les œuvres qui y contreviennent.
Les mesures envisagées visent à favoriser le respect du droit moral et des principes relatifs à la rémunération des auteurs, y compris par les plateformes américaines, lorsque sont demandées des aides publiques, en :
- confiant au Centre national du cinéma et de l’image animée une mission de vérification du respect de ces principes ;
- facilitant la mise en œuvre des principes relatifs à la rémunération des auteurs et leur vérification par la mise en place de clauses types dans les contrats de production ;
- favorisant la négociation interprofessionnelle pour l’établissement des clauses types.
Il existe en réalité déjà des contrats-types mis en œuvre dans le domaine de la production audiovisuelle. Ces contrats-types, dépourvus de toute valeur obligatoire, sont utilisés dans le cadre très classique de la production, en dehors des projets des grandes plateformes, lorsque, notamment, les auteurs sont affiliés à des organismes de gestion collective qui ont élaboré de tels contrats. L’encadrement des pratiques par un contrat-type a toujours prouvé son efficacité et ne requiert aucune intervention des pouvoirs publics.
Il est donc proposé d’inscrire dans la loi que le Centre national du cinéma et de l’image animée vérifie le respect dans les contrats de production des droits moraux reconnus aux auteurs et des principes relatifs à la détermination de leur rémunération. Il s’agit d’une logique déjà employée par le code du cinéma et de l’image animée, dont l’article L. 311-3 prévoit que le Centre national du cinéma et de l’image animée vérifie le respect, par le bénéficiaire des aides, de ses obligations sociales.
Pour assurer à la fois, en amont, l’encadrement des contrats par les principes du droit d’auteur, et, en aval, la mise en œuvre de la vérification exercée par le Centre national du cinéma et de l’image animée, il est proposé que la loi encadre la formation des contrats, lorsque les producteurs sollicitent des aides publiques, par la mise en place de clauses-types.
Ces clauses-types seront négociées par les professionnels, c’est-à-dire les organisations professionnelles représentatives des producteurs, d’une part, et les organisations professionnelles représentatives des auteurs ou les organismes de gestion collective de leurs droits, d’autre part. Il y aura lieu de suppléer à l’absence d’accord par un décret en Conseil d’Etat si ces négociations n’aboutissent pas.
L’établissement de clauses-types est préféré à celui de contrats-types afin de minimiser l’encadrement contractuel et de laisser les différentes parties prenantes libres de négocier ce qu’elles souhaitent sur tous les autres aspects, dans les limites de la loi. Un tel encadrement demeure cependant plus efficace au regard de l’expérience des contrats-types des organismes de gestion collective. Toute autre forme d’encadrement, par une méthode incitative, serait dépourvue d’effet au regard de la disproportion entre la taille des plateformes d’un côté, leur marge de manœuvre financière et celle, sur le marché, des auteurs et de leurs organismes de représentation.
Il existe par ailleurs déjà dans la loi de nombreux renvois à des clauses-types. L’article L. 111-4 du code des assurances prévoit par exemple que l'autorité administrative peut imposer l'usage de clauses-types de contrats. Le code des transports dispose, à son article L. 1432-12, que « les clauses des contrats-types de transport de marchandises et des contrats-types de commission de transport sont établies par voie réglementaire ».
Cette option apparaît donc conforme aux objectifs poursuivis et à l’état actuel du droit.
Concrètement, le dispositif retenu prévoit ainsi que l’attribution des aides financières du Centre national du cinéma et de l’image animée est subordonnée à l’inclusion dans les contrats de production remis à l’appui d’une demande d’aide, de clauses-types établissant le respect des droits moraux reconnus aux auteurs et des principes relatifs à la détermination de leur rémunération. A cette fin, des accords entre organismes professionnels d’auteurs ou organismes de gestion collective et organisations professionnelles représentatives des producteurs devront être conclus. A défaut les clauses-types seront fixées par un décret en Conseil d’Etat.
C’est par ailleurs dans le cadre du contrôle opéré par le Centre national du cinéma et de l’image animée que celui-ci pourra saisir l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique afin qu’elle contrôle le respect des droits des auteurs dans le cadre de la mise en œuvre de la contribution à la production des éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande.
