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N° 735

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à assurer la poursuite de la formation des apprentis employés
par des entreprises faisant défaut,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanLouis THIÉRIOT, Thibault BAZIN, Justine GRUET, Vincent SEITLINGER, Patrick HETZEL, Alexandre PORTIER, Isabelle VALENTIN, Raphaël SCHELLENBERGER, Alexandra MARTIN, Éric PAUGET, MarieChristine DALLOZ, Jean-Luc BOURGEAUX, Nathalie SERRE, Emmanuelle ANTHOINE, Jean-Pierre VIGIER, Nicolas FORISSIER, Jean-Pierre TAITE, Antoine VERMORELMARQUES, Josiane CORNELOUP, Valérie BAZIN-MALGRAS, Ian BOUCARD, Francis DUBOIS, Michel HERBILLON,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’apprentissage est une excellente formation pour nos jeunes à qui elle permet d’apprendre un métier et trouver un travail dès l’obtention à l’obtention de leur diplôme. Cependant, parmi les entreprises qui acceptent d’employer un apprenti, certaines se trouvent être peu recommandables, parfois vitrines de trafics et de blanchiment d’argent, ce qui entraîne à terme des difficultés pour l’apprenti.

Loin d’être anecdotiques, ces situations se multiplient et présentent des analogies : les apprentis ont signé un contrat d’apprentissage avec des entreprises de restauration rapide ou de réparation automobile qui se volatilisent du jour au lendemain sans, évidemment, avoir respecté les formalités de rupture du contrat, ni engagé la moindre procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

Les apprentis qui sont officiellement toujours liés par contrat à l’entreprise se trouvent alors dans une impasse au regard de la poursuite de leur formation, une telle situation n’ayant pas été envisagée par les actuelles dispositions du code du travail relatives l’apprentissage.

En effet, si l’article L. 6222‑18 du code du travail prévoit que lorsqu’une entreprise a été liquidée, il appartient au liquidateur de notifier à l’apprenti la rupture du contrat de travail et de lui remettre les documents de fin de contrat, ce qui lui permet de bénéficier des disposition de l’article L. 6222‑18‑2, lesquelles disposent que « le centre de formation dans lequel est inscrit l’apprenti prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d’achever son cycle de formation » et que « l’apprenti bénéficie pendant cette période du statut de stagiaire de la formation professionnelle », ce dispositif ne peut s’appliquer lorsque les mandataires sociaux se sont évanouis dans la nature avant la liquidation de l’entreprise.

En outre, même lorsqu’il existe une procédure de liquidation, les dispositions précitées ne sont pas adaptées à l’urgence de la situation. En effet, la nomination d’un liquidateur ne garantit pas que des mesures soient prises rapidement au regard de la situation contractuelle de l’apprenti. Dans la pratique, on constate que les procédures de liquidation durent plusieurs mois, voire plusieurs années. Un tel délai est évidemment incompatible avec le besoin de l’apprenti de poursuivre sa formation sans attendre.

Par ailleurs, les articles L. 6225‑1 et suivants du code du travail permettent au préfet de s’opposer à l’engagement d’apprentis par une entreprise « lorsqu’il est établi par les autorités chargées du contrôle de l’exécution du contrat d’apprentissage que l’employeur méconnaît les obligations mises à sa charge » et dans ce cas, de décider que les contrats en cours ne peuvent continuer à être exécutés. Ainsi, la décision de rupture du contrat est nécessairement corrélée à une longue « procédure d’opposition à de nouveaux engagements » tout‑à‑fait inappropriée puisqu’elle ne permet pas de répondre à l’urgence d’une poursuite immédiate de l’apprentissage chez un autre formateur faisant perdre une année scolaire à l’apprenti.

En l’absence de recours à cette procédure, l’apprenti ne peut bénéficier des dispositions subséquentes de l’article L. 6225‑3‑1 du code du travail qui prévoient l’assistance de son centre de formation suite à la rupture de son contrat d’apprentissage par le préfet.

