N° 1954

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

pour préserver les revenus ou la transmission du patrimoine par l’actualisation de divers seuils du code général des impôts,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Patrick HETZEL, Mme Emmanuelle ANTHOINE, M. Thibault BAZIN, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, Mme Émilie BONNIVARD, M. Jean-Yves BONY, M. Hubert BRIGAND, M. Fabrice BRUN, M. Éric CIOTTI, M. Pierre CORDIER, Mme Josiane CORNELOUP, M. Fabien DI FILIPPO, M. Francis DUBOIS, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. Nicolas FORISSIER, M. Jean-Jacques GAULTIER, M. Meyer HABIB, M. Michel HERBILLON, M. Philippe JUVIN, M. Mansour KAMARDINE, M. Marc LE FUR, Mme Véronique LOUWAGIE, Mme Alexandra MARTIN (ALPES-MARITIMES), M. Éric PAUGET, M. Nicolas RAY, M. Vincent ROLLAND, M. Raphaël SCHELLENBERGER, M. Vincent SEITLINGER, Mme Nathalie SERRE, Mme Isabelle VALENTIN, M. Alexandre VINCENDET, M. Stéphane VIRY,

députés.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Nombre de seuils, d’exonération, d’abattement, de déduction forfaitaire ou de réduction d’impôt ne sont jamais réévalués dans le code général des impôts (CGI).

La fiscalité du patrimoine est celle qui connaît le plus de seuils fixes qui ne sont jamais mis à jour. Cela concerne aussi bien l’assurance vie que les droits de succession, les revenus fonciers, les plus‑values ou encore le plafonnement des niches fiscales.

On peut considérer cela comme une augmentation indirecte des impôts à laquelle le contribuable n’a pas consenti.

Dans un souci de justice et d’équité, une telle situation doit être corrigée. Au regard de la reprise de l’inflation, il ne s’agit là en définitive que d’un simple rattrapage. En 2022, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a chiffré l’inflation moyenne à 5,2 % sur un an. Mais, pour les ménages les plus exposés, la hausse des prix peut atteindre 8,5 %.

Aussi, il semble équitable d’actualiser 17 seuils pour préserver les revenus ou la transmission du patrimoine, à chaque fois sur la base de l’inflation constatée depuis l’entrée en vigueur du dispositif :

L’article 1er concerne le seuil d’abattement accordé avant la prise en compte des primes versées sur un contrat d’assurance vie après les 70 ans de l’assuré pour le calcul des droits de succession. Ce seuil n’a pas été actualisé depuis la mise en place du dispositif, c’est‑à‑dire le 20 novembre 1991 ce qui se traduit par une inflation cumulée de 64,7 %.

L’article 2 a pour objet les seuils d’abattement pour le calcul du prélèvement de 20 % ou de 31,25 % dus sur les capitaux décès issus de primes versées avant les 70 ans de l’assuré. Ces deux seuils n’ont pas été revus depuis leur création, à savoir le 13 octobre 1998 et le 31 juillet 2011 ce qui se traduit par une inflation cumulée de 46 %.

L’article 3 modifie les abattements en matière de revenus issus de l’assurance vie. À la mise en place de la fiscalité sur les produits issus des contrats d’assurance vie de plus de huit ans, le 26 septembre 1997, il a été prévu un abattement annuel sur ces produits de 4 600 € pour une personne seule et 9 200 € pour un couple. Depuis cette date, ces abattements n’ont jamais été actualisés, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 47 %.

L’article 4 concerne la réduction d’impôt accordée aux personnes handicapées dans le cadre de l’assurance vie. A l’occasion de la loi sur le handicap du 11 février 2005, la réduction d’impôt à laquelle ont droit les personnes handicapées qui versent des cotisations sur un contrat d’assurance vie dit « épargne‑handicap » a été mise à jour. Depuis lors, la réduction d’impôt de 25 % s’applique aux primes versées dans la limite de 1 525 € par an, avec une majoration de 300 € par enfant à charge. Depuis le vote de la loi, ces limites n’ont jamais été actualisées, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 30 %.

L’article 5 a pour objet la réduction forfaitaire des frais d’obsèques en cas de de succession. Pour la déclaration des droits de succession, les héritiers peuvent porter au passif de la succession les frais d’obsèques pour un montant fixé forfaitairement à 1 500 € depuis le 1er janvier 2003, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 38 %.

