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N° 5204

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 avril 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à encadrer le développement des éoliennes sur le territoire national,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Nicolas DUPONTAIGNAN,

député.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En quelques années, les éoliennes sont devenues dans l’esprit de nos concitoyens le symbole de la transition énergétique. À l’unisson, médias, promoteurs et militants écologistes ont chanté leurs louanges et prétendu qu’elles étaient la garantie d’une électricité non polluante, moins chère et créatrice d’emplois en France. Leur nombre a fortement augmenté sur notre territoire ces vingt dernières années. Un mouvement que le Gouvernement compte accélérer, Madame Pompili ayant annoncé un passage de 9 000 éoliennes en 2019 à 15 000 en 2028. Cependant, l’opinion publique a progressivement pris conscience de plusieurs réalités problématiques.

Une fausse alternative au nucléaire.

Les éoliennes ne produisent que par intermittence, lorsque le vent souffle, alors que les centrales sont des moyens de production d’énergie pilotables, qui peuvent produire plus ou moins selon les besoins. Par conséquent il est faux de prétendre que la fermeture des centrales nucléaires pourrait être compensée par l’éolien. Pour répondre instantanément à la demande d’électricité, il faut d’autres moyens de production pilotables : les énergies fossiles, très polluantes, comme le charbon, ou le gaz. À l’inverse, si la France investit peu à peu dans le solaire (2 % de l’électricité produite en 2020) et l’éolien (6 %), sa production d’électricité dépend encore majoritairement du nucléaire (67 %) et de manière marginale de l’hydraulique (11 %) et du gaz (7 %). Néanmoins, après la fermeture de la centrale de Fessenheim, la France a réactivé des centrales à charbon. De son côté, l’Allemagne a massivement investi dans l’éolien et le solaire, mais sans diminuer significativement la production de ses moyens pilotables : en 2002 comme en 2019, elle produisait 100GWh de puissance pilotable. La fermeture des centrales nucléaires et des centrales à charbon a en réalité été compensée par des centrales à gaz. Ainsi, en 2020, la part du renouvelable dans la production de l’électricité allemande était de 45 % (solaire, éolien, hydraulique), le nucléaire représentait 11 % et les centrales à gaz et à charbon près de 40 %. L’éolien n’a donc pas remplacé le nucléaire en Allemagne, il ne le peut pas. Aucun pays ne peut se passer d’une certaine quantité d’électricité pilotable pour répondre dans l’instant aux pics de consommation. On prétend parfois résoudre le problème de l’intermittence de l’éolien en stockant l’électricité produite dans des batteries. C’est ce que prévoit RTE à Fontenelle en Côte d’Or, avec un projet de plus 5 600 batteries lithium‑ion. Cet investissement de 80 millions d’euros ne permettra de stocker qu’une quantité dérisoire d’énergie, équivalente à 2h de consommation pour 10 000 foyers.

Une énergie sale.

On entend souvent que les éoliennes constituent un moyen de lutte efficace contre le réchauffement climatique. Mais en réalité, ce mode de production ne permet nullement de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Analysant l’ensemble du cycle de vie des différentes sources d’énergie, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) a reconnu que le nucléaire français, qui génère 70 % de notre électricité, produit 6 grammes de CO2 par kWh, soit deux fois moins que l’éolien qui en produit 14 grammes. Par ailleurs, en 2019, une commission d’enquête parlementaire a affirmé que les éoliennes étaient inefficaces pour lutter contre le réchauffement climatique.

Les éoliennes sont aussi polluantes, étant composées de matériaux qui, pour la plupart, ne sont pas recyclables. Le socle, pour commencer, pollue fortement les sols. Ce dernier est constitué d’une masse de béton comprise entre 800 et 1 500 tonnes à laquelle s’ajoutent environ 50 tonnes de ferraillage. Or, le socle d’une éolienne en fin de vie n’est pas réutilisable. Pour la remplacer, il faudra réaliser un socle supplémentaire. S’agissant des pâles, elles sont composées de fibre de verre, de carbone et de résine polyester, un alliage qui ne se recycle pas. La nacelle, enfin, se compose d’un alternateur à aimant permanent, généralement fabriqué avec un alliage de néodyme et de dysprosium, des métaux appartenant à la catégorie communément nommée « terres rares ». Souvent produites et raffinées en Chine, ces matières premières ne sont pas renouvelables. Or, il en faut 200 kilogrammes pour construire une éolienne et environ une tonne pour une éolienne en mer.

