N° 1956

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à protéger la santé des populations et l’environnement contre les nuisances aériennes,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Naïma MOUTCHOU, M. Paul CHRISTOPHE, M. Dominique DA SILVA, M. Romain DAUBIÉ, Mme Christine DECODTS, M. Olivier FALORNI, Mme Hélène LAPORTE, Mme Sandrine LE FEUR, M. Pierre MOREL-À-L’HUISSIER, M. Christophe NAEGELEN, M. Hubert OTT, M. Bertrand PANCHER, Mme Maud PETIT, M. Kévin PFEFFER, M. Jean-François PORTARRIEU, Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK, M. Lionel ROYER-PERREAUT, M. Jean-Luc WARSMANN, M. Emmanuel PELLERIN, Mme Anne LE HÉNANFF,

députées et députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Entre pollution chimique et bruit, les dégâts du trafic aérien sur la santé des riverains et sur le réchauffement climatique ne sont plus à démontrer mais ne cessent pourtant de se développer. Les enjeux sont considérables sur le cadre de vie et l’environnement, mais également sur l’état physique et psychique de ceux qui vivent au quotidien, jour et nuit, avec les nuisances aériennes.

Pour en évaluer précisément les effets sanitaires, l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires a piloté une étude épidémiologique (le programme de recherche national « DEBATS ») portant sur l’analyse croisée des données de santé et de mortalité des habitants des 161 communes situées aux abords de trois aéroports français (Paris‑Charles‑de‑Gaulle, Lyon‑Saint‑Exupéry et Toulouse‑Blagnac). Publiés en octobre 2020, les résultats de cette étude sont édifiants. L’exposition au bruit aérien, qui se concentre autour des aéroports, est associée à une mortalité plus élevée par maladie cardiovasculaire. Ainsi, le risque de décéder des suites d’un infarctus du myocarde est 28 % plus élevé pour les riverains d’aéroports par rapport à la population générale. Dans une étude parue en juillet 2021, l’ADEME et le Conseil national du bruit estiment que le coût social relatif aux nuisances sonores aériennes s’élève à 6,1 milliards d’euros par an.

Si des dommages parfois irrémédiables pour les cellules auditives de l’oreille interne se manifestent à partir de 80 décibels (dB), des effets extra‑auditifs apparaissent à des niveaux beaucoup plus faibles, dès 50 dB, en raison du stress physiologique provoqué par l’exposition au bruit, qu’il soit perçu ou non comme une gêne. La fréquence cardiaque s’accélère, la pression artérielle augmente, le système endocrinien et le métabolisme sont perturbés, avec diminution de la tolérance au glucose et augmentation de la sécrétion de cortisol, d’adrénaline et de dopamine. Le bruit soutenu engendre également des difficultés de concentration et des troubles du sommeil pouvant conduire à des états anxiodépressifs. En cas d’exposition prolongée, ces effets à court terme peuvent se traduire par un risque accru de diabète de type II, de surpoids, mais aussi, plus brutalement, d’infarctus du myocarde. D’autant qu’il n’existe pas de phénomène d’habituation au bruit. La répétition de la gêne sonore représente, au contraire, un facteur aggravant. Selon les estimations de l’Organisation mondiale de la santé, plus d’un million d’années de vie en bonne santé seraient perdues chaque année en Europe, en raison du bruit causé par les infrastructures de transport. Et parmi l’ensemble de ces nuisances, le lien entre hypertension et trafic aérien est de loin le plus marqué. Pour le seul aéroport de Paris Charles‑de‑Gaulle, certaines habitations sont survolées par 450 avions chaque jour. Les habitants de la région Île‑de‑France exposés à ces nuisances aériennes peuvent perdre jusqu’à trois années d’espérance de vie en bonne santé. Le rapport Emile Quinet de septembre 2013 portant sur l’évaluation socioéconomique des investissements publics estime que le coût social des nuisances sonores liées au trafic aérien s’élèverait à 283 euros par personne et par an, pour un niveau d’exposition journalier moyen de 65 décibels.

