N° 760

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 décembre 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à exonérer de taxe d’habitation l’ensemble des locaux des établissements d’enseignement privés sous contrat,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Corentin LE FUR, Mme Josiane CORNELOUP, Mme Sylvie BONNET, M. Pierre CORDIER, M. Jérôme NURY, Mme Véronique LOUWAGIE, M. Jean-Pierre TAITE, M. Jean-Pierre VIGIER, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, M. Vincent JEANBRUN, M. Éric PAUGET, Mme Pascale BAY, M. Jean-Luc BOURGEAUX, Mme Marie-Christine DALLOZ, M. Jean-Yves BONY, Mme Anne-Laure BLIN, Mme Christelle PETEX, Mme Émilie BONNIVARD, M. Thibault BAZIN, M. Ian BOUCARD, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. Xavier BRETON, M. Olivier MARLEIX, M. Nicolas RAY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Jusqu’à une période récente, les établissements privés d’enseignement sous contrat étaient exemptés de taxe d’habitation. Cependant, depuis la fin de l’année 2023 et la suppression totale de la taxe d’habitation sur les résidences principales, de nombreux établissements scolaires reçoivent des avis d’imposition au titre de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. 

Surpris et abasourdis par ce nouvel assujettissement, les chefs des établissements concernés ont très tôt tiré la sonnette d’alarme afin d’alerter les pouvoirs publics sur les lourdes conséquences financières de ces charges nouvelles. La plupart d’entre eux ont diligenté des recours afin que les avis d’imposition émis soient annulés. Beaucoup ont obtenu satisfaction, quand d’autres attendent encore que l’annulation tant attendue leur soit notifiée. 

La pertinence de ce revirement de la doctrine fiscale en matière d’assujettissement des locaux des établissements privés d’enseignement ne peut que laisser perplexe. En plus d’être créatrice de charges nouvelles pour les établissements concernés, elle contribue à complexifier la règle de droit et donc les procédures avec l’administration. 

Dans une réponse à la question écrite n° 16700 publiée au Journal Officiel le 4 juin dernier, la Ministre de l’Education nationale précisait que des travaux devaient être menés afin de clarifier le droit applicable. Plus de 6 mois après cette annonce, l’instabilité politique n’a hélas pas permis aux pouvoirs publics de mener ce travail pourtant essentiel. En l’absence de tels travaux, de très nombreux établissements ont donc reçu cet automne de nouveaux avis de taxe d’habitation. 

Personne ne peut se satisfaire d’une telle situation. Repousser sine die cet éclaircissement, et surtout cette simplification de la règle de droit, revient à alourdir la facture pour les établissements, et donc in fine pour les familles. Derrière ce sujet de l’assujettissement à la taxe d’habitation des locaux des établissements privés sous contrat, c’est aussi la question de l’attachement et du soutien de l’État à l’école libre qui est en jeu. Le statu quo ne peut se justifier, même en cette période de grande instabilité. 

En l’état du droit rien n’empêche pourtant d’exonérer l’ensemble des locaux des établissements d’enseignement privé de taxe d’habitation. Dans un premier temps et pour faire face à l’urgence, une instruction fiscale permettant de revenir à la situation qui prévalait avant 2023 aurait pu être prise, et pourrait encore l’être.

Si l’article 1407 du code général des impôts dispose que « les locaux destinés au logement des élèves dans les écoles et pensionnats » ne sont pas imposables à la taxe d’habitation. Le législateur ne prévoit en revanche aucune disposition s’agissant des autres locaux des établissements. Seule l’instruction fiscale (BOITH10401020120912), précise qu’ « il y a lieu, toutefois, d’admettre que les locaux affectés à l’instruction des élèves (salle de classe, études, etc.) peuvent être exclus de la taxe d’habitation. ». Cette place laissée à l’interprétation de l’administration fiscale la conduit hélas trop souvent à produire des avis d’impôt qui viennent grever les budgets de bien des établissements pourtant déjà fortement impactés par un alourdissement substantiel de leurs charges (chauffage, restaurant scolaire ou taxe foncière).

Le danger est qu’à terme, les établissements n’aient d’autre choix que de répercuter cette charge nouvelle sur les familles, et ce au risque de porter atteinte à la liberté de l’enseignement à laquelle nous tenons tant. Rappelons qu’en France 2,15 millions d’élèves soit 17,6 % sont scolarisés dans un établissement privé sous contrat, et qu’en Bretagne administrative cette proportion dépasse même les 40 % soit 230 000 élèves. Déstabiliser les budgets des établissements concernés pourrait avoir des effets en cascade sur les familles d’abord, sur la pérennité de l’école libre ensuite, et plus largement et enfin sur le bon fonctionnement du service public de l’éducation nationale.

À titre d’illustration, du fait de ce changement de doctrine fiscale, une école privée sous contrat comprenant 400 élèves (de la maternelle au primaire) est désormais redevable pour l’année 2024, de 2 550 euros de taxe d’habitation pour ses divers locaux. Il s’agit là d’une somme substantielle qui s’ajoute de surcroît à celle déjà acquittée au titre de l’année 2023, et pour laquelle l’école reste dans l’attente d’une réponse de l’administration suite au recours diligenté à l’époque.

Si le droit en vigueur devrait permettre d’exonérer l’ensemble des locaux des établissements scolaires de taxe d’habitation, force est d’admettre que l’absence d’une règle claire laisse une grande latitude aux directions départementales des finances publiques (DDFIP), et conduit à des disparités criantes entre établissements.

Afin de sécuriser et de clarifier la règle de droit, le présent texte vise à inscrire dans loi la doctrine fiscale qui prévalait jusque récemment, soit une exonération de l’ensemble des locaux scolaires. 

Son article unique propose donc de modifier les dispositions de l’article L.407 du code général des impôts en précisant que l’ensemble des locaux scolaires, notamment ceux destinés à l’enseignement et au logement des élèves dans les écoles et pensionnats ne sont pas imposables à la taxe d’habitation.

 


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proposition de loi

Article 1er

Au 3° du II de l’article 1407 du code général des impôts, le mot : « destinés » est remplacé par les mots : « scolaires notamment ceux destinés à l’enseignement et ». 

Article 2 

La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.