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N° 546

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 novembre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à réintégrer et à indemniser les personnels suspendus
soumis à l’obligation vaccinale contre la covid19,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Frédéric FALCON, Bénédicte AUZANOT, Philippe BALLARD, Christophe BARTHÈS, Romain BAUBRY, José BEAURAIN, Christophe BENTZ, Pierrick BERTELOOT, Emmanuel BLAIRY, Sophie BLANC, Frédéric BOCCALETTI, Pascale BORDES, Jorys BOVET, Jérôme BUISSON, Frédéric CABROLIER, Victor CATTEAU, Sébastien CHENU, Roger CHUDEAU, Caroline COLOMBIER, Annick COUSIN, Nathalie Da CONCEICAO CARVALHO, Hervé de LÉPINAU, Edwige DIAZ, Sandrine DOGORSUCH, Nicolas DRAGON, Thibaut FRANÇOIS, Thierry FRAPPÉ, Stéphanie GALZY, Frank GILETTI, Yoann GILLET, Christian GIRARD, José GONZALEZ, Florence GOULET, Géraldine GRANGIER, Daniel GRENON, Michel GUINIOT, Marine HAMELET, Joris HÉBRARD, Laurent JACOBELLI, Alexis JOLLY, Hélène LAPORTE, Laure LAVALETTE, Julie LECHANTEUX, Gisèle LELOUIS, Katiana LEVAVASSEUR, Christine LOIR, MarieFrance LORHO, Philippe LOTTIAUX, Alexandre LOUBET, Matthieu MARCHIO, Michèle MARTINEZ, Alexandra MASSON, Kévin MAUVIEUX, Nicolas MEIZONNET, Joëlle MÉLIN, Yaël Menache, Thomas MÉNAGÉ, Pierre MEURIN, Serge MULLER, Julien ODOUL, Kévin PFEFFER, Lisette POLLET, Stéphane RAMBAUD, Angélique RANC, Julien RANCOULE, Laurence ROBERTDEHAULT, Béatrice ROULLAUD, Anaïs SABATINI, Alexandre SABATOU, Emeric SALMON, Emmanuel TACHÉ de la PAGERIE, Jean-Philippe TANGUY, Michaël TAVERNE, Lionel TIVOLI, Antoine VILLEDIEU, Nicolas DUPONTAIGNAN, Véronique BESSE,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

À la suite de la promulgation de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, de nombreux professionnels se sont vu imposer une vaccination contre la covid‑19 conditionnant la poursuite de leur activité. Cette obligation vaccinale concerne les personnes exerçant dans les domaines de la santé, des transports, de l’aide à domicile, les personnes travaillant au sein des centres médicaux‑sociaux, les personnes ayant la qualité de sapeur‑pompier volontaire ou professionnel, ainsi que les militaires. Cette liste est détaillée au chapitre II de la loi n° 2021‑1040.

La suspension des personnels non vaccinés a de lourdes conséquences auxquelles la présente proposition de loi permet de remédier à travers quatre ambitions :

  1. Renforcer notre système de santé

Notre système hospitalier est fragilisé par des années de restrictions budgétaires et des conditions de travail sévèrement dégradées. La crise sanitaire a amplifié le phénomène. Les agents en sont sortis épuisés. La mise en place de protocoles sanitaires stricts, le manque de revalorisations salariales, la désorganisation généralisée ou encore l’absence de reconnaissance freinent les vocations, et poussent au départ un certain nombre d’entre eux (démissions, départs en retraite).

La mise en place de cette obligation vaccinale a fortement divisé au sein du personnel hospitalier. Après avoir été encensés et applaudis pendant le premier confinement pour leur combat en première ligne, les soignants ont été désignés coupables par le gouvernement de ne pas se soumettre à la vaccination. Ce revirement a été mal vécu et incompris par nombre d’entre eux. Ces derniers témoignent pourtant d’un dévouement et d’une abnégation sans faille pour leur prochain.

Peu à peu, la pression a touché les services, suscitant défiance, démissions, mises à pied et suspensions. Chacun sait pourtant que la perte d’un poste suffit à désorganiser un service hospitalier, déjà sous tension par manque d’effectifs :

– Les syndicats évaluent à 180 000 le nombre d’infirmiers en âge d’exercer qui auraient renoncé à leur profession (dont 30 % dans les 5 premières années d’activité) ([1]) ;

– En 2020, 5.758 lits d’hospitalisation complète ont été fermés dans les hôpitaux français ([2]) ;

– Un lit sur cinq est fermé dans les grands établissements de santé, faute de personnel en nombre selon une enquête du Conseil scientifique[3].