Les nuisances aéroportuaires ne se limitent pas au bruit des avions. La pollution de l’air et les émissions de carbone sont d’autres externalités négatives aux conséquences durables sur la santé‑environnementale et le climat, même si les effets cumulés du bruit et de l’exposition à d’autres types de pollution, notamment atmosphérique, demeurent mal connus. Afin de limiter l’impact carbone du transport aérien responsable de 5 à 6 % des émissions de gaz à effet de serre en France et 3 % dans le monde, le Parlement et le Conseil européen sont parvenus à un accord en avril 2023 visant à accroître la part de carburants durables pour l’aviation pour atteindre 2 % dès 2025, 34 % d’ici 2040 et 70 % d’ici 2050. Un système d’étiquetage européen sur la performance environnementale des vols commerciaux est également prévu à horizon 2025.

Pour tenter de limiter l’impact des nuisances sonores aériennes pour les riverains des zones aéroportuaires, la doctrine internationale dite « approche équilibrée » a été élaborée par l’Organisation de l’Aviation civile internationale dans le cadre de sa résolution A33/7, traduite dans le Règlement UE 598/2014 du Parlement européen et du Conseil, qui fixe la procédure à suivre pour introduire des restrictions d’exploitation. En vertu de cette procédure, « sont examinées de façon cohérente les diverses mesures disponibles, à savoir la réduction à la source des nuisances sonores liées au trafic aérien, l’aménagement et la gestion du territoire, les procédures d’exploitation dites « à moindre bruit » et les restrictions d’exploitation, en vue de traiter le problème du bruit de manière économiquement efficiente, aéroport par aéroport. »

Dans la réglementation française, l’approche équilibrée se traduit par les mesures suivantes :

– modulation de la redevance d’atterrissage en fonction des performances acoustiques des avions et de la période de la journée ;

– élaboration de Plans d’exposition au bruit (PEB), dont la finalité est de limiter l’urbanisation autour des aéroports ;

– amélioration des procédures d’exploitation allant de l’optimisation de l’utilisation des pistes en fonction de la direction de départ à la généralisation de la technique d’approche en descente continue qui permet par exemple de réduire de 4 à 6 dB le niveau sonore perçu au sol pour un A320, équivalent à une division par 4 du volume sonore (sachant que l’intensité sonore double tous les 3 dB, 70 dB est par exemple le double de 67 dB en termes de quantité d’énergie sonore) ;

– restrictions d’exploitation, notamment interdiction de certains aéronefs (les modèles construits avant 1977 par exemple), plafonnement annuel du trafic aérien, couvre‑feu ‑ les aéroports d’Orly, de Bâle‑Mulhouse, de Beauvais, et l’aéroport de Nantes ont par exemple instauré un couvre‑feu allant de 22 h 15 à minuit le soir, jusqu’à 5 heures à 6 h 15 le matin ;

– taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) dont les recettes servent, depuis 2005, au financement des travaux d’insonorisation des riverains situés dans le périmètre des Plans de gêne sonore (PGS) des 12 principaux aéroports français.

Plus récemment, les vols intérieurs pour lesquels une alternative de moins de 2 h 30 existe par voie ferroviaire ont été interdits – cette mesure concernant essentiellement les liaisons Paris‑Orly à Bordeaux, Nantes et Lyon.

Le plan d’action « zéro pollution » de l’Union européenne prévoit une réduction de 30 % des personnes affectées par le bruit lié au transport d’ici à 2030 par rapport à 2017. Or, le rapport de la Commission européenne publié le 20 mars 2023, sur la mise en œuvre de la directive sur les bruits dans l’environnement, laisse augurer des résultats bien en‑deçà de cet objectif avec de réels risques, souvent sous‑estimés, pour la santé publique. En dépit des efforts entrepris, une partie de la population reste exposée au bruit, et notamment au bruit aérien. Aussi, les commissaires européens appellent les États membres à intensifier leurs efforts, en réduisant les vols de nuit, en renforçant la règlementation relative au fret et aux procédures de décollage et d’atterrissage des avions et en favorisant le renouvellement des flottes et la conception de technologies moins bruyantes.

