N° 398
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 octobre 2024.
PROPOSITION DE LOI
visant à réduire l’imposition et à alléger les taxes pesant sur les successions et à faciliter la transmission de patrimoine aux jeunes générations,
(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Éric PAUGET, M. Thibault BAZIN, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, Mme Anne-Laure BLIN, M. Jean-Yves BONY, Mme Virginie DUBY-MULLER, Mme Justine GRUET, M. Philippe JUVIN, M. Corentin LE FUR, Mme Véronique LOUWAGIE, Mme Christelle PETEX, M. Vincent ROLLAND, Mme Michèle TABAROT, M. Jean-Pierre TAITE, M. François-Xavier CECCOLI, M. Nicolas FORISSIER, M. Vincent DESCOEUR,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Un patrimoine, c’est le fruit du travail de toute une vie et tout le monde s’accorde à dire que nous aspirons à la liberté de le transmettre à nos enfants, à un membre de la famille, à un proche.
Or, la France est, avec ses 45 % de taux d’imposition des successions en ligne directe, le pays avec le taux le plus élevé d’Europe (30 % en Allemagne, 15 % au Danemark et même 4 % en Italie). Notre pays commence à taxer le patrimoine à partir de 8 700 euros à hauteur de 5 % et les taux montent jusqu’à 45 % au‑delà d’un peu plus de 1 800 000 euros.
Les taux sont punitifs sur les successions et les donations et le contraste au sein de l’Union européenne, saisissant.
Il est le troisième taux le plus élevé du monde après celui du Japon (55 %) et de la Corée du Sud (50 %).
C’est la raison pour laquelle je souhaite une baisse drastique de cette fiscalité confiscatoire.
Par ailleurs, nous le savons tous, la France, avec un taux d’épargne de 17 %, rapport entre la capacité de financement des ménages et le revenu disponible brut, fait partie des pays de la zone euro où ce taux est le plus élevé.
Enfin, selon les chiffres de la Banque de France, l’argent détenu sur les comptes courant qui ne sont pas rémunérés, représentent 751 milliards d’euros, soit 12,1 % de l’épargne des Français.
Il est donc temps d’encourager les donations afin de réinjecter ce véritable capital dormant dans l’économie réelle et de relancer ainsi la consommation des ménages et l’investissement.
Aussi, dans la perspective de réduire cette imposition et d’encourager les donations, la présente proposition de loi se veut articulée autour de deux axes majeurs, prévoyant de :
‑ faciliter la transmission de patrimoine en rétablissant les facilités de transmission de patrimoine, notamment les donations, dans le cadre des droits de succession (Chapitre I) ;
‑ supprimer le droit de partage (Chapitre II) ;
Le chapitre Ier de la présente proposition de loi souhaite en matière de transmission de patrimoine revenir sur la suppression par M. François Hollande des facilités consenties en matière de succession et de donation en allant plus loin.
Ainsi, dans son article 1, elle modifie en conséquence l’article 779 et 788 du code général des impôts (CGI) et propose de porter l’abattement fiscal, pour les donations ou succession en ligne directe entre parent et enfant, de 100 000 euros à 200 000 euros.
Cet abattement sera applicable tous les 10 ans, au lieu des 15 ans prévus par l’article 784 du code général des impôts (CGI) actuellement en vigueur, pour offrir la possibilité de transmission dans un laps de temps plus réduit, en franchise de droit, à un même bénéficiaire.
En ligne indirecte (neveux…), il porte l’abattement à 150 000 euros et un abattement pour la perception des droits de mutation à titre gratuit passe à 30 000 euros au lieu de 7 967 euros.
Enfin, dans le cadre des droits de mutation par décès, il porte l’abattement de 1 594 euros opéré sur chaque part successorale à 10 000 euros.
De même, la possibilité de donation prévue à l’article 790 dudit code et qui concerne les donations de sommes d’argent exonérées d’impôts et limitée à 31 865 euros est portée de 15 ans à 10 ans.
Alors que la loi de 2007 la loi n° 2007‑1223 du 21 août 2007, « en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat » dite Loi TEPA, prévoyait la revalorisation annuelle des barèmes applicables pour les droits de succession et donation (article 777 du CGI) avant d’être supprimée par le gouvernement socialiste de M. François Hollande, l’article 2 de la présente proposition de loi rétablit la réactualisation annuelle des abattements, suivant ainsi l’évolution du taux d’inflation.
Enfin, parmi toutes les impositions et taxes qui pénalisent la bonne transmission des patrimoines, figure le « droit de partage » qui vient s’ajouter aux droits de succession comme une taxe sur les droits déjà trop lourds à acquitter.
