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N° 360

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 octobre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à protéger les logements contre l’occupation illicite,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par

M. Guillaume KASBARIAN, Mme Aurore BERGÉ, M. Laurent MARCANGELI, des membres du groupe Renaissance et apparentés (1) et
des membres du groupe Horizons et apparentés (2),

députés.

 

 

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(1) Mesdames et Messieurs : Damien Abad, Caroline Abadie, Damien Adam, Sabrina Agresti‑Roubache, Éric Alauzet, David Amiel, Pieyre‑Alexandre Anglade, Jean‑Philippe Ardouin, Antoine Armand, Quentin Bataillon, Xavier Batut, Belkhir Belhaddad, Mounir Belhamiti, Fanta Berete, Aurore Bergé, Benoît Bordat, Éric Bothorel, Florent Boudié, Chantal Bouloux, Bertrand Bouyx, Pascale Boyer, Yaël Braun‑Pivet, Maud Bregeon, Anthony Brosse, Anne Brugnera, Danielle Brulebois, Stéphane Buchou, Françoise Buffet, Céline Calvez, Éléonore Caroit, Lionel Causse, Thomas Cazenave, Jean‑René Cazeneuve, Pierre Cazeneuve, Émilie Chandler, Yannick Chenevard, Mireille Clapot, Fabienne Colboc, François Cormier‑Bouligeon, Laurence Cristol, Dominique Da Silva, Christine Decodts, Julie Delpech, Frédéric Descrozaille, Benjamin Dirx, Nicole Dubré‑Chirat, Philippe Dunoyer, Sophie Errante, Philippe Fait, Marc Ferracci, Jean‑Marie Fiévet, Jean‑Luc Fugit, Thomas Gassilloud, Anne Genetet, Raphaël Gérard, Hadrien Ghomi, Éric Girardin, Joël Giraud, Olga Givernet, Charlotte Goetschy‑Bolognese, Guillaume Gouffier‑Cha, Jean‑Carles Grelier, Marie Guévenoux, Claire Guichard, Philippe Guillemard, Benjamin Haddad, Nadia Hai, Yannick Haury, Pierre Henriet, Laurence Heydel Grillere, Alexandre Holroyd, Sacha Houlié, Servane Hugues, Monique Iborra, Alexis Izard, Jean‑Michel Jacques, Caroline Janvier, Guillaume Kasbarian, Fadila Khattabi, Brigitte Klinkert, Daniel Labaronne, Emmanuel Lacresse, Amélia Lakrafi, Michel Lauzzana, Pascal Lavergne, Sandrine Le Feur, Didier Le Gac, Gilles Le Gendre, Constance Le Grip, Anaïg Le Meur, Christine Le Nabour, Nicole Le Peih, Fabrice Le Vigoureux, Marie Lebec, Vincent Ledoux, Mathieu Lefèvre, Patricia Lemoine, Brigitte Liso, Jean‑François Lovisolo, Sylvain Maillard, Laurence Maillart‑Méhaignerie, Jacqueline Maquet, Bastien Marchive, Louis Margueritte, Christophe Marion, Sandra Marsaud, Didier Martin, Denis Masséglia, Stéphane Mazars, Graziella Melchior, Ludovic Mendes, Lysiane Métayer, Nicolas Metzdorf, Marjolaine Meynier‑Millefert, Paul Midy, Benoit Mournet, Karl Olive, Nicolas Pacquot, Sophie Panonacle, Astrid Panosyan‑Bouvet, Didier Paris, Charlotte Parmentier‑Lecocq, Emmanuel Pellerin, Patrice Perrot, Anne‑Laurence Petel, Michèle Peyron, Béatrice Piron, Claire Pitollat, Barbara Pompili, Jean‑Pierre Pont, Éric Poulliat, Natalia Pouzyreff, Rémy Rebeyrotte, Robin Reda, Cécile Rilhac, Véronique Riotton, Stéphanie Rist, Marie‑Pierre Rixain, Charles Rodwell, Xavier Roseren, Jean‑François Rousset, Lionel Royer‑Perreaut, Thomas Rudigoz, Laetitia Saint‑Paul, Mikaele Seo, Freddy Sertin, Charles Sitzenstuhl, Philippe Sorez, Bertrand Sorre, Violette Spillebout, Bruno Studer, Liliana Tanguy, Sarah Tanzilli, Jean Terlier, Prisca Thevenot, Huguette Tiegna, Stéphane Travert, David Valence, Annie Vidal, Patrick Vignal, Corinne Vignon, Stéphane Vojetta, Lionel Vuibert, Guillaume Vuilletet, Christopher Weissberg, Éric Woerth, Caroline Yadan, Jean‑Marc Zulesi.

