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N° 2035

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 décembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre obligatoire l’affichage d’une carte de France et d’une frise chronologique dans les salles de classe,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Roger CHUDEAU, les membres du groupe Rassemblement National [(1)],

députés.

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

 

« L’histoire d’un peuple est inséparable de la contrée qu’il habite. »

Paul VIDAL DE LABLACHE, Tableau de la géographie de la France

 

L’enseignement de l’ « histoire‑géographie » occupe une place singulière dans l’histoire de l’école de la République. La France est l’unique pays à réunir ces deux disciplines en un seul enseignement tout au long de la scolarité des élèves, depuis le cours préparatoire jusqu’à l’enseignement supérieur. Cette articulation de l’histoire et de la géographie trouve ses racines dans la mission assignée à l’école républicaine : former des citoyens français. Il était donc capital d’apprendre aux élèves la façon dont la France s’est construite dans le temps et dans l’espace : les manuels d’histoire de France de Lavisse et les cartes murales de Vidal de la Blache ont nourri dans l’imaginaire de générations d’élèves la connaissance et l’amour de la patrie et ont forgé le sentiment identitaire français.

Si le contenu et les méthodes de l’enseignement de l’histoire‑géographie ont évolué, les enjeux attachés à cette discipline restent les mêmes. Il n’est pas seulement question de maîtriser les grandes dates de notre histoire et les hauts lieux de notre pays, sans lesquels on ne peut savoir ni d’où l’on vient, ni ce que l’on est. L’histoire et la géographie jouent, en France, un rôle déterminant dans la construction de la nation au sens où l’entendait Ernest RENAN : « Une nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu’on a fait et de ceux qu’on est disposé à faire encore ». Enseigner ces matières à l’école, c’est offrir aux élèves les moyens de devenir des citoyens, c’est‑à‑dire des républicains et des Français, c’est‑à‑dire les dépositaires, les héritiers, les légataires de notre civilisation.

Pendant longtemps a primé dans cet enseignement, à l’école primaire et au collège une pédagogie de l’image : on apprenait l’histoire de France sur des frises chronologiques, et la géographie sur des cartes murales, moyens simples d’offrir en permanence aux élèves une vue synthétique de la géographie et de l’histoire de notre pays.

La frise chronologique permet de situer dans le temps, la carte dans l’espace. D’un côté les évènements et les personnages clefs de notre histoire ; de l’autre, les lieux, les paysages et les ressources de notre territoire. Grâce à la frise et à la carte, on fait plus que visualiser : on mémorise. On habitude son esprit à inscrire les évènements dans une succession chronologique ou dans un ordre spatial.

A partir des années 1960‑1970, un nouveau paradigme, la « pédagogie de l’éveil », vient bouleverser l’enseignement de l’histoire‑géographie. Celui‑ci est en outre profondément modifié sur le plan épistémologique par les progrès de la recherche historique portés notamment par « l’école des Annales ». L’approche universitaire de l’Histoire s’est alors imposée comme une référence obligatoire dans l’enseignement scolaire : l’enseignement chronologique fut remplacé par des approches thématiques, la mémoire des grandes batailles et des grands hommes qui ont fait l’histoire fit place à une découverte des phénomènes culturels, économiques et sociaux. Le récit national le cède peu à peu à une forme d’analyse critique phénoménologique où les élèves de l’enseignement scolaire trouvent très difficilement des repères historiques.

L’objet de cette proposition de loi est de rendre obligatoire l’affichage d’une carte de France et d’une frise chronologique illustrant l’histoire de France dans toutes les salles de classe des écoles et collèges publics.

Loin de toute tentation nostalgique, cette proposition vise à l’inverse, à illustrer la modernité de la notion de construction de la nation française à travers les âges. Elle préfigure et annonce un projet de résolution sur l’enseignement de l’Histoire et de la Géographie dans l’enseignement scolaire.