Aucune disposition du code du travail ne permet donc actuellement à l’apprenti dont l’entreprise fait défaut d’obtenir une rupture immédiate de son contrat d’apprentissage et l’assistance de son centre de formation afin de poursuivre sans délai sa formation dans les meilleures conditions.

Une autre difficulté qui se pose à l’apprenti est celle de la validation des heures d’apprentissage effectuées au sein de l’entreprise. La disparition physique du maître d’apprentissage prive en effet l’apprenti de la remise d’une attestation des heures validées au sein de l’entreprise au titre de la formation pratique.

Chaque situation étant différente, il semble judicieux de prévoir un dispositif individualisé d’évaluation des heures d’apprentissage validées. En effet, bien que l’apprenti soit victime de la situation, il est dans son intérêt que l’ensemble des heures ne soient pas automatiquement validées mais que les acquis de l’apprentissage fassent l’objet d’une évaluation concrète afin qu’à l’obtention de son diplôme, l’apprenti soit réellement formé et en mesure de trouver et garder un travail.

Pour l’ensemble de ces motifs, il est nécessaire que la loi prévoie une procédure de rupture de contrat spécifique aux apprentis employés par une entreprise faisant défaut. Cette procédure se doit d’être à la fois extrêmement rapide et personnalisée afin de garantir aux apprentis la poursuite sans délai de leur formation dans les meilleures conditions et in fine la validation de leur diplôme nécessaire à leur bonne insertion professionnelle.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi.

Concrètement, l’article unique de la proposition de loi prévoit qu’à la demande de l’apprenti, lorsqu’une entreprise dans laquelle se déroule l’apprentissage ne remplit pas ses obligations d’encadrement ou fait défaut pour quelque cause que ce soit, le directeur du centre de formation notifie sans délai la rupture du contrat d’apprentissage à l’apprenti ainsi qu’au mandataire social ou au liquidateur judiciaire de l’entreprise le cas échéant.

Le texte prévoit que le directeur du centre de formation remette à l’apprenti le certificat de travail afin qu’il retrouve immédiatement sa liberté d’engagement auprès d’une autre entreprise.

Il est ensuite prévu que le directeur du centre de formation s’entretienne avec l’apprenti afin d’évaluer les acquis de son apprentissage dans l’entreprise puis décide du nombre d’heures validées au titre de l’apprentissage dans le cadre de son diplôme.

Enfin, conformément à la mission d’assistance des centres de formation auprès de l’apprenti en rupture du contrat qui découle du 5° de l’article L. 6231‑2 du code du travail, il est également prévu que le centre de formation prenne les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois sous le statut de stagiaire rémunéré de la formation professionnelle et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d’achever son cycle de formation.


proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 6222‑19 du code du travail, il est rétabli un article L. 6222‑20 ainsi rédigé :

« Art. L. 622220. – À la demande de l’apprenti, lorsqu’une entreprise dans laquelle se déroule l’apprentissage ne remplit pas ses obligations d’encadrement ou fait défaut pour quelque cause que ce soit, le directeur du centre de formation notifie sans délai la rupture du contrat d’apprentissage à l’apprenti ainsi qu’au mandataire social ou au liquidateur judiciaire de l’entreprise le cas échéant.

« Le directeur du centre de formation remet à l’apprenti le certificat de travail en lieu et place de l’employeur ou du liquidateur judiciaire le cas échéant.

« Après entretien avec l’apprenti visant à évaluer les acquis de son apprentissage dans l’entreprise, le directeur du centre de formation décide du nombre d’heures d’apprentissage validées dans le cadre de son diplôme.

« Le centre de formation prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de poursuivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d’achever son cycle de formation.

« L’apprenti bénéficie pendant cette période du statut de stagiaire de la formation professionnelle dans les conditions fixées au 5° de l’article L. 6231‑2. »