L’article 6 se rapporte au seuil d’application du régime forfaitaire du microfoncier. Lorsque le montant annuel brut des loyers n’excède pas 15 000 €, le contribuable bénéficie, s’il le souhaite, du régime microfoncier permettant abattement forfaitaire de 30 % au titre des dépenses déductibles. La limite n’a pas été réévaluée depuis 2002, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 30 %.

Les deux articles suivants s’appliquent aux seuils de dispense des acomptes de prélèvement pour les revenus du patrimoine ou les produits de placement.

L’article 7 touche au seuil de ressources en‑deçà duquel le contribuable peut demander à être dispensé de payer le prélèvement forfaitaire non libératoire normalement précompté par les organismes lors du paiement d’intérêts ou de dividendes, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 16 %.

L’article 8 a trait au seuil de ressources en‑deçà duquel le contribuable peut demander à être dispensé de payer le prélèvement forfaitaire non libératoire normalement précompté par les assureurs en cas de rachat d’un contrat d’assurance vie, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 16 %.

Ces seuils n’ont pas été actualisés depuis leur entrée en vigueur le 1er janvier 2013.

Les deux articles suivants se rapportent aux seuils de dispense d’imposition de la plus‑value en cas de cession d’un bien meuble ou immeuble.

L’article 9 s’applique à la valeur de cession d’un bien immobilier en‑deçà de laquelle la plus‑value n’est pas imposable. Ce montant n’a pas été réévalué depuis son entrée en vigueur, c’est‑à‑dire le 1er janvier 2004, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 35 %.

L’article 10 concerne la valeur de cession d’un bien meuble corporel en‑deçà de laquelle la plus‑value n’est pas imposable. Ce montant n’a pas été réévalué depuis son entrée en vigueur, c’est‑à‑dire le 1er janvier 2004, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 35 %.

L’article 11 s’applique au plafond d’économie d’impôt pour certaines niches fiscales. L’économie d’impôt résultant de certaines niches fiscales est plafonnée depuis le 1er janvier 2013. Le seuil de droit commun est de 10 000 € mais peut être porté à 18 000 € dans le cas de certains investissements outre‑mer ou SOFICA. Ces seuils n’ont pas été révisés depuis leur création, ce qui se traduit par une inflation cumulée de 16 %.

L’article 12 gage l’ensemble de ces mesures. L’objectif de cette proposition de loi étant évidemment de préserver les revenus ou la transmission du patrimoine des Français, le gouvernement est appelé à lever ce gage.

Tel est l’objet de cette proposition de loi.

 


proposition de loi

Article 1er

À la fin du II de l’article 757 B du code général des impôts, le montant : « 30 500 € » est remplacé par le montant : « 50 000 € ».

Article 2

La section 0I ter du chapitre III du titre IV de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifiée :

1° À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article 990 I, le montant : « 152 000 € » est remplacé par le montant : « 225 000 € » ;

2° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 990 I bis, le montant : « 700 000 € » est remplacé par le montant : « 830 000 € ».

Article 3

Le quatrième alinéa du I de l’article 125‑0A est ainsi modifié :

1° Le montant : « 4 600 € » est remplacé par le montant : « 7 000 € » ;

2° Le montant : « 9 200 € » est remplacé par le montant : « 14 000 € ».

Article 4

Au premier alinéa du I de l’article 199 septies du code général des impôts, le montant : « 1 525 € » est remplacé par le montant : « 2 000 € » et le montant : « 300 € » est remplacé par le montant : « 400 € ».

Article 5

À l’article 775 du code général des impôts, le montant : « 1 500 € » est remplacé par le montant « 2 500 € ».

Article 6

Au premier alinéa du 1. de l’article 32, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 21 000 € ».

Article 7

Au troisième alinéa de l’article 117 quater du code général des impôts, le montant : « 50 000 € » est remplacé par le montant : « 60 000 € » et le montant : « 75 000 € » est remplacé par le montant : « 90 000 € ».

Article 8

Au dernier alinéa du I de l’article 125 A du code général des impôts, le montant : « 25 000 € » est remplacé par le montant : « 30 000 € » et le montant : « 50 000 € » est remplacé par le montant : « 60 000 € ».

Article 9

À la fin de la première phrase du 6° du II de l’article 150 U du code général des impôts, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 21 000 € ».

Article 10

À la fin du 2° du II de l’article 150 UA, le montant : « 5 000 € » est remplacé par le montant : « 7 000 € ».

Article 11

Au second alinéa du 1. de l’article 200‑0‑A du code général des impôts, le montant : « 10 000 € » est remplacé par le montant : « 12 000 € » et, à la fin, le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 21 000 € ».

Article 12

La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.