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N° 737
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 décembre 2024.
PROPOSITION DE LOI
visant à garantir l’implantation d’un dispositif de tomographie par émission de positons en Corse,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. François-Xavier CECCOLI, M. Paul-André COLOMBANI, M. Michel CASTELLANI, M. Philippe JUVIN, M. Laurent MARCANGELI, Mme Nicole DUBRÉ-CHIRAT, Mme Pascale BAY, M. Thibault BAZIN, M. Ian BOUCARD, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Fabrice BRUN, Mme Marie-Christine DALLOZ, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. Michel HERBILLON, M. Vincent JEANBRUN, M. Corentin LE FUR, Mme Alexandra MARTIN, M. Yannick NEUDER, M. Jérôme NURY, Mme Christelle PETEX, M. Nicolas RAY, M. Mickaël COSSON, M. Didier PADEY, Mme Sandrine LE FEUR, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. Bernard CHAIX, M. Joël BRUNEAU, M. Laurent MAZAURY, M. Salvatore CASTIGLIONE, M. Franck ALLISIO, M. Michaël TAVERNE, Mme Anchya BAMANA, M. Pierre MEURIN, Mme Claudia ROUAUX, M. Laurent LHARDIT, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Fabrice BARUSSEAU, M. Damien GIRARD, Mme Mereana REID ARBELOT, Mme Murielle LEPVRAUD, M. René PILATO, M. Pierre-Yves CADALEN, Mme Zahia HAMDANE, M. Maxime LAISNEY, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Éric COQUEREL, Mme Valérie ROSSI,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La santé est un droit fondamental consacré par le onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. Son accès doit être garanti à tous sur l’ensemble du territoire.
Dans le droit fil de ce rappel, la présente proposition de loi entend donner la possibilité à la représentation nationale de corriger une injustice territoriale majeure en matière d’accès aux soins, en permettant à la Corse et à ses habitants de pouvoir bénéficier dans un horizon prévisible de la présence sur l’île de la technologie de tomographie par émission de positons (TEP‑Scan).
L’île, en plus d’un déficit chronique en matière d’infrastructures de santé, mis en évidence à la faveur de la crise sanitaire du printemps 2020, est à ce jour la seule région française dépourvue de ce dispositif d’imagerie. Une technologie pourtant essentielle en matière de détection de pathologies complexes telles que les cancers, maladies neurodégénératives ou endocriniennes dont un diagnostic précoce augmente significativement les chances d’évolution favorable avec la mise en place de traitements adaptés et d’un suivi plus efficient.
Si des discussions ont régulièrement permis jusqu’à ce jour de convenir de manière unanime de l’opportunité autant que de la nécessité d’implanter un TEP‑Scan sur l’île, force est de constater que d’arbitrages renvoyés en difficultés techniques, les Corses continuent de devoir effectuer des déplacements sur le continent pour pouvoir accéder à des soins auxquels ils ne peuvent se soustraire et qui sont particulièrement épuisants pour les malades autant que coûteux pour leurs familles et le contribuable.
Pour rappel, en 2022, 25,5 % des décès ont été répertoriés comme consécutifs au développement d’une tumeur ([1]), faisant des décès par cancer la première cause de mortalité en France, les maladies cardio‑neurovasculaires (comme l’infarctus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral (AVC) et l’insuffisance cardiaque), en étant la deuxième cause avec 20,8 % des décès.
En Corse, environ 1 800 nouveaux cas de cancer sont détectés chaque année, pour 843 décès liés à cette maladie en 2023 ; la prise en charge des malades justifiant quant à elle près de 18 000 déplacements médicaux annuels de patients corses vers le continent.
Malgré les efforts financiers déployés par les pouvoirs publics et l’engagement du secteur associatif insulaire pour améliorer la prise en charge et le confort des malades, l’obligation de se déplacer, par avion essentiellement, pour accéder aux examens permis par les TEP‑Scan, constitue un facteur puissant de renoncement aux soins dans une île de 350 000 habitants dont le taux de pauvreté avoisine les 18 % et dont la population est la plus âgée de France.
Cette situation, justifie que les progrès médicaux, scientifiques et technologiques considérables, qui ont été réalisés dans le domaine de la lutte contre le cancer et des traitements de certaines pathologies cardiaques ou neurodégénératives puissent être rendus accessibles à l’ensemble de la population insulaire.
La tomographie par émission de positrons ou TEP est une technologie d’imagerie fonctionnelle qui permet une production d’images dynamiques permettant d’acquérir des informations précieuses sur l’activité et les processus dynamiques du corps, le débit sanguin à travers ce dernier, l’évolution des cellules cancéreuses ainsi que l’activité cérébrale avec une résolution et une précision beaucoup plus importante que des appareils de tomographie par émission monophotonique (TEMP) dont la Corse est dotée à ce jour ([2]).
