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N° 2343

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIziÈme LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 mars 2024.

 

TEXTE DE LA COMMISSION
des lois constitutionnelles, de la lÉgislation et de l’administration gÉnÉrale de la RÉpublique

ANNEXE AU RAPPORT

PROPOSITION  DE  LOI

 

visant à prévenir les ingérences étrangères en France

(Première lecture)

Voir le numéro : 2150.


1

Article 1er

La loi n° 2013‑907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° Après la section 3 bis du chapitre Ier, est insérée une section 3 ter ainsi rédigée :

« Section 3 ter

« Répertoire numérique des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger

« Art. 1811. – Un répertoire numérique assure l’information des citoyens sur l’action des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger.

« Ce répertoire est rendu public par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Cette publication s’effectue dans un format ouvert librement utilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, dans les conditions prévues au titre II du livre III du code des relations entre le public et l’administration.

« Ce répertoire fait état, pour chaque représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, des informations communiquées en application de l’article 18‑3 de la présente loi. Il est commun à la Haute Autorité, l’Assemblée nationale et au Sénat.

« Art. 1812. – (Supprimé)

« Art. 18121 (nouveau). – I. – Sont des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, au sens de la présente section, les personnes physiques ou morales exerçant, sur l’ordre, à la demande ou sous la direction ou le contrôle d’un mandant étranger mentionné au II et aux fins de promouvoir ses intérêts, une ou plusieurs des activités suivantes :

« 1° Influer sur la décision publique, notamment sur la loi ou sur le règlement, en entrant en communication avec une ou plusieurs personnes mentionnées aux 1° à 7° de l’article 18‑2, à l’initiative de ces personnes ou de sa propre initiative ;

« 2° Réaliser toute action de communication à destination du public ;

« 3° Collecter des fonds ou procéder au versement de fonds sans contrepartie.

« II. – Sont des mandants étrangers, au sens de la présente section :

« 1° Les puissances étrangères ;

« 2° Les personnes morales qui sont directement ou indirectement dirigées ou contrôlées par une puissance étrangère ou dont les ressources sont financées pour plus de la moitié par une puissance étrangère ;

« 3° Les organisations politiques étrangères.

« III. – Ne sont pas des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, au sens de la présente section :

« 1° Les membres du personnel diplomatique et consulaire en poste en France, les fonctionnaires d’un État étranger et les personnes assimilées ;

« 2° Les avocats, lorsqu’ils réalisent des prestations d’assistance ou de représentation des parties devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires ;

« 3° Les associations à objet cultuel ;

« 4° Les entreprises éditrices mentionnées à l’article 2 de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse.

« Art. 1813. – I. – Tout représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger communique à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, par l’intermédiaire d’un téléservice, les informations suivantes :

« 1° Son identité, lorsqu’il s’agit d’une personne physique, ou celle de ses dirigeants et des personnes physiques chargées des activités de représentation d’intérêts en son sein, lorsqu’il s’agit d’une personne morale ;

« 2° Le nom et l’adresse de chacun des mandants étrangers pour le compte desquels il agit ;

« 3° Le contenu de l’accord liant le représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger et le mandant étranger ;

« 4° Le nombre de personnes employées dans l’accomplissement des activités mentionnées au I de l’article 18‑12‑1 et, le cas échéant, le chiffre d’affaires de l’année précédente ;

« 5° Les actions réalisées, notamment :

« a) S’agissant des activités mentionnées au 1° du même I, les actions d’influence menées auprès des personnes mentionnées aux 1° à 7° de l’article 18‑2, en précisant notamment la fonction des personnes contactées, l’intitulé, l’objet ou la référence de la décision publique concernée et le type d’actions menées ainsi que le montant des dépenses liées à ces actions durant l’année précédente ;

« b) S’agissant des activités mentionnées au 2° du I de l’article 18‑12‑1, la liste des actions de communication réalisées et les informations communiquées ;

« c) S’agissant des activités mentionnées au 3° du même I, la liste des opérations de collecte de fonds et des personnes bénéficiaires des versements opérés, le cas échéant.

« II. – Tout représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger communique à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle les conditions définies à l’article 18‑12‑1 sont remplies, les informations figurant aux 1° à 3° du I du présent article.

« Le représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger communique ensuite l’ensemble des informations mentionnées au même I dans un délai d’un mois à compter de la fin de chaque semestre civil, à l’exception du chiffre d’affaires mentionné au 4° et du montant des dépenses mentionnées au 5° dudit I, qui sont communiqués dans un délai de trois mois à compter de la clôture de son exercice comptable.