La mesure insère un nouvel article L. 311-5 dans le titre Ier du livre III du code du cinéma et de l’image animée relatif aux aides du CNC. Cet article renvoie aux principes existant déjà dans le code de la propriété intellectuelle et dans les directives européennes relatives au droit d’auteur.
Le dispositif proposé favorisera le respect des droits moraux et patrimoniaux des auteurs lorsque leurs œuvres donnent lieu à l’attribution d’aides financières. En effet, en l’absence des clauses-types dans les contrats de production remis pour l’obtention d’une aide, celle-ci sera refusée.
La totalité des aides financières attribuées par le Centre national du cinéma et de l’image animée pour la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles sera donc en principe conditionnée à la mise en œuvre des clauses-types.
Le dispositif n’aura aucun coût : sa vocation est d’empêcher de façon préventive que se développent ou continuent de se développer des pratiques contraires au modèle français de protection juridique des auteurs. Les principes existant déjà, les entreprises de production concernées ne devraient pas avoir de difficultés à les mettre en œuvre.
25 agents du Centre national du cinéma et de l’image animée sont actuellement chargés de l’instruction des dossiers de demandes d’aides à la production, ce qui représente en moyenne 4800 demandes d’aides chaque année. Ils devront, dans le cadre de l’examen des contrats de production auxquels ils procèdent déjà, vérifier plus particulièrement la présence ou non et l’exactitude des clauses-types. Ce travail ne nécessitera aucun recrutement supplémentaire mais pourrait, le cas échéant, requérir des besoins de formation, que le Centre national du cinéma et de l’image animée mettra en œuvre.
Ces dispositions sont soumises, à titre facultatif, à l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel, de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.
La mesure envisagée s’applique en France métropolitaine et en outre-mer.
Les contrats de production devront comporter des clauses-types établies en principe par accord professionnel entre les représentants des auteurs et les organisations professionnelles de producteurs.
A défaut d’accord dans le délai d’un an, les clauses-types seront fixées par décret en Conseil d’Etat.
Article 8 : placement de produit
De nombreuses règles encadrant la programmation des services de télévision, adoptées dans les années 1980 et 1990, sont aujourd’hui obsolètes, au regard de l’évolution des technologies et des usages. Elles pénalisent les médias traditionnels dans leur situation de concurrence nouvelle avec les acteurs du numérique, dont beaucoup ne sont pas assujettis à la réglementation française, ainsi que l’ont mis en évidence les rapports de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, en conclusion des travaux de la mission d’information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique en octobre 2018, et de l’Autorité de la concurrence dans son avis n° 19-A-04 du 21 février 2019 relatif à une demande d’avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale dans le secteur de l’audiovisuel.
Le ministère de la culture a mené depuis plusieurs mois des consultations publiques[25] afin d’adapter ces dispositions, tout en veillant à ce que cette modernisation de la réglementation ne porte pas atteinte au respect de ses objectifs fondamentaux, tels le pluralisme des médias, la diversité culturelle ou la protection des publics fragiles.
Une consultation publique sur la simplification des règles relatives à la publicité télévisée a été ainsi menée par la Direction générale des médias et des industries culturelles au second semestre 2017. Elle a fait l’objet d’une quarantaine de réponse des professionnels (représentants et groupes de services de télévision, radios, régies publicitaires, auteurs, producteurs, industrie cinématographique, annonceurs et agences publicitaires, opérateurs télécoms, presse écrite).
Le placement de produit est une technique publicitaire qui est prisée en raison de l’effet de la mémoire implicite : elle active la préférence de marque sans que celle-ci soit explicitement mémorisée. Ainsi, un placement récurrent dans une fiction peut générer jusqu’à 35 % de part de marché supplémentaire auprès des consommateurs exposés[26] et justifient d’une rentabilité jusqu’à quatre fois supérieure à celle d’un spot de publicité (dont les coûts sont beaucoup plus importants)[27]. De même, un placement de produit peut faire quasiment jeu égal avec un spot pour améliorer l’image de la marque. Plus encore, l’étude commandée par le SNPTV démontre que l’intégration au scénario (citation orale, utilisation par les acteurs, rôle positif dans une scène, etc.) augmenterait l’impact du placement de produit en termes de mémorisation, avec un rapport qui peut être de 1 à 10, comparé à un placement non intégré.
