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N° 666
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 décembre 2024.
PROPOSITION DE LOI
visant à renforcer la démographie professionnelle des orthophonistes,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Agnès FIRMIN LE BODO, M. Joël AVIRAGNET, Mme Aurore BERGÉ, Mme Sylvie BONNET, Mme Émilie BONNIVARD, M. Ian BOUCARD, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Anthony BROSSE, Mme Danielle BRULEBOIS, M. Joël BRUNEAU, Mme Danièle CARTERON, M. Michel CASTELLANI, M. Salvatore CASTIGLIONE, M. Jean-René CAZENEUVE, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, M. Charles DE COURSON, M. Laurent CROIZIER, Mme Sophie DELORME DURET, Mme Julie DELPECH, Mme Nicole DUBRÉ-CHIRAT, M. Philippe FAIT, M. Philippe GOSSELIN, M. Jean-Carles GRELIER, M. Timothée HOUSSIN, M. Cyrille ISAAC-SIBILLE, M. Jean-Michel JACQUES, Mme Sandrine JOSSO, M. Loïc KERVRAN, Mme Sandrine LE FEUR, Mme Anne LE HÉNANFF, M. Corentin LE FUR, Mme Pauline LEVASSEUR, Mme Lise MAGNIER, M. Christophe MARION, Mme Alexandra MARTIN, M. Denis MASSÉGLIA, M. Laurent MAZAURY, Mme Isabelle MESNARD, M. Christophe NAEGELEN, M. Yannick NEUDER, M. Hubert OTT, M. Didier PADEY, Mme Sophie PANONACLE, Mme Maud PETIT, M. Aurélien PRADIÉ, Mme Isabelle RAUCH, M. Nicolas RAY, M. Jean-François ROUSSET, Mme Violette SPILLEBOUT, M. Vincent THIÉBAUT, M. Frédéric VALLETOUX, Mme Annie VIDAL, M. Philippe VIGIER, Mme Corinne VIGNON, Mme Anne-Cécile VIOLLAND, M. Stéphane VIRY,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’embolisation des cabinets d’orthophonie n’a jamais été telle. Listes d’attente à rallonge et messageries téléphoniques pleines constituent le quotidien de patients en attente de soins orthophoniques qui désespèrent de trouver un professionnel de santé. Au‑delà du renoncement aux soins et de l’aggravation des troubles engendrés, c’est la promesse républicaine toute entière, d’un système de protection sociale efficace, qui se trouve confrontée à ses propres errements. D’une augmentation constante des demandes de soins conjuguée à une démographie professionnelle atone résulte la situation que nous connaissons.
21 172 orthophonistes exercent en libéral selon les dernières données, ce qui représente une moyenne de 30 orthophonistes pour 100 000 habitants. Cette situation n’a que peu évolué ces dernières années, puisque l’on en recensait 20 044 il y a cinq ans ; soit une faible augmentation du nombre de professionnels en activité de près de 1 % par an.
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Avec un enrichissement des connaissances scientifiques constant ces deux dernières décennies, le champ d’exercice des orthophonistes a été élargi et approfondi.
Professionnel de premier recours, compétent pour l’évaluation et la rééducation des troubles de la communication, de la voix, du langage et de la déglutition à tous les âges de la vie ; l’orthophoniste dispose d’une expertise reconnue, reposant sur des connaissances anatomiques, physiologiques et thérapeutiques solides. Il intervient au quotidien dans le cadre du handicap, de la prématurité, de la fin de vie, des traumatismes crânio‑cérébraux, des accidents vasculaires cérébraux, des soins intensifs, des tumeurs cérébrales, des maladies neurodégénératives et des cancers, notamment des voies aéro‑digestives supérieures.
Ce champ d’action en permanente évolution se couple d’une exigence de prise en soins toujours plus grande, qui se traduit par des projets thérapeutiques de plus en plus exigeants. Dans ce double mouvement, les orthophonistes sont pris au piège par leur démographie ne permettant pas d’accompagner de manière optimale tous les patients qui en auraient besoin.
Augmenter les capacités en formation initiale d’orthophonie, et l’accompagner par des solutions de terrain pertinentes, tel est le projet porté par cette proposition.
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L’article 1er vise à faire évoluer progressivement le nombre d’étudiants en orthophonie sur les cinq prochaines années, en passant d’un quota annuel de 975 à 1 463 places en formation initiale.
À l’occasion des assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant en 2024, conscient de la situation préjudiciable de la démographie professionnelle pour les patients en attente de soins, le Gouvernement avait annoncé des premières mesures.