L’activité de l’aéroport Paris‑Charles de Gaulle, premier aéroport le plus fréquenté de l’Union européenne, a représenté 504 839 mouvements en 2019, dont 12 % de vols de nuit. D’après le plan de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) 2022‑2026 élaboré par l’aéroport, 316 525 riverains sont encore exposés aux nuisances sonores aériennes, essentiellement dans le Val‑d’Oise. Plus de 100 000 personnes sont affectées par une forte gêne (entre 55 et 75 dB) et plus de 12 000 personnes voient leur sommeil fortement perturbé. Aussi, la commission européenne appelle les États membres à prendre des mesures plus contraignantes pour réduire les nuisances sonores liées au trafic aérien, notamment en exploitant les aéronefs de la manière la moins bruyante possible et en réduisant le trafic de nuit. Ainsi, l’aéroport Amsterdam‑Schiphol aux Pays‑Bas a annoncé une limitation du nombre de vols annuels à 440 000 mouvements, contre 504 839 avant la pandémie. Les riverains de l’aéroport Paris‑Charles‑de‑Gaulle et certaines associations telles que l’Association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR) plaident pour qu’une mesure similaire soit appliquée à l’aéroport Paris‑Charles de Gaulle dont le nouveau plan de prévention du bruit dans l’environnement prévoit une forte évolution du trafic qui pourrait être porté à 680 000 mouvements annuels en 2025 contre 500 000 en 2019 ! La décision récente de la compagnie Air France de faire transférer presque tous ses vols de l’aéroport d’Orly à celui de Roissy n’est pas, dans ces conditions, sans inquiéter.

Malgré un haut niveau d’externalités négatives, le transport aérien n’est pas promis à un sombre avenir. Nous avons confiance en la capacité d’innovation des multiples acteurs économiques qui travaillent actuellement au développement d’aéronefs moins bruyants et plus respectueux de l’environnement. L’avion à hydrogène pourrait par exemple représenter une évolution viable et durable pour l’aéronautique civile dans les décennies à venir. C’est tout l’objet des mesures de soutien pour le développement de la filière de l’avion vert annoncées par le Président de la République en juin 2023. À horizon 2030, il prévoit une enveloppe de 300 millions d’euros par an consacrée à la conception de nouveaux avions et de nouveaux moteurs à laquelle s’ajoute 200 millions d’euros d’investissement public pour soutenir le développement de petits avions électriques ou à hydrogène. La création d’une filière française de production et de distribution de carburants aériens durables (CAD) a également été annoncée, avec comme objectif la production de 500 000 tonnes de CAD d’ici 2030.

La présente proposition de loi pose les conditions d’un nouvel équilibre entre intérêts individuels et prospérité collective, nécessité sanitaire et écologique et enjeux économiques. En harmonisant par le haut les règles actuellement en vigueur et en les rehaussant au niveau législatif, ces mesures visent à permettre, aux uns, de vivre dans un environnement sain, aux autres, de continuer à voyager le plus librement possible en empruntant l’espace aérien.

L’article 1er instaure, pour l’aéroport de Paris‑Charles de Gaulle, un plafonnement annuel du nombre de vols fixé à 440 000 mouvements par an ainsi qu’un couvre‑feu entre 23 heures et 6 heures.

L’article 2 prévoit de doubler le montant maximum des amendes administratives en cas de manquement constaté, en portant ce plafond à 80 000 euros lorsque le manquement concerne des mesures de restriction des vols de nuit ou des restrictions d’usage de certains types d’aéronefs en fonction de leurs émissions atmosphériques polluantes ou de la classification acoustique.

L’article 3 porte diverses mesures de réduction des nuisances sonores aériennes, en s’appuyant notamment sur les règles actuellement en vigueur à l’aéroport international de Bâle‑Mulhouse‑Fribourg qui fait l’objet d’une cogestion par la France et la Suisse. Prenant acte des observations formulées par les commissaires européens, il prévoit notamment :

– des restrictions de vols pour les aéronefs les plus bruyants (chapitre 3 avec marge cumulée inférieure à 13 EPNdB) entre 22 heures et 7 heures ;

– le décollage en seuil de piste pour tout mouvement entre 22 heures et 7 heures ;

– la généralisation des procédures de vol à moindre bruit, tant en matière de décollage que d’atterrissage et d’approche, en généralisant notamment la descente continue.

L’article 4 prévoit des exceptions aux restrictions prévues aux articles 1 et 2, notamment pour les missions à caractère sanitaire ou humanitaire, les situations d’urgence, les vols militaires et gouvernementaux. Le ministre des transports peut également accorder certaines dérogations à titre exceptionnel en raison notamment de manifestations à caractère international, telles que les Jeux olympiques et paralympiques 2024 ou d’importance économique majeure.