L’objectif de cette proposition de loi est de l’ordre de la transmission des savoirs et des valeurs, tout comme elle a une portée symbolique. S’il ne revient pas au législateur d’intervenir dans la didactique d’une discipline, il est bien de sa responsabilité de veiller – à des fins de construction d’une identité citoyenne et en sorte d’assurer l’assimilation à notre civilisation et à son génie propre de tous les élèves – à ce que soit illustré de manière iconique dans chaque classe, le processus de construction de la nation française.

 


proposition de loi

Article unique

L’article L. 111‑1‑3 du Code de l’éducation est ainsi rédigé :

« Art. L. 111‑1‑3. –  L’affichage d'une carte de France et d’une frise chronologique représentant l’histoire de France est obligatoire dans chacune des salles de classe des écoles et collège publics. La carte de France représente les territoires français d'outre-mer. »

 

 


[(1)](1) Ce groupe est composé de : M. Franck ALLISIO, Mme Bénédicte AUZANOT, M. Philippe BALLARD, M. Christophe BARTHÈS, M. Romain BAUBRY, M. José BEAURAIN, M. Christophe BENTZ, M. Pierrick BERTELOOT, M. Bruno BILDE, M. Emmanuel BLAIRY, Mme Sophie BLANC, M. Frédéric BOCCALETTI, Mme Pascale BORDES, M. Jorys BOVET, M. Jérôme BUISSON, M. Frédéric CABROLIER, M. Victor CATTEAU, M. Sébastien CHENU, M. Roger CHUDEAU, Mme Caroline COLOMBIER, Mme Annick COUSIN, Mme Nathalie DA CONCEICAO CARVALHO, M. Jocelyn DESSIGNY, Mme Edwige DIAZ, Mme Sandrine DOGOR-SUCH, M. Nicolas DRAGON, Mme Christine ENGRAND, M. Frédéric FALCON, M. Grégoire DE FOURNAS, M. Thibaut FRANÇOIS, M. Thierry FRAPPÉ, Mme Stéphanie GALZY, M. Frank GILETTI, M. Yoann GILLET, M. Christian GIRARD, M. José GONZALEZ, Mme Florence GOULET, Mme Géraldine GRANGIER, M. Daniel GRENON, M. Michel GUINIOT, M. Jordan GUITTON, Mme Marine HAMELET, M. Timothée HOUSSIN, M. Laurent JACOBELLI, Mme Catherine JAOUEN, M. Alexis JOLLY, Mme Hélène LAPORTE, Mme Laure LAVALETTE, Mme Marine LE PEN, Mme Julie LECHANTEUX, Mme Gisèle LELOUIS, M. Hervé DE LÉPINAU, Mme Katiana LEVAVASSEUR, Mme Christine LOIR, M. Aurélien LOPEZ-LIGUORI, Mme Marie-France LORHO, M. Philippe LOTTIAUX, M. Alexandre LOUBET, M. Matthieu MARCHIO, Mme Michèle MARTINEZ, Mme Alexandra MASSON, M. Bryan MASSON, M. Kévin MAUVIEUX, M. Nicolas MEIZONNET, Mme Joëlle MÉLIN, Mme Yaël MENACHE, M. Thomas MÉNAGÉ, M. Pierre MEURIN, M. Serge MULLER, M. Julien ODOUL, Mme Mathilde PARIS, Mme Caroline PARMENTIER, M. Kévin PFEFFER, Mme Lisette POLLET, M. Stéphane RAMBAUD, Mme Angélique RANC, M. Julien RANCOULE, Mme Laurence ROBERT-DEHAULT, Mme Béatrice ROULLAUD, Mme Anaïs SABATINI, M. Alexandre SABATOU, M. Emeric SALMON, M. Philippe SCHRECK, M. Emmanuel TACHÉ DE LA PAGERIE, M. Jean-Philippe TANGUY, M. Michaël TAVERNE, M. Lionel TIVOLI, M. Antoine VILLEDIEU.