La particularité, hélas bien française du « mille‑feuille fiscal » s’applique là encore, comme en matière de taxes appliquées aux dépenses énergétiques, et nos compatriotes subissent une double peine fiscale !
En effet, aux termes de l’article 746 du code général des impôts, les partages de biens meubles et immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés, à quelque titre que ce soit, pourvu qu’il en soit justifié, sont assujettis à un droit d’enregistrement ou à une taxe de publicité foncière de 2,50 %.
Il est à noter que ce droit de partage n’est pas d’application homogène bien que s’appliquant à toutes les hypothèses de partage d’un bien, car il intervient très principalement à la suite d’une succession, mais concerne plus accessoirement les situations de divorce, de Pacs ou de concubinage.
Enfin, le droit de partage étant un droit d’acte, en l’absence de partage écrit, le droit de partage n’est pas dû, ce qui est source d’insécurité juridique.
Il existe donc bien là une « double peine » imposée aux héritiers obligés de s’acquitter du droit de partage en sus des droits de succession à laquelle s’ajoute cette insécurité juridique que vivent les personnes qui ont opté pour le partage non écrit.
Surtaxation des successions, disparité d’application de la taxe, insécurité juridique, sont les raisons qui plaident en faveur de la suppression pure et simple des droits de partage.
Aussi, le Chapitre II de la présente proposition de loi supprime le droit de partage et allège ainsi les taxes pesant sur les successions en modifiant la section II du chapitre premier du titre IV du code général des impôts (CGI) (articles 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12).
Tel est, Mesdames, Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi que je vous demande de bien vouloir adopter.
– 1 –
proposition de loi
Chapitre I
Transmission de patrimoine
Article 1er
Le C du VI de la section II du chapitre premier du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 779 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, le montant : « 100 000 euros » est remplacé par le montant : « 200 000 euros » ;
b) Au premier alinéa du IV, le montant : « 15 932 euros » est remplacé par le montant : « 150 000 euros » ;
c) Au V, le montant : « 7 967 euros » est remplacé par le montant : « 30 000 euros » ;
2° Au deuxième alinéa de l’article 784, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix » ;
3° Au IV de l’article 788, le montant : « 1 594 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros » ;
4° Au premier alinéa du I de l’article 790 G, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix ».
Article 2
Le C du VI de la section II du titre IV du livre Ier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 777 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les limites des tranches des tarifs prévus aux tableaux ci‑dessus sont actualisées au 1er janvier de chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu et arrondies à l’euro le plus proche. » ;
2° Le VI de l’article 779 est ainsi rétabli :
« VI. – Le montant des abattements du présent article est actualisé au 1er janvier de chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche de l’impôt sur le revenu et arrondi à l’euro le plus proche. »
Chapitre II
Supprimer le droit de partage et alléger les taxes pesant sur les successions
Article 3
L’article 746 du code général des impôts est abrogé.
Article 4
L’article 747 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° La première phrase est supprimée ;
2° La seconde phrase est ainsi modifiée :
a) Au début, les mots : « Lorsque le partage comporte » sont remplacés par les mots : « En cas de partage comportant » ;
b) Après le mot : « perçu », sont insérés les mots : « sur la soulte ou la plus‑value ».
Article 5
La dernière phrase de l’article 748 du code général des impôts est supprimée.
Article 6
L’article 748 bis du code général des impôts est abrogé.
Article 7
Au début du second alinéa de l’article 749 du code général des impôts, sont ajoutés les mots : « En cas de rachats de parts de fonds communs de placement et parts de fonds de placement immobilier ou de répartition des actifs de ces fonds entre les porteurs et ».
Article 8
Les articles 749 A et 749 B du code général des impôts sont abrogés.
Article 9
À la première phrase du premier alinéa du II de l’article 750 du code général des impôts, les mots : « assujetties à un droit d’enregistrement ou à une taxe de publicité foncière de 2,50 % » sont remplacés par les mots : « exonérées de ce même impôt ».
Article 10
Le second alinéa du II de l’article 750 du code général des impôts est supprimé.
Article 11
À l’article 750 bis du code général des impôts, les mots : « assujettie au droit d’enregistrement ou à la taxe de publicité foncière prévu à l’article 746 » sont remplacés par les mots : « exonérée de l’impôt mentionné au I de l’article 750 ».
Article 12
Les articles 750 bis A, 750 bis B et 750 bis C du code général des impôts sont abrogés.
Article 13
La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.