L’objectif était d’accentuer l’augmentation de places en formation initiale afin de répondre aux besoins très importants constatés sur le terrain avec un calendrier en trois temps :
– Dès 2025, créer 100 places supplémentaires via l’extension des structures existantes ou la création d’antennes nouvelles, soit + 10 % ;
– Objectif de + 20 % de places d’ici 2027 et +50 % d’ici 2030.
Repartant des objectifs fixés entre les représentants de la profession et le Gouvernement, la programmation proposée est donc la suivante :
2025 |
1 073 |
2026 |
1 122 |
2027 |
1 170 |
2028 |
1 268 |
2029 |
1 366 |
2030 |
1 463 |
Si à ce stade les craintes d’une surpopulation professionnelle semblent lointaines après l’augmentation d’étudiants en orthophonie, il semble toutefois prudent d’introduire une clause de revoyure, permettant de débattre et statuer sur l’opportunité d’une évolution à la baisse ou à la hausse du nombre de places en formation initiale.
L’article 2 vise à créer un statut de maître de stage universitaire en orthophonie.
Dans la même logique et comme cela existe aujourd’hui en médecine, le statut de maître de stage universitaire est essentiel pour mieux accompagner les étudiants pendant leurs parcours de formation, de surcroît, lorsque l’on sait à ce jour, que de trop nombreux étudiants rencontrent des difficultés dans la recherche de leur terrain de stage. Fortement attendu parles étudiants et les professionnels, ce statut permettra d’accompagner l’augmentation des quotas en centres de formation universitaire en orthophonie.
L’article 3 vise à étendre les contrats d’engagement de service public aux orthophonistes.
Le code de l’éducation prévoit que les étudiants de médecine, d’odontologie, de maïeutique et de pharmacie peuvent se voir accorder une allocation mensuelle en contrepartie d’un engagement à exercer 2 ans minimum sur un territoire donné après la fin de leur formation.
Cet article permet d’élargir ce dispositif, qui a montré son efficacité, aux orthophonistes.
L’article 4 vise à créer une clause de revoyure dans cinq ans qui permettra d’évaluer les effets de la mise en œuvre de cette proposition de loi.
L’article 5 vise à gager financièrement la présente proposition de loi.
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proposition de loi
Article 1er
À titre dérogatoire des conditions fixées par l’article L. 4383‑2 du code de la santé publique, la loi détermine le nombre des étudiants admis à entreprendre des études en vue de la délivrance du certificat de compétences en orthophonie de manière pluriannuelle.
Pour la rentrée scolaire 2030, le nombre des étudiants admis à entreprendre des études en vue de la délivrance du certificat de compétences en orthophonie est fixé à 1 463, selon la programmation prévue par le tableau ci‑dessous :
2025 |
1 073 |
2026 |
1 122 |
2027 |
1 170 |
2028 |
1 268 |
2029 |
1 366 |
2030 |
1 463 |
Article 2
Le chapitre Ier du titre IV du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 4341‑10 ainsi rédigé :
« Art. L. 4341‑10. — Les étudiants en orthophonie peuvent être autorisés à effectuer une partie de leurs stages pratiques auprès d’orthophonistes agréés maîtres de stage des universités, dans des conditions fixées par décret.
« Les conditions de l’agrément des orthophonistes agréées‑maîtres de stage des universités, qui comprennent une formation obligatoire auprès de l’université de leur choix ou de tout autre organisme habilité, sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Article 3
L’article L. 636‑1 du code de l’éducation est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Chaque année, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale détermine le nombre d’étudiants du premier cycle des études d’orthophonie, qui peuvent signer un contrat d’engagement de service public avec une autorité administrative désignée par arrêté des ministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur.
« Les candidatures à la signature d’un contrat d’engagement de service public sont classées dans la limite du nombre fixé en application du deuxième alinéa du présent article, selon des modalités fixées par voie réglementaire.
« Ce contrat ouvre droit, en sus des rémunérations auxquelles les signataires peuvent prétendre du fait de leur formation, à une allocation mensuelle versée par l’autorité administrative désignée en application du deuxième alinéa du présent article jusqu’à la fin de leurs études. En contrepartie de cette allocation, les signataires s’engagent à exercer leurs fonctions à titre libéral ou salarié, à compter de la fin de leur formation, dans les lieux d’exercice mentionnés au cinquième alinéa et dans des conditions définies par voie réglementaire. La durée de leur engagement est égale à celle pendant laquelle l’allocation leur a été versée et ne peut être inférieure à deux ans.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »
Article 4
Entre le 1er juillet et le 31 décembre 2030, le Gouvernement remet au Parlement un rapport faisant état de la nécessité de modifier, le cas échéant, le dispositif de programmation pluriannuelle.
Article 5
I. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.