(2) Mesdames et Messieurs : Xavier Albertini, Henri Alfandari, Béatrice Bellamy, Thierry Benoit, Agnès Carel, Paul Christophe, Yannick Favennec-Bécot, Félicie Gérard, François Gernigon, François Jolivet, Loïc Kervran, Stéphanie Kochert, Luc Lamirault, Jean-Charles Larsonneur, Anne Le Hénanff, Didier Lemaire, Lise Magnier, Laurent Marcangeli, Thomas Mesnier, Naïma Moutchou, Jérémie Patrier-Leitus, Christophe Plassard, Jean-François Portarrieu, Marie-Agnès Poussier-Winsback, Philippe Pradal, Isabelle Rauch, Vincent Thiébaut, Frédéric Valletoux, Anne-Cécile Violland.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La médiatisation constante des squats et litiges de loyers témoigne de la forte émotion que suscitent chez nos concitoyens ces exemples d’incivilité et d’injustice vécues au quotidien.

64 % des propriétaires bailleurs ne détiennent qu’un seul logement en location ([1]). Les petits propriétaires sont une réalité, et un tiers d’entre eux sont des retraités. Les revenus qu’ils tirent de leur bien en location sont absolument indispensables pour leur garantir une retraite sereine. Ils n’ont pas, comme les gros bailleurs, les moyens de faire protéger leurs logements des squatteurs par des entreprises de surveillance, ou de faire gérer leurs biens par des tiers.

C’est la raison pour laquelle les squats, à la fois violation de la sphère intime et privation de l’usage de la propriété, sont ressentis si fortement, par tous, comme une injustice criante contre laquelle, après les évolutions de la loi ASAP en 2020, qui ont déjà accéléré les procédures, ce texte vient encore conforter les possibilités à la main des propriétaires.

Mais l’injustice peut aussi être celle du propriétaire qui voit son bien occupé par un locataire qui ne paie plus son loyer, refuse de se plier aux obligations prévues dans le contrat de bail qu’il a signé, et refuse de partir, avant de devoir lutter pendant des mois et des années pour récupérer son bien, en essuyant souvent au passage des pertes financières considérables.

Face à cette situation, la présente proposition de loi clarifie la définition juridique du squat et sanctionne mieux cette infraction. Elle accélère les procédures dans le litige de loyer, rend opératoire la possibilité de résilier le bail pour manquement aux obligations contractuelles du locataire, et pénalise le fait de rester dans le logement en dépit d’une décision de justice défavorable.

Le chapitre 1er contient deux articles qui visent à renforcer la protection de la vie privée contre les violations du domicile du fait de squatteurs.

L’article 1er renforce les sanctions pesant sur les auteurs du délit de violation de domicile, afin de les aligner sur la peine qu’encourent les propriétaires qui procèdent à une expulsion sans le concours de la force publique.

Actuellement, les personnes qui occupent illégalement le domicile d’autrui, c’est‑à‑dire qui squattent un domicile, encourent une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Paradoxalement, cette peine est nettement inférieure à celle qui est encourue par les personnes qui expulsent personnellement les squatteurs de leur domicile sans avoir recours à la force publique, qui s’élève à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Le présent article propose d’équilibrer le régime des sanctions en pénalisant les premiers à la même hauteur que les seconds.

L’article 2 clarifie les notions utilisées dans la caractérisation légale de l’infraction de squat.

La notion de domicile est d’abord mieux précisée pour que le domicile temporairement vide de meubles (par exemple, celui dans lequel un nouveau locataire est sur le point d’emménager), ne puisse pas être écarté au motif que son caractère vide de meubles le rendrait impropre ou non prêt à être habité (I).

