N° 2492

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 avril 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à sécuriser la vente de plaques d’immatriculation,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Luc GEISMAR,

député.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’usurpation de plaques d’immatriculation est une pratique de plus en plus répandue depuis une dizaine d’années : alors que moins de 13 600 cas ont été rapportés par les forces de l’ordre en 2010, 22 008 délits de « doublettes » ont été enregistrés par le ministère de l’intérieur en 2022, soit une augmentation de 62 %. De leur côté, les professionnels du domaine estiment même désormais qu’entre 400 000 et un million de Français seraient victimes chaque année de ces agissements.

Le fait d’utiliser sur un véhicule des plaques comportant le numéro d’immatriculation d’un autre véhicule – pratique aussi appelée « doublette » – est un délit sanctionné d’un retrait de six points sur le permis de conduire, d’une amende d’un montant maximum de 30 000 euros et d’une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de 7 ans, au titre des peines principales. Le délit peut également entraîner les peines complémentaires suivantes : la suspension du permis de conduire pendant 3 ans (au maximum), l’annulation du permis de conduire et la confiscation du véhicule (article L. 317‑4‑1 du code de la route).

Malgré ces lourdes peines, cette pratique frauduleuse gagne du terrain d’année en année. Elle s’est développée en France en même temps que le système de contrôle‑sanction automatisé et le nombre d’infractions pouvant être verbalisées « à la volée », c’est‑à‑dire sans l’interception du conducteur. Les délinquants ont de plus en plus recours à l’usurpation de plaque d’immatriculation pour échapper à la verbalisation des infractions qu’ils commettent sur la route et passer ainsi au travers de l’appareil répressif.

De plus, avec la dématérialisation de la vignette d’assurance automobile à compter du 1er avril 2024, les contrôles relatifs à l’assurance des véhicules se baseront désormais sur la consultation par les forces de l’ordre du Fichier des Véhicules assurés (FVA) à partir du numéro de la plaque d’immatriculation portée par le véhicule. Si cette disposition légale est un pas en avant indéniable vers la simplification des démarches administratives qui s’imposent aux automobilistes, elle porte également le risque de voir à nouveau s’accroître le nombre d’usurpation de plaques.

Au‑delà du danger évident qu’ils représentent pour la société et les autres usagers de la route, les délinquants qui utilisent des doublettes font peser sur d’autres les conséquences financières et pénales de leurs actes. De plus, les victimes d’usurpation de plaques sont contraintes à des démarches administratives (déclaration en préfecture, ré‑immatriculation du véhicule, achat et pose de nouvelles plaques d’immatriculation) et judiciaires (contestation des avis de contravention auprès de l’OMP, dépôt de plainte…) longues et parfois coûteuses : entre les envois en « recommandé avec avis de réception » de la requête en exonération, les frais de dossier pour obtenir un nouveau numéro d’immatriculation et l’achat‑pose des nouvelles plaques correspondantes, le coût des démarches permettant à la victime de faire reconnaître son innocence est même supérieur à celui de l’amende !

La multiplication des cas d’usurpation de plaque est favorisée par la simplicité avec laquelle n’importe quel automobiliste peut se procurer une plaque d’immatriculation : les sites marchands proposant la fabrication à la demande de plaque d’immatriculation fleurissent sur Internet, sans aucun contrôle ni contrainte réglementaire. Le plus souvent, il suffit en effet pour le client de renseigner le numéro d’immatriculation et les options souhaitées (matériaux et fixation de la plaque), et il recevra en quelques jours à son domicile un jeu de plaques flambant neuf pour moins d’une trentaine d’euros. À aucun moment il n’aura eu à justifier de la correspondance du numéro demandé avec celui figurant sur le certificat d’immatriculation de son véhicule. À ce jour, chacun peut ainsi légalement acheter des plaques d’immatriculation dont le numéro identifie un autre véhicule que le sien.

Aussi, pour sécuriser la fabrication et l’achat de plaques d’immatriculation et réduire les cas d’usurpation de plaques d’immatriculation, nous proposons de rendre obligatoire, pour tout achat de plaques d’immatriculation sur un site Internet marchand ou en magasin, la présentation systématique d’une pièce d’identité et du certificat d’immatriculation correspondant au numéro demandé. En cas de refus ou d’impossibilité pour le client de fournir ces documents, le produit ne pourra pas être fabriqué et/ou vendu.

 


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proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 317‑2 du code de la route, il est inséré un article L. 317‑2‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 31721.  Toute personne souhaitant acquérir une plaque d’immatriculation de véhicule en magasin ou sur un site internet marchand est tenue de présenter au commerçant une pièce d’identité et le certificat d’immatriculation du véhicule, ou d’en fournir une copie si l’achat se fait à distance. Dans le cas où l’acheteur refuse ou n’est pas en mesure de fournir ces documents, la fabrication et la vente de la plaque ne peuvent avoir lieu. Le fait de contrevenir aux dispositions du présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. »