N° 797

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 janvier 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à développer l’usage des médicaments biosimilaires et des médicaments hybrides substituables,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Sophie DELORME DURET, M. Jean-François ROUSSET, Mme Danièle CARTERON, Mme Annie VIDAL, M. Moerani FRÉBAULT,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Après cinq années de commercialisation via les délivrances en ville, le développement des médicaments biosimilaires et des médicaments hybrides est beaucoup trop lent puisqu’il ne pèse que 32 % du 1,9 milliard d’euros des remboursements par l’Assurance maladie de ces classes thérapeutiques (contre 70 % à 75 % après un an pour les génériques).

Dans plusieurs pays européens, ce taux dépasse déjà les 70 %, voire les 80 % comme en Allemagne ou au Royaume‑Uni.

Dans un contexte économique difficile, autoriser l’industrie pharmaceutique à consentir aux pharmacies d’officine des remises commerciales sur les médicaments biosimilaires et les médicaments hybrides substituables, favorisera leur vente dans les officines et encouragera leur prescription par les professionnels.

Il s’agit d’ailleurs d’une des préconisations du rapport « Charges et produits » de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) ([1])° qui vise justement à accroître leur prescription : « des niveaux supérieurs à 80 % de pénétration des médicaments génériques et des médicaments biosimilaires constituent un enjeu majeur pour la soutenabilité du système de santé et sa capacité à financer un égal accès à l’innovation thérapeutique ».

L’usage de ces derniers ‑ tout aussi efficaces que les autres médicaments ‑ pourraient ainsi faire économiser plus de 680 millions d’euros ([2]) dans un contexte où la Sécurité sociale est fortement endettée ([3]).

Toutefois, bien que les pharmaciens aient la possibilité de substituer les médicaments biosimilaires et hybrides aux autres médicaments ([4]), le bénéfice de remises commerciales qu’ils peuvent obtenir lors de leurs commandes auprès de l’industrie pharmaceutique, n’est toujours pas applicable à ces deux types de médicaments.

À ce jour, le code de la sécurité sociale autorise et encadre les exploitants de médicaments à consentir des remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers aux pharmacies d’officine. Celuici prévoit, notamment, un plafonnement de ces gestes commerciaux consentis à hauteur de :

– 2,5 % du prix fabricant hors taxes (PFHT) pour l’ensemble des médicaments ;

– 50 %, au plus, du PFHT, pour les médicaments inscrits au répertoire des groupes génériques, les spécialités de référence dont le prix de vente au public est identique à celui des autres spécialités du même groupe générique ou les spécialités non génériques soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité.

En outre, le code de la sécurité sociale prévoit également que ces derniers doivent être déclarés au Comité économique des produits de santé ([5]) (CEPS).

Ces gestes commerciaux permettent de favoriser la pénétration des médicaments concernés ‑ notamment génériques ‑ dans les ventes officinales et d’adapter leur prix à l’évolution des réalités économiques.

Ils agissent aussi en indicateur de la rentabilité, élevée, de certains produits ([6]). C’est la raison pour laquelle le législateur a souhaité que le code de la sécurité sociale les fasse figurer parmi les critères justifiant que des baisses de prix soient négociées ou imposées par le CEPS.

En définitive, cette proposition de loi participe à l’effort de rétablissement de nos comptes sociaux en faisant sauter un verrou permettant de fluidifier et de faciliter le développement de ces médicaments moins coûteux pour les pharmaciens, les patients et la Sécurité sociale.

L’article unique contient l’essentiel du dispositif. Il intègre, à l’article L. 138‑9 du code de la sécurité sociale, un traitement identique entre les spécialités de référence des groupes génériques et les spécialités de référence des groupes hybrides et biosimilaires dont la substitution est autorisée par arrêté, à la liste des spécialités pour lesquelles les fournisseurs peuvent consentir des remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers renforcés.

En conséquence, il modifie l’article L. 138‑9‑1 du même code pour prévoir que les fournisseurs de médicaments hybrides et biosimilaires substituables sont tenus de déclarer au CEPS, par année civile et par spécialité, les remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers consentis, ainsi que les chiffres d’affaires hors taxes réalisés au titre de ces spécialités.

La rédaction permet de prendre en compte les potentielles situations dans lesquelles le CEPS fixerait un tarif forfaitaire de responsabilité applicable aux spécialités du registre des groupes hybrides.

 


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proposition de loi

Article unique

La section 1 du chapitre 8 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

1° Le premier alinéa de l’article L. 138‑9 est ainsi modifié :

a) À la deuxième phrase, après le mot : « appartiennent, », sont insérés les mots : « pour les spécialités hybrides substituables figurant au registre mentionné au dernier alinéa de l’article L. 5121‑10 du même code, pour les médicaments biologiques similaires substituables dans les conditions prévues à l’article L. 5125‑23‑2 dudit code, pour les spécialités de référence substituables figurant au registre mentionné au dernier alinéa de l’article L. 5121‑10 du même code dont le prix de vente est identique à celui des autres spécialités du registre des groupes hybrides auquel elles appartiennent ainsi que pour les spécialités de référence dont le prix de vente est identique à celui des médicaments biologiques similaires substituables dans les conditions prévues à l’article L. 5125‑23‑2 du même code, » ;

b) À la dernière phrase, les mots : « non génériques » sont remplacés par les mots : « de référence » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 138‑9‑1, après le mot : « publique », sont insérés les mots : « , de spécialités hybrides substituables figurant au registre mentionné au dernier alinéa de l’article L. 5121‑10 du même code ainsi que de médicaments biologiques similaires substituables dans les conditions prévues à l’article L. 5125‑23‑2 dudit code, ».

 

 


([1]) Recommandation n° 28 - https ://www.assurancemaladie.ameli.fr/sites/default/files/202407_syntheserapportpropositionspour2025_assurancemaladie.pdf

([2])  Estimation de la Cour des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de 2017.

([3]) Le Secrétariat général de la Commission des comptes de la Sécurité sociale présentait le 14 octobre dernier la situation pour 2025 : si rien n’est fait, sans mesure nouvelle, le déficit de la sécurité sociale s’élèvera à 28 milliards d’euros.

([4])  L’avenant 1 de la convention avec les pharmaciens appelle à une large substitution, à une égalisation de marges réglementées entre les médicaments biologiques et les biosimilaires et incite les pharmaciens à substituer dès à présent via la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) exceptionnelle suivante : 100 euros pour la substitution d’un hybride et d’un biosimilaire en 2024.

([5])  À défaut, ce dernier peut fixer une pénalité financière annuelle à la charge du fournisseur fautif, dans la limite de 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au titre des ventes concernées.

([6])  D’après le rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments, publié en 2023, « le CEPS relève que le niveau relativement élevé et croissant des remises commerciales accordées par les exploitants de produits génériques constitue le signe d’une rentabilité du secteur. Le comité indique que ces remises étaient en 2021, en moyenne, de 24 % du PFHT, pour un plafond fixé par arrêté ministériel à 40 % par produit. ».