Les méthodes d’imagerie nucléaire fournissent une retranscription tridimensionnelle (3D) de l’activité métabolique du patient, par le biais de la détection de la lumière émise par un médicament radiopharmaceutique (i.e. radioactif) injecté au préalable. Ces dernières sont particulièrement adaptées à l’oncologie, en utilisant principalement le « fluorodesoxyglucose » comme marqueur radioactif ce qui permet de différencier par exemple une tumeur maligne d’une tumeur bénigne (qui ne grossit pas excessivement), détecter la propagation dans le corps (métastase), identifier les cancers à un stade précoce, et surveiller la réapparition de tumeurs chez d’anciens patients.
L’imagerie nucléaire est également efficace en matière de maladies cardiaques par sa capacité à détecter de potentielles anomalies du « cycle du cœur » et autres « myocardes hibernant », de maladies neurodégénératives (Alzheimer, SLA/ Maladie de Charcot, démence pour le diagnostic précoce) et de problèmes d’origine thyroïdienne en permettant de positionner un « adénome parathyroïdien », facilitant le travail des chirurgiens.
Les marqueurs radioactifs émettant des positons étant moins stables, chaque dispositif TEP nécessite un accélérateur de particules de type cyclotron, produisant des isotopes radioactifs indispensables à la réalisation des images. Son implantation, à proximité d’un TEP‑Scan apparait comme nécessaire dans un environnement insulaire où les contraintes géographiques et les difficultés chroniques de déplacement peuvent facilement restreindre la capacité de livraison desdits isotopes.
C’est pourquoi il semble aujourd’hui légitime, dans le prolongement de la discussion de la proposition de loi visant à la création d’un Centre hospitalier universitaire en Corse, de remédier à cette iniquité territoriale en faisant de la présence et de l’exploitation d’un dispositif de tomographie par émission de positons de type TEP‑Scan ou équivalent et du cyclotron qui le complète, un acquis en matière d’implantation d’équipements lourds sur le territoire.
Cette mise à niveau se justifiant également par une meilleure allocation des budgets conséquents actuellement affectés par la sécurité sociale à la prise en charge du déplacement des malades corses, qui pourraient être économisés en présence d’une offre de soin adaptée aux besoins et de qualité sur l’île, dans le cadre de la prise en charge précoce de nombreuses pathologies.
L’article 1er de la présente proposition vise à consacrer par la loi l’obligation légale de garantir la présence et le fonctionnement, dans chaque région française, d’au moins un dispositif de tomographie par émission de positons et du cyclotron nécessaire à son bon fonctionnement.
L’article 2, prévoit une entrée en vigueur des dispositions de la présente proposition de loi au 1er janvier 2029. Un décret viendra définir les modalités d’application de l’article 1er en établissant notamment un calendrier dans lequel seront indiquées les étapes de déploiement d’un tel dispositif.
Un rapport précisant les besoins matériels et humains nécessaires à la mise en service et au fonctionnement du TEP‑Scan, détaillant notamment les prérequis financiers, techniques, administratifs ou en termes de formation devra être remis au plus tard 6 mois après la promulgation de la présente loi..
Le présent rapport devra s’accompagner d’une projection financière permettant de déterminer l’actuel surcoût pour les finances publiques, du transport des malades corses sur le continent pour une prise en charge qui ne pourrait être effective sur l’île faute de TEP‑Scan.
L’article 3, vise à gager le dispositif. Il est demandé à l’État de lever le gage.
Tel est l’objet de cette proposition de loi.
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proposition de loi
Article 1er
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le b du 2° du I de l’article L. 1434‑3, le a du 2° de l’article L. 1434‑9, le premier alinéa de l’article L. 6122‑1 et l’article L. 6123‑1 sont complétés par les mots : « en tenant compte des dispositions de l’article L. 6123‑2 » ;
2° Le chapitre III du titre II du livre Ier de la sixième partie est complété par un article L. 6123‑2 ainsi rédigé :
« Art. L. 6123‑2. – Chaque région est dotée d’au moins un dispositif de tomographie par émission de positons à usage médical et d’au moins un cyclotron à usage médical. »
Article 2
I. – L’article 1er entre en vigueur au 1er janvier 2029.
II. – Un décret définit les modalités d’application de la présente loi. Il établit le calendrier et les étapes de la mise en œuvre de cette dernière avant l’échéance mentionnée au I du présent article.
Article 3
I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
([1]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, 2023