Une énergie coûteuse.

Lorsqu’il installe un parc éolien en France, le promoteur est assuré de sa forte rentabilité, quel que soit le rendement de production électrique. L’État lui confère en effet une double garantie. Le courant qu’il produit accède en priorité au réseau et le prix, qui est deux fois supérieur à celui du marché, est fixe sur 15 ans. En d’autres termes, les industriels de l’éolien sont assurés de vendre leur production au double du prix du marché. Les sites les plus récents dégagent ainsi 31 % de résultat net après impôt sur leur chiffre d’affaires. Dans ces conditions, on comprend aisément l’emballement des fonds étrangers venus investir massivement pour dégager du bénéfice au prétexte de développer un mode de production d’énergie verte. L’exemple du projet de parc éolien de la baie de Saint‑Brieuc est évocateur. L’énergéticien espagnol Iberdrola, via sa filiale française Ailes Marines, a négocié avec l’État la somme de 155 € le MWh, soit un prix trois fois supérieur à celui du marché.

En outre, la construction de ces parcs éoliens a entraîné une forte augmentation du TURPE (Tarif d’Utilisation des Réseaux d’Electricité). Ce tarif, qui est la refacturation des investissements des opérateurs d’acheminement, représente aujourd’hui le tiers de la facture d’électricité et continue à augmenter. Les opérateurs d’acheminement ont en effet été contraints de renforcer fortement leurs réseaux pour accueillir le surplus d’électricité intermittente venu des parcs éoliens. Une électricité qui demande des raccordements d’autant plus nombreux, complexes et coûteux qu’elle provient d’une multiplicité d’installations diffuses à raccorder au réseau. L’exemple de l’Allemagne est à cet égard éloquent. Depuis 2010, elle a investi 30 milliards par an dans l’éolien et le solaire. Cette stratégie était censée faire baisser la facture d’électricité. Or, elle est aujourd’hui en moyenne 45 % plus élevée que dans les autres pays européens et deux fois supérieure à celle de la France.

Enfin, de nombreux pays développés développent des parcs éoliens : la demande des minerais nécessaires à leur construction (terres rares, cuivre pour les réseaux, cobalt, lithium) augmente fortement, ce qui pourrait entraîner des pénuries à moyen terme. La Chine, qui produit certains de ces métaux, commence à taxer les exportations afin de les diminuer.

Une destruction d’emplois profitant aux entreprises étrangères.

56 % des entreprises qui construisent et exploitent des éoliennes en France sont des entreprises étrangères. Les deux tiers de ces entreprises étrangères sont allemandes. Rappelons qu’Alstom et Areva, qui devaient être les champions de l’éolien en France, ont revendu leurs branches offshore à des structures américaines et allemandes. Les entreprises françaises restantes ne représentent que 40 % du marché et achètent à l’étranger presque tous les équipements nécessaires. Ainsi, sur 70 milliards de chiffre d’affaires produit en 20 ans, on estime qu’environ 40 milliards repartent à l’étranger.

Nuisances sonores, dégradation du patrimoine et dépréciation immobilière.

Plus que tout, les éoliennes ont généré de vives protestations dans les territoires. Leur présence touche à l’évidence une dimension non quantifiable, non mesurable du pays : la beauté des paysages et du patrimoine. La présence de ces machines de ferraille monumentales pèse assurément sur les lieux alentour. Les plaintes fondées sur la qualité de vie des riverains se sont aussi multipliées. Ces machines génèrent d’importantes gênes en tournoyant bruyamment, en grinçant, en clignotant. En 2017, l’Académie de médecine rappelait que même si les éoliennes ne causaient pas directement de pathologies organiques, elles généraient effectivement des nuisances sonores et visuelles affectant la qualité de vie des riverains et donc leur santé. Un impact négatif révélé par la dépréciation immobilière des villages situés à proximité.