Ensuite, l’introduction par voie de fait et le maintien dans les lieux par voie de fait sont clairement dissociés, sous peine de ne pas voir inquiété le squatteur qui se maintiendrait dans les lieux par la contrainte mais qui serait entré dans les lieux en trouvant par exemple la porte ouverte (II).

Le chapitre 2 contient trois articles qui visent à mieux accompagner les bailleurs dans les procédures d’impayés de loyers.

L’article 3 crée un délit d’occupation sans droit ni titre, en violation d’une décision de justice, du logement d’autrui. Par contraste avec le délit du squat, fondé dans la protection de la vie privée, le délit ici créé est fondé dans la protection de la propriété. Cette mention vise à permettre au propriétaire d’un logement d’attaquer en justice un occupant sans droit ni titre, lorsque celui‑ci se maintient en dépit d’une décision de justice, laquelle n’intervient qu’après une longue procédure judiciaire.

L’article 4 sécurise la portée de la clause de résiliation dans le contrat de bail en la rendant obligatoire (1°) et en revenant sur la capacité du juge à en suspendre l’exécution. Les clauses de résiliation du bail sont en effet un outil sécurisant pour les bailleurs, qui gagneraient à être présents dans tous les baux d’habitation.

Actuellement, cette clause contractuelle, censée provoquer la résiliation automatique du bail lorsqu’un commandement de payer est demeuré infructueux, manque de caractère opératoire. En effet, depuis 1998, la loi permet au juge de suspendre d’office ses effets tant que les délais de paiement de la dette locative qu’il a accordés au locataire sont en cours, ce qui peut durer jusqu’à trois années. Le présent article, sans revenir sur la faculté du juge d’accorder ces délais de paiement, supprime la suspension concomitante de l’effet de la clause de résiliation du bail (2°).

L’article 5 propose deux réductions des délais dans la procédure contentieuse du traitement des impayés de loyer afin de fluidifier la prise en charge de ces cas.

Il réduit de deux mois à un mois le délai minimal entre l’assignation au titre de l’audience et le jour de l’audience (I).

Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que leur relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Leur durée est comprise entre trois mois et trois ans. Il est proposé de réduire cette durée pour qu’elle soit comprise entre deux mois et un an, revenant par‑là sur une évolution de 2014 (II).

 

 


proposition de loi

Chapitre Ier

Mieux réprimer le squat du logement

Article 1er

Au premier alinéa de l’article 226‑4 du code pénal, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de trois ans » et le montant : « 15 000 » est remplacé par le montant : « 45 000 ».

Article 2

I. – Le premier alinéa de l’article 226‑4 du code pénal est ainsi modifié :

1° Après le mot : « introduction », sont insérés les mots : « ou le maintien » ;

2° Après le mot : « autrui », sont insérés les mots : « , qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale et qu’il soit meublé ou non, ».

II. – Au premier alinéa de l’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, la première occurrence du mot : « et » est remplacée par le mot : « ou » et, après le mot : « principale », sont insérés les mots : « , qu’il soit meublé ou non, ».

Chapitre II

Sécuriser les rapports locatifs

Article 3

Le titre Ier du livre III du code pénal est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« De l’occupation frauduleuse du logement d’un tiers

« Art. 3151. – L’occupation sans droit ni titre d’un logement appartenant à un tiers, lorsqu’elle se fait en violation d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement régulier de quitter les lieux, est punie de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende. »

Article 4

L’article 24 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa du I, le mot : « Toute » est remplacé par les mots : « Tout contrat de bail d’habitation contient une » et, après le mot : « garantie », sont insérés les mots : « . Cette clause » ;

2° Le VII est abrogé.

Article 5

I. – À la première phrase du III de l’article 24 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « un ».

II. – À la première phrase de l’article L. 412‑4 du code des procédures civiles d’exécution, la première occurrence du mot : « trois » est remplacée par le mot : « un » et, à la fin, les mots : « trois ans » sont remplacés par les mots : « un an ».


([1]) Agence nationale pour l’information sur le logement, « Le parc locatif et ses bailleurs en 2013 », juillet 2016.