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N° 1972

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à la généralisation du contrat à durée indéterminée à des fins d’employabilité,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Nicolas TURQUOIS, M. Jean-Paul MATTEI, Mme Anne-Laure BABAULT, M. Erwan BALANANT, Mme Géraldine BANNIER, Mme Anne BERGANTZ, M. Philippe BERTA, M. Christophe BLANCHET, M. Philippe BOLO, M. Jean-Louis BOURLANGES, Mme Blandine BROCARD, M. Vincent BRU, M. Mickaël COSSON, M. Laurent CROIZIER, M. Jean-Pierre CUBERTAFON, Mme Geneviève DARRIEUSSECQ, M. Romain DAUBIÉ, Mme Mathilde DESJONQUÈRES, M. Laurent ESQUENET-GOXES, M. Olivier FALORNI, Mme Marina FERRARI, Mme Estelle FOLEST, M. Bruno FUCHS, Mme Maud GATEL, M. Luc GEISMAR, Mme Perrine GOULET, M. Frantz GUMBS, M. Cyrille ISAAC-SIBILLE, Mme Élodie JACQUIER-LAFORGE, Mme Sandrine JOSSO, M. Mohamed LAQHILA, Mme Florence LASSERRE, M. Philippe LATOMBE, M. Pascal LECAMP, M. Laurent LECLERCQ, Mme Delphine LINGEMANN, Mme Aude LUQUET, M. Emmanuel MANDON, M. Éric MARTINEAU, Mme Sophie METTE, M. Bruno MILLIENNE, Mme Louise MOREL, M. Hubert OTT, M. Jimmy PAHUN, M. Frédéric PETIT, Mme Maud PETIT, Mme Josy POUEYTO, M. Richard RAMOS, Mme Sabine THILLAYE, Mme Laurence VICHNIEVSKY, M. Frédéric ZGAINSKI, les membres du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) [(1)],

députés.

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2018‑771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a mis en place une expérimentation permettant de développer le contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité (contrat à durée indéterminée aux fins d’employabilité – CDIE). Cette expérimentation prendra fin le 31 décembre 2023.

La présente proposition de loi du groupe Démocrate vise à pérenniser l’expérimentation de ce dispositif innovant, dont l’objectif est de favoriser l’employabilité durable d’un public confronté à la précarité professionnelle.

Le travail à temps partagé à des fins d’employabilité représente une nouvelle forme de mise à disposition temporaire de salariés entre deux entreprises (l’entreprise de travail à temps partagé, qui embauche un salarié, et l’entreprise utilisatrice, auprès de laquelle le salarié est mis à disposition pour pallier ses besoins de recrutement). Elle place l’effort de formation au cœur du contrat de travail, en ciblant les personnes les plus éloignées d’un emploi, celles qui sont inscrites à Pôle emploi depuis au moins six mois, bénéficiaires de minima sociaux, handicapées, âgées de plus de cinquante ans ou de niveaux de formation inférieurs au bac.

Ce contrat offre pour le salarié une stabilité professionnelle résultant de la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée, d’une rémunération minimale garantie entre les missions ainsi que de possibilités élargies de formation, facilitant l’accès au logement et lui permettant, partant, de construire plus librement sa vie.

Aux termes de plusieurs années d’exécution d’une ou plusieurs missions, le salarié disposera en effet, outre l’apprentissage effectif d’un métier, d’un compte personnel de formation spécifiquement abondé par l’employeur. Le titulaire d’un CDIE pourra ensuite suivre une ou plusieurs formations, pour faire évoluer ses compétences en lien avec les évolutions du marché du travail.

Le contrat à temps partagé à des fins d’employabilité concilie donc :

– une sécurité pour le salarié, lui permettant de développer son employabilité sur une période suffisamment longue (durée moyenne des missions de trois ans) ;

– et une flexibilité socialement encadrée pour l’entreprise utilisatrice, en lui offrant le moyen de recourir à une main d’œuvre adaptée à ses besoins et à ses contraintes.

De plus, l’usage généralisé d’un tel contrat ne créé aucune dépense supplémentaire à la charge de l’État ou des collectivités locales. Comme le souligne le rapport de la mission flash de la commission des affaires sociales, menée en juillet 2023 par nos collègues Mme Fanta Berete (Renaissance) et M. Stéphane Viry (Les Républicains), le CDIE « ne coûte rien » à la collectivité. Il pourrait même constituer une économie, les salariés conservant leur rémunération pendant les périodes d’intermissions sans aucun versement complémentaire de l’assurance‑chômage.

L’expérimentation de ce dispositif, déployé sur tout le territoire en partenariat avec des organisations d’insertion professionnelle locales, régionales et nationales a permis, selon le rapport de la mission flash la conclusion d’environ 7 000 contrats. Près de 2 500 contrats seraient en cours d’exécution au 1er juillet 2023.