Des pressions exercées sur les responsables locaux.

Les industriels de l’éolien disposent de moyens financiers persuasifs pour convaincre les communes de l’opportunité d’installer un parc. Ils ciblent souvent les communes en difficulté financière avant de rechercher une zone venteuse potentiellement productive. Un accord donne ainsi lieu au versement aux communautés de communes et aux départements d’une redevance annuelle de 7 200 euros par mégawatt installé. En outre, le Service Central de Prévention de la Corruption (SCPC) avait alerté dans son rapport d’activité de 2013 sur les « prises illégales d’intérêts » de certains élus locaux. Le rapport leur reproche d’avoir profité de leurs fonctions pour favoriser, en échange de sommes importantes, l’installation d’un parc éolien sur le territoire de leur commune. Enfin, s’agissant du démantèlement, la loi oblige théoriquement le promoteur à en supporter les coûts. Mais une simple provision de 50 000 € est prévue par les textes alors que le coût réel de l’opération avoisine plutôt 400 000 €. Lorsqu’un parc est en fin de vie, il arrive que les actionnaires échappent au paiement, in fine financé par les propriétaires du terrain ou par le contribuable. Tous ces éléments ont progressivement conduit à des mouvements de contestation locale : en moyenne, 70 % des projets sont combattus. Pourtant, les collectivités concernées disposent de moins en moins de pouvoir d’opposition. Depuis la loi Brottes en 2013, le cadre règlementaire a été peu à peu démoli à leur détriment. Les temps de recours ont été diminués, les enquêtes publiques allégées, les démarches des promoteurs facilitées.

Compte tenu de ces éléments, cette proposition de loi vise à encadrer le développement des éoliennes sur le territoire national.

L’article 1er vise à mettre fin aux aides publiques de la filière éolienne.

L’article 2 vise :

– à s’assurer du plein accord des communes concernées directement par l’implantation d’un parc éolienne, en imposant d’avoir un avis conforme des conseils municipaux de la commune d’implantation et des communes se trouvant à moins de 5 km des éoliennes ;

– à exiger une distance minimale de 2 000 mètres entre les éoliennes et les habitations, les immeubles habités et les zones destinées à l’habitation ;

– à rendre obligatoire l’avis conforme de l’architecte des bâtiments de France sur les installations d’éoliennes visibles depuis un immeuble classé, un monument historique ou un site patrimonial protégé et visible dans un périmètre de 5 kilomètres.

L’article 3 vise à ce que l’exploitant ou la société propriétaire constitue les garanties financières au minimum à hauteur de 5 % du coût d’investissement pour une éolienne et de 400 000 € pour toute éolienne d’au moins 2 MW, au lieu des 50 000 € prévus aujourd’hui.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 121‑6 du code de l’énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent, aucun nouveau contrat prévu au titre des articles L. 311‑12 à L. 311‑13‑2, du 3° de l’article L. 314‑1 et de l’article L. 314‑18 ne peut être conclu à compter de la promulgation de la présente loi. »

Article 2

L’article L. 515‑44 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la troisième phrase du dernier alinéa, le nombre : « 500 » est remplacé par le nombre : « 2 000 ».

2° Il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent, l’autorisation d’exploiter ne peut être délivrée que sur avis conforme des conseils municipaux de la commune du site d’implantation et des communes situées à moins de trois kilomètres des sites d’implantation.

« Les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent ne peuvent être implantées que sur avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France, rendu dans les conditions prévues à l’article L. 621‑32 du code du patrimoine, lorsqu’elles sont visibles depuis un immeuble classé défini à l’article L. 631‑1 du même code ou un immeuble inscrit défini à l’article L. 341‑1 du code de l’environnement ou visibles en même temps qu’un de ces immeubles et situées dans un périmètre déterminé par une distance de 8 000 mètres autour de ces immeubles. »

Article 3

Le premier alinéa de l’article L. 515‑46 du code de l’environnement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de ces garanties ne peut être inférieur à 5 % du coût de construction de l’installation ni à 400 000 euros pour une installation de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent d’une puissance d’au moins deux mégawatts. »