L’article 5 prévoit qu’un bilan des exceptions aux restrictions prévues aux articles 1 et 2 de la présente loi soit présenté chaque année à l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires.

Afin de promouvoir la décarbonation du secteur de l’aviation et d’informer le public, l’article 6 prévoit la création d’un label mesurant la performance environnementale des vols. A compter du 1er janvier 2025, les compagnies aériennes commercialiseront leurs vols avec un label indiquant l’empreinte carbone prévue par passager, les émissions de dioxyde de carbone prévues par kilomètre et le niveau de performance acoustique de l’avion. Cette disposition anticipe une mesure européenne en cours de mise en œuvre.

L’article 7 vise à inclure une évaluation de l’impact sanitaire de l’exposition au bruit lié au trafic aérien dans les cartes de bruit et les plans de prévention du bruit dans l’environnement. En effet, l’application de la Directive (UE) 2020/367 du 4 mars 2020 concernant le bruit du transport aérien via les articles R 572‑6, R 572‑6‑1, R 572‑6‑2 et R 572‑12 du Code de l’Environnement prévoit uniquement une évaluation de l’impact sanitaire du bruit aérien relatif aux fortes gêne et perturbation du sommeil, mais ne prend pas en considération l’ensemble des impacts sanitaires, notamment l’occurrence des cardiopathies ischémiques, lacune qu’il convient de combler.

L’article 8 prévoit la réalisation d’une étude portant sur les effets cumulés du bruit et des principaux polluants sur la santé des populations, conformément aux recommandations de la commission européenne.

L’article 9 prévoit une réforme du dispositif d’aide à l’insonorisation pour les riverains des zones aéroportuaires, prévoyant que cette aide puisse rembourser l’ensemble des dépenses engagées par le propriétaire pour isoler son logement des nuisances sonores aériennes, dans la limite d’un plafond revalorisé chaque année. En effet, le plafonnement du dispositif n’a pas été révisé depuis plus d’une décennie. Or, le reste à charge des riverains a considérablement augmenté, particulièrement depuis 2 ans compte tenu de la forte augmentation du prix des vitrages.

L’article 10 prévoit la remise par la Cour des comptes au Parlement d’un rapport relatif aux dispositifs alternatifs d’aide à l’insonorisation pour les populations exposées aux nuisances sonores aériennes, tels que le rachat des habitations dès 65 Lden et le relogement de certains riverains. Si un système de rachat est prévu par le troisième aliéna de l’article R. 571‑85 du code de l’environnement ainsi que les articles R. 571‑88 et R. 571‑89, aucune habitation autour de Roissy n’est concernée en raison du seuil d’exposition au bruit retenu. L’Organisation de l’aviation civile internationale demande à ce qu’aucun riverain d’aéroport ne soit exposé à un niveau de bruit supérieur à Lden 65.

L’article 11 permet d’assouplir les règles d’éligibilité à l’aide à l’insonorisation dans certains cas spécifiques, conformément aux conclusions des assises nationales du transport aérien. Il permet d’accorder l’aide à l’insonorisation à toute personne qui prouve par des mesures qu’elle subit une gêne supérieure ou égale à la limite extérieure du Plan de Gêne Sonore.

L’article 12 prévoit la prise en compte de l’amélioration des performances thermiques des logements dans le cadre des travaux d’isolation phonique.

En accord avec les recommandations de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), l’article 13 prévoit de simplifier, de fluidifier et de rendre plus lisible le pouvoir de sanction de l’autorité (possibilité de publicité des décisions et de règlement à l’amiable des litiges notamment).

L’article 14 prévoit que la consultation de l’ACNUSA soit effectuée en amont de l’enquête publique préalable à toute modification de la circulation aérienne et rendue publique pour éclairer l’avis du public.

L’article 15 prévoit la consultation de l’ACNUSA sur les projets de plan de prévention du bruit dans l’environnement. Actuellement les tribunaux ne reconnaissent pas à l’ACNUSA le droit de rendre un avis sur les PPBE aéroports, alors que ces plans concernent bien la "protection de l’environnement sonore."