Signe de son succès, de nombreux acteurs du secteur du travail temporaire et de grandes entreprises françaises ont d’ailleurs décidé d’y recourir.

Animé de la conviction que personne n’a à être laissé au bord du chemin de l’insertion professionnelle, et que chacun peut être l’acteur de son rebond professionnel, le groupe Démocrate propose par le présent texte la généralisation du contrat à temps partagé à fins d’employabilité.

 


proposition de loi

Article 1er

Le chapitre II du titre V du livre II de la première partie du code du travail est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4 : Contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité

« Art. L. 125214. – I. – Sans préjudice de l’article L. 1252‑2, un entrepreneur de travail à temps partagé peut conclure un contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité avec des personnes qui rencontrent des difficultés particulières d’insertion professionnelle en vue de leur mise à disposition auprès d’entreprises utilisatrices. Peuvent conclure ce contrat :

« 1° Les personnes qui sont inscrites à Pôle emploi depuis au moins six mois ;

« 2° Les bénéficiaires de minima sociaux ;

« 3° Les personnes handicapées ;

« 4° Les personnes âgées de plus de cinquante ans ;

« 5° Les personnes ayant un niveau de formation V, V bis ou VI.

« Pendant les périodes sans exécution de mission, le dernier salaire horaire de base est garanti au salarié.

« Le contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité est un contrat à durée indéterminée. 

« II. – Le salarié bénéficie durant son temps de travail d’actions de formation prises en charge par l’entrepreneur de travail à temps partagé et sanctionnées par une certification professionnelle enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles mentionné à l’article L. 6113‑1 ou par l’acquisition d’un bloc de compétences au sens du même article L. 6113‑1.

« Sans préjudice de l’article L. 6323‑14, l’employeur abonde le compte personnel de formation à hauteur de 500 euros supplémentaires par salarié à temps complet et par année de présence. L’abondement est calculé, lorsque le salarié n’a pas effectué une durée de travail à temps complet sur l’ensemble de l’année, à due proportion du temps de travail effectué. L’employeur s’assure de la bonne information du salarié sur l’utilisation de son compte personnel de formation.

« III. – Le contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité est soumis aux dispositions des sections 2 et 3 du présent chapitre. »

Article 2

Le chapitre V du titre V du livre II de la première partie du code du travail est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4 : Contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité

« Art. L. 125519. – Est puni de 3 750 euros d’amende le fait de conclure un contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité en méconnaissance de l’article L.1252‑14.

« Art. L. 125520. – Est puni d’une amende de 3 750 euros le fait pour l’utilisateur de recourir à un salarié titulaire d’un contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité sans avoir conclu avec une entreprise de travail à temps partagé un contrat écrit de mise à disposition, dans le délai prévu à l’article L. 1251‑42.

« La récidive est punie d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 7 500 euros. »

Article 3

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

 

 


[(1)](1) Ce groupe est composé de : Mme Anne-Laure BABAULT, M. Erwan BALANANT, Mme Géraldine BANNIER, Mme Anne BERGANTZ, M. Philippe BERTA, M. Christophe BLANCHET, M. Philippe BOLO, M. Jean-Louis BOURLANGES, Mme Blandine BROCARD, M. Vincent BRU, M. Mickaël COSSON, M. Laurent CROIZIER, M. Jean-Pierre CUBERTAFON, Mme Geneviève DARRIEUSSECQ, M. Romain DAUBIÉ, Mme Mathilde DESJONQUÈRES, M. Laurent ESQUENET-GOXES, M. Olivier FALORNI, Mme Marina FERRARI, Mme Estelle FOLEST, M. Bruno FUCHS, Mme Maud GATEL, M. Luc GEISMAR, Mme Perrine GOULET, M. Frantz GUMBS, M. Cyrille ISAAC-SIBILLE, Mme Élodie JACQUIER-LAFORGE, Mme Sandrine JOSSO, M. Mohamed LAQHILA, Mme Florence LASSERRE, M. Philippe LATOMBE, M. Pascal LECAMP, M. Laurent LECLERCQ, Mme Delphine LINGEMANN, Mme Aude LUQUET, M. Emmanuel MANDON, M. Éric MARTINEAU, M. Jean-Paul MATTEI, Mme Sophie METTE, M. Bruno MILLIENNE, Mme Louise MOREL, M. Hubert OTT, M. Jimmy PAHUN, M. Frédéric PETIT, Mme Maud PETIT, Mme Josy POUEYTO, M. Richard RAMOS, Mme Sabine THILLAYE, M. Nicolas TURQUOIS, Mme Laurence VICHNIEVSKY, M. Frédéric ZGAINSKI.