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N° 4957

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 janvier 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à reconnaître l’affiliation aux organismes de retraite des vétérinaires sanitaires prescrits titulaires d’un mandat sanitaire,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Stéphane TRAVERT, Pierre MORELÀL’HUISSIER, Olivier FALORNI, Robert THERRY, Sonia KRIMI, JeanMarie SERMIER, JeanClaude BOUCHET, Laurence TRASTOURISNART, Christophe NAEGELEN, Patrick HETZEL, Vincent DESCOEUR, Frédérique DUMAS, Marc LE FUR, Guy BRICOUT, Sophie MÉTADIER, Didier QUENTIN, André CHASSAIGNE, Thierry BENOIT, JeanLuc REITZER, Virginie DUBYMULLER, Xavier BRETON, Philippe GOSSELIN, Emmanuelle ANTHOINE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans les années 1955‑1970 l’État a été confronté à d’importantes épizooties ravageant le cheptel bovin français considéré comme richesse nationale.

Ces grandes épizooties constituaient alors un problème majeur de santé publique par contamination de la population française consommant les produits d’origine animale, mais également un problème économique important pour le monde rural en empêchant les exportations. Aussi l’État a décidé de mettre en œuvre un vaste plan de prophylaxies pour éradiquer ces graves zoonoses, telle la tuberculose, la fièvre aphteuse, la brucellose…

Ne disposant pas lui‑même des moyens humains et matériels pour procéder au traitement des cheptels l’État a fait appel aux vétérinaires praticiens libéraux en leur confiant une importante mission via le mandat sanitaire délivré par l’autorité préfectorale.

Les vétérinaires praticiens ont pleinement adhéré à ce vaste plan de prophylaxies, malgré les très importantes difficultés auxquelles ils ont été confrontés, du fait des réserves, voire de l’opposition d’un grand nombre d’exploitants éleveurs. En effet, au‑delà du coût des opérations de prophylaxie, négocié avec les organisations agricoles, il était fréquent que soit nécessaire l’élimination de la totalité du cheptel avec son contexte dramatique.

Les vétérinaires libéraux ont ainsi consacré énormément de temps et d’efforts pour réaliser cette mission, prenant souvent des risques importants afin d’y parvenir et ceci s’ajoutant aux exigences de la médecine vétérinaire rurale au quotidien.

En contrepartie de l’exercice de ses mandats sanitaires l’État a versé aux vétérinaires des rémunérations sous forme d’honoraires jusqu’au 1er janvier 1990 en vertu des arrêtés du 29 mai 1963 et 13 janvier 1967 et en application du décret interministériel 63301 du 16 mars 1963.

De ce fait les vétérinaires sanitaires n’ont jamais été affiliés aux organismes sociaux, puisque leurs rémunérations reçues du ministère de l’agriculture étaient des honoraires excluant toute initiative de l’État en matière de protection sociale.

Toutefois, la consultation des archives a révélé que, aux termes des avis du Conseil d’État du 17 juillet 1962 et du 3 février 1981, les vétérinaires concernés étaient en réalité subordonnés à l’État, pour l’exercice de ces missions dans le cadre d’un lien hiérarchique caractérisant une activité salariée.

Par deux arrêts en date du 14 novembre 2011 (Requêtes n° s 334197 et 341325) le Conseil d’État a jugé que l’État avait commis une faute à l’égard des vétérinaires sanitaires en s’abstenant de les affilier aux organismes de retraite, alors même qu’ils auraient dû avoir le statut de salarié.

Les vétérinaires concernés, ainsi privés d’une part de leur pension de retraite ont sollicité une indemnisation de la part de l’État. Celui‑ci a opposé aux plus âgés l’expiration du délai de prescription quadriennale prévue par l’article 1er de la loi n° 68‑1250 du 31 décembre 1968, ayant couru selon lui, par effet rétroactif, à compter de la liquidation de la retraite libérale. Le Conseil d’État a validé cette analyse par un arrêt du 27 juillet 2016 (requête n° 388198).

Concrètement, pour échapper à la prescription quadriennale rétroactive, les vétérinaires sanitaires, aujourd’hui prescrits, auraient dû déposer, dès leur cessation d’activité, une demande de retraite de salarié calculée à partir d’honoraires, systématiquement rejetée par la CARSAT, puisque, conformément à la loi, la rémunération sous forme d’honoraires ne permet pas l’accès à la retraite du régime général. Or, ils ignoraient totalement cette démarche administrative non publique et non transmise aux intéressés.

Dans ces conditions, jusqu’au 14 novembre 2011, date où le Conseil d’État s’est prononcé sur le travail salarié, le vétérinaire sanitaire ne pouvait en aucun cas acquérir une créance envers l’État puisque en recevant des honoraires, le droit à la retraite lui était refusé.

Cette procédure de prescription rétroactive, initiée par le ministère de l’agriculture, n’affecte pas les vétérinaires les plus jeunes ou ceux qui sont encore en exercice, dès lors qu’ils sont en mesure de formuler leur demande dans le délai ainsi imparti.

En revanche, les vétérinaires les plus âgés et qui ont rencontré les plus grosses difficultés en raison des conditions de l’époque se voient privés d’une partie de leur retraite, tandis que, précisément, ces vétérinaires font partie de ceux dont la pension de retraite est fréquemment la plus faible. De plus, pendant cette période, les cabinets vétérinaires avaient pour la plupart un fonctionnement de type familial et le statut de conjoint collaborateur n’existait pas encore. C’est pourquoi beaucoup d’entre eux sont pénalisés par la privation de ce complément de retraite.

Cette situation doit conduire l’État à assumer pleinement ses responsabilités à l’égard des intéressés en s’abstenant d’opposer la prescription quadriennale aux titulaires d’un mandat sanitaire qui à l’évidence, en recevant des honoraires ignoraient totalement que l’État avait l’obligation de les affilier aux organismes sociaux et n’ont pu ainsi agir dans le délai de quatre ans suivant la liquidation du titre de pension libérale.

C’est pourquoi, la présente proposition de loi vise à faire courir le délai de prescription pour les actions en responsabilité exercées contre l’État du fait de la non affiliation aux organismes sociaux des vétérinaires titulaires d’un mandat sanitaire, à compter du 14 novembre 2011 afin de prendre en compte tous les dossiers déposés avant le 31 décembre 2015 par les vétérinaires sanitaires et leurs veuves.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Le délai de la prescription instauré par l’article 1er de la loi n° 68‑1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État, les départements, les communes et les établissements publics court, pour les actions en responsabilité exercées contre l’État du fait de la non‑affiliation aux organismes de retraite des vétérinaires titulaires d’un mandat sanitaire, à compter du 14 novembre 2011.

Les demandes indemnitaires formées sur ce fondement par les vétérinaires titulaires d’un mandat sanitaire et rejetées par une décision administrative ou juridictionnelle du fait de la prescription quadriennale font l’objet d’un nouvel examen.

Article 2

I. ‒ La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 3

Les modalités de versement et d’indemnisation font l’objet également d’un protocole d’accord entre l’État et les représentants des vétérinaires sanitaires concernés.