– 1 –

N° 378

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 octobre 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à mieux protéger la société des étrangers clandestins dangereux et à faciliter leur expulsion,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Laurent WAUQUIEZ, M. Fabien DI FILIPPO, M. Thibault BAZIN, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, M. Jean-Didier BERGER, Mme Anne-Laure BLIN, Mme Sylvie BONNET, Mme Émilie BONNIVARD, M. Jean-Yves BONY, M. Ian BOUCARD, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Xavier BRETON, M. Hubert BRIGAND, M. Fabrice BRUN, M. François-Xavier CECCOLI, M. Pierre CORDIER, Mme Josiane CORNELOUP, M. Vincent DESCOEUR, M. Julien DIVE, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. Nicolas FORISSIER, M. Philippe GOSSELIN, Mme Justine GRUET, M. Michel HERBILLON, M. Vincent JEANBRUN, M. Philippe JUVIN, M. Corentin LE FUR, M. Guillaume LEPERS, Mme Véronique LOUWAGIE, M. Olivier MARLEIX, Mme Alexandra MARTIN, Mme Frédérique MEUNIER, M. Yannick NEUDER, M. Jérôme NURY, M. Éric PAUGET, Mme Christelle PETEX, M. Nicolas RAY, M. Vincent ROLLAND, Mme Michèle TABAROT, M. Jean-Pierre TAITE, M. Jean-Louis THIÉRIOT, M. Antoine VERMOREL-MARQUES, M. Jean-Pierre VIGIER,

députés.

 


– 1 –

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Entre 2018 et 2021, le nombre d’obligations de quitter le territoire français (OQTF) a dépassé chaque année les 100 000, avec un pic en 2021 (124 111 OQTF prononcées). Or, la France figure parmi les pays d’Europe avec la plus faible proportion d’OQTF effectuées.

Dans un rapport à la Cour des comptes publié le 4 janvier 2024, le gouvernement a rendu public le nombre d’étrangers soumis à une « obligation de quitter le territoire français ». Ainsi, entre 2019 et 2022, les préfets ont prononcé 447 257 obligations de quitter le territoire français : sur les cinq dernières années, le nombre d’OQTF délivrées a donc augmenté de 60 %. Mais moins de 10 %, de ces obligations de quitter le territoire français a été exécutée.

Environ 700 000 personnes sous OQTF ou ayant déjà fait l’objet d’une OQTF seraient actuellement sur le territoire national.

Malheureusement, l’absence d’exécution de ces OQTF mène parfois à de véritables drames.

Notre pays a été maintes fois endeuillé ces dernières années, alors que plusieurs de nos concitoyens, parfois même des enfants, ont été tués par des personnes qui faisaient l’objet depuis parfois plusieurs semaines ou plusieurs mois d’une mesure d’éloignement.

Certaines d’entre elles avaient été relâchées des centres de rétention administrative (CRA) dans lesquels elles étaient maintenues dans l’attente de leur expulsion, parce que les délais légaux étaient dépassés, ou parce‑que le juge n’avait pas été en mesure de justifier la prolongation de leur maintien en rétention.

Ce type de situation est intolérable. La France doit impérativement agir pour que des personnes ayant violé nos lois et nos frontières, et représentant pour une partie d’entre elles un grave danger pour nos concitoyens, ne puissent circuler en liberté et commettre des crimes alors même qu’elles ont l’obligation de quitter le territoire français.

Actuellement, la durée de rétention administrative ne peut excéder 90 jours (hors activités terroristes). Le placement en rétention est d’abord décidé pour une durée de 4 jours, puis le juge doit choisir de prolonger ou refuser la prolongation pour une durée de 26 jours. Il peut ensuite ordonner une prolongation de la rétention de 30 jours supplémentaires, en cas d’urgence absolue (risque de fuite…), menace pour l’ordre public, renvoi impossible (perte ou destruction volontaire du passeport, laissez‑passer qui n’a pas été délivré par le consulat du pays d’origine, pas de moyens de transport…)

Deux prolongations supplémentaires de 15 jours peuvent ensuite être ordonnées s’il y a obstruction à l’exécution de la mesure d’éloignement, présentation d’une demande d’asile, absence de délivrance des documents de voyage par le consulat, urgence absolue ou menace à l’ordre public

Dans tous les cas, la rétention ne peut pas durer plus de 90 jours au total.

Il est essentiel de modifier ces dispositions juridiques, notamment pour les individus qui présentent une menace à l’ordre public ou qui ont fait l’objet d’une condamnation pénale récente.

Concernant le ressortissant marocain sous OQTF qui a tué la jeune Philippine le 20 septembre dernier, le fait que son maintien en centre de rétention administrative ait été automatiquement remis en question pour les 15 derniers jours et que le juge n’ait pas ordonné ce maintien a mené à sa libération et à un drame absolu

La présente proposition de loi supprime donc les obligations de justification jusqu’à 90 jours de rétention et allonge les durées maximales de rétention, en droit commun et pour les personnes ayant été condamnées pour des crimes.

Les articles 1 et 2 portent la durée maximale de rétention des immigrés en situation irrégulière à 135 jours au lieu des 90 prévus actuellement, sans qu’aucune justification ne doive être apportée avant 90 jours.

L’article 3 supprime la possibilité pour un juge de décider de ne pas maintenir en rétention un individu au prétexte qu’il n’est pas établi que la délivrance de ses documents de voyage par le consulat dont il relève interviendra dans un délai bref.

L’article 4 porte à 210 jours la durée maximale de rétention pour un étranger condamné pour un crime, comme le droit actuel le prévoit pour les étrangers condamnés pour des actes à caractère terroriste.

Le placement en rétention des étrangers contrôlés en situation irrégulière doit devenir la règle et non plus l’exception. Le respect de nos lois et la protection de nos concitoyens doivent constituer des priorités absolues.

 


– 1 –

proposition de loi

Article 1er

À l’article L. 742‑3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « de vingt‑six » sont remplacés par les mots : « maximale de cent trente‑et‑un ».

Article 2

L’article L. 742‑4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé : « Lorsque la durée de rétention dépasse quatre‑vingt‑dix jours, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742‑1, justifier le maintien en rétention : «

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé : « Sa durée maximale de rétention est alors de cent trente‑cinq jours. »

Article 3

À la fin du 3° de l’article L. 742‑5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai » sont supprimés.

Article 4

L’article L. 742‑6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 7426.  La durée maximale de la rétention est de deux‑cent dix jours au maximum, sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire n’ait à apporter de justification, pour l’étranger qui a été condamné à une peine d’interdiction du territoire pour des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal ou pour la commission d’un crime ou qui a fait l’objet d’une décision d’expulsion édictée pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement constatées ou pour la commission d’un crime.« L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742‑2. »