Jusqu’en 2018, la directive 2007/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 modifiant la directive 89/552/CEE du Conseil visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle (directive « Services de médias audiovisuels »), devenue la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010, posait, en son article 3 octies, devenu article 11, le principe de la prohibition du placement de produit sur l’ensemble des services de médias audiovisuels. Cependant, cette pratique était, sauf à ce que l’Etat membre en décide autrement, admissible dans certains cas limitativement énumérés.
Le législateur français a décidé d’user de cette possibilité. L’article 14-1 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction issue de la loi n°2009-258 du 5 mars 2009, charge le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de fixer les conditions dans lesquelles les programmes des services de communication audiovisuelle peuvent comporter du placement de produit.
Ainsi, le CSA a défini ces conditions dans la délibération du 16 février 2010. Cette délibération définit les contours de la pratique du placement de produit. Est donc considéré comme un placement de produit le placement effectué à titre payant, c'est-à-dire la fourniture, formalisée par un contrat, de biens ou de services dont la marque est identifiable au sein du programme.
Le placement de produit est autorisé uniquement dans les œuvres cinématographiques, les fictions audiovisuelles et les clips vidéo, sauf lorsque ces programmes sont destinés aux enfants. Il est interdit dans les autres programmes. Certains produits ne peuvent faire l’objet de placement, parmi lesquels les produits du tabac, les boissons alcooliques, les médicaments, les armes à feu et les préparations pour nourrissons.
Les émissions contenant du placement de produit doivent respecter les exigences suivantes :
- Leur contenu et leur programmation ne doivent en aucun cas être influencés de manière à porter atteinte à la responsabilité et à l’indépendance éditoriale de l’éditeur ;
- Elles ne doivent pas inciter directement à l’achat ou à la location des produits ou services d’un tiers et ne peuvent comporter des références promotionnelles spécifiques à ces produits, services ou marques ;
- Elles ne doivent pas mettre en avant de manière injustifiée ces produits, services ou marques.
Depuis 2018, la directrice SMA modifiée inverse le mécanisme actuel, en passant d’un régime de prohibition du placement de produits avec exceptions, à un régime d’autorisation avec exceptions (journaux télévisés, programmes d’actualité, émissions de consommateurs, programmes religieux et des programmes pour enfants). Ces modifications ouvrent potentiellement le placement de produits à certains programmes (documentaires, vidéo-clips).
Avant sa révision en 2018, la directive SMA disposait que l’interdiction générale du placement de produits ne s’appliquait pas dans certains cas limitativement énumérés, sauf à ce qu’un Etat membre en décide autrement. De fait, la plupart des pays Européens avait recouru à cette faculté.
Ainsi, d’après un rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel[28] pour les années 2011-2013, 17 Etats membres[29] avaient mis en œuvre des dispositions plus strictes que celles prévues par la directive en matière de placement de produit.
Certains pays ont élargi le champ des programmes dans lesquels le placement de produit est interdit, afin d’y inclure expressément les programmes d’actualité (Communauté française de Belgique, Bulgarie et Hongrie), les émissions religieuses (Bulgarie et Hongrie), ou les émissions politiques et les programmes consacrés à des manifestations officielles (Hongrie).
D’autres pays ont apporté des restrictions supplémentaires, pour certains formats (les émissions sportives à Chypre) ou le type de diffuseur (interdiction pour le service public aux Pays-Bas et en Bulgarie).
En complément des normes générales prévues par l’article 9 de la Directive SMA, son article 11(4) interdit le placement de produit en faveur des cigarettes et autres produits du tabac, ainsi qu’en faveur de médicaments et de traitements médicaux. Bien que la publicité pour les boissons alcoolisées soit en principe autorisée, de nombreux Etats membres ont décidé d’ajouter les alcools et spiritueux à la liste des produits interdits. C’est par exemple le cas de l’Autriche et de Malte. Certains pays ont également interdit le placement de produits dont la promotion est jugée préjudiciable aux nourrissons et aux jeunes enfants comme les jouets à Chypre.
Conformément à l’article 2 de la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels, compte tenu de l'évolution des réalités du marché, (directive « Services de médias audiovisuels »), au plus tard le 19 septembre 2020.
La transposition en droit national des nouvelles règles en matière de placement de produit issues de la directive susmentionnée nécessite de modifier l’article 14-1 de la loi du 30 septembre 1986.