– Près de 120 établissements (soit 20 % des 620 établissements publics et privés munis d’un service d’urgence) ont dû adapter leur service selon différentes méthodes (délestage, régulation voire même fermeture partielle ou mise en place du « plan blanc ») ([4]) ;

– 42 établissements sont fermés la nuit et 23 sont fermés la journée selon une enquête ne ciblant que la moitié des services d’urgence ([5]) ;

– Différentes sources s’accordent à dire que plus de 2 000 postes d’infirmiers sont vacants à l’AP‑HP, et que 20 à 30 % des blocs opératoires sont fermés faute de personnel.

Cette situation a des répercussions directes sur les patients et la qualité des soins. Les situations de détresse se multiplient, à l’image de cet homme décédé le 1er septembre 2022 au Nouvel Hôpital Civil de Strasbourg. Alors que le syndicat FO déposait un droit d’alerte 36 heures plus tôt pour dénoncer la saturation des urgences, ce patient est resté 22 heures sur un brancard. Ces situations indignes ne peuvent plus durer.

Le Ségur de la Santé n’a pas apporté de réponses réelles et pérennes à ce délitement. En février 2021, le rapporteur du Sénat sur la loi n° 2021 du 26 avril 2021 affichait son « insatisfaction totale » face à « un texte brouillon, qui aborde beaucoup de sujets très importants actuellement pour la santé, et qui en fait ne les traite pas » : « Le système de santé a besoin d’oxygène et le texte n’apporte que de l’azote »[6].

 

  1. Améliorer la sécurité des Français

 Les sapeurs‑pompiers, professionnels et volontaires, subissent une situation similaire. Pour les services départementaux d’incendie et de secours, 200 sapeurs‑pompiers professionnels et 5 000 volontaires ont été suspendus sur un effectif global de 251 900 sapeurs‑pompiers (41 800 professionnels, 197 100 volontaires et 13 000 militaires). Ces chiffres sont non négligeables.

Pourtant, il s’agit d’un secteur d’activité en tension où les conditions d’exercice sont difficiles et où les niveaux de rémunération sont insuffisants au regard du risque pris chaque jour par les sapeurs‑pompiers. Les incendies de l’été 2022 ont démontré le dévouement et le rôle central de ces derniers dans les territoires ruraux de la République, exposés à des aléas climatiques toujours plus intenses.

Malgré des recherches approfondies, il est délicat d’obtenir des chiffres précis des personnels suspendus dans d’autres secteurs d’activité. Nous estimons leur nombre à plusieurs centaines voire à plusieurs milliers de personnes.

  1.                    Une obligation vaccinale qui ne se justifie plus

À l’été 2021, les parlementaires adoptaient l’obligation vaccinale contre la covid‑19. Le vaccin était alors perçu comme le seul moyen de sortir de la crise sanitaire. Depuis, de nombreuses études attestent que le vaccin ne suffit pas, à lui seul, à contenir la propagation du virus.

Le 10 octobre 2022, la commission spéciale du Parlement européen relative à la covid‑19 auditionnait Janine SMALL, Présidente des marchés internationaux développés de Pfizer. Cette dernière a reconnu qu’aucune étude n’a été effectuée pour connaître l’effet du vaccin sur la transmission de la maladie.

De nombreuses études mettent en évidence les difficultés à démontrer l’efficacité réelle du vaccin contre la transmission du virus. Le journal Le Monde écrivait d’ailleurs le 3 novembre 2021[7], seulement 45 jours après la suspension de nombreux soignants :

« Des épidémiologistes, des spécialistes en santé publique et des immunologistes britanniques ont conduit une étude visant à évaluer la transmission du variant Delta chez des personnes vaccinées et non vaccinées. Le résultat de l’étude confirme que la vaccination n’empêche pas le fait de pouvoir être infecté. »

Enfin, l’Institut Pasteur reconnaît quant à lui que l’impact de la vaccination sur la transmission du virus n’est pas celui espéré initialement, et qu’il reste faible depuis l’arrivée du variant Delta ([8]).

