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N° 2267

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 mars 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à prendre des mesures d’urgence pour la santé mentale des jeunes,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Joël AVIRAGNET, Mme Chantal JOURDAN, M. Boris VALLAUD, M. Elie CALIFER, M. Arthur DELAPORTE, M. Jérôme GUEDJ, M. Christian BAPTISTE, Mme Marie-Noëlle BATTISTEL, M. Mickaël BOULOUX, M. Philippe BRUN, M. Alain DAVID, M. Stéphane DELAUTRETTE, M. Inaki ECHANIZ, M. Olivier FAURE, M. Guillaume GAROT, M. Johnny HAJJAR, Mme Marietta KARAMANLI, Mme Fatiha KELOUA HACHI, M. Gérard LESEUL, M. Philippe NAILLET, M. Bertrand PETIT, Mme Anna PIC, Mme Christine PIRES BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Valérie RABAULT, Mme Claudia ROUAUX, Mme Isabelle SANTIAGO, M. Hervé SAULIGNAC, Mme Mélanie THOMIN, Mme Cécile UNTERMAIER, M. Roger VICOT, les membres du groupe Socialistes et apparentés [(1)], Mme Sandrine JOSSO, Mme Anne-Cécile VIOLLAND, M. Jean-Carles GRELIER,

députés et députées.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Le malêtre, les dépressions et les pensées suicidaires ont beaucoup progressé chez nos jeunes. Je veux faire de la santé mentale de notre jeunesse une grande cause de notre action gouvernementale au travers, là aussi, de mesures claires et immédiates.

Tout d’abord, il s’agit de réformer le dispositif MonSoutienPsy. Il faut être lucide : il partait d’une bonne intention, mais n’a pas donné les résultats escomptés, il faut avoir le courage de le reconnaître même si c’est nous qui l’avons instauré. Je vous annonce donc que le dispositif va être rénové de fond en comble : nous allons augmenter le tarif de la consultation remboursée pour limiter au maximum le reste à charge pour les jeunes patients et leurs familles, et pour lever tous les verrous, nous permettrons aussi aux jeunes d’avoir accès directement à un psychologue sans nécessairement passer par un médecin.

De plus, nous allons mailler le territoire de maisons départementales des adolescents. Il y en a cinquante aujourd’hui : je souhaite qu’il y en ait une par département. »

Gabriel Attal, Premier ministre, lors de sa déclaration de politique générale prononcée à l’Assemblée nationale, 30 janvier 2024.

 

Les députées et députés signataires de la présente proposition de loi ne peuvent que partager le constat fait par M. le Premier ministre : l’état de santé mentale de l’ensemble de la population, et en particulier des jeunes, s’est gravement détérioré.

Cette aggravation est particulièrement visible depuis la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid‑19.

Selon les dernières données disponibles ([1]), 7 % des 18‑24 ans ont eu des pensées suicidaires en 2021, (soit un doublement en 7 ans), 1,1 % ont fait une tentative de suicide au cours de l’année écoulée, 9 % ont fait une tentative de suicide au cours de leur vie.

Par ailleurs, le nombre de passages annuels au moins une fois en court séjour à la suite d’une tentative de suicide ou d’actes d’automutilation a été multiplié par deux pour la classe d’âge des 10 à 14 ans et connaît une progression à deux chiffres dans d’autres classes d’âge (15‑20 ans par exemple) ([2]).

Enfin, on estime plus largement qu’entre deux et trois millions de jeunes Françaises et Français de moins de 19 ans souffrent de troubles de santé mentale.

Face à ce constat alarmant, plusieurs mesures d’urgence sont à prendre en parallèle de celles annoncées : ouvrir davantage de postes en pédopsychiatrie, revaloriser les professionnels de la santé mentale en milieu scolaire, en former et en recruter davantage, organiser une réponse à l’éco‑anxiété croissante chez les jeunes générations, etc.

Outre ces mesures qui ne nécessitent pas l’adoption de dispositions législatives, la présente proposition de loi a pour ambition de strictement traduire les annonces du Premier ministre faites lors de sa déclaration de politique générale du 30 janvier 2024, qui relèvent - elles - d’un niveau législatif, afin de répondre rapidement à la dégradation de l’état de santé mentale des jeunes.

*  *

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L’article 1er supprime ainsi l’obligation pour les jeunes de passer par un médecin pour accéder aux séances chez le psychologue intégralement prises en charge par l’Assurance maladie (dispositif « Mon soutien psy »).

L’article 2 reconnaît dans la loi l’existence des maisons départementales des adolescents et fixe surtout le principe d’un meilleur maillage territorial de ces maisons, en garantissant qu’il y ait au moins une de ces maisons dans chaque département.

L’article 3 vise à gager les coûts de la présente proposition de loi.

 

 


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proposition de loi

Article 1er

Après le 2° du I de l’article L. 162‑58 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les assurés sociaux de moins de vingt‑six ans ne sont pas concernés par la condition d’adressage mentionnée au 2°. »

Article 2

Après le chapitre V du titre II du livre III de la deuxième partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre V bis ainsi rédigé :

« Chapitre V bis

« Maisons des adolescents

« Art. L. 23258. – Les maisons des adolescents sont des établissements pluridisciplinaires dont l’objectif est d’apporter une réponse globale aux problématiques physique, psychique, relationnelle, sociale et éducative des adolescents, de leurs proches et des professionnels. Elles ont pour mission l’accueil individuel et collectif des adolescents et de leurs proches, le partage de ressources, et la coordination des acteurs.

« Art. L. 23259. – Est instituée, dans chaque département, une maison des adolescents. La personne physique ou morale qui gère une maison d’adolescents mentionnée à l’article L. 2325‑8 conclut un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens avec le ou les présidents du conseil départemental et le directeur général de l’agence régionale de santé concernés, qui fixe son statut et son mode de gouvernance.

« Son financement est principalement assuré par l’agence régionale de santé et par le conseil départemental territorialement compétents.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article et notamment, les missions des maisons d’adolescents, les professionnels compétents pour y exercer et les acteurs pouvant contribuer à leur financement. »

Article 3

I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

 

 


([1])  Résultats de l’enquête Baromètre 2021, publié dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH).

([2])  Source : Données PMSI – PSY fournies par l’ATIH.


[(1)](1) Ce groupe est composé de : M. Joël AVIRAGNET, M. Christian BAPTISTE, Mme Marie-Noëlle BATTISTEL, M. Mickaël BOULOUX, M. Philippe BRUN, M. Elie CALIFER, M. Alain DAVID, M. Arthur DELAPORTE, M. Stéphane DELAUTRETTE, M. Inaki ECHANIZ, M. Olivier FAURE, M. Guillaume GAROT, M. Jérôme GUEDJ, M. Johnny HAJJAR, Mme Chantal JOURDAN, Mme Marietta KARAMANLI, Mme Fatiha KELOUA HACHI, M. Gérard LESEUL, M. Philippe NAILLET, M. Bertrand PETIT, Mme Anna PIC, Mme Christine PIRES BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Valérie RABAULT, Mme Claudia ROUAUX, Mme Isabelle SANTIAGO, M. Hervé SAULIGNAC, Mme Mélanie THOMIN, Mme Cécile UNTERMAIER, M. Boris VALLAUD, M. Roger VICOT.