N° 1958

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant l’ouverture avancée des données judiciaires,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Philippe LATOMBE,

député.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi s’inscrit dans la continuité des États généraux de la justice, qui ont élaboré un plan de transformation numérique de la justice pour 2023‑2027, poursuivant l’objectif stratégique de « Mettre la valeur de la donnée au cœur des réflexions (open data, aide à la décision, qualité et gouvernance de la donnée) », en visant le renforcement de la politique de l’open data (données ouvertes).

La Loi d’Orientation et programmation du ministère de la justice 20232027 a acté dans son Rapport annexé la volonté du ministère de rapprocher les citoyens de leur justice, et notamment de renforcer l’accès au droit, permettant aux justiciables de mieux comprendre et de mieux s’approprier les décisions de justice. Pour atteindre ces objectifs, l’alinéa 410 du rapport annexé énonce qu’ » Afin de permettre au justiciable de mieux comprendre et de s’approprier la justice, et conformément à l’objectif d’intégrer la donnée au cœur des réflexions, de nouveaux jeux de données seront publiés en données ouvertes, notamment les conclusions des rapporteurs publics devant les juridictions administratives ainsi que les rapports publics des conseillers rapporteurs et les avis des avocats généraux près la Cour de cassation. »

La présente proposition de loi a pour ambition de concrétiser cet engagement, renforçant ainsi la confiance dans la justice.

En effet, comme le souligne la Cour européenne des droits de l’Homme, la publicité des décisions de justice « protège les justiciables contre une justice secrète échappant au contrôle du public ; elle constitue aussi l’un des moyens de contribuer à préserver la confiance dans les cours et tribunaux. Par la transparence qu’elle donne à l’administration de la justice, elle aide à atteindre le but de l’article 6 § 1 : le procès équitable, dont la garantie compte parmi les principes de toute société démocratique au sens de la Convention ».

La France a consacré cette publicité en prévoyant, aux articles L. 111‑13 du code de l’organisation judiciaire et L. 10 du code de justice administrative, la mise à disposition du public à titre gratuit sous forme électronique des décisions de justice. Cependant, la bonne compréhension des décisions de justice nécessite parfois de se référer à d’autres documents publics produits dans le cadre de la procédure juridictionnelle.

C’est pourquoi cette proposition de loi propose d’élargir la mise à disposition du public à tous les documents publics considérés comme « non détachables de la procédure juridictionnelle » et donc essentiels à la bonne publicité de la justice, comme l’a par exemple jugé le Conseil d’État (CE 26 janv. 1990, n° 104236, Vincent, Lebon).

Il s’agit ainsi pour la France d’adopter des pratiques en termes de publicité de sa procédure juridictionnelle alignées sur celles des plus hautes juridictions européennes, pour lesquelles ces documents sont systématiquement publiés.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 7 du code de justice administrative est complété par une phrase ainsi rédigée : 

« Sous réserve des dispositions particulières qui régissent l’accès aux décisions de justice et leur publicité, les conclusions du rapporteur public sont mises à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique dans les mêmes conditions que les jugements. »

Article 2

Sous réserve des dispositions particulières qui régissent l’accès aux décisions de justice et leur publicité, les rapports publics des conseillers rapporteurs et les avis des avocats généraux près la Cour de cassation sont mis à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique dans les mêmes conditions que les jugements.

Lorsqu’un arrêt est rendu dans les conditions des articles 1014 du code de procédure civile ou 567‑1‑1 du code de procédure pénale, les moyens invoqués au soutien du pourvoi sont annexés à l’arrêt lors de sa mise à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique.

Un décret précise les conditions d’application du présent article.