Face à ce constat, le Canada et l’Italie ont levé la suspension des soignants non vaccinés.

  1.                     Réconcilier les Français

Le choix de la vaccination doit rester libre. Il appartient à chacun de définir sa stratégie de défense face au virus de la covid‑19. Cette prise de recul, couplée à la fin du passe vaccinal, ne justifie plus la suspension de milliers de Français mis au ban de la société.

Cette proposition de loi a pour ambition de réconcilier les Français qui se sont divisés sur l’obligation vaccinale, en proposant une amnistie à tous les professionnels ou volontaires suspendus ou licenciés, qui pourront ainsi réintégrer leur poste.

Les agents publics conserveront leurs droits et leur état d’avancement arrêtés au jour de leur suspension. Afin de pallier la crise des vocations et les difficultés de recrutement, notamment à l’hôpital, tout agent qui acceptera sa réintégration se verra verser ses salaires non perçus pendant la période de suspension.

Nous souhaitons réparer cette injustice en redonnant des soignants à l’hôpital, des personnels aux services de transports, des aides à domicile aux personnes soignées, des personnels aux centres médico‑sociaux, et des sapeurs‑pompiers aux services départementaux d’incendie et de secours.

Par cette proposition de loi, le Rassemblement National invite l’ensemble des groupes politiques à redonner aux Français la possibilité d’être soignés et protégés dignement.

L’article 1 en supprimant le chapitre II de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire permet aux personnels soignants non vaccinés de reprendre une activité professionnelle ou aux personnes souhaitant embrasser une telle carrière de pouvoir commencer leurs études.

L’article 2 permet aux personnels des établissements publics suspendus de retrouver leur poste ou un équivalent avec la garantie d’être maintenus dans l’échelon qui était le leur lors de leur suspension.

L’article 3 prévoit une indemnisation de ce personnel pour la période de suspension avec une équivalence de rémunération à celle d’une période de chômage. Ainsi les personnels des établissements publics suspendus auront rétroactivement un traitement identique à ceux du privé licenciés qui ont pu percevoir le chômage. Des conditions additionnelles sont exigées : conserver un emploi dans ce secteur d’activité pendant minimum cinq ans sauf départ en retraite. Afin d’éviter de mettre les budgets en difficulté, cette indemnisation pourra s’étaler sur trois ans.

L’article 4 est le gage pour faire face à cette dépense. Il s’agit de demander aux fortunes mobilières issues des marchés financiers de participer à cet effort collectif de réhabilitation de notre système de santé.

 

 

 


proposition de loi

Article 1er

Le chapitre II de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire est abrogé.

Article 2

Les agents publics réintégrés et mentionnés au I de l’article 12 de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 précitée, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, conservent l’état d’avancement qu’ils possédaient au jour précédant leur suspension.

Article 3

Les agents publics mentionnés au I de l’article 12 de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 précitée, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, ayant accepté leur réintégration, perçoivent les salaires non perçus pendant la période de suspension à hauteur du montant brut journalier de l’allocation chômage d’aide au retour à l’emploi.

Sont versées ces indemnités aux personnels répondant à ces conditions, mais également les charges dues aux différents organismes concernés à l’identique de l’allocation chômage d’aide au retour à l’emploi. Ces versements peuvent s’étendre sur une période de trois années calendaires à compter de la date de reprise d’activité après acceptation de la réintégration.

Cette restitution est conditionnée à la poursuite d’activité pendant une durée de cinq ans minimum, à l’exception du départ en retraite. En cas de démission avant la fin de ce délai, un remboursement des sommes perçues est exigé, à moins que le démissionnaire reprenne des fonctions identiques ou similaires dans un autre établissement de santé.

Article 4

I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à la taxe visée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.

II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à la taxe visée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.

III. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de la taxe visée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.


([1])  Source : Collectif Inter-Hôpitaux.

([2])  Source : Ministère de la Santé.

([3])  Source : Public Sénat.

([4])  Source : Samu-Urgences de France.

([5] Source : SUdF.

([6])  Article de la tribune en date du 17 fevrier 2021.

([7])  Article du Monde en date du 3 novembre 2021.

([8])  Article de l’Institut Pasteur en date du 6 septembre 2021.