Conformément aux recommandations de l’ACNUSA, l’article 16 vise à demander au Gouvernement une étude évaluant l’impact de la réforme de la classification acoustique des aéronefs sur les nuisances sonores et environnementales.

L’article 17 prévoit une réévaluation périodique de la classification acoustique des aéronefs au plus tard tous les cinq ans.

Sur le modèle des indicateurs de gênes sonores applicables au transport ferroviaire, l’article 18 instaure des critères d’intensité et de répétitivité pour les indicateurs de gênes sonores aériennes.

L’article 19 vise à renforcer et à améliorer le contrôle de la pollution atmosphérique liée aux activités aériennes.

L’article 20 gage financièrement la proposition de loi.

 

 


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proposition de loi

TITRE I

Mesures de réduction des nuisances sonores aéroportuaires

Article 1er

Le chapitre Ier du titre VII du livre V du code de l’environnement est complété par une section 7 ainsi rédigée :

« Section 7

« Dispositions particulières pour l’aérodrome Paris‑Charles de Gaulle

« Art. L. 57120. – Le nombre maximal annuel de créneaux horaires attribuables par le coordonnateur de l’aéroport de Paris‑Charles de Gaulle est fixé à 440 000.

« Art. L. 57121. – L’utilisation de nuit de l’aéroport de Paris‑Charles de Gaulle est ainsi limitée :

« 1° Aucun atterrissage d’aéronef ne sera programmé entre 23 heures et 6 heures – heure locale du toucher des roues ;

« 2° Aucun atterrissage pour retard accidentel ne sera admis après 23 heures ; cette disposition ne s’étend pas aux situations susceptibles de mettre en cause la sécurité de l’aéronef, réservées à la seule appréciation du commandant de bord, sous réserve d’une justification a posteriori ;

« 3° Aucun décollage d’aéronef ne sera programmé entre 23 heures et 6 heures – heure locale de départ de l’aire de stationnement ;

« 4° Aucun décollage pour retard accidentel ne sera admis après 23 heures ;

« 5° Les aéronefs effectuant des atterrissages entre 22 heures et 7 heures – heure du toucher des roues - sont manœuvrés au tracteur électrique sur les voies de circulation ;

« 6° L’utilisation des dispositifs de freinage au moyen des groupes moteurs est interdite entre 22 heures et 7 heures, sauf raisons particulières mettant en jeu la sécurité et dont le bien‑fondé est apprécié a posteriori sur un rapport du commandant de bord. »

Article 2

Le premier alinéa de l’article L. 6361‑13 du code des transports est ainsi modifié :

1° À la première phrase, le montant : « 20 000 € » est remplacé par le montant : « 40 000 € » ;

2° À la seconde phrase, le montant : « 40 000 € » est remplacé par le montant : « 80 000 € ».

Article 3

Après l’article L. 6360‑4 du code des transports, il est inséré un article L. 6360‑5 ainsi rédigé :

« Art. L. 63605. Pour les aérodromes des groupes 1 à 3 mentionnés à l’article L. 6360‑1 du présent code :

« I. – Aucun aéronef certifié conformément aux normes mentionnées au « chapitre 3 » avec une marge cumulée inférieure à 13 niveau effectif de bruit perçu ne peut :

« a) Atterrir entre 22 heures et 7 heures, heure du toucher des roues ;

« b) Quitter le point de stationnement, en vue d’un décollage, entre 22 heures et 7 heures ;

« II. – Entre 22 heures et 7 heures :

« a) Aucun essai de moteurs ne peut être effectué du lundi au samedi et toute la journée le dimanche, sauf lorsqu’ils sont exécutés avec un réducteur de bruit ;

« b) Les déplacements des aéronefs entre les hangars et les postes de stationnement sont obligatoirement effectués à l’aide de tracteurs électriques ;

« c) Le recul des avions à l’aide de leurs propres moteurs est interdit.

« III. – Tout aéronef au décollage est tenu, entre 22 heures et 7 heures, heures locales, de décoller depuis l’extrémité de la piste.

« IV. – Tout aéronef évoluant selon les règles de vol aux instruments respecte les procédures élaborées en vue de limiter les nuisances sonores.