L’article 14-1 de la loi du 30 septembre 1986 a confié au CSA un pouvoir réglementaire délégué pour fixer les conditions dans lesquelles les programmes peuvent comporter du placement de produit dans le cadre des exigences minimales posées par la directive et reprises dans la loi. Par amendements à la loi du 5 mars 2009, le législateur avait toutefois souhaité reprendre certaines des règles posées par la directive en matière de placement de produits.
Trois modalités de transposition apparaissent envisageables :
- une simplification rédactionnelle de cet article ne conservant que le premier alinéa renvoyant au pouvoir réglementaire délégué du CSA mais cela aboutirait à un renvoi très peu (voire pas du tout) encadré à l’ARCOM, ce qui peut paraître trop large ;
- une modification a minima de l’article 14-1 tirant les conséquences des modifications apportées par la nouvelle directive ;
- l’affirmation au niveau de la loi de l’autorisation du placement de produit par un renvoi moins large à la compétence de l’ARCOM pour déterminer les genres de programmes pour lesquels cette pratique est autorisée. La dernière option donne au marché un signal de libéralisation.
C’est cette dernière option qui est retenue. Il est proposé de poser plus clairement la possibilité de recourir au placement de produit dans les programmes des services de communication audiovisuelle à l’exception de ceux mentionnés dans la directive, c’est-à-dire dans les programmes d'information et d'actualité, les émissions de consommation, les programmes religieux et les programmes pour enfants.
Ce sera l’ARCOM qui se chargera des modalités de mise en œuvre de ce dispositif en veillant au respect des exigences suivantes :
1° Le contenu de ces placements de produits ainsi que leur programmation par des services de télévision ou leur organisation dans un catalogue des services de médias audiovisuels à la demande ne doivent en aucun cas être influencés de manière à porter atteinte à la responsabilité et à l'indépendance éditoriale de l'éditeur de services de médias ;
2° Ils n'incitent pas directement à l'achat ou à la location des produits ou services d'un tiers et ne peuvent en particulier comporter des références promotionnelles spécifiques à ces produits ou services ;
3° Ils ne mettent pas en avant de manière injustifiée le produit en question ;
4° Les téléspectateurs sont clairement informés de l’existence d’un placement de produit par une identification appropriée au début et à la fin de leur diffusion, ainsi que lorsqu’un programme reprend après une interruption publicitaire afin d'éviter toute confusion.
Cette disposition se traduit par une réécriture de l’article 14-1 de la loi du 30 septembre 1986.
La mesure envisagée est, en outre, conforme au droit de l’Union européenne. Elle s’inscrit dans le prolongement de la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive «Services de médias audiovisuels»).
La mise en œuvre de cette nouvelle disposition nécessite l’adoption par l’ARCOM d’une délibération.
La libéralisation du placement de produit, entendu comme une forme de communication commerciale consistant à inclure ou bien à faire référence à un produit, un service ou une marque dans un programme moyennant paiement ou contrepartie, pourrait être un véritable levier pour améliorer le financement des programmes au-delà de l’apport des diffuseurs et des producteurs. En effet, cette technique uniquement autorisée dans les œuvres cinématographiques, fictions audiovisuelles et vidéoclips (sauf lorsque ces œuvres sont destinées aux enfants), génère potentiellement des recettes publicitaires au bénéfice des producteurs. L’impact de cette mesure est cependant difficile à quantifier en raison de l’absence de données chiffrées et de bilan récent de l’expérience des professionnels sur le placement de produit dans les programmes autorisés.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, lors du bilan d’application de sa délibération du 16 février 2010, modifiée par celle du 24 juillet 2012, avait conclu que la pratique était restée « prudente » et progressive en raison des spécificités de la fiction, telles que les contraintes de scénario et l’implication des auteurs dans la réalisation, qui ont joué le rôle de « freins naturels » dans le développement du placement de produit. Le Conseil avait souligné que cette pratique publicitaire n’était pas marquée par un caractère intrusif, notamment en raison de l’application du Pictogramme « P »[30], et son utilisation « modérée et respectueuse du téléspectateur ».
Quelques exemples de placement de produit observés dans certaines fictions françaises
(source : SPECT) :