« Un décret en Conseil d’État, pris après un avis public de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, précise :

« 1° Les modalités des communications prévues au présent article ainsi que les conditions de publication des informations correspondantes ;

«  Les modalités de présentation des activités du représentant d’intérêts.

« Art. 18131 (nouveau). – Les règles applicables aux représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger au sein de chaque assemblée parlementaire sont déterminées et mises en œuvre dans les conditions prévues à l’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58‑1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

« Art. 1813-2 (nouveau). – Les obligations prévues à l’article 18‑5 sont applicables aux représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger dans le cadre des activités mentionnées au 1° du I de l’article 18‑12-1, lorsqu’ils réalisent de telles activités.

« Art. 1814. – La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’assure du respect des obligations prévues aux articles 18‑13 et 18‑13-2. Aux fins de contrôler leur respect, elle peut faire usage des prérogatives prévues à l’article 18‑6.

« Lorsqu’elle constate un manquement aux obligations prévues aux articles 18‑13 et 18‑13-2, elle :

« 1° Adresse au représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger concerné une mise en demeure, qu’elle peut rendre publique, de respecter les obligations auxquelles il est assujetti, après l’avoir mis en état de présenter ses observations ;

« 2° Avise la personne mentionnée aux 1° et 3° à 7° de l’article 18‑2 qui a répondu favorablement à une sollicitation effectuée par un représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger mentionné au 1° du présent article et, le cas échéant, lui adresse des observations, sans les rendre publiques.

« Art. 1815. – Le fait, pour un représentant d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, de ne pas communiquer, de sa propre initiative ou à la demande de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, les informations qu’il est tenu de communiquer à cette dernière en application de l’article 18‑13 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

« Art. 1816. – Lorsqu’une personne physique ou morale remplit simultanément les conditions pour être qualifiée de représentant d’intérêts au sens de l’article 18‑2 et de représentant d’intérêts agissant pour un mandant étranger au sens de l’article 18‑12‑1 et qu’elle s’est régulièrement acquittée des obligations prévues à la présente section, les obligations prévues à la section 3 bis du présent chapitre sont réputées remplies, au titre des seules actions qu’elle a régulièrement déclarées.

« Lorsqu’une personne physique ou morale qui remplit simultanément les conditions pour être qualifiée de représentant d’intérêts au sens de l’article 18‑2 et de représentant d’intérêts agissant pour un mandant étranger au sens de l’article 18‑12‑1 ne s’est pas régulièrement acquittée des obligations prévues à la présente section, les manquements constatés ne peuvent être réprimés que sur le fondement de l’article 18‑15.

« Art. 1817. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, définit les modalités de mise en œuvre de la présente section. » ;

2° À la seconde phrase du 5° du I de l’article 20, après la référence : « 18‑2, », sont insérés les mots : « les relations avec les représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, au sens de l’article 18‑12‑1 ».

Article 2

Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 111‑3 ainsi rédigé :

« Art. L. 1113.  Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er juillet de l’année qui suit celle de la promulgation de la loi n°     du      visant à prévenir les ingérences étrangères en France, puis tous les deux ans, un rapport sur l’état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale. Ce rapport, qui fait état des menaces résultant d’ingérences étrangères, peut faire l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat. »

Article 3

I.  L’article L. 8513 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du I est ainsi modifié :  

a) Les mots : « seuls besoins de la prévention du terrorisme » sont remplacés par les mots : « seules finalités prévues aux 1°, 2° et 4° de l’article L. 811‑3 » ;

b) Sont ajoutés les mots : « ou toute forme d’ingérence ou de tentative d’ingérence étrangère » ;

2° À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa du IV, les mots : « à caractère terroriste » sont supprimés.

II.  Le I est applicable pendant une durée de quatre ans à compter de la promulgation de la présente loi.

III.  Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application du présent article au plus tard six mois avant la fin de la période prévue au II. Ce rapport détaille les conséquences de l’élargissement des finalités justifiant le recours à cette technique sur l’efficacité de cet outil dans la lutte contre le terrorisme et, plus précisément, la variation induite de la masse des données traitées et du nombre d’accès recensés.

Article 4

Le chapitre II du titre VI du livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le 1° de l’article L. 562‑1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis “Acte d’ingérence” : l’intervention délibérée d’une personne physique ou morale agissant au nom ou pour le compte d’une puissance étrangère visant à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, à la sécurité économique, aux systèmes d’information, à la sincérité des scrutins ou à diffuser intentionnellement de fausses informations de nature à perturber le fonctionnement régulier des institutions ou le débat démocratique ; »

2° Au 1° de l’article L. 562‑2, après le mot : « terrorisme », sont insérés les mots : « ou des actes d’ingérence ».