« V. – Tout exploitant d’aéronef effectuant des vols commerciaux au départ ou à l’arrivée des aéroports des groupes 1 à 3 publie dans son manuel d’exploitation des consignes de conduite machine visant à réduire au minimum l’impact sonore des phases d’approche, d’atterrissage et de décollage. Ces consignes sont conformes aux prescriptions du document 8168/OPS/611 publié par l’Organisation de l’aviation civile internationale.

« VI. – Tout exploitant effectuant des vols commerciaux au départ ou à l’arrivée des aérodromes des groupes 1 à 3 publie dans son manuel d’exploitation, la classification et la marge cumulée de ses aéronefs.

« VII. – Le contrôle de la circulation aérienne attribue les niveaux de vol et optimise l’organisation des pistes et des trajectoires de façon à minimiser les nuisances sonores et le survol des zones densément peuplées, notamment en généralisant les procédures d’approche en descente continue. Ce faisant, il tient compte de la sécurité de l’aviation et des flux du trafic.

« VIII. – Le commandant de bord ne peut déroger aux règles définies aux III, IV et VII que s’il le juge nécessaire pour des raisons de sécurité du vol. »

Article 4

Après l’article L. 6360‑4 du code des transports, il est inséré un article L. 6360‑6 ainsi rédigé :

« Art. L. 63606. – I. – Les dispositions prévues au 22° de l’article L. 6323‑4 et à l’article L. 6360‑5 ne font pas obstacle à l’atterrissage ou au décollage, à titre exceptionnel, des aéronefs suivants :

« a) Aéronefs effectuant des missions à caractère sanitaire ou humanitaire ;

« b) Aéronefs en situation d’urgence tenant à des raisons de sécurité de vol ou de sûreté ;

« c) Aéronefs mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 6100‑1 du code des transports ;

« d) Aéronefs effectuant des vols gouvernementaux.

« II. – Des dérogations aux règles définies au 22° de l’article L. 6323‑4 et à l’article L. 6360‑5 peuvent être accordées à titre exceptionnel par le ministre chargé de l’aviation civile en raison notamment de manifestations à caractère international ou d’importance économique majeure.

« III. – Le transporteur aérien fournit dans un délai de quarante‑huit heures aux services de l’aviation civile les éléments relatifs aux motifs du retard des vols opérés en application du 22° de l’article L. 6323‑4 et du I de l’article L. 6360‑5. »

Article 5

Après l’article L. 6360‑4 du code des transports, il est inséré un article L. 6360‑7 ainsi rédigé :

« Art. L. 63607. – Un bilan des mouvements effectués au titre des I et II de l’article L. 6360‑6 est présenté chaque année, par les services de l’aviation civile, à l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires. »

TITRE II

Mesures d’Évaluation des effets sanitaires et de protÉction des populations exposÉes
au bruit aÉrien

Article 6

À titre expérimental pour une durée de 5 ans, un label relatif à la performance environnementale et sanitaire des vols commerciaux est mis en place à partir de 2025 par les compagnies aériennes. Il indique l’empreinte carbone prévue par passager, les émissions de gaz à effet de serre prévues par kilomètre et le niveau de performance acoustique de l’aéronef. Les critères et les modalités de délivrance de ce label sont précisés par décret pris après avis de l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires.

Au plus tard douze mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact du dispositif sur le choix des consommateurs et sur les performances sanitaires et environnementales des vols commercialisés par les compagnies aériennes.

Article 7

Le chapitre II du titre VII du livre V du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À l’article L. 572‑1, les mots : « fait l’objet d’actions tendant à le prévenir ou à le » sont remplacés par les mots : « l’impact sanitaire de ces émissions sonores sur la population sont évalués et font l’objet d’actions tendant à les prévenir ou à les » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 572‑3, après le mot : « environnement » sont insérés les mots : « , à estimer les effets sanitaires de l’exposition au bruit sur la population » ;

3° Au deuxième alinéa de l’article L. 572‑6, après le mot : « excessif » sont insérés les mots : « une estimation des effets sanitaires de cette exposition sur la population impactée ».

Article 8

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Conseil national du bruit et le Conseil national de l’air sont chargés de remettre au Gouvernement et au Parlement une étude épidémiologique portant sur les effets cumulés du bruit et des principaux polluants sur la santé des populations présentes sur les territoires identifiés par les différentes cartes de bruit stratégiques. Cette étude évalue notamment l’impact de ces expositions sur les femmes enceintes et les enfants.

Article 9

L’article L. 571‑14 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Les mots : « contribuent aux » sont remplacés par les mots : « remboursent les » ;

2° Le mot : « fixées » est remplacé par les mots : « et dans la limite d’un plafond fixés » ;

3° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ce plafond fait l’objet d’une revalorisation annuelle sur la base de l’évolution de l’indice des prix à la consommation ».

Article 10

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la Cour des comptes remet un rapport au Parlement sur les dispositifs alternatifs d’aide à l’insonorisation pour les propriétaires de logements situés dans le périmètre d’un plan de gêne sonore afin d’étudier l’opportunité et la faisabilité de modalités d’action pratiquées dans d’autres pays, comme le rachat d’habitations, le relogement et le versement de compensations aux riverains ou aux communes.

Article 11

L’article L. 571‑15 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute personne qui prouve, par des mesures de bruit individuelles menées chez le demandeur sur une période de quatorze jours, que les niveaux de bruit atteints pour une durée d’au moins quatre jours sont supérieurs ou égaux à ceux du plan de gêne sonore, voit son logement éligible à l’aide à l’insonorisation. »

Article 12

À l’article L. 571‑14 du code de l’environnement, après le mot : « sonores », sont insérés les mots : « tout en concourant à l’isolation thermique ».

TITRE III

Mesures visant À simplifier et renforcer le contrÔle des nuisances aÉriennes

Article 13

Le chapitre Ier du titre VI du livre III de la sixième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase de l’article L. 6361‑11, le mot : « suppléant » est remplacé par le mot : « adjoint » ;

2° L’article L. 6361‑12 est ainsi modifié :

a) Au 3°, après le mot : « aérienne » sont insérés les mots : « ou aéroportuaire » ;

b) Au sixième alinéa, les mots : « ne respectant pas » sont remplacés par les mots : « lorsque ces personnes n’ont pas respecté ».

3° L’article L. 6361‑13 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du dernier alinéa, après le mot : « amendes », sont insérés les mots : « , qui peuvent être assorties d’un sursis d’une durée maximale d’un an, » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le collège peut rendre publiques les décisions qu’il prend. Il peut également ordonner leur insertion dans des publications, journaux et supports qu’il désigne, aux frais des personnes sanctionnées. »

4° Après l’article L. 6361‑13, il est inséré un article L. 6361‑13‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6361131. – Le sursis dont le collège peut assortir une décision de sanction, en application de l’article L. 6361‑13, ne peut être ordonné à l’égard d’une personne physique ou morale que lorsque celle‑ci n’a pas été condamnée, au cours des deux années précédant les faits, pour méconnaissance de la réglementation environnementale sur et autour d’un aéroport français, à une amende d’un montant égal au plafond prévu à l’article L. 6361‑13.

« La condamnation à une amende pour méconnaissance de la réglementation environnementale sur et autour d’un aéroport français assortie du sursis est réputée non avenue si la personne qui en bénéficie n’a pas de nouveau méconnu la réglementation environnementale sur et autour d’un aéroport français, dans le délai d’un an à compter de celle‑ci.

« Le collège peut, par décision spéciale, révoquer totalement ou partiellement, pour un montant qu’il détermine, le sursis antérieurement accordé, lorsqu’il prononce une nouvelle condamnation à une peine d’amende.

« En cas de révocation du sursis, la première amende est due sans qu’elle puisse se confondre avec la seconde. »

5° L’article L. 6361‑14 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « de deux ans » sont remplacés par les mots : « d’un an » ;

b) Au début du quatrième alinéa, les mots : « L’instruction est assurée » sont remplacés par les mots : « Les compléments d’instruction demandés par le rapporteur permanent sont réalisés » ;

c) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

– au début, les mots : « Après s’être assuré que le dossier d’instruction est complet, le rapporteur permanent le notifie à la personne concernée et l’invite à présenter ses observations écrites dans un délai d’un mois, par tout moyen, y compris par voie électronique. À l’issue de cette procédure contradictoire, le rapporteur permanent clôt l’instruction et » sont remplacés par les mots : « Lorsque le dossier est en état, le rapporteur permanent ou son adjoint »

– à la deuxième phrase, les mots : « complet d’instruction à l’autorité » sont remplacés par les mots : « au collège » ;

d) La dernière phrase du cinquième alinéa est supprimée ;

e) Le sixième alinéa est supprimé ;

f) Aux septième et huitième alinéas, après le mot : « rapporteur », sont insérés les mots : « , ou son adjoint, » ;

g) Au huitième alinéa, les mots : « l’autorité » sont remplacés par les mots : « le collège » ;

h) À la fin du dernier alinéa, les mots : « et ne prennent pas part au vote » sont supprimés ;

6° Est ajoutée une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« Procédure de composition administrative devant l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires 

« Art. L. 636116. – Lorsque, dans les conditions fixées par l’article L. 6361‑14, plusieurs procès‑verbaux ont été dressés, sur une période de six mois, à l’encontre d’une même personne et lui ont été notifiés et transmis à l’autorité, le rapporteur permanent ou son adjoint peut proposer à la personne concernée d’entrer en voie de composition administrative.

« L’entrée en voie de composition administrative est conditionnée à la reconnaissance des faits par la personne concernée et au versement, par cette dernière, d’une somme au Trésor dont le montant, fixé par le rapporteur permanent ou son adjoint, ne peut excéder la somme des montants maximums des amendes encourues pour tous les manquements inclus dans le périmètre de la procédure de composition administrative.

« L’acceptation de cette proposition par la personne concernée dans les conditions posées par l’alinéa précédent interrompt le délai de prescription fixé au deuxième alinéa de l’article L. 6361‑14. L’accord conclu entre le rapporteur permanent ou son adjoint et la personne concernée est soumis, pour homologation, au collège sans que la personne mise en cause soit mise en mesure de se présenter devant lui.

« Si, à l’issue des négociations, aucun accord n’a été conclu, l’instruction du dossier se poursuit dans les conditions prévues par l’article L. 6361‑14. »

Article 14

Au premier alinéa de l’article L. 6362‑2 du code des transports, après le mot : « objet » sont insérés les mots : « d’un avis rendu public de l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires comprenant une étude de l’impact sanitaire de la modification de la circulation aérienne envisagée sur les populations, suivi ».

Article 15

Au 5° de l’article L. 6361‑7 du code des transports, après le mot : « environnement », sont insérés les mots : « , plan de prévention du bruit dans l’environnement ».

Article 16

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les effets de la nouvelle classification acoustique des aéronefs en vigueur depuis le 1er avril 2022 sur, d’une part les recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes, d’autre part les modulations tarifaires des redevances des aéroports selon les caractéristiques acoustiques des aéronefs, afin d’apprécier l’efficience de cette nouvelle classification au regard des objectifs sanitaires et environnementaux recherchés.

Article 17

Le dernier alinéa de l’article L. 422‑55 du code des impositions sur les biens et les services est complété par une phrase ainsi rédigée : « La classification acoustique des aéronefs est réévaluée au plus tard tous les cinq ans. »

Article 18

À la deuxième phrase de l’article L. 6361‑5 du code des transports, après le mot : « adéquats », sont insérés les mots : « prenant en compte des critères de durée, d’intensité, de répétitivité des nuisances »

Article 19

Le II de l’article L. 6361‑6 du code des transports est ainsi rédigé :

« II. – Dans le domaine de la pollution atmosphérique et des gaz à effet de serre générés par l’aviation, l’autorité :

« 1° S’assure que les indicateurs de la qualité de l’air sur les plateformes aéroportuaires sont suivis grâce aux moyens propres du gestionnaire ou par ceux de l’association agréée de la surveillance de la qualité de l’air compétente sur le territoire ;

« 2° S’assure de la qualité des protocoles de mesure des polluants atmosphériques effectués sur les plateformes aéroportuaires ;

« 3° Vérifie que les plateformes aéroportuaires assurent un suivi de leurs émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre ;

« 4° S’assure de la qualité des inventaires des émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre réalisés sur les plateformes aéroportuaires ;

« 5° S’assure des programmes et moyens mis en œuvre par les différents acteurs agissant sur les plateformes aéroportuaires pour limiter les émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre et respecter les prescriptions les concernant. »

Article 20

La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.