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N° 1594

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à ajuster le tarif des péages autoroutiers lors de travaux,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Thomas MÉNAGÉ, Philippe BALLARD, José BEAURAIN, Bruno BILDE, Emmanuel BLAIRY, Sophie BLANC, Frédéric BOCCALETTI, Jérôme BUISSON, Frédéric CABROLIER, Victor CATTEAU, Sébastien CHENU, Caroline COLOMBIER, Annick COUSIN, Jocelyn DESSIGNY, Edwige DIAZ, Frédéric FALCON, Thierry FRAPPÉ, Stéphanie GALZY, José GONZALEZ, Florence GOULET, Géraldine GRANGIER, Daniel GRENON, Marine HAMELET, Timothée HOUSSIN, Hélène LAPORTE, Laure LAVALETTE, Julie LECHANTEUX, Gisèle LELOUIS, Katiana LEVAVASSEUR, Philippe LOTTIAUX, Matthieu MARCHIO, Michèle MARTINEZ, Alexandra MASSON, Bryan MASSON, Kévin MAUVIEUX, Caroline PARMENTIER, Kévin PFEFFER, Lisette POLLET, Stéphane RAMBAUD, Angélique RANC, Julien RANCOULE, Laurence ROBERTDEHAULT, Alexandre SABATOU, Emmanuel TACHÉ de la PAGERIE, JeanPhilippe TANGUY, Antoine VILLEDIEU,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France constitue le 4e réseau autoroutier mondial, et comprend environ 12 000 kilomètres de voies routières dont 9 200 sont concédés à une vingtaine de sociétés privées. Dès lors, c’est plus de 75 % du réseau autoroutier qui est entretenu et exploité dans le cadre du régime concessif.

Il apparaît, selon l’intégralité des statistiques officielles dont le public dispose, que depuis les décisions successives de privatisation, la hausse des tarifs applicables aux péages est systématiquement supérieure à l’inflation générale enregistrée dans le pays. En ce sens, le décret n° 95‑81 du 24 janvier 1995, lequel prévoit que la majoration des tarifs de péages ne peut être inférieure à 70 % de l’évolution des prix à la consommation constatée depuis la fixation des tarifs applicables sur le réseau faisant l’objet de la concession, ne permet pas de garantir aux usagers autoroutiers une maîtrise des sommes dont ils doivent s’acquitter dans la mesure où il prévoit un plancher au lieu d’instaurer un plafond.

Depuis ces privatisations réalisées par les gouvernements successifs, nombreuses ont été les autorités, telles que la Cour des comptes – notamment dans son rapport du 24 juillet 2013 relatif aux relations entre l’État et les sociétés concessionnaires d’autoroutes – ou encore l’Autorité de la concurrence par un avis public rendu le 18 septembre 2014, à pointer les béances financières que ces opérations ont pu engendrer pour les finances publiques, le manque à gagner pour le budget de l’État, et surtout les coûts exorbitants auxquels sont exposés les usagers. En effet, dans le rapport sénatorial du 20 février 2019 rendu par le M. le Sénateur Guillaume Gontard, il est relevé qu’entre 2006 et 2019, la hausse des tarifs kilométriques moyens (TKM) s’est établie à plus de 20 % pour une inflation ayant évolué de 10,14 % sur la même période.

Autant d’années donc au cours desquelles les Français ont dû subir les conséquences de l’inflation notamment alimentaire, à laquelle il faut adjoindre une augmentation des prix encore plus forte pour le réseau autoroutier. Ces constantes majorations trouvent leur explication dans de nombreux faits générateurs imputables aux pouvoirs publics, de la vaste privatisation motivée par des considérations court‑termistes sous le Gouvernement de Dominique de Villepin au fiasco du gel des tarifs impulsé par Ségolène Royal, alors ministre de l’Environnement, dont le surcoût est estimé à plus de 500 millions d’euros pour les usagers.

Au‑delà de cette situation et de sa faible soutenabilité pour les automobilistes, il est à noter que l’année 2022 a enregistré une hausse des tarifs inégalée depuis l’année 2004, et cette explosion des dépenses contraintes est aggravée si l’on y ajoute le prix de l’essence.

En plus d’être globalement néfastes pour le portefeuille des Français, ces hausses sont inégalement réparties sur le territoire national et certains tronçons connaissent au fil des années des majorations considérables. Ainsi, les voies autoroutières qui relient Rouen à Tours ont par exemple enregistré une hausse de 34,06 % entre 2011 et 2018.

Les lacunes du contrôle de l’État permettent aux sociétés de décider d’une augmentation des tarifs dès lors que des investissements sont déployés sur un tronçon, alors même que ces sociétés jouissent de bénéfices toujours croissants.

À titre d’exemple, le chiffre d’affaires des sociétés concessionnaires d’autoroutes a pu atteindre 10,6 milliards d’euros en 2021, dont 10,3 milliards provenant des recettes liées aux péages. Ainsi, le bénéfice net de ces sociétés a bondi de 47 % en 2021, tandis que les tarifs des péages ont encore augmenté en moyenne de 4,75 % le 1er février 2023.

Ces chiffres posés, il convient de porter un regard attentif à la situation de l’usager de l’autoroute, et aux nombreuses nuisances auxquelles la multiplication des travaux l’expose. Il paraît inacceptable de justifier des majorations tarifaires par la réalisation d’investissements par les sociétés concessionnaires, sans considérer l’altération de la qualité du service pour les voies concernées.

En effet, l’usager subit la double peine de devoir débourser davantage alors que la réalisation des travaux entraîne des congestions, des retards, des désagréments divers tout au long du trajet. Cet état de fait n’est pas soutenable, et l’on ne peut imposer aux usagers de payer toujours plus cher pour un trafic toujours moins fluide.

Le péage étant la redevance pour le service accompli par les sociétés concessionnaires, il ne paraît pas justifiable de faire peser sur les usagers le coût des investissements qu’elles réalisent, au regard du montant des bénéfices qu’elles enregistrent continuellement et qui lui permettent de les financer, au lieu de les répartir dans une telle proportion à leurs actionnaires.

C’est pourquoi la présente proposition de loi prévoit, en son article unique, la mise en place d’un ajustement à la baisse les tarifs de péages en fonction des travaux en cours et de leurs incidences sur la qualité du service.


proposition de loi

Article unique

Après le troisième alinéa de l’article L. 122‑4 du code de la voirie routière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de travaux ayant une incidence sur un trajet, le tarif de péage fait l